Senerchia c. Rinaldi |
2011 QCCQ 3593 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-22-167826-109 |
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DATE : |
Le 15 avril 2011 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
SYLVIE LACHAPELLE, J.C.Q. |
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SERGIO SENERCHIA |
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-et- |
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ÉBÉNISTERIE BOBOIS |
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Demandeurs |
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c. |
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REMO RINALDI |
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-et- |
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RINALDI CONSTRUCTION INC. |
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Défendeurs |
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JUGEMENT |
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[1] La partie demanderesse, Sergio Senerchia (« Senerchia ») et Ébénisterie Bobois (« Bobois ») réclament aux défendeurs solidairement, Remo Rinaldi (« Rinaldi ») et Rinaldi Construction inc. (« Construction ») 20 155,78 $ pour marchandises vendues et livrées.
[2] Rinaldi et Construction refusent de payer au motif que les travaux auraient été mal faits et n'auraient pas été terminés.
[3] Rinaldi et Construction allèguent que le contrat P-1 invoqué par Senerchia et Bobois n'a jamais été accepté par Rinaldi et Construction et en conséquence, ils s'opposent à la production de ce contrat. L'objection est prise sous réserve par le Tribunal.
Jugement sur l'objection
[4] La partie adverse a admis, lors de la preuve en défense, tant lors du témoignage de Rinaldi que de madame Vanessa Masciotra (« Masciotra »), sa conjointe, que les services de Bobois ont été retenus pour fabriquer et installer des cabinets de cuisine et autres vanités pour leur résidence. Ils ont également reconnu tous les deux que les travaux devaient être faits pour 46 000 $.
[5] Par ailleurs, Rinaldi témoigne que le contrat était de 46 000 $, taxes incluses, alors que Masciotra ne se rappelle pas si le prix convenu incluait les taxes.
[6] La preuve révèle donc que Rinaldi et Construction admettent qu'ils ont retenu les services de Bobois. Ils admettent également que des travaux ont été faits par Bobois suivant leurs instructions.
Jugement
[7] Les admissions de Rinaldi et Construction constituent un commencement de preuve permettant au Tribunal de recevoir la preuve testimoniale pour démontrer l'existence d'un contrat entre les parties, soit le contrat P-1 .
[8] Ainsi, il appert de la preuve que le document P-1 , préparé par Bobois, mais non signé par Rinaldi et Construction reflète l'entente conclue entre les parties. L'objection est donc rejetée.
Les faits
[9] Lors de l'audience, Bobois avise le Tribunal que la réclamation est réduite à 20 155,78 $ après avoir déduit 5 500 $ pour la chambre froide qui n'a pas été faite.
[10] Ainsi, Senerchia et Bobois réclament les sommes suivantes :
Solde
dû sur le contrat
P-1
pour les armoires
de cuisine au montant total de 51 922,50 $ : 15
714,36 $
Contrat P-2 (sablage et vernissage de 14 portes) : 4 441,41 $
Pour un total de : 20 155,77 $
[11] Monsieur Asbet Bajkian (« Bajkian »), associé de la société en nom collectif Bobois témoigne qu'il a rencontré Rinaldi et Masciotra dans le but de préparer une soumission pour la fabrication et l'installation d'armoires de cuisine et diverses autres vanités dans leur résidence.
[12] Rinaldi et Masciotra ont remis un plan et ont travaillé avec Bajkian à l'élaboration de leur projet.
[13] Bajkian, basé sur la demande de Rinaldi et Masciotra a préparé un plan à l'échelle des travaux requis lesquels totalisaient selon son témoignage 48 355 $.
[14] La discussion concernant le prix des travaux aurait eu lieu le 3 juillet 2008. Bajkian accorde un escompte de 2 355 $ réduisant le coût des travaux à un chiffre rond, soit à 46 000 $ auquel s'ajoutent les taxes pour totaliser 51 922,50 $.
[15] Bajkian complète P-1 . Il décrit les travaux et note en bas de page le prix, l'escompte et les taxes, tel que décrit au paragraphe ci-haut.
[16] Le contrat P-1 prévoit que Bobois vend à Construction.
[17] Le jour même, Rinaldi remet un chèque daté du 3 juillet 2008 de 10 000 $. Ce chèque porte l'entête de « Rinaldi Construction inc. » ( P-5 en liasse ).
[18] Construction aurait été dissoute en septembre 2008.
[19] Bobois débute les travaux vers le mois de décembre 2008 puisque Rinaldi doit d'abord terminer la construction de sa maison. L'installation des armoires et autres cabinets aurait été finalisée en avril 2009.
[20] Le 16 mars 2009, Rinaldi effectue un deuxième paiement, cette fois de 20 000 $ en remettant un chèque identifié strictement au nom personnel de Remo Rinaldi ( P-5 en liasse ).
[21] La preuve révèle que Rinaldi a, au cours du mois de janvier 2009, commandé par l'entremise de Bobois, des moulures qu'il paie 10 693,77 $ par chèque personnel, daté du 26 janvier 2009 ( P-5 ). Cette facture ne fait pas partie de la réclamation puisqu'elle a été payée au complet.
