9134-5223 Québec inc. c. Tatti

2012 QCCQ 3219

   JG2338

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE VAUDREUIL-DORION

« Chambre civile »

N° :

760-32-014109-112

 

 

 

DATE :

Le 30 avril 2012

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

 CÉLINE GERVAIS, J.C.Q

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9134-5223 QUÉBEC INC.

Demanderesse - défenderesse reconventionnelle

 

c.

 

SYLVIE TATTI

Défenderesse - demanderesse reconventionnelle

 

 

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JUGEMENT

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[1]            Il s'agit d'un litige né dans le contexte des rénovations de la maison de Sylvie Tatti, qui ont été effectuées par 9134-5223 Québec Inc. (ci-après Maisons Bella).  Maisons Bella réclame le solde dû pour les travaux effectués, qui s'élève à 13 032,82 $, mais qu'elle accepte de réduire au montant de 7000 $ pour pouvoir présenter sa demande en division des petites créances.  Madame Tatti présente une demande reconventionnelle de 8 000 $ représentant le montant déjà versé à Maisons Bella, qu'elle accepte aussi de réduire à 7000 $ pour demeurer dans le cadre de la juridiction des petites créances.

LES FAITS :

[2]            Pour ce qui est de la chronologie des faits, le Tribunal s'appuiera sur le témoignage de Mme Tatti et sur le document de résumé qu'elle a préparé [1] , son témoignage à ce sujet étant beaucoup plus précis que celui du représentant de Maisons Bella, M. Paul Cressaty.

[3]            Le 25 avril 2009, une première rencontre a lieu entre Mme Tatti et son conjoint et M. Cressaty quant au projet de rénovation de leur maison située sur le chemin St-Thomas à Rigaud.  Le projet comprend trois volets: la démolition du garage existant et la construction d'un nouveau garage de 20 pieds par 24 pieds à côté de la maison, mais détaché de celle-ci; la construction d'un balcon (deck) de 25 pieds par 14 pieds à l'arrière de la maison; la réfection de la salle de bain.

[4]            Un contrat est signé par les parties le 19 juin 2009 pour un montant total de 17 250 $ plus taxes, réparti ainsi : 3700 $ pour la salle de bain; 10 600 $ pour le garage; 2950 $ pour le balcon. [2]

[5]            Les travaux ont débuté le 1 er juillet 2009, par la démolition du garage et la préparation de la nouvelle dalle de ciment.

[6]            Le 8 juillet, Maisons Bella réclamait un acompte pour couvrir le coût des matériaux achetés et des travaux déjà effectués.  Madame Tatti lui verse 8000 $ le 17 juillet 2009.  Les travaux pour le balcon débutent le lendemain.

[7]            Le 23 juillet suivant, Mme Tatti reçoit livraison des fermes de toit du garage, qui sont installées le 3 août.  Le lendemain, les travaux dans la salle de bain débutent.

[8]            Madame Tatti fait état des nombreux retards et problèmes encourus dans le cadre de ce chantier.  Le 24 août 2009, elle informe Maisons Bella de la résiliation du contrat et lui transmet une mise en demeure à cet effet le lendemain [3] .

[9]            Par sa demande reconventionnelle, Mme Tatti prétend qu'elle ne devrait rien payer à Maisons Bella relativement à l'ensemble du contrat.  Elle soutient avoir dû verser 20 000 $ à un autre entrepreneur pour corriger et compléter les travaux mal faits par Maisons Bella.

[10]         Dans la mesure où la preuve a démontré qu'une certaine quantité de travaux a déjà été effectuée par Maisons Bella, le Tribunal devra déterminer la qualité des travaux effectués pour décider si un solde est dû.  Le Tribunal y procédera pour chacun des trois volets du projet.

ANALYSE ET DÉCISION :

[11]         Ce sont les articles 2125 et 2129 du Code civil du Québec qui déterminent les obligations des parties en cas de résiliation d'un contrat d'entreprise :

2125.   Le client peut, unilatéralement, résilier le contrat, quoique la réalisation de l'ouvrage ou la prestation du service ait déjà été entreprise.

