Dufour, Motet Avocats c. Finance Hwy inc.

2011 QCCQ 14354

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LAVAL

« Chambre civile »

N° :

540-22-015746-117

 

DATE :

15 novembre 2011

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DENIS LE RESTE, J.C.Q.

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DUFOUR, MOTET AVOCATS,

Demanderesse

c.

FINANCE HWY INC.,

Défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            La société demanderesse réclame 11 287,50 $ de la défenderesse à titre d'honoraires professionnels et rétribution d'une commission suite à un financement obtenu d'un tiers en faveur de la défenderesse.

 

QUESTIONS EN LITIGE:

[2]            Existe-t-il une entente pour une rétribution de deux pour cent (2 %) de commission sur tout investisseur référé par la demanderesse à la défenderesse?

[3]            La demanderesse a-t-elle trouvé un investisseur intéressé à financer la défenderesse?

[4]            La demanderesse a-t-elle droit à une commission?  Et si oui, laquelle?

 

LES FAITS:

[5]            Les faits les plus pertinents retenus par le Tribunal sont les suivants.

[6]            Le Tribunal a recueilli les témoignages contradictoires des représentants de chacune des parties impliquées.

[7]            Me Jean Marius Mottet, qui représente la demanderesse, explique qu'il représente professionnellement Me Jacques Marcotte, le président de la défenderesse, depuis quelques dizaines d'années.

[8]            Le 11 mars 2009, lors d'un dîner d'affaires, le représentant de la défenderesse demande alors au représentant de la demanderesse de rechercher du capital d'investissement privé pour financer l'expansion de son entreprise de financement automobile.

[9]            En fait, la défenderesse offre du financement à risque de deuxième ou troisième chance au crédit et compte tenu du succès de ses affaires, a besoin de nouveaux capitaux.

[10]         Me Mottet précise qu'il y a eu entente entre les parties à l'effet qu'il recevrait un pourcentage à titre de commission s'il parvenait à trouver un investisseur.

[11]         Il a alors effectué certaines démarches.  Notamment, il a pris contact avec son comptable, qui lui, a référé monsieur Belle au représentant de la défenderesse.

[12]         À l'été 2008, des discussions ont lieu entre monsieur Belle et Me Marcotte, le représentant de la défenderesse.

[13]         D'ailleurs, le 29 août 2008, Me Mottet reçoit du comptable le projet de financement de monsieur Belle au bénéfice de la défenderesse.

[14]         La demanderesse a complété ses services professionnels, tels que la mise en place du plan de financement, la modification des livres de minutes de l'entreprise et les documents de prêt et d'investissement menant au déboursé de capitaux neufs en faveur de la défenderesse par monsieur Belle.

[15]         Dès le début de 2009, Me Mottet prétend qu'il a discuté avec Me Marcotte et ce dernier aurait requis d'attendre qu'une année se soit écoulée avant qu'il puisse lui verser sa commission à titre d'honoraires professionnels.

[16]         Me Mottet prétend qu'il a appris lors de cette rencontre que la contribution totale était de 500 000 $.

[17]         De plus, messieurs Belle et Marcotte ont acquis avec un tiers un immeuble où la défenderesse exploite maintenant sa nouvelle place d'affaires.

[18]         Lors des négociations établissant le pourcentage auquel aurait droit la demanderesse, Me Mottet mentionne que l'entente est à l'effet qu'une rétribution de deux pour cent (2 %) lui serait due par la défenderesse.

[19]         Compte tenu que les commissions habituellement versées dans ce domaine varient d'un à trois pour cent (1 % à 3 %), la somme de deux pour cent (2 %) lui convenait très bien.

[20]         La demanderesse produit d'ailleurs plusieurs courriels intervenus entre les parties et le Tribunal croit opportun de résumer ici quelques-uns de ces échanges intervenus entre les parties.

[21]         Le 27 mai 2010, Me Mottet écrivait à Me Marcotte en ces termes:

« (…) J'aimerais aussi parler et régler la commission due suite à l'investissement de Pierre… (…). »

 

[22]         Le 28 mai 2010, Me Marcotte répondait en ces termes:

« (…) Re: commission

je parle avec Pierre la semaine prochaine et on pourra se céduler un lunch et s'en parler à cette occasion. » (sic)

 

[23]         Le 1 er juin 2010, Me Mottet écrit à Me Marcotte en ces termes:

« (…) Si notre lunch tient toujours demain, je préférerais te rencontrer seul car, à mon avis, Pierre n'a pas à être là, du moins par pour le volet commission… »

 

[24]         La preuve révèle que le 2 juin 2010, les parties se sont rencontrées en compagnie de monsieur Belle, le nouvel investisseur.

