Chayer c. Eggena

2012 QCCQ 413

JB-2754

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

LOCALITÉ DE SAGUENAY, ARR. CHICOUTIMI

DISTRICT DE

CHICOUTIMI

 

« Chambre civile »

 

NO:

 

150-32-007321-108

 

 

 

DATE :

17 janvier 2012

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE MONSIEUR LE JUGE RAOUL P. BARBE, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

 

PHILIPPE CHAYER , […], St-Honoré, Qc, […]

demandeur

c.

ZOE ANFOSSE EGGENA , […], St-Isidore, Qc, […]

défendeur et demandeur en garantie

c.

SYLVAIN RODRIGUE , […] , Dolbeau-Mistassini, Qc, […]

défendeur en garantie

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

______________________________________________________________________

 

 

[1]            Par une demande judiciaire déposée au greffe le 4 mars 2010, le demandeur réclame 3 306,21 $ pour vice caché à la cheminée. L'audition a lieu le 12 octobre 2011.

LES FAITS

[2]            Le 12 décembre 2005, le défendeur achète de Sylvain Rodrigue un immeuble situé au 2511, rue de l'Hôtel de Ville à St-Honoré.

[3]            Le 18 mai 2006, l'assureur Wawanesa (Mylène Guay) du défendeur inspecte le système de chauffage du 2511, Hôtel de Ville et s'en déclare satisfait (D-1) :

« La présente est pour confirmer que le 18 mai 2006, nous avons inspecté un appareil de chauffage au bois situé à l'adresse suivante, soit au 2511 Hôtel-de-Ville à St-Honoré. Suite à cette inspection, nous n'avons exigé aucune modification concernant l'installation de cet appareil. L'usage déclaré était de trois cordes par année. »

[4]            En 2009, le défendeur met cet immeuble en vente. En février 2009, le demandeur s'intéresse à l'achat de cet immeuble; il fait une offre d'achat et après négociation, les parties s'entendent sur le prix de 127 000 $ sous réserve d'une inspection préachat et de l'obtention du financement. La valeur marchande selon le rôle d'évaluation 2009 est de 101 000 $ (T: 9 900 $ + B: 91 100 $) (P-3a). Il s'agit d'une maison construite en 1960.

[5]            Le 13 février 2009, Daniel Mérédith fait l'inspection préachat, à l'égard de la cheminée, l'inspecteur préachat fait les commentaires suivants (P-3) :

« Chauffage-cheminée-foyer :

Notre inspection ne couvre par l'état des cheminées, ni les appareils de chauffage s'y rattachant et ni les foyers et/ou poêle.

Nous vous recommandons fortement de faire vérifier par un technicien spécialisé ou par le service des incendies de votre municipalité, les cheminées ainsi que tous genres de foyers et de poêles, afin d'être conforme aux normes en vigueur. Communiquez avec votre assureur afin qu'il envoie un technicien spécialisé vérifier vos installations et aussi pour votre sécurité (…)

Cheminée : Condition physique remarquée : Parties extérieures visibles exclusivement :

§   Refaire des joints de mortier et remplacer les briques endommagées.

§   Installer un couvercle sur la sortie ne servant plus, afin d'éviter toute infiltration.

§   Condition hivernale: Étant donné que nous ne sommes pas monté sur le toit, nous n'avons pas regardé la partie supérieure de la cheminée.

§   Vous devez la faire inspecter par un spécialiste, nous ne l'inspectons pas. » (sic)

[6]            En fait, le système de chauffage principal de l'immeuble consiste en une fournaise bi-énergie, c'est-à-dire qu'elle peut être utilisée pour le chauffage au bois ou pour le chauffage électrique, l'air chaud étant ainsi distribué dans la résidence par le biais de divers conduits d'aération. La résidence possède aussi un système de chauffage secondaire et d'apport par le biais de quelques calorifères.

