Rodrigue c. Pinet |
2012 QCCQ 4773 |
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JD2273
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« Division administrative et d’appel » |
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Canada |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
Montréal |
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LOCALITÉ DE |
Montréal |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-80-011678-084 |
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DATE : |
13 juin 2012 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE DANIEL DORTÉLUS |
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Sylvain rodrigue |
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Appelant |
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c. |
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JULIE PINET , ès qualités de syndique de l'Organisme d'Autoréglementation du Courtage Immobilier du Québec «oaciq» |
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Intimée en reprise d'instance |
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et |
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Comité de discipline de l'organisme d'autorÉglementation du courtage immobilier du québec «oaciq» |
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Mis-en-cause |
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JUGEMENT |
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[1] Initialement, cette Cour était saisie de l’appel de deux décisions rendues les 21 février et 14 juillet 2008, respectivement sur culpabilité et sanction par le Comité de discipline de l’Association des courtiers et agents immobiliers du Québec (ci-après désigné «le Comité») composé de M e Gilles Duchesne, président, de Monsieur René Morrow et de Monsieur Carlos Ruiz, à titre de membre.
[2] Dans un jugement rendu le 30 juillet 2009, la Cour du Québec accueille l'appel, infirme la décision sur culpabilité rendue le 21 février 2008, acquitte l'appelant à l’égard des infractions reprochées. Vu la décision sur culpabilité, la décision sur sanction rendue le 14 juillet 2008 est aussi infirmée.
[3] L'Appelant a interjeté appel du jugement devant la Cour d'appel.
[4] Le 25 mars 2011, la Cour d'appel dispose de l'appel en ces termes:
· ACCUEILLE l’appel;
· INFIRME le jugement du 30 juillet 2009;
· CONFIRME la décision sur culpabilité rendue par le Comité de discipline le 21 février 2008;
· RETOURNE le dossier à la Cour du Québec pour qu’elle statue sur l’appel de l’intimé de la décision sur sanction prononcée par le Comité de discipline le 14 juillet 2008;
[5] Le chef d'infraction n o 1 décrit les actes dérogatoires qui sont reprochés à l'Appelant en ces termes :
« 1. De 2004 à 2006, concernant différents immeubles situés dans la grande région de Montréal, notamment :
a) 2620 Des Prairies, Brossard;
b) 5270 Terrasse Beaudry, St-Hubert;
c) 200 rue Jacques Cartier, Longueuil;
d) 290 rue Jacques Cartier, Longueuil,
e) 303 rue Jacques Cartier, Longueuil;
e) 6105 rue Brodeur, Brossard;
f) 450 Place Vimy, Brossard;
g) 990 rue Simon, Brossard;
h) 5465 rue Bernier, St-Hubert;
i) 5260 rue Redmond, Longueuil;
(Collectivement désignés « 10 immeubles »)
l’intimé n’a pas fait preuve de probité, a posé des actes dérogatoires à l’honneur et à la dignité de la profession, a participé à des actes ou pratiques en matière immobilière qui peuvent être illégaux ou qui peuvent porter préjudice au public ou à la profession notamment en agissant, à titre d’agent inscripteur, pour la revente de ces 10 immeubles, alors qu’il savait ou aurait dû savoir que ceux-ci avaient été utilisés pour la culture de cannabis et
a) sans prendre les moyens nécessaires pour que cette information soit dûment portée en temps opportun à la connaissance de tout acheteur pressenti et/ou;
b) en n’informant pas en temps opportun les acheteurs pressentis ou l’agent immobilier qui les représentait que l’immeuble avait été utilisé pour la culture de cannabis, exception faite du 200 rue Jacques Cartier, Longueuil et/ou;
c) en laissant les acheteurs pressentis signer l’acte de vente de ces immeubles sans divulguer ce fait, exception faite du 200 rue Jacques Cartier, Longueuil;
le tout contrairement aux articles 1 et 13 des Règles de déontologie de l’Association des courtiers et agents immobiliers du Québec. » (sic) (Nous avons souligné et mis en caractères gras). »
{sic}
[6] Après six jours d'audition, le Comité déclare l'Appelant coupable à l'égard des alinéas a), d), e), f), i) et j) du chef 1 de la plainte.
[7] Le Comité a aussi déclaré l'Appelant coupable à l'égard du chef 6 de la plainte qui est libellé comme suit :
« À Brossard, le ou vers le 27 octobre 2006, l’intimé a fait de fausses déclarations lorsqu’il a fourni des renseignements ou des documents lors d’une enquête tenue par le syndic Hélène Morand, notamment en déclarant à Julie Pinet, enquêteur :
a)[…];
b)que jamais il n’avait été prévenu que la propriété du 1590, Du Portage à Laval, avait servi à la culture de cannabis;
le tout contrairement à l’article 55 des Règles de déontologie de l’Association des courtiers et agents immobiliers du Québec ».
