RÉGIE DU BÂTIMENT
DU QUÉBEC

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

No du dossier :

5590-9691

8108-4204

 

No du rôle :

16.a-C-12

 

Date :

10 juillet 2012

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DEVANT :

Monsieur Robert Généreux, régisseur

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L’entreprise «9205-6191 QUÉBEC INC.» faisant des affaires sous le nom «CRÉATIONS T.E.»

L’entreprise «VULCI INC.»

 

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DÉCISION

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[1]            L’entreprise «9205-6191 QUÉBEC INC.» faisant des affaires sous le nom «CRÉATIONS T.E.» est titulaire d’une licence d’entrepreneur de construction. L’entreprise «VULCI INC.» est également titulaire d’une licence d’entrepreneur de construction.  Monsieur Luc Vinette est l’unique dirigeant et l’unique répondant des deux entreprises.

MOTIFS DE LA CONVOCATION

[2]            Monsieur Luc Vinette, dirigeant et répondant de l’entreprise « Vulci inc .», a été déclaré coupable le 1 er septembre 2011 d’actes criminels prévus aux articles 380 (1) a), 367 a) et 368 (1) a) et c) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46).

Dispositions de la Loi sur le bâtiment : articles 60 (6 o ) et 70 (2 o )

[3]            Monsieur Luc Vinette, dirigeant et répondant de l’entreprise «9205-6191 QUÉBEC inc .», a été déclaré coupable le 1 er septembre 2011 d’actes criminels prévus aux articles 380 (1) a), 367 a) et 368 (1) a) et c) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46).

Dispositions de la Loi sur le bâtiment : articles 60 (6 o ) et 70 (2 o )

[4]            Après analyse des éléments aux dossiers, la Régie a avisé lesdites entreprises qu’il est de son intention de suspendre ou encore d’annuler les licences d’entrepreneur de construction, considérant :

Le paragraphe 2° de l’article 70 de la Loi sur le bâtiment qui se lit comme suit :

70. La Régie peut suspendre ou annuler une licence lorsque le titulaire :

[…]

2° ne remplit plus l’une des conditions requises par la présente loi pour obtenir une licence;

[5]            À cet effet, les entreprises «9205-6191 QUÉBEC INC.» et «VULCI INC.» ont été convoquées devant la Régie le 17 avril 2012, au 545, boul. Crémazie est, 3 étage, à Montréal, afin de leur permettre de présenter leurs observations, et ce, après une demande de remise de la part des défenderesses.

[6]            Monsieur Luc Vinette s’est présenté accompagné de Me Konstantinos Voggas et de Me Pierre Latour à l’heure et à la date fixées.

[7]    Les conditions requises pour obtenir une licence sont prévues à l’article 60 de la Loi sur le bâtiment, en ce qui concerne les sociétés ou personnes morales. Le paragraphe 6° du premier alinéa de l’article 60 de cette loi se lit comme suit : 

60.  Une licence est délivrée à une société ou personne morale qui satisfait aux conditions suivantes :

[…]

6°elle-même, l'un de ses dirigeants ou, si elle n'est pas un émetteur assujetti au sens de la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1), l'un de ses actionnaires n'a pas été déclaré coupable, dans les cinq ans précédant la demande, d'une infraction à une loi fiscale ou d'un acte criminel et qui sont reliés aux activités que la personne entend exercer dans l'industrie de la construction ni d'un acte criminel prévu aux articles 467.11 à 467.13 du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) ou, ayant été déclaré coupable d'un tel acte ou infraction, cette personne a obtenu la réhabilitation ou le pardon;

[8]            La déclaration de culpabilité de monsieur Vinette aux actes criminels fait en sorte que les entreprises «VULCI inc .» et «9205-6191 QUÉBEC INC.» ne remplissent plus l’une des conditions requises par la Loi sur le bâtiment pour obtenir une licence.

[9]            La présente cause a été prise en délibérée le 13 juin 2012 suite à la réception des représentations écrites des parties.

TÉMOIGNAGES

Interrogatoire de Luc Vinette

[10]         Au début de la rencontre, les parties échangent leurs points de vue sur la possibilité de remettre l’audience considérant que les entreprises « Vulci Inc .» et «9205-6191 QUÉBEC INC.» sont présentement en processus de proposition concordataire.

