Hébert c. Agence de voyages Duvernay inc.

2011 QCCQ 13183

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LAVAL                             

LOCALITÉ DE

LAVAL

« Chambre civile »

N°:

540-32-022236-093

 

 

 

DATE :

Le 25 octobre 2011

_____________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

 JEAN PIERRE ARCHAMBAULT, J.C.Q.

_____________________________________________________________________

 

 

RACHEL HÉBERT

ET

BERTRAND HÉBERT 

 

Partie demanderesse

c.

 

AGENCE DE VOYAGES DUVERNAY INC.

et

9107-7107 QUÉBEC INC. faisant affaires sous le nom TOUR SOLAZUR

 

Parties défenderesses

Et

 

9107-7107 QUÉBEC INC. faisant affaires sous le nom TOUR SOLAZUR,

 

           Demanderesse en garantie

 

c.

AUTOCAR PRÉFÉRENCE LTÉE,

 

           Défenderesse en garantie

 

 

_____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

_____________________________________________________________________

[1]    Le Tribunal est saisi de dix-neuf (19) dossiers de voyageurs mécontents du même voyage en autocar à Chicago;

[2]    Vingt-cinq (25) voyageurs qui ont participé à un voyage à Chicago du 13 au 17 août 2009,  se sont déclarés insatisfaits du voyage et de la qualité des services.  Ils se plaignent notamment de la climatisation de l’autocar fourni;

[3]    Il s’agit des dossiers suivants :


NO. DOSSIER

PARTIES DEMANDERESSE

PARTIES DÉFENDERESSES

MONTANT

 

 

 

 

540-32-022112-096

SMITH, Micheline

Solazur

700.00 $

540-32-022113-094

LAVOIE, Fleurette

Solazur

700.00 $

540-32-022114-092

MARCEAU, Nicole

Solazur

700.00 $

540-32-022115-099

CHARBONNEAU, Cécile

Solazur

700.00 $

 

 

 

 

540-32-022128-092

BARIL, Gaétane*

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022139-099

DESJARDINS, Francine

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022203-093

QUESNEL, Thérèse

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022240-095

COURCHESNE, Marguerite

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022247-090

RHÉAUME, Lise

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022248-098

LANCTOT, Francine

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022303-091

MARCHAND, Jacques

Solazur- Duvernay

535.00 $

540-32-022306-094

VANDEWALLE, André

Solazur- Duvernay

535.00 $

 

 

 

 

540-32-022155-095

FOREST, Roger  et

DESJARDINS, Liliane

Solazur-Duvernay

1 070.00 $

540-32-022203-093

COURVAL, Jean-Guy  et

VÉZINA, Hélène

Solazur- Duvernay

1 070.00 $

540-32-022236-093

HÉBERT, Rachel  et

HÉBERT, Bertrand

Solazur- Duvernay

1 070.00 $

 

 

 

 

540-32-022210-098

CONSTANTINEAU, Cécile

Solazur

853.15 $

 

 

 

 

540-32-022211-096

MORIN, Georges  et

NICKNER, Lucie

Solazur

1 088.05 $

540-32-022213-092

ARSENEAULT, Michel et

LÉVESQUE, Marcelle

Solazur- Duvernay

1 088.05 $

540-32-022220-097

BÉRARD, Marie et

BÉRARD, Jacinthe

Solazur- Duvernay

1 106.30 $

 

 

 

 

13 actions contre

Solazur -Duvernay

 

 

  6 actions contre

Solazur

 

 

 

 

TOTAL

14,425.75 $

 

[4]    Dans tous les dossiers, les demandeurs réclament le remboursement intégral du coût payé pour effectuer leur voyage;

[5]    Certains d’entre eux ont poursuivi conjointement et solidairement « Duvernay » et « Solazur ».  D’autres ont poursuivi uniquement « Solazur »;

[6]    Ledit voyage fut acheté par les demandeurs chez la défenderesse « Duvernay » qui est une agence de voyages dûment accréditée;

[7]    « Duvernay » a réservé le voyage auprès de la codéfenderesse « Solazur » qui est un grossiste en voyages se spécialisant dans les voyages en autocar, tel que l’a expliqué son président Belhajali Noureddine;

[8]    Il est admis que c’est « Solazur » qui a fait les arrangements auprès d’un transporteur opérant des autocars, soit Autocar Préférence Ltée pour la location de l’autocar et auprès des hôtels pour l’hébergement des voyageurs, soit le Hampton Inn Suites à Windsor pour la première nuit, le Marriott Chicago Midway à Chicago pour les deuxième et troisième nuit et au Radisson Hôtel à London pour la quatrième nuit;

[9]    Il est aussi admis que c’est « Solazur » qui prépare le programme du voyage et prévoit les lieux à visiter ainsi que les activités reliées au voyage; 

[10]         Dans tous les dossiers dans lesquels elle est poursuivie, la défenderesse « Duvernay » produit une défense dans laquelle elle allègue qu’elle a réservé un forfait voyage d’une durée de 5 jours à Chicago, du 13 au 17 août 2009, auprès de la co-défenderesse « Solazur » pour l’ensemble du groupe de voyageurs;

[11]         Elle ajoute que c’est « Solazur » qui était responsable de l’entière exécution de toutes les prestations relativement audit voyage et que les problèmes rencontrés lors du voyage relèvent de la seule responsabilité de « Solazur » ajoutant que « Duvernay » n’avait aucun contrôle sur ceux-ci et que c’est « Solazur » qui a retenu les services de Autocar Préférence Ltée;

[12]         Appelant « Solazur » en garantie dans tous les dossiers visés, « Duvernay » précise que « Solazur » doit être tenue responsable pour tous les problèmes relatifs au voyage;

[13]         « Duvernay » ajoute, par ailleurs, que la réclamation pour le remboursement intégral de la somme payée par chacun des demandeurs pour l’achat du forfait voyage est nettement exagérée et disproportionnée eu égard à la proportion du contrat que les demandeurs allèguent ne pas avoir été complétée;