[8] Dans sa décision sur sanction redue le 14 juillet 2008, le Comité impose à l'appelant les sanctions qui suivent :
«
ORDONNE, pour tenir compte séparément des chefs 1 a), 1 d), 1 e), 1 f),
1 i) et 1 j), la suspension du certificat d’agent immobilier affilié de
l’intimé (B0996) pour six périodes concurrentes de neuf mois chacune, à compter
de l’expiration du délai d’appel, avec interdiction à l’intimé d’en demander la
reprise d’effet ou la délivrance de toute catégorie de certificat avant la fin
de cette période;
ORDONNE que ces six périodes concurrentes de neuf mois soient réduites
globalement de la période de trois semaines que l’intimé a déjà purgée à la
suite de l’ordonnance de suspension provisoire;
IMPOSE à l’intimé, à l’égard du chef 2, le paiement d’une amende de 1 200 $;
IMPOSE à l’intimé, à l’égard du chef 3, le paiement d’une amende de 1 200 $;
IMPOSE à l’intimé, à l’égard du chef 4, le paiement d’une amende de 1 200 $;
IMPOSE à l’intimé, à l’égard du chef 5, le paiement d’une amende de 1 200 $;
ORDONNE, à l’égard du chef 6, la suspension du certificat du certificat d’agent
immobilier affilié de l’intimé (B0996) pour une période consécutive d’un mois à
compter de l’expiration du délai d’appel, avec interdiction à l’intimé d’en
demander la reprise d’effet ou la délivrance de toute catégorie de certificat avant
la fin de cette période;
DISPENSE la secrétaire du comité de discipline de faire publier avis de la
présente décision de suspension dans un journal local;
RECOMMANDE au conseil d’administration de l’ACAIQ d’exiger de l’intimé, comme
condition du renouvellement de son certificat au 31 décembre 2009, qu’il ait
suivi avec succès auprès d’une institution reconnue le cours de quarante-cinq
heures intitulé « Rédaction de contrats et documents relatifs à
l’immobilier » et le cours de quarante-cinq heures intitulé « Loi sur
le courtage immobilier et ses règlements »;
ORDONNE que les dépens de l’instance, incluant les dépens d’expertise, soient à
charge de l’intimé.»
1. Moyens d'appel et questions soulevées par l'Appelant
[9] L'Appelant formule les questions qu'il soumet à cette Cour, en ces termes :
Le Comité de discipline a-t-il commis une erreur déraisonnable en imposant une sanction trop sévère pour chacun des chefs d’infraction 1a), d), e), f), j) et i) ?
Le Comité de discipline a-t-il commis une erreur déraisonnable en imposant à l’Appelant une sanction trop sévère pour le chef d’infraction 6 ? »
[10] Dans sa plaidoirie, lors de l'audition de l'appel, l'appelant soulève que la décision est inintelligible, l'analyse ne motive pas entre autre pourquoi une suspension si sévère de neuf mois doit être imposée pour les infractions du chef 1 de la plainte.
2. le Contexte
[11] Le Tribunal estime utile de reproduire ici la trame factuelle décrite aux paragraphes 8 à 31 du jugement du 30 juillet 2009 :
«II - le contexte factuel et procédural
[8] L'Appelant est un agent immobilier affilié, membre de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, l'ACAIQ, depuis 1995. Il est inscrit dans le système SIM-MLS. Il mène, en général, ses opérations principalement sur la Rive-Sud de Montréal. Les inscriptions à l'extérieur de ce secteur représentent un faible pourcentage de sa clientèle.
[9] Il participe, en moyenne, à la vente d'une centaine de propriétés par année.
[10] Il n'a aucun antécédent disciplinaire et n'a fait l'objet d'aucune enquête du Syndic avant le présent dossier.
A) l'enquête menée par le bureau du syndic de l'acaiq
[11] Madame Julie Pinet, est l’enquêtrice qui a piloté le dossier pour le bureau du Syndic de l'ACAIQ. Elle débute une enquête, au mois de juin 2006, après avoir obtenu l'information, au mois d'octobre 2005, que l'Appelant a agi à titre d'agent-vendeur pour trois propriétés qui auraient servi à la culture de cannabis sans le déclarer.
[12] Dans le cadre d’une recherche qui a duré un mois, madame Pinet a procédé à établir une liste de propriétés qui ont été vendues par l'intermédiaire de l'Appelant.
[13] Elle a, entre autres, obtenu le registre des transactions de l'Appelant chez Sutton, elle a identifié les propriétés de type plein-pieds ou bungalows vendues par l'Appelant.
[14] Dans le cadre de son enquête, madame Pinet a communiqué avec différents services de police pour s'enquérir si les propriétés, vendues par l'Appelant, ont fait l'objet de perquisition.
[15] Elle a obtenu des informations des services de police et elle a visité plusieurs palais de justice pour consulter les dossiers de Cour.
[16] Elle a également rencontré et questionné plusieurs personnes dans le cadre de son enquête.
[17] Elle a rencontré l'Appelant dans le cadre de son enquête, celui-ci a nié avoir su que les propriétés avaient servi à la culture de cannabis quand il a agi à titre d'agent pour les différents vendeurs.
[18] L'Appelant n'a pas été informé par les autorités policières que les immeubles mis en vente ont fait l'objet de perquisition en raison de la présence de culture de cannabis.