[7]            Le 14 février 2009, le défendeur-vendeur signe la déclaration du vendeur qui fait état qu'il fait le ramonage de la cheminée une fois par année et que la dernière fois ce fut en août 2007 (D-2).

[8]            Le contrat de vente est notarié le 24 avril 2009, avec prise de possession le même jour au prix de 127 000 $ (P-1).

[9]            Le 27 mai 2009, un inspecteur de l'assureur La Personnelle inspecte l'appareil à combustion lente et fait les recommandations suivantes (P-2) :

§   L'appareil doit reposer sur une base en matériaux incombustibles devant excéder l'avant de 450 mm (18 pouces), les côtés et l'arrière de 200 mm (8 pouces);

§   La cheminée actuelle ne peut être utilisée pour le chauffage au bois. Elle devra être remplacée par une cheminée préfabriquée métallique homologuée selon la norme U.L.C. S-629M ou par une cheminée de briques avec un revêtement intérieur (ardoise, ciment, fonte) selon les exigences du Code national du bâtiment (…)

§   Les matériaux combustibles près des conduits de distribution de chaleur de l'appareil central doivent être protégés par des matériaux incombustibles (…)

§   Dégager les fils électriques des conduits de chaleur.

[10]         L'assureur exige que ces recommandations soient effectuées dans les 90 jours à compter du 27 mai 2009, soit avant le 27 août 2009 (P-2).

[11]         Le demandeur consulte Michel Nepton, technologue, pour expertiser la cheminée en litige. Le 27 juin 2009, ce dernier expertise la cheminée en litige et rédige un rapport écrit concernant l'appareil de chauffage et la cheminée (P-3) :

« Pièce qui possède l'appareil de chauffage : La superficie de la pièce est d'environ 600 pi 2 . Le plancher est fait de béton sur toute la surface de la pièce. Les murs sont de gypse tandis que le plafond n'est pas terminé par endroit et fait de bois. La pièce sert de salle de rangement. Aucunes matières dangereuses à proximité du système au bois n'ont été aperçues lors de l'inspection.

Description de l'appareil de chauffage : L'appareil est une fournaise au bois à simple combustion, fabriqué par "Powermatic". La fournaise est le modèle "EU-18" et porte le numéro de série 8305 216. La buse de ce poêle a un diamètre de six pouces. Pour une évacuation efficace des gaz et de la fumée par le tuyau de raccordement, le raccord doit avoir la même dimension afin d'assurer la performance du système. Une différence de 1 pouce de diamètre en plus, comme dans le cas présent, ne comporte aucuns risque étant donné que le tirage est suffisant. Cette fournaise est très usée par l'âge. Le tuyau de raccordement à une dimension de 7 pouces et une longueur d'environ 10 pieds.

Description de la cheminée : L'appareil est rattaché à une cheminée préfabriquée 1200 degrés fahrenheit dont l'occupant ignore la date d'installation. La cheminée préfabriquée passe à l'intérieur de la maison. Cette cheminée usinée n'est pas conforme étant donné son degré de résistance au feu de 1200 degrés. La suie retrouvée dans la cheminée est en fine particule. La suie en fine particule est signe que le système performe bien avec la cheminée tandis que la créosote est signe d'une mauvaise utilisation du poêle, d'un mauvais combustible ou d'une mauvaise performance de la cheminée (tirage). La cheminée passe à l'intérieur de la maison et est visible par une petite ouverture dans le mur du couloir au rez-de-chaussée et au grenier. Les distances entre la cheminée et les matières combustibles au rez de chaussée ne sont pas respectées car du bois touche directement à la cheminée. La cheminée extérieure dépasse d'environ 3 pieds la toiture de la maison et une mitre artisanale en inox gît à son sommet. Le solin à la base de la cheminée manque un peu de scellant. » (sic)

[12]         Dans son expertise, le technologue y décrit les 7 anomalies suivantes (P-3) :

1 .   Anomalie : La cheminée n'est pas une cheminée de type 2100 comme l'exige la plupart des assureurs.

