COMMISSION DES RELATIONS DU TRAVAIL

(Division des relations du travail)

 

Dossier :

AQ-2001-2017

Cas :

CQ-2011-6384

 

Référence :

2012 QCCRT 0354

 

Québec, le

19 juillet 2012

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DEVANT LE COMMISSAIRE :

Raymond Gagnon, juge administratif

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Ghislain Naud

 

Plaignant

c.

 

Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Scierie Abitibi-Consolidated,
division la Tuque (CSN)

Intimé

et

 

Produits forestiers Mauricie S.E.C.
9192-8515 Québec inc.

 

Mises en cause

 

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DÉCISION

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[1]           Le 23 novembre 2011, monsieur Ghislain Naud dépose une plainte à l’encontre du Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Scierie Abitibi Consolidated, division La Tuque (CSN), ci-après « le syndicat  ». Sa plainte prend appui sur les articles 47.2 et suivants du Code du travail , L.R.Q., c. C-27 (le Code ).

[2]           Monsieur Naud soutient que le syndicat a agi de mauvaise foi, de manière arbitraire ou discriminatoire ou a fait preuve de négligence grave à son égard en ne posant pas les actions nécessaires pour que lui soit attribué le poste de patrouilleur dans son groupe et, partant, la possibilité d’accéder au poste d’opérateur de la ligne de sciage, poste immédiatement supérieur dans l’échelle de progression, et de percevoir le salaire correspondant à cette occupation.

[3]           Le syndicat indique dans un premier temps que monsieur Naud n’a pas déposé sa plainte dans le délai de six mois prescrit au deuxième alinéa de l’article 116 du Code.

[4]           Sur le fond, le syndicat répond qu’il a donné suite aux décisions de la Commission fusionnant les deux unités d’accréditation et établissant une seule liste d’ancienneté d’usine. Il ajoute qu’il a adéquatement représenté monsieur Naud afin que son rang d’ancienneté et son classement salarial correspondent aux principes établis au protocole d’entente du 30 avril 2009, aux règles prévues à la convention collective en matière d’organisation du travail et aux motifs énoncés par la Commission dans ses décisions d’octobre 2010.

[5]           L’employeur fait valoir qu’il s’est entendu avec le syndicat pour organiser les groupes de travail et que monsieur Naud a reçu le traitement approprié.

les faits

le contexte factuel

[6]           En 2008, la transformation de deux entreprises, Produits forestiers La Tuque inc. (PFLT) et Compagnie Abitibi-Consolidated du Canada, division Scierie La Tuque (SLT) donne naissance à Produits forestiers Mauricie S.E.C. et à sa commanditée 9192-8515 Québec inc. (PFM).

[7]           Cette transformation entraîne le regroupement des salariés de ces deux entreprises et l’exploitation, à compter de l’hiver 2008, des activités de sciage et de rabotage de deux scieries au sein d’une seule, celle de la Rivière-aux-Rats. Les règles de fonctionnement applicables à la suite de cette transformation, tout particulièrement la répartition du travail, ont fait l’objet d’un protocole d’entente entre les syndicats et entreprises concernés intervenu en novembre 2007.

[8]           Au cours de l’été 2009, les activités de sciage sont réparties entre les deux groupes de salariés demeurés distincts, les salariés issus de SLT forment les factions # 1 et 2 et ceux qui proviennent de PFLT sont regroupés dans la faction # 3.

[9]           Ainsi, monsieur Naud, embauché le 13 mars 2000 par SLT pour travailler à l’usine de la Rivière-aux-Rats fait partie de la faction # 2 dans le département du sciage. Ce groupe comprend :

1)            Les opérateur s de ligne de sciage à 19,89 $/h, Guy Munger et Pierre Gariépy;

2)            Le patrouilleur de ligne de sciage à 18,91 $/h, Luc Champagne;

3)            L’opérateur de déligneuse optimisée à 18,76 $/h, Ghislain Naud; et,

4)            L’opérateur de déchiqueteuse à 18,47 $/h, André Pelletier.

[10]        Pour sa part, monsieur Yves Lefebvre, embauché le 9 septembre 1994 par PFLT fait partie de la faction # 3 dans le département du sciage et cette faction est composée de salariés qui, comme lui, sont issus de l’usine PFLT au site Vallières. Ce groupe est constitué de :

1)            L’ opérateur de ligne de sciage à 19,89 $/h, Yves Lefebvre;

2)            Le patrouilleur de ligne de sciage à 18,91 $/h;

3)            L’ opérateur de déligneuse optimisée à 18,76 $/h, Jean-Raymond Plourde; et,

4)            L’ opérateur de déchiqueteuse à 18,47 $/h, Claude Duchesneau.