[14]         Elle précise que les demandeurs ont tous bénéficié des autres services inclus dans le forfait dont, notamment, les quatre (4) nuitées à l’hôtel et quatre (4) petits déjeuners ainsi que la visite des lieux et des temps libres;

[15]         Pour sa part, « Solazur » allègue, elle aussi, que la réclamation pour le remboursement intégral de la somme payée par chacun des demandeurs, pour l’achat de leur forfait voyage, est nettement exagérée et disproportionnée et ce, pour les mêmes raisons que « Duvernay »;

[16]         « Solazur » précise que les demandeurs ont notamment bénéficié des services de la guide, Sonia Tremblay, employée de « Solazur »;

[17]         « Solazur » ajoute que les problèmes rencontrés par les voyageurs, du 13 au 17 août 2009, sont le résultat de bris mécaniques de l’autocar qu’elle avait loué de Autocar Préférence Ltée.  Elle rejette donc toute la responsabilité des problèmes sur cette dernière qu’elle appelle en garantie;

[18]         Quant à cette dernière, elle allègue, dans un premier temps, que l’autocar n’a jamais eu de bris mécanique, ni de panne et que le voyage s’est poursuivi jusqu’à Chicago et pour le retour dans le même autocar.  Elle admet que celui-ci fut remplacé le matin de la cinquième journée à London.  Elle ajoute que c’était «  pour rendre les passagers heureux  »;

[19]         Les parties ont donc convenu de faire une preuve commune pour les dix-neuf (19) dossiers ;

[20]         Dans le but d’éviter les répétitions, d’alléger l’audition et d’éviter de reprendre 19 fois les mêmes faits et les mêmes arguments dans chacun des 19 dossiers, les parties ont convenu de présenter une preuve commune pour les 19 dossiers;

[21]         Le dossier 540-32-022128-092, soit celui de Gaétane Baril, fut choisi pour l’audition de la preuve; 

[22]         Dans ce dossier, la demanderesse, Gaétane Baril, réclame une somme de      535 $, conjointement et solidairement des défenderesses, Agence de Voyages Duvernay Inc. et 9107-7107 Québec Inc.  « Duvernay » appelle « Solazur » en garantie alléguant que « Solazur » est seule responsable des problèmes rencontrés par les demandeurs;

[23]         À son tour 9107-7107 Québec Inc., faisant affaires sous le nom Tour Solazur, appelle Autocar Préférence Ltée en garantie dans l’ensemble des 19 dossiers;

[24]         Il fut convenu que le jugement rendu au niveau de la responsabilité dans ce dossier s’appliquerait aux 18 autres dossiers selon les parties défenderesses poursuivies et que le Tribunal déterminerait le montant des dommages attribués de façon distincte dans chacun des dossiers, selon la preuve entendue et le montant réclamé;

LES FAITS

[25]         Les faits acceptés par le Tribunal comme prouvés par prépondérance de preuve et ce, malgré des versions contradictoires présentées lors de l'audition se résument comme suit;

[26]         Il est admis que Claude Lavoie, le représentant de « Duvernay », a réservé un forfait voyage en autocar à Chicago pour cinq (5) jours, du 13 au 17 août 2009, pour l’ensemble des demandeurs et d’autres qui ne font pas partie des présents dossiers, le tout tel qu’il appert d’un document émanant de « Solazur », daté du 17 février 2009 et produit comme pièce P-2;

[27]         L’objet de ce document se lit comme suit :

« - Cotation pour un voyage à Chicago pour un groupe de 48 à 52 personnes

                  Départ :  le 13 août 2009

                  Durée :   5 jours/4 nuits

                  Transport aller-retour :   Laval-Chicago en autocar de luxe »

[28]         Un document intitulé « Chicago 5 jours » indiquant les coûts du voyage et le programme des 5 journées fut également transmis à Claude Lavoie de « Duvernay » (P-1-1) qui l’a remis à l’ensemble des demandeurs;

[29]         On peut y lire :

« INCLUANT : transport en autobus de luxe…

4 nuitées à l’hôtel….

4 petits déjeuners….  

Tour guidé de Chicago (4 heures)   

Ascension de la Tour Sears   

Toutes les visites au programme (sauf activités optionnelles)

Guide accompagnateur »

[30]         Il est admis que la défenderesse « Solazur » a payé 6 000 $ à la défenderesse en garantie, Autocar Préférence Ltée pour la location de l’autocar du 13 au 17 août 2009 et pour le chauffeur durant cette période, tel qu’il appert de la facture produite comme pièce DS-1;

[31]         Claude Lavoie de « Duvernay » déclare qu’il n’en était pas à sa première expérience d’affaires avec « Solazur ».  Il ajoute qu’il avait organisé quatre autres voyages similaires en autocar par le passé, ce qui est confirmé par monsieur Noureddine;

[32]         Monsieur Lavoie déclare que lui et ses groupes antérieurs ont toujours été très satisfaits du service de « Solazur »;

[33]         Il indique qu’il a réservé pour 48 passagers et qu’il était certain que son groupe aurait l’exclusivité de l’autobus comme pour les voyages précédents.  Il précise qu’il accompagnait lui-même le groupe et qu’il était assis au premier banc, à côté du chauffeur;

[34]         Il déclare avoir été surpris et déçu lorsque la guide, Sonia Tremblay, l’a informé que l’autobus s’arrêterait à Montréal pour embarquer un groupe de 12 autres voyageurs;

[35]         Monsieur Noureddine de « Solazur » déclare qu’il n’avait pas garanti l’exclusivité de l’autocar au groupe de « Duvernay » dans le cas présent;

[36]         Madame Gaétane Baril déclare, qu’après avoir roulé environ une heure et alors que l’autocar venait d’arriver en Ontario, le système de climatisation de l’autocar a commencé à donner des signes de défectuosités;

[37]         Elle était assise dans le deuxième banc, à proximité du chauffeur et précise qu’il faisait très froid à l’avant de l’autobus;

[38]         Elle indique que le cadran du thermostat indiquait 16° centigrades et ajoute que les voyageurs se plaignaient du froid.  Elle s’est alors adressée à la guide, Sonia Tremblay, pour lui demander d’augmenter le chauffage à l’avant du véhicule;