[19] Le 4 avril 2007, le bureau du Syndic de l'ACAIQ signifie une plainte disciplinaire à l’Appelant, lui reprochant certains manquements dans le cadre de transactions pour la vente de plusieurs immeubles entre 2003 et février 2006, qui iraient à l'encontre des articles 1, 13, 22 et 55 des Règles de déontologie de l'ACAIQ .
[20] La plainte disciplinaire comprenait six chefs d'infractions. Il est reproché à l'Appelant, aux chefs d'infractions 2 à 5, d'avoir obtenu seulement la signature d'un des deux promettants-vendeurs sur des formulaires et contrat pour quatre ventes intervenues entre novembre 2003 et juin 2004. l'Appelant a plaidé coupable sur ces chefs, et n'en appelle pas de la décision sur sanction relative à ces chefs pour lesquels une amende de 1 000 $ dollars par chef lui a été imposée par le Comité de discipline.
[21] En ce qui concerne le chef d'infraction 6, le Comité a retenu que l'Appelant a fait une fausse déclaration à l'enquêtrice, Julie Pinet, lors d'une rencontre le 27 octobre 2006.
[22] Pour six des dix propriétés visées par le chef 1 de la plainte, le Comité de discipline estime que l'Appelant ne savait pas, pour aucune de ces six propriétés, qu'il y avait eu antérieurement culture de cannabis. Cependant, le Comité a décidé que l'Appelant aurait dû savoir qu'il y avait de la culture de cannabis dans ces propriétés.
[23] Le Comité a ordonné la suspension de son certificat d'agent immobilier affilié pour six périodes concurrentes de neuf mois chacune à compter de l'expiration du délai d'appel, moins la période de trois semaines que l'Appelant a déjà purgées à la suite de l'ordonnance de suspension provisoire rendue par le Comité de discipline, le 6 juin 2007.
[24] L'Appelant nie qu'il savait ou qu'il aurait dû savoir, au moment où il a participé à la vente des propriétés visées au chef 1 de la plainte, qu'il y avait eu de la culture de cannabis dans six propriétés.
B) ordonnance de suspension provisoire
[25] La plainte est assortie d’une requête pour l’émission d’une ordonnance de suspension provisoire du certificat de l’Appelant, que l'Intimée lui signifie le 4 avril 2007.
[26] Dans la requête, l'Intimé allègue, entre autres, aux paragraphes 11 et 12 :
« 11. L'Intimé dans le cadre de sa profession, a prêté son concours et utiliser son statut de membre pour permettre la revente des immeubles ayant servi à la culture de cannabis, sans rien divulguer;
12. L'Intimé a donc pris part à des activités à caractères malhonnête, frauduleux et criminel, démontrant clairement un manque d'intégrité professionnel et une conduite répréhensible totalement inadmissible; »
[27] Le 6 juin, le Comité de discipline ordonnait la suspension provisoire du certificat d'agent immobilier affilié de l'Appelant jusqu'à ce que jugement final intervienne sur la plainte disciplinaire.
[28] L'Appelant s'est adressé à la Cour du Québec pour obtenir la suspension de l'exécution de la décision du Comité qui ordonnait la suspension provisoire de son certificat d'agent immobilier.
[29] Le 28 juin 2007, l'honorable Gilles Lachance, de la Cour du Québec, accueille la requête en suspension de l'exécution de la décision et ordonne la suspension de l'exécution de la décision du 6 juin du Comité de discipline de l'ACAIQ et déclare la reprise d’effet immédiate du certificat d'agent immobilier de l'Appelant.
[30] On retrouve aux paragraphes 20 à 25 du jugement, les motifs ou les raisons retenus par le juge Lachance pour accueillir la requête de l'Appelant :
« [20] Quant à l'allégué de la plainte que Rodrique savait ou aurait dû savoir que ceux-ci avaient été utilisés pour la culture de cannabis, le seul paragraphe qui en traite dans la décision est le paragraphe 121 qui se lit comme suit:
"Dans un cas particulier soumis à l'analyse du comité, la preuve a révélé que c'est l'acheteur lui-même qui avait été témoin de la perquisition et qui l'a mentionné à l'intimé. Il a acheté quand même, mais le comité estime qu'il avait alors l'éclairage nécessaire pour apporter un consentement valable à l'opération qu'il menait. Dans les autres cas, les acheteurs se sont engagés dans une opération immobilière de grande envergure sans avoir l'éclairage nécessaire à la formation d'un consentement valable. Le comité estime qu'il y a preuve prima facie d'une relation entre l'intimé et les opérations immobilières litigieuses."
[21] Sur cet aspect crucial, la décision est succincte. Elle ne traite pas comment et pourquoi le requérant savait ou aurait dû savoir.
[22] Le comité ne motive pas sa décision.
[23] Le requérant est en droit de savoir quels sont les éléments de la preuve qui amène le comité à conclure que Rodrigue savait ou aurait dû savoir qu'il y avait eu culture de cannabis dans les maisons vendues. Voilà l'essence d'une décision motivée.
[24] Il n'est pas suffisant d'écrire que le comité estime qu'il y a une preuve prima facie d'une relation entre l'intimé et les opérations immobilières litigieuses pour permettre une radiation provisoire. Encore faut-il que le comité dise en quoi cette preuve existe et quel est le lien que cette preuve établit avec les gestes reprochés.
