Piscines et spas Perrin inc. c. Laplante

2011 QCCQ 3477

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LONGUEUIL

« Chambre civile  »

N° :

505-22-014558-078

DATE :

22 mars 2011

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

VIRGILE BUFFONI, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

PISCINES ET SPAS PERRIN INC.

 

Partie demanderesse

 

c.

 

CLAIRE LAPLANTE

et

SYLVAIN DARGIS

 

Partie défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]             La demanderesse (Piscines Perrin) réclame aux défendeurs la somme de 14 459,55 $ à titre de solde sur le prix de vente et d'installation d'une piscine creusée, d'un spa et de divers accessoires à la résidence des défendeurs située à St-Bruno.

[2]            La réclamation tient compte de divers surplus, crédits et paiements partiels effectués par les défendeurs.

[3]            Subsidiairement, Piscines Perrin demande la résolution de la vente du spa et une condamnation des défendeurs à payer 1 459,55 $ [1] .

[4]            Les défendeurs contestent les montants réclamés comme surplus et estiment que le solde exact dû à Piscines Perrin en vertu des deux contrats, piscine et spa, s'établit plutôt à 12 245,32 $, taxes incluses.

[5]            Se portant demandeurs reconventionnels, les défendeurs réclament à Piscines Perrin une somme de 17 568,46 $ à titre de dommages et intérêts pour malfaçons, troubles et inconvénients. Ils demandent au Tribunal d'opérer compensation entre ces deux sommes et de condamner Piscines Perrin à leur payer la somme nette de 5 323,14 $.

[6]            En juillet 2007, Piscines Perrin amende sa procédure pour alléguer la résolution de la vente du spa et sa revendication à titre de vendeur impayé. En septembre 2007, Piscines Perrin fait saisir le spa et ses accessoires au même titre.

les faits

[7]            La défenderesse Claire Laplante exerce la profession de comptable agréée. Son conjoint, le défendeur Sylvain Dargis, est chiropraticien. Ils vivent dans une résidence avec quatre enfants âgés de 6 à 15 ans.

[8]            Le couple décide en 2004 de ne pas investir dans un chalet à la campagne mais plutôt dans l'aménagement de leur cour arrière. Cette cour arrière, selon leur conception, comprend une piscine creusée et un spa, le tout entouré d'un ensemble paysager de grande qualité.

[9]            Ils retiennent les services d'un paysagiste, monsieur Bélisle. Ce dernier prépare un plan d'aménagement paysager comprenant un emplacement projeté pour la piscine et le spa. 

[10]         Le couple magasine ensuite les pisciniers pour y trouver la piscine idéale. Dans leur esprit, la piscine idéale, c'est une piscine fonctionnelle et esthétiquement belle et surtout, une piscine comportant le moins d'entretien possible, compte tenu de leur emploi du temps très chargé.

[11]         Les défendeurs rencontrent madame Marlyne Perrin, présidente de Piscines Perrin, et discutent avec elle de leurs besoins et de leurs intérêts. Les défendeurs exhibent le plan d'aménagement paysager de monsieur Bélisle dans lequel on peut voir un emplacement pour la piscine et le spa. Madame Perrin l'examine et leur expose divers choix de piscines disponibles.

[12]         Piscines Perrin est une entreprise familiale fondée il y a plus de 45 ans et qui se spécialise dans la construction, l'installation et l'entretien des piscines au Québec. Depuis une quinzaine d'années, Piscines Perrin se démarque du marché par la fourniture de piscines avec marches intérieures et bancs intégrés, faits en ciment et recouverts de la toile de piscine. Ces piscines faites sur mesure sont la renommée et la fierté de Piscines Perrin qui, selon la preuve, est à toute fin pratique la seule entreprise au Québec à fabriquer ce genre de piscines.

