Dodier c. Pineault

2011 QCCQ 15846

JA0437

 
 COUR DU QUÉBEC

«Division des petites créances»

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

LOCALITÉ: RIMOUSKI

DISTRICT DE

 RIMOUSKI

« Chambre civile »

N° :

100-32-004779-105

 

 

 

DATE :

21 octobre 2011

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

MONSIEUR LE

JUGE MAURICE ABUD, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

CAROLINE DODIER

ET

RENAUD LAFLAMME      

Partie demanderesse

 

c.

ANDRÉ PINEAULT   

Partie défenderesse

 

Et

EXCAVATION GARON INC.

 

           Partie appelée en garantie

______________________________________________________________________

 

J U G E M E N T  

______________________________________________________________________

 

[1]    La partie demanderesse, Caroline Dodier et Renaud Laflamme, réclame de la partie défenderesse, André Pineault, un montant de 7,000 $ constituant les coûts additionnels qu'elle a dû débourser suite au déplacement inutile d'un champ de polissage lors de la construction d'un système de rejet des eaux usées d'une résidence.

[2]    André Pineault soutient que les plans et devis sont conformes à la réglementation et la décision de déplacer le champ de polissage n’a pas été prise par lui, mais par l’entrepreneur Excavation Garon Inc. qu’il appelle en garantie.

[3]    En septembre 2007, Caroline Dodier et Renaud Laflamme font appel aux services de André Pineault d'Urbatech Concept pour une étude de caractérisation du sol pour leur future résidence.

[4]    Renaud Laflamme témoigne qu'après avoir visité la propriété, André Pineault a déposé une étude (P-6) de caractérisation du sol; elle visait également à proposer un système de traitement conforme aux règlements pour le débit d'eaux usées.

[5]    Après avoir analysé la topographie des lieux, les pentes du terrain, le  niveau de perméabilité du sol, le niveau du roc et des eaux souterraines, André Pineault prévoit que les eaux usées de la résidence seront acheminées par une conduite d'amener de 10 centimètres de diamètre. La pente de cette conduite sera comprise entre 1 et 2% pour être déversées vers une fosse septique NQ3680-905 installée de niveau.

[6]    Et, en fonction du nombre de chambres à coucher, de la perméabilité du sol et du niveau du roc, il a été suggéré de construire un système de traitement secondaire avancé NQ3680-910, modèle écoflo STB-650/BR, installé, utilisé et entretenu selon les guides du fabricant. L'effluent devait être acheminé vers un champ de polissage situé à 139 pieds de la résidence.

[7]    Renaud Laflamme précise que, pendant la réalisation des travaux, à la fin du mois d'août 2008, il s'est avéré que le plan déposé n'était pas conforme aux spécifications du fabricant Premier Tech.

[8]    Lors de l'installation du système écoflo STB-650/BR prévu au rapport, ils se sont demandés quelle était la longueur maximale à respecter pour le tuyau reliant la pompe intégrée à l'écoflo au champ de polissage adjacent.

[9]    Il a communiqué avec Stéphane Lussier, représentant de Premier Tech, qui fournissait le système écoflo. Celui-ci les a alors informés que le type de pompes intégrées au modèle STB-650/BR était prévu pour un champ de polissage situé à une distance maximale de 60 pieds de la résidence.

[10]         Or, dans le rapport préparé par André Pineault, il est spécifié que le champ de polissage est prévu à 139 pieds  de la résidence.

[11]         Puisque les travailleurs étaient sur place, il fallait trouver une solution rapidement, ajoute Renaud Laflamme.

[12]         Il a alors tenté de communiquer avec André Pineault, sans succès, ce dernier étant en vacances, mais a parlé avec Simon Boucher, technicien en urbanisme de la firme Urbatech Concept, qui a accepté de se rendre sur place en début d'après-midi.

[13]         À  l'arrivée de ce dernier, Renaud Laflamme l'informe qu'ils ont pris la décision de bûcher un autre espace pour le champ de polissage à 60 - 70 pieds de l'écoflo afin de respecter les normes du fabricant.

[14]         Renaud Laflamme ajoute que Simon Boucher était en accord avec cette décision.

