TRIBUNAL  D’ARBITRAGE

 

C A N A D A

PROVINCE DE QUÉBEC

N o de dépôt : 2012-9431 et 2012-9432

 

QUÉBEC,                                                       le 17 septembre 2012

 

 

AUDITIONS TENUES LES:                          24 mai, 12 juin et 21 juin 2012

 

DEVANT L’ARBITRE :                                  M e JEAN-GUY MÉNARD

 

 

NOS DES GRIEFS :             1- 186232 - déposé le 28 décembre 2011

                                               2- 186235 - déposé le 13 janvier 2012

                                               3- 186285 - déposé le 21 mars 2012

                                               4- 186286 - déposé le 21 mars 2012

                                               5- 186288 - déposé le 26 mars 2012

                                               6- 186289 - déposé le 29 mars 2012

 

OBJETS DES GRIEFS :     

1-     Contestation des formulaires de candidature à un poste affiché, des règles et de la procédure d'attribution et de nomination

2-   Contestation des communiqués numéros 1, 4 et 6

3-   Contestation de l'affichage et de la procédure de dotation accélérée pour la catégorie 3

4-   Contestation de la procédure de dotation accélérée, des formulaires de mise en candidature et des modalités d'utilisation du registre des postes et de tout autre changement aux procédures d'affichage pour la catégorie 3

5-   Contestation de la procédure de dotation accélérée, des formulaires de mise en candidature et des modalités d'utilisation du registre des postes et de tout autre changement aux procédures d'affichage pour la catégorie 2

6-   Contestation de la décision de ne pas reconnaître le Syndicat comme seul agent négociateur aux fins de la mise en œuvre de la procédure de dotation accélérée et aux fins de l'introduction d'un formulaire de mise en candidature engageant les seules personnes salariées

 

PROCUREUR SYNDICAL :              Monsieur Louis Proulx

 

PROCUREUR PATRONAL :            M e Normand Drolet

 

 

SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DE QUÉBEC-NORD (CSN),

ci-après appelé le «Syndicat»

ET

CSSS DE QUÉBEC-NORD,

ci-après appelé l'«Employeur»


S E N T E N C E  A R B I T R A L E

 

 

I - UNE DÉFINITION GÉNÉRALE DE LA PROBLÉMATIQUE RENCONTRÉE

[1]        L'Employeur opère un établissement multivocationnel qui origine de la fusion complétée en juillet 2004 du Centre de santé Haute-St-Charles, du Centre de santé Orléans et du CLSC-CHSLD La Source. Il regroupe actuellement dix (10) points de services CLSC, huit (8) centres d'hébergement et de soins de longue durée, deux (2) hôpitaux, une (1) unité de médecine familiale et un (1) centre administratif. Ses effectifs sont constitués de trois mille quarante-trois (3,043) employés dont mille deux cent dix-sept (1,217) sont du personnel technique, des services auxiliaires et de métiers qui réfèrent à la catégorie 2, et trois cent vingt-six (326) qui sont du personnel de bureau, techniciens et professionnels de l'administration qu'on regroupe dans la catégorie 3.

[2]        De juillet 2004 à juin 2005, les services rendus dans le secteur des ressources humaines sont demeurés décentralisés. Les vingt-cinq (25) accréditations syndicales qui couvraient le personnel précédemment défini et leurs conventions collectives et arrangements locaux pertinents ont continué d'exister et de s'appliquer jusqu'à l'accréditation de nouvelles unités de négociation par l'effet de la Loi 30.

