COMMISSION DES RELATIONS DU TRAVAIL

(Division des relations du travail)

 

Dossier :

AM-1002-7077

Cas :

CM-2011-6267

 

Référence :

2012 QCCRT 0482

 

Montréal, le

24 octobre 2012

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DEVANT LE COMMISSAIRE :

Benoît Monette, juge administratif

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Benoit Paquette

 

Plaignant

c.

 

Syndicat national de l’automobile, de l’aérospatiale,

du transport et des autres travailleurs et travailleuses

du Canada (TCA-Canada)

Intimé

et

 

Paccar du Canada ltée

 

Mise en cause

 

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DÉCISION

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[1]            Dans une plainte qu’il dépose le 23 novembre 2011, Benoit Paquette (le plaignant ) allègue que Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada (TCA-Canada) (le Sy ndicat ), dont il fait partie, a manqué au devoir de juste représentation que lui impose l’article 47.3 du Code du travail , L.R.Q., c. C-27 (le Code ).

la preuve

[2]            Le plaignant travaille depuis 2002 à titre d'assembleur pour la compagnie Paccar du Canada ltée (l' employeur ) qui fabrique des camions dans la Couronne Nord de Montréal.

[3]            Les premières années, cela va bien pour lui et il s'implique beaucoup. Avec la crise financière et la récession 2008-2009 qui a suivi, les choses se sont mises à mal aller.

[4]            Comme le plaignant était parmi ceux qui détenaient le moins d'ancienneté, il a dû changer de poste à plusieurs reprises, ce à quoi il eut de la difficulté à s'adapter. Il s'ensuit des problèmes de santé, mais aussi des avis disciplinaires, verbaux et écrits.

[5]            Le 4 juin 2010, le plaignant commet une erreur sur la chaîne de montage qui a pour conséquence d'arrêter la production. Il est réprimandé. N'en pouvant plus, il quitte le travail et se rend à la Clinique médicale Sainte-Thérèse. Le médecin le met en arrêt de travail pour un trouble de l'adaptation et lui prescrit un antidépresseur.

[6]            Il revoit un médecin régulièrement par la suite et son congé est prolongé jusqu'au 10 septembre 2010. Ce jour-là, il se rend de nouveau à la Clinique médicale Sainte-Thérèse, mais il y a affluence et on ne peut le recevoir. Il se rend alors dans une autre clinique où il voit un médecin qui prolonge son congé jusqu'au 10 octobre tout en indiquant sur le certificat médical un retour au travail pour le 11 octobre 2010. De plus, ce médecin lui indique qu'il devra retourner à la Clinique médicale Sainte-Thérèse.

[7]            Dans les jours qui précèdent son retour au travail, le plaignant communique avec le bureau de santé de l'employeur. Il prévient ce dernier qu'il ne sera pas en mesure de reprendre le travail. On lui demande alors de présenter un nouveau certificat médical.

[8]            Le 10 octobre, le plaignant se rend à la Clinique médicale Sainte-Thérèse. Il voit le médecin qui renouvelle sa prescription, mais sans mention de prolongation de congé ni mention de retour au travail.

[9]            Comme à l'habitude, le plaignant se rend à la guérite de l'entreprise et remet une copie de cette prescription à un agent de sécurité puisqu'il ne veut pas pénétrer dans l'usine. Le ou vers le 12 octobre 2010, le bureau de santé communique avec le plaignant pour lui souligner que la prescription qu'il avait remise n'était pas un certificat médical et qu'elle ne pouvait pas être interprétée comme autorisant une prolongation du congé de maladie.

[10]         De son côté, le plaignant indique que le bureau de santé lui a demandé de remettre les notes évolutives de la clinique le concernant. Il n'est pas sûr si on lui a également dit de remettre un nouveau certificat médical autorisant la prolongation de son congé.

