Bonneau c. Côté

2012 QCCQ 5303

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances»

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

ROBERVAL

LOCALITÉ DE

ROBERVAL

«Chambre civile»

«Division des petites créances»

 

N° :

155-32-000006-127

 

 

 

DATE :

4 juillet 2012

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

JEAN HUDON, J.C.Q.

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PATRICK BONNEAU

ET

JESSICA BLAIS-VIGNEAULT

 

Demandeurs

c.

SÉBASTIEN CÔTÉ

ET

MARIE-CLAUDE MORIN   

 

Défendeurs - Demandeurs en garantie

c.

PATRICIA TREMBLAY

 

         Appelée en garantie

 

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JUGEMENT

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[1]            Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault poursuivent Sébastien Côté et Marie-Claude Morin, pour vices cachés suite à l'achat de leur résidence et ces derniers poursuivent à leur tour leur vendeur, Patricia Tremblay, afin qu'elle les indemnise au cas où il y aurait condamnation contre eux.

[2]            Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault achètent leur résidence, le 30 avril 2010.

[3]            Le 30 juillet 2011, ils constatent qu'il y a de l'eau sur le plancher qui provient de l'endroit où l'aquarium est encastré dans le mur.

[4]            Ils procèdent alors à l'enlèvement de cet aquarium et, en retirant une partie du prélart, ils constatent que le plancher est mouillé à deux endroits, soit près de l'endroit où l'aquarium est situé et derrière le poêle qui mène à la salle de bain.

[5]            Ils contactent alors un entrepreneur en construction qui effectue un test d'eau et constate que de l'eau s'infiltre à partir du toit le long du mur à l'endroit où une annexe a été construite par Sébastien Côté et Marie-Claude Morin.

[6]            Quant au problème d'eau qui a été constaté à la salle de bain, il appert qu'il s'agit d'un tuyau situé en-dessous du bain qui fuit.

[7]            Ils procèdent à divers travaux aux deux endroits qu'ils considèrent comme étant des vices et ils en réclament le paiement à Sébastien Côté et Marie-Claude Morin.

[8]            Ces derniers sont avisés par écrit de l'existence des vices et que des travaux vont être exécutés. Ils se sont rendus sur place.

[9]            Sébastien Côté et Marie-Claude Morin admettent avoir construit l'annexe où il y a eu infiltration d'eau, mais ajoutent qu'ils ne se sont jamais aperçus de quelque écoulement d'eau que ce soit à cet endroit.

[10]         Quant à la salle de bain, ils mentionnent qu'ils ne se sont jamais aperçus de rien non plus à cet endroit, mais que si le Tribunal conclut à la présence de vices cachés, que leur vendeuse, Patricia Tremblay, doit être condamnée à les indemniser puisque le bain se trouve dans un endroit de la résidence qui existait avant que l'annexe soit construite.

[11]         Quant à Patricia Tremblay, elle confirme avoir été avisée par écrit de l'existence des vices, qu'elle n'a jamais rien constaté à la salle de bain alors que, pour les dommages allégués concernant l'écoulement d'eau dans un mur, celui-ci n'existait pas lorsqu'elle a vendu la résidence.

[12]         Les parties ont chacun eu recours à des entrepreneurs en construction.

[13]         Sylvain Doucet de Bon-Air Construction qui a procédé aux travaux à la résidence de Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault témoigne à l'effet que de l'eau s'écoule à partir de la toiture et longe le mur situé à la jonction de l'ancienne partie et de l'annexe et que cette situation dure depuis longtemps vu la couleur du bois et qu'il a fallu enlever le mur de revêtement de gypse  ainsi que la laine minérale pour pouvoir le constater.

[14]         Quant au problème à la salle de bain, il témoigne que l'écoulement par le tuyau n'est pas récent et date de plusieurs mois, mais qu'il n'était pas visible.

[15]         Il témoigne également à l'effet qu'une partie du revêtement du toit a dû être refaite considérant que le bardeau qui s'y trouvait n'avait pas été installé suivant les règles de l'art en raison de la faible pente du toit et qu'il était impossible de changer uniquement la partie située à la jonction entre la résidence et l'annexe en raison de ce fait.

[16]         En défense, Gaétan Gaudreault témoigne s'être rendu sur place et avoir constaté que le bardeau est installé selon les règles de l'art et qu'il n'y a aucun danger d'écoulement.

[17]         Bernard Morin, père de Marie-Claude Morin, est celui qui a construit l'annexe et il explique au Tribunal la façon dont il s'y est pris et que tout avait été fait suivant les règles de l'art. Il a une expérience de plus de 30 ans en construction.

Question en litige

La résidence de Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault est-telle affectée d'un vice caché ?

