Lutzenkirchen c. Lessard (Étienne Lessard, courtier Re/Max)

2012 QCCQ 797

 

 

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

LOCALITÉ DE

QUÉBEC

« Chambre civile  »

 

N o  :

200-32-053912-118

 

DATE :

7 février 2012

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE ANDRÉ J. BROCHET, J.C.Q.  (JB3844)

 

 

FRIEDRICH LUTZENKIRCHEN , […], Québec (Québec) […]

 

Demandeur

c.

 

ÉTIENNE LESSARD , faisant affaires sous le nom de ÉTIENNE LESSARD, COURTIER RE/MAX , 3175, rue des Quatre-Bourgeois, Québec (Québec) G1W 2K7

 

Défendeur

 

 

JUGEMENT

 

[1]            La poursuite du demandeur, monsieur Friedrich Lutzenkirchen, contre le défendeur, monsieur Étienne Lessard, a trait à une somme de 10 943,75 $ qu'il a dû payer comme taxe sur les produits et services et taxe de vente du Québec lors de l'achat d'un terrain.

[2]            Monsieur Lessard, qui est le courtier immobilier ayant mandat de vendre ledit terrain, lui avait affirmé que prix de vente de 85 000 $ incluait les taxes.

[3]            La réclamation de monsieur Lutzenkirchen est réduite à 7 000 $ pour donner juridiction à la division des petites créances.

[4]            A-t-il raison de réclamer le remboursement de cette somme de monsieur Lessard?

[5]            C'est par un site Internet de vente de terrains que monsieur Lutzenkirchen apprend l'existence du mandat de monsieur Lessard à l'égard du terrain dont il s'agit. Le prix de vente affiché de ce terrain est de 91 000 $.

[6]            Quand monsieur Lutzenkirchen communique avec monsieur Lessard pour s'informer du meilleur prix possible, ce dernier lui affirme qu'en bas de 85 000 $, sa cliente ne vendra pas.

[7]            Il avance aussi à monsieur Lutzenkirchen qu'il n'y a pas de taxe sur les produits et services ni taxe de vente d'exigibles à l'égard de la transaction du terrain.

[8]            C'est dans ce contexte que le 24 septembre 2010, monsieur Lutzenkirchen accepte de signer une promesse d'achat du terrain pour 85 000 $, laquelle sera acceptée par la venderesse le 26 septembre suivant.

[9]             Le mandat de confection du contrat notarié est alors confié à une notaire référée par monsieur Lessard. Aussi, l'arpenteur-géomètre retenu pour la localisation du terrain est celui que recommande monsieur Lessard à monsieur Lutzenkirchen.

[10]         Ce dernier envisage l'autoconstruction de sa maison sur ce terrain et dès le 29 septembre 2010, il procède à acheter de la firme Dessins Drummond inc. des plans et dessins de la construction qu'il prévoit ériger.

[11]         Il faut souligner, suivant ce que nous dit monsieur Lessard, que les terrains sur lesquels des acheteurs peuvent s'autoconstruire sont très rares dans la région. En effet, la plupart des terrains disponibles sont vendus conjointement avec un contrat de construction d'un entrepreneur qui en est, soit directement ou indirectement, le propriétaire.

[12]         Alors qu'il revient de son voyage de chasse, le 11 octobre 2010, un rendez-vous ayant été fixé chez la notaire pour deux jours plus tard, monsieur Lutzenkirchen apprend de cette dernière qu'il devra payer des taxes sur le prix de vente totalisant 10 943,75 $. Il est alors surpris puisque monsieur Lessard lui avait affirmé qu'il n'y avait pas de taxes d'exigibles.

[13]         Il communique avec ce dernier, qui admet avoir commis une erreur puisqu'il croyait qu'une vente était possible sans paiement des taxes dont il s'agit.

[14]         Sans attendre, monsieur Lessard offre à monsieur Lutzenkirchen de se retirer de la vente, quitte à trouver un solide prétexte. Il lui offre aussi, sans préjudice ni admission, de lui payer 1 000 $ comme contribution au paiement des taxes additionnes exigées.

[15]         Monsieur Lutzenkirchen prétend s'être engagé pour près de 5 000 $ à ce moment-là. Des factures de plans pour plus de 1 000 $ ont été déposées. Aucune autre ne fut présentée au Tribunal.