[22] Le 15 avril 2009, Rinaldi demande à Bobois de sabler, teindre et vernir 14 portes et cadres de bois et il commande une moulure ronde décorative pour le plafond.
[23] Rinaldi apporte les portes à l'atelier et Bobois effectue le travail pour un coût total de 4 441,41 $ ( P-2 ).
[24] Dans les jours qui suivent, Bobois cherche à se faire payer le solde dû pour les deux contrats P-1 et P-2 totalisant 26 663,91 $, (réduit le jour de l'audience à 20 155,77 $). Rinaldi refuse de payer.
[25] Selon Sernerchia, Rinaldi ne retourne pas ses appels. Finalement au mois de novembre 2009, Sernerchia réussit à rejoindre Rinaldi qui lui indique que des travaux correctifs doivent être exécutés.
[26] C'est la première fois que Rinaldi fait part à Sernerchia de défauts de construction parce qu'il ne s'est jamais plaint auparavant.
[27] Selon Sernerchia, il s'agit de corrections mineures. Le 25 novembre 2009, il transmet une lettre à Rinaldi ( P-3 ) dans laquelle il dresse la liste des déficiences que ce dernier lui a indiquées. Sernerchia demande à Rinaldi de fixer un rendez-vous dans un délai de 10 jours pour lui permettre de finaliser le tout.
[28] Rinaldi ne donne pas suite, et Bobois initie donc les présentes procédures pour se faire payer.
[29] La version de Rinaldi est fort différente. Rinaldi témoigne qu'il aurait demandé à plusieurs reprises de finaliser les travaux, mais que Bobois n'a jamais rien fait.
[30] Quant au contrat P-1 , Rinaldi témoigne que les parties avaient convenu d'un prix de 46 000 $ toutes taxes incluses.
[31] Son épouse, Masciotra témoigne qu'elle ne se souvient pas si l'entente était de 46 000 $ plus les taxes ou taxes incluses.
[32] Rinaldi témoigne qu'il n'a pas vu les documents P-1 et P-2 avant les travaux. Bobois aurait préparé P-1 et P-2 de façon unilatérale, de telle sorte qu'il n'est pas d'accord avec les prix tels que ventilés. Selon lui, il devrait être crédité d'un montant supérieur à 5 500 $ pour la chambre froide non faite. Il évalue à plus de 10 000 $ ce qui lui en coûterait pour la faire construire.
[33] Quant au deuxième contrat ( P-2 ), Rinaldi considère que le montant de 4 441,41 $ réclamé est trop élevé. Il n'aurait convenu d'aucun prix avec Bobois pour ces travaux. Lorsqu'il fut informé du prix une fois le travail terminé, il en fut surpris.
[34] Rinaldi témoigne que parce qu'il avait perdu confiance en Bobois, il aurait corrigé certaines déficiences lui-même. Il évalue que ces réparations lui auraient coûté ou lui coûteront 2 500 $.
Questions en litige
a) Qui est partie au contrat P-1 , Rinaldi personnellement ou Construction Rinaldi inc. ou les deux ?
b) Bobois a-t-elle finalisé le contrat et a-t-elle droit au paiement du solde dû pour les contrats P-1 et P-2 qu'elle réclame des défendeurs ?
Discussion et décision
[35] Bobois indique au contrat P-1 du 10 juillet 2008 avoir vendu une cuisine à « Rinaldi Construction inc. »
[36] Par ailleurs, Bobois poursuit Rinaldi personnellement et Rinaldi Construction inc. et demande leur condamnation solidaire.
[37] La preuve révèle que Rinaldi et Masciotra ont retenu les services de Bobois pour faire la cuisine de leur résidence personnelle.
[38] Rinaldi allègue d'ailleurs dans son plaidoyer que les travaux ont effectivement été faits à la résidence de Rinaldi pour ses fins personnelles.
[39] Trois chèques ont été mis en preuve. Le premier paiement du 3 juillet 2008 de 10 000 $ est fait au moyen d'un chèque de Construction.
[40] Les paiements du 26 janvier 2009 de 10 693,77 $ et du 16 mars 2009 de 20 000 $ sont faits par Rinaldi personnellement.
[41] Ainsi, même si le contrat est libellé à l'ordre de Construction, la partie qui a retenu les services de Bobois est Rinaldi personnellement.
[42] Comme la solidarité ne se présume pas et qu'il n'est pas prévu à P-1 que Construction et Rinaldi sont solidairement responsables du paiement, le Tribunal conclut donc que le contrat a été conclu avec Rinaldi personnellement.
[43] Rinaldi soulève deux moyens de défense.
[44] Le premier, que les montants indiqués au contrat ne correspondent pas à l'entente initiale. Plus précisément que le coût total du contrat est 46 000 $, toutes taxes incluses.
[45] Bajkian nie le témoignage de Rinaldi.