[3]        À cette époque, le processus d'attribution des postes vacants qu'on appliquait à l'égard de la clientèle ici visée était essentiellement constitué des éléments suivants :

3.1      Les affichages se faisaient à tout moment sur demande des gestionnaires;

3.2      Les postes étaient affichés aux endroits habituels convenus par les parties pour chaque unité d'accréditation et seules les personnes salariées appartenant à une accréditation visée y avaient accès;

3.3      Les personnes salariées devaient remplir un formulaire de mise en candidature pour chaque poste qui les intéressait;

3.4      Au terme de la période d'affichage, la technicienne à la dotation saisissait dans le système informatique chacune des candidatures et les plaçait par ordre d'ancienneté afin de pouvoir offrir par téléphone à la personne salariée la plus ancienne le poste convoité;

3.5      Dans l'éventualité où une personne salariée avait posé sa candidature sur plus d'un poste, il lui revenait de faire un choix entre ceux-ci et, une fois cette décision prise, elle était réputée s'être désistée des autres postes offerts lors de l'appel téléphonique;

3.6      La personne salariée candidate devait répondre aux exigences normales de la tâche et se qualifier au moment de la dotation par le biais de tests, lorsque requis;

3.7      Les personnes salariées absentes pouvaient s'inscrire sur le registre des postes selon les modalités applicables à chacune des unités d'accréditation, cette inscription étant considérée comme une candidature à tous les postes affichés et les attentes exprimées étaient considérées comme étant autant de candidatures;

3.8      Une lettre envoyée à la personne choisie lui confirmait sa nomination au poste, étant entendu que, depuis janvier 2010, l'avis de nomination affiché dans les endroits habituels servait dorénavant d'avis à la personne salariée;

3.9      L'Employeur affichait toutes les nominations aux endroits habituels pour une période de quinze (15) jours;

3.10   En cas de refus ou de désistement de la personne salariée la plus ancienne, le poste visé était offert à la personne candidate suivante par ordre d'ancienneté jusqu'à ce qu'il y ait une nomination finale, et s'il y avait plus d'un désistement, on poursuivait le processus jusqu'à ce que le poste en question soit comblé.

[4]    De par l'application de la Loi 30 , les vingt-cinq (25) unités d'accréditation existantes en juillet 2004 ont été réduites en fonction des quatre (4) catégories d'emploi. Le 22 juillet 2005, le Syndicat a été accrédité pour représenter les personnes salariées des catégories 2 et 3. Toutefois, les listes d'ancienneté ont été intégrées par voie d'entente entre les parties à compter du 22 juillet 2007.

[5]    Entretemps, l'Employeur a appliqué, pour la dotation des postes, les principes découlant d'une décision rendue par l'arbitre François Hamelin le 1 er mars 2005. [1] On y prévoyait que :

5.1      Les postes vacants devaient être affichés dans les anciennes unités d'accréditation et chaque poste devait être octroyé par ancienneté parmi les personnes salariées de cette ancienne unité d'accréditation;

5.2      À défaut de candidats, le poste devait être offert par ancienneté parmi toutes les personnes salariées de l'établissement;

5.3      Les postes nouvellement créés devaient être affichés dans l'unité d'accréditation du syndicat gagnant et les personnes salariées de cette accréditation avaient, par ancienneté, priorité pour les obtenir;

5.4      Toute personne salariée nouvellement embauchée devait se voir appliquer la convention collective du syndicat gagnant et par conséquent accumuler son ancienneté dans cette unité d'accréditation.

[6]        À partir de mai 2006, on a instauré des cycles de dotation, c'est-à-dire des affichages de postes en bloc à des moments précis, ce qui a permis d'afficher en moyenne une centaine de postes par cycle pour toutes les catégories d'emploi confondues.

[7]        À compter du moment où les listes d'ancienneté ont été intégrées, soit à partir du 22 juillet 2007, la dotation des postes, y incluant l'affichage, s'est effectuée simultanément sur l'ensemble des sites, et ce, à l'adresse de toutes les personnes salariées des catégories 2 et 3. La procédure suivie était celle qu'on avait appliquée jusque-là à la différence :

7.1      qu'un calendrier des cycles de dotation était établi;

7.2      que les postes étaient affichés sur tout le territoire couvert par l'unité d'accréditation du Syndicat et qu'ils étaient octroyés par ancienneté aux personnes salariées de la catégorie concernée et

7.3      qu'une harmonisation des règles antérieures relatives aux modalités d'inscription au registre des postes a été effectuée si bien qu'une personne qui prévoyait s'absenter pour une durée de quatorze (14) jours et plus pouvait s'inscrire au registre et était dès lors considérée avoir posé sa candidature sur chaque poste affiché.

