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TRIBUNAL D’ARBITRAGE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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N o de dépôt : |
2012-7690 |
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Date : |
13 juin 2012 |
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DEVANT L’ARBITRE : |
M e Diane Veilleux |
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Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 50 |
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Ci-après appelé « le Syndicat » |
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Et |
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Papiers Scott Ltée, division de fabrication de Gatineau - Produits Kruger Ltée |
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Ci-après appelé « l’Employeur » |
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Plaignant : |
M. Jean Roy |
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Grief : |
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n o du Syndicat |
62481 |
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Convention collective : |
2004-2009 |
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SENTENCE ARBITRALE |
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Article
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[1] Par le grief en date du 19 mars 2008, le Syndicat conteste le non-respect de la convention collective relativement au paiement des heures de travail effectuées dans le cadre d’un changement d’horaire de travail à moins de 24 heures d’avis.
[2] Les procureurs admettent que la procédure de règlement des griefs prévue à la convention collective a été respectée et que l’arbitre a compétence pour décider du présent grief.
[3] La partie syndicale a fait entendre les témoins suivants : M. André Lajoie, électricien employé de quart à l’usine Laurier et secrétaire-trésorier archiviste du Syndicat; M. Pierre Masson, technicien principal du département électrique à l’usine Laurier, à la retraite depuis le mois de juillet 2010; M. Yan Tremblay, électrotechnicien, électricien employé de quart à l’usine Richelieu; M. Jean Roy, électricien employé de jour à l’usine Richelieu.
[4] Je résume ci-après les faits qui ressortent des témoignages entendus.
[5] L’Employeur opère deux plans de travail à Gatineau : l’usine Laurier et l’usine Richelieu. La première usine sert à la fabrication du papier et la seconde à la transformation du papier en produits finis. L’usine de Laurier fonctionne en opérations continues sur sept (7) jours. L’usine de Richelieu opère aussi en continu mais sur cinq (5) jours, soit du lundi au vendredi.
[6] Les électriciens de quart ont des horaires de travail de douze (12) heures de jour ou de nuit sur un cycle de neuf (9) semaines. Ils répondent aux appels d’urgence visant la réparation des bris électriques sur les machines. Il s’agit de travaux non planifiés et prioritaires. Les électriciens de quart s’occupent aussi du cadenassage et de la maintenance générale lorsqu’il n’y a pas d’urgence. Il y a un électricien de quart, par quart, pour chaque usine.
[7] Contrairement aux électriciens de quart, les électriciens de jour sont assignés par bons de travail. Les travaux exécutés sont planifiés. Ils travaillent huit (8) heures par jour. Il y a au maximum quatre (4) électriciens de jour à l’usine Laurier, et trois (3) électriciens de jour à l’usine Richelieu. Les électriciens de quart et les électriciens de jour ont les mêmes qualifications et ils ont le même taux de salaire horaire.
[8] Selon le témoignage de M. André Lajoie, lorsqu’un électricien de quart s’absente, il peut être remplacé par un électricien de quart sur l’horaire d’appel ou à défaut par un électricien de quart en congé s’il accepte le remplacement. Le remplaçant est payé à taux et demi pour la journée. Il peut aussi arriver qu’un électricien de jour fasse du travail de l’électricien de quart si celui-ci n’a pu être remplacé. Lorsque l’électricien de quart est occupé à réparer un bris en urgence et qu’un autre appel d’urgence doit être immédiatement répondu, l’électricien de jour va faire le travail en urgence et ensuite retourner à ses bons de travail.
[9] Selon le témoignage de M. Masson, il lui arrivait de remplacer le contremaître. À ces occasions, il a parfois été appelé à remplacer un électricien de quart par un électricien de jour qui en était informé au préalable. Selon M. Masson, s’il n’avertissait pas au préalable l’électricien de jour du changement de son horaire, il le rémunérait à taux et demi. Il dit que cela lui est arrivé dans le cas de M. J.-G. St-Amour.
[10] M. Masson témoigne que de 2000 à 2007, la procédure de remplacement était simple. On remettait le téléavertisseur au plus jeune des électriciens de jour. Il prenait les appels pendant ses huit (8) heures de travail. Ensuite, on lui offrait de faire des heures supplémentaires. S’il refusait, on appelait quelqu’un d’autre, et celui qui venait était rémunéré à taux et demi.
