[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 9 fév rier 2011
En présence de monsieur le juge Rennie
ENTRE :
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et
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ET DE L’IMMIGRATION
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MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1]
La Cour est saisie d’une demande
présentée en vertu du paragraphe
Rappel des faits
[2] Le demandeur est arrivé au Canada le 17 septembre 2003. Il est devenu résident permanent le 12 mai 2005 et a présenté une demande de citoyenneté le 21 mars 2008. Pour justifier son refus de la demande, le juge de la citoyenneté a indiqué qu’il était préoccupé par l’absence de « piste de vérification » permettant de savoir si le demandeur avait effectivement résidé au Canada. Le demandeur s’était trouvé à l’extérieur du Canada pendant 186 jours aux Émirats arabes unis de sorte qu’après déduction de sa période de résidence totale de 1 252 jours, il se retrouvait avec 1 095 jours de présumée résidence au Canada.
[3]
Au moment de la présentation de sa
demande de citoyenneté canadienne, en mars 2008, M. Abbas croyait avoir
accumulé exactement le nombre minimum de jours de résidence au Canada requis
par l’alinéa
[traduction]
Le principal problème que comporte le présent dossier est l’absence d’éléments de preuve objectifs démontrant l’existence d’une « piste de vérification » confirmant que l’intéressé a vécu au Canada pendant la période en cause, et ce, dans le but de démontrer que M. Abbas a établi et maintenu sa résidence pendant le nombre de jours exigé par la Loi.
En matière de résidence, c’est au demandeur qu’il appartient de démontrer qu’il a résidé au Canada pendant trois des quatre années au cours de la période en cause pour démontrer qu’il satisfait aux obligations de résidence prévues par la Loi qui ont été énoncées dans la décision Maharatnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté), [ 2000 ] A.C.F. n o 405 (C.F. 1 re inst.). Le demandeur ne l’a pas fait.
Appliquant le critère de résidence
proposé par le juge Muldoon dans la décision
Pourghasemi
, je ne suis pas
convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que vous satisfaites aux exigences
en matière de résidence prévues à l’alinéa
[4]
Le juge de la citoyenneté, qui
mettait en doute la véracité du témoignage et des documents, a déclaré qu’il n’était
pas convaincu que les renseignements fournis par M. Abbas dans sa demande
de citoyenneté correspondaient fidèlement au nombre de jours pendant lesquels il
avait effectivement été présent au Canada. En appliquant le critère posé dans la
décision
Pourghasemi
, [1993] A.C.F. n
o
232, le juge de la
citoyenneté a conclu que M. Abbas ne satisfaisait pas aux exigences en matière
de résidence prévues à l’alinéa
La question en litige
[5]
Le demandeur soutient que le juge
de la citoyenneté a commis une erreur de droit en appliquant le critère de résidence
énoncé dans la décision
Pourghasemi
. Il fait valoir qu’il n’existe qu’un seul bon critère juridique, à savoir l’analyse à six volets proposée dans la
décision
Koo
,
Analyse
[6]
À l’appui de sa thèse, le demandeur
signale diverses décisions récentes dans lesquelles notre Cour a appliqué le
critère qualitatif des décisions
Koo
et
Takla
, notamment :
Canada
(Citoyenneté et Immigration) c. Elzubair
,
[7]
L’avocate du défendeur signale toutefois
que le critère quantitatif énoncé dans la décision
Pourghasemi
a également été appliqué par notre Cour, à la suite de la
décision
Takla
, ainsi que dans d’autres affaires, de sorte que le choix
du critère à appliquer revient toujours au juge de la citoyenneté, à condition
que celui-ci exprime clairement et de façon raisonnable les raisons de
son choix (voir, par exemple :
Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Jeizan
,
[8] Indépendamment du critère qui est retenu, il incombe à tout candidat à la citoyenneté de soumettre des éléments de preuve suffisamment crédibles pour permettre l’appréciation de la résidence, qu’elle soit quantitative ( Pourghasemi ) ou qualitative ( Koo ). À cet égard, le juge de la citoyenneté doit tirer des conclusions de fait que notre Cour ne peut modifier que si elles sont déraisonnables.
[9] La nécessité de présenter des éléments de preuve crédibles et cohérents pour établir la résidence, peu importe la définition que l’on en donne, ne disparaît pas lorsqu’on applique le critère quantitatif ou le critère qualitatif. C’est bien ce qu’a reconnu le juge Mainville dans la décision Takla :
Finalement, comme dernier point, il est utile de souligner que l’application du critère de la décision Koo et l’analyse en six questions qui y est rattaché ne sont utiles que dans la mesure où la résidence au Canada a été effectivement établie à une date préalable à la demande de citoyenneté afin de permettre effectivement le calcul d’une période de résidence en vertu de la Loi sur la citoyenneté . En effet, si la résidence n’a pas été établie au préalable, il n’y a pas lieu de procéder à une analyse plus poussée (par. 50).