[13]         Piscines Perrin fournit diverses estimations aux défendeurs. Après négociations, les parties s'entendent et signent un contrat de vente et d'installation d'une piscine creusée et de divers accessoires le 1 er février 2004 [2] . Le contrat prévoit une piscine faite sur mesure de 93 pieds, « Selon Plan ». Le contrat prévoit aussi un banc intégré dans la piscine, avec deux jets tourbillon, une balayeuse « robot » et un système de remplissage automatique. Le prix du contrat s'élève à 33 270 $, incluant les taxes.

[14]         Le même jour, les parties s'entendent verbalement pour l'achat et l'installation d'un spa au prix de 13 000 $, incluant taxes.

[15]         Les défendeurs paient un acompte de 5 000 $ sur les deux contrats, 3 000 $ sur le contrat de la piscine et 2 000 $ sur le contrat du spa. Les travaux doivent débuter en mai 2004.

[16]         Le spa est livré en mai 2004. Comme le spa livré n'est pas celui spécifié au contrat, Piscines Perrin le reprend et livre le bon spa plus tard, à une date non spécifiée.

[17]         Le 12 juin 2004, Piscines Perrin débute ses travaux. Le contremaître constate un dénivellement d'environ 15 pieds entre le devant de la résidence et la cour arrière, ce qui complique le creusage. Il craint que les équipements ne « versent » durant le creusage. À la demande du contremaître, selon madame Perrin, le défendeur accepte d'effectuer les travaux de creusage supplémentaire à ses frais afin de ne pas retarder les travaux.

[18]         Les travaux de creusage et d'installation de la piscine sont plus longs que prévu, ce qui mécontentent les défendeurs. Ils relancent madame Perrin.

[19]         Le 5 juillet 2004, enfin, la piscine est remplie d'eau. La famille des défendeurs s'y baigne quelques jours.

[20]         Le 3 août 2004, la défenderesse émet un chèque de 17 000 $ à Piscines Perrin en paiement partiel du prix des contrats. Piscines Perrin impute ce paiement au contrat de la piscine.

[21]         Rapidement, les défendeurs constatent que l'eau de la piscine devient verte, parfois brune, et peu invitante. Ils constatent aussi des plis et un trou dans la toile. Ils constatent des algues qui se forment au fond de la piscine. La défenderesse écrit à Piscines Perrin.

[22]         Le 10 août 2004, la défenderesse écrit à nouveau à Piscines Perrin en énumérant une longue liste de déficiences à être corrigées, notamment la toile, l'écumoire qui ne fonctionne pas, la lumière qui n'éclaire pas, le tremplin mal placé, etc.

[23]         Le 16 août 2004, à la suite d'une autre lettre, un technicien mandé par Piscines Perrin répare le trou, remonte l'écumoire, déplace le tremplin, coule du ciment et remplace le robot. Malgré le remplacement du robot, celui-ci n'est toujours pas fonctionnel.

[24]         À l'automne 2004, Piscine Perrin ferme la piscine. En octobre 2004, madame Perrin se rend au domicile des défendeurs pour percevoir le solde dû sur les deux contrats. C'est le défendeur qui s'occupe des enfants et la fait entrer dans la résidence.

[25]         La défenderesse est absente. Le défendeur informe madame Perrin que sa conjointe ne retournera à la maison que dans environ deux heures. Madame Perrin décide d'attendre dans la résidence des défendeurs le retour de la défenderesse. Lorsque celle-ci arrive, madame Perrin insiste pour obtenir le paiement du solde dû et indique clairement qu'elle ne quittera pas le domicile à moins de recevoir le chèque. De guerre lasse, la défenderesse émet un chèque de 25 000 $ postdaté en date du 1 er décembre 2004. Elle dira au Tribunal qu'elle a émis ce chèque pour se « débarrasser » de madame Perrin et éviter d'appeler les policiers. Dès le lendemain, la défenderesse fait arrêter le paiement et émettra plutôt un chèque de 12 024,68 $ le 26 novembre 2004, laissant un solde à payer suffisant pour pallier aux déficiences des travaux.

