Paquette c. Constructions Nomade Faubourg Boisbriand

2012 QCCQ 6329

JG 1496

 
 COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

TERREBONNE

LOCALITÉ DE

ST-JÉRÔME

« Chambre civile  »

N° :

700-22-024245-119

 

 

 

DATE :

25 juillet 2012

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

DIANE GIRARD, J.C.Q.

 

 

 

BENOIT PAQUETTE &

DENIS PAQUETTE

Demandeurs

c.

CONSTRUCTIONS NOMADE FAUBOURG BOISBRIAND

Défenderesse

 

 

 

JUGEMENT

 

 

[1]            Les demandeurs, qui avaient signé avec la défenderesse des contrats préliminaires pour l'achat de triplex, réclament le remboursement des acomptes versés, l'achat n'ayant finalement pas eu lieu.

[2]            Ils plaident subsidiairement que les contrats ne respectaient pas les formalités exigées par la loi et étaient incomplets ou inexacts, d'où la demande de nullité des contrats. Enfin, ils allèguent ne pas avoir pu obtenir le financement requis, qu'ils croyaient être une condition du contrat; d'où le vice de consentement.

[3]            La défenderesse, Constructions Nomade Faubourg Boisbriand (Construction Nomade) plaide que les demandeurs sont des personnes instruites, ayant de l'expérience dans l'acquisition d'immeubles, qu'ils ont délibérément mis fin au contrat et encaissé pour des fins autres, la mise de fonds qui devait servir à l'achat des triplex. Elle nie leur incapacité d'obtenir le financement requis et plaide qu'ils n'avaient tout simplement plus l'intention d'acquérir les immeubles et qu'ils n'ont pas respecté les obligations leur incombant en vertu des contrats préliminaires, ce qui justifie la conservation des dépôts.

I           Les faits et la preuve :

[4]            Les parties ont déposé le 28 juin 2012 une liste d'admissions comprenant les pièces déposées (aux fins de production) ainsi que des éléments factuels dont il y a lieu de reproduire le contenu:

«   LES FAITS

1.         Le demandeur Benoit Paquette est un homme d'affaires oeuvrant dans le domaine de l'impression commerciale et à ce titre, il est coactionnaire et président d'une entreprise d'une vingtaine d'employés, savoir Imagerie DB inc.

2.         Le demandeur Benoit Paquette est un individu instruit, bachelier en administration de l'Université du Québec et détenteur d'un diplôme collégial en sciences pures du Collège du Bois de Boulogne.

3.         Le demandeur Denis Paquette est un homme d'affaires oeuvrant dans le domaine de l'impression commerciale et à ce titre, il est coactionnaire et vice-président avec son frère, le demandeur Benoit Paquette, de l'entreprise Imagerie DB.

4.         Le demandeur Denis Paquette est un individu instruit, diplômé en administration de l'université américaine de l'État de l'Idaho.

5.         Le demandeur Benoit Paquette admet avoir accepté les 2 contrats préliminaires 11855 et 11268.

6.         Le demandeur Benoit Paquette admet que le contrat préliminaire 11268 a remplacé le contrat préliminaire 11855.

7.         Lors de la signature du contrat 11855, la défenderesse ne pouvait confirmer aucune date de livraison puisqu'elle attendait les autorisations de construction de la part du comité consultatif d'urbanisme de la ville de Boisbriand et c'est la raison pour laquelle le contrat préliminaire était sujet à acceptation C.C.U. et ville.

8.         En vertu de ce contrat préliminaire, le demandeur Benoit Paquette remettait à la défenderesse un acompte de 25 000 $.

9.         Le demandeur Benoit Paquette avait alors avisé la défenderesse de son intention d'acquérir le triplex à des fins d'investissement (ne pas y résider lui-même).

10.       Lors de la signature du contrat 11858, la défenderesse ne pouvait confirmer aucune date de livraison puisqu'elle attendait les autorisations de construction de la part du comité consultatif d'urbanisme de la ville de Boisbriand et c'est la raison pour laquelle le contrat préliminaire était sujet à acceptation C.C.U. et ville.

11.       En vertu de ce contrat préliminaire, le demandeur Denis Paquette remettait à la défenderesse un acompte de 25 000,00 $.

12.       Le demandeur Denis Paquette avait avisé alors la défenderesse de son intention d'acquérir le triplex à des fins de location (ne pas y résider lui-même).

13.       La mise de fonds nécessaire pour le financement des immeubles était de 100 000 $ chacun (25 000 $ d"acompte et 75 000 $ lors de la signature).

