Doe c. Broomes

2012 QCCQ 6713

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE

CHÂTEAUGUAY

« Chambre civile »

N° :

760-32-014077-103

 

 

 

DATE :

Le 8 mai 2012

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

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GILLES DOE

 

Demandeur

 

c.

 

ORVILLE BROOMES &

JENNIFER AMARAL

 

Défendeurs

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JUGEMENT

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[1]            VU la procédure écrite, la documentation produite et les témoignages entendus;

[2]            ATTENDU que le demandeur, Gilles Doe, réclame une diminution du prix de vente d'un immeuble acheté des défendeurs en raison de vices cachés, et ce, pour les motifs énoncés à sa demande datée du 16 décembre 2010 qui se lit comme suit:

«1.  Le 25 juin 2009, la partie demanderesse a acheté des biens de la partie défenderesse suite à une entente écrite.

2.  L'entente a été conclue à Châteauguay (Québec).

3.  La vente portait sur les biens suivants:  une maison située au 132 Elmridge, Châteauguay (Québec).

4.  Avant d'acheter, la partie demanderesse a fait inspecter le bien par Marc-André Beauchemin, inspecteur agréé (NACHI).

5.  Les défauts sur les biens achetés sont les suivants:  moisissures, dégâts d'eau qui a (sic) endommagé la salle de bain et la chambre de travail, tel (sic) que décrit (sic) plus amplement dans la mise en demeure.

6.  La partie demanderesse a constaté certains vices cachés pour la première fois le 28 juin 2009.  Elle a donc procédé à une contre-expertise dont le rapport est produit sous la pièce #6.

7.  La partie demanderesse n'a pas constaté les vices et/ou défauts avant cette date pour les raisons suivantes:  des meubles cachaient les défauts ainsi qu'une trappe.

8.  La partie demanderesse n'a pas effectué de travaux d'urgence, elle réclame donc la somme de 7 000,00$ afin d'effectuer lesdits travaux, tel (sic) que décrits dans la soumission produite sous pièce #4.

9.  La partie demanderesse a informé par écrit la partie défenderesse des vices et/ou défauts du bien acheté.

10.  Le prix d'achat du bien est de 171 500,00$.

11.  La partie demanderesse a payé le bien en totalité.

12.  Bien que dûment requis (sic) par mise en demeure, la partie défenderesse refuse ou néglige de payer.»

[3]            ATTENDU que la somme réclamée par le demandeur à titre de diminution du prix de vente est de 7 000,00$;

[4]            ATTENDU  que les défendeurs, Orville Broomes et Jennifer Amaral, refusent de payer cette somme pour les motifs énoncés à leur contestation datée du 29 décembre 2010 qui se lit comme suit:

«1.  An initial inspection was done by Plaintiff's inspector of choice (per clause B2.1 Offer to purchase).  The only items ordered to be repaired were foundation cracks located at side and back of dwelling. 

2.  The Plaintiff showed a lack of interest in the dwelling by not attending the inspection and denying to return to the dwelling even though invited.

3.  After the Plaintiff  took possession they decided to have a second inspection done (AAB Inspectors).  This inspection suggested only changing a small area of the floor (section 27.2.1.2). Yet the Plaintiff is demanding money for home renovations including tiling the bathroom, redoing insulation, adding doorways and re-flooring  the master bedroom.

4.  Plaintiff is using small claims court to have home renovations paid for.»

[5]            ATTENDU qu'en matière de vice caché, le Tribunal doit déceler les quatre critères suivants :

 

-          Le vice est grave, c’est-à-dire qu’il cause des inconvénients sérieux à l’usage du bien et que l’acheteur n’aurait pas payé le prix convenu s’il l’avait connu;

 

-          Le vice est inconnu de l’acheteur au moment de la vente;

 

-          Le vice est caché, c’est-à-dire qu’il ne peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans devoir recourir à un expert;

 

-          Le vice est antérieur à la vente puisque la garantie porte sur l’état du bien au moment de la vente.

[6]            ATTENDU qu'une condition supplémentaire est imposée à l'acheteur, soit la dénonciation écrite du vice selon l'article 1739 du Code civil du Québec qui stipule ce qui suit:

«1739.  L'acheteur qui constate que le bien est atteint d'un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l'acheteur a pu en soupçonner la gravité et l'étendue.

 

Le vendeur ne peut se prévaloir d'une dénonciation tardive de l'acheteur s'il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice. »

[7]            Cette dénonciation doit avoir lieu dans un délai raisonnable suite à la découverte du vice.