[26]         Elle dira au Tribunal qu'elle était prête à payer le solde dès que Piscines Perrin solutionnerait les diverses déficiences. Le Tribunal ne juge pas répréhensible ce comportement de la défenderesse dans ces circonstances particulières, vu l'attitude cavalière de madame Perrin et le souci manifeste des défendeurs d'éviter un esclandre. On ne saurait interpréter ce chèque comme une reconnaissance de dette.

[27]         Les relations entre les parties, déjà tendues, se détériorent gravement. Au printemps 2005, c'est un autre piscinier, Piscines Romano, qui ouvre la piscine des défendeurs. Avec l'aide du représentant de Piscines Romano, monsieur Pierre-Denis Malo, les défendeurs constatent un trou dans la marche et une perte d'eau d'environ 2 à 3 pouces par jour. Quant à l'eau verte et trouble, le problème persiste.

[28]         Les défendeurs écrivent à madame Perrin le 1 er juin 2005 mais celle-ci ne répond pas à la lettre. Le 6 juin 2005, la défenderesse renvoie la lettre à madame Perrin, sans plus de succès.

[29]         Le 9 septembre 2005, un technicien de Piscines Perrin soude et répare le trou de la toile plissée dans la marche. Au début d'août 2005, la défenderesse fait installer un système « à sel », à la suggestion de Piscines Romano. Cette forme de chlorination règle le problème de l'eau troublée mais la perte d'eau persiste.

[30]         Les défendeurs constatent également que le système de remplissage automatique, prévu au contrat, ne fonctionne ni pour la piscine ni pour le spa. Quant à la thermopompe installée par la défenderesse, elle « saute » à plusieurs reprises.

[31]         À la fin du mois d'octobre 2006, Piscines Romano examine la toile et répare environ 30 trous dans la toile.

[32]         En 2007, les défendeurs font inspecter leur piscine car il y a encore une perte anormale d'eau et la toile est déchirée à certains endroits ou décollée de la paroi.

[33]         Du côté de Piscines Perrin, on prend la position de ne pas répondre aux appels de services puisque les défendeurs doivent encore un solde contractuel.

[34]         Du côté des défendeurs, ils font appel à monsieur Pierre-Denis Malo et Yvon Villemaire, de Piscines Romano, à titre d'experts [3] . Les deux produisent un rapport daté du 21 août 2007. Ils constatent une anomalie au niveau de la ligne de retour d'eau, le plissage et le décollement de la toile à plusieurs endroits, permettant de conclure à une mauvaise installation de la toile lors de son installation.

[35]         Ils proposent diverses solutions pour rendre la piscine fonctionnelle au prix total de 9 350 $.

analyse

action principale

[36]         À l'origine du dossier, Piscines Perrin réclamait une somme de 14 459,55 $. La pièce P-5 indique le calcul détaillé de cette somme :

« ANNEXE 5

 

Balance due pour la piscine et le spa

 

Balance contrat 1705

13 270,00 $

Balance facture spa

11 000,00 $

Surplus d'excavation

2070,45 $

Surplus lumière (4 e et 5 e )

977,72 $

Crédit templin

690,15 $-

Paiement le 26 novembre 2004

12 024,68 $-

Crédit paysagiste

143,78 $-

Balance payable sur réception

14 459,55 $ »

[37]         En plaidoirie, l'avocat de Piscines Perrin a réduit le montant réclamé à 14 056,96 $ pour tenir compte du fait que la quatrième lumière, facturée comme un surplus, était en réalité comprise dans le prix du contrat de la piscine. En conséquence, le surplus réclamé est réduit de 977,72 $ à 575,13 $.

[38]         Les défendeurs reconnaissent les montants des contrats et des paiements mais refusent d'accepter les surplus réclamés par Piscines Perrin, tout comme les crédits octroyés en leur faveur.