[15]         Le lendemain, Charles Langlois - l'inspecteur en urbanisme de la ville qui était sur place la veille au moment ou la décision a été prise d'avancer le champ de polissage - arrête les travaux au motif que l'épaisseur du sol perméable à l'endroit qu'il venait de bûcher ne respectait pas les normes puisqu'on atteignait le roc trop rapidement.

[16]         Ne pouvant  résoudre le problème dans un délai raisonnable, il a  interrompu les travaux et Excavation Garon a quitté les lieux avec ses équipements et ses hommes.

[17]         Ce n'est que vers le 10 septembre qu'ils ont pu poursuivre les travaux suite à une rencontre qu'ils ont eue avec André Pineault. La seule alternative qui restait était d'installer une station de pompage à l'écoflo avec une possibilité de pompage jusqu'à 175 pieds, tout en gardant la position originale inscrite sur les plans pour le champ de polissage.

[18]         Dans le deuxième rapport préparé par Simon Boucher, en septembre 2008, on propose plutôt un système de traitement pour traiter les eaux, de type écoflo STB-650B certifié NQ3680-910, plutôt que STB-650/BR, tel que proposé à l'origine.

[19]         On a également prévu d'installer un poste de pompage PSA 240 L de Premier Tech à l'extérieur du système de traitement afin d'obtenir une capacité de pompage supérieure à celle de la pompe intégrée au modèle STB-650/BR; le champ de polissage se situant alors à environ 131 pieds de la résidence.

[20]         Renaud Laflamme termine en mentionnant que André Pineault s'est reconnu responsable de cette situation et s'est engagé à lui rembourser les frais supplémentaires occasionnés par cette erreur. C'est pourquoi, il lui réclame les frais encourus pour l'ajout de la station de pompage, la demande d'un nouveau permis d'installation septique à la ville de Rimouski, le déboisement et divers dommages.

[21]         Il réclame des dommages pour le champ de polissage bûché inutilement. Ce champ a été construit parce qu'il se fiait à un plan comportant une erreur et, qu'en pareille circonstance, il a fait confiance aux professionnels et travailleurs impliqués, entre autres, Stéphane Lussier, représentant de Premier Tech, Charles Langlois, inspecteur à la ville de Rimouski, Simon Boucher et Jean-Guy Caron, excavateur accrédité pour ce type d'installation.

[22]         Il précise que c'est l'erreur de André Pineault qui est à l’origine de tous les problèmes et des dommages qui s’ensuivirent plus amplement détaillés à P-3.

                                                                                               

Ajout d'une nouvelle station de pompage

 

- Achat du poste de pompage

 

-  Frais occasionnés pour le creusage final et le    raccordement de la station à l' Écoflo

 

-  Frais occasionnés pour le creusage final et le    raccordement de la station à l' Écoflo

    

 

 

1 094,89 $

 

 

      176,70 $

 

 

      200,00 $

 

Demande d'un nouveau permis à la Ville de Rimouski     

 

      250,00 $

Excavation

 

-  Excavation inutile du premier champ d'épuration

  

 

-  Déplacement inutile de végétation par camion: étape qui    aurait été évitée en respectant l'emplacement prévu    initialement pour le champ

 

-  Épandage inutile de concassé

  

 

-  Transfert du concassé d'un champ à l'autre

  

-  Remblai du premier champ d'épuration

 

-  Un quart de voyage de concassé supplémentaire: perte    due au transfert

 

-  Perte de temps encourue par les arrêts fréquents des    procédures sur le chantier pour deux hommes durant 1h    chacun

  

 

 

      136,80 $

 

 

 

 

        79,80 $

 

      136,80 $

 

 

        91,20 $

 

        91,20 $

 

        85,50 $

 

 

       216,60$

 

 

 

Déboisement

-           Temps pour bûcher

 

-  Ramasser les branches et s'en départir

 

        40,00 $

 

      100,00 $

Dommages

 

-  Suivi du dossier

 

-        Appels téléphoniques

 

-  Consultations

 

-  Troubles, ennuis et inconvénients:

 

-  Anxiété et tracas:

 

-  Délais dans l'échéancier de réalisation du projet:

 

-  Préjudices esthétiques:

  

 

                                                                                          Total:

 

 

      600,00 $

 

        80,00 $

 

      200,00 $

 

      900,00 $

 

      250,00 $

 

      500,00 $

 

1 750,00 $

 

 

7 000,00 $

 

[23]         En défense, André Pineault témoigne qu'il a préparé l'étude de caractérisation du sol et des plans de construction d'une installation septique en septembre 2007 pour la future résidence de la partie demanderesse.

