RÉGIE DES ALCOOLS, DES COURSES ET DES JEUX
DÉCISION
[1] Par avis du 6 mars 2012, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) a convoqué en audience la titulaire en vue de procéder à une enquête et de déterminer si elle a manqué à ses obligations légales en rapport avec les reproches mentionnés à l’avis et, le cas échéant, aux fins de sanctionner tel manquement.
LES FAITS
[2] Les faits qui ont donné ouverture à la convocation se résument comme suit à l’avis :
[Transcription conforme]
Boisson alcoolique contenant un insecte
Le 8 novembre 2007, les policiers ont saisi, dans votre établissement, 2 boisson(s) alcoolique(s) contenant un (des) insecte(s). Les Entreprises André et Rock inc. a été, le 28 juillet 2008, déclarée coupable de cette infraction par les autorités compétentes. La Régie a fait parvenir un avis au titulaire concernant cette infraction le 28 septembre 2009. (Document 1)
Le 29 octobre 2010, les policiers ont saisi, dans votre établissement, 1 boisson(s) alcoolique(s) contenant un (des) insecte(s); Les Entreprises André et Rock inc. a été, le 14 novembre 2011, déclarée coupable de cette infraction par les autorités compétentes. (Document 2)
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AUTRES INFORMATIONS PERTINENTES :
Les Entreprises André et Rock inc. est autorisé(e) à exploiter cet établissement depuis le 13 décembre 1982.
La date d'anniversaire du(des) permis est le 20 décembre.
[3] Après une remise de l’audience demandée par l’avocat de la titulaire, l’audience s’est tenue au Palais de justice de Montréal, le 10 juillet 2012. La titulaire était représentée par sa responsable, M me Patricia St-Louis, assistée de son avocat, M e Claude Deschamps. La Direction du contentieux de la Régie (le contentieux) était représentée par M e Guillaume Dutil-Lachance.
Preuve de la Direction du contentieux
[4] M e Guillaume Dutil-Lachance fait savoir que la preuve de la Direction du contentieux est essentiellement documentaire, basée sur des rapports policiers signés (documents 1 et 2).
[5] La preuve concerne une bouteille de boissons alcooliques contenant un insecte (document 1) saisie à l’établissement de la titulaire par les policiers le 29 octobre 2010 et d’une saisie antérieure, de deux bouteilles le 8 novembre 2007, lorsqu’ un événement semblable avait eu lieu (document 2) pour lequel, la Régie avait fait parvenir un avis à la titulaire à ce sujet.
[6] Il ajoute en même temps que la titulaire avait été déclarée coupable à deux reprises par les autorités compétentes.
Témoignage de M me Patricia St-Louis
[7] M me Patricia St-Louis témoigne et explique ce qui suit :
La titulaire exploite ses permis d’alcool depuis novembre 1982, dont les propriétaires à l’origine étaient son père M. Roch St-Louis et M. André Lebeau. Ce dernier a vendu ses actions à M. St-Louis, six mois après opération du commerce.
Pendant quelques années, son père a exploité seul le commerce. Suite à la séparation de ses parents, sa mère M me Monique Strauss-Rohrbasser, en 1987, est devenue actionnaire 100 % de la compagnie titulaire.
Le 1 er avril 2009, M me Patricia St-Louis a acheté les actions de la compagnie de sa mère, devenant ainsi actionnaire unique de la titulaire.
Elle travaille dans cet établissement depuis 22 ans; d’abord avec son père et par la suite, comme barmaid avec sa mère.
Elle est au courant des faits de l’événement du 8 novembre 2007. À cette époque, explique-t-elle, les bouchons de bouteille n’étaient pas couverts. C’est en 2008, qu’elle a acheté des bouchons en plastique qui se posent par-dessus les réguliers.
Suite à la saisie du 29 octobre 2010, elle s’est trouvé un autre moyen pour rendre les bouteilles hermétiques; elle a commencé à enrober chaque bouchon par du papier cellophane par-dessus duquel, le bouchon de plastique est placé.
Des instructions ont été données aux employés pour vérifier régulièrement les bouteilles de boissons alcooliques.
Elle avoue qu’en 2008 et en 2011, la titulaire a été déclarée coupable au niveau pénal. Toutefois, elle évoque le fait d’avoir agi promptement, cherchant des moyens, espérant chaque fois éliminer le problème d’insectes et finalement, avoir réussi. Les mesures prises ont permis de résoudre le problème.
Depuis la dernière infraction, les policiers sont revenus de huit à douze fois pour inspection à son établissement; ils n’ont rien trouvé à reprocher.