[39]         Selon les défendeurs, le solde dû à Piscines Perrin, sous réserve de leur propre réclamation, s'établit plutôt à 12 245,32 $, calculé comme suit :

Contrat piscine

33 270,00 $

Contrat spa

13 000,00 $

Total :

46 270,00 $

Moins paiements

- 5 000,00 $

 

- 17 000,00 $

 

- 12024,68 $

Total paiements

34 024,68 $

Solde net :

12 245,35 $

[40]         Piscines Perrin accepte ces chiffres mais insiste pour réclamer les surplus, tout en reconnaissant certains crédits.

[41]         Un seul surplus est véritablement contesté, celui de 2 070,45 $ pour l'excavation supplémentaire.

[42]         La présidente de Piscines Perrin, madame Marlyne Perrin, a témoigné que le creusage du trou de la piscine ne pouvait être effectué par l'excavatrice habituellement utilisée, vu le dénivellement du terrain et l'accès étroit au lieu de creusage. Piscines Perrin a dû employer une excavatrice plus petite. Elle ajoute que le défendeur a spécifiquement autorisé les travaux, sachant que cela entraînerait un supplément d'environ 2 000 $.

[43]         À cet égard, la preuve n'a pas convaincu le Tribunal d'une telle autorisation ou, du moins, de l'acceptation du défendeur de payer un supplément pour l'utilisation d'une plus petite excavatrice.

[44]         Il s'agit en l'espèce d'un contrat d'entreprise à forfait et l'entrepreneur ne peut prétendre à une augmentation du prix en faisant valoir que l'ouvrage coûte plus cher que prévu [4] .

[45]         Cette règle s'applique d'autant plus qu'en l'espèce, Piscines Perrin savait ou devait savoir, ou aurait dû s'informer, au moment de contracter, de la dénivellation du terrain et de la largeur de l'accès au site de creusage.

[46]         Enfin, Piscines Perrin n'a aucunement établi, par une preuve documentaire ou autrement, le coût réel de ce supplément des travaux d'excavation.

[47]         Le Tribunal n'accorde pas ce montant de 2 070,45 $ réclamé comme supplément pour les travaux d'excavation.

[48]         L'autre surplus relatif à la fourniture et l'installation d'une cinquième lumière pour la piscine est bien fondée. Le contrat de la piscine, pièce P-2, indique clairement un prix de 850 $ pour quatre lumières. Le Tribunal accorde donc à Piscines Perrin un extra de 575,13 $ pour la cinquième lumière.

[49]         En rectifiant en conséquence les montants indiqués sur la pièce P-5, le solde à payer à Piscines Perrin s'établit donc 11 986,51 $.

[50]         En conséquence, la réclamation de Piscines Perrin est bien fondée à hauteur de 11 986,51 $.

demande reconventionnelle

[51]         Les défendeurs réclament 17 568,46 $ à Piscines Perrin. La réclamation se présente comme suit :

a) coût d'installation d'un système de filtration au sel pour pallier le problème de qualité d'eau et de la présence d'algues dans la piscine :

 

2 185,46 $

b) coût de réparation de la toile en octobre 2006 :

683,70 $

c) remboursement du prix pour le système de remplissage automatique :

 

350,00 $

d) travaux correctifs recommandés par l'expert des défendeurs :

9 350,00 $

e) troubles et inconvénients

5 000,00 $

Total

17 569,16 $ [5]

[52]         Les défendeurs ont fait entendre monsieur Yvon Villemaire, à titre d'expert dans le domaine de l'installation, de l'entretien et de la réparation de piscines au Québec. Son rapport, signé conjointement avec monsieur Malo, est produit comme pièce D-3.

[53]         Monsieur Villemaire est employé depuis 2008 par Piscines Romano, une entreprise concurrente à Piscines Perrin. Il a examiné l'installation de Piscines Perrin chez les défendeurs à l'été 2007, en compagnie de monsieur Malo, représentant de Piscines Romano, et de son fils, Martin Villemaire, qui possède et dirige une entreprise de rénovation de piscines sous le nom « Nautico ». Messieurs Malo et Martin Villemaire avaient réparé les trous et effectué les soudures l'été précédent.