[39]         Elle déclare que le chauffeur, Marc Foley, a alors répondu qu’il y avait un problème avec la climatisation et que s’il augmentait la chaleur à l’avant du véhicule, cela ferait en sorte que les passagers à l’arrière de l’autocar «  allaient crever de chaleur »;

[40]         Sonia Tremblay a alors logé un appel chez « Solazur » suite à un arrêt et on lui a répondu que l’autocar devait continuer sa route et son itinéraire;

[41]         Le chauffeur a alors indiqué qu’il allait devoir « prolonger les arrêts de l’autocar pour permettre au système de climatisation de se replacer  » car il y avait un problème;

[42]         Ceci est confirmé par Claude Lavoie qui était présent dans l’autocar;

[43]         Madame Baril précise que la guide, Sonia Tremblay, a alors proposé aux passagers de faire une rotation des sièges de l’avant vers l’arrière, ce qui n’était pas prévu au départ puisque chaque passager devait conserver son siège initial;

[44]         La preuve, non contredite, est à l’effet que, lors de la deuxième journée, un des membres du groupe a tiré sur le fil du micro utilisé par la guide et que le micro n’était plus utilisable.  Ce n’est que le lendemain, lors de la troisième journée, après le tour de 4 heures de la Ville de Chicago, que la guide a pu trouver un autre micro pour le remplacer;

[45]         Madame Baril déclare, qu’à ce moment, la guide Tremblay a commencé à souffrir d’une extinction de voix;

[46]         Elle déclare qu’il ne s’agissait pas d’un autocar de luxe, tel que promis dans la publicité.  Elle ajoute qu’il y avait peu d’espace pour les genoux et que les vitres n’étaient pas teintées;

[47]         De plus, elle ajoute que les espaces de rangement, au-dessus des passagers, étaient inadéquats et que les sièges étaient inconfortables;

[48]         Elle précise que la chasse d’eau de la toilette de l’autocar ne fonctionnait pas, ni les écrans de télévision devant les passagers;

[49]         Elle estime la température à 16° centigrades à l’avant et à 26° centigrades à l’arrière;

[50]         En ce qui concerne le tour de Ville de 4 heures prévu au programme, elle confirme qu’il a eu lieu alors que le micro de l’autocar ne fonctionnait pas et déclare qu’on n’entendait pas bien les commentaires de la guide en raison des fortes vibrations du moteur de l’autocar;

[51]         Elle ajoute que «  la visite de la légendaire Water Tower : un des rares bâtiment à avoir survécu au Grand Incendie de 1811  » s’est résumée à une visite de l’extérieur de l’immeuble sans qu’il y ait de visite de l’intérieur;

[52]         Elle déclare que, lors de la troisième journée, la guide Tremblay a avisé les voyageurs que la croisière sur le Lac Michigan, prévue durant la soirée, était annulée et remplacée par deux autres activités au choix des demandeurs;

[53]         Lors de la quatrième journée, les demandeurs ont visité la Tour Sears et le Jardin Botanique.  Puis, ils ont quitté rapidement Chicago pour amorcer le voyage de retour vers Montréal;

[54]         C’est alors que la pluie a débuté et que l’eau a commencé à pénétrer dans l’autocar, à deux endroits, d’abord à l’avant puis à l’arrière;

[55]         Malgré les efforts de la guide Tremblay, l’eau s’est infiltrée dans l’autocar mouillant des sacs à dos se trouvant par terre;

[56]         Le chauffeur a dû arrêter dans une quincaillerie pour acheter du ruban adhésif et du plastique pour colmater les fuites causant ainsi un retard sur l’itinéraire de retour;

[57]         Dans l’après-midi, suite à une pause, le chauffeur déclare aux demandeurs qu’il y a, de nouveau, un problème avec la climatisation et que certains tuyaux gèlent.  Ceci fait en sorte qu’il a dû prolonger l’arrêt et d’en faire plusieurs autres pour permettre au système de se replacer;

[58]         Tout ceci a occasionné du retard de sorte que l’autocar est arrivé à l’hôtel à London, en Ontario, à environ 1 heure 30 minutes du matin, de la cinquième journée sans avoir visité la boutique hors taxes, alors qu’il devait arriver à 21 heures 30 minutes de la quatrième journée;

[59]         En raison de l’heure tardive, ce sont les demandeurs qui ont dû transporter leurs bagages à leur chambre respective;

[60]         Le lendemain matin, les demandeurs constatent qu’on a remplacé l’autocar par un nouvel autocar;

[61]         Madame Baril déclare qu’il n’a pas de climatisation et qu’il n’a pas de filtre solaire dans les vitres;

[62]         Ceci est contredit par monsieur Marcel Chartrand, président de Autocar Préférence Ltée, qui déclare qu’il s’agit du même type d’autocar que le premier et qu’il comprend lui aussi 60 ou 62 sièges et les mêmes caractéristiques;

[63]         Il ajoute que, dans les deux cas, il a fourni un autocar de luxe;

[64]         Il déclare que le premier autobus n’a jamais connu de bris mécanique ou de panne et qu’il a poursuivi son itinéraire jusqu’à Chicago. Il ajoute que Autocar Préférence l’a remplacé simplement afin de rendre les passagers heureux;

[65]         Quant à l’infiltration d’eau, il déclare que celle-ci est peut être entrée par les deux trappes d’urgence se trouvant sur le toit de l’autobus, que des passagers auraient pu ouvrir afin d’avoir de l’air;

  RÈGLES DE DROIT APPLICABLES

[66]          L'article 2803 C.c.Q énonce:

« Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée. »

[67]         Cet article impose, sur les épaules des demandeurs et des défenderesses, le fardeau de prouver les allégations contenues dans leurs demandes et dans les appels en garantie, par prépondérance de preuve;

[68]         L'article 2804 C.c.Q. ajoute:

« La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. »

[69]         Cet article fait en sorte de permettre au Tribunal d'apprécier la preuve présentée de part et d'autre par les parties, afin de conclure que l'existence d'un fait est plus probable que son inexistence;