[8]            Or, la preuve révèle que le demandeur Doe a découvert des tuiles de parqueterie noircies et endommagées par l'eau dès sa prise de possession des lieux à la fin juin 2009.

[9]            Ce n'est que le 15 mars 2010, soit neuf mois plus tard, que le demandeur a dénoncé par écrit pour la première fois aux défendeurs l'existence de vices cachés.

[10]         Pourtant, le demandeur avait les nouvelles coordonnées des défendeurs ainsi que leur numéro de téléphone à la maison et le numéro de cellulaire de monsieur Broomes.

[11]         Le Tribunal est d'avis que le demandeur Doe n'a pas dénoncé les prétendus vices dans un délai raisonnable selon les exigences de la loi.

[12]         Également, le Tribunal estime que l'absence du demandeur Doe lors de l'inspection pré-achat réalisée en mai 2009 constitue un problème important à l'appréciation par le Tribunal de sa connaissance de l'état des lieux lors de l'achat.

[13]         En effet, le Tribunal croit le témoignage du défendeur Broomes que lors de la visite de l'inspecteur pré-achat, Marc-André Beauchemin, il a déplacé des meubles afin de lui montrer des tuiles de parqueterie noircies dans une chambre d'enfant ainsi qu'une trappe d'accès à la plomberie de la salle de bain adjacente.

[14]         Or, justement les principales traces d'infiltration d'eau dont se plaint le demandeur Doe se situent dans cette partie de la maison.

[15]         De plus, le deuxième inspecteur engagé par le demandeur à la fin juillet 2009, André Bérard,  (rapport P-6), mentionne qu'un morceau de bois non calfeutré à l'extérieur permet l'infiltration d'eau (page 12 sur 54) dans la structure, ainsi que l'absence de scellant autour des fenêtres et à la base de la porte (pages 13 et 14) et que des traces de dégâts d'eau passées sont visibles sous la salle de bain principale, sur le pontage de contreplaqué (page 35 sur 54).

[16]         Le Tribunal est d'avis qu'il s'agit de vices apparents qui ne sont pas couverts par la garantie légale de l'article 1726 C.c.Q. qui se lit comme suit:

«1726.  Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.

 

Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.»

 

[17]         ATTENDU  que le Tribunal conclut que le demandeur Doe n'a pas prouvé les allégations de sa demande, soit que la maison du […] qu'il a achetée des défendeurs était affectée de vices cachés;

[18]         ATTENDU que les défendeurs, Orville Broomes et Jennifer Amaral, ont prouvé les allégations de leur contestation, soit que les travaux envisagés par le demandeur sont plus de la nature de rénovations et de rafraîchissement d'un immeuble construit il y a 27 ans (1985) et que s'il y avait des traces d'anciennes infiltrations d'eau, celles-ci étaient visibles et ont été de toute façon montrées clairement à l'inspecteur pré-achat qui n'en a pas fait mention dans son rapport;

[19]         ATTENDU que le deuxième inspecteur engagé par le demandeur (André Bérard, pièce P-6) consacre 6 pages de son rapport (56 à 61) à l'analyse des nombreuses anomalies qu'il a détectées dans le rapport d'examen pré-achat de Marc-André Beauchemin (P-5);

[20]         ATTENDU que les défendeurs n'ont pas à répondre de la piètre qualité du travail effectué par l'inspecteur pré-achat du demandeur;

[21]         ATTENDU  que le Tribunal n'a entendu aucun témoin expert au soutien des prétentions du demandeur Doe;

[22]         CONSIDÉRANT  qu'il y a lieu de mettre fin de façon définitive au présent litige, chaque partie payant ses propres frais;

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

REJETTE  la demande du demandeur, le tout chaque partie payant ses propres frais.

 

 

 

 

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CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

(JM2018)

 

 

 

 

 


 

 

Date d’audience :  Le 3 mai 2012

 

 

 

 

SECTION III

DU RETRAIT ET DE LA DESTRUCTION DES PIÈCES

 

Les parties doivent reprendre possession des pièces qu'elles ont produites, une fois l'instance terminée.  À défaut, le greffier les détruit un an après la date du jugement ou de l'acte mettant fin à l'instance, à moins que le juge en chef n'en décide autrement.

 

Lorsqu'une partie, par quelque moyen que ce soit, se pourvoit contre le jugement, le greffier détruit les pièces dont les parties n'ont pas repris possession, un an après la date du jugement définitif ou de l'acte mettant fin à cette instance, à moins que le juge en chef n'en décide autrement.  1994, c. 28, a. 20.