[8]        À compter de l'automne 2010, l'Employeur a entrepris une réflexion et une révision du processus de dotation de manière notamment à diminuer les délais de nomination constatés et à stabiliser les équipes en réduisant autant que possible les mouvements internes. C'est ainsi qu'en 2010, 2011 et 2012, les parties ont eu des discussions au sujet de la possibilité de revoir la procédure de dotation et les règles du registre des postes. Ces pourparlers s'inscrivaient dans le cadre d'un projet Kaisen qui avait au surplus pour objet de réorganiser le travail relatif à la liste de rappel et d'identifier des moyens de faire en sorte que les personnes salariées soient heureuses au travail.

[9]        Le 10 novembre 2010, il y a eu une première rencontre des parties dont l'objet était d'échanger sur les problématiques rencontrées en matière de dotation de postes et de faire savoir au Syndicat qu'il n'était plus possible de fonctionner de la façon dont on le faisait jusque-là. La question de la dotation des postes a particulièrement été discutée lors des réunions du 11 avril 2001, du 30 juin 2011 et du 7 février 2012.

[10]     Par ailleurs, la notion de "préqualification" qui s'entend de la vérification du respect des exigences liées à un poste par la réussite de tests et/ou par la remise de diplômes ou autres documents requis avant l'affichage des postes convoités, a quant à elle été traitée lors d'une rencontre des parties le 23 juin 2011. Cette étape a pour particularité d’emporter, lorsqu’on la complète avec succès, une reconnaissance du titre d’emploi visé, et pour utilité de contribuer à la réduction des délais de nomination suivant la fin des périodes d'affichage.

[11]     Le 9 janvier 2012, l'Employeur informait les personnes salariées de la catégorie 3 par un communiqué transmis par la poste de l’ajout d’une nouvelle modalité à la préqualification. On y précisait qu'il était désormais obligatoire pour les personnes salariées de la catégorie 3 qui avaient à subir des tests ou à remettre des diplômes ou d'autres documents requis, de se préqualifier pour que leurs candidatures à un ou des postes convoités soient considérées. À cette fin, on a prévu des séances de préqualification pour la catégorie 3 les 7 et 8 mars 2012, lesquelles ont ensuite été déplacées aux 8 et 9 février 2012.

[12]     Le 31 janvier 2012, madame Anne-Sophie Blais, conseillère en gestion des ressources humaines chez l'Employeur, adressait la correspondance suivante à monsieur Gilles Lamontagne, président du Syndicat, donnant ainsi suite à une conversation téléphonique qu'ils avaient eue le 27 janvier précédent:

"(…) Tel que convenu lors de notre discussion téléphonique du 27 janvier, je vous transmets l'ensemble des informations relatives au processus de dotation accélérée qui sera en application à compter du prochain cycle de dotation pour le personnel de la catégorie 1 et dont nous souhaitons étendre à l'ensemble du personnel que vous représentez. Notre façon de faire actuelle nous permet difficilement de respecter les délais prévus aux dispositions locales en raison du nombre important d'affichages, du nombre important de candidatures à saisir, de la difficulté à contacter les candidats et les délais de réponse des candidats qui peuvent s'étirer sur plusieurs jours. Notre intention est donc d'emboiter le pas à plusieurs organisations et d'utiliser la méthode de dotation accélérée. Cette façon de faire nous permettra de doter les postes beaucoup plus rapidement, soit dans un délai inférieur à cinq (5) jours, permettant ainsi des entrées en fonction plus rapides et une augmentation des cycles de dotation.

Les modifications qui sont à apporter sont au niveau de demander aux salariés de prioriser les postes sur lesquels ils postulent, en fonction de leur intérêt. Ainsi, le poste est doté à la personne salariée ayant le plus d'ancienneté et répondant aux exigences en fonction de ses priorités. Il n'y a donc plus d'appel téléphonique. Ceci vient faire en sorte que la personne doit répondre aux exigences du poste avant la période de dotation. Pour ce faire, les personnes salariées doivent être préqualifiées, si nécessaire, afin d'avoir le titre d'emploi convoité. De plus, si le titre d'emploi exige une formation académique spécifique, les documents pertinents doivent se trouver dans le dossier de la personne salariée et il est de sa responsabilité de s'assurer que tous les documents s'y retrouvent.