[10] De même, la juge Layden-Stevenson (maintenant juge à la Cour d’appel) propose un cadre d’analyse efficace au sujet de la façon de procéder au contrôle des décisions en matière de citoyenneté. Dans la décision Goudimenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) , 2002 CFPI 447, au paragraphe 13, elle déclare ce qui suit :
Le problème
que pose le raisonnement de l’appelant est qu’il ne tient pas compte de la
question préliminaire, soit l’établissement de sa résidence au Canada. Si le
critère préliminaire n’est pas respecté, les absences du Canada ne sont pas
pertinentes […] Autrement dit, à l’égard des exigences de résidence de l’alinéa
[11] Le raisonnement de la juge Layden-Stevenson s’applique à la présente demande. La résidence elle-même doit être établie par preuve prépondérante. Dans le cas qui nous occupe, le juge de la citoyenneté a conclu que la preuve était insuffisante pour établir la résidence, étant donné que la preuve n’était ni claire ni cohérente. Le juge de la citoyenneté a notamment fait observer ce qui suit :
a. Dans son questionnaire de résidence, le demandeur avait indiqué qu’il vivait et travaillait à Dubai, aux Émirats arabes unis, depuis mars 2008, ce qui contredisait carrément ce qu’il avait déclaré à CIC lors de son examen pour l’obtention de la citoyenneté;
b. Il y avait des contradictions au sujet de son adresse en mars 2008; on ne savait pas avec certitude s’il vivait à Windsor, en Ontario, ou aux Émirats arabes unis;
c. La preuve était contradictoire au sujet de la question de savoir s’il vivait avec sa femme à Windsor ou si sa femme avait vécu avec lui aux Émirats arabes unis pendant 18 mois;
d. Il y avait une contradiction entre l’adresse canadienne indiquée dans le questionnaire sur la résidence et la résidence indiquée sur son permis de conduire temporaire de l’Ontario;
e.
Il
avait demandé son permis de conduire temporaire de l’Ontario la veille de l’audience.
[12] Le demandeur ne conteste pas ces conclusions, mais fait reposer sa cause sur son assertion que le juge de la citoyenneté a commis une erreur de droit en n’appliquant pas le critère articulé dans la décision Takla , précitée. Ainsi qu’il a été signalé, conformément à la décision rendue par notre Cour dans l’affaire Lam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) , (1999), 164 FTR 177, dès lors que le juge de la citoyenneté adopte et applique un critère correctement, sa décision ne sera pas modifiée. La décision Takla n’a pas eu pour effet d’infirmer la décision Lam , contrairement à ce que le demandeur prétend, et elle ne pouvait avoir cet effet.
[13] De plus, ainsi que nous l’avons déjà signalé, peu importe le critère que le juge de la citoyenneté applique, il doit y avoir un fondement factuel suffisant pour justifier dès le départ l’application d’un critère. À mon avis, si le juge de la citoyenneté avait appliqué la décision Takla , l’issue de la cause de M. Abbas n’aurait pas été différente que celle à laquelle aurait donné lieu l’application de la décision Pourghasemi . Il y avait tout simplement trop de contradictions inexpliquées en ce qui concerne la résidence dans sa demande et ces contradictions ne pouvaient se volatiliser comme par magie en recourant à l’analyse qualitative préconisée dans les décisions Koo et Takla . Des éléments de preuve contradictoires ou ambigus, s’agissant de la résidence, ne deviendront pas plus solides ou plus cohérents par suite de l’application du critère qualitatif de la décision Koo .
[14]
Il est bien établi en droit que la
norme de contrôle des décisions des juges de la citoyenneté est celle de la
décision raisonnable (
Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration)
,
[15] Pour ces motifs, j’estime que la décision du juge de la citoyenneté appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit . La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée.
JUGEMENT
LA COUR REJETTE la demande de contrôle judiciaire.
Traduction certifiée conforme
Sandra de Azevedo, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-988-10
INTITULÉ : MOHAMAD RAGHEB ABBAS c. MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
DATE DE L’AUDIENCE : Le 11 janvier 2011
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE RENNIE
DATE DES MOTIFS : Le 9 février 2011
COMPARUTIONS :
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M e Sally Thomas |
POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Toronto (Ontario)
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Myles J. Kirvan Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario) |
POUR LE DÉFENDEUR
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