      Correctif : Installer une cheminée de type 2100 degrés.

2.   Anomalie : La cheminée touche directement la structure de bois et à l'isolation au rez-de-chaussée.

      Correctif : Installer une cheminée de type 2100 avec le dégagement requis de 2 pouces aux matières combustible.

      Référence : Homologation de la cheminée.

3.   Anomalie : Le tuyau de raccordement n'est pas suffisamment dégagé des matières combustibles.

      Correctif : Munir d'un écran les parties combustibles exposées.

      Référence : CSA B365 Art. : 5.4.9. : À moins d'être certifié pour dégagements moindres (ex : tuyau double paroi, 6 po habituellement), le dégagement minimal d'un conduit de raccordement installé à proximité d'une surface combustible protégée ou non par un matériau incombustible tel le plâtre, doit être de 450 mm (18 po).

4.   Anomalie : Du bois a été ajouté sur le dessus de la cheminée pour tenir la mitre en inox.

      Correctif : Retirer le bois qui montre des signes de pyrolyse.

      Référence : Homologation de la cheminée et gros bon sens

      Note : cette anomalie aurait pu être très dangereuse pour les occupant car le bois a commencé à se transformer et aurai pu s'enflammer et créer un incendie dans la toiture .

5.   Anomalie : Le tuyau de raccordement est posé à l'envers et il n'est pas muni de trois vis par joint.

      Correctif : Poser le tuyau avec la partie mâle au dessus et installer trois vis par joint.

      Référence : Normes CSA B365 Article 5.4.2. : Un conduit de raccordement doit : (…) h) avoir des joints agencés de façon que la condensation qui se forme dans la cheminée s'écoule vers l'appareil (…)

ET

      CSA B365 Art. : 5.4.7.b) Les joints dans les conduits de raccordement doivent être assujettis à l'aide d'au moins trois vis ou autres organes mécaniques équivalents (y compris le raccord à la cheminée et à l'appareil)

6.    Anomalie : La fournaise montre des signes d'usure élevés dans son âtre et a l'extérieur autour de la buse derrière le système.

      Correctif : restaurer l'âtre de ce système ou le remplacer

7.   Anomalie : Le dégagement de 6 pouces au dessus de la fournaise n'est pas respecté (plénum)

      Correctif : Dégager le plenum au dessus de la fournaise a 6 pouces du plafond

      Référence : Homologation du système. (sic)

[13]         Ces anomalies sont illustrées par des photos. Le demandeur paie 95,94 $ pour cette expertise.

[14]         Le demandeur obtient le 10 juillet 2009 le coût de Chauffage Moderne pour rendre le système de chauffage conforme à la réglementation (P-5) :

« (…)

Remplacer les 6 premiers pieds de conduits pour les installés à 6" d'une matière combustible, modifier la suite du conduit d'alimentation principal pour avoir 1', d'une matière combustible.

Notre prix les taxes en sus est de 1280 $

Remplacer la cheminée pour une de type 2100

Notre prix les taxes en sus est de 2320 $ » (sic)

[15]         Le 22 juillet 2009, le demandeur dénonce ces anomalies au défendeur et le met en demeure de procéder aux corrections (P-4) :

« En date du 22 juillet 2009, nous avons découvert avec stupéfaction que la cheminée située dans le sous-sol de l'immeuble dont nous avons fait l'acquisition le 24 avril 2009 dernier et dont vous étiez les propriétaires est affectée de vices cachés.

En effet, la non-conformité de celle-ci ainsi que des conduits d'aérations n'ont pu être découvert que par les vérifications attentives de l'expert de notre assureur, lequel refuse désormais d'assurer notre résidence contre l'incendie à défaut d'effectuer les corrections appropriées dans les 90 jours.