[24]         D'entrée, il précise qu'il n'est pas responsable des actes commis par l'entrepreneur ni des décisions prises par le représentant de la Ville de Rimouski.

[25]         Il ajoute qu'il a tenté de s'entendre avec Renaud Laflamme, qu'il lui a fait une proposition de bonne foi dans le but de régler ce litige hors Cour, mais que celui-ci a refusé. Cette offre n'a été faite que dans le but de clore le dossier et non pas d'admettre une responsabilité quelconque.

[26]         Il ajoute que le rapport de septembre 2007 respecte en tout point les exigences de l'article 4.1 du règlement sur l'évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées (Q-2, r.8). À preuve, la Ville de Rimouski a émis un permis de construction.

[27]         Il précise que les plans proposés à l'origine était à l'effet que le système de traitement des eaux usées était composé d'une fosse septique munie d'un système de traitement secondaire avancé modèle STB-650/BR. Il savait que Premier Tech, fabricant du système écoflo, venait de mettre sur le marché un modèle qui comportait une station de pompage intégré, soit le modèle STB0650/BR, mais il ne savait pas que la capacité de cette pompe ne permettait pas de pomper à plus de 65 pieds.

[28]         Il ajoute qu'il aurait dû prévoir une station de pompage indépendante, soit un modèle PSA 240L, laquelle permet de pomper à une distance plus grande. C'est finalement celle-ci qui a été installée suite à la visite de Stéphane Lussier.

[29]         Par conséquent, soutient-il, il n'y a pas de dommages.

[30]         Il ajoute que, lorsque le temps est venu de la construction du champ de polissage, une décision a été prise par une personne hors de son contrôle de construire celui-ci à 60 pieds de la résidence au lieu de 139, tel que prévu au plan. Cette décision, dit-il, n'a pas été prise par lui ni par aucun de ses employés et, c'est à juste titre, que la ville a ordonné l'arrêt des travaux parce que le roc se trouvait trop près.

[31]         Simon Boucher témoigne qu'au mois d'août 2008, Renaud Laflamme qui était en cours de réaliser les travaux planifiés suite à l’étude de sol produite par André Pineault en 2007, a communiqué avec lui par téléphone pour l’informer qu'il avait entrepris des vérifications relativement à la capacité de pompage du système projeté par André Pineault. Il l'informait que la pompe prévue n'avait pas la capacité d'alimenter le champ de polissage à l'endroit où il avait été destiné sur le plan préparé en  2007.

[32]         Il a également été informé, lors de la même conversation, que l'entrepreneur et le surveillant des travaux de la ville avaient de la difficulté à concevoir pourquoi le champ de polissage avait été prévu en deux paliers et comment l'alimentation en eaux allait se faire entre ces deux paliers.

[33]         Il a tenté de fournir des explications à Renaud Laflamme relativement à ce point, mais ce dernier s'est dit insatisfait par les explications fournies par téléphone.

[34]         Il a alors convenu avec ce dernier qu'il se rendrait sur place pour illustrer ses explications  et ce dernier lui a précisé qu'il contacterait Stéphane Lussier chez Premier Tech pour éclaircir la situation sur la capacité de pompage du système.

[35]         Lorsqu'il est arrivé sur place, Renaud Laflamme l'a informé qu'après discussion avec Stéphane Lussier, ils avaient conclu que la pompe avait une portée de 60 à 65 pieds mais qu'elle était fonctionnelle jusqu'à 80, quoiqu'elle serait, dans ce cas, plus sollicitée et s'userait plus rapidement.

[36]         Renaud Laflamme lui a alors dit que la solution retenue avait été de faire le champ de polissage plus près que l'emplacement prévu aux plans.