[70]         Le contrat intervenu entre les demandeurs et les défenderesses est un contrat de consommation, au sens de l’article 1384 du Code civil du Québec et de la Loi sur la protection du consommateur [1] ;

[71]         C’est aussi un contrat de service au sens de l’article 2098 C.c.Q.;

«  2098 .  Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer. »

[72]         Notre collègue, l’honorable Patrick Théroux a qualifié comme suit le contrat par lequel une personne achète un forfait voyage dans Marie Claude St-Onge et al c. Voyages Escapades Inc. et als  :

« Le contrat de forfait de voyage, s’il peut prendre différentes qualifications selon la nature des obligations qu’il crée, est souvent qualifié de contrat de service assujetti aux dispositions du Code civil qu Québec (C.c.Q.)  Il est aussi, comme en l’instance, un contrat de consommation soumis à l’application de la Loi sur la protection du consommateur . [2]  »

[73]         L'article 2100 C.c.Q. impose au prestataire de services, l’obligation d’agir au mieux des intérêts de ses clients, avec prudence et diligence;

«  2100 .   L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure. »

[74]         De plus, l’article 2102 C.c.Q. précise notamment, l'obligation d'information de l'entrepreneur face au client en ce qui concerne la nature des services et leurs prix;

«  2102.  L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute information utile relativement à la nature de la tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi qu'aux biens et au temps nécessaires à cette fin. »

ANALYSE et DÉCISION

[75]         Considérant la preuve documentaire et testimoniale présentée de part et d'autre, par les parties;

[76]         La preuve entendue fait état de deux problématiques.  Dans un premier temps, les demandeurs allèguent qu’ils s’attendaient à voyager dans un autocar de luxe alors que l’autocar, dans lequel ils ont voyagé, ne répondait pas à ce critère en plus de connaître des problèmes avec le système d’air climatisé;

[77]         Dans un deuxième temps, ils allèguent qu’ils n’ont pas eu droit à l’ensemble des services et activités prévues au programme fourni par « Solazur »;

[78]         Ils demandent donc le remboursement intégral du montant payé par eux pour le voyage à Chicago;

[79]         Les deux lettres de mise en demeure transmises aux défenderesses, produites comme pièce P-4, précisent :

« Voici les nombreuses contrariétés qui nous ont causé préjudices tout au long du voyage.  Nous avons acheté un forfait comprenant le transport en autobus de luxe et voici ce que nous avons eu  :

- Fenêtres non munies de toiles solaires et non teintées;

- Air climatisé inadéquat, ce qui a provoqué une chaleur excessive à l’arrière de l’autobus et un froid non acceptable à l’avant, indisposant l’ensemble des passagers;

- Microphone défectueux toute la journée des 14 et 15 août 2009 ;  cela a perturbé grandement la qualité de l’information de notre tour de ville d’une durée de 4 heures;

- Infiltration d’eau de pluie à l’intérieur de l’autobus l’après-midi du 16 août .  L’eau a coulé sur une passagère ainsi que sur son siège.  L’écoulement sur le plancher a imbibé deux sacs à dos;

- Sièges et appuie-bras défectueux et sièges inconfortables causant des maux de dos;

- Écrans de télévision défectueux;

- Espaces de rangement au-dessus des sièges non munis de portes;

- Absence de porte-documents à l’arrière des sièges;

- Manque d’espace entre les bancs;

- Chasses d’eau hors service dans les toilettes;

- Nombre de passagers (59) trop élevé pour offrir un confort acceptable auquel    s’attendait le groupe de 47 passagers inscrits à Voyage Duvernay, alors que 12 personnes ont été ajoutées et on subi avec nous les inconvénients .   Aucun voyageur n’a été averti avant le départ que 2 groupes seraient jumelés au cours du voyage;

- Moteur de l’autobus trop bruyant pour entendre adéquatement l’information pertinente;

- Vibrations incommodantes pour les passagers des sièges arrière. »

(notre soulignement)

[80]         Le Tribunal constate que ces lettres de mise en demeure font essentiellement référence à la qualité de l’autocar fourni;

[81]         Les demandeurs, sont des personnes du troisième âge et, déclarent avoir été particulièrement indisposés par la qualité de l’autocar dans lequel ils ont voyagé;

AUTOCAR DE LUXE et QUALITÉ DU VÉHICULE

[82]         Les documents P-2 et P-1-1 précisent que « Solazur » doit fournir un autocar de luxe pour le voyage à Chicago;

[83]         Les demandeurs allèguent que l’autocar fourni n’était pas un autocar de luxe;

[84]         La preuve révèle que l’autocar fourni est un autocar de maque Van Hool de 60 places. Aucune photo du véhicule ne fut fournie par les demandeurs qui n’ont produit que deux photos de l’intérieur du deuxième autocar utilisé lors de la cinquième journée en remplacement du premier autocar;

[85]         Marcel Chartrand, président de Autocar Préférence Ltée, produit une photo de l’extérieur de l’autocar visé pour les quatre premiers jours du voyage, comme pièce    AP-1;

[86]         Malheureusement, aucune preuve formelle de l’âge du véhicule n’a été faite par l’une ou l’autre des parties;

[87]         Un fait est clair, il ne s’agit pas d’un autocar neuf. Mais qui dit autocar de luxe n’implique pas nécessaire un autocar neuf;

[88]         La photo produite comme pièce AP-1 montre un autocar dont les vitres sont teintées contredisant les allégations des demandeurs à l’effet que les vitres de l’autocar n’étaient pas teintées;

[89]         Quel que soit l’âge de l’autocar, le Tribunal est d’opinion que la preuve prépondérante et non contredite est à l’effet que l’autocar fourni par « Solazur » par l’intermédiaire d’Autocar Préférence Ltée pour le voyage du 13 au 17 août 2009, à Chicago, a connu des difficultés de climatisation et ce, bien que Marcel Charland, président d’Autocar Préférence Ltée, déclare qu’il n’a pas dû s’arrêter en raison d’une panne ou d’un bris mécanique. Les faits parlent par eux-mêmes;