14.       Lors de l'incendie du 3 octobre 2008, les immeubles en litige n'étaient pas encore débutés.

15.       Le ou vers le 9 octobre 2008, la défenderesse recevait les approbations hypothécaires des demandeurs de la part de la Banque de Nouvelle-Écosse.

16.       Le 25 juillet 2008, les demandeurs retiraient les sommes suivantes du placement détenu auprès de la Banque Royale du Canada et qui devait constituer la mise de fonds pour l'acquisition des immeubles:

i)          25 juillet 2008:  retrait de 35 323,67 $ (près de 2 semaines après la signature des contrats préliminaires 11268 et 11269)

ii)         7 août 2008:  retrait de 50 000,00 $

iii)         7 avril 2009:  retrait de 55 064,64 $

17.       Le ou vers le 1 er mai 2009, la défenderesse recevait de la part des demandeurs une correspondance lui indiquant que «  le financement avec la banque ne sera pas possible puisque les conditions de mise de fonds lors de la pré-autorisation de l'hypothèque ne seront pas disponibles » .

18.       Le demandeur Benoit Paquette est copropriétaire d'un immeuble situé au […] dans la municipalité de Lac-du-Cerf évalué au montant de 134 300,00 $.

19.       Entre le printemps et l'automne 2009, les parties ont mutuellement tenté de se rejoindre sans succès.

20.       Le 18 août 2009, le demandeur Benoit Paquette faisait l'acquisition d'une nouvelle propriété située au 643, carré Dufaut à Sainte-Thérèse pour la somme de 296 000,00 $ dont l'acquisition avait été financée auprès de la Banque de Nouvelle-Écosse.

21.       Le ou vers le 11 décembre 2009, la défenderesse signifiait aux demandeurs (qui accusent réception sans admettre le contenu) une mise en demeure afin que ces derniers fournissent les preuves de financement requises dans un délai de 10 jours, à défaut de quoi la défenderesse résilierait les contrats préliminaires et conserverait le dépôt versé conformément à la clause 5.6 du contrat préliminaire, le tout sans préjudice de ses droits et recours et de la loi.

22.       Les premières unités de copropriété du Projet Pimbina Loggia ont été livrées les 23 octobre 2009, 30 octobre 2009, 6 novembre 2009 et 3 décembre 2009.

23.       Les immeubles en litige ont été respectivement vendus les 21 avril 2010 et 10 mai 2010.  »

[5]            Pour compléter ces admissions, la preuve a révélé que la défenderesse était l'instigatrice d'un projet immobilier d'envergure composé de 27 (vingt-sept) bâtiments de deux (2) triplex jumelés détenus en copropriété divise, situés sur l'ancien terrain de l'usine General Motor à Boisbraind. Les triplex ayant fait l'objet des contrats préliminaires, signés par les demandeurs, faisaient partie du second projet nommé Projet Pimbina Loggia (composé de 6 (six) bâtiments, pièce D-5).

[6]            Les premiers contrats préliminaires ont été signés le 28 avril 2008 au prix de 530 000 $ chacun (pièces P-1, P-2, D-6 et D-9). Les contrats ne prévoyaient pas de date de livraison. Vu les exigences de ville de Boisbriand, les immeubles ont dû être agrandis et les demandeurs ont accepté de payer plus cher soit 550 000 $ (pièces P-3, P-4, D-8 et D-10).

[7]            Le second contrat (pièce P-3) de Benoit Paquette mentionne l'acompte versé des 25 000 $, qui en fait, provenait du premier contrat. La copie du contrat de Denis Paquette (pièce P-4) ne mentionne pas cet acompte, mais il appert de la preuve que les 25 000 $ versés lors du premier contrat ont été conservés par la défenderesse.

[8]            Ces deux (2) contrats, datés du 7 juillet 1008 et signés par les demandeurs, ne prévoient pas de date de livraison. Les demandeurs n'ont pas demandé d'inscrire la date de l'été 2009. Les copies (pièces D-8 et D-10) comprennent les signatures des demandeurs à l'effet qu'ils ont reçu copie du contrat le 17 juillet 2008.

[9]            L'acceptation des contrats par la représentante de la défenderesse apparaît aux pièces (pièces P-3, D-8 et D-10).