[25] L'existence de griefs de nature grave et sérieuse n'a pas été traitée par le comité aux paragraphes 104 à 106 de la décision à la satisfaction du Tribunal. »
[31] Le 31 octobre 2008, l’honorable Yves Hamel, de la Cour du Québec, rejetait l’appel au mérite sur la requête pour la suspension provisoire logée par l’Appelant, l’estimant devenu théorique, suite à la décision sur culpabilité rendue par le Comité qui n‘a pas ordonné l’exécution provisoire de la décision durant l’appel.»
[12] Dans la décision sur sanction, rendue le 14 juillet 2008, le Comité motive sa décision en ces termes :
«[65] Le comité a
constaté que l’intimé, au cours de son témoignage, manifestait une forte
propension à imputer à autrui la responsabilité des erreurs qu’il avait
commises : on ne l’avait pas informé, on ne l’avait pas sensibilisé, on n’avait
pas attiré son attention, on n’avait pas suffisamment publicisé un danger
potentiel.
[66] Lui-même était à la recherche de clients potentiels et on ne peut pas le
blâmer du fait que les autres ne l’alertaient pas. Étonnante affirmation de la
part d’un agent de grande expérience.
[67] Le comité tient à souligner que l’intimé fait partie d’une classe
privilégiée de gens qui bénéficient de privilèges particuliers à l’égard des
individus qu’ils ont mission de servir et qu’à ce titre, il doit assumer, de sa
propre initiative, une probité et une rigueur professionnelle de tous les
instants. Il n’est plus un adolescent en formation.
[68] Son Association ne peut le prendre par la main et l’information qui est
publiée ponctuellement par l’ACAIQ ne doit pas être son seul critère
d’appréciation d’une situation : il doit manifester une conscience éveillée à
l’égard de son éthique.
[69] Saura-t-il manifester une certaine constance dans la rigueur
professionnelle à l’avenir ? Le comité entretient un léger doute.
[70] Par ailleurs, la preuve présentée au mérite quant au chef 1 n’a pas révélé
que l’intimé connaissait tous les méandres des opérations dans lesquelles
certains clients l’avaient entraîné.
[71] Le comité en a retenu que c’est principalement à cause de sa négligence et
de son incurie lors de l’octroi des contrats de courtage, que l’intimé s’est
prêté aux stratagèmes étayés par ces clients.
[72] C’est en tenant compte de cette particularité de la preuve au mérite que
le comité a retenu la culpabilité de l’intimé à l’égard de six opérations
immobilières identifiées dans la plainte.
[73] Il n’en demeure pas moins qu’objectivement de telles infractions sont
graves et sérieuses et la sanction qui en découle doit tenir compte de cette
gravité objective.
[74] Subjectivement, l’intimé a témoigné qu’il avait amélioré sa façon de
travailler, mais le comité constate que l’exemple qu’il a choisi pour en faire
état, soit les pièces IS-5 et IS-5A, n’est pas le meilleur exemple d’un travail
rigoureux.
[75] Quand ce ne serait que l’absence de conditions relatives à l’examen de la
déclaration du vendeur, que l’identification de la véritable Annexe G liée à sa
promesse d’achat, que l’absence de la signature d’accusé de réception, tout
autant que la formulation exclusivement auto-protectrice de l’Annexe G; il reste
encore beaucoup à apprendre ou plutôt à réapprendre.
[76] Il reste un certain bout de chemin pour que l’intimé atteigne à cette
rigueur professionnelle, qu’il n’est quand même pas exorbitant d’exiger d’un
membre de l’ACAIQ.
[77] Compte tenu de ces remarques, le critère éducatif n’est certes pas à
négliger dans l’atteinte d’une sanction appropriée, en plus des critères de
dissuasion et d’exemplarité.
[78] A cet égard, le comité croit que la recommandation du plaignant d’une
suspension de trente-six mois du certificat d’agent immobilier affilié de
l’intimé tient plus de la punition que de l’harmonisation des critères dont il
vient de traiter.
[79] Les deux parties reconnaissent que la sanction à l’égard du chef 1 doit
comporter une suspension de certificat d’agent immobilier de l’intimé : seule
leur appréciation de sa durée varie.
[80] Même si la recommandation de la plaignante à l’égard du chef 1 demeure
trop sévère, dans l’esprit du comité, il reste que la recommandation de
l’intimé au même égard tient plutôt de ce que l’Honorable Juge Morris Fish
qualifiait, dans la décision Daignault, de « tolerant slap on the
wrist ».
[81] Le comité estime qu’une suspension d’une période de neuf mois du
certificat de l’intimé s’harmonise avec la philosophie du comité sur les
critères de dissuasion et d’exemplarité et tient autant compte du souhait de
l’intimé d’améliorer son travail que de la préoccupation de la plaignante de
préserver l’objectif de protection du public.
[82] Le comité tiendra aussi compte de la période de trois semaines de
suspension que l’intimé a déjà purgée.