[54]         L'expert Villemaire témoigne avoir constaté les anomalies suivantes : (sic)

« - Anomalie au niveau de la ligne de retour d'eau, à savoir que cette ligne doit fournir de l'eau à deux retours dans le banc de spa, 3 retours dans la piscine et un jet pour la cascade, ce qui serait une des principales sources de problème pour la filtration.

-           Le remplissage d'eau est non fonctionnel car on doit surveiller l'alimentation en eau puisque le contrôle automatique ne fonctionne pas

-           La toile est plissée à plusieurs endroits et décollée de la paroi de la piscine, situation habituelle lorsqu'une toile a été mal installée et possiblement que la prise de plan a été déficiente. »

[55]         Il recommande les mesures suivantes pour corriger ces anomalies : (sic)

« - Enlever le banc spa et la marche intérieure, ce qui est une des principales sources du déplacement de la toile en automne et des trous dans la toile. Pour ce faire, il faut casser le béton du banc et de la marche pour un montant de 3 000$

-           Condamner les deux retours d'eau dans le banc spa, ce qui augmentera la circulation d'eau dans la piscine pour un montant de 400$

-           Condamner l'orifice qui permet le remplissage automatique pour un montant de 200$, dans les cas des retours et du tuyau de remplissage, l'installation des pièces serait à refaire.

-           La toile de la piscine serait à changé : 2 800$ pour la toile et 1 200$ pour son installation.

-           Installation d'un feutre pour s'assurer de protéger la toile (sous-tapis) pour 450$

-           Pour refaire la toile on doit procéder à la prise de plan ce qui coûte 450$

-           Remplacer la marche par une échelle 450$ (pièce et installation incluse).

-           Container pour ramasser le béton : 400$ »

[56]         L'expert Villemaire témoigne avoir constaté la présence d'une toile « flottante », non stable et déplacée et coupée par endroits.

[57]         Il constate une anomalie importante : une seule pompe de 2 hp qui fournit de la pression pour cinq sorties d'eau. À son avis, la pression d'eau est nettement insuffisante pour permettre une circulation d'eau adéquate. Il serait avantageux d'installer une deuxième pompe au coût d'environ 2 500 $ tout en enlevant le banc intégré dans la piscine et les marches et en condamnant deux sorties d'eau. En adoptant cette solution, il faudrait nécessairement enlever le banc de spa dans la piscine et installer des plaques au niveau des orifices à condamner. Plus tard, l'expert dira au Tribunal qu'une pompe suffirait, qu'elle soit de 1.5 hp comme prévu au contrat ou 2 hp comme installée, pour assurer une circulation d'eau adéquate mais avec trois retours d'eau seulement. Cette solution réglerait le problème de la circulation d'eau.

[58]         Par ailleurs, cette solution ne réglerait pas le problème de la toile qui se décolle et se déplace à cause de la présence du banc et des marches intégrés, à son avis. En effet, il dit avoir constaté à plusieurs reprises un problème semblable de décollement et de déplacement de la toile en présence de bancs et de marches intégrés dans une piscine. Il explique qu'à moyen terme, la toile se coupe en raison de la configuration du banc et finit par se déplacer. D'ailleurs, l'absence de pression d'eau contribue au décollement de la toile et aggrave le déplacement.

[59]         Les trous dans la toile réparés l'été précédent auraient été causés par des pics résultant d'un polissage insuffisant de la surface de béton au moment de l'installation de la piscine. C'est la raison pour laquelle il recommande de remplacer la toile qui ne peut plus être utilisée une fois les travaux d'enlèvement des marches et du banc exécutés.

[60]         Quant au système de remplissage d'eau qui devait fonctionner de façon automatique, il constate que le contrôle ne fonctionne pas du tout et que la solution la plus simple et la moins chère serait de simplement boucher un orifice et de continuer à faire du remplissage manuel comme le fait présentement le défendeur, principal responsable de l'entretien de la piscine.