[11]         Suite aux représentations des parties, le soussigné décide que l’audience se tiendrait tel que prévu.

[12]         Par la suite, les parties conviennent que les défenderesses débuteraient par l’interrogatoire de monsieur Vinette.

[13]         Les faits saillants de l’interrogatoire sont les suivants :

§   «Vulci Inc.» est détentrice d’une licence d’entrepreneur de construction depuis 1998;

§   La licence de «Vulci Inc.» est restreinte depuis décembre 2011;

§   Monsieur Luc Vinette est le seul actionnaire et le seul répondant de «Vulci Inc.»;

§   «Vulci Inc.» est en activité et en processus de proposition concordataire;

§   Actuellement, l’entreprise embauche 25 personnes alors qu’annuellement ce nombre peut varier de 10 à 70;

§   Monsieur Vinette mentionne que […] travaille également pour l’entreprise.

[14]         Monsieur Vinette ajoute que l’entreprise «Vulci Inc.» a environ pour X $ de projets en cours alors que son chiffre d’affaires annuel oscille entre X et X $.

[15]         Pourquoi vouloir maintenir les activités ? Monsieur Vinette mentionne qu’il est un bon entrepreneur, que son équipe réalise des travaux de qualité et avec tout le professionnalisme requis.

[16]         Pourquoi avoir plaidé coupable le 1 er septembre 2011 ? Parce que je voulais alléger les frais d’avocats, je voulais aller au plus court et aussi parce que j’étais de bonne foi répond monsieur Vinette.

[17]         Pourquoi avoir fait partie de ce stratagème de fausses factures ? Monsieur Vinette répond que, dans ce monde de «requins», il n’avait pas le choix d’agir ainsi s’il voulait continuer à être en opération.  Il ajoute qu’il ne faisait pas ça pour s’enrichir «salement» mais seulement pour faire face à la concurrence.

[18]         Par la suite, monsieur Vinette explique que, contrairement à ce que pensaient les enquêteurs de Revenu Québec, il n’était aucunement impliqué dans les fausses factures concernant l’entreprise «L. & R. Vinette» car cette entreprise a été vendue, le 18 décembre 2007, à monsieur J-F C.

[19]         Monsieur Vinette déclare également qu’il n’a jamais fait personnellement de fausses factures ce qui a de beaucoup réduit les charges portées contre lui.

[20]         Selon son témoignage, monsieur Vinette explique que «Vulci Inc.» avait besoin d’argent comptant afin de pouvoir payer au noir ses employés.  Il ajoute qu’il n’avait pas le choix car ses employés voulaient être payés en «cash» sinon ils s’en allaient travailler ailleurs.

[21]         Au sujet de la proposition concordataire, monsieur Vinette mentionne qu’il est présentement en négociation avec son syndic et Revenu Québec.  Ce dernier ajoute qu’il n’a aucun antécédent en la matière et que «Vulci Inc.» ne fait l’objet d’aucune plainte à la RBQ, ni à la CCQ ou encore à la CSST.

[22]         Finalement, monsieur Vinette mentionne qu’à ce jour, l’entreprise «Vulci Inc.» aurait remis pour la somme de X $ à Revenu Québec, somme provenant des contrats réalisés par l’entreprise récemment, et ce, dans le cadre des négociations de la proposition concordataire.

 

 

 

Contre-interrogatoire de Luc Vinette

[23]         Les faits saillants du contre-interrogatoire sont les suivants :

§   L’entreprise «Vulci Inc.» est présentement en activités alors que l’entreprise «9205-6191 QUÉBEC INC.» ne l’est pas;

§   Les contrats en cours pour «Vulci Inc.» sont de l’ordre d’environ X $ et près de 25 employés sont actuellement à l’emploi de cette entreprise. De plus, «Vulci Inc.» obtient des contrats dits de sous-traitance.

[24]         Monsieur Vinette explique que son rôle au sien de «Vulci Inc.» est principalement de s’occuper de la gestion des contrats, de la supervision des chantiers et de la collection des comptes.  Il déclare œuvrer environ 50% du temps sur les chantiers et 50% au bureau.  Monsieur Vinette précise qu’il possède des cartes de compétence en systèmes intérieurs, comme menuisier et également en gérance de chantiers.  Finalement, monsieur Vinette ajoute avoir suivi une formation en administration à l’université.