 

2129.   Le client est tenu, lors de la résiliation du contrat, de payer à l'entrepreneur ou au prestataire de services, en proportion du prix convenu, les frais et dépenses actuelles, la valeur des travaux exécutés avant la fin du contrat ou avant la notification de la résiliation, ainsi que, le cas échéant, la valeur des biens fournis, lorsque ceux-ci peuvent lui être remis et qu'il peut les utiliser.

L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, pour sa part, de restituer les avances qu'il a reçues en excédent de ce qu'il a gagné.

Dans l'un et l'autre cas, chacune des parties est aussi tenue de tout autre préjudice que l'autre partie a pu subir.

 

Le balcon :

[12]         Le contrat intervenu entre les parties prévoyait qu'une somme de 2950 $ plus taxes serait facturée pour la construction du balcon.  Dans sa réclamation, tel qu'il appert à l'état de compte [4] , Maisons Bella réclame 2800 $ plus taxes.

[13]         Maisons Bella prétend qu'elle a fait le plancher du balcon et qu'il n'y manquait que trois planches et un garde-corps.  Madame Tatti pour sa part indique qu'elle a dû obtenir un deuxième devis en août 2009 pour faire refaire des travaux puisque le balcon n'était pas attaché à la maison et était instable.

[14]         Son témoin, l'entrepreneur André Castonguay, a indiqué au Tribunal qu'il avait dû refaire le balcon parce qu'il n'était pas solide.  Il dit que son entreprise a travaillé pendant trois jours à raison de deux ouvriers, pour un total de 48 heures.  Aucune facture n'a été produite pour établir le montant qui a ainsi été facturé, puisque les travaux au balcon ne semblent pas être inclus dans la pièce D-6.1, soit le contrat intervenu entre Mme Tatti et M. Castonguay pour la rénovation de la salle de bain et du garage.

[15]         Comme ce contrat prévoit un taux horaire de 35 $, c'est à ce taux que les travaux effectués par M. Castonguay pendant 48 heures seront calculés, et le Tribunal alloue à Mme Tatti une somme de 1680 $ pour faire refaire les travaux relatifs au balcon.

[16]         En effet, selon la photo produite comme pièce D-7.15, à sa face même, les quatre poteaux soutenant le toit au dessus du balcon n'apparaissent ni solides ni conformes aux règles de l'art.

[17]         Maisons Bella, ayant quand même effectué du travail pour la construction du balcon, a droit à la somme de 1120 $ (2800 $ moins 1680 $).

La salle de bain :

[18]         Le contrat prévoyait un montant de 3700 $ plus taxes pour la rénovation de la salle de bain [5] .  Dans son état de compte, Maisons Bella réclame la somme de 3750 $ plus taxes.

[19]         Au contrat initial, il était prévu que les travaux suivants devaient être effectués:

"Doubling plywood floor

Install ceramic shower with plastic base

Tile floor and ceramic shower walls

Boxing in the ceiling and vent

Gyproc the rest of bathroom

Plaster the whole bathroom

Install new toilet (toilet not included in price)

Install cabinet, counter and sink (cabinet, counter and sink not included in price)

Install plumbing fixture for shower (plumbing fixture not including in price)

Install lighting fixture (lighting fixture not included in price)"

 

[20]         La réclamation inclut des frais de plomberie de 950 $ et des coûts pour la démolition de 2800 $.

[21]         Madame Tatti et son conjoint avaient déjà défait une partie de la salle de bain, n'y conservant que la douche, la toilette et le lavabo.  Madame Tatti indique dans son témoignage que deux ouvriers ont travaillé pendant 2 heures le 4 août pour défaire les installations restantes.  Le plombier mandaté par Maisons Bella s'est présenté avec un ouvrier pendant 2 heures le 10 août 2009.  Aucun autre travail n'a été effectué par Maisons Bella dans la salle de bain.

[22]         Le principal reproche de Mme Tatti, qui a certainement contribué à sa décision de résilier le contrat, est le fait qu'elle et sa famille ont été laissées sans salle de bain utilisable pendant trois semaines.

[23]         Maisons Bella dit avoir ignoré que c'était la seule salle de bain de la maison.  Cette excuse ne tient pas.  Il n'est pas normal que le représentant de Maisons Bella n'ait pas remarqué ce fait lors de sa visite de la maison pour l'évaluation des travaux, ou qu'il ne se soit pas enquis de la situation.