[11] Selon le témoignage de M. Masson, une nouvelle procédure a été mise en application durant l’année 2007. On ne pouvait plus prendre un électricien de jour pour remplacer un électricien de quart sauf si c’était pour quelques heures. Par exemple, si l’électricien de quart était malade, on appelait l’électricien de quart sur la liste d’appel. S’il n’était pas disponible, on appelait un électricien de quart en congé qui n’avait pas d’obligation d’accepter le remplacement. À défaut, on offrait le travail à un électricien de jour et en dernier recours, on assignait l’électricien de jour ayant le moins d’ancienneté et il était rémunéré à taux et demi toute la journée.
[12] M. Yan Tremblay témoigne qu’un électricien de quart est appelé en remplacement lorsqu’il s’absente du travail. S’il ne peut être joint ou s’il ne peut venir en remplacement, le travail est offert par ordre d’ancienneté décroissant aux électriciens de jour, le salarié ayant le moins d’ancienneté étant obligé de prendre le quart. M. Tremblay précise, en contre-interrogatoire, que l’électricien de jour peut être appelé à le remplacer pour une absence de courte durée, notamment pour une formation ou une rencontre.
[13] M. Jean Roy explique dans son témoignage que l’horaire de travail est affiché, de façon générale, le jeudi midi pour la semaine à venir. Si un électricien de jour s’absente, il n’est pas remplacé. Les électriciens de quart sont remplacés parce qu’ils s’occupent des urgences.
[14] Selon l’horaire affiché le jeudi précédent, M. Roy devait travailler du lundi au vendredi, de 7h00 à 15h00. Le lundi 10 mars, il a travaillé selon l’horaire prévu. À 16h00, M. Parent, son superviseur, l’a avisé qu’il allait remplacer l’électricien de quart pour les journées du 11 mars et du 12 mars. Il allait donc travailler douze (12) heures de 6h30 à 18h30. M. Roy précise qu’en 2008, le travail en remplacement d’un électricien de quart était assigné directement à l’électricien de jour ayant le moins d’ancienneté. M. Roy a été assigné au remplacement de l’électricien de quart pour les journées du 11 et du 12 mars conformément à son rang d’ancienneté. L’électricien ayant le moins d’ancienneté avait déjà été assigné à un autre remplacement.
[15] M. Roy témoigne qu’il a complété sa feuille de temps, le 11 mars, en pensant qu’il avait droit d’être rémunéré à taux et demi pour ses douze (12) heures de travail cette journée-là. Toutefois, M. Parent, son superviseur l’a avisé qu’il avait fait un changement à sa carte de temps au motif qu’il avait commis une erreur en la complétant. Il allait être payé à taux simple pour huit (8) heures, et à taux et demi pour quatre (4) autres heures de travail.
[16] M. Roy précise, en contre-interrogatoire, qu’il a demandé à être payé douze (12) heures à taux simple pour la journée du 12 mars 2008 parce qu’il a eu l’avis préalable de 24 heures du changement à son horaire. Le 11 mars, il a commencé à travailler 30 minutes plus tôt et il a terminé sa journée de travail 3 heures et demie plus tard que l’horaire prévu.
[17] D’entrée de jeu, la procureure syndicale pose la question en litige : M. Roy, électricien de jour, dont l’horaire de travail a été modifié à moins de 24 heures d’avis pour la journée du 11 mars 2008, est-il en droit de recevoir une rémunération en temps supplémentaire pour les douze (12) heures de travail visées par la modification d’horaire?
[18] La procureure syndicale soumet que l’Employeur est tenu, selon l’article 18.01 (5) de la convention collective, de payer au taux majoré les heures de la première journée lorsqu’un changement d’horaire est effectué à moins de 24 heures d’avis. Conclure que l’Employeur n’a qu’à payer à taux majoré les heures excédentaires aurait pour effet de vider de son sens le paragraphe 5 de l’article 18.01, ainsi que le paragraphe 1 du même article. Le paragraphe 1 prévoit déjà que les « heures de travail effectuées après l’heure d’arrêt normale du soir et avant l’heure d’entrée normale du matin sont payées au taux majoré.
[19] La procureure syndicale note que les mêmes règles existent depuis les trois dernières conventions collectives comme le démontre la pièce S-3 en liasse. De plus, M. Masson a témoigné qu’en l’absence de l’avis de 24 heures, l’employé dont l’horaire est modifié et qui est obligé de remplacer un électricien de quart était rémunéré à taux et demi.