[25]         Comment en êtes-vous arrivé à vous adonner à la fausse facturation ?  Monsieur Vinette explique qu’au début, il soumissionnait les contrats à prix fixe.  Voyant qu’il faisait un profit, le donneur d’ouvrage a changé les règles du jeu, au point que «Vulci Inc.» ne faisait plus autant d’argent.  Puis, pour être rentable, «Vulci Inc.» n’a pas eu le choix de payer ses employés au noir.

[26]         Combien de fausses factures avez-vous utilisées durant la période allant de 2004 à 2008 ?  Environ 200, répond monsieur Vinette.

[27]         Au sujet de l’entreprise «9205-6191 QUÉBEC INC.» faisant des affaires sous le nom «CRÉATIONS T.E.», monsieur Vinette mentionne que c’est une compagnie «tablette» au cas où «Vulci Inc.» aurait eu un problème.  Monsieur Vinette se dit prêt à laisser tomber la licence d’entrepreneur de cette entreprise.

Au sujet des infractions

[28]         Le mandat d’arrestation contre monsieur Luc Vinette découle de l’enquête du projet «Dorade I» qui a débuté suite au ratissage du projet «Béquille» de la Sûreté du Québec.

[29]         Suite à son plaidoyer de culpabilité aux chefs d’accusation 3, 5 et 6, aux actes criminels 380 (1) a), 367 a) et 368 (1) a) c) du Code criminel, monsieur Luc Vinette a reçu comme sentence 13 mois d’emprisonnement avec sursis en plus d’une suramende de 100 $ payable dans les 90 jours.

[30]         Les chefs d’accusations 3, 5 et 6 se lisent comme suit :

3.     Entre le 1 er juin 2007 et le 4 novembre 2008, à Montréal, district de Montréal et ailleurs dans la province de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, ont frustré Revenu Québec et l’Agence du Revenu du Canada, d’une somme d’argent d’une valeur dépassant 5 000 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380  (1) a) du Code criminel.

5.   Entre le 1 er juin 2007 et le 4 novembre 2008, à Montréal, district de Montréal et ailleurs dans la province de Québec, ont fait des faux documents soit des fausses factures les sachant fausses, avec l’intention qu’elles soient employées ou qu’on y donne suite comme authentiques au préjudice de Revenu Québec et l’Agence du Revenu du Canada, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 367 a) du Code criminel.

6.   Entre le 1 er juin 2007 et le 4 novembre 2008, à Montréal, district de Montréal et ailleurs dans la province de Québec, sachant que des documents étaient contrefaits, soit des fausses factures, s’en sont servis, traités, ou ont agi à leur égard comme si ces documents étaient authentiques, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 367 (1) a)c) du Code criminel.

Le litige opposant «Vulci Inc.» à Revenu Québec

[31]         Essentiellement, le litige opposant l’entreprise «VULCI INC.» à Revenu Québec est attribuable à la contestation des avis de cotisation par «VULCI INC.»  Le tout découlant de l’enquête «Dorade I».

[32]         De plus, comme «Vulci Inc.» est en opposition face à ces avis de cotisation, il en va de soi que le processus de négociation dans pareille circonstance est très long et très complexe.

[33]         Finalement, l’importance des sommes en cause est telle pour l’entreprise «VULCI INC.» qu’il en va de la survie de l’entreprise.

Témoignage de M. R. L., syndic

[34]         Par son témoignage, monsieur L. est venu clarifier la situation qui oppose l’entreprise «VULCI INC.» à l’Agence du Revenu du Québec.

[35]         Selon les faits, le 16 février 2012, une requête a été déposée à la Cour pour obtenir un délai supplémentaire pour le dépôt d’une proposition concordataire.

[36]         Jusqu’à ce jour, il appert que les ententes intervenues entre l’Agence du Revenu du Québec et l’entreprise «Vulci Inc.» sont respectées.

[37]         Monsieur L. ajoute que la proposition concordataire devrait être déposée prochainement.

[38]         Considérant que le principal créancier dans cette proposition est l’Agence du Revenu du Québec, ce sera à lui de décider s’il accepte ou pas ladite proposition.

[39]         Si jamais, l’Agence du Revenu du Québec n’accepterait pas la proposition, l’entreprise «Vulci Inc.» n’aura d’autre choix que de déclarer faillite.