[25]         Me Mottet, dans l'après-midi suivant ce dîner, écrit ce qui suit:

« Salut Jacques,

Encore merci pour le lunch!

Juste un rappel de me confirmer par écrit le montant global de l'investissement de Pierre dans HWY, svp.

Je te ferai alors suivre 2 factures, chacune pour 50 % de la commission convenue (2 %), payables les 31 juillet et 1 er août 2010. »

 

[26]         Le 16 juin 2010, Me Mottet faisait un rappel à Me Marcotte puisqu'il n'avait pas encore eu de suivi:

[27]         Me Marcotte y répond le 18 juin 2010 en ces termes:

« J'étais en procès à Québec.

De retour auj. - je t'envoie le document la sem. prochaine. »

 

[28]         Le 29 juin 2010, Me Marcotte expédie à Me Mottet un projet de facturation d'honoraires professionnels où il écrit lui-même:

« (…)

- Recommandation d'un partenaire financier, monsieur (…) Belle, à titre de futur administrateur et actionnaire de FINANCE HWY inc., pour un investissement minimum de trois cent mille dollars (300,000$)

- Commissions: Deux pourcent (2%) (…).

 

[29]         Après réception de ce projet de facturation, Me Mottet réécrit le 29 juin 2010 à Me Marcotte comme suit:

« (…) Pas de problème avec ton projet de texte.

Tel que demandé, voudrais-tu me confirmer le montant total de l'investissement de Pierre? »

 

[30]         Le 30 juin, Me Marcotte écrivait:

« Le montant initial exigé était, comme tu le sais, de $300,000.

Pour tout montant additionnel futur, je t'en remets à Pierre considérant que c'est son intérêt personnel… »

 

[31]         Le même jour, Me Mottet réplique en disant ceci:

« Ceci n'est pas correct.

Je t'en «reparle» cet p.m. »

 

[32]         Le 12 juillet 2010, Me Marcotte écrivait ceci:

« Afin d'acheminer le cheque pour le 31 juillet, svp émettre une facture au nom du cabinet…» (sic)

 

[33]         Le même jour, Me Mottet écrivait en ces termes:

« (…) À notre dernier lunch, j'ai accepté le taux de commission à 2%, même s'il est dans la partie basse de la fourchette normalement applicable pour ce type de services (de 2 à 5%).

Toutefois, c'est bien entendu l'ensemble de l'investissement de Pierre qui est visé et non seulement une partie.

Je suis prêt à ne pas réclamer de commission sur l'investissement dans l'immeuble bien que je puisses le faire, mais j'aurais apprécié un peu plus de transparence de ta part.

Je sais, pour l'avoir entendu de Pierre, que son investissement dans ta société est de plus de 500 000,00$, sans parler des investissements à venir.

Je considère donc avoir droit à des honoraires de référencement pour un montant minimum de 500 000,00$ et j'ai fait préparer une facture sur cette base, que tu trouveras ci-jointe.

À ta demande, je l'ai fait payable en 2 versements dont le premier est exigible immédiatement et le second, le 1 er août prochain.

Comme tu le sais, ce type de services est normalement payable lors de l'encaissement de l'investissement et généralement, à même le montant payé…

Encore une fois, à ta demande, j'ai accepté d'attendre plus de 18 mois avant de facturer ces services…(…) » (sic)

 

[34]         La facture totalisant 10 000 $ plus taxes, donc 11 287,50 $, est jointe à ce courriel du 12 juillet 2010.

[35]         Pour sa part, le représentant de la défenderesse, Me Marcotte, réécrivait au représentant de la demanderesse, le 12 juillet 2010 en ces termes:

« Tu te souviendras qu'en aucun moment lors des pourparlers avec (…) Belisle et/ou (…) Belle, il ne fût question d'honoraires pour cette possibilité d'investissement…C'est mon initiative au cours d'une conversation téléphonique qui t'a souligné une 'appréciation' en considération de la venue de Pierre au sein de Finance HWY..

Or, la valeur du 2% consenti faisait suite à une offre de services signée avec un tiers le ou vers le mois de mars dernier.

L'essentiel de l'investissement original prévu était de $300,000 et ce n'est que sur cette base que j'entends te remettre une rémunération volontaire… Tu comprendras certes que si M. Belle désire investir toute(s) somme (s) additionnelle(s)…ces montants deviennent strictement du domaine privé et selon une entente avec les actionnaires.