[90]         Par ailleurs, monsieur Chartrand n’était pas présent lors du voyage et ne peut donc témoigner de la situation dans l’autocar à l’aller et au retour de Chicago;

[91]         Par ailleurs, le Tribunal constate que, Autocar Préférence Ltée n’a pas cru bon de faire entendre le témoignage de son chauffeur, Marc Foley, et « Solazur » n’a pas non plus cru bon de faire entendre la guide, Sonia Tremblay, comme témoin pour contredire les témoignages de Gaétanne Baril et de Claude Lavoie relativement aux circonstances du voyage, notamment les problèmes de climatisation et d’infiltration d’eau lors du retour;

[92]         D’ailleurs, même le représentant de « Solazur » monsieur Noureddine, confirme l’appel de la guide Tremblay mais précise que son entreprise ne dispose d’aucun autocar, qu’elle ne possède aucun garage pour réparer les autocars;

[93]         Il ajoute que « Solazur » s’en remet donc aux transporteurs de qui elle loue des autocars lorsqu’il y a un problème avec l’autocar, précisant que ceux-ci ont des ententes avec différents transporteurs ailleurs au Canada et aux États-Unis pour les dépanner, le cas échéant;

[94]         Il confirme que l’information qu’il a reçue est la même que celle qui fut transmise aux passagers de l’autocar, soit que, dans le cas présent, l’autocar ferait des arrêts plus fréquents pour contrôler le problème;

[95]         Dans les circonstances, la preuve entendue amène le Tribunal à conclure qu’il y avait un problème de climatisation avec l’autocar visé au cours du voyage d’environ 3000 kilomètres aller-retour entre Montréal et Chicago;

[96]         Il est indéniable que ce problème a causé de l’inconfort aux passagers;

[97]         Quant aux problèmes d’infiltrations d’eau, encore une fois, la preuve non contredite est à l’effet que ceux-ci ont forcé le chauffeur à arrêter dans une quincaillerie pour acheter  du vinyle et du « ruban adhésif » pour les colmater;

[98]         Ces problèmes ont occasionné des retards au retour qui ont notamment fait en sorte que l’autocar est arrivé à London à 1h30 du matin, la cinquième journée, alors qu’il devait arriver à 21h30 et ce, sans faire d’arrêt à la boutique hors taxes, tel qu’il est précisé sur le programme remis aux voyageurs.  Ceci a obligé les passagers à transporter eux-mêmes leurs bagages à leur chambre respective en raison du manque de personnel à cette heure tardive;

[99]         Il ressort de l’ensemble des dossiers que les demandeurs n’ont pas reçu le service d’autocar auquel ils étaient en droit de s’attendre;

[100]      Le Tribunal est d’opinion que si l’autocar avait été changé lors de la première journée, quand le problème de climatisation s’est déclaré, les passagers n’auraient pas connu les inconvénients qui s’en sont suivis;

MICRO DÉFECTUEUX

[101]      La preuve révèle que, lors de la deuxième journée, un des membres du groupe des demandeurs a brisé le fil du micro de la guide Tremblay causant la panne de celui-ci et que c’est seulement le lendemain, après la visite guidée de 4 heures de Chicago, que la guide a pu trouver un micro de rechange;

[102]      Ni « Duvernay », ni « Solazur », ni Autocar Préférence Ltée ne peuvent être blâmé pour le bris du micro par un des membres du groupe et les conséquences qui en ont résulté;

[103]      Le Tribunal est d’opinion que, dans les circonstances, la guide a agi avec diligence en trouvant un micro de remplacement le lendemain;

[104]      Le fait que la guide ait eu, par la suite, une extinction de voix, constitue un fait imprévisible et incontrôlable;

TOILETTE DE L’AUTOBUS

[105]      À ce sujet, le programme remis aux demandeurs précise à l’arrière :

« Étant donné que nous avons accès fréquemment aux salles de bains publiques sur la route et à Chicago, nous vous prions d’utiliser au strict minimum les toilettes de l’autobus »

[106]      Le Tribunal comprend qu’une telle restriction puisse être indiquée, mais la preuve, non contredite, est à l’effet que la chasse d’eau de l’autocar, dans laquelle se trouvaient les demandeurs, ne fonctionnait pas et que les passagers n’ont pas utilisé les toilettes de l’autocar et ont dû attendre les arrêts pour aller aux toilettes dans les lieux publics;

[107]      Encore une fois, ni Autocar Préférence Ltée, ni « Solazur » n’ont fait entendre le chauffeur ou la guide pour contredire cette preuve;

[108]      Il s’agit donc là d’un autre problème d’entretien et de qualité de service relié à l’autocar;

NOMBRE DE PASSAGERS et PROBLÈMES D’ESPACE DANS L’AUTOCAR

[109]      Les demandeurs et « Duvernay » se plaignent qu’un groupe additionnel de 12 personnes s’est joint à leur groupe;

[110]      Monsieur Lavoie de l’agence « Duvernay » déclare que lors des quatre voyages antérieurs faits par l’intermédiaire de « Solazur », les groupes qu’ils formaient avaient l’exclusivité de l’autocar qui effectuait leur transport;

[111]      Or, aucune preuve n’a été faite du nombre de passagers lors de ces voyages, ni du type d’autocar utilisé lors de ceux-ci;

[112]      De plus, le Tribunal constate que la cotation P-2 ne stipule aucunement que le groupe de « Duvernay » avait l’exclusivité de l’autocar. On peut y lire «  pour un groupe de 48 à 52 passagers »;

[113]      Le Tribunal ne retient donc pas cet argument des demandeurs et de « Duvernay »;

[114]      Quant à la question de l’espace intérieur restreint du véhicule, le Tribunal constate qu’aucune photo ne fut produite à l’appui de cette prétention ou pour démontrer l’état de l’intérieur du véhicule;

SERVICES HÔTELIERS

[115]      Dans le document produit comme pièce P-6A par madame Baril, intitulé « Voyage non consommé dans son entité tel que réservé », le Tribunal note les principaux problèmes dénoncés par les demandeurs;