[11]         Le 11 octobre, le plaignant se rend à la clinique et obtient une copie des notes évolutives, mais pas de certificat prolongeant le congé de maladie. Il remet le ou vers le 13 octobre les notes évolutives à la guérite de l'usine.

[12]         Le 28 octobre 2010, le plaignant reçoit une lettre de l'employeur l'avisant qu'il n'a pas reçu de certificat médical prolongeant le congé de maladie au-delà du 10 octobre et ordonne de se présenter au travail pour le 29 octobre 2010 à 7 h. La lettre mentionne également que s’il ne se présente pas, son absence de plus de trois jours sera interprétée comme une démission. Au début de son témoignage, le plaignant disait ne pas avoir reçu cette lettre la journée du 28 octobre, mais en voyant le bordereau il reconnaît l'avoir reçue cette journée-là.

[13]         Le plaignant affirme avoir contacté l'employeur pour l'informer qu'il n'était pas en mesure de reprendre le travail pour le 29 octobre.

[14]         Éric Gravelle est le président du Syndicat chez l’employeur depuis le mois d'avril 2010. Dans les années qui ont précédé, il a occupé un poste à plein temps en santé et sécurité au travail.

[15]         Monsieur Gravelle précise qu'il est le seul du comité syndical à occuper un poste à temps plein. Les cinq autres personnes du comité ont droit à une libération syndicale de huit heures par semaine. Cela dit, lorsqu'il doit s'absenter pour des obligations à l'extérieur, monsieur Gravelle est remplacé à temps plein par un collègue du comité syndical.

[16]         Monsieur Gravelle souligne avoir reçu un appel du plaignant le 29 octobre 2010. Le plaignant relate avoir reçu une lettre de l'employeur qui le somme de se présenter au travail pour le lendemain matin à défaut de quoi il mettra fin à son emploi. Le plaignant explique que sa condition médicale ne lui permet pas de reprendre le travail pour le lendemain.

[17]         Dans ses explications, le plaignant souligne avoir remis tous ses certificats médicaux à l'employeur. Monsieur Gravelle le rassure alors en lui disant qu'il ne devrait pas y avoir de problème. Cela dit, monsieur Gravelle ne se souvient pas s'il a fait une intervention auprès de l'employeur après cette conversation.

[18]         Le 8 novembre, le plaignant reçoit de l'employeur un avis de fin d'emploi. Il croit s'être rendu à la clinique entre le 28 octobre et le 8 novembre et avoir remis un document à l'employeur pendant cette période.

[19]         Après avoir reçu la lettre qui met fin à son emploi, le plaignant affirme avoir immédiatement contacté le Syndicat. Il croit avoir parlé avec son représentant syndical, monsieur Gravelle, et, avec ce dernier, avoir convenu d'un rendez-vous à la mi-décembre 2010. Le plaignant ne communique toutefois pas avec l'employeur. De son côté, monsieur Gravelle nie catégoriquement cette conversation.

[20]         Le plaignant revoit un médecin de la Clinique médicale Sainte-Thérèse qui le met de nouveau en arrêt de travail à compter du 16 novembre 2010. Ce congé de maladie sera prolongé jusqu'au 25 février 2011.

[21]         Le plaignant se rappelle également avoir laissé un message sur la boîte vocale du local syndical le 1 er décembre 2010. Il demande que l'on dépose un grief.

[22]         Monsieur Gravelle souligne qu'après avoir vérifié auprès de l'une des membres de son comité syndical, France Chalifoux, cette dernière lui a dit avoir informé le plaignant qu'elle n'avait pas en sa possession de formulaire de grief.

[23]         Monsieur Gravelle relate avoir vaqué à des obligations à l'extérieur au mois de novembre et décembre. Le 16 décembre 2010, il travaille au local syndical sur les affaires courantes. Il prend connaissance de la correspondance reçue et constate que le Syndicat a reçu de l'employeur copie de la lettre du 8 novembre adressée au plaignant qui met fin à son emploi.