[61]         Il constate que la toile s'est déjà détachée à au moins deux endroits. Il remarque aussi la présence de nombreux plis dans la toile, ce qui justifie d'autant plus son remplacement. Ces plis empêchent le robot nettoyeur de fonctionner normalement.

[62]         Quant au système de filtration « au sel », il s'agit d'un système qui fonctionne très bien depuis une dizaine d'années environ et le recommande. D'ailleurs, selon le défendeur, le problème de la qualité de l'eau s'est amélioré depuis l'installation de ce système à la fin de l'été 2005.

[63]         Il explique les difficultés de fonctionnement de la thermopompe par l'insuffisance d'eau pour l'alimenter.

[64]         Quant à la perte d'eau dans la piscine constatée par les défendeurs et par son collègue Malo durant l'été précédent, il l'attribue à la toile percée en raison des pics et de l'eau qui s'infiltre sous la toile trouée. Afin d'empêcher la présence de ces pics à l'avenir, il recommande justement d'installer un feutre sous la toile, après avoir évidemment nettoyé et poli la surface de béton.

[65]         Le témoignage de l'expert Villemaire rejoint les constatations faites par son collègue Malo l'été précédent. Ce dernier avait notamment perçu rapidement et clairement une circulation d'eau tout à fait insuffisante et inadéquate. Le témoignage de l'expert Villemaire, ses recommandations et ses explications sont tout à fait crédibles et le Tribunal les retient sans réserve. Le fait que son fils ait réparé les trous dans la toile l'été précédent n'affecte aucunement sa crédibilité.

[66]         Les mêmes commentaires s'appliquent à l'égard du témoignage de Malo.

[67]         Piscines Perrin n'a pas fait entendre pour sa part un expert pour contredire ou nuancer le témoignage de l'expert Villemaire. Madame Perrin n'a pas été qualifiée d'experte ni a demandé à être reconnue à ce titre. Elle a bien tenté d'exprimer certaines opinions sur le sujet mais le Tribunal a maintenu les objections formulées par l'avocat des défendeurs.

[68]         Elle a néanmoins tenté d'expliquer que le problème de circulation d'eau provient en grande partie d'une cascade d'eau faisant partie de l'ensemble paysager conçu pour le bénéfice des défendeurs. La preuve n'appuie pas cette affirmation. Même si cela était fondé, il revient à l'entrepreneur de prendre en considération cet élément de l'ensemble paysager dans lequel s'intègrent la piscine et le spa vendus et livrés aux clients.

[69]         Madame Perrin savait ou devait savoir que l'installation d'une cascade ou d'une chute d'eau faisant partie intégrante du système d'alimentation en eau de la piscine avait pour effet d'enlever de la pression sur la circulation d'eau dans la piscine et aurait dû aviser en conséquence les défendeurs.

[70]         Madame Perrin témoigne aussi du fait que le problème d'algues participe habituellement d'un problème de niveau de chlore dans la piscine et non d'un problème relié à l'installation de la piscine ou à la piscine elle-même. La preuve n'appuie pas cette affirmation, le Tribunal préférant le témoignage de Messieurs Malo et Villemaire.

[71]         De toutes façons, Piscines Perrin a refusé de donner suite aux appels de service des défendeurs aux motifs clairement exprimés par madame Perrin, à savoir qu'il n'était pas question de faire un appel de service tant qu'il restait un solde dû à payer sur les contrats.

[72]         Elle ajoute que les recommandations de l'expert Villemaire ne sont pas réalisables puisqu'il n'y a pas suffisamment de dégagement à l'extérieur de la piscine pour y installer les marches à l'extérieur comme il le préconise. Il est possible que la solution proposée ne convienne pas ou ne convienne pas entièrement mais dans les deux cas, la solution proposée s'effectue au détriment des défendeurs et eux seuls pourraient se plaindre de cette absence de dégagement. Les défendeurs subiront un préjudice certain si, en plus de remplacer les marches intégrées par un simple escalier, ils ne peuvent replacer l'escalier ailleurs au pourtour de la piscine.    