[83] À l’égard du chef 6, le comité estime, suivant en cela sa propre
jurisprudence, qu’une suspension consécutive d’une durée d’un mois est une
sanction appropriée pour tenir compte de l’obligation d’un membre de l’ACAIQ de
fournir à l’enquête d’un syndic des informations véridiques et vérifiées.
[84] Le bureau du syndic est un rouage essentiel de la mission principale de
l’ACAIQ et il est nécessaire que tous les membres de la profession en soit
aussi conscients que l’intimé lui-même.
[85] Quant aux chefs 2 à 5, le comité est d’avis que les infractions sont
sérieuses et graves et qu’elles auraient pu entraîner des conséquences
juridiques préjudiciables à certaines des parties en cause. Il n’en a pas été
ainsi heureusement, mais l’objectif de dissuasion et d’exemplarité exige qu’une
amende de 1 200 $ soit imposée à l’intimé à l’égard de chacun des
chefs 2 à 5 inclusivement.
[86] Cette sanction monétaire amènera sans doute l’intimé à maintenir la
rigueur que le comité lui souhaite d’atteindre.
[87] Le comité estime que l’avis de suspension a déjà été publié et le sursis
n’a pas fait l’objet d’une rétractation aussi largement publicisée. Le comité
est d’avis que le critère de protection du public n’exige pas une nouvelle
publication dans les journaux.
[88] Reste le volet de formation éducative qui s’ajoute au volet de dissuasion
et d’exemplarité et le comité estime que l’intimé a besoin de rafraichir ses
connaissances. Il recommandera donc au conseil d’administration de l’ACAIQ
d’exiger que l’intimé suive les deux cours de quarante-cinq heures portant sur
la Loi sur le courtage immobilier et sur la rédaction des documents relatifs à
l’immobilier.»
3. PRÉTENTIONS DES PARTIES
[13] L'Appelant soulève que la sanction est trop sévère, injuste et totalement inappropriée eu égard aux critères suggestifs et objectifs.
[14] Quant à la sanction prononcée à l’égard des chefs d’infraction 1a), 1d), 1e), 1f), 1i) et 1j), il prétend que :
· Le Comité aurait omis de tenir compte du fait qu’il s’agissait de sanctionner des gestes attribuables à de la négligence et non pas des gestes prémédités ou volontaires;
· Le Comité n’aurait pas tenu compte d’une série de facteurs atténuants;
· Le Comité n’aurait pas tenu compte de son besoin de gagner sa vie;
· Le Comité de discipline n’aurait pas respecté le principe de gradation des sanctions;
[15] Quant à la sanction prononcée à l’égard du chef d’infraction 6, il prétend que le Comité de discipline n’a pas tenu compte d’une série de facteurs atténuants et n’aurait pas tenu compte des circonstances dans lesquelles la déclaration visée par le chef 6b) aurait été faite.
[16] Selon l’Intimée, la décision sur sanction comprend les attributs de l’arrêt Dunsmuir quant à sa justification et son intelligibilité.
[17] En ce qui concerne les sanctions imposées à l’Appelant par le Comité, l’intimée prétend que le Comité de discipline a exercé sa discrétion, dans le cadre législatif et réglementaire auquel il était astreint, pour établir la sanction en fonction du dossier et de l’individu à sanctionner.
[18] Selon l’intimée, dans leur ensemble, les motifs retenus par le Comité pour l’imposition de la sanction ne font voir aucune erreur justifiant l’intervention de cette Cour.
[19] Selon l'intimée, compte tenu des motivations de la décision sur sanction et de l’état de la jurisprudence relative à l’obligation de motiver de telles décisions, le moyen présenté par l’appelant sur l'absence de motivation, n'est pas fondé.
4. questions en litige
[20] En regard des arguments soumis de part et d'autre, lors de l’audition de l’appel, le Tribunal estime qu'il y a lieu de reformuler les questions comme suit :
· La décision sur sanction est-elle suffisamment motivée ?
· Le Comité a-t-il rendu une décision déraisonnable en imposant une suspension de neuf mois, sanction trop sévère, pour chacun des chefs d’infraction 1a), d), e), f), j) et i) ?
· Le Comité a-t-il rendu une décision déraisonnable en imposant à l’appelant une sanction trop sévère, soit une suspension d'un mois pour le chef d’infraction 6?
5.1 La norme d'intervention
[21] Dans la cause Savage c. Simard [1] , l'honorable Danielle Côté résume les principes qui se dégagent des enseignements de la Cour suprême dans l’arrêt Dunsmuir :
[49] Depuis le jugement de la Cour suprême du Canada dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick 13 , le mécanisme de contrôle judiciaire d'une décision d'un organisme administratif emporte l'application de deux normes : celle de la décision correcte et celle de la décision raisonnable.
