Lemay c. Société de transport de Montréal |
2012 QCCQ 1056 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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LOCALITÉ DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-125006-108 |
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DATE : |
20 février 2012 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
DANIEL DORTÉLUS |
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CAROLE LEMAY, |
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Demanderesse |
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c. |
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SOCIÉTÉ DE TRANSPORT DE MONTRÉAL, |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] La demanderesse poursuit la Société de transport de Montréal « STM » pour la somme de 2 840 $ à titre de dommages, résultant de la foulure de sa cheville droite, en empruntant l'escalier fixe pour se rendre à la plate-forme du métro Mont- Royal, le 2 juin 2010.
[2] Elle prétend que la foulure de sa cheville est causée par le manque d'entretien de l'escalier.
[3] La défenderesse, nie toute responsabilité. Elle conteste les faits de même que le quantum qui est amendé à la somme de 3 129 $ à l'audience.
1.1 Preuve en demande
[4] Le 2 juin 2010, la demanderesse se dirige vers la station de métro Mont-Royal vers 12h45. Les escaliers mécaniques étant hors fonction, elle emprunte l'escalier fixe pour descendre.
[5] Après avoir descendu deux marches, son pied droit s'est tourné vers l'intérieur. La demanderesse affirme que cet incident survient lorsqu'elle met son pied dans une « encaveuse » .
[6] Elle s'agrippe à la rampe. Par la suite, elle demeure assise par terre jusqu'à ce qu'un employé de la STM lui vienne en aide.
[7] Lorsque les ambulanciers arrivent, sa cheville est très enflée. Elle n'est pas transportée vers un centre hospitalier. Elle appelle son chiropraticien qui vient la rencontrer sur les lieux. Aidée de par ce dernier, elle marche pour se rendre à sa clinique située non loin d'une station de métro.
[8] Lors de sa chute, la demanderesse portait des sandales ouvertes.
[9] Elle a eu plusieurs traitements d'acupuncture au mois de juin, suivi par des traitements en ostéopathie qui se sont poursuivis jusqu'au mois d'octobre 2010.
[10] La demanderesse a produit une réclamation auprès de la STM au mois d'août 2010.
[11] Dans la mise en demeure datée du 16 août 2010, transmise à la STM, les détails de la réclamation de la demanderesse sont indiqués comme suit :
Dommages et intérêts moraux : Perte de jouissance, qualité de vie : Frais assurance, traitement et frais de transport : |
1 500 $ 1 000 $ 340 $ |
[12] La demanderesse produit en preuve une série de photos des marches de l'escalier ou est survenu l'incident.
1.2 Preuve en défense
[13] Monsieur Angelo Farano Prato Morneau est préposé aux réclamations à la STM. Il a traité le dossier de réclamation de la demanderesse.
[14] Il affirme que la STM n'a reçu q'une seule réclamation en 2010 pour la station de métro Mont-Royal, soit celle de la demanderesse.
[15] La défenderesse produit, par l'intermédiaire de ce témoin, le résumé d'intervention pour le mois de juin 2010 et le rapport statistique colligés par la STM pour les réclamations relatives au réseau du métro et le rapport d'achalandage pour la station de métro Mont-Royal.
[16] La défenderesse soulève que l'entretien de l'escalier n'est pas déficient, aucun problème relié à l'escalier en question lui a été rapporté. Elle souligne que plus de 13 000 personnes ont utilisé l'escalier le jour de l'accident
[17] Jusqu'à la fermeture du métro le 2 juin 2010, la seule chute rapportée est celle de la demanderesse.
2.1 Principes de droit applicable
[18] Le recours intenté par la demanderesse contre la STM est de nature extra contractuelle.
[19]
Les dispositions applicables
du Code civil du Québec
se
retrouvent à l’article
1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.
Elle est, lorsqu'elle est douée de raison et qu'elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu'elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu'il soit corporel, moral ou matériel.
Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait des biens qu'elle a sous sa garde [1] .
[20] L'application de l'article 1457 C.c.Q et les principes quant aux obligations du propriétaire d'un lieu public et de l'usager d'un tel lieu public sont bien résumés dans la cause Ouaknine c. Ivanhoe et Service d'entretien Distinction Inc . [2] , par l’honorable Danielle Grenier de la Cour supérieure :
Le propriétaire d'un centre commercial se doit d'agir avec une prudence raisonnable. Son obligation en est une de moyens qui varie en fonction des circonstances, des usages ou de la loi (1457 C.c.Q.). [3] Pour que la responsabilité soit retenue, il faut prouver une faute, un préjudice ainsi qu'un lien de causalité selon la balance des probabilités. Le critère pour juger de la faute est fondé sur l'agissement d'une personne raisonnablement prudente ou diligente. D'autres sous-critères s'y ajoutent :
a) cette personne doit être au courant de l'état dangereux des lieux;
b) le danger doit avoir été raisonnablement prévisible;
c) le danger doit avoir été raisonnablement impossible à prévenir. [4]
La jurisprudence rappelle aux intéressés que les propriétaires ou exploitants d'établissements publics ou commerciaux ne sont pas les assureurs des usagers qui fréquentent leurs immeubles. Ils doivent cependant prévenir les accidents normalement prévisibles. L'usager d'un lieu public, de son côté, doit se montrer raisonnablement prudent dans la situation où il se trouve engagé.
(Référence omise)
[21] Le fardeau de prouver que la STM ou ses employés, ou ses commettants, ont été négligents, appartient à la demanderesse. Ce principe est établi par la Cour suprême dans l'arrêt T. Eaton c. Moore [5] .
[22] C'est en appliquant ces principes que le Tribunal analyse les faits mis en preuve afin de déterminer si la responsabilité de la STM est engagée envers la demanderesse.
[23] Les photos produites en preuve laissent voir la présence de légères imperfections qui résultent de l'usure normale.
[24] Le Tribunal estime bien fondée la prétention de la défenderesse qu'il n'existe pas de pièges sur les escaliers en question, car les photos et le témoignage de la demanderesse ne permettent pas de tirer une telle conclusion. L'état des marches n'est pas dégradé au point de constituer une situation dangereuse.
[25] La preuve présentée n'établit pas que lors de la chute de la demanderesse, les marches de l'escalier en question sont laissées dans un état dangereux, dû à la négligence ou une quelconque défaillance dans le système d'entretien ou au manque de diligence raisonnable de la part de la STM ou de ses employés et commettants.
[26] Il n'y a pas de preuve que la STM n'a pas pris les précautions nécessaires pour empêcher la cause de la chute et les dommages subis par la demanderesse.
[27] Il ressort des rapports statistiques produits par la STM qu'il s'agit ici d'un cas isolé.
[28] Le Tribunal conclut que la demanderesse ne s'est pas déchargée de son fardeau de prouver que l'escalier était dans un état dangereux et que la STM a commis une faute pouvant engager sa responsabilité envers elle, en conséquence, son recours doit être rejeté.
[29] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[30] REJETTE la demande.
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__________________________________ DANIEL DORTÉLUS J.C.Q. |
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Date d’audience : |
14 février 2012 |
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[1] Code civil du Québec , L.Q., 1991, c. 64. art. 1457.
[2] Jacky Ouaknine c. Ivanhoe III Inc. et Ivanhoe Inc . c. Service d'entretien Distinction Inc ., C.S. Montréal, 500-05-044253-987, 20 janvier 2004, j. Grenier, paragr. 11 et 12.
[3]
Benoît-Gravel
c.
Montréal (Ville de)
,
[4] Payette c. Caisse populaire St-Jean-Bocso , C.S. Hull, 550-05-001766-925, 3.
[5] The T. Eaton Co. Limited of Canada c. Dame Lena Moore , [1951], R.C.S. 470 .