Ainsi, nous n'avons d'autre choix, tel que requis par la Loi, de vous accorder un délai de 10 jours à compter de la réception de la présente pour venir constater lesdites défectuosités et de corriger celles-ci dans le même délai, par un expert de votre choix compétent et qualifié. Vous trouverez joint à la présente copie une soumission effectuée, laquelle démontre que le coût des corrections sera de 4063.50 $.

À défaut d'obtempérer volontairement à la présente, soyez avisés que nous n'aurons d'autre choix que de procéder audites corrections nous-même et ce, à vos frais, en vous réclamant ces frais en entreprenant les mesures judiciaires appropriées par la suite.

Toutefois, afin de régler le présent litige rapidement, nous serions immédiatement prêt à laisser tomber toute réclamation concernant lesdites défectuosités attachées sur paiement de la somme de 3000 $ dans les 10 jours de la réception de la présente. » (sic)

[16]         Le 3 août 2009, le défendeur-vendeur informe le demandeur qu'il nie toute responsabilité (P-6) :

« La présente fait suite à une lettre reçue en date du samedi 25 juillet 2009 à l'effet que la propriété sise au 2511 Hôtel de Ville à St-Honoré aurait une installation non conforme à son système de chauffage aux normes d'assurance habitation selon vos dires. Je tiens à vous rappeler qu'une inspection a été effectuée à cette adresse par la compagnie d'inspection en bâtiment DM en date du 13 février 2009, dont une copie vous a été transmise afin de vous permettre de voir les détails de cette inspection. Par la suite, lors de votre offre d'achat, vous avez demandé une deuxième inspection, d'une firme de votre choix, afin de vous assurez que le bâtiment ne comportait aucun vice caché. Dans votre lettre envoyée, vous mentionné qu'il y a vice caché au système de chauffage secondaire au bois et que les conduits et la cheminée ne seraient pas conformes aux normes de l'assurance que vous avez choisis. Je tiens à vous rappeler que lorsque vous m'avez fait part de cette information, j'ai contacté ma compagnie d'assurance Wawanesa qui œuvre dans ce domaine depuis 1896. Ils avaient effectué une inspection sur mon installation de chauffage lors de mon achat le 18 mai 2006 et ils m'ont informé que tout était conforme selon leurs normes et qu'ils n'auraient aucun problème à vous assurer si vous êtes assurable. Je tiens aussi à vous rappeler la définition d'un vice caché selon le dictionnaire.  « Un vice caché est un défaut ou une imperfection dans un article découvert après l'achat et que l'acheteur n'aurait pas pu découvrir par un examen visuel. » Selon la définition, les conduits de chauffage ne peuvent pas faire partie d'un vice caché puisqu'ils sont à la vue de toute inspection visuelle dans le sous-sol au niveau de la tête. Aucune des deux inspections n'a fait part d'une quelconque non-conformité concernant les conduits de chauffage et la cheminée. Les conduits étaient donc visibles lors de votre achat et ne comportaient aucun problème selon les inspections effectuées. Je joins à cette lettre une copie de la confirmation de conformité de mon installation de chauffage selon l'inspection effectuée par ma compagnie d'assurance qui confirme que le 18 mai 2006, ils avaient inspectés l'appareil de chauffage au bois (fournaise, cheminée et conduits) et suite à cette inspection, ils n'avaient exigée aucune modification concernant l'installation de cet appareil. Cela démontre que le tous répondaient aux normes applicables de leur compagnie. Je n'ai donc effectué aucune modification sur le dit système. Lors de votre achat, je vous ai affirmé que je n'utilisais ce système que pour chauffage d'appoint et que le système de calorifères était le chauffage principal.

Pour conclure, vous avez eu le rapport d'inspection fait par la compagnie DM, ensuite vous avez fait venir un nouvel inspecteur pour vous assurez de la conformité de tout le bâtiment. Le système de chauffage est visible sans enlever aucune construction ou matériaux, vous avez vue la cheminée existante et les conduits de chauffage, vous avez quand même acheté la maison. C'est pour ces raisons que je considère qu'il n'y a pas présence de vice caché et que je ne procèderai pas aux travaux demandés, dans votre courrier recommandé. » (sic)

[17]         Vu l'ampleur des travaux de remplacement de la cheminée, le demandeur opte pour le remplacement de la fournaise qui serait moins cher et condamne la cheminée, celle-ci étant inutilisable, vu les risques d'incendie.