[73]         En résumé, le Tribunal conclut que les défendeurs ont dûment établi une conception et une installation déficiente de la piscine livrée à leur résidence, provoquant les nombreuses anomalies constatées par les défendeurs, les techniciens et l'expert retenus par eux.

[74]         Le Tribunal estime au surplus que le fardeau de la preuve de déterminer les causes des déficiences incombe à Piscines Perrin. En effet, il s'agit d'un contrat d'entreprise comportant une obligation de résultat : l'installation d'une piscine, d'un spa et des accessoires fonctionnels. Ce résultat n'a pas été atteint.

[75]         Il revenait à Piscines Perrin d'établir que le résultat n'avait pas été atteint en raison d'un manque d'entretien et d'une autre cause imputable aux défendeurs ou à des tiers redevables aux défendeurs. Cette preuve n'a été faite, au contraire.

[76]         Piscines Perrin conteste le droit des défendeurs de leur réclamer le coût des travaux correctifs en l'absence d'une mise en demeure. Elle invoque l'exception d'inexécution pour justifier la cessation des appels de service à compter du printemps 2005.

[77]         À la suite de l'incident du chèque de 25 000 $ en octobre 2004 et de l'envoi de plusieurs lettres par télécopieur adressées par les défendeurs en 2005, l'attitude manifestée par Piscines Perrin était clairement de refuser d'exécuter tout autre service en rapport aux contrats. Elle a clairement manifesté aux défendeurs son intention de ne pas exécuter ses obligations contractuelles. Il y avait donc dispense de la part des défendeurs de faire parvenir une mise en demeure formelle après le printemps 2005, à supposer même que les nombreuses lettres ne constituent pas en soi une mise en demeure suffisante [6] .

[78]         En tout état de cause, la procédure judiciaire constitue en soi une mise en demeure suffisante et valable à l'égard de tous les travaux non encore exécutés, soit la vaste majorité des travaux visés par demande reconventionnelle.

[79]         Par ailleurs, l'exception d'inexécution n'est pas applicable dans les circonstances. En effet, les défendeurs pouvaient retenir sur le prix convenu une somme suffisante pour satisfaire aux réserves faites quant aux vices et malfaçons apparents qui existaient lors de la réception de l'ouvrage et ce, jusqu'à ce que les réparations et les corrections soient faites à l'ouvrage [7] .

[80]         Reprenant les items de la réclamation en demande reconventionnelle, le Tribunal accueille la réclamation reliée au coût de l'installation d'un système de filtration au sel causé par la mauvaise installation de la piscine, soit un montant de 2 185,46 $. Ce système de filtration a corrigé le problème de qualité de l'eau et confirme l'existence du vice et la validité du travail correctif. Ces travaux ont été exécutés le 28 juillet 2005, soit bien après que la demanderesse ait pris la décision de refuser d'exécuter tous les appels de service provenant des défendeurs.

[81]          Le Tribunal accorde également le montant de 683,70 $ pour la réparation des trous de la piscine effectuée en octobre 2006. Comme l'affirme l'expert Villemaire, la présence de ces trous s'explique par une mauvaise installation de la piscine par Piscines Perrin.

[82]           Le Tribunal accorde également aux défendeurs le remboursement du montant de 350 $ payé en vertu du contrat pour le système de remplissage d'eau automatique. En effet, ce système n'a jamais fonctionné et la solution préconisée par l'expert Villemaire est de continuer le remplissage manuel, renonçant ainsi au caractère automatique du système initial.

[83]         Le Tribunal accepte les recommandations non contredites, valables et logiques proposées par l'expert Villemaire dans son rapport D-3 et ses explications détaillées données au procès et accorde aux défendeurs la somme de 9 350 $ pour ce poste de réclamation.