[37]         Puisque des ajustements de dernières minutes peuvent arriver et sont courants lors des travaux similaires, et que le mandat de la surveillance des travaux appartenait à la Ville, il a considéré la problématique de la capacité de la pompe comme ayant été réglé à l'interne et il s'est attardé à répondre aux interrogations du système et de l'entrepreneur en rapport avec la conception en pallier du champ de polissage.

[38]         Le lendemain, il apprend que les travaux ont été interrompus par le représentant de la ville et lorsqu'il se rend  sur les lieux, il constate qu'un emplacement a  été déboisé et excavé pour y construire le champ de polissage.

[39]         Puisque le sol avait été enlevé jusqu'au roc et qu'il n'est pas légalement possible de remettre  celui-ci en place une fois qu’il est remanié, il n'était plus possible de faire le champ de polissage à cet endroit. Malgré que cela eut été possible si les travaux avaient été bien exécutés.

[40]         Il a fait quelques trous en amont et en aval de l’endroit qui avait été excavé pour vérifier l'épaisseur de matériel qu'il y avait. Il a constaté qu’avant le défrichage, il y avait suffisamment de terre pour envisager de faire le champ de polissage à cet endroit.

[41]         Par contre, le roc était plus proche; donc le champ aurait dû être moins profond. Selon lui, on aurait pu placer le champ de polissage à cet endroit si l'on n'avait pas excavé comme on l'a fait. Il ajoute qu'il n'a pas donné l'ordre d'excaver cet emplacement et qu'il n'était pas sur place au moment où cela s'est fait.

[42]         La solution trouvée a été de refaire le champ de polissage dans le secteur prévu à l'origine, en installant un réservoir avec une pompe de plus grande capacité à l'extérieur du système écoflo.

[43]         Stéphane Lussier l'a informé qu'il créditerait la pompe intégrée qui devenait ainsi inutile et qu'il fournirait la nouvelle station de pompage au prix coûtant afin que le coût net de ce changement imprévu corresponde seulement à la différence du prix entre les deux pompes.

[44]         Compte tenu que la ville a exigé un nouveau plan pour les permis, il a alors fait des relevés nécessaires pour réaliser les nouveaux plans qu'il a lui-même préparés et qui ont été acheminés à Renaud Laflamme, le 3 septembre 2008, par André Pineault.

[45]         À une question suggérée par Renaud Laflamme afin de savoir s'il a manifesté quelque désaccord lorsqu'il est arrivé sur les lieux dans l'après-midi du 26, et qu'il a constaté l'endroit du nouveau champ de polissage qui avait été prévu, il répond par la négative. Il ajoute que, lorsqu'il est arrivé sur les lieux, il a remarqué que c'était possible de le mettre à cet endroit en apportant les ajustements en conséquence en terme de profondeur.

[46]         Mais, compte tenu que l'excavation avait déjà eu lieu et qu'on était rendu sur le roc, il n'était plus possible de remanier le sol pour conclure positivement.

[47]         Stéphane Lussier de Premier Tech mentionne que l'équipement prévu aux plans - le système STB 650/Br avec la pompe intégrée - ne permettait pas de construire un champ de polissage à 139 pieds de la résidence. La pompe intégrée à l'intérieur STB 650/Br n'était pas assez forte; au lieu d’avoir une durée de vie de 7 à 8 ans, cela aurait été de  6, 7 ou 8 mois.

[48]         Il se souvient d'avoir été sur place pour aller voir la problématique comme telle. Il voulait donner satisfaction autant à l'installateur qu'au propriétaire de même qu'au consultant.

[49]         Considérant l'excavation qui avait été faite, l'écoflo qui avait été placé dans le trou - un équipement de 10,450 livres - il aurait fallu le sortir de l'endroit où on l'avait mis, le retourner à leur centre de dépôt pour prendre le bon modèle et le replacer dans le même trou.

[50]         Pour sauver du temps et de l'argent, il a  eu l'idée d'installer une autre pompe à l'extérieur et de ne pas se servir de celle qu'il y avait dans l'écoflo, de boucher le trou supérieur où c'était censé sortir et de faire une ouverture au bas. C'est ce qui a été fait.

[51]         De plus, il ajoute que lorsqu'ils ont décidé de reprendre le STB 650/Br, celui-ci a été crédité. Les coûts pour la partie demanderesse se sont avérés moindres, sauf qu’il a fallu rajouter la station de pompage au coût de 1 094,89 $.