[18]         Le 19 septembre 2009, le demandeur fait installer par Chauffage Moderne une fournaise électrique 20 kw-220 volts, et modifie les conduits pour un coût de 2 821,88 $ (P-7a). Le 14 octobre 2009, Chauffage Moderne fait le branchement de la fournaise et pose un disjoncteur 125 amp Siemens pour un coût de 388,39 $ (P-7b).

[19]         Le demandeur consulte un avocat qui envoie le 19 novembre 2009 au défendeur une mise en demeure de payer 3 306,21 $ (P-8) :

« Comme vous le savez, notre client a procédé à l'achat d'une propriété dont vous étiez le propriétaire et ladite vente fut effectuée avec garantie légale à l'encontre des vices cachés.

Or, le ou vers le 25 juillet 2009, vous avez reçu un avis de dénonciation vous exposant clairement que vous deviez faire le nécessaire pour procéder aux travaux qui s'imposaient afin de remédier à certains vices cachés affectant la cheminée de l'immeuble ainsi que les conduits d'aération. Ledit avis de dénonciation comprenait une soumission visant le coût des corrections à apporter mais notre client a été en mesure de faire effectuer lesdits travaux à moindre coût.

Vu votre inaction, notre client était en droit d'effectuer lesdits travaux et de vous réclamer les frais engendrés.

Ainsi, vous êtes mis en demeure par la présente de nous transmettre la somme de 3 306,21 $ à l'ordre de Jérome Théberge, avocat en fiducie , dans les cinq (5) jours suivants la réception de la présente ou de prendre entente dans le même délai, à défaut de quoi, notre client entreprendra les démarches judiciaires appropriées afin d'obtenir paiement de cette somme. »

[20]         Le 10 décembre 2009, le défendeur répond qu'il n'a pas l'intention de verser la somme demandée (D-4) :

« La présente fait suite à une lettre reçu en date du jeudi 10 décembre 2009 à l'effet que vous me mettez en demeure de vous versez la somme de 3 306,21$ dans les cinq jours suivant la réception de celle-ci. Comme j'ai expliqué dans ma lettre enregistrée envoyée le 3 août 2009 à monsieur Chayer, je n'ai pas l'intention de verser la somme demandé. Je vous joins en annexe copie de cette lettre qui contient toutes les explications nécessaires afin de comprendre mes motifs. Je crois espérer que ceux-ci, vous ferons comprendre, que les conduits d'aérations étaient visible lors de deux inspections faites par des firmes d'inspecteurs en Bâtiment et que même l'acheteur en à vue l'état et la position. Pour ce qui est de la cheminée, j'ai obtenu une lettre par ma compagnie d'assurance qui me confirme qu'aucune modification n'a été demandée afin de m'assurer conformément à leurs normes. Cette inspection comprenait la cheminée, les conduits d'aérations ainsi que le foyer. Je joins copie de celle-ci en annexe. » (sic)

[21]         Le 4 mars 2010, le demandeur dépose son action au greffe réclamant 3 306,21 $.

[22]         Le défendeur conteste aux motifs que les anomalies relevées étaient visibles au moment de la vente.

[23]         Le demandeur dépose la déclaration pour valoir témoignage de Michel Dufour, courtier immobilier qui déclare :

« Le 15 février 2009, je visite quelques propriétés avec mes clients « Madame […], St-Honoré.

Tout se déroule bien pendant la visite. Nous demandons au vendeur Monsieur Zoe Eggena Anfousse qui était présent lors de notre visite, si les installations bi-énergie (bois / électricité) étaient conformes, ainsi que la cheminée.