[10]         Les contrats comprennent les clauses suivantes:

«   3.1   Prêt :  S'il est impossible au promettant-acheteur d'obtenir l'un ou l'autre des prêts hypothécaires décrits à l'article 2.2 des présentes dans les trente (30) jours suivant l'acceptation du présent contrat, à moins d'entente contraire entre les parties, le promettant-acheteur s'engage à en aviser immédiatement le vendeur par écrit. Le promettant-acheteur s'engage à fournir sur demande, les informations et documents requis pour l'obtention d'un prêt hypothécaire. Le vendeur pourra, dans un délai de cinq (5) jours suivant la réception de cet avis, exiger par écrit que le promettant-acheteur fasse immédiatement et à ses frais une nouvelle demande d'un prêt hypothécaire, conforme aux termes et conditions exposés précédemment, par l'entremise du vendeur.

Advenant le refus de cette nouvelle demande, le promettant-acheteur s'engage à aviser immédiatement par écrit le vendeur de son impossibilité d'obtenir le financement requis. Dans un tel cas, le présent contrat sera annulé et le vendeur devra remettre au promettant-acheteur tous les acomptes déjà versés au vendeur en vertu de l'article 2.2 des présentes, déduction faite des dépenses raisonnablement encourues par le vendeur relative à l'exécution du présent contrat, sans autre recours.

[…]

4.7  Retard: Le vendeur ne sera pas responsable du retard de délivrance de l'immeuble dans les cas de défaut par le promettant-acheteur de remplir ses obligations contenues aux présentes et dans le cas de force majeure. Aux fins des présentes, force majeure signifie notamment:  un accident inévitable, un feu, un cataclysme naturel, un conflit de travail, une guerre, une révolution, le défaut de tout fournisseur de matériaux ou services et enfin toute autre cause indépendante de la volonté du vendeur.  Si le retard est de plus de trente (30) jours, alors les frais supplémentaires engendrés par l'augmentation de coûts de construction seront payables au vendeur dans un délai de dix (10) jours après la remise au promettant-acheteur des pièces justificatives. À défaut de paiement dans ce délai, les frais supplémentaires seront ajoutés au prix de vente et le prix de vente du contrat sera modifié en conséquence et liera les parties.

[…]

5.5  Défaut du vendeur:   À moins de stipulations à l'effet contraire, le défaut par le vendeur de respecter l'une des obligations lui incombant en vertu du présent contrat, permettra au promettant-acheteur de l'annuler à compter de l'expiration d'un délai de dix (10) jours suivant un avis écrit à cet effet, auquel cas le vendeur sera tenu de remettre au promettant-acheteur les sommes versées jusqu'alors, sans préjudice à tout autre recours.

5.6  Défaut du promettant-acheteur:  À moins de stipulations à l'effet contraire, le défaut par le promettant-acheteur de respecter l'une des obligations lui incombant en vertu du présent contrat permettra au vendeur de l'annuler à compter de l'expiration du délai de dix (10) jours suivant un avis écrit à cet effet auquel cas le vendeur conservera les sommes versées jusqu'alors, en vertu de l'article 2.2 des présentes, à titre de dommages, sans préjudice à tout autre recours.

[…]

5.8  Date limite/acceptation: Le présente contrat devra être accepté par le vendeur au plus tard dix (10) jours après la signature du promettant-acheteur, à défaut de quoi il deviendra nul et de nul effet. Le présent contrat annule et remplace toute autre entente écrite ou verbale antérieure et ne sera considéré comme accepté par le vendeur que s'il porte sa signature.  »

Pièce D-8

[11]         Selon Benoit Paquette, il connaissait ce type de clauses, qui, selon lui, étaient standard. Denis Paquette témoigne ne pas avoir lu toutes les clauses du contrat, mais son frère lui avait expliqué le sens de l'article 3.1.

[12]         Curieusement, ce n'est que le 9 octobre 2008 que la Banque Scotia (pièce P-5) confirme la demande de prêt hypothécaire:

«  […] conditionnel à ce que la propriété soit terminée à 100%.  Prévue:  juin 2009.  »

[13]         Quant à cette date de finition des travaux, la défense s'est objectée au témoignage de Benoit Paquette sur des représentations du courtier immobilier Ladouceur qui lui aurait représenté que l'immeuble serait prêt en avril - mai 2009. Le Tribunal a pris cette objection sous réserve de la preuve à venir.

[14]         Monsieur Ladouceur n'a pas témoigné et le contrat mentionne comme date « à venir  ». Les parties ont admis que la date ne pouvait être précisée, car le comité consultatif d'urbanisme de la Ville n'avait pas encore émis les autorisations de construction (voir également interrogatoire hors Cour du 14 juin 2011).

[15]         De plus, Steve St-Pierre, président du groupe Nomade et de la défenderesse, a confirmé, séance tenante, que si le feu n'avait pas eu lieu dans la première phase en octobre 2008, la seconde phase aurait été livrée à l'été. Ceci confirme le témoignage de Benoit Paquette et l'objection est donc rejetée.

