Bérubé c. Voyages Vasco Oasis

2012 QCCQ 5574

 

 

 

 
 COUR DU QUÉBEC

 

 

« Division des petites créances »

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE

QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

LOCALITÉ DE

QUÉBEC

 

« Chambre civile  »

 

 

N o  :

200-32-054179-113

 

 

 

 

 

 

 

 

DATE :

18 juillet 2012

 

 

 

 

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE DOMINIQUE LANGIS J.C.Q.  (JL4155)

 

 

 

 

 

 

MICHELINE BÉRUBÉ , […], Charny (Québec) […]

et.

JACQUES GOUDREAULT , […], Charny (Québec) […]

et.

LISE MALTAIS , […], Québec (Québec) […]

et.

LISE ROY , […], Québec (Québec) […]

 

 

 

 

 

Demandeurs

 

 

c.

 

 

 

VOYAGES VASCO OASIS , 2257, boul. de la Rive-Sud, Lévis (Québec) G6W 2S2

 

 

 

 

 

Défenderesse

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

 

 

 

 

 

 

[1]            Les demandeurs réclament 7 000,00 $ à Voyages Vasco Oasis (Vasco), pour les ennuis qu'ils ont eus durant leur voyage, lequel ne s'est pas déroulé tout à fait comme prévu.

[2]            Plus particulièrement, les demandeurs se plaignent des complications qu'ils ont rencontrées et qui leur ont causé bien des soucis et de l'insatisfaction durant les cinq premiers jours de leur voyage. La somme réclamée représente une bonne partie du coût de celui-ci.

[3]            Vasco conteste la réclamation puisque les demandeurs ont fait le voyage tel que prévu, qu'ils ont bénéficié de billets en classe affaires pour le vol Paris-Venise, lesquels leur ont été remboursés par Vasco et que le crédit voyage de 200,00 $ offert à chacun d'eux est raisonnable dans les circonstances.

LES FAITS

[4]            Les demandeurs font partie d'un groupe de six personnes ayant acheté de Vasco un voyage en Europe qui doit se dérouler du 9 au 22 novembre 2010.

[5]            Celui-ci comprend les vols Québec-Montréal, Montréal-Paris et Paris-Venise, une nuit à Venise et une croisière de neuf jours; ensuite, deux nuits à Lisbonne et les vols Lisbonne-Paris, Paris-Montréal et Montréal-Québec.

[6]            Juste avant la date du départ, deux personnes du groupe se désistent pour des raisons de santé. Vasco annule donc leur voyage auprès des trois grossistes avec lesquels elle fait affaire : Intair pour les vols et l'hôtel à Venise, Premium Tours pour la croisière et Tours Chanteclerc pour l'hôtel à Lisbonne.

[7]            Le 9 novembre 2010, jour du départ, les demandeurs se présentent à l'Aéroport de Québec et apprennent que leurs billets sont annulés pour les vols jusqu'à Venise et ceux du retour.

[8]            Il s'ensuit une série d'échanges avec Vasco. Dans les minutes précédant l'embarquement, celle-ci confirme les places pour Montréal et pour le segment Montréal-Paris. Toutefois, le vol Paris-Venise demeure incertain. Vasco fait les démarches à ce sujet dans les heures suivantes.

[9]            Déjà préoccupés et insatisfaits de la façon dont commence le voyage, l'inquiétude s'installe chez les demandeurs pour la suite de celui-ci, notamment pour la croisière.

[10]         À Montréal, ils se rendent au comptoir d'Air France. On les informe qu'ils sont sur la liste officielle pour le vol Paris-Venise mais qu'ils n'ont plus de billet. On leur conseille de ne pas partir.

[11]         Ils ont de nouveau des échanges avec Vasco qui ne peut toujours pas confirmer le vol Paris-Venise mais leur conseille tout de même de partir et de se présenter au comptoir d'Air France à l'aéroport Charles-de-Gaulle pour une prise en charge par ce transporteur. Après avoir effectué d'autres démarches, ils décident à la toute dernière minute de s'envoler pour Paris.

[12]         Arrivés à Paris le 10 novembre à 08h35, ils se rendent au comptoir d'Air France pour constater qu'il n'y a pas de prise en charge et qu'ils doivent gérer eux-mêmes la situation. Le départ pour Venise est prévu à 09h35 (P-1) mais ils n'ont plus de billet.

[13]         Air France les informe que tous les vols pour Venise sont complets les 10 et 11 novembre, mais qu'ils peuvent se procurer quatre billets pour le vol de 09h35, en classe affaires, au prix de 5 338,24 $, ce qu'ils font puisque le bateau lève l'ancre à 17h00 le 11 novembre.

[14]         Entretemps, sans que les demandeurs en soient avisés, on a pu leur obtenir des billets pour 18h30 le même jour.

[15]         Ils prennent le vol de 09h35 et ils arrivent à Venise vers 11h30,  l'heure prévue  à l'origine, mais les bagages ne suivent pas, ce qui les oblige à rester quelques heures de plus à l'aéroport pour les récupérer.

[16]         Ils vérifient de l'aéroport leur réservation à l'hôtel pour apprendre qu'elle est aussi annulée. Toutefois, les chambres sont toujours disponibles. Ils les réservent et doivent les garantir avec carte de crédit.