« Il nous a dit qu'il était en voie d'être inspecteur en bâtiment dans la région de Québec et que c'était pour cette raison qu'il déménageait ». Il nous a confirmé que les installations étaient conformes (dont cheminée 2100 0 F). Vers la fin de notre visite, il nous a dit que ce n'était qu'un chauffage d'appoint et qu'il ne s'en servait pas beaucoup.

Nous n'avions aucun doute sur la véracité de ses dires, il avait l'air honnête et de bonne foi. De plus, de par son futur travail, cela ne laissait planer aucune malhonnêteté.

Les clients acheteurs ont fait une offre d'achat le 15 février 2009 et la conclusion de l'offre a été acceptée le 17 février 2009. » (sic)

[24]         Le 26 septembre 2011, le défendeur appelle en garantie son vendeur Sylvain Rodrigue au motif suivant :

« Lors de l'achat de la résidence en décembre 2005, le système de chauffage était déjà en place. Ma compagnie d'assurance ne m'a exigé aucune modification. Lorsque j'ai vendu la propriété en mars 2009, le système de chauffage était le même que la journée de mon achat puisque je ne l'ai jamais modifié. C'est pourquoi j'appel en garantie la personne qui m'a vendu la propriété en 2005. » (sic)

ANALYSE ET MOTIFS

Demande principale

[25]         Le demandeur fonde sa réclamation sur l'article 1726 du Code civil du Québec qui édicte ce qui suit :

1726. « Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.

Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert. »

[26]         Pour réussir dans son action, le demandeur doit établir que le vice est antérieur à la vente, qu'il rend le bien vendu impropre à son usage ou en diminue considérablement l'utilité, que le vice ne pouvait être constaté par un acheteur prudent et diligent et qu'il était caché.

[27]         Premièrement, quant à l'existence du vice avant la vente, l'acheteur a le fardeau de prouver que le vice est antérieur à la vente. Toutefois, l'acheteur bénéficie d'une présomption de fait, notamment, s'il dénonce le vice après la délivrance du bien ou s'il prouve qu'il s'est manifesté peu après.

[28]         En l'espèce, le demandeur a pris possession de la maison le 24 avril 2009 et le 27 mai 2009, l'inspecteur de l'assurance leur apprend que la fournaise à combustion lente est affectée de certaines anomalies. Le demandeur bénéficie donc de cette présomption permettant de conclure que le vice existait lors de la vente.

[29]         Deuxièmement, le vice doit rendre le bien vendu impropre à l'usage auquel on le destine ou en diminuer sérieusement l'utilité. Autrement dit, le vice doit être important. En l'espèce, il s'agit d'un système de chauffage bi-énergie, fournaise qui peut être utilisée pour le chauffage au bois ou pour le chauffage électrique et la résidence possède aussi un système de chauffage secondaire par le biais de quelques plinthes électriques. La preuve établit que ce n'est que le chauffage au bois qui se trouve affecté.

[30]         Dans Bédard c. Rochon (C.Q.Q. 200-32-008847-963, 1997-02-21), la cheminée de la maison vendue était utilisée par les anciens propriétaires comme poêle à combustion lente qu'ils chauffaient occasionnellement. Subséquemment à la vente, les acheteurs apprennent que les assureurs sont devenus plus exigeants à cet égard et qu'une cheminée destinée à l'usage d'un poêle à combustion lente doit maintenant pouvoir supporter une chaleur de 2100 degrés au lieu de 1200 degrés. Dans ce cas, le tribunal considère qu'un accessoire important de la maison, soit la cheminée était affectée d'un vice caché d'une importance telle que les acheteurs n'auraient pas payé le prix exigé s'ils en avaient connu l'existence. On a jugé l'inverse dans Lefebvre c. Penaloza , C.Q. Trois-Rivières, 400-32-001536-965 , 1996-10-30). En l'espèce, bien que secondaire, l'acheteur s'attendait à bénéficier du chauffage au bois. Cette seconde condition est donc satisfaite.