[52]         Si on ajoute la pompe au montant de 1 094,89 $, moins le crédit accordé de 4 977,79 $ pour le STB 650/Br, plus 4 695,60 $ pour le STB-650B, on arrive à un montant 812,70 $ comme coût additionnel à Renaud Laflamme au niveau des équipements uniquement.

[53]         Excavation Garon Inc. était le contracteur qui avait été retenu pour installer le système. Jean-Guy Garon explique que le travail consistait à installer le système à partir des plans préparés par André Pineault.

[54]         Il installait le système à tarif horaire. Le temps de la machinerie était à l'heure de même que celui des hommes.

[55]         À la question de savoir combien d'heures additionnelles cela a pris pour régler la situation, il mentionne que, pour le creusage de la fosse, cela a été les mêmes coûts que ceux prévus; qu'on installe un champ de polissage plus bas ou plus haut, la fosse, il fallait la creuser.

[56]         Les coûts additionnels, c'est lorsqu'ils ont excavé pour le premier champ de polissage, celui situé à 60 pieds. Il estime que cela a pris à peu près une heure de pelle. Il a mis une heure sur cela et ils ont déposé un voyage de pierre qui valait 300 $;  en tout, environ 500 $.

[57]         Ce n'est pas la première fois qu'il installe ce type de système. À la question de savoir s'il a réclamé quelque chose à Renaud Laflamme parce qu'il a été arrêté, il mentionne que cela n'est pas détaillé dans sa facture. Il ne peut dire combien; mais une fois qu’il a été informé que les travaux avaient été arrêtés, il n'y avait pas d'urgence à terminer les travaux; il a plié bagages pour un autre chantier; il n’a pas perdu d’argent.

 

ANALYSE

 

[58]         L'article 2803 C.c.Q. précise:

Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.

[59]         Cette disposition impose à Caroline Didier et Renaud Laflamme de prouver les allégations contenues dans leur demande et à André Pineault d’établir les faits sur lesquels sa prétention est fondée pour sa demande en garantie.

[60]         L’article 2804 C.c.Q. énonce que:

La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.Il s'agit là d'une disposition pour le Tribunal pour lui permettre d'apprécier la preuve présentée de part et d'autre afin de conclure que l'existence d'un fait est plus probable que son inexistence.

[61]         Le contrat intervenu entre la partie demanderesse et la partie défenderesse est un contrat de services au sens des articles 2098 et suivants C.c.Q. .

[62]         Les obligations du fournisseur de service, André Pineault sont notamment régies par les articles 2098 et 2100 du Code civil du Québec  :

2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer

[63]         Le « prestataire » est tenu en vertu de l'article 2100 CcQ :

2100. [...] d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

 

[64]         André Pineault précise qu'il n'a rien à se reprocher, qu'il a rempli son mandat conformément aux demandes de son client, que les plans étaient conformes aux normes du règlement sur l'évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées (Q-2, r.8) et que la partie demanderesse n'a pas démontré que le dommage a été causé par une faute de sa part.

[65]         Le Tribunal retient plutôt que André Pineault a commis une faute. Il aurait dû s'assurer, avant de proposer dans son rapport du mois de septembre 2007, que le modèle d'écoflo qui comportait une station de pompage intégré, soit le modèle STB 650 BR pouvait être efficace et qu’il fonctionnerait selon les spécifications qu'il avait mentionnées à son rapport.

[66]         La preuve démontre que le modèle proposé ne permettait pas de pomper l'eau à plus de 65 pieds alors que dans le rapport, il était prévu que la station de polissage était située à 139 pieds plus loin.

[67]         Un simple coup de fil auprès du vendeur de l’équipement, Premier Tech, de la part de André Pineault aurait pu lui permettre de constater cette situation et modifier rapidement ses plans et devis pour les rendre conformes à l'équipement qu'il souhaitait proposer à son client.

[68]         Cette omission par André Pineault a eu un effet de domino sur les travaux exécutés en août 2008,

[69]         André Pineault n’a pas agi avec prudence et diligence faisant en sorte qu’il doit être tenu responsable pour ne pas avoir bien informé Caroline Dodier et Renaud Laflamme. S’il l’avait fait, la partie demanderesse n’aurait pas eu à subir les dommages qu’elle réclame.