[116]      Sous la rubrique Services hôteliers, ces derniers se plaignent que les déjeuners servis au Chicago Marriott Midway étaient incomplets, tout comme celui servi à l’Hôtel Radisson à London;

[117]      De plus, ils se plaignent aussi du service et du manque de propreté à cet hôtel mentionnant : « serviettes grises-troués »;

[118]      La preuve révèle que les déjeuners servis à ces occasions étaient des déjeuners de type continental comprenant viennoiseries (brioches, croissants) et café et non des déjeuners américains comprenant œufs, bacon ou jambon, patates, toasts et café;

[119]      Le Tribunal constate que la cotation P-2 remise à « Duvernay » et la brochure du programme remise à chacun des passagers mentionnent seulement 4 petits déjeuners, sans préciser s’il s’agit de déjeuners de type continental ou américain; 

[120]      Or, la preuve révèle qu’au cours du voyage les demandeurs ont eu droit aux deux types de déjeuners dépendamment de l’hôtel où ils se trouvaient;

[121]      Dans les circonstances, le Tribunal ne retient pas cette prétention des demandeurs en raison de l’imprécision des documents précités;

[122]      En ce qui concerne l’hébergement, le Tribunal constate que les demandeurs ne se plaignent aucunement de l’hébergement du premier hôtel, soit au Hampton Inn. Suites de Windsor, ni des deux nuitées au Marriott Chicago Midway;

[123]      Ils se plaignent de la propreté de l’hôtel Radisson de London mais, encore une fois, ne produisent aucune photo à l’appui de leur prétention;

[124]      De plus, ceci n’était aucunement mentionné dans leurs mises en demeure d’août et septembre 2009.  Dans les circonstances, le Tribunal est d’opinion que les demandeurs ne se sont pas déchargés de leur fardeau de preuve à ce sujet;

VISITE WATER TOWER

[125]      Au deuxième jour, la brochure mentionne : «  Visite de la légendaire Water Tower : un des rares bâtiment à avoir survécu au grand incendie de 1871…  »

[126]      Or, la preuve révèle que cette « visite » s’est résumée à une simple visite de l’extérieur du bâtiment, sans visite de l’intérieur alors que les demandeurs s’attendaient à visiter aussi l’intérieur;

CROISIÈRE SUR LE LAC MICHIGAN

[127]      Au troisième jour, la brochure mentionne : « Croisière et feux d’artifice sur le Lac Michigan ($) WOW!  Quel spectacle que de voir le panorama de Chicago tout en lumière »;

[128]      Madame Baril précise que cette croisière sur le Lac Michigan devait être le clou ou le couronnement du voyage à Chicago.  Elle ajoute que la guide Tremblay a indiqué aux voyageurs, à la fin de la troisième journée, que celle-ci était annulée « en raison d’un spectacle aérien »;

[129]      Elle précise que la guide Tremblay a alors informé les passagers que, suite au souper au Navy Pier, il n’y aurait pas de croisière sur le Lac Michigan;

[130]      Elle ajoute que la guide leur a indiqué qu’ils avaient plutôt le choix entre une soirée libre à visiter le Navy Pier jusqu’à 23 heures alors que l’autocar viendrait les chercher pour les ramener à l’hôtel ou un itinéraire en autobus suivi d’un tour de bateau sur les canaux de Chicago au coût de 10 $;

[131]      Elle ajoute que l’ensemble des voyageurs était très déçu de la situation;

[132]      Encore une fois, le Tribunal constate que « Solazur » n’a pas fait entendre la guide Tremblay pour expliquer cette situation;

[133]      Le Tribunal se questionne sur la raison donnée pour annuler la croisière, soit un spectacle aérien, puisque ces spectacles ont habituellement lieu le jour et non durant la soirée.  S’il s’agit vraiment d’un spectacle aérien, un tel spectacle est habituellement annoncé longtemps d’avance et le Tribunal est d’opinion que « Solazur », à titre de grossiste, aurait dû connaître cette information à l’avance et avertir ses clients en conséquence;

[134]      Par ailleurs, le Tribunal note que « Solazur » a remplacé l’activité par une autre activité qui fut moins appréciée par les demandeurs qui anticipaient, avec plaisir, une croisière sur le Lac Michigan;

[135]      Suite à l’examen de l’ensemble de la preuve, le Tribunal constate, qu’à l’exception de la visite du Water Tower et de la croisière et en excluant la visite au magasin hors taxes qui fut annulée en raison des problèmes de l’autocar, les demandeurs ont bénéficié du reste du programme annoncé par « Solazur »;

[136]      Cette dernière a tenté d’offrir compensation aux demandeurs, telles qu’en font foi les lettres datées du 24 septembre et du 22 octobre 2009, produites comme pièces P-5 et P-5A.   Monsieur Noureddine déclare que certains des 48 passagers ont accepté les offres de « Solazur » mais les présents demandeurs les ont refusés et ont intenté les présentes actions;

RESPONSABILITÉ

[137]      Me Nicole l’Heureux, dans son traité de Droit de la consommation, précise la responsabilité des agents de voyages et des grossistes de la façon suivante :

« Généralement les prestations que l’agent de voyage vend à son client sont préparées par des grossistes. Ceux-ci jouent le rôle d’entrepreneur de voyages et sont tenus à une obligation de résultats.

Les grossistes ne peuvent se libérer de leurs responsabilités en alléguant qu’ils s’en sont remis à des tiers pour l’exécution de la prestation mal exécutée ou que la mauvaise exécution résulte d’actes de tiers. Ils peuvent cependant faire la preuve de forces majeures ou d’un cas fortuit.

