Labib c. Construction Stemi inc.

2012 QCCQ 10908

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-119540-096

 

 

 

DATE :

LE 13 NOVEMBRE 2012

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

JULIE VEILLEUX, J.C.Q.

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AHMED LABIB.

et

RASHA AWAD

Demandeurs-défendeurs reconventionnels

c.

 

CONSTRUCTION STEMI INC.

Défenderesse-demanderesse reconventionnelle

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JUGEMENT

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[1]        Les demandeurs réclament un montant de 7 000 $ à la suite de travaux exécutés par la défenderesse à leur triplex, situé boulevard Laurentien à Montréal (l’immeuble).

[2]        Pour sa part, la défenderesse nie devoir les montants réclamés, se portant demanderesse reconventionnelle pour le solde contractuel et les extras impayés totalisant 4 000 $.

LE CONTEXTE

[3]        Les demandeurs sont propriétaires de l’immeuble depuis le mois de mai 2007 et rencontrent des problèmes d’infiltration d’eau au sous-sol, côté façade et côté nord. Différentes estimations sont demandées pour l’installation d’un drain français, qui sont de l’ordre de 25 000 $ à 30 000 $.

[4]        La défenderesse suggère l’installation d’un drain français sur deux côtés pour un montant de 9 030 $ incluant les taxes. Les parties signent un contrat qui prévoit les travaux devant être exécutés pour corriger le problème d’infiltration d’eau de l’immeuble.

[5]        Les travaux débutent à la fin du mois d’août 2009 et, au cours de ceux-ci, des extras sont négociés entre les parties. Ces dernières admettent s’être entendues sur les extras apparaissant au bas et à l’endos du contrat signé :

-    refaire l’escalier avant : 250 $ (ces travaux n’ont cependant pas été exécutés);

-    changer le tuyau d’entrée d’eau en raison de sa vétusté : 1 500 $;

-    changer une partie de la plomberie du sous-sol : 900 $.

[6]        L’original du contrat, remis au Tribunal lors de l’audition, prévoit cependant un autre extra, à savoir des travaux d’excavation pour la partie arrière de l’immeuble pour un montant additionnel de 4 000 $.

[7]        Les demandeurs nient avoir accepté de défrayer pour ces travaux d’excavation, ajoutant que la signature du demandeur de même que la date sont situées au-dessus de l’ajout manuscrit qu’ils imputent à la défenderesse.

[8]        Quoi qu’il en soit, le montant du contrat, incluant les extras sur lesquels il y a admission, totalise 11 680 $.

[9]        Les travaux durent environ dix jours et les demandeurs font des paiements partiels totalisant 7 000 $. Lors d’une pluie abondante qui survient à la mi-septembre, les demandeurs notent la présence d’infiltrations d’eau au sous-sol. M. Boudreau, représentant de la défenderesse qui a participé aux travaux, se rend sur les lieux et suggère de corriger le problème avec du ciment hydrofuge, mais les demandeurs décident plutôt de retenir les services de Basement System Québec (Basement) à la suite du visionnement sur YouTube d’une vidéo illustrant le fonctionnement d’un drain intérieur visant l’écoulement des eaux du sous-sol.

[10]     Parallèlement, les services de M. Antoine Bridi, technologue professionnel, sont retenus par les demandeurs. M. Bridi vient inspecter l’immeuble le 5 octobre 2009. Dans son rapport, de même que dans son témoignage, M. Bridi explique qu’à partir des photographies prises par le demandeur en cours d’exécution des travaux, il note que le drain installé par la défenderesse est surélevé et placé sur la membrane Delta MS. M. Bridi est d’avis que cette installation n’est pas conforme et il suggère de ré-installer le tuyau à un niveau plus bas, sous cette membrane.

[11]     En parallèle, il note aussi l’inexistence d’un système de drainage préventif à l’intérieur et en recommande l’installation après en avoir discuté avec le demandeur lors de sa visite de l’immeuble le 5 octobre 2009.