[70]         Quels sont ces dommages ?

[71]         Selon la preuve, on a dû installer une station de pompage à l'extérieur de l'écoflo afin de minimiser les coûts, et le demandeur a été dans l'obligation de se procurer une station de pompage pour laquelle il a dû débourser un montant additionnel de 1 094 $.

[72]         Par contre, avec les crédits accordés par Premier Tech, c’est un montant de  812,70 $ que la partie demanderesse a dû débourser en surplus en regard des équipements.

[73]         Il  y a également un montant de 250 $ qu’elle a dû verser à la ville de Rimouski pour le nouveau permis.

[74]         Renaud Laflamme admet qu'il n'y avait pas d'urgence pour changer le champ de polissage d'endroit, et il prend la responsabilité d'avoir pris la décision de l'avoir fait, après avoir questionné les experts qu'il pouvait consulter à ce moment-là.

[75]         C’est pourquoi, le Tribunal ne  peut accorder de dédommagement pour les coûts engendrés par la construction du champ de polissage. Renaud Laflamme a pris la décision de changer l’endroit de celui-ci lorsqu’il s’est rendu compte du problème. Pour Jean-Guy Garon, il n'y avait pas d'urgence à terminer les travaux et on aurait pu facilement attendre le retour de vacances de André Pineault.

[76]         Il aurait été facile d'attendre que toutes les personnes soient en place avant de prendre une décision concernant la suite des travaux; d'autant plus que ceux-ci se faisaient à tarif horaire. Jean-Guy Garon aurait pu simplement prendre ses machines, comme il l’a fait après avoir été arrêté par l’inspecteur de la ville, aller sur un autre chantier et revenir plus tard et cela n'aurait apporté aucun coût additionnel pour André Pineault et  Renaud Laflamme.

[77]         De plus, avant de procéder unilatéralement, Renaud Laflamme aurait du mettre en demeure André Pineault de corriger la situation, ce qu’il n’a pas fait.

[78]         C’est pourquoi, le Tribunal ne peut accorder de dommages qui sont reliés à l’excavation du premier champ de polissage de même que pour le déboisement. Il en sera également ainsi pour le préjudice esthétique.

[79]         Jean-Guy Garon a été surpris de l'ampleur qu'a pris le dossier. Lui-même, évaluait que, dans le cadre de son dossier, les retards que cela avait occasionnés présentaient une heure d'ouvrage environ pour reprendre le matériel et le remettre ailleurs.

[80]         Il a également mentionné que les arbres qui avaient été coupés se trouvaient dans le passage de la conduite qui devait de toute façon monter au champ de polissage situé en amont et qu'il y avait des arbres qu'il aurait fallu couper de toute façon pour que la machinerie puisse excaver une tranchée et passer le tuyau jusqu'au champ situé à 130 pieds plus loin.

[81]         Il est certain que la partie demanderesse a subi des inconvénients reliés à la mauvaise information que lui a donnée André Pineault et qu’il y a eu retard dans l’échéancier du projet. Pour l’ensemble des postes réclamés à titre de dommages, le Tribunal accordera un montant de 800 $.

[82]         Enfin, les frais de 376,70$ occasionnés pour le creusage final et le raccordement de la station à l’écoflo seront accordés.

[83]         Quant à la demande en garantie, elle sera rejetée. Rien dans la preuve ne permet de conclure que Excavation Garon Inc. a pris la décision de déplacer le champ de polissage.

[84]         POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL :

[85]         ACCUEILLE partiellement la demande de la partie demanderesse;

[86]         CONDAMNE la partie défenderesse, André Pineault, à payer à la partie demanderesse, Caroline Dodier et Renaud Laflamme, la somme de 2 239,40 $ avec intérêts au taux de 5% l'an, et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 2 avril 2009, date de la mise en demeure.

[87]         LE TOUT avec dépens.

[88]         REJETTE l'appel en garantie.

[89]         LE TOUT sans frais.

 

 

__________________________________

MAURICE ABUD, J.C.Q.

 

Date de l'audience:  25 août 2011