[31]         Troisièmement, il faut rappeler que le régime juridique des garanties légales du vendeur ne constitue pas un système de protection de l'acheteur imprudent ou incompétent. L'acheteur a une obligation de prudence et de diligence lors de l'achat et il doit inspecter le bien comme le ferait toute personne raisonnable. Il a l'obligation de constater le vice apparent et doit apporter une attention particulière à tout indice pouvant laisser présager un vice quelconque.

[32]         La conduite de l'acheteur doit être examinée à la lumière des circonstances particulières à chaque espèce, notamment en fonction du statut du vendeur, de celui de l'acquéreur, de la nature, de l'âge et du prix du bâtiment ainsi que du type de vice dont il est affecté.

[33]         En l'espèce, il 'agit d'une maison de 50 ans, l'acheteur devait donc s'attendre à une bâtisse qui respecte les normes de l'époque et non les normes de 2009. La preuve indique qu'en 2006, les assureurs acceptaient ce type d'installation. Par ailleurs, l'expert Michel Nepton écrit dans son rapport « cette fournaise est très usée pour l'âge » (P-3). Il ne faudrait pas confondre vétusté et vice caché.

[34]         La vétusté n'est pas un vice caché. L'acheteur qui achète une fournaise et une cheminée qui a 50 ans d'âge ne peut après la vente demander que le vendeur lui paie une fournaise et une cheminée neuves.

[35]         Si l'acheteur néglige d'exécuter son obligation d'inspecter le bien acheté, le vice est alors considéré comme apparent. Un acheteur raisonnable aurait dû le découvrir et dans un tel cas, la garantie ne s'applique pas. Lorsque des indices d'un vice sont décelables, un acheteur prudent et diligent se doit de découvrir l'importance du problème dut-il recourir aux services d'un expert s'il ne peut y parvenir lui-même, sans quoi, il ne peut invoquer son ignorance. En l'espèce, l'inspecteur préachat Daniel Meredith avait recommandé au demandeur de consulter un technicien spécialisé ou le service des incendies.

[36]         Le 27 mai 2009, l'inspecteur de l'assureur, sans rien briser, seulement à la suite d'une inspection visuelle précise que le poêle à combustion lente doit reposer sur une base en matériaux incombustibles devant excéder l'avant de 18 pouces et de 8 pouces de chaque côté et à l'arrière. Il s'agit là non pas d'un vice caché, mais d'un vice apparent dont l'acheteur n'a pas su apprécier la gravité.

[37]         Le même inspecteur recommande de dégager les fils électriques des conduits de chaleur; que les matériaux combustibles situés près des conduits de distribution de chaleur soient protégés par des matériaux incombustibles. Encore là, il s'agit de vices apparents dont l'acheteur n'a pas apprécié la gravité.

[38]         L'acheteur qui n'a pas les connaissances requises pour juger de l'état d'un bien qu'il veut acquérir, doit s'assurer le concours d'une personne capable de le renseigner.

[39]         Les représentations du vendeur sur l'état du bien n'exemptent pas l'acheteur de son obligation d'agir en acheteur prudent et diligent. L'acheteur a une obligation accrue de prudence lorsqu'il acquiert une maison d'une cinquantaine d'années.

[40]         Il faut donc conclure que le demandeur n'a pas satisfait à cette troisième condition que le vice était caché. Il faut donc rejeter la réclamation (voir Brunette c. Harnois , AZ-50563416 ).

Demande en garantie

[41]         La demande principale étant rejetée, il faut aussi rejeter la demande en garantie.

[42]         PAR CES MOTIFS, LA COUR :

[43]         REJETTE la demande principale, chaque partie assumant ses frais judiciaires.

[44]         REJETTE la demande en garantie.

 

 

 

 

__________________________________

RAOUL P. BARBE, J.C.Q.

 

 

Date d'audience:

 12 octobre 2011