Michaud c. Authier

2012 QCCA 1013

 

COUR D'APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE MONTRÉAL

 

N o :

500-09-021047-105

 

540-22-010427-069

 

 

PROCÈS-VERBAL D'AUDIENCE

 

 

DATE:

1 er juin 2012

 

CORAM:   LES HONORABLES

ALLAN R. HILTON, J.C.A.

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

JACQUES R. FOURNIER, J.C.A.

 

APPELANTS

AVOCAT(S)

DANIELLE MICHAUD

DENIS VILLENEUVE

Me Geneviève Pilon

DUFRESNE, HÉBERT, COMEAU

 

 

 

INTIMÉS

AVOCAT(S)

MICHEL AUTHIER

MARIELLE CLÉMENT

 

MÉLANIE ST-ONGE

ÉRIC DERIX

 

 

Me Richard Thivierge

CHARTIER, THIVIERGE, DOLBEC

 

Me Claude Coursol (absent)

CLAUDE COURSOL AVOCAT

 

 

INTIMÉE

AVOCAT(S)

LE TRAITEMENT DES FENÊTRES DE LAVAL INC.

Me Pierre Viau (absent)

GREENSPOON PERREAULT

 

 

En appel d'un jugement rendu le 3 septembre 2010 par l'honorable Micheline Sasseville de la Cour du Québec, district de Laval.

 

NATURE DE L'APPEL :

Vente - vices cachés

 

Greffière: Marcelle Desmarais

Salle: Antonio-Lamer

 

 

AUDITION

 

 

9 h 31 Argumentation par Me Geneviève Pilon.

9 h 43 Argumentation par Me Richard Thivierge.

9 h 51 Fin de l'argumentation de part et d'autre.

9 h 51 Suspension de la séance.

9 h 55 Reprise de la séance.

PAR LA COUR:

Arrêt - voir page 3.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Marcelle Desmarais

Greffière d'audience

 


PAR LA COUR

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           Les appelants qui étaient défendeurs principaux et demandeurs en garantie en première instance se pourvoient à l'encontre d'un jugement rendu le 3 septembre 2010 par la Cour du Québec, district de Laval (l'honorable Micheline Sasseville), qui rejette leur action en garantie contre les intimés de qui ils réclamaient d'être indemnisés de la condamnation prononcée contre eux. L'action principale et l'action en garantie sont fondées sur la garantie de qualité.

LES FAITS

[2]           En 1988, les intimés ont acheté un immeuble en bordure de la Rivière-des-Prairies. Il s'agissait alors d'un chalet qui a été transformé en résidence principale à la suite d'importants travaux de rénovation, dont la construction d'une verrière. Les travaux de la verrière sont exécutés par l'intimé Authier personnellement bien que la fondation ait été coulée par un professionnel. Les travaux ont été approuvés par les autorités municipales. Selon la preuve, les intimés ont toujours entretenu la verrière et accordé une attention particulière au calfeutrage des fenêtres.

[3]           L'immeuble est vendu aux appelants en 1997 et le rapport d'inspection qu'ils ont obtenu ne révèle aucune anomalie pertinente aux faits du présent litige.

[4]           En 2000, les appelants entreprennent des travaux et font remplacer les fenêtres de la verrière par un entrepreneur spécialisé. Lors de l'installation, l'entrepreneur constate la pourriture des meneaux, les barres qui séparent les fenêtres. Il ne s'en préoccupe pas outre mesure et les remplace sans en faire mention à ses clients, les appelants, et sans facturation additionnelle.

[5]           De 1997 à 2003, les appelants ne constatent aucune infiltration d'eau.

[6]           En 2003, l'immeuble est vendu aux demandeurs principaux qui entreprennent des travaux de rénovation. En enlevant les plinthes de la verrière, ils voient des traces de pourriture. Ils poussent l'examen et constatent que les solives du plancher sont pourries et que la verrière est en mauvaise état.

[7]           Des mises en demeure sont envoyées en temps utile et les appelants nient toute responsabilité.

[8]           L'action est prise en 2006. Les appelants forment alors un recours en garantie contre les intimés et l'entrepreneur qui a remplacé les fenêtres de la verrière.