PLAIDOIRIE DE LA RÉGIE

[40]         Pour les deux motifs évoqués dans l’avis d’intention, le procureur de la Régie mentionne qu’il s’agit essentiellement de la même preuve considérant que les motifs portent sur la même personne physique, soit monsieur Luc Vinette qui a été reconnu coupable aux articles suivants, selon le Code criminel :

§   article 380 (1) a) pour fraude;

§   article 367 a) pour faux;

§   article 368 (1) a) c) pour faux.

[41]         Comme ces actes criminels sont bien en lien avec l’industrie de la construction, tel qu’il a été démontré lors de l’audience, et ce, via l’utilisation d’un stratagème de fausses factures reliées à des travaux de construction, le procureur de la Régie souligne qu’en vertu des articles 60 (6 o ), 70 ( 2 o ) de la Loi sur le bâtiment, la Régie peut exercer son pouvoir de suspension ou encore d’annulation de licence en l’espèce.

[42]         Le procureur de la Régie mentionne que monsieur Luc Vinette est le seul dirigeant, actionnaire et répondant des entreprises «VULCI INC.» et «9205-6191 QUÉBEC INC.».

[43]         Le procureur de la Régie soumet que la sentence de 13 mois avec sursis, qui a été imposée à monsieur Luc Vinette, est l’une des plus importantes qui ait été décernée à ce jour à un dirigeant d’un titulaire de licence.  Celle-ci commande donc une sanction appropriée et raisonnable en l’espèce.

[44]         Pour étayer sa position, le procureur de la Régie évoque les décisions rendues par la Régie dans les dossiers suivants :

Ø   Albeau Construction (5619-0804, le 21 octobre 2011);

Ø   9190-8905 Québec Inc. (8360-4769, le 27 octobre 2011);

Ø   Les Entreprises Promécanic Ltée (1838-2200, le 14 mars 2012);

ou encore par la Cour du Québec dans le dossier :

Ø   Technique Acoustique (L.R.) Inc. (700-01-070459-07, le 14 mars 2012).

[45]         Considérant le cas Albeau Construction ci-haut mentionné, le procureur de la Régie indique que l’unique dirigeant, actionnaire et répondant de l’entreprise a été déclaré coupable personnellement aux mêmes actes criminels que monsieur Luc Vinette et ce dernier s’est vu décerner une sentence de 6 mois pour ses gestes.

[46]         Considérant le cas en l’espèce, celui-ci doit être considéré plus grave que le cas Albeau Construction compte tenu du prononcé de la sentence.

[47]         Cela faisant, par les principes de justesse et d’équité des décisions, considérant les similitudes entres lesdits cas précités, la décision raisonnable qui s’impose en pareilles circonstances n’est nulle autre que l’annulation des licences d’entrepreneur de construction des entreprises «VULCI INC.» et de «9205-6191 QUÉBEC INC.».

[48]         Le procureur de la Régie ajoute les facteurs aggravants suivants pour justifier sa position, soient : l’implication active de monsieur Vinette dans l’échange des fausses factures ainsi que l’argent obtenu frauduleusement au noir, et ce, tel qu’il a été confirmé par monsieur Vinette durant sa déclaration (pièce P-10).

[49]         En conséquence, le procureur de la Régie plaide en faveur de l’annulation des licences d’entrepreneur de construction des entreprises «VULCI INC.» et de «9205-6191 QUÉBEC INC.».

PLAIDOIRIE DES DÉFENDERESSES

[50]         Résumé des faits pertinents :

§   Depuis 1998, monsieur Luc Vinette est l’unique actionnaire, administrateur et répondant vis-à-vis la Régie du bâtiment de «VULCI INC.», cette compagnie est toujours active;

§   En décembre 2007, monsieur Vinette a vendu l’entreprise «R & L Vinette Inc.» à monsieur J-F C. (pièce D-3);

§   Depuis cette vente, monsieur Vinette n’est plus actionnaire ni administrateur de cette entreprise (pièce D-2);

§   Depuis l’année 2009, monsieur Vinette était aussi actionnaire, administrateur unique et répondant de «9205-6191 QUÉBEC INC.», laquelle n’était en fait qu’une compagnie «tablette» que monsieur Vinette gardait en réserve dans l’éventualité où il «arriverait» quelque chose à «Vulci Inc.»