[11]        En juin 2010, en vue de la reprise des activités à l’usine de la Rivière-aux-Rats, interrompues depuis l’automne précédent, PFM et le syndicat signent une lettre d’entente portant sur la mise en place d’un horaire de travail allégé (2 factions au lieu de 3). À la même époque, les parties conviennent de renouveler la convention collective en vigueur jusqu’en octobre 2015.

[12]        Les parties intègrent à cette convention certaines des dispositions ayant fait l’objet du protocole d’entente et d’ententes antérieures portant sur l’intégration des listes d’ancienneté.

[13]        Un comité patronal-syndical doit se réunir dans les 45 jours de la reprise des activités (été 2010) pour trouver une solution à l’intégration des listes d’ancienneté des deux groupes de salariés. Le comité doit notamment s’assurer que le processus d’intégration sera équitable pour les salariés concernés et voir à minimiser l’impact de cette intégration pour les salariés déjà titulaires de postes comme pour l’ensemble des salariés.

[14]        À la reprise des activités pour la période du 15 août au 30 octobre 2010, les parties s’entendent sur des mécanismes de fonctionnement devant assurer l’efficacité des activités. Durant cette période, les activités de sciage et de rabotage se déroulent sur deux factions, les postes sont pourvus par ancienneté parmi les salariés travaillant toujours pour PFM et capables de faire le travail sans entraînement et les rappels au travail respectent la proportion de deux salariés issus de SLT et d’un salarié issu de PFLT.

[15]        Le patrouilleur de la ligne de sciage de la faction # 2, monsieur Luc Champagne, ne se présente pas au travail. Monsieur Naud, opérateur de déligneuse qui le suit dans la ligne de progression, est assigné à l’occupation de patrouilleur.

[16]        L’opérateur de la ligne de sciage de la même faction # 2, monsieur Pierre Gariépy, ne reprend pas son occupation. Il agit maintenant comme agent de prévention. Son poste d’opérateur est accordé à monsieur Lefebvre qui, comme patrouilleur, le suit dans la ligne de progression de ce groupe.

[17]        Cette réorganisation du travail à l’été 2010, eu égard tout particulièrement à l’application des règles d’ancienneté, est temporaire et faite dans l’attente d’une solution permanente.

[18]        Les parties ne sont pas en mesure d’en venir à une solution négociée dans le délai qu’elles se sont donné et, en septembre 2010, saisissent la Commission de leur différend.

les décisions de la COMMISSION

[19]        En octobre, la Commission rend deux décisions : 2010 QCCRT 0475 le 7 octobre 2010 et 2010 QCCRT 0503 le 25 octobre 2010.

[20]        Dans la première décision, celle du 7 octobre 2010, la Commission déclare que PFM est aux droits et obligations résultant des accréditations visant les deux scieries et que la CSN est accréditée pour y représenter tous les salariés dorénavant regroupés à l’usine de la Rivière-aux-Rats.

[21]        La Commission y déclare aussi que les conditions de travail de l’ensemble des salariés sont celles prévues à la convention collective intervenue entre SLT et la CSN et elle ordonne aux parties impliquées de lui présenter leur proposition en vue de procéder à l’intégration complète des listes d’ancienneté des deux groupes de salariés.

[22]        Dans sa décision 2010 QCCRT 0503 du 25 octobre 2010, la Commission établit une seule liste d’ancienneté d’usine de tous les salariés alors à l’emploi de PFM à son usine de la Rivière-aux-Rats. Elle y réserve sa compétence pour trancher toute autre question ou difficulté résultant de la transmission des droits et obligations ou de l’application de la liste d’ancienneté.

LA CONSTITUTION DES GROUPES DE TRAVAIL

[23]        Malgré la demande de révision judiciaire des décisions de la Commission présentées à la Cour supérieure par la CSN, les parties s’emploient immédiatement à confirmer aux travailleurs leur occupation principale dans les postes dont ils sont titulaires et à constituer les groupes de travail dans chacun des départements.

[24]        La constitution de ces groupes de travail prend en compte les changements dans la main-d’œuvre survenus depuis le regroupement des activités des deux usines en une seule, la situation qui résulte des dispositions de la convention collective intervenue en juin 2010, et la nouvelle liste d’ancienneté d’usine établie par la décision de la Commission du 25 octobre 2010.