[20] Le procureur patronal note qu’il n’est pas contesté que l’Employeur avait le droit d’assigner M. Roy au remplacement d’un électricien de quart. La contestation porte essentiellement sur la rémunération auquel M. Roy a droit pour la journée du 11 mars 2008 compte tenu du fait qu’il a été avisé moins de 24 heures à l’avance de son changement d’horaire de travail. L’Employeur doit-il payer à taux majoré les 12 heures de travail accomplies cette journée-là par M. Roy ou doit-il payer à taux majoré les heures qui excèdent la journée de travail prévue à son horaire du 11 mars?
[21] Selon la compréhension de l’Employeur, il est tenu de payer seulement les heures qui excèdent les heures prévues à l’horaire affiché. Le 5 e paragraphe de l’article 18.01 prévoit que sont rémunérées au taux majoré « les heures de travail effectuées avant ou après la période antérieurement prévue, soient (sic) les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié ». Les termes « soient (sic) les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié » viennent préciser ce que les parties à la convention collective entendent par « les heures effectuées avant ou après la période antérieurement prévue ».
[22] Le procureur patronal rappelle qu’il s’est objecté à la pertinence d’une preuve fondée sur les conventions collectives antérieures parce qu’il n’est pas nécessaire de référer aux règles des dernières conventions collectives pour dire le sens et la portée de la règle qui nous occupe actuellement.
[23] Le procureur patronal rappelle aussi qu’il s’est objecté au témoignage de M. Masson concernant la preuve d’une pratique passée. La pratique passée ne peut être invoquée qu’en présence d’un texte ambigu à la convention collective. De plus, ajoute-t-il, le témoignage de M. Masson ne fait pas preuve d’une pratique passée. Par ailleurs, même si M. St-Amour a été rémunéré à taux et demi pour toutes les heures de la première journée où il a remplacé un électricien de quart, cela ne constitue pas un fait générateur de droit puisque l’erreur n’est pas source de droit.
[24] Le plaignant est électricien de jour. Il a été assigné, à moins de 24 heures d’avis, au remplacement d’un électricien de quart pour les journées du 11 mars 2008 et du 12 mars 2008. Il a travaillé douze (12) heures par jour au lieu des huit (8) heures à son horaire prévu pour ces deux journées.
[25] Selon le Syndicat, l’Employeur n’a pas respecté l’article 18.01 (5) de la convention collective parce que le plaignant a été rémunéré à taux simple pour huit (8) heures et à taux majoré pour quatre (4) heures lors de la journée du 11 mars 2008. Le Syndicat prétend que le plaignant avait droit, selon cette clause de la convention collective, à une majoration de son taux horaire pour les douze (12) heures qu’il a effectuées cette journée-là.
[26] L’Employeur prétend, au contraire, que l’article 18.01 (5) a été respecté parce que le plaignant avait droit à une rémunération majorée seulement pour les heures excédant la journée prévue à son horaire avant qu’il ne soit modifié.
[27] La question soulevée par le présent grief est de savoir si l’article 18.01 (5) a été respecté. Cette disposition se lit comme suit :
18.01 L’employé de jour est payé au taux majoré de moitié dans les cas suivants :
1) les heures de travail effectuées après l’heure d’arrêt normale du soir ou avant l’heure d’entrée normale du matin, sous réserve des dispositions du paragraphe 4 ci-dessous;
2) ….
3) …
4) …
5) les heures de travail effectuées avant ou après la période antérieurement prévue, soient (sic) les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié, si un avis de changement de 24 heures n’a pas été donné. Il est entendu qu’on fera connaître les heures normales quotidiennes d’entrée au travail et d’arrêt du travail de la semaine avant jeudi 16h de la semaine précédente. Cet horaire peut être changé sans avoir à payer le taux majoré de moitié, si un avis de 24 heures a été donné. Si le travail inhabituel est terminé avant l’heure prévue ou si le travail est annulé, l’employé peut choisir de retourner à son poste permanent, dans un tel cas, il n’est pas payé au taux majoré de moitié. Toutefois, s’il doit continuer le travail inhabituel (à un taux inférieur) jusqu’à la fin de l’horaire, il touche le taux de son poste permanent.
[28] Les procureurs s’accordent pour dire que c’est la première partie du paragraphe 5 qui est pertinente au présent grief, et leurs argumentaires respectifs s’appuient essentiellement sur cette première partie du paragraphe 5. Cette partie du texte est identifiée en caractères gras.