Je m'étonne de ta réaction alors que le montant à verser ne fait partie d'aucun contrat ni subordonné à aucune entente quelconque…sauf mon désir personnel de récompenser cette référence.

Or, je maintiens la remise de la somme globale de $6000 et je te réfère à M. Belle pour toute revendication quelconque supérieure à ce montant, s'il y a lieu.. » (sic)

 

[36]         Les discussions, rencontres, représentations et mandats professionnels furent malheureusement interrompus par la suite entre les parties.

[37]         Le représentant de la demanderesse admet qu'il a effectué plusieurs démarches, conventions et modifications aux livres des compagnies et aussi d'autres services professionnels au bénéfice de la défenderesse et que cette dernière fut toujours payée pour les travaux tels qu'effectués.

[38]         Cependant, la présente réclamation est tout autre, en ce qu'il représente purement et simplement la réclamation équivalant à une entente de deux pour cent (2%) de commission visant le capital des investisseurs obtenu par les démarches de la demanderesse.

[39]         Le représentant de la défenderesse estime qu'aucune entente n'est intervenue entre les parties relativement au versement d'une commission de deux pour cent (2%) pour toute référence de capital d'investissement privé fourni par la demanderesse.

[40]         En fait, il mentionne que la défenderesse n'a jamais requis les services professionnels de la demanderesse relativement à un service de référence de partenariat financier.

[41]         Il admet qu'au cours d'un dîner d'affaires, seuls des pourparlers ont eu lieu sans qu'aucune entente ou contrat tant verbal qu'écrit ne soit conclu.

[42]         Le représentant de la défenderesse dit ne jamais avoir admis devoir les honoraires de 10 000 $ plus taxes réclamés par la demanderesse.

[43]         Il admet cependant et simplement que pour bonnes et valables considérations, il s'était engagé suivant une promesse de donation à effectuer un versement de 6 000 $ plus taxes, compte tenu de la référence indirecte dont il avait pu bénéficier dans cette affaire.

[44]         Dans le cadre de la dénonciation des moyens de défense oraux, la défenderesse indique :

« 6.        Toutefois, considérant que cette promesse de donation manuelle n'a pas été suivie d'un dessaisissement actuel, la promesse n'a aucune valeur. (…) ».

 

[45]         Elle ajoute:

« 7.        À tout événement, considérant que les représentants des parties sont des connaissances de longue date, la défenderesse offre et consigne au dossier de la Cour une somme de 6 835,50 $ en capital, intérêts et frais. »

 

[46]         Dans les faits, cette somme n'a jamais été remise selon les règles des « Offres et consignation » contenues au Code de procédure civile au Tribunal.

[47]         Tout au plus, cette somme serait actuellement dans le compte en fidéicommis des procureurs de la défenderesse.

[48]         En fait, la thèse véhiculée en défense est à l'effet que la défenderesse ne s'est jamais véritablement engagée à verser deux pour cent (2%) de commission à la demanderesse, mais que compte tenu de leur relation passée, ils ont, après-coup, accepté de verser deux pour cent (2%) sur la somme de 300 000 $, donc 6 000$, représentant une certaine gratification.

[49]         Le tiers investisseur, monsieur Belle, a témoigné à l'effet qu'il possède quelques compagnies et que notamment, l'une d'elles a investi 450 000 $ dans l'entreprise défenderesse, en échange de capital-actions.

[50]         L'acquisition de l'immeuble abritant les locaux de la défenderesse est une tout autre histoire, selon lui, puisque trois coactionnaires ont formé une société où ils ont acquis pour 200 000 $ un immeuble.

[51]         Il admet que c'est le comptable du représentant de la demanderesse qui l'a référé à la défenderesse.

[52]         Le Tribunal se retrouve donc devant des versions contradictoires.

 

LE DROIT APPLICABLE:

Décision sur l'objection:

[53]         Le Tribunal a pris sous réserve une objection visant à interdire la preuve testimoniale destinée à établir l'entente contractuelle intervenue entre les parties.

[54]         Cette objection est basée sur l'article 2862 du Code civil du Québec qui stipule:

2862.  La preuve d'un acte juridique ne peut, entre les parties, se faire par témoignage lorsque la valeur du litige excède 1 500 $.


Néanmoins, en l'absence d'une preuve écrite et quelle que soit la valeur du litige, on peut prouver par témoignage tout acte juridique dès lors qu'il y a commencement de preuve; on peut aussi prouver par témoignage, contre une personne, tout acte juridique passé par elle dans le cours des activités d'une entreprise.

