La Ferrière c. Landry

2011 QCCQ 12454

JS 1046

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LONGUEUIL

« Chambre civile »

N° :

505-32-026967-100

 

 

DATE :

Le 4 octobre 2011

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

CHANTAL SIROIS, J.C.Q.

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SIMON LA FERRIÈRE

et

RÉMY RONDEAU

Partie demanderesse

c.

 

JOCELYN LANDRY

et

CHANTALE HUBERDEAU

Partie défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            Les demandeurs Simon La Ferrière (La Ferrière) et Rémy Rondeau (Rondeau) réclament 5 490,19 $ en diminution du prix de vente et en dommages-intérêts aux parties défenderesses Jocelyn Landry (Landry), leur vendeur, et Chantale Huberdeau (Huberdeau), l’agent immobilier ayant représenté les deux parties lors de la vente de l’immeuble situé au 4750, Gaétan-Boucher à Saint-Hubert, en date du 28 mai 2007. Ils allèguent qu’une fissure dans l’un des coins de la fondation constituait un vice caché, connu du vendeur et de l’agent immobilier.

[2]            Landry et Huberdeau plaident qu’ils ignoraient tous les deux l’existence de cette fissure.

[3]            Les explications qu’ils ont fournies à cet égard sont plausibles et vu leur témoignage crédible et cohérent et vu la présomption de bonne foi édictée par l’article 2805 C.c.Q., il n’y a pas lieu d’écarter leur témoignage.

[4]            La Ferrière et Rondeau n’ont donc pas prouvé la faute professionnelle d’Huberdeau à titre d’agent immobilier.

[5]            Lors de la vente, Landry a dévoilé aux acheteurs qu’il avait fait réparer deux fissures quelque temps auparavant. Il leur a d’ailleurs remis la facture de réparation de ces deux fissures, avec garantie transférable à l’acheteur.

[6]            Le fait pour le vendeur d’avoir fait réparer antérieurement deux autres fissures situées ailleurs dans les fondations et le fait d’avoir enlevé une partie du revêtement pour vérifier la présence ou l’absence de fissures à un autre endroit dans les fondations ne permet pas d’inférer la connaissance d’un autre problème par le vendeur.

[7]            D’ailleurs, il s’est écoulé plus de deux ans après la prise de possession de la résidence et avant que les acheteurs connaissent leurs premières infiltrations d’eau dans cette résidence.

[8]            Cependant, l’ignorance du problème par le vendeur ne suffit pas à conclure à absence de vice caché.

[9]            Pour décider s’il y a vice caché ou non, le Tribunal doit appliquer les principes des articles 1726 et 1739 C.c.Q. qui déterminent les conditions d’application de cette garantie légale :

·         Le vice doit être grave, c'est-à-dire doit diminuer significativement l'utilité du bien vendu;

·         Le vice doit être inconnu de l'acheteur au moment de la vente;

·         Le vice doit être caché, c'est-à-dire non apparent au moment de la vente;

·         Le vice doit être antérieur à la vente;

·         Il doit s'agir réellement d'un vice et non d'une usure ou d'une détérioration résultant de l'usage normal d'un bien ;

·         L’acheteur n’aurait pas acheté ou n’aurait pas donné si haut prix s’il avait connu le vice;

·         Il doit y avoir dénonciation écrite par l’acheteur au vendeur dans un délai raisonnable de la découverte du vice.

[10]         Il est donc clairement reconnu que l'usure normale du bien vendu ne peut donner ouverture à la garantie contre les vices cachés.  L'auteur Jeffrey Edwards traite comme suit de ce principe dans son ouvrage La garantie du vendeur en droit québécois [1]   :

 

Ils ont néanmoins observé que la détérioration due à l'usure, au vieillissement ou à la vétusté, n'est pas visée par l'usage mentionné dans l'article 1726 C.c.Q., car l'acheteur devait « s'[y] attendre» et la « prévoir ».

 

[11]         En l’espèce, en l’absence de toute preuve par expert et en l’absence de témoignage d’un entrepreneur indépendant, on ne peut pas savoir si la fissure reprochée résulte d’un vice de conception ou de construction de l’immeuble ou plutôt si elle est due au vieillissement et à la vétusté d’une résidence dont la construction remonte à 1973, donc près de 40 ans.

[12]         Or, en vertu des articles 2803 et 2804 C.c.Q. le fardeau de prouver vice de façon prépondérante repose sur les demandeurs.

[13]         Le Tribunal est d’avis que La Ferrière et Rondeau ne se sont pas déchargés de ce fardeau.

[14]         POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[15]         REJETTE la demande contre les deux parties défenderesses, avec les frais judiciaires de 148 $ payables à chacune d’entre elles.

 

 

 

 

 

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CHANTAL SIROIS, J.C.Q.

 

 

 

 

Date d’audience : Le 4 octobre 2011

 

 



[1] Jeffrey EDWARDS, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois , Montréal, Wilson et Lafleur, 1998, p. 151.