[29] À la lecture de l’article 18.01 (5) de la convention collective, je constate d’abord que l’employé de jour dont l’horaire de travail est modifié, avec un avis préalable de 24 heures, n’a pas droit à une rémunération à taux majoré. La rémunération à taux majoré de moitié est applicable seulement lorsque l’avis de 24 heures n’est pas fourni.
[30] En l’absence d’un avis de 24 heures, la question est la suivante : quelles sont les heures rémunérées à taux majoré?
[31] Selon le paragraphe 5 de l’article 18.01, les heures suivantes doivent être rémunérées au taux majoré de moitié: les heures de travail effectuées avant ou après la période antérieurement prévue, soient (sic) les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié ». Il convient de souligner que le mot « soient » aurait dû s’écrire « soit », et ce terme est ici synonyme de « à savoir », « c’est-à-dire » selon le dictionnaire Le Nouveau Petit Robert 2010 .
[32] Il est important de noter que ce sont les heures effectuées avant ou après la période antérieurement prévue qui sont rémunérées à taux majoré.
[33] La question est de savoir qu’est-ce que « la période antérieurement prévue », et aussi à quoi sert le groupe nominal suivant : « les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié »?
[34] À mon avis, les termes « la période antérieurement prévue » font référence aux heures de l’horaire de travail, tel qu’il avait été affiché. C’est l’horaire de travail antérieurement prévu.
[35] Quant au groupe nominal suivant : « soient (sic) les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié », à mon avis, ces termes viennent limiter le sens et la portée du premier groupe nominal qui se lit comme suit « les heures effectuées avant ou après la période antérieurement prévue». Ce ne sont pas toutes les heures effectuées avant ou après la période antérieurement prévue qui sont rémunérées à taux majoré. Ce sont seulement les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié effectuées avant ou après la période antérieurement prévue.
[36] En l’absence d’un avis préalable de 24 heures, un employé de jour ne peut pas réclamer d’être rémunéré à taux majoré pour toutes les heures effectuées avant ou après les heures de l’horaire antérieurement prévu. Il a droit d’être rémunéré en surtemps seulement pour les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié effectuées avant ou après les heures de l’horaire antérieurement prévu.
[37] Dans le présent cas, les parties s’entendent pour dire que le plaignant avait droit à une majoration de son taux de salaire seulement sur la base des heures de la première journée de l’horaire modifié.
[38] Le plaignant n’a pas demandé d’être rémunéré à taux majoré sur la base de la journée du 12 mars 2008. Il a témoigné qu’il n’a pas demandé d’être rémunéré à taux majoré cette journée-là parce qu’il considérait avoir eu l’avis de 24 heures pour sa deuxième journée de l’horaire modifié. Je constate que les parties à la convention collective ont tenu le même raisonnement que le plaignant, en limitant expressément, à l’article 18.01 (5), la rémunération en surtemps des heures effectuées avant ou après les heures de l’horaire antérieurement prévu, à celles de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié.
[39] Le seul point de désaccord entre le Syndicat et l’Employeur porte sur la détermination des heures qui doivent être payées au taux majoré durant la première journée de l’horaire modifié.
[40] Avec respect pour l’opinion contraire formulée par la partie syndicale, ce ne sont pas toutes les heures de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié qui doivent être rémunérées au taux majoré. Comme je viens de l’expliquer, ce sont seulement les heures de travail effectuées avant ou après les heures initialement prévues à l’horaire.
[41] Si les parties à la convention collective avaient voulu que ce soit toutes les heures de travail de la première journée ou de la première nuit qui soient rémunérées à taux majoré, elles n’auraient pas écrit « les heures effectuées avant ou après la période antérieurement prévue ». Elles auraient commencé le paragraphe 5 en écrivant : les heures de travail effectuées lors de la première journée ou de la première nuit de l’horaire modifié.
[42] Si je donnais au paragraphe 5 le sens que la partie syndicale suggère de lui accorder, je modifierais le libellé de cette disposition de la convention collective en soustrayant des termes qui y sont prévus. Il faudrait, en effet, ignorer ou enlever les termes « les heures de travail effectuées avant ou après la période antérieurement prévue » pour faire droit à la prétention syndicale. Or, cela est clairement interdit selon l’article 33.11 de la convention collective. Cette disposition prévoit que « (l)e conseil d’arbitrage n’a aucune autorité lui permettant de modifier ou de changer les dispositions de la présente convention collective ».