 

[55]         Le Tribunal est conscient qu'un acte juridique ne peut se faire par témoignage lorsque la valeur du litige excède 1 500 $.

[56]         Cependant, nous sommes nettement dans le cas où il y a un commencement de preuve permettant d'accueillir la preuve testimoniale présentée dans cette affaire.

[57]         Les nombreux échanges de correspondance et de courriels transmis par l'une et l'autre des parties confirment qu'il s'agit bien d'un cas où le commencement de preuve permet au Tribunal d'accueillir la preuve testimoniale même si la preuve de l'acte juridique excède la valeur de 1 500 $ tel que prescrit par l'article 2862 précité.

[58]         Le Tribunal rejette donc l'objection et permet la preuve testimoniale.

[59]         L'article 1458 du Code civil du Québec stipule:

1458.  Toute personne a le devoir d'honorer les engagements qu'elle a contractés.


Elle est, lorsqu'elle manque à ce devoir, responsable du préjudice, corporel, moral ou matériel, qu'elle cause à son cocontractant et tenue de réparer ce préjudice; ni elle ni le cocontractant ne peuvent alors se soustraire à l'application des règles du régime contractuel de responsabilité pour opter en faveur de règles qui leur seraient plus profitables.

 

[60]         Le Tribunal considère important de décrire les règles et critères applicables dans le cadre du fardeau de la preuve.

[61]         En effet, le rôle principal des parties dans la charge de la preuve est établi aux articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec qui stipulent:

 

2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

 

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.

 

2804.  La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.

 

[62]         Selon ces articles, les justiciables ont le fardeau de prouver l'existence, la modification ou l'extinction d'un droit.  Les règles du fardeau de la preuve signifient l'obligation de convaincre, qui est également qualifiée de fardeau de persuasion.  Il s'agit donc de l'obligation de produire dans les éléments de preuve une quantité et une qualité de preuve nécessaires à convaincre le Tribunal des allégations faites lors du procès.

[63]         La Cour suprême du Canada, dans la décision de Parent c. Lapointe [1] , nous précisait sous la plume de l'honorable juge Taschereau:

 

« C'est par la prépondérance de la preuve que les causes doivent être déterminées, et c'est à la lumière de ce que révèlent les faits les plus probables, que les responsabilités doivent être établies. »

 

[64]         Dans leur traité de La preuve civile (4 e Édition) [2] , les auteurs Jean-Claude Royer et Sophie Lavallée précisent:

 

« Il n'est donc pas requis que la preuve offerte conduise à une certitude absolue, scientifique ou mathématique.  Il suffit que la preuve rende probable le fait litigieux. »

 

[65]         Les auteurs rappellent la décision de notre Cour d'appel du Québec dans l'arrêt Dubois c. Génois [3] où le Juge Rinfret s'exprime comme suit:

 

« Il aurait pu également s'appuyer sur les décisions citées par M. le juge Taschereau dans Rousseau c. Bennett, pour appuyer la théorie que "les tribunaux doivent souvent agir en pesant les probabilités.  Pratiquement rien ne peut être mathématiquement prouvé." »

 

[66]         Ces mêmes auteurs écrivant quant à l'appréciation de la prépondérance mentionnent:

 

« Pour remplir son obligation de convaincre, un plaideur doit faire une preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.  Le degré de preuve requis ne réfère pas à son caractère quantitatif, mais bien qualitatif.  La preuve produite n'est pas évaluée en fonction du nombre de témoins présentés par chacune des parties, mais en fonction de leur capacité de convaincre.  Ainsi, le plaideur doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible, mais probable.  Dans l'appréciation globale d'une preuve, il n'est pas toujours facile de tracer la ligne de démarcation entre la possibilité et la probabilité. »

 

[67]         Pour les Tribunaux, plusieurs règles peuvent aider un juge à décider de la suffisance ou non de la preuve entendue lors d'un procès.

[68]         Par exemple, une preuve directe est préférée à une preuve indirecte, la preuve d'un fait positif est préférée à celle d'un fait négatif.  La corroboration est une preuve qui renforce un témoignage de façon à inciter le juge à le croire, et l'attitude lors d'un procès d'un témoin peut même influencer le Tribunal.

[69]         Plus récemment, l'honorable juge Rothstein de la Cour suprême du Canada, dans l'affaire de F.H. c. Mc Dougall [4] , rappelait les critères applicables suivants de la preuve en matière civile:

 

«[45] […]Il n’existe qu’une seule règle de droit : le juge du procès doit examiner la preuve attentivement.