Par ailleurs, pour faire connaître leurs produits, ils font imprimer des dépliants, souvent illustrés, décrivant….des prestations.  En vertu des articles 42 et 43 L.P.C. les grossistes sont responsables de la conformité des produits fournis aux descriptions faites verbalement, par écrit, par illustrations ou autrement dans leurs énoncés, publications . » [3]

(notre soulignement)

[138]      Dans son ouvrage, La Responsabilité civile , Jean-Louis Baudoin déclare que les obligations d’un agent de voyage et d’un grossiste vis-à-vis de leur client sont :

«  … l’obligation d’information;

     … l’obligation de conformité;

     … l’obligation relative au choix du prestataire;

     … l’obligation de sécurité;

     … l’obligation d’assistance. » [4]

[139]      Citant Baudoin, l’honorable Alain Désy conclut lui aussi que l’obligation d’un grossiste, comme la défenderesse « Solazur », est une obligation de résultat dans Faucher et Faucher c. Voyages Terre et monde Inc . : :

« […] dans le cas d’une obligation de résultat, la simple constatation d’absence du résultat ou du préjudice subi suffit à faire présumer la responsabilité du débiteur, une fois le fait même de l’inexécution ou la survenance du dommage démontré par le créancier. (…).  Sur le plan de la preuve, l’absence de résultat fait donc présumer la responsabilité du débiteur et place sur ses épaules, le fardeau de démontrer que l’inexécution provient d’une cause qui ne lui est pas imputable […]   À défaut de décharger ce fardeau, le débiteur est tenu responsable de l’inexécution. » [5]

(notre soulignement)

[140]      Dans le présent dossier, la responsabilité des problèmes rencontrés par les demandeurs lors du voyage à Chicago est une responsabilité solidaire;

[141]      En effet, tel que l’ont indiqué les auteurs et la jurisprudence, l’agence de voyages et le grossiste ont une obligation de résultat vis-à-vis de leurs clients.  Il découle de ce principe et de la preuve que « Duvernay » et « Solazur » sont solidairement responsables des dommages envers les demandeurs car ils ont manqué à leur obligation de résultat;

[142]      L’obligation qu’ils ont envers eux est une obligation de résultat et ils ne peuvent se décharger de leur responsabilité qu’en démontrant que l’inexécution totale ou partielle provient d’une cause qui ne leur est pas imputable;

[143]      Dans le présent dossier, « Duvernay » a donc appelé « Solazur » en garantie et demande de tenir cette dernière responsable des dommages réclamés en précisant que son rôle s’est résumé à faire une réservation pour 48 places dans l’autocar auprès de « Solazur »;

[144]      Elle demande que « Solazur », qui a retenu les services de Autocar Préférence Ltée, assume toute la responsabilité envers les demandeurs puisque c’est le mauvais fonctionnement de cet autocar qui est à la base des problèmes et des dommages encourus par les demandeurs.  « Duvernay » demande que « Solazur » soit condamnée à rembourser à « Duvernay » toutes sommes qu’elle pourrait être condamnée à payer aux demandeurs dans les diverses actions entendues par le Tribunal;

[145]      Quant à « Solazur » elle appelle Autocar Préférence Ltée en garantie alléguant, elle aussi, le mauvais fonctionnement du système d’air climatisé de l’autocar, comme étant la base des problèmes et des dommages.

[146]      « Solazur » demande que Autocar Préférence Ltée soit condamnée à lui rembourser toutes sommes que « Solazur » pourrait être condamnée à payer aux demandeurs dans les diverses actions entendues par le Tribunal;

ACTION EN GARANTIE DE DUVERNAY

[147]      Dans son action en garantie contre « Solazur », « Duvernay » demande au Tribunal que « Solazur » soit tenue responsable d’assumer les dommages qu’elle pourrait être condamnée à payer aux demandeurs;

[148]      Suite à l’examen de l’ensemble de la preuve, le Tribunal est d’opinion que la responsabilité des problèmes rencontrés lors du voyage à Chicago incombe à « Solazur ».  Le rôle de « Duvernay » a consisté à réserver 48 places dans un autocar pour un forfait vendu par « Solazur » et selon un programme élaboré par « Solazur »;

[149]      Son action en garantie est donc accueillie contre « Solazur »;


ACTION EN GARANTIE DE SOLAZUR

[150]      À son tour, en appelant Autocar Préférence Ltée en garantie, « Solazur » demande au Tribunal que Autocar Préférence Ltée soit tenue responsable d’assumer tous les dommages qu’elle pourrait être condamnée à payer aux demandeurs;

[151]      Le transporteur qui met un autocar à la disposition d’un grossiste de voyages signe un contrat d’entreprise et de services avec ce dernier;

[152]      En vertu de l’article 2100 C.c.Q. il a l’obligation d’agir aux mieux des intérêts de ses clients avec prudence et diligence;

[153]      En conséquence, il doit mettre à leur disposition un autocar dont il s’est assuré de l’entretien et du bon fonctionnement pendant la période du voyage de 3000 kilomètres, qui, dans le cas présent, a duré plus de 30 heures;

[154]      Dans le cas présent, bien que le problème se soit révélé après environ une heure de route, Autocar Préférence Ltée n’a pas cru bon de le corriger;

[155]      Le Tribunal est d’opinion que, si cela avait été fait à ce moment, ou si Autocar Préférence Ltée avait fait appel à un de ses partenaires ontariens ou américains pour l’aider, le voyage n’aurait pas donné lieu aux problèmes d’écarts de températures, d’arrêts fréquents et de retards, tel que décrits par les demandeurs;

[156]      De toute évidence, le problème de climatisation n’avait pas été identifié, ni corrigé adéquatement, une fois qu’il fut identifié, engageant ainsi la responsabilité d’Autocar Préférence Ltée;

[157]      Quant à l’autocar de remplacement, la preuve, non contredite, révèle qu’il s’agit d’un autre autocar Van Hool, semblable au premier, mais aucune photo de celui-ci n’a été produite, ni par Autocar Préférence Ltée, ni par les demandeurs à l’exception de quelques photos de l’intérieur montrant des châles ou des couvertures couvrant les fenêtres pour repousser les rayons de soleil;

[158]      Autocar Préférence Ltée est le sous-traitant engagé par « Solazur » pour effectuer le transport des passagers durant le voyage;

[159]      À titre de commettant, « Solazur » est solidairement responsable des dommages causés aux demandeurs par les agissements ou la négligence de son sous-traitant Autocar Préférence Ltée, tel qu’énoncé à l’article 1463 C.c.Q.;