[43] Il convient aussi d’ajouter que le paragraphe 5 de l’article 18.01 confère à l’employé de jour dont l’horaire est modifié, sans un avis préalable de 24 heures, une condition de travail en accord avec la règle qui est prévue au paragraphe 1 du même article.
[44] Selon le paragraphe 1, l’employé de jour a droit d’être rémunéré pour les heures supplémentaires « après l’heure d’arrêt normale du soir ou avant l’heure d’entrée normale du matin ». Les parties à la convention collective ont conféré le même avantage à l’employé de jour dont l’horaire de travail est modifié à moins de 24 heures d’avis. Par contre, si l’avis de 24 heures est respecté, l’employé de jour n’aura pas droit à cet avantage, et il sera rémunéré à taux simple même s’il fait 12 heures dans une journée alors qu’il aurait fait huit (8) heures selon l’horaire antérieurement prévu.
[45] Dans le cas du plaignant, il devait travailler de 7h00 à 15h00, le 11 mars 2008, selon l’horaire antérieurement prévu. N’ayant pas été avisé 24 heures à l’avance de son changement d’horaire, le plaignant avait droit d’être rémunéré au taux majoré de moitié, lors de la journée du 11 mars 2008, pour les heures travaillées avant 7h00 et pour celles travaillées après 15h00.
[46] Selon le Syndicat, il y aurait une pratique passée qui montre que l’Employeur a rémunéré toutes les heures de travail de la première journée lorsqu’un électricien de jour était appelé à remplacer un électricien de quart, sans avoir été avisé 24 heures à l’avance de son changement d’horaire. La partie patronale s’est objectée à la preuve d’une pratique passée. Cette objection a été prise sous réserve. Au surplus, l’Employeur soumet qu’une telle pratique n’a pas été prouvée.
[47] Dans le cas qui nous occupe, la pratique passée, même si elle existait, ne pourrait servir à préciser le sens et la portée de l’article 18.01 (5) parce que cette disposition de la convention collective ne comporte pas d’ambiguïté justifiant de recourir à une preuve extrinsèque pour dire le droit. Certes, l’article 18.01 (5) exige une analyse grammaticale pour en clarifier le sens et la portée. Cela dit, le texte parle par lui-même malgré les difficultés grammaticales qu’il pose, excluant ainsi la pratique passée comme moyen d’interprétation.
[48] Par ailleurs, je constate à l’examen de la preuve que le Syndicat n’a pas démontré la pratique passée alléguée. Le témoignage de M. Masson ne constitue pas une preuve de pratique passée. Dans son témoignage, M. Masson a mentionné qu’un électricien de jour qui était appelé à remplacer un électricien de quart, sans avoir reçu à l’avance l’avis de 24 heures de changement d’horaire, était rémunéré au taux majoré pour toutes les heures effectuées en remplacement lors de la première journée. Avec respect, une telle affirmation de M. Masson ne constitue pas une preuve de pratique passée.
[49] Comme on le sait, la pratique passée repose sur une condition de travail bien établie, généralisée et appliquée de façon constante pendant la durée de plus d’une convention collective. Dans son témoignage, M. Masson a fourni le nom d’un électricien de jour dont l’horaire de travail aurait été modifié sans l’avis préalable de 24 heures et qui aurait été rémunéré à taux majoré pour toutes les heures travaillées durant le remplacement d’un électricien de quart. Soulignons qu’un seul cas ne peut constituer une pratique passée. En outre, le fait qu’un électricien de jour ait été payé à taux majoré, à un moment donné, n’est pas générateur de droit, et cela ne permet pas de contredire l’article 18.01(5) de la convention collective.
[50] Pour tous les motifs qui précèdent, je constate que l’Employeur a respecté l’article 18.01 (5) de la convention collective en rémunérant le plaignant huit (8) heures à taux simple et quatre (4) heures à taux majoré de moitié pour la journée du 11 mars 2008.
[51] Par conséquent, le grief est rejeté.
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__________________________________ Diane Veilleux, arbitre de grief |
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Pour le Syndicat : |
M e Maryse Lepage |
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Pour l’Employeur : |
M e Alexis-François Charrette |
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Dates d’audience : |
18 mai 2011, 28 mars 2012 |
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