[50] Par ailleurs, il n'est plus nécessaire de toujours se livrer à une analyse exhaustive pour arrêter la bonne norme de contrôle :
« [57] Il n'est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive pour arrêter la bonne norme de contrôle. Là encore, la jurisprudence peut permettre de cerner certaines des questions qui appellent généralement l'application de la norme de la décision correcte […]. En clair, l'analyse requise est réputée avoir déjà eu lieu et ne pas devoir être reprise. » 14
[…]
[52] Dans l’arrêt Dunsmuir, la majorité s'exprime ainsi :
« [53] En présence d'une question touchant aux faits, […], la retenue s'impose habituellement d'emblée […]. Nous sommes d'avis que la même norme de contrôle doit s'appliquer lorsque le droit et les faits s'entrelacent et ne peuvent être aisément dissociés. » 15
( Références omises )
[22] Dans l’arrêt Association des courtiers et agents immobiliers du Québec c. Proprio Direct Inc. [2] , la Cour suprême s’est prononcée sur la détermination de la norme d’intervention à l’égard des décisions rendues par le Comité de discipline de l’ACAIQ.
[23] La Cour Suprême privilégie la méthode d’analyse empreinte de déférence établie par le juge Chamberland, dans Pigeon c. Daigneault [3] , et par le juge Dalphond, dans Pigeon c. Proprio Direct inc. , [4] .
[24] Il n’est pas nécessaire de reprendre l’examen des quatre facteurs contextuels à considérer dans le cadre de l’analyse relative à la norme de contrôle, car la jurisprudence établit, de manière satisfaisante, le degré de déférence requise en ce qui concerne l’appel de décision du Comité de discipline de l’ACAIQ devant la Cour du Québec.
[25] L'application de ces principes amène à la conclusion que hormis la question de motivation, la norme raisonnable s'applique aux questions soulevées.
[26] Il est bien établi par la jurisprudence [5] que la norme de contrôle en matière de sanction disciplinaire est la norme raisonnable.
5.2 Le droit applicable en matière de sanction disciplinaire
[27] L’auteur Patrick de Niverville résume les principes qui s’appliquent en matière de sanction disciplinaire :
«Lors de l’imposition de la sanction, le Comité de discipline devra pondérer l’ensemble des facteurs atténuants et aggravants, tant objectifs que subjectifs, afin de déterminer la sanction juste, raisonnable et appropriée au cas du professionnel.
Dans tous les cas, la sanction doit tenter de concilier, d’une part, la protection du public et d’autre part, les droits du professionnel [6] .»
[28] Les critères à prendre en considération pour imposer une sanction en droit disciplinaire sont bien établis par la doctrine et la jurisprudence [7] . Dans l’arrêt Daigneault [8] , la Cour d’appel enseigne :
«[37] La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier. Chaque cas est un cas d'espèce.
[38] La sanction disciplinaire doit permettre
d'atteindre les objectifs suivants: au premier chef la protection du public,
puis la dissuasion du professionnel de récidiver, l'exemplarité à l'égard des
autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes
semblables et enfin, le droit par le professionnel visé d'exercer sa profession
(Latulippe c. Léveillé (Ordre professionnel des médecins),
[39] Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier. Parmi les facteurs objectifs, il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si l'infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l'exercice de la profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif. Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l'expérience, du passé disciplinaire et de l'âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger son comportement. La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à décider d'une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et atténuantes, de l'affaire.
[40] Ces principes étant posés tant au niveau du pouvoir d'intervention de la Cour du Québec qu'au niveau de l'imposition des sanctions disciplinaires, il s'agit d'en faire l'application aux faits de l'espèce.»
[29] Dans l'arrêt Laliberté c. Huneault [9] , la Cour d'appel, sous la plume de l'honorable juge Chamberland, enseigne :
«La sanction infligée n'est pas déraisonnable du simple fait qu'elle est clémente ou sévère; elle le devient lorsqu'elle est si sévère, ou si clémente, qu'elle est injuste ou inadéquate eu égard à la gravité de l'infraction et à l'ensemble des circonstances, atténuantes et aggravantes, du dossier.
Nul doute que, si la Cour du Québec peut intervenir pour ce motif dans un dossier régi par la Loi sur le courtage immobilier , le Tribunal peut faire de même lorsqu’il entend un appel sur une sanction en vertu du Code des professions .»
[30] Le Tribunal des professions dans l’affaire Blanchette c. Psychologues [10] écrit :
«En droit disciplinaire, l’attention se porte aussi sur l’individu en fonction du geste qu’il a posé et du type de personne qu’il représente. La nature, la gravité et les circonstances de l’infraction constituent des facteurs essentiels, comme le sont les éléments propres à la personnalité du professionnel, lorsqu’il s’agit de déterminer la sanction appropriée.»
[31] C’est sous la loupe de ces principes que la décision sur sanction rendue par le Comité doit être analysée, afin d’en déterminer la raisonnabilité.
5.3 La décision du 14 juillet 2008 est-elle suffisamment motivée ?
[32] Il y a lieu d’aborder en premier lieu, l'omission du Comité de motiver suffisamment la décision. Il n'est pas nécessaire de déterminer pour cette question la norme de contrôle puisqu'il s'agit d'une composante des règles de justice naturelle qu'un décideur se doit de respecter.
[33] La violation des principes de justice naturelle est considérée comme un excès de compétence [11] , ce qui donne ouverture à l’intervention de cette Cour.
[34] L'omission de motiver une décision, contrairement aux exigences impératives d'une disposition législative, donne ouverture à la cassation de cette décision pour excès de compétence [12] . Ce principe s’applique en matière d’appel d’une décision d’un tribunal administratif devant la Cour du Québec [13] .