[25]        Ainsi, un poste devenu vacant est comblé en ayant recours à l’ancienneté d’occupation. En application de cette règle, monsieur Lefebvre, 24 e sur la liste d’ancienneté d’usine, devient titulaire de l’occupation de patrouilleur en raison de son ancienneté d’occupation comme scieur acquise chez PFLT et de la reconnaissance de son ancienneté d’usine. Il devient titulaire de l’occupation de patrouilleur qu’avait monsieur Champagne, maintenant parti. Comme patrouilleur, il accède ensuite à l’occupation d’opérateur de la ligne de sciage du fait que monsieur Gariépy agit comme conseiller à la prévention.

[26]        Monsieur Naud, 87 e sur la liste d’ancienneté d’usine, demeure titulaire de l’occupation d’opérateur de déligneuse optimisée. Toutefois, en raison de la vacance au poste de patrouilleur, il est assigné comme patrouilleur, une occupation mieux rémunérée que son occupation et il reçoit le salaire horaire prévu pour cette occupation.

[27]        La convention collective (par. 14.02 d)) prévoit que l’employeur doit, en janvier, faire parvenir au syndicat de même qu’à chacun des salariés une copie de la liste d’ancienneté de la période d’ancienneté précédente. Cet envoi sera fait le 12 mai 2011.

[28]        Sur cette liste d’ancienneté, monsieur Lefebvre est 22 e et il détient l’occupation principale de patrouilleur sur la ligne de sciage avec mention qu’il était opérateur sur la ligne de sciage sur la faction #3. Monsieur Naud, y est 83 e et détient l’occupation d’opérateur de déligneuse optimisée.

[29]        Avec la publication de la liste d’ancienneté le 12 mai, monsieur Naud réalise qu’il n’est toujours pas titulaire de l’occupation de patrouilleur, même s’il y travaille depuis l’été 2009. Comme il n’est pas titulaire d’un poste de patrouilleur, il n’a pu obtenir un poste d’opérateur sur la ligne de sciage, occupation plutôt confiée à monsieur Lefebvre.

LA PLAINTE DE MONSIEUR naud

[30]        Rapidement, le 17 mai, monsieur Naud demande à l’employeur de corriger «  une erreur d’attribution de poste dans le groupe 2 (sciage) suite au départ de M. Luc Champagne dans le courant de l’année 2010  ». Il ajoute que le poste de patrouilleur aurait dû lui être accordé et non à monsieur Lefebvre qui, selon sa compréhension, ne pouvait faire valoir aucune ancienneté d’occupation dans le poste de patrouilleur, n’ayant jamais détenu ce poste ni aucun autre dans la ligne de progression. À défaut de corriger la situation, il demandera à son syndicat de faire valoir ses droits.

[31]        L’employeur lui répond que l’attribution des postes résulte d’une entente avec le syndicat dans la foulée de la décision de la Commission du 25 octobre 2010.

[32]        Le 26 mai, monsieur Naud écrit au président du syndicat, monsieur Herman Martel. Il met en cause l’entente intervenue entre l’employeur et le syndicat et demande à son syndicat de reconsidérer le tout et, le cas échéant, «  de prendre les mesures nécessaires afin qu’un grief soit déposé dans les délais prescrits  ». Le grief pourrait même être collectif puisque d’autres salariés seraient mis en cause en raison de sa demande.

[33]        Le 20 juin, la réclamation de monsieur Naud est discutée au comité des relations du travail de l’usine. Lui-même y est invité pour présenter ses observations. Revenir sur l’entente de novembre obligerait à mettre en cause d’autres salariés.

[34]        Monsieur Martel doit le revoir plus tard à ce sujet.

[35]        En fait, le syndicat n’a pas une position bien arrêtée sur la question. Il préfère laisser porter et il ne veut pas revenir sur l’entente conclue avec l’employeur. D’une part, il a pris part à l’entente avec l’employeur pour donner suite à la décision de la Commission. D’autre part, monsieur Naud est membre du syndicat depuis plus de dix ans et le syndicat lui-même a demandé à la Cour supérieure de réviser les décisions de la Commission (Voir la position du syndicat reprise aux paragraphes 14 à 20 du jugement de la Cour supérieure 2012 QCCS 5 portant sur la demande de révision judiciaire des décisions de la Commission).