[24]         Monsieur Gravelle ne peut fournir d'explication sur le retard que le Syndicat a mis avant de prendre connaissance de cette lettre. Il explique que le comité syndical rencontre toutes les semaines l'équipe de la Direction des ressources humaines. Toutefois, à ces rencontres, il n'est pas question de dossiers individuels, mais plutôt de politiques générales puisqu'au moins une dizaine de personnes participent à ces rencontres. Ce n'est qu'après ces réunions qu'un membre du comité syndical rencontrera son vis-à-vis patronal afin de discuter de dossiers individuels.

[25]         Il communique avec le plaignant et fixe un rendez-vous pour le lendemain à 10 h au bureau de la section locale situé à Sainte-Thérèse.

[26]         Dès le début de la rencontre, le 17 décembre 2010, monsieur Gravelle explique au plaignant ne pas avoir pris connaissance de la lettre de fin d'emploi avant la veille. Il affirme avoir dit au plaignant à ce moment que le délai pour déposer un grief était déjà expiré puisqu'il s'agit d'un court délai de 15 jours ouvrables. Il lui dit que tout n'était pas perdu considérant que les relations de travail avec l'employeur étaient bonnes et que la majorité des dossiers se réglaient par la négociation. Monsieur Gravelle explique au plaignant qu'il s'occupera personnellement de son dossier, mais que ce dernier devra couvrir toutes les périodes d'absences par des certificats médicaux. Il suggère au plaignant d'obtenir les notes évolutives de ses rendez-vous médicaux. Le plaignant remet aussi tous ses certificats médicaux.

[27]         Le plaignant confirme avoir rencontré monsieur Gravelle le 17 décembre 2010. Il a été question de préparer son dossier. Monsieur Gravelle lui aurait expliqué qu'il ne pouvait pas déposer de grief parce qu'il attendait que des formulaires ou des documents lui soient livrés par l'employeur. Lors de cette rencontre, le plaignant reconnaît dans un premier temps que monsieur Gravelle lui a demandé un certificat médical qui prouverait qu'il était inapte au travail pour la période du 10 octobre au 16 novembre 2010. Puis dans un deuxième temps, il le nie. Il nie également que son représentant syndical lui ait dit que le grief était prescrit.

[28]         L'après-midi du 17 décembre 2010, monsieur Gravelle rencontre le directeur des ressources humaines, Claude Beauchamp, et lui fait part du cas du plaignant. Celui-ci se dit ouvert à le reprendre dans la mesure où il pourra «  patcher  » ses absences avec des certificats médicaux.

[29]         Entre-temps, le 3 décembre 2010, le plaignant se renseigne sur ses droits à la Commission des normes du travail (la CNT ). Il y dépose une plainte de pratique interdite et peut-être aussi une plainte de congédiement fait sans cause juste et suffisante. Il se désistera de sa ou ses plaintes le 1 er mars 2011 lorsque la CNT l'informe que ce n'est pas à elle d’intervenir, mais bien au Syndicat. La CNT l'informe également à ce moment qu'il peut déposer une plainte contre le Syndicat à la Commission.

[30]         Après une fermeture de deux semaines à l'occasion des fêtes, le comité syndical rencontre le Service des ressources humaines, le 6 janvier 2011, dans le cadre de leurs réunions hebdomadaires. Après la réunion, monsieur Gravelle demande à monsieur Beauchamp où en est le dossier du plaignant. Monsieur Beauchamp répond que son enquête n'était pas terminée.

[31]         En après-midi, monsieur Gravelle rencontre les membres du comité syndical. Il les questionne sur la lettre du 8 novembre. Tous répondent qu'ils ne l'ont pas vue.

[32]         Le lendemain, 7 janvier 2011, monsieur Gravelle remet à madame Marie-France Desrosiers, coordonnatrice aux ressources humaines, tous les documents médicaux qu'il avait reçus du plaignant lors de leur rencontre du 17 décembre 2010.