[35] Ce principe est appliqué par l’honorable André Cloutier de notre Cour siégeant en appel de décision du comité de déontologie policière, dans l’affaire Sandra Labrecque c. Me Paul Monty [14] :
« L’absence de motivation, lorsque celle-ci est exigée par la loi, est un motif suffisant qui, à lui seul, peut justifier l’intervention de notre Cour en appel. »
[36] Dans l’affaire Leduc c. Médecins , cité par l’Intimée, le Tribunal des professions écrit :
« Une décision doit être motivée de façon suffisante sans pour autant imposer au décideur l’obligation de faire un tour exhaustif de tous les motifs et facteurs susceptibles de s’appliquer au dossier sous étude. Le comité [a] donc l’obligation de rendre une décision motivée […]. Le procédé [doit satisfaire] aux exigences de la rationalité et de la raisonnabilité [15] . »
[37] Dans la cause Syndicat des professionnelles en soins de Québec (SPSQ) c. Fortier [16] , l’Honorable Chantale Masse de la Cour supérieure traite des caractéristiques d’une décision suffisamment motivée :
«[42] Une décision ne permettant pas au juge de révision de comprendre sa justification ou une décision qui ne serait ni transparente ni intelligible quant au processus décisionnel ou au raisonnement qui a mené à ce qu'elle soit rendue, rendrait impossible l'exercice du contrôle judiciaire.
[43] Pour reprendre les termes de la juge Grenier dans l'affaire Ozanam [21] , la « motivation logique constitue pour le justiciable une garantie que la décision qui affecte ses droits n'est pas le résultat d'une appréciation arbitraire » [22] et« permet au justiciable d'exercer pleinement les recours qui sont mis à sa disposition » [23].
[44] Dans le contexte d'une révision judiciaire, les motifs de la décision doivent donc permettre au juge de révision de déterminer si celle-ci se situe parmi les issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ou si elle est correcte, selon la norme de contrôle applicable aux questions dont elle dispose.
[45] Si le juge de révision n'est pas en mesure d'exercer son rôle, la décision est insuffisamment motivée [24] et pourra être annulée et renvoyée afin qu'une décision motivée soit rendue par un autre arbitre ou décideur [25].»
( Références omises )
[38] Dans l’arrêt Northwestern Utilities Limited and the Public Utilities Board of the Province of Alberta c. The City of Edmonton [17] la Cour suprême du Canada énonce les principes qui suivent :
«[…], il ne suffit pas d’affirmer ou, plus précisément, d’énoncer que la preuve et les moyens soumis par les parties ont été considérés. Cela va de soi.
[…], les motifs doivent être appropriés, pertinents et intelligibles, et doivent permettre à la partie concernée d’évaluer les possibilités d’appel… À une époque où le style est souvent verbeux, la brièveté est un atout et elle aurait pu donner lieu à un résultat différent en l’espèce si ce n’était que l’ordonnance de la Commission ne comporte que des conclusions et est muette quant au raisonnement pour y arriver.»
[39] Dans l'arrêt Baker [18] , la juge L'Heureux-Dubé écrit :
« On a
soutenu que la rédaction de motifs favorise une meilleure prise de décision en
ce qu'elle exige une bonne formulation des questions et du raisonnement et, en
conséquence, une analyse plus rigoureuse. Le processus de rédaction des motifs
d'une décision peut en lui-même garantir une meilleure décision. Les motifs
permettent aussi aux parties de voir que les considérations applicables ont été
soigneusement étudiées, et ils sont de valeur inestimable si la décision est
portée en appel, contestée ou soumise au contrôle judiciaire: R. A. Macdonald
et D. Lametti, «Reasons for Decision in Administrative Law» (1990), 3
C.J.A.L.P.
123, à la p. 146;
Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de
l'Immigration)
,
[40] Ces principes sont applicables en matière de droit disciplinaire [19] .
[41] Le Comité en tant que décideur a l’obligation de motiver la décision qu’il rend qui affecte les droits du justiciable qui a le droit de connaître les raisons qui motivent le décideur à juger comme il le fait [20] .
[42] Il ressort, des motifs de la décision reproduits précédemment, que le Comité a tenu compte de la gravité des manquements reprochés et de la conduite de l'appelant, lorsqu'il écrit :
«[71] […] que c’est principalement à cause de sa négligence et de son
incurie lors de l’octroi des contrats de courtage, que l’intimé s’est prêté aux
stratagèmes étayés par ces clients.
[72] C’est en tenant compte de cette particularité de la preuve au mérite que
le comité a retenu la culpabilité de l’intimé à l’égard de six opérations
immobilières identifiées dans la plainte.
[73] Il n’en demeure pas moins qu’objectivement de telles infractions sont
graves et sérieuses et la sanction qui en découle doit tenir compte de cette
gravité objective.»
[43] Hormis la mention que la suspension de trente-six mois du certificat d’agent immobilier affilié recommandé par la syndique est trop sévère, les motifs de la décision ne permettent de comprendre l'analyse effectuée par le Comité pour l’imposition d’une suspension de neuf mois du certificat d’agent immobilier de l’appelant, pour le chef 1 de la plainte.