[36]        Dans ce contexte ambigu, le syndicat dépose un grief pour monsieur Naud le 26 juillet pour contester la décision de PFM d’avoir appliqué la notion de réduction de l’intensité avant celle de promotion. En privilégiant la notion de réduction de l’intensité, monsieur Lefebvre, ayant moins d’ancienneté d’occupation que monsieur Naud, a pu obtenir le poste de patrouilleur et être nommé ensuite au poste d’opérateur à l’usine de sciage, un poste mieux rémunéré et plus haut dans l’échelle de progression. Il demande que PFM corrige son erreur.

[37]        Le grief est déféré à l’arbitrage. Toutefois, cet arbitrage est suspendu du fait que la Commission a été saisie de la présente plainte. De fait, toutes les parties à la présente affaire, monsieur Naud, le syndicat de même que l’employeur, s’en remettent d’abord à la Commission afin d’obtenir une décision sur la plainte de monsieur Naud avant de procéder, le cas échéant, à cet arbitrage.

les motifs de la décision

[38]        La plainte de monsieur Naud soulève un manquement du syndicat à son devoir de représentation envers lui, en application d’une entente intervenue avec l’employeur lors de la constitution des groupes de travail et alors qu’il fallait préciser l’ancienneté d’occupation et le poste dont chacun des salariés était titulaire.

[39]        Cette entente découlait de la décision de la commission du 25 octobre 2010, décision résultant d’une demande conjointe des parties pour trancher la question délicate de l’intégration des listes d’ancienneté d’usine à la suite du regroupement dans une seule usine des activités déployées sur deux sites par des salariés faisant partie de deux unités de négociation.

[40]        La Commission exerçait alors la compétence prévue à l’article 46 du Code en réglant une difficulté découlant d’un changement de la structure juridique d’une entreprise doublé d’un transfert d’entreprise à PFM, le nouvel employeur, liée par les accréditations visant deux groupes de salariés et la CSN dorénavant accréditée pour les représenter tous les deux. La fusion des unités d’accréditation emportait l’intégration des listes d’ancienneté d’usine des salariés de chacune de ces unités.

[41]        La Commission déterminait la liste d’ancienneté d’usine de ces salariés, celle qui «  commence le premier jour où l’employé a été embauché pour travailler pour Produits forestiers Mauricie [et qui] détermine le rang de la mise à pied de l’usine  ». (Conv. coll., par. 14.01 a)).

[42]        Ni l’ancienneté de groupe, celle qui «  commence le premier jour où l’employé est classifié à une fonction dans un groupe  » (Conv. coll., par. 14.01 c)), ni l’ancienneté d’occupation, celle qui «  débute dès que le travailleur devient titulaire d’une occupation dans une ligne de progression suite au départ d’un travailleur pour une raison autre que maladie accident de travail, accident non-industriel, absence autorisée ou vacances annuelles  » (Conv. coll., par. 14.01 d)) n’ont pas été déterminées par la décision de la Commission.

[43]        Il appartenait donc aux parties signataires de la convention collective de préciser le rang d’ancienneté de groupe et d’occupation de chacun des salariés concernés, de même que les postes dont ils étaient titulaires.

[44]        Dans l’accomplissement de cette tâche, il leur a fallu examiner la situation de quelque dix-sept salariés, dont celle de messieurs Naud et Lefebvre.

[45]        D’une part, monsieur Naud est classifié opérateur de déligneuse optimisée. Il était déjà titulaire de cette occupation lorsqu’il a été assigné à l’occupation de patrouilleur en remplacement de monsieur Champagne.

[46]        D’autre part, monsieur Lefebvre avait été scieur à la scierie du site Vallières. Il a été opérateur à la ligne de sciage lorsqu’il a fait partie de la faction # 3 à la reprise des activités au cours de l’été 2009. Il est classifié patrouilleur dans le poste devenu vacant à la suite du départ de monsieur Champagne.

[47]        PFM et le syndicat ont considéré que l’expérience de monsieur Lefebvre à la scierie du site Vallières devait être prise en compte. Elles justifient leur décision en référant à l’équité qui devait guider leur prise de décision, principe rappelé aux paragraphes 22 à 25 de la décision de la Commission du 25 octobre 2010.

[48]        Monsieur Naud n’a pu prendre la véritable mesure de sa situation eu égard à celle reconnue à monsieur Lefebvre qu’au moment de la publication de la liste d’ancienneté le 12 mai 2011. Il a agi promptement en écrivant à l’employeur le 17 mai et à son syndicat le 26 mai. Sa demande a ensuite été discutée au comité de relations du travail, le 20 juin avec dépôt d’un grief, le 26 juillet. Depuis cette date, le grief a été déféré à l’arbitrage.