[33]         Fin janvier 2011, le plaignant fait parvenir un certificat médical au Syndicat qui confirme son inaptitude au travail pour la période de novembre et décembre 2010. Monsieur Gravelle lui avait dit d'être assidu. Il explique au plaignant que la période du 11 octobre au 16 novembre 2010 n'était pas comblée.

[34]         À la fin février 2011, le Syndicat reçoit un certificat médical qui confirme l'inaptitude du plaignant au travail de la fin décembre 2010 au 25 février 2011.

[35]         Monsieur Gravelle souligne avoir sensibilisé son conseiller syndical, Sylvain Martin, au dossier du plaignant. Monsieur Martin lui a répondu qu'en regard de la jurisprudence arbitrale, le plaignant devait absolument combler la période médicale manquante. Comme il s'était absenté plus de trois jours consécutifs sans motif, la jurisprudence considérait la décision de l'employeur comme un congédiement administratif non susceptible de révision.

[36]         Le 20 mars 2011, le Syndicat reçoit un nouveau certificat médical. À la suite d'une visite chez son médecin le 11 mars 2011, le plaignant obtient un retour au travail rétroactif au 22 février 2011.

[37]         Quelques jours plus tard, monsieur Gravelle demande à monsieur Beauchamp s'il reprendrait le plaignant à la faveur d'un processus d'embauche de plusieurs salariés prévu pour avril 2011. Monsieur Beauchamp lui répond que l’intervalle du 11 octobre au 16 novembre n’ayant pas été comblé par un certificat médical confirmant l’inaptitude du plaignant au travail pour cette période, il ne le reprenait pas.

[38]         Monsieur Gravelle communique avec le plaignant pour l’informer de la décision de l’employeur. Il lui dit également que son dossier était clos.

[39]         Le plaignant affirme avoir communiqué de nouveau avec le Syndicat au mois de mars 2011. Monsieur Gravelle lui aurait dit qu’il attendait toujours les formulaires que devait lui envoyer l’employeur.

[40]         Le plaignant communique de nouveau avec monsieur Gravelle en juin 2011 pour savoir si un grief avait été déposé. Le représentant syndical lui aurait dit que l’employeur avait caché les formulaires qu’il attendait dans le local syndical. Pour le plaignant, c’était la première fois que monsieur Gravelle mentionnait le fait que le grief était prescrit.

[41]         Ayant perdu confiance en le Syndicat, le plaignant communique de nouveau avec la CNT durant le mois de juin 2011. On lui dit qu’il peut déposer une plainte contre le Syndicat à la Commission. Il dépose sa plainte le 23 novembre 2011.

[42]         Le 25 octobre 2011, le plaignant présente une réclamation à la CSST afin de reconnaître une lésion professionnelle. La CSST refuse sa réclamation parce qu’elle était prescrite. Il en demande la révision à la Commission des lésions professionnelles (la CLP ).

Motifs de la décision

La prescription

Sous l’angle de ne pas avoir déposé de grief

[43]         Dès le début de l’enquête, le Syndicat et l’employeur ont soumis que la plainte avait été déposée plus de six mois après la connaissance par le plaignant que le Syndicat n’entendait pas déposer de grief dans son cas.

[44]         Concrètement, le dossier prend naissance quand le plaignant est avisé par l’employeur, le 28 octobre 2010, qu’il doit reprendre le travail parce qu’il n’a pas fourni un certificat médical, déclarant son inaptitude au travail, pour la période qui débute le 11 octobre 2010.

[45]         Le lendemain, le plaignant communique avec le Syndicat. Monsieur Gravelle lui répond qu’il ne semble pas qu’il y aura de problème puisque le plaignant lui a dit avoir remis des certificats justificatifs à l’employeur.

[46]         La preuve révèle que dans les faits, jamais le plaignant, malgré plusieurs demandes du Syndicat et de l’employeur, n’a été en mesure de prouver par un certificat médical qu’il pouvait s’absenter pour la période du 11 octobre au 16 novembre 2010.