 

[46] De même, la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités. Mais, je le répète, aucune norme objective ne permet de déterminer qu’elle l’est suffisamment. […]Aussi difficile que puisse être sa tâche, le juge doit trancher.  Lorsqu’un juge consciencieux ajoute foi à la thèse du demandeur, il faut tenir pour acquis que la preuve était à ses yeux suffisamment claire et convaincante pour conclure au respect du critère de la prépondérance des probabilités.»

 

[70]         Le Tribunal doit donc, à la lumière de tous les éléments de la preuve, soit la preuve matérielle, documentaire et la preuve testimoniale reçue lors du procès, déterminer si la partie demanderesse a réussi à le convaincre selon les règles des probabilités.

2845.  La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du tribunal.

 

ANALYSE ET DISCUSSION:

[71]         Le Tribunal estime qu'il y a preuve prépondérante établissant que le représentant de la défenderesse s'est engagé à verser deux pour cent (2 %) de commission à la demanderesse pour tout investisseur qu'il lui référerait et qui investirait dans son entreprise.

[72]         Si, comme le prétend le représentant de la défenderesse, les 6 000 $ offerts par une correspondance qu'il a lui-même rédigée par courriel étaient une donation, pourquoi exige-t-il une facturation à ce chapitre?

[73]         Aussi, pourquoi y a-t-il lieu de tenir une rencontre spécifiquement pour calculer le pourcentage de ce cadeau ou de cette donation?  Si tel était le cas, la défenderesse n'avait tout simplement qu'à expédier cette somme d'argent à titre de compensation ou de donation directement à la demanderesse sans autre formalité.

[74]         Le Tribunal s'explique mal pourquoi les parties ont dû «négocier» un cadeau ou une offre de donation.

[75]         La version offerte en défense est loin d'être cohérente lorsque nous analysons attentivement les échanges de correspondance intervenus entre les parties.

[76]         Pourquoi le représentant de la défenderesse ne réagit-il pas immédiatement ou ne contredit-il pas immédiatement la demande de commission de deux pour cent (2 %) du représentant de la demanderesse dans ces nombreux écrits?

[77]         Lorsque Me Mottet écrit à Me Marcotte le 1 er juin 2010, à l'effet qu'il requiert lui-même de discuter de la commission dans leur rencontre du lendemain, ce n'est sûrement pas parce qu'aucune entente n'était antérieurement intervenue entre les parties à ce chapitre.

[78]         Pourquoi le représentant de la défenderesse ne réagit-il pas autrement dans ces correspondances qu'en référant le représentant de la demanderesse à d'éventuels documents, informations, rencontres ou négociations, si véritablement il ne lui devait rien?

[79]         Pourquoi prend-il la peine d'indiquer que le pourcentage de commission s'applique sur la somme de 300 000 $ si aucune commission n'était convenue entre les parties?

[80]         Le Tribunal estime qu'il n'y a qu'une seule réponse logique, claire et concordante c'est qu'il y a eu, dès le départ, une entente entre les parties prévoyant que la demanderesse serait rétribuée par deux pour cent (2 %) de commission pour sa référence menant à l'obtention de nouveaux capitaux par la défenderesse.

[81]         Cependant, compte tenu que le véritable investissement de monsieur Belle est de 450 000 $, le Tribunal estime que la défenderesse est endettée envers la demanderesse de la somme de 9 000 $ plus taxes, soit: 10 253,25 $.

[82]         POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

[83]         ACCUEILLE en partie la réclamation.

[84]         CONDAMNE la défenderesse, Finance HWY inc., à payer à la demanderesse, Dufour, Mottet avocats, la somme de 10 253,25 $ plus les intérêts au taux légal majoré de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter de l'assignation.

[85]         LE TOUT avec dépens.

 

 

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DENIS LE RESTE, J.C.Q.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Sébastien Matte

DUFOUR, MOTTET AVOCATS

Procureur de la demanderesse

 

Me Mélanie Marcil

PROVOST, LAROUCHE

Procureurs de la défenderesse

 

Date d’audience :

12 octobre 2011

 



[1]     [1952] 1 R.C.S., 376.

[2]     Jean-Claude ROYER et Sophie LAVALLÉE, La preuve civile , 4 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2008.

[3]     [1964] B.R. 637 .

[4]     2008 CSC 53 , J.E. 2008-1864 , EYB 2008-148155 .