[49]        Dans ce contexte, monsieur Naud déclare dans sa plainte avoir pris connaissance du manquement de son syndicat à son devoir de représentation le 26 juin.

[50]        En déposant sa plainte le 23 novembre suivant, monsieur Naud agit dans le délai de six mois prévu au deuxième alinéa de l’article 116 du Code pour demander à la Commission d’examiner la façon dont le Syndicat a traité sa situation.

[51]        La plainte de monsieur Naud porte sur un défaut de représentation du syndicat dans la détermination de son rang d’ancienneté d’occupation en lien avec celui de monsieur Lefebvre.

[52]        Avec la plainte de monsieur Naud, la Commission est saisie en même temps d’une difficulté découlant de l’application de la liste d’ancienneté qu’elle a déterminée dans sa décision du 25 octobre 2010. Elle en est saisie sous l’angle du traitement que le syndicat a accordé à sa situation personnelle lors de la reconnaissance de son ancienneté d’occupation en lien avec celle reconnue à monsieur Lefebvre et de l’impact d’une telle reconnaissance sur sa progression, incluant la détermination de son salaire.

[53]        Il appartenait d’abord aux parties patronale et syndicale de donner suite à la décision de la Commission du 25 octobre 2010 dans l’organisation du travail et la gestion des mouvements de main-d’œuvre selon les règles prévues tout particulièrement à l’article 15 de la convention collective intervenue en décembre 2010. Il leur fallait alors régulariser une situation avec laquelle tous avaient composé pendant plus de deux ans.

[54]        Le syndicat a dû alors se commettre et prendre position.

[55]        La prise de position du Syndicat doit toutefois reposer sur un examen sérieux des faits propres à la situation de monsieur Naud, et ce, dans le respect des obligations qui lui sont imposées à l’article 47.2 du Code du travail  :

47.2     Une association accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, ni faire preuve de négligence grave à l'endroit des salariés compris dans une unité de négociation qu'elle représente, peu importe qu'ils soient ses membres ou non.

[56]        En réaction à la prise de position de son syndicat, le salarié qui allègue un comportement fautif de ce dernier, doit démontrer, par preuve prépondérante, qu’il a manqué à ses obligations.

[57]        Ainsi, il doit établir que la position prise par le syndicat est fondée sur la mauvaise foi. Il en est de même s’il croit que cette prise de position est arbitraire parce qu’elle n’est pas justifiée de façon objective et raisonnable. Il pourrait aussi y avoir eu négligence grave parce que la position prise par le syndicat ne s’appuie pas sur un examen sérieux des faits, ne tient pas compte de toutes les circonstances ou encore fait fi des intérêts légitimes du salarié.

[58]        Le syndicat et PFM ont convenu d’appliquer l’ancienneté d’occupation sans égard à la scierie dans laquelle elle avait été acquise. C’est d’ailleurs ce principe d’équité qui était rappelé par la Commission aux paragraphes 24 et suivants de sa décision du 25 octobre 2010.

[59]        Dans les circonstances propres à la présente affaire, le syndicat a adopté une approche raisonnée qui prend en compte les intérêts respectifs de monsieur Naud et de monsieur Lefebvre. Il s’est appuyé sur son obligation de traiter équitablement les salariés, qu’ils soient issus du groupe PFLT ou du groupe SLT, et dont il a fallu régulariser la situation après plus de deux années d’incertitude, années au cours desquelles avaient été adoptées des mesures temporaires.

[60]        La Commission n’a pas à se substituer au syndicat dans la solution qu’il a retenue lors de ses discussions avec PFM. Elle doit s’assurer qu’en adoptant la position qui lui a permis de s’entendre avec l’employeur, il n’a pas été négligent ou qu’il n’a pas abusé de sa discrétion de façon à porter préjudice à monsieur Naud.

[61]        En participant, comme l’a fait, au règlement de la difficulté résultant de l’application de la liste d’ancienneté portant sur les aspects spécifiques de l’ancienneté d’occupation. le syndicat n’a pas manqué à son devoir de représentation.

EN CONSÉQUENCE, la Commission de relations du travail

REJETTE                      la plainte.

 

 

 

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Raymond Gagnon

 

M. Dominique Demers

Représentant de l’intimé

 

M. Christian Painchaud

Représentant de la mise en cause

 

 

Date de la dernière audience :

le 5 juin 2012

 

/jb