[84]         Les défendeurs réclament 5 000 $ pour des troubles et inconvénients subis par suite de l'inexécution des obligations de Piscines Perrin. Notamment, le défendeur a témoigné que c'est lui qui s'occupe principalement de l'entretien de la piscine et que le problème de qualité de l'eau a considérablement augmenté le temps consacré à l'entretien de la piscine, notamment par le remplissage manuel quotidien de la piscine et par le nettoyage de la piscine pour enlever les algues, les feuilles, etc.

[85]         Il ne peut nettoyer la piscine avec le robot nettoyeur qui ne fonctionne pas. Il doit donc faire le nettoyage à la main. Le système de filtration au sel requiert également certains travaux de remplissage, ce que le défendeur voulait éviter par le système de chlorinateur acheté de la demanderesse. La famille n'a pu se baigner durant les deux premiers étés, comme elle l'escomptait, en raison de la mauvaise qualité de l'eau.

[86]         Les défendeurs ont demandé et Piscines Perrin s'est engagée à leur fournir une piscine et un spa avec un entretien minimal. Piscines Perrin n'a pas respecté son engagement à cet égard. Et les inconvénients se poursuivront à l'avenir puisque les travaux correctifs n'élimineront pas tous les travaux supplémentaires.

[87]         À toutes fins utiles, la famille des défendeurs a été privée d'une piscine fonctionnelle et des avantages qui en découlent durant tout l'été 2004 et l'été 2005. Rappelons que Piscines Perrin devait débuter ses travaux en mai 2004 et ce n'est qu'à la mi-juillet que la piscine fut remplie d'eau. À ce titre, le Tribunal considère qu'il y a troubles et inconvénients justifiant une compensation de 2 000 $.

[88]         En conséquence, le Tribunal fait droit à la demande reconventionnelle des défendeurs pour un montant de 14 569,16 $. Par le jeu de la compensation, le Tribunal condamne donc la demanderesse à payer une somme de 2 582,65 $ aux défendeurs. À ce montant, il faut ajouter le montant de la facture de l'expert Villemaire de 676,12 $.

[89]         Dans les circonstances, le Tribunal doit annuler la saisie avant jugement pratiquée par Piscines Perrin en l'instance.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[90]         ACCUEILLE l'action principale pour la somme de 11 986,51  $;

[91]         ACCUEILLE la demande reconventionnelle des défendeurs pour la somme de 14 569,16 $;

OPÉRANT COMPENSATION, LE TRIBUNAL :

[92]         CONDAMNE la demanderesse à payer aux défendeurs la somme de 2 582,65 $, avec intérêts au taux légal plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec depuis l'assignation;

[93]         ANNULE la saisie avant jugement pratiquée par la demanderesse le 1 er septembre 2007 sur le bien décrit au procès-verbal de saisie, à savoir :

« un spa Hydropool, le seul accessoire le couvercle».

[94]         ACCORDE mainlevée aux défendeurs de cette saisie avant jugement;

[95]         LE TOUT , avec dépens, incluant les frais d'expert établis à la somme de 676,12 $.

 

 

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VIRGILE BUFFONI, J.C.Q

M e Maxime Olivier Léonard 

Procureur de la demanderesse

 

M e Éric-Pierre Fugère

Procureur des défendeurs

 



[1] La remise en état des parties entraînerait un crédit de 13 000 $ pour le spa.

[2] Pièce P-2. Même si le contrat porte la date « 1 février 2003 », les parties conviennent qu'en réalité, le contrat est signé le 1 er février 2004.

[3] Pièce D-3.

[4] Article 2119 , Code civil du Québec .

[5] La différence de 0,70 $ entre le montant réclamé et le calcul détaillé est sans conséquence.

[6] Article 1597 , Code civil du Québec .

[7] Article 2111 , Code civil du Québec .