[46] Le Tribunal est confronté à deux témoignages contradictoires et doit donc choisir celui qui est le plus crédible, c'est-à-dire celui dont les faits sont les plus précis et concordants selon la balance des probabilités.
[47] La preuve révèle que ce qui a été usiné et livré chez Rinaldi est conforme à la description apparaissant au contrat sauf quant à la chambre froide qui n'a pas été construite et dont le montant a été déduit de la réclamation.
[48] La seule controverse est donc le prix. Est-ce 46 000 $ tout compris ou 46 000 $ plus taxes ?
[49] Bajkian a rédigé P-1 à l'aide des notes prises lors des rencontres avec ses clients. Il explique que le coût total des travaux était en fait de 48 355 $ et qu'il accordait un escompte de 2 355 $ pour arriver à 46 000 $ en capital. Ensuite, il ajoutait les taxes de 2 300 $ et 3 622,50 $.
[50] Bajkian a rendu un témoignage fort convaincant. De toute évidence, il connaissait bien son dossier et avait une mémoire précise des discussions avec ses clients. C'est ce témoignage que le Tribunal retient. Pour le Tribunal, Rinaldi a probablement compris erronément que Bobois déduisait les taxes alors que Bobois a plutôt donné un escompte de 2 355 $.
[51] Le deuxième motif invoqué par Rinaldi pour justifier son refus de payer est la mauvaise exécution des travaux.
[52] Or, Rinaldi n'a pas démontré qu'il s'est plaint des défauts de construction avant que Bobois réclame le solde dû sur les contrats.
[53] La preuve documentaire supporte le témoignage de Senerchia que ce dernier a tenté de rejoindre Rinaldi à plusieurs reprises sans succès. Il s'est présenté au domicile de Rinaldi et a parlé à Masciotra rappelant à cette dernière qu'un solde était dû.
[54] Masciotra témoigne qu'elle a eu peur lors de cette visite. Dans son plaidoyer, il est même allégué que le refus de Rinaldi de payer le solde a entraîné des menaces de Bobois qui ont donné lieu à une plainte aux autorités policières par Masciotra.
[55] Aucune preuve n'a été faite, lors de l'audience, pour supporter cet allégué que le Tribunal juge plutôt farfelu.
[56] La preuve révèle donc que c'est Senerchia qui cherche par tous les moyens à effectuer les correctifs qui selon lui, sont mineurs.
[57] Senerchia explique qu'il veut terminer le contrat à la satisfaction du client pour que ce dernier paie le solde du contrat, ce qui est fort crédible.
[58] C'est Senerchia qui complète une liste de déficiences d'après les informations que lui donne Rinaldi lors de la visite de la résidence.
[59] C'est Senerchia qui, le 25 novembre 2009, demande à Rinaldi de le rappeler pour fixer une date pour effectuer les travaux. Rinaldi ne lui répond pas.
[60] Finalement, le 7 décembre 2009, Senerchia informe Rinaldi de son intention de le poursuivre.
[61] Lors de l'audience, Rinaldi témoigne qu'il n'a pas demandé à Bobois de faire les correctifs parce qu'il avait perdu confiance.
[62] Rinaldi aurait lui-même fait certains travaux et il évalue qu'il lui en coûterait 2 500 $ pour corriger le tout.
[63] Rinaldi n'a pas convaincu le Tribunal du bien-fondé de sa défense. Son témoignage n'est pas supporté par la preuve documentaire, et n'est pas vraisemblable.
[64] Rinaldi admet que Bobois a sablé, teint et verni 14 portes et a fourni diverses moulures décoratives pour lesquelles il a été facturé 4 441,41 $ et qu'il n'a rien payé. Il témoigne qu'il n'a pas payé parce qu'il trouvait cette facture trop élevée.
[65] Ce n'est pas un motif.
[66] Le Tribunal conclut donc que Bobois qui a le fardeau de la preuve a démontré à la satisfaction du Tribunal avoir vendu et livré une cuisine à Rinaldi conformément au contrat P-1 et qu'un solde de 15 714,36 $ est toujours dû.
[67] Bobois a aussi démontré avoir complété les travaux décrits à P-2 et que ce contrat de 4 441,41 $ n'a pas été payé par Rinaldi.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE la requête introductive d'instance de la partie demanderesse ;
CONDAMNE
la partie défenderesse, Remo Rinaldi, à payer à la demanderesse la somme de
20 155,77 $, avec intérêts au taux de 5 % l'an plus l'indemnité
additionnelle prévue à l'article
AVEC LES ENTIERS DÉPENS.
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__________________________________ SYLVIE LACHAPELLE, J.C.Q. |
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Procureure de la demanderesse : |
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Me Elaine Bissonnette |
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BISSONNETTE & AL. |
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3892 Monselet |
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Montréal-Nord (Québec) H1H 2C1 |
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Procureur des défendeurs : |
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Me Pierre Pratte |
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BCF, 1100 boul. René-Lévesque Ouest, 25 e étage |
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Montréal (Québec) H3B 5C9 |
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Date d’audience : |
8 octobre 2010 |
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