[16]         Monsieur Lutzenkirchen refuse la proposition de monsieur Lessard et lui dit qu'il achètera le terrain en payant les taxes, mais qu'il le poursuivra par la suite pour les récupérer, considérant qu'il doit disposer d'une assurance responsabilité à ce sujet.

[17]         Dans un tel contexte, monsieur Lessard retire sa proposition qu'il lui avait antérieurement offerte de lui payer le montant de 1 000 $ de dommages.

[18]         Le 14 octobre 2010, l'acte de vente notarié se signe. Monsieur Lessard soulignera la cordialité qui existait au moment de cette transaction chez la notaire.

[19]         Cinq jours plus tard, le 19 octobre 2010, monsieur Lutzenkirchen met monsieur Lessard de lui payer la somme de 10 943,75 $.

[20]         Voici comment le Tribunal décidera du présent litige.

[21]         Il ne fait pas de doute que monsieur Lessard a commis une faute à l'égard de monsieur Lutzenkirchen en l'informant erronément de l'absence de taxes sur la transaction de 85 000 $, lors de la signature de la promesse d'achat.

[22]         Il s'agit d'une faute civile extracontractuelle qui l'oblige à payer les dommages qu'a pu avoir encourus monsieur Lutzenkirchen.

[23]         À ce sujet, ce dernier n'a pas convaincu le Tribunal qu'il ne se serait pas porté acquéreur du terrain, à supposer même qu'il eût su que les taxes s'ajoutaient au prix d'achat offert.

[24]         Le Tribunal est d'autre part convaincu qu'il aurait tenté une négociation qui aurait probablement abouti à un prix différent, mais à la conclusion d'une vente.

[25]         Il s'agissait d'un terrain qui lui permettait de construire lui-même sa maison, caractéristique très rare des terrains de la région.

[26]         Monsieur Lutzenkirchen a refusé catégoriquement de tenter de se sortir de cet achat. Du reste, il n'a pas établi avec monsieur Lessard le montant précis des dommages qu'il aurait à supporter s'il refusait de donner suite à la promesse d'achat à cause des taxes exigibles.

[27]         Le dommage qu'a subi monsieur Lutzenkirchen ne peut consister en la totalité des taxes qu'il dû payer. Usant de sa discrétion, le Tribunal ne lui en accordera qu'une partie, soit 25 % ou 2 735,93 $, puisqu'il est convaincu qu'il aurait fort probablement accepté de payer la différence des taxes exigibles s'il avait été informé en conséquence.

[28]         Le créancier d'une obligation a toujours l'obligation d'éviter d'aggraver un préjudice qu'il pouvait éviter (article 1479 C.c.Q.).

[29]         Le Tribunal considère que cette somme de 2  735,93 $ est à peu de choses près le montant des dommages directs causés à monsieur  Lutzenkirchen et qui lui étaient payables s'il mettait fin à la transaction après avoir appris que les taxes étaient exigibles.

[30]         C'est pourquoi cette somme lui sera accordée à titre de dommage puisque l'excédent fait partie du prix de son terrain, actif qui est à sa disposition et qui a une valeur dont il disposera un jour à un prix qui tiendra compte des taxes qu'il a payées.

[31]         Certes, décider a posteriori que le retrait de monsieur Lutzenkirchen de la transaction lui aurait coûté approximativement ce montant de dommage qui lui est accordé est établi après certaines assumations, par exemple, que la cliente de monsieur Lessard ou que monsieur Lessard acceptait de payer tous les autres frais possibles, ce qui n'a pas été comme tel établi. Mais le Tribunal considérerait injuste de lui faire supporter le paiement total des taxes, tout en tenant compte de la juridiction de la Cour des petites créances.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

CONDAMNE le défendeur, Étienne Lessard, faisant affaires sous le nom de Étienne Lessard, courtier RE/MAX, à payer au demandeur, monsieur Friedrich Lutzenkirchen, la somme de 2 735,93 $, avec l'intérêt au taux légal de 5 % l'an et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec , à compter du 19 octobre 2010.

AVEC FRAIS limités à la somme de 148 $.

 

 

 

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ANDRÉ J. BROCHET, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

31 janvier 2012