[8] Pour corroborer le témoignage de M me St-Louis, M e Deschamps, dépose les factures datées du 13 mars 2011 démontrant que la titulaire a engagé les services de la compagnie Orkin, contrôle parasitaire (pièce T-1 en liasse).
[9] Dans ses plaidoiries, M e Deschamps invoque l’argument qu’aucune sanction ne devrait être imposée par la Régie, puisque la titulaire avait agi avec sérieux et diligence, cherchant des moyens pour résoudre le problème d’insectes.
LE DROIT
[10] Les dispositions légales qui s'appliquent dans le présent dossier sont les suivantes :
Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques [1] ( LIMBA)
108 . Quiconque étant muni d'un permis: (…)
2.1° garde ou tolère qu'il soit gardé dans son établissement une boisson alcoolique contenant un insecte, à moins que cet insecte n'entre dans la fabrication de cette boisson alcoolique; (…)
commet une infraction (…)
Loi sur les permis d'alcool [2] (LPA)
86 . La Régie peut révoquer ou suspendre un permis si: (…)
9 le titulaire du permis ou, dans le cas où ce titulaire est une société ou une personne morale visée dans l'article 38, une personne mentionnée dans cet article, a été déclaré coupable d'une infraction à la présente loi ou aux règlements, à la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques (chapitre I-8.1), à une loi sur la sécurité, l'hygiène ou la salubrité dans les édifices publics (…) ou à un règlement adopté en vertu d'une telle loi,(…).
ANALYSE
[11]
La titulaire
avoue avoir été trouvée coupable pour présence d’insectes dans deux bouteilles
de boissons alcooliques, infractions à deux reprises (en juillet 2008 et en
novembre 2011) en contrevenant à l’article
[12] Cette disposition interdit à un titulaire de permis d’alcool de garder ou tolérer des boissons alcooliques contenant des insectes.
[13] Par cette mesure, le législateur a voulu s’assurer que les boissons alcooliques servies dans les établissements exploitant des permis d’alcool offrent certaines garanties de qualité et de salubrité des produits servis dans son établissement.
[14] Le législateur en vertu de l’article 86, 1 er alinéa, 9 e paragraphe de la LPA a laissé à la Régie la discrétion : possibilité à ne pas intervenir ou bien, intervenir imposant des mesures disciplinaires lorsqu’un titulaire a été trouvé coupable d’infraction à la LIMBA, et ce, après avoir pris connaissance de la preuve de chaque cas.
[15] Mentionnons les dossiers suivants : Resto-bar Le Club Sandwich [3] ; Restaurant Buffet la Stanza [4] ; Cafka [5] ; où la Régie, après avoir constaté une négligence de la part de la titulaire, a décidé d’imposer une suspension de deux ou de trois jours. Par contre dans les dossiers : Restaurant Shogun 1984 Ltée [6] ; Bar le Dogue [7] ; Newtown [8] ; Boccacinos Restaurant [9] ; Bar Salon chez Albert [10] et Restaurant Mikes [11] , la Régie a décidé de ne pas intervenir parce que la titulaire avait pris des mesures pour corriger la situation lorsque le problème d’insectes s’est manifesté dans leur établissement.
[16] Dans le présent cas, la preuve ne permet pas de conclure que la titulaire a agi avec négligence. En effet, en presque 30 ans, les policiers n’ont saisi que trois bouteilles de boissons alcooliques contenant des insectes; situations rares auxquelles la titulaire a réagi promptement.
[17] Dans les circonstances, la Régie ne croit pas que la suspension des permis de la titulaire soit nécessaire dans ce cas-ci; elle n’interviendra pas contre la titulaire.
[18] Elle doit toutefois être vigilante tenant compte que les boissons alcooliques à être consommées dans son établissement doivent en tout temps être propre à la consommation, car toute nouvelle infraction pourrait entraîner la suspension ou la révocation des permis incluant la licence de la titulaire.
PAR CES MOTIFS, |
N'INTERVIENT PAS contre la titulaire dans la présente affaire.
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Régisseure |
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[1] L.R.Q., chapitre I-8.1
[2] L.R.Q., chapitre P-9.1
[3] RACJ, 30 juillet 20004, No 40-0000155
[4] RACJ, 5 avril 2005, No 40-0000598
[5] RACJ, 21 juillet 2011, No 40-0004286
[6] RACJ, 8 juillet 2004, No 40-0000109
[7] RACJ, 12 décembre 2002, No 40-5002359
[8] RACJ, 4 avril 2005, No 40-0000597
[9] RACJ, 19 septembre 2007, No 40-0002162
[10] RACJ, 28 janvier 2008, No 40-002369
[11] RACJ, 27 mars 2008, No 40-002478