[17]         À leur arrivée à l'hôtel, des démarches sont entreprises et on leur confirme finalement que les chambres sont bel et bien réservées et payées.

[18]         Ils contactent Vasco en soirée, l'informent de l'achat des billets à Paris pour le segment Paris-Venise et lui demandent de leur acheminer tous les documents pour terminer sereinement le voyage, soit la confirmation de l'hôtel à Lisbonne et des billets d'avion pour le retour. Ils demeurent inquiets pour la croisière qui commence le lendemain.

[19]         Le 11 novembre, en matinée, leur place pour la croisière est confirmée.

[20]         Le 14 novembre, les demandeurs reçoivent, par Internet, confirmation des réservations pour l'hôtel à Lisbonne et le vol de retour selon les segments prévus. Les voilà rassurés. Le reste du voyage se déroule sans problème.

[21]         Au retour, ils entreprennent des démarches pour être remboursés du billet Paris-Venise et pour obtenir un dédommagement pour les ennuis qu'ils ont eus.

[22]         En décembre 2010, Vasco rembourse la somme de 5 338,34 $ représentant le coût des billets en classe affaires et offre à chacun des demandeurs un crédit voyage de 200,00 $ qu'elle trouve raisonnable dans les circonstances.

[23]         Les demandeurs refusent l'offre et reprochent à Vasco d'avoir tardé à les rembourser.

L'ANALYSE ET LES MOTIFS

[ 24 ]          Le contrat intervenu entre les demandeurs et Vasco est un contrat de services au sens du Code civil du Québec (C.c.Q.).

[25]         L'article 2100 C.c.Q. prévoit:

2100. L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence . Ils sont aussi tenus , suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer , le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat .

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure .

[soulignements ajoutés]

[26]         Dans son ouvrage Les contrats d'entreprise, de prestation de services et l'hypothèque légale , l'auteur Vincent Karim énonce:

« L'activité exercée par un agent de voyages (organisateur de voyages ou intermédiaire) peut donner lieu à un contrat de services en vertu duquel ce dernier offre et vend des voyages organisés. Il est tenu à une obligation de résultat et à une garantie de conformité du produit vendu ou représentation faite au client (art. 2100 C.c.Q.). Il s'agit en effet d'un contrat de services au sens de la Loi sur la protection du consommateur . Ce type de contrat est assujetti à l'application de cette loi lorsqu'il est conclu avec un consommateur. » [1]

 

[Références omises]

 

[27]         Les agences de voyages doivent s'assurer que leurs clients voyagent en toute quiétude à défaut de quoi, elles en sont responsables. Les tribunaux accordent des dommages et intérêts pour compenser les ennuis et les inconvénients, l'incertitude ou la perte de bénéfices de vacances.

[28]         Dans le présent dossier, la demande d'annulation pour deux membres du groupe a créé la confusion chez le grossiste Intair puisque les problèmes rencontrés par les demandeurs ont trait à sa partie du contrat. C'est ainsi que leurs billets d'avion et leur réservation de l'hôtel à Venise ont été annulés. Cette situation a causé des inquiétudes et du stress aux demandeurs.

[29]         Les inconvénients subis doivent être compensés. Toutefois, la réclamation des demandeurs est exagérée.

[30]         Malgré les soucis qu'ils ont eus, les vols, l'hébergement et la croisière se sont déroulés selon l'itinéraire prévu et dans les délais prévus. Les demandeurs ont fait leur voyage et ont bénéficié de leurs vacances.

[31]         Ils ont aussi obtenu remboursement du coût du billet Paris-Venise en classe affaires de Vasco et le Tribunal ne considère pas déraisonnable le délai de remboursement (trois semaines).

[32]         Les auteurs Nicole l'Heureux et Marc Lacoursière, dans l'ouvrage Droit de la consommation , nous enseignent à ce sujet:

« Les recours entrepris en raison d'un défaut de conformité ne donnent lieu qu'à une fraction des montants réclamés , puisque les tribunaux considèrent qu'une partie de services a été consommée : le trajet aérien, le service hôtelier, les repas, notamment. » [2]

[Soulignement ajouté et références omises]

 

 

[33]         Le Tribunal accorde donc à chacun d'eux un dédommagement de 500,00 $ pour les complications survenues au cours de leur voyage.

[34]         Le Tribunal tient à souligner que, selon la preuve soumise, Vasco a fait tous les efforts nécessaires pour corriger la situation. Malgré cela, Vasco demeure responsable des inconvénients subis par ses clients. [3]

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la demande des demandeurs.

CONDAMNE la défenderesse à payer à chacun des demandeurs la somme de cinq cents dollars (500,00 $), avec les intérêts au taux de 5% l'an ainsi que l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec ;

CONDAMNE la défenderesse à payer aux demandeurs les frais judiciaires fixés à 159,00$.

 

 

__________________________________

DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

14 février 2012

 

 



[1]     Vincent Karim, Les contrats d'entreprise, de prestation de services et l'hypothèque légale , 2 e éd., Montréal, Wilson et Lafleur, 2011, p. 13.

[2]     Nicole L'Heureux et Marc Lacoursière , Droit de la consommation , 6 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 421. Voir aussi Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers , La responsabilité civile , vol. 2 « La responsabilité professionnelle », 7 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2007, n° 2-482.

 

[3]     Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, ibidem , n° 2-479.