§   Le ou vers le 29 octobre 2008, monsieur Vinette est arrêté par la Sûreté du Québec dans le cadre de l’opération Dorade à l’occasion d’une perquisition effectuée à sa résidence.

§   Monsieur Vinette est accusé en vertu des articles suivants du Code criminel : 380 (1) a), 367 (a), 368 (1) a) c), 465 (1) c) et 334 a).

§   C’est là que monsieur Vinette apprend que la compagnie «R & L Vinette Inc.», vendue environ 1 an plus tôt, a servi depuis à un groupe criminel pour émettre de nombreuses fausses factures dans le cadre d’un stratagème visant à procurer de l’argent comptant à plusieurs entrepreneurs dans le but principal de payer des employés «au noir».

§   L’opération Dorade est menée conjointement par la Sûreté du Québec et Revenu Québec qui se trouve frustrée de la perception de taxes et d’impôt en raison du stratagème de fausses factures qui a cours dans l’industrie de la construction.

§   Suite à son arrestation et à sa mise en accusation, monsieur Vinette a reçu de Revenu Québec des avis de cotisation lui réclamant des sommes d’argent non seulement comme administrateur de «Vulci Inc.» mais aussi comme administrateur de l’entreprise «R & L Vinette Inc.» pour les montants que Revenu Québec prétendait lui être dus par ces deux compagnies en raison du stratagème de fausses factures.

§   Or, tous les avis de cotisation émis par Revenu Québec à l’endroit de monsieur Vinette comme administrateur de l’entreprise «R & L Vinette Inc.» ont été annulés parce que monsieur Vinette n’était plus actionnaire, ni administrateur de cette entreprise lorsque celle-ci a été utilisée pour émettre des fausses factures en 2008.

§   Le 1 er septembre 2011, monsieur Vinette a plaidé coupable aux trois chefs d’accusations suivants : 380 (1) a), 367 (a) et 368 (1) a) c) alors qu’il y a eu arrêt des procédures quant aux deux chefs suivants : 465 (1) c) et 334 a).

§   Le 14 octobre 2011, monsieur Vinette a reçu une sentence de 13 mois avec sursis et une suramende de 100 $.

§   Dans son témoignage devant la Régie du bâtiment, monsieur Vinette déclare avoir plaidé coupable pour tourner la page et éviter un procès de plusieurs mois et les frais associés à un tel procès.

§   Le 22 novembre 2011, monsieur Vinette a collaboré avec la Régie du bâtiment et a signé une déclaration dans laquelle il admettait avoir reçu des fausses factures dans le cadre d’un stratagème visant à payer comptant les heures supplémentaires de ses employés.

[51]         Durant son témoignage, monsieur Vinette précise avoir agi ainsi notamment à la demande de ses employés et pour éviter que ceux-ci n’aillent travailler pour des compétiteurs qui offraient de les payer comptant.

[52]         Monsieur Vinette précise, par ailleurs, ne pas avoir utilisé à des fins personnelles les sommes obtenues grâce à ce stratagème.

[53]         Monsieur Vinette précise qu’il a maintenu les opérations de «Vulci Inc.» et gardé son rôle de répondant parce qu’il aime son métier, que ses clients ont toujours été satisfaits de ses services mais aussi parce qu’il veut régler sa dette avec Revenu Québec.

[54]         À ce sujet, monsieur Vinette négocie avec Revenu Québec par l’entremise d’un procureur fiscaliste, Me Voggas, et doit déposer, dans les prochaines semaines, une proposition concordataire suite à la production en février 2012 d’un avis d’intention en ce sens (pièce D-1).

[55]         Me Voggas, entendu comme témoin, précise qu’il y a déjà une entente temporaire avec Revenu Québec suivant laquelle une partie des revenus réalisés par «Vulci Inc.» sont automatiquement remis à Revenu Québec.  Une somme d’environ X $ à ce jour a été remise à Revenu Québec en vertu de cette entente.

[56]         Monsieur Vinette précise que «Vulci Inc.» a présentement en main plusieurs contrats, qu’il est […] et que sa compagnie est sa seule source de revenus.