[12]     Témoigne aussi à l’audition M. Haydamous, représentant de la compagnie Basement impliquée dans les travaux d’installation du drain intérieur. Il explique avoir cassé la dalle de béton du sous-sol de l’immeuble pour procéder à l’installation d’une pompe et d’une membrane préalablement à la confection d’un nouveau plancher de béton afin d’empêcher que l’eau provenant de l’extérieur remonte au-dessus du plancher.

[13]     M. Boudreau explique avoir exécuté les travaux conformément à l’entente intervenue et aux règles de l’art en tenant compte des demandes spécifiques de la demanderesse.

[14]     Il concède par ailleurs que le drain extérieur devait être installé à un niveau plus bas, mais précise que c’est à la suite d’une demande expresse formulée par la demanderesse que le drain a été installé là où il est actuellement.

[15]     Aussi, M. Boudreau explique avoir offert une solution complémentaire aux demandeurs, le ciment hydrofuge, mais ceux-ci ont refusé.

[16]     Dans ce contexte, il estime que la défenderesse est en droit de recevoir le paiement complet du montant convenu à l’entente. À ce jour, des paiements partiels totalisant 7 000 $ ont été faits par les demandeurs et la défenderesse prétend avoir droit au paiement du solde contractuel et des extras, le tout pour un montant de 4 000 $.

ANALYSE

[17]     Le contrat de service intervenu entre les parties est assujetti à la Loi sur la protection du consommateur [1] et aux articles 2098 et suivants du Code civil du Québec .

[18]     Il est utile de reproduire l’article 2100 C.c.Q. qui est formulé ainsi :

2100.  L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.

[19]     À la lumière de la preuve offerte et de la teneur du rapport et du témoignage de M. Bridi, technologue professionnel, le Tribunal doit conclure que l’installation du drain par la défenderesse n’était pas conforme aux règles de l’art, plus particulièrement en ce qui a trait au niveau où il a été installé.

[20]     L’explication fournie par M. Boudreau à l’audience, soit que c’est à la demande de la demanderesse que le drain a été installé à ce niveau inadéquat, ne convainc pas le Tribunal. En effet, si tel avait été le cas, il aurait été plus prudent pour la défenderesse de consigner dans un écrit signé par les parties que l’installation marginale du drain était faite à la demande spécifique de la demanderesse.

[21]     Selon M. Bridi, cette dérogation aux règles de l’art dans l’installation du drain a contribué, du moins en partie, à la persistance des infiltrations d’eau dans le sous-sol de l’immeuble. Il y a quand même lieu de préciser que l’inexistence d’un système de drainage intérieur (préventif) a aussi contribué à la persistance des problèmes d’infiltration d’eau. Ceci est confirmé par le fait que l’installation du drain intérieur a réglé le problème d’infiltration sans qu’il n’y ait eu repositionnement du drain extérieur.

[22]     Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le recours des demandeurs contre la défenderesse est fondé et que le montant de 7 000 $ versé par eux à la défenderesse pour l’installation du drain extérieur doit leur être remboursé.

[23]     Par ailleurs, il n’y a aucune preuve que les extras acceptés par les demandeurs et exécutés par la défenderesse (1 500 $ pour le tuyau d’entrée d’eau vétuste et 900 $ pour la plomberie du sous-sol) aient été exécutés en contravention aux règles de l’art ou qu’ils soient même inutiles. La défenderesse est donc bien fondée de réclamer le paiement de ces extras totalisant 2 400 $ aux demandeurs.

[24]     À la lumière de ce qui précède et dans le cadre de la compensation judiciaire des montants dus de part et d’autre, le Tribunal déduira de la condamnation de la défenderesse le montant des extras dus par les demandeurs.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE en partie la réclamation d’Ahmed Labib et Rasha Awad;

ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle de Construction Stemi inc.;

CONDAMNE Construction Stemi inc. à payer à Ahmed Labib et Rasha Awad un montant de 3 600 $ avec intérêts au taux légal majorés de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter du 18 septembre 2009;

 

LE TOUT , sans frais.

 

                                                                                                   _________________________

JULIE VEILLEUX, J.C.Q.

 

Dates d’audience : les 24 avril et 22 octobre 2012

 



[1]     L.R.Q., c. P-40.1.