St-Pierre et Premier horticulture ltée |
2011 QCCLP 2081 |
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Le 31 août 2010, monsieur Raynald St-Pierre (le travailleur) dépose à la
Commission des lésions professionnelles une requête en vertu de l’article
[2] Cette décision en confirme une rendue par un de ses inspecteurs le 21 juillet 2010, déclarant qu’il n’existe pas de danger justifiant le travailleur à refuser d’exécuter son travail le 20 juillet 2010.
[3] L’audience s’est tenue à Rivière-du-Loup le 20 décembre 2010 en présence du travailleur. Des intervenants de Premier horticulture ltée (l’employeur) étaient également présents. Pour sa part, la représentante de la CSST a signifié son absence au tribunal.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître qu’il existait un danger pour sa santé et sa sécurité le 20 juillet 2010 et qu’en conséquence, son droit de refus était justifié.
LES FAITS
[5] Le travailleur témoigne à l’audience. Il est travaille pour l’employeur depuis 26 ans.
[6] Le 20 juillet 2010, il était affecté au désherbage d’une butte de compost. Pour ce faire, il devait porter un dossard. Cette journée-là, il n’y avait pas de vent et en raison du fait que son dossard ne lui procure pas une ventilation adéquate, il a signifié à son employeur un droit de refus à 9 h 30 de l’avant-midi.
[7] Le travailleur mentionne avoir craint pour sa santé en raison d’une transpiration excessive causée par le port du dossard et la crainte d’attraper une grippe occasionnée par des changements de température lorsqu’il aurait à se présenter dans un endroit plus frais. Il souligne que l’aire des repas est climatisée.
[8] Interrogé par monsieur Bernard Pedneault pour l’employeur, le travailleur reconnaît que s’il ne porte pas son dossard, il est sujet à une mesure disciplinaire.
[9] Le 20 juillet 2010, son superviseur l’a aperçu alors qu’il ne portait pas son dossard et lui a enjoint de le mettre. C’est à ce moment qu’il a décidé de faire un droit de refus.
[10] Ce n’était pas la première fois qu’il ne portait pas son dossard, ayant déjà reçu des mesures disciplinaires pour cette raison; il a déjà eu un avis verbal, un avis écrit et une suspension.
[11] Monsieur Martin Plourde témoigne à la demande de l’employeur. Il est le superviseur du travailleur depuis cinq ans. En 2007, l’employeur a mis en place un règlement qui exige que sur les aires de circulation, les travailleurs portent un dossard pour être visibles des opérateurs de machinerie.
[12] Le 20 juillet 2010, en se rendant au site de compose, il s’est rendu compte que le travailleur ne portait pas son dossard. Il lui a donc enjoint de le porter. Monsieur Plourde fait remarquer que le 20 juillet 2010, il ne faisait pas excessivement chaud.
[13] Monsieur Bernard Dumais témoigne également à la demande de l’employeur. Il occupe un poste de directeur depuis novembre 2005. Le 20 juillet 2010, il a été informé de l’exercice d’un droit de refus.
[14] Il se souvient que monsieur Mario-André Gagnon, représentant des travailleurs au comité de santé-sécurité, en plus d’être responsable des dossiers en santé et sécurité au travail de l’employeur, est intervenu.
[15] Monsieur Dumais indique que chez l’employeur, il existe une politique pour gérer les cas où il y a une température extrême et il se rappelle que la journée en question, il faisait dans les vingt degrés avec un vent léger.
[16] Monsieur Marc Villeneuve témoigne également à la demande de l’employeur. Il est intervenu le 20 juillet 2010 pour tenter de régler ce cas de droit de refus. Il a discuté avec le travailleur pour connaître les motifs justifiant le droit de refus. Face à l’intransigeance du travailleur, il a communiqué avec un inspecteur de la CSST. Ce dernier a mentionné qu’il n’était pas nécessaire qu’il se déplace pour trancher la question parce qu’il considérait que le port d’un dossard ne représentait pas un danger pour la santé et à la sécurité d’un travailleur. L’inspecteur s’est notamment référé aux signaleurs routiers qui portent le même genre de dossard.
[17] Un dossard tel celui du travailleur a été exhibé à l’audience. Il est sans manches et fait d’un tissu perforé pour permettre l’aération.
L’AVIS DES MEMBRES
[18] Le membre issu des associations d’employeurs de même que le membre issu des associations syndicales sont d’avis de rejeter la requête du travailleur. En aucun temps ce dernier n’a été exposé à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique.
[19] Ils sont d’avis que la situation découle d’un problème de relations de travail où le travailleur se voyait imposé une nouvelle mesure disciplinaire en raison du non-respect de la directive quant au port du dossard de sécurité.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[20]
La Commission des lésions professionnelles doit décider si le 20 juillet
2010 le travailleur rencontrait les conditions pour exercer un droit de refus
en vertu de l’article
12. Un travailleur a le droit de refuser d'exécuter un travail s'il a des motifs raisonnables de croire que l'exécution de ce travail l'expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou peut avoir l'effet d'exposer une autre personne à un semblable danger.
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1979, c. 63, a. 12.
[21] Le tribunal est d’avis que la notion de motifs raisonnables réfère au test de la réaction de la personne raisonnable confrontée au même fait. C’est d’ailleurs en ce sens que conclut la jurisprudence consultée par le soussigné [2] .
[22] Par ailleurs, cette démarche ne doit pas être farfelue ou tendancieuse et constituer une croyance frivole en un danger inexistant, improbable ou minime, ou encore un motif inexistant, futile, vexatoire ou un seul prétexte insidieux [3] .
[23] Dans le présent cas, le travailleur soumet qu’il a exercé un droit de refus en raison de l’obligation qu’il avait de porter un dossard ventilé. Il mentionne que le port de ce dossard lui occasionnait une transpiration excessive et qu’il craignait en conséquence d’attraper la grippe.
[24] La Commission des lésion professionnelles considère qu’une personne raisonnable confrontée au même fait ne tirerait pas de telles conclusions. Le tribunal est plutôt d’avis qu’il s’agit d’une croyance frivole, d’un danger inexistant, voire d’une mesure tendancieuse, dont le seul but était d’éviter une mesure disciplinaire.
[25] La requête du travailleur est donc non fondée et doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête déposée par monsieur Raynald St-Pierre, le travailleur;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 18 août 2010 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur n’était pas fondé d’exercer un droit de refus le 20 juillet 2010.
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Michel Larouche |
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M e Marie-Claude Delisle |
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VIGNEAULT THIBODEAU GIARD |
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Représentante de la partie intervenante |
[1] L.R.Q., c. S-2.1.
[2]
Syndicat
des Agents de la Paix en Services correctionnels du Québec
et
Ministère
de la Sécurité publique
, C.L.P.
[3]
Trudel
et
Fédération des travailleurs du Québec
, C.L.P.