[16]         Comme mentionné précédemment, un incendie s'est déclaré le 3 octobre 2008 (voir article de journal, pièce D-11). Monsieur St-Pierre a témoigné que l'assureur a fait enquête et cela a pris 4 mois avant que les travaux reprennent. La phase II n'a débuté qu'au printemps 2009 et les premières unités ont été livrées le 23 octobre 2009.

[17]         Avant l'incendie, les demandeurs avaient encaissé 85 323,67 $ placés à la Banque Royale du Canada et qui devaient servir à la mise de fonds pour l'acquisition des immeubles.

[18]         Les demandeurs témoignent que ces sommes ont été investies dans leur entreprise, car leur équipement était vétuste et un local s'était libéré leur permettant d'agrandir. Ils témoignent, qu'à cette époque, ils croyaient pouvoir rembourser cette somme. Or, selon eux, l'entreprise a eu des difficultés financières au début de l'année 2009. Un gros client a eu des restrictions budgétaires pour son marketing et ses commandes ont passé de 200 000 $ à 300 000 $ mensuellement à environ 30 000 $.

[19]         Denis Paquette témoigne que lors du dernier retrait de 55 000 $, le 7 avril 2009, ils savaient que leur triplex n'était pas fini. Ils ont licencié cinq (5) employés sur vingt-deux (22) et l'argent a servi à payer les salaires.

[20]         Les difficultés financières de l'entreprise n'ont pas été corroborées par une preuve comptable.

[21]         Le 22 avril 2009, Benoit Paquette et Denis Paquette écrivent à la défenderesse (pièce P-7) que le financement avec la Banque ne sera plus possible puisque la mise de fonds n'est plus disponible.

[22]         La preuve a révélé que les demandeurs n'ont fait aucune démarche pour confirmer leur financement, malgré l'allégation en ce sens à la mise en demeure de leur avocat du 9 juillet 2009 (pièce P-8) réclamant le remboursement des acomptes versés alléguant l'article 3.1 du contrat.

II          Les questions en litige :

[23]         1.         L'acompte versé était-il transférable d'un contrat à l'autre?

2.         Le contrat respectait-il toutes les formalités exigées par la loi? Si non, cela invalide-t-il le contrat? Y a-t-il eu vice de consentement par erreur? Cette erreur est-elle excusable?

3.         L'acceptation de financement par l'institution financière était-elle expirée? Si oui, la défenderesse a-t-elle respecté les conditions du contrat (article 3.1)?

4.         Les délais de livraison occasionnés par l'incendie du 3 octobre 2008 relèvent-ils d'une force majeure?

1.         L'acompte versé :

[24]         Les demandeurs plaident que le dépôt versé n'était pas transférable d'un contrat à l'autre (pièce P-1 à P-4). Ils ajoutent que les contrats (pièces P-3 et P-4) ne portent pas le même numéro de licence de la Régie du Bâtiment.

[25]         Selon l'avocate de la défenderesse, il s'agit d'une erreur purement technique quant au numéro de licence. Les contrats (pièces P-3 et P-4) indiquent le même nom de vendeur, soit Constructions Nomade Faubourg Boisbriand.

[26]         D'autre part, les demandeurs ont admis avoir accepté de payer un prix plus élevé compte tenu des exigences de la Ville. Ils ont bien signé ces nouveaux contrats et dans le cas de Benoit Paquette, il a reconnu avoir reçu copie du contrat le 17 juillet 2008, copie dûment signée par une personne autorisée de la défenderesse (pièce P-3).

[27]         Quant à Denis Paquette, il a signé ce deuxième contrat le 7 juillet et malgré l'absence de signature de la représentante de la défenderesse sur sa copie (pièce P-4), il a tout de même une copie du contrat et la copie de la défenderesse (pièce D-10) comprend sa signature attestant qu'il en a reçu une copie et elle est signée par la défenderesse.

[28]         De plus, les témoignages des deux (2) demandeurs établissent clairement leur consentement quant à un nouveau contrat pour un prix plus élevé. L'absence de versement d'un autre dépôt constitue un acquiescement à ce que le dépôt versé lors du premier contrat serve pour le second puisqu'il s'agit du même immeuble pour le même acheteur (voir témoignage de monsieur St-Pierre sur l'attestation d'acompte).

2.         Les éléments et formalités du contrat :

[29]         Comme mentionné précédemment, l'acceptation des deux (2) contrats (pièces P-3 et P-4) ne fait aucun doute et conformément à l'article 1394 du Code civil du Québec, la volonté des parties ne souffre pas d'ambiguïté. L'article 5.8 du contrat ne s'applique pas.