[47]         Le 8 novembre 2010, le plaignant est avisé de sa fin d’emploi. Il soutient avoir immédiatement communiqué avec le Syndicat pour le prévenir. Monsieur Gravelle lui aurait fixé un rendez-vous pour la mi-décembre. C’est invraisemblable puisque le délai pour déposer un grief est de 15 jours ouvrables. Il est évident qu’un rendez-vous aurait été fixé beaucoup plus tôt.

[48]         De plus, pourquoi le plaignant prend-il la peine de téléphoner au Syndicat le 1 er  décembre afin de lui demander de déposer un grief s’il a déjà pris contact avec ce dernier pour un rendez-vous? Le message du 1 er décembre est laissé sur la boîte vocale. C’est madame Chalifoux, membre du comité syndical, qui le rappelle pour le prévenir qu’elle n’a pas de formulaire de grief. Cette réponse créera une grande confusion chez le plaignant par la suite. Mais, de toute façon, au 1 er décembre 2010, le grief est déjà prescrit.

[49]         La position du plaignant ne peut être retenue parce que s’il avait déjà convenu d’un rendez-vous lors d’une communication avec monsieur Gravelle à la mi-novembre pour le dépôt d’un grief, il n’aurait pas eu à rappeler le Syndicat le 1 er décembre.

[50]         C’est donc la version de monsieur Gravelle qui doit être retenue. Ce dernier apprend le 16 décembre que le plaignant a perdu son emploi lorsqu’il prend connaissance de la lettre de fin d’emploi. Il communique immédiatement avec lui et les deux hommes se rencontrent le lendemain.

[51]         Le plaignant prétend que monsieur Gravelle ne lui a pas parlé de grief prescrit. Ce dernier affirme le contraire.

[52]         Là encore, c’est la version de monsieur Gravelle qui est retenue parce qu’elle est conforme à tout ce qui s’est fait par la suite. Ainsi, il a renoncé à déposer un grief afin de tenter de régler le dossier par voie de négociation. D’ailleurs, toute la preuve postérieure va dans ce sens. Jamais, il est question de grief dans les discussions avec l’employeur.

[53]         Cela est tellement vrai que toutes les demandes du Syndicat et de l’employeur adressées au plaignant visaient la remise de certificats médicaux. Le plaignant en a effectivement remis plusieurs mais jamais le bon.

[54]         Forcément, le plaignant a été avisé dès la rencontre du 17 décembre 2010 qu’il n’y aurait pas de grief déposé parce qu’il était déjà prescrit. La plainte date du 23 novembre 2011. En regard du grief, il est évident que la plainte est prescrite.

Sous l’angle de la représentation faite par le Syndicat

[55]         Bien qu’en regard de la procédure de grief, la plainte a été déposée hors délai, la Commission est d’avis que le comportement postérieur du Syndicat, soit toute la phase de négociation et discussions engagées par le Syndicat avec l’employeur en vue de la réintégration du plaignant, doit faire l’objet d’une évaluation d’autant que le plaignant ne demande pas d’être réintégré dans la présente affaire, mais voudrait plutôt obtenir une indemnité compensatrice puisque le Syndicat l’aurait mal représenté.

[56]          C’est le 17 décembre 2010 que monsieur Gravelle informe le plaignant de la stratégie qu’il entendait mener dans son cas. La preuve révèle que monsieur Gravelle a discuté le jour même avec monsieur Beauchamp, responsable des ressources humaines, du cas du plaignant. Monsieur Beauchamp se dit ouvert à la négociation. Il annonce toutefois ses couleurs. Il veut que le plaignant couvre par certificats médicaux toutes ses périodes d’absence.

[57]         Le 6 janvier 2011, lors de la reprise des activités après deux semaines de fermeture, monsieur Gravelle relance monsieur Beauchamp. Celui-ci lui dit qu’il doit d’abord parler à la coordonnatrice qui s’occupe du dossier du plaignant.