[9]           Le procès se tient devant la Cour du Québec. L'ingénieur, René Vincent, témoigne sur l'étendue des dommages. L'ingénieur, André Morel, qui est entendu à la demande des appelants estime que la cause probable des dégâts est une infiltration d'eau. Il ne se prononce pas sur son origine. Enfin, l'expert des intimés, l'architecte Réal Thivierge, considère que la construction respecte les règles de l'art et que la pourriture est la conséquence d'une infiltration d'eau consécutive, à un manque d'entretien.

[10]        Après une analyse de la preuve, la juge de première instance identifie les conditions d'application de la garantie de qualité prévue au Code civil du Québec . Elle conclut que le vice en question est grave, inconnu des acheteurs et qu'il y a eu dénonciation en temps opportun. Pour elle, ces questions [1] ne soulèvent aucun débat.

[11]        Ensuite, elle considère que la preuve ne permet pas de conclure au défaut d'entretien du bien par les demandeurs, c'est-à-dire la partie ayant acheté l'immeuble en 2003. Elle conclut au caractère caché du vice.

[12]        Pour elle, les enjeux véritables portent sur l'étendue des dommages et sur leur origine.

[13]        La juge indique d'abord que les appelants sont débiteurs de l'obligation de garantie de qualité. Leur bonne foi n'étant pas mise en question, il n'y a pas ouverture à des dommages-intérêts.

[14]        Son examen porte alors sur la question de l'antériorité du vice. Elle retient des expertises que le vice résulte d'une infiltration d'eau ayant eu cours sur une « période plus ou moins longue, mais significative, compte tenu de l'ampleur des dommages. [2] » Elle conclut que les causes les plus probables des dommages précèdent la vente de 2003 [3] . Elle retient la responsabilité des appelants à titre de vendeurs d'un bien affecté d'un vice caché au moment de la vente et les condamne à payer une somme de 21 189,83 $, soit la moitié des coûts d'installation d'une nouvelle verrière. Elle considère que les demandeurs principaux ayant amélioré leur sort, il y a lieu d'appliquer aux coûts de réfection, un facteur d'amortissement de 50 %.

[15]        Se prononçant sur la demande en garantie, la juge conclut qu'aucune preuve ne permet de retenir la responsabilité des intimés [4] .

[16]        Estimant qu'aucun vice de construction n'est ni allégué ni prouvé, elle conclut que rien ne permet d'établir l'existence du vice lors de la vente de 1997. Cette partie du jugement fait l'objet de l'appel.

[17]        La position des appelants est simple. Si les conditions existaient en 2003 au moment où ils ont vendu, elles existaient en 1997 au moment où ils ont acheté.

[18]        Pour les intimés, la preuve ne démontrant pas de vice de construction, leur responsabilité ne peut être recherchée. Ensuite, ils estiment que les travaux de 2000 sur les fenêtres de la verrière viennent rompre le lien de causalité en ce que les travaux ont modifié une partie importante de la structure qu'ils avaient mise en place. Enfin, ils plaident que la preuve ne permet pas d'établir que le vice était antérieur à 1997.

[19]        Le dossier ne permet pas d'établir la cause du vice. Le degré d'avancement de la pourriture amène la juge à conclure, par présomption de fait, que la cause de la pourriture existait en 2003. Par contre, l'écoulement du temps et l'exécution de travaux en 2000 sont des éléments qui viennent estomper le caractère précis et concordant requis pour pouvoir à partir de faits connus conclure selon la balance de probabilités à l'existence d'un vice caché en 1997.

[20]        S'agissant d'une présomption de fait qui n'est pas établie par la loi, elle est régie par l'article 2849 C.c.Q.  :

2849. Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi sont laissées à l'appréciation du tribunal qui ne doit prendre en considération que celles qui sont graves, précises et concordantes.

[21]        Le texte de l'article réfère à l'appréciation du tribunal. S'impose alors la règle qui veut que les tribunaux d'appel s'abstiennent en l'absence de la démonstration d'une erreur manifeste et dominante d'intervenir sur les déterminations des faits par un juge d'instance [5]

[22]        Les appelants n'ont pas fait la démonstration d'une telle erreur.

[23]        En conséquence, l'appel est rejeté avec dépens.

 

 

 

 

 

ALLAN R. HILTON, J.C.A.

 

 

 

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

 

 

 

JACQUES R. FOURNIER, J.C.A.

 

 



[1]     Jugement dont appel, paragr. 76.

[2]     Ibid., paragr. 85.

[3]     Ibid., paragr. 86.

[4]     Ibid ., paragr. 90.

[5]     Housen c. Nikolaisan [2002] 2 R.C.S. 235 .