[30]         Quant à la date de livraison, qui n'était pas indiquée au contrat, et qui, selon la demande, était un élément essentiel, la preuve a révélé que les parties s'attendaient à ce que l'immeuble soit livré à l'été 2009, mais qu’elles étaient tributaires des autorisations de la Ville.

[31]         Le Tribunal ne peut conclure à quelque erreur que ce soit pour les demandeurs.

3.         L'impossibilité de financement :

[32]         Les demandeurs ont reçu une confirmation de leur financement le 9 octobre 2008 (pièce P-5). La mise de fonds devait provenir de placements détenus à la Banque Royale. Or, avant même la réception de l'acceptation de financement (pièce P-5), les demandeurs avaient retiré ces sommes d'argent pour s'en servir à d'autres fins, et ce, sans en aviser le prêteur hypothécaire. Ce n'est que le 22 avril 2009 qu'ils en avisent la défenderesse.

[33]         Les demandeurs ne font aucun effort pour obtenir le financement requis, malgré l'encaissement des sommes devant servir à la mise de fonds. La preuve a révélé que les demandeurs possédaient des actifs, mais ils n'ont pas tenté d'obtenir le financement requis. Les demandeurs se sont volontairement mis dans une situation qui rendait l'approbation hypothécaire invalide. Leur argument qu'ils devaient rénover leur équipement ne peut mettre en échec l'engagement qu'ils avaient pris précédemment.

[34]         Ils ne peuvent donc plaider l'impossibilité d'obtenir le financement. Ce financement avait été accepté, la défenderesse n'avait pas d'autre formalité à remplir et le fait que l'immeuble n'ait pas été complété en juin 2009 ne peut leur venir en aide vu l'absence de démarche auprès du créancier hypothécaire qui n'a pas témoigné que le financement n'était plus possible, l'immeuble n'étant pas terminé en juin 2009.

[35]         La lettre (pièce P-5) mentionne la date prévue juin 2009, mais ne mentionne pas qu'après cette date l'approbation hypothécaire tombe. Elle ne mentionne que la condition que l'immeuble soit terminé.

4.         Le retard dans la livraison des immeubles :

[36]         Les demandeurs plaident que les immeubles ont été terminés fin octobre 2009. Ils ajoutent qu'il était primordial pour eux qu'ils soient prêts avant le 1 er juillet, car l'achat était dans le but de louer. Précisons d'abord que Denis Paquette a témoigné hors Cour (page 41 de l'interrogatoire du 14 juin 2011) qu'au printemps 2009 l'achat du triplex n'était plus faisable compte tenu de l'encaissement des mises de fonds.

[37]         D'autre part, l'article 4.7 du contrat prévoit l'absence de responsabilité du vendeur de livrer dans les délais dans les cas de force majeure, notamment le feu.

[38]         Les demandeurs plaident qu'il ne s'agit pas de l'incendie des immeubles achetés. L'article 4.7 ne précise pas qu'il doive s'agir de l'immeuble en question, mais la preuve a révélé que la construction des immeubles en litige relevait d'un méga projet de la défenderesse dont une partie importante des immeubles construits ont été incendiée (voir article de journal, pièce D-11) et que l'assureur a bloqué les fonds pendant le temps de son enquête. Il s'agit d'un cas de force majeure et le constructeur a agi avec diligence, les immeubles ayant été terminés en octobre 2009.

[39]         Le retard dans la livraison de l'immeuble ne pouvait justifier l'inexécution des demandeurs.

[40]         L'article 5.6 du contrat prévoit que le défaut des promettants-acheteurs de respecter leur contrat autorise le vendeur à conserver le dépôt versé.

[41]         Les demandeurs ont consenti à cette clause. Ils sont des gens instruits, hommes d'affaires qui connaissaient les engagements qu'ils signaient. Ils se sont placés volontairement dans une situation précaire selon leur dire et pour laquelle ils n'ont tenté aucune alternative.

[42]         Les demandeurs ont décidé de ne plus acheter, mais ils n'ont pas droit au dépôt versé, ni à l'annulation du contrat.

[43]         Pour ces motifs, le Tribunal:

[44]         REJETTE la requête avec dépens.

 

 

 

__________________________________

L'Honorable Diane Girard, j.C.Q.

 

Me Martine Létourneau

Procureure des demandeurs

 

Me Annie Lefebvre

Procureure de la défenderesse

 

 

Date d’audience :

28 et 29 juin 2012