[160]      Telle que la preuve l’a  révélée, « Solazur » n’a aucun contrôle sur le bon fonctionnement de l’autocar et/ou sur le mauvais entretien de celui-ci;

[161]      Dans le présent dossier, la guide a demandé de procéder au changement d’autocar mais sans succès.  Autocar Préférence Ltée décide de continuer le voyage avec le résultat qu’on connaît;

[162]      Dans les circonstances, l’appel en garantie de « Solazur » contre Autocar Préférence Ltée est en partie bien fondé en faits et en droit, « Solazur » étant responsable en partie des dommages réclamés;

QUANTUM

[163]      Considérant l’ensemble de la preuve présentée;

[164]      Considérant que pendant les 5 jours, les demandeurs ont profité de la très grande majorité des activités prévues au programme à l’exception de la visite complète du Water Tower et de la visite de la boutique hors taxes;

[165]      Considérant qu’ils ont aussi profité de l’hébergement dans 3 hôtels différents pendant 4 jours ainsi que des petits déjeuners;

[166]      Considérant que l’activité prévoyant une croisière sur le Lac Michigan a été annulée et remplacée par une autre activité, moins intéressante pour les demandeurs;

[167]      Considérant que, tout comme la croisière sur le Lac Michigan, il s’agissait d’une activité prévoyant un déboursé supplémentaire pour les demandeurs, tel qu’en fait foi le signe de « $ » apparaissant sur le programme P-1-1;

[168]      Considérant que, tel qu’il appert de la pièce P-6, le voyage en autocar aller-retour de Montréal à Chicago représentait un voyage de plus de 3 000 kilomètres d’une durée de plus de 30 heures;

[169]      Considérant le mauvais fonctionnement du système d’air climatisé de l’autocar et la moyenne d’âge des demandeurs, soit de plus de  70 ans;

[170]      Le Tribunal arbitre le montant des dommages accordé à chacun des voyageurs individuellement à 175 $, plus le montant des déboursés pour frais postaux pour les demandeurs qui les ont réclamés dans leurs dossiers respectifs;

[171]      En ce qui concerne les dommages pour troubles et inconvénients réclamés par certains voyageurs, en sus du remboursement de leurs frais de voyage, le Tribunal n’accueille pas les réclamations des demandeurs estimant le remboursement de la somme de 175 $ suffisant;


RÉPARTITION DE LA RESPONSABILITÉ

[172]      Compte tenu que la preuve révèle une responsabilité de « Solazur » en ce qui concerne la non exécution complète du programme prévu pour le voyage, le Tribunal répartit la responsabilité entre « Tour Solazur » et Autocar Préférence Ltée sur la somme des dommages à 20 % pour « Tour Solazur », soit 35 $ et à 80 % pour Autocar Préférence Ltée, soit 140 $;

[173]      Tel que convenu entre les parties, le jugement rendu dans le présent dossier s’appliquera dans chacun des dossiers ci-dessus énumérés en fonction des dommages réclamés par chacun des demandeurs dans les dossiers respectifs;

POUR CES MOTIFS dans le présent dossier, le Tribunal :

ACCUEILLE partiellement l’action des demandeurs, Bertrand Hébert et Rachel Hébert;

CONDAMNE solidairement la défenderesse, Agence de voyages Duvernay et 9107-7107 Québec Inc. faisant affaires sous le nom Tour Solazur à payer à la demanderesse Rachel Hébert, la somme de 175 $ et au demandeur, Bertrand Hébert, la somme de 175 $ avec intérêts au taux légal de 5 % l’an ainsi que l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de l’assignation à chacun des demandeurs; 

CONDAMNE solidairement les défenderesses, Agence de Voyages Duvernay Inc. et 9107-7101 Québec Inc. (Tour Solazur) à payer aux demandeurs les frais judiciaires de 69 $;

ACCUEILLE l’appel en garantie de Agence de Voyages Duvernay Inc. contre 9107-7107 Québec Inc. (Tour Solazur);

CONDAMNE 9107-7107 Québec Inc. (Tour Solazur) à payer la totalité de la somme précitée à la demanderesse, Rachel Hébert, la somme de 175 $ et au demandeur, Bertrand Hébert, la somme de 175 $ et les frais judiciaires de 99 $ aux demandeurs pour et à l’acquit de la défenderesse, Agence de Voyages Duvernay Inc., y compris les frais précités;

ACCUEILLE partiellement l’appel en garantie de 9107-7107 Québec Inc. (Tour Solazur) contre Autocar Préférence Ltée Ltée;

CONDAMNE Autocar Préférence Ltée, à payer à la demanderesse, Rachel Hébert, pour et à l’acquis de 9107-7107 Québec Inc. (Tour Solazur), la somme de 140 $ et au demandeur, Bertrand Hébert, la somme de 140 $, plus les intérêts au taux légal de 5 % ainsi que l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. depuis l’assignation, sur le montant de la condamnation de 140 $ dans chacun des cas, y compris la totalité des frais précités de 99 $;

CONDAMNE 9107-7107 Québec Inc. (Tour Solazur) à payer à chacun des demandeurs la somme de 35 $ avec intérêt légal de 5 % ainsi que l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de l’assignation.

 

 

__________________________________

 JEAN PIERRE ARCHAMBAULT, J.C.Q.

 

 

 

 

Date d’audience

Le 9 septembre 2011

[174]       

 



[1] Loi sur la protection du consommateur ,  L.R.Q. c. P-40.1

[2] Marie Claude St-Onge et al c. Voyages Escapades Inc. et als   P.C. Montréal, no. 540-32-009312-034, 14 février 2005, j. Théroux. 

[3] Nicole l’HEUREUX, Droit de la consommation, 5 e éd. Cowansville, Éd. Yvon Blais, p. 227

[4] Jean-Louis BAUDOIN, La Responsabilité civile

[5] Faucher et Faucher c. Voyages Terre et Monde Inc . 2006 QCCQ 6786 (CAN.LII) par. 47