[24]         Les seules mentions contenues à l'état de compte relativement aux travaux effectués à la salle de bain sont les suivantes :

-        Demolish and dispose of entire bathroom

-        Install rough plumbing.

 

[25]         Il est inconcevable que Maisons Bella réclame le même montant que celui qui était prévu au contrat pour avoir seulement démoli la salle de bain.

[26]         Ce montant inclut cependant une somme de 950 $ payée au plombier; à l'audience, le représentant de Maisons Bella a indiqué qu'il s'agissait de Plomberie Rigaud, mais n'a pas été en mesure de produire une facture pour démontrer le paiement.  Cette réclamation ne peut donc être accordée, faute de preuve.

[27]         Quant à la somme réclamée de 2800 $ pour la démolition de la salle de bain, le Tribunal la considère grossièrement exagérée et la réduit à la somme de 300 $.

Le garage :

[28]         Le contrat initial prévoyait un montant de 10 600 $ pour la démolition et la construction du nouveau garage, ce montant ne comprenant pas les coûts de la finition extérieure.

[29]         Maisons Bella réclame 12 525 $ pour les travaux faits au garage.  Une première somme de 7800 $ est demandée pour la démolition et la construction, à laquelle on ajoute des frais de 4725 $ pour l'installation de cinq fenêtres qui ont été fournies par Maisons Bella.

[30]         Plusieurs problèmes ont eu lieu lors de la construction du garage.  Les témoignages sont contradictoires quant à la question des fermes de toit.  Madame Tatti prétend qu'elles ont été commandées en ne respectant pas les plans et devis et que la construction du garage n'a pas été faite selon le devis initial.  De plus, quelques semaines se sont écoulées entre la construction de la structure et l'arrivée des fermes de toit, ce qui aurait occasionné certains dommages à l'isolation à cause de la pluie qui est survenue dans l'intervalle.

[31]         Un autre problème est survenu à cause d'un câble électrique qui se rendait de l'intérieur vers l'extérieur du garage et qui passait à travers une porte.  Enfin, la dalle de béton a été mal coulée et a dû être recommencée, vu qu'elle était inégale.  Les photos produites en ce sens sont éloquentes.

[32]         L'entrepreneur, André Castonguay, qui a témoigné pour Mme Tatti a indiqué au Tribunal qu'un coût de 1500 $ avait dû être encouru pour corriger les défectuosités constatées dans la construction du garage.

[33]         Dans la mesure où l'ancien garage a été démoli par Maisons Bella et qu'une nouvelle structure a été construite, Maisons Bella doit être payée pour le travail effectué, sous réserve des déficiences observées.  Sur une somme réclamée de 7800 $, elle aura donc droit à un montant de 6300 $.

[34]         Par ailleurs, le Tribunal s'explique difficilement comment Maisons Bella peut facturer 4725 $ pour quatre fenêtres (selon le témoignage de Mme Tatti et de M. Castonguay).  Il est vrai que ces fenêtres ont été fournies par Maisons Bella, mais encore une fois, aucune facture n'a été produite au Tribunal pour expliquer le fondement d'une réclamation si élevée.  Faute de preuve, elle est donc rejetée.

[35]         Considérant tout ce qui précède, Maisons Bella n'aura droit qu'à un montant global de 7720 $ pour tout le travail effectué chez Mme Tatti.  Comme cette dernière a déjà versé une somme de 8000 $, elle a droit à un remboursement de 280 $.

[36]         L'action réclamant le solde dû sur le contrat de construction est donc rejetée, et la demande reconventionnelle est accueillie en partie pour un montant de 280 $.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

REJETTE la demande principale;

ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle;

CONDAMNE la demanderesse, 9134-5223 Québec Inc., à payer à la défenderesse, Sylvie Tatti, la somme de 280 $, en plus des intérêts au taux légal et de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec depuis le 25 août 2009, date de la mise en demeure;

LE TOUT avec les frais judiciaires de 225 $.

 

 

 

 

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CÉLINE GERVAIS, J.C.Q.

 

 

 



[1]     Pièce D-10.

[2]     Pièce D-2.1.

[3]     Pièce D-4.1.

[4]     Pièce P-2.

[5]     Pièce D-2.1.