[58]         De son côté, le lendemain, monsieur Gravelle remet à la coordonnatrice qui s’occupe du dossier du plaignant tous les documents médicaux en sa possession depuis la rencontre avec ce dernier, le 17 décembre 2010.

[59]         Par la suite, monsieur Gravelle s’assure que tous les nouveaux certificats médicaux fournis par le plaignant soient remis au service médical de l’employeur.

[60]         Quelque part à la fin mars ou au début d’avril 2011, monsieur Gravelle rencontre de nouveau monsieur Beauchamp. Monsieur Gravelle sait que l’employeur est sur le point de procéder à l’embauche de plusieurs dizaines de nouveaux salariés. Il lui demande s’il reprendra le plaignant qui est un salarié déjà bien formé pour le travail à effectuer.

[61]         Monsieur Beauchamp lui répond qu’il ne le reprendra pas puisque le plaignant n’a pas fourni une preuve médicale pour son absence entre les 11 octobre et 16 novembre 2010. Monsieur Gravelle communique immédiatement la décision au plaignant. Il ajoute que son dossier était clos.

[62]         C’est donc à compter de ce moment, fin mars début avril 2011, que le plaignant a su que le Syndicat cessait les démarches afin de le réintégrer. Le délai de prescription de six mois commence donc à cette date.

[63]         Comme il a été dit, le plaignant a déposé sa plainte le 23 novembre 2011. La preuve révèle que les premières embauches de nouveaux salariés ont eu lieu le 11 avril 2011. En retenant l’hypothèse la plus favorable au plaignant, soit que les discussions entre messieurs Gravelle et Beauchamp ont eu lieu la veille, soit le 10 avril 2001, force est de constater que le délai de six mois est expiré.

[64]         Cela dit, même si la plainte n’était pas prescrite, rien ne peut être reproché au Syndicat pour tout ce qui touche les discussions entreprises par le Syndicat en vue de la réintégration du plaignant.

[65]         Dans l’affaire à l’étude, le cœur du problème touchait l’absence de certificat médical pour la période du 11 octobre au 16 novembre. À plusieurs reprises, il a été demandé au plaignant de fournir cette preuve. Ce dernier, qui a pourtant remis plusieurs certificats, n’a pas été en mesure d’en fournir un pour la période litigieuse.

[66]         Pourtant, la preuve révèle que c’était possible. Le plaignant a obtenu en février 2011, un certificat prévoyant une période rétroactive d’incapacité. De plus, la Commission constate que lors de la dernière visite médicale du plaignant, le 11 mars 2011, son médecin traitant lui donne un retour au travail pour le 22 février 2011. C’est donc dire que c’était possible pour le plaignant d’obtenir ce type de certificat.

[67]         Le plaignant a tenté de démontrer qu’il avait été dans les faits incapable de travailler depuis le début de l’automne 2010 et que cette incapacité aurait perduré jusqu’au 22 février 2011, voire qu’elle durerait encore.

[68]         Pourtant, des rapports médicaux le contredisent. L’expertise psychiatrique réalisée à l’automne 2010 souligne que le plaignant doit effectivement continuer à prendre une médication. Cela dit, le médecin suggère malgré tout un retour au travail. Il n’y a pas a priori d’incompatibilité entre la nécessité de prendre une médication et l’incapacité au travail. Des tas de gens prenant des médicaments travaillent tous les jours.

EN CONSÉQUENCE, la Commission des relations du travail

REJETTE                       la plainte.

 

 

 

Benoît Monette

 

M. Michel Thibault

Représentant du plaignant

 

M e Catherine St-Germain

Représentante de l’intimé

 

M e Carl Lessard

LAVERY, DE BILLY, S.E.N.C.R.L.

Représentant de la mise en cause

 

 

Date de la dernière audience :

9 octobre 2012

 

/ls