[57]         Monsieur Vinette fait valoir que ni lui ni sa compagnie n’ont été l’objet de plainte à la Régie du bâtiment de la part de clients dans le passé et que, mis à part les infractions qui font l’objet de la présente enquête, il n’a aucun autre antécédent judiciaire.

[58]         Le procureur des défenderesses soumet que la Loi sur le bâtiment ne prévoit nulle part que le fait d’avoir été déclaré coupable d’un acte criminel entraîne l’annulation automatique de la licence d’entrepreneur.  Si le législateur avait voulu qu’il en soit ainsi, il l’aurait dit clairement et n’aurait pas accordé de discrétion à la Régie.

[59]         En conséquence, les défenderesses soumettent que la sentence dans les présents dossiers devrait s’apparenter à celle infligée à l’entreprise «Isolation Y.G. Ippersiel Inc.» (8108-1150, le 21 décembre 2011) dont la licence a été suspendue pour une durée de 30 jours, en tenant compte des facteurs atténuants ou aggravants, le cas échéant, puisque cette compagnie, comme la défenderesse «Vulci Inc.» a profité du même stratagème de fausses factures émises par le même groupe de criminels, dans le but de payer ses employés au noir.

[60]         La sentence demandée par le procureur de la Régie est déraisonnable et arbitraire et empêcherait «Vulci Inc.» de rembourser les sommes dues à Revenu Québec ce qui irait en outre à l’encontre des intérêts des contribuables.

MOTIFS DE LA DÉCISION

[61]         L’article 60 de la Loi sur le bâtiment énonce les conditions qui doivent être respectées par une personne morale afin qu’une licence d’entrepreneur de construction soit délivrée, notamment : qu’un de ses dirigeants n’a pas été déclaré coupable d’un acte criminel en lien avec l’industrie de la construction, et ce, dans les cinq ans précédant la demande.

[62]         Cela dit, les faits présentés donnent ouverture à l’application de l’article 70 (2 o ).

[63]         La preuve, en l’espèce, démontre clairement que les entreprises «VULCI INC.» et «9205-6191 QUÉBEC INC.» ne remplit plus l’une des conditions requises pour détenir une licence.

[64]         Si bien que, selon les plaidoiries, le procureur des demanderesses demande une suspension de la licence alors que le procureur de la Régie demande l’annulation.

[65]         Considérant l’extrême gravité des gestes «criminels» qui ont été posés par le dirigeant des entreprises «VULCI INC.» et «9205-6191 QUÉBEC INC.», ceux-ci doivent être reconnus comme ayant été malhonnêtes, frauduleux et ayant pour but de tromper le public.

[66]         Considérant la jurisprudence, il ne fait pas de doute, qu’en l’espèce, les actes criminels pour lesquels monsieur Luc Vinette a plaidé coupable militent en faveur d’une sanction sévère.

[67]         Depuis toujours, la jurisprudence unanime de la Régie en cette matière a été d’annuler la licence du titulaire d’une licence d’entrepreneur de construction lorsque coupable d’acte criminel tel qu’il appert des décisions suivantes :

Ø   Technique Acoustique (L.R.) Inc. (2636-8621, le 26 avril 2012);

Ø   9200-2997 Québec Inc. faisant des affaires sous le nom «Albeau Construction» (5619-0804, le 21 octobre 2011);

Ø   9153-3190 Québec Inc. faisant des affaires sous le nom «B.O. Joints» (8318-8482, le 22 avril 2010);

Ø   9162-8305 Québec Inc. faisant des affaires sous le nom «Construction C. Marchand» (5600-6091, le 15 février 2011), décision confirmée par la CRT ( 2011 QCCRT 0338 , 15 juillet 2011);

[68]         En conséquence, le soussigné reconnaît que l’ensemble des faits identifiés en l’espèce témoigne d’un manque évident et flagrant de probité de la part de monsieur Luc Vinette, seul et unique dirigeant et répondant des entreprises «VULCI INC.» et «9205-6191 QUÉBEC INC.»

[69]         PAR CES MOTIFS, la Régie annule les licences d’entrepreneur de construction des entreprises «VULCI INC.» et «9205-6191 QUÉBEC INC.» faisant des affaires sous le nom «CRÉATIONS T.E.» et retourne les dossiers au Centre de relations à la clientèle pour les suites appropriées.

 

 

 

 

 

ROBERT GÉNÉREUX