[44] Quant à la suspension d’un mois imposée à l’égard du chef 6, le raisonnement du Comité se limite à référer à la jurisprudence, pour conclure qu’une suspension consécutive d’une durée d’un mois est une sanction appropriée pour tenir compte de l’obligation d’un membre de l’ACAIQ de fournir à l’enquête d’un syndic des informations véridiques et vérifiées.
[45] En ce qui concerne le chef 1, nous sommes devant une situation ou il n'existe aucune fourchette de sanction établie par la jurisprudence pour l'infraction reprochée et pour laquelle le Comité décide d’imposer une suspension de neuf mois pour une première infraction. Les motifs de la décision sont muets quant aux facteurs atténuants, ils ne référent essentiellement qu’à l'aspect dissuasif et à la gravité de l'infraction.
[46] En matière de droit disciplinaire, il est établi qu'en principe, la gradation des sanctions n’implique pas nécessairement qu’un professionnel soit en droit de s’attendre à se voir imposer une simple réprimande pour une première plainte disciplinaire. Tout dépendra de la gravité de l’infraction reprochée et de toutes les autres circonstances révélées dans chaque cas [21] .
[47] La lecture des motifs et de la décision dans son ensemble ne permet pas de suivre le raisonnement suivi par le Comité, ni l’analyse des facteurs objectifs et subjectifs pour arriver à une sanction proportionnée à la gravité du manquement reproché à l’appelant qui correspond aux circonstances particulières du cas de l’appelant.
[48] Le Tribunal estime que la décision sur sanction ne comporte pas les éléments essentiels d’une décision motivée, en ce sens qu’il n’est pas possible de comprendre le raisonnement qui le sous-tend.
[49] L'insuffisance de motivation de la décision ne permet pas au Tribunal de déterminer si le Comité s'est acquitté de sa tâche d'imposer une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances aggravantes et atténuantes de l'affaire.
[50] Le fait que le Comité remette en question la crédibilité de l'appelant ne l'autorise pas à se limiter aux facteurs portant sur la gravité, la dissuasion, cela ne le dispense pas de l'obligation de tenir compte de toutes les circonstances aggravantes et atténuantes.
[51] Les motifs succincts de la décision ne permettent pas de cerner les facteurs atténuants et toutes les autres circonstances pris en considération par le Comité qui se limite à référer aux principes généraux applicables en matière de sanction disciplinaire.
[52] Vu la conclusion à laquelle arrive le Tribunal sur l’insuffisance de motivation, ce qui constitue une violation aux règles de justice naturelle, en conséquence, il y a lieu d'infirmer la décision et de retourner le dossier au Comité pour la tenue d’une nouvelle audition sur sanction.
[53] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[54] accueille l'Appel;
[55] INFIRME la décision sur sanction rendue le 14 juillet 2008 par le Comité de discipline de l’Association des courtiers et agents immobiliers du Québec «ACAIQ»;
[56] Retourne le dossier au Comité de discipline de l'Organisme d'Autoréglementation du Courtage Immobilier du Québec «oaciq» , pour une nouvelle audition et décision motivée sur sanction.
[57] Le tout , chaque partie payant ses propres frais.
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__________________________________ DANIEL DORTÉLUS, J.C.Q. |
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M e Sophie Perron |
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Irving mitchell kalichman, s.e.n.c.r.l. Place Alexis Nihon, Tour 2 3500, boul. de Maisonneuve Ouest Bureau 1400 Westmount (Québec) H3Z 3C1 |
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Avocate de l'Appelant |
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M e Karoline Khelfa |
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Savoie le goff bouret Affaires disciplinaires 6300, ave. Auteuil Bureau 300 Brossard (Québec) J4Z 3P2 |
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Avocate de l'Intimée |
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Date d’audience : |
5 juin 2012 |
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[1]
[2]
Association des courtiers et agents immobiliers du Québec
c.
Proprio Direct Inc.
[3]
[4]
J.E. 2003 1780,
[5]
Pigeon
c.
Daigneault,
[6] Patrick de Niverville, La sentence en matière disciplinaire - une revue approfondie de la jurisprudence, Développements récents en déontologie droit professionnel et disciplinaire, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais, 2000, pp. 147 et ss.
[7] Précité.
[8] Précité , note 3 , parag. 37- 40 .
[9]
Laliberté
c
. Huneault,
,
(C.A.)
[10]
[11]
Transport CFA Inc.
c.
Lina Transport Inc.,
[12]
Labonté
c.
Cour du Québec
, Division des petites créances,
[13]
Donatelli
c.
Dubé
(C.Q., 2005-12-07),
[14]
Sandra Labrecque
c.
Me Paul Monty
,
[15]
Leduc
c.
Médecins,
[16]
[17]
[18] Baker c. Canada , [1999] 2 R.C.S. 845 et ss.
[19] Gonshor c. Morin , 2001 QCTP 32; Dentistes c. Forget , 2001 QCTP 60.
[20]
Société des services Ozanam inc
. c.
Commission municipale du
Québec et al.
,
[21]
Brunet c. Notaires
,