[18]         Pour qu'il y ait vice caché, il faut qu'il y ait la présence de ces quatre critères:

1. Le vice doit être antérieur à la vente;

2. Le vice doit être non apparent;

3. Le vice doit être grave;

4. Le vice doit être inconnu de l'acheteur.

[19]         Ces critères trouvent leur origine de la jurisprudence et de l'article 1726 C.c.Q. qui concerne la garantie de qualité qu'un vendeur est tenu d'offrir à son acheteur et qui se lit comme suit:

1726 - Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.

Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.

[20]         Dans le présent dossier, les critères 2, 3 et 4 sont rencontrés, car tant l'écoulement de l'eau le long du mur que celui sous le bain sont non apparents parce qu'aucun indice ne laissait voir cette eau et qu'il a fallu enlever le gypse et le tour du bain pour s'en apercevoir; ils sont inconnus de l'acheteur car les vendeurs eux-mêmes les ignoraient et ils sont graves.

[21]         Les vices étant apparus le 30 juillet 2011, soit quinze (15) mois après l'achat, sont-ils antérieurs à la vente ? Selon la preuve, la réponse est affirmative.

[22]         Sylvain Doucet a livré un témoignage non contredit que l'écoulement le long du mur existait depuis plusieurs mois et qu'il provenait de la toiture de l'annexe construite par Sébastien Côté et Marie-Claude Morin alors que l'écoulement d'eau sous le bain datait, lui aussi, de plusieurs mois.

[23]         Sébastien Côté et Marie-Claude Morin soulèvent la vétusté du tuyau sous le bain, mais aucune preuve de cela n'a été faite par eux de sorte que ce moyen de défense est rejeté.

[24]         Le Tribunal conclut à la présence d'un vice caché.

[25]         Que Sébastien Côté et Marie-Claude Morin n'ait pas eu connaissance de ces vices n'enlève rien au fait qu'ils s'agisse de vices cachés, car l'absence de connaissance n'est pas un moyen de défense.

Dommages

[26]         Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault ont déposé sous P-6 une facture de plomberie pour le vice de la salle de bain, laquelle inclut l'achat et la pose d'un bain et la main-d'œuvre.

[27]         Le Tribunal ne peut faire droit à cette réclamation en entier considérant que le changement du bain est une décision personnelle qui n'a rien à voir avec le vice. Le Tribunal ne retiendra qu'une somme de 350 $ pour la main-d'œuvre et les matériaux.

[28]         Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault ont déposé sous P-7 une facture de Construction Bon-Air de 8 000 $ représentant les travaux de réparation du vice à la jonction de l'annexe et de la résidence. Cette réclamation sera accueillie.

[29]         Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault ont donc fait la preuve de travaux de réparation nécessaires pour corriger les vices pour une valeur de 8 300 $ qu'ils ont choisi de limiter à 7 000 $ afin d'intenter leur recours à la division des petites créances.

[30]         Ils ont également fait la preuve qu'ils avaient avisé Sébastien Côté et Marie-Claude Morin dès qu'ils ont constaté l'existence des vices, comme l'exige l'article 1739   C.c.Q. et leur ont transmis une mise en demeure avant d'effectuer les travaux, comme l'exige l'article 1595 C.c.Q. .

[31]         La réclamation de Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault contre Sébastien Côté et Marie-Claude Morin est donc accueillie.

Demande en garantie

[32]         Pour cette demande, les mêmes conditions que celles exposées au paragraphe 18 des présentes s'appliquent.

[33]         Il est clair que Sébastien Côté et Marie-Claude Morin n'ont aucun recours contre Patricia Tremblay pour les vices reliés à l'écoulement d'eau à la jonction de l'annexe et de la roulotte, car ce sont eux qui ont construit cette annexe.

[34]         Quant au vice concernant l'écoulement d'eau à la salle de bain, Sébastien Côté et Marie-Claude Morin avaient le fardeau de prouver qu'il existait lorsqu'ils ont acheté la résidence de Patricia Tremblay en 2007 et ils n'ont pas fait cette preuve.

[35]         Il est vrai que la preuve faite par Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault en demande principale est à l'effet que l'écoulement dure depuis plusieurs mois, mais aucune preuve n'a été faite qu'il y avait écoulement d'eau lorsque Patricia Tremblay en était la propriétaire quatre (4) ans plus tôt, de sorte que le critère d'antériorité à la vente pour qu'il y ait vice caché n'est pas rencontré.

[36]         POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

[37]         ACCUEILLE la demande principale.

[38]         CONDAMNE Sébastien Côté et Marie-Claude Morin à payer à Patrick Bonneau et Jessica Blais-Vigneault la somme de 7 000 $ avec intérêts au taux légal plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q. depuis le 9 novembre 2011, date de la mise en demeure.

[39]         LE TOUT avec dépens fixés à 163 $.

 

 

 

 

 

[40]         REJETTE la demande en garantie de Sébastien Côté et Marie-Claude Morin contre Patricia Tremblay, avec dépens.

 

 

 

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JEAN HUDON,

Juge à la Cour du Québec

 

 

Date d’audience :

14 mai 2012