Telle que discuté avec vous, une modification au registre des postes doit également être apportée. Ce registre des postes deviendra alors une liste d'envoi où les personnes salariées en absence pour la totalité du cycle de dotation pourront s'inscrire et recevoir la liste des postes en affichage. Les personnes salariées devront postuler et prioriser les postes.

(…)

(Pièce E-24)

[13]     Dans le cours de son témoignage, madame Blais a précisé, quant à la dernière phrase de cette lettre, qu'il faudrait plutôt lire que les personnes salariées devaient faire connaître leurs priorités.

[14]     Le 7 février 2012, le Syndicat a avisé l'Employeur qu'il mettait fin au projet pilote mis en œuvre quant à la réorganisation du travail concernant la liste de rappel. À partir de ce moment, les relations et les échanges entre les parties se sont détériorés, au point qu'il n'y a pratiquement plus eu de communications entre elles, notamment au sujet de la question de la dotation des postes.

[15]     Le 28 février 2012, un communiqué a été adressé aux personnes salariées de la catégorie 3 aux fins de les informer du début du processus de dotation accélérée instauré. Le 19 mars 2012, on faisait de même à l'adresse des personnes salariées de la catégorie 2. À l'une et à l'autre de ces occasions, l'Employeur a fait parvenir à l'ensemble des membres du Syndicat de catégorie 2 et de catégorie 3 un Guide de mise en candidature qui expliquait la nouvelle procédure de dotation accélérée qu'il entendait mettre en application lors du cycle de dotation du 13 au 27 mars 2012, pour ce qui est de la catégorie 3, et du cycle de dotation du 10 au 24 février 2012, pour ce qui a trait à la catégorie 2.

[16]     Cette nouvelle procédure de dotation accélérée était ainsi constituée que la personne salariée devait remplir un nouveau formulaire de mise en candidature disponible sur Intranet et Internet qui lui permettait de postuler sur plusieurs postes à la fois en n’utilisant qu'un seul formulaire sur lequel elle devait prioriser ses choix et qu'elle devait transmettre par courriel, par courrier interne ou par la poste. En substance, cette procédure de dotation accélérée comportait les éléments suivants:

16.1   La personne salariée intéressée par un ou des postes qui avait pour exigence de se soumettre à des tests ou de déposer des diplômes ou d'autres documents devait le faire dans une phase préalable de préqualification et, dans l'éventualité d'échec aux tests ou de défaut de transmettre les pièces requises, sa candidature à un ou des postes donnés ne pouvait être retenue;

16.2   La personne salariée qui convoitait un poste ayant des exigences particulières devait joindre toutes les pièces justificatives à sa mise en candidature, si elles n'étaient pas déjà au dossier;

16.3   La personne salariée en absence pour une période de quatorze (14) jours et plus pouvait s'inscrire à une liste d'envoi en complétant un formulaire disponible sur un Intranet et Internet, ce qui lui permettait de se voir transmettre à son domicile par courrier ou par courriel les affichages de postes. Sur réception de ces informations, il lui revenait de faire savoir, par un autre formulaire, l'ordre de priorité de ses choix de postes parmi ceux qui étaient affichés;

16.4   La nomination se faisait de façon automatique en tenant compte de l'ancienneté et de l'ordre des priorités retenues par la personne candidate, et ce, sans appel téléphonique. Le poste était attribué à la personne salariée qui avait le plus d'ancienneté parmi celles qui avaient posé leur candidature à la condition qu'elle satisfasse aux exigences du poste;

16.5   Les avis de nomination étaient disponibles pour les personnes salariées dans les trois (3) jours suivant la fin du cycle de dotation. Ils étaient affichés sur Intranet, Internet et sur les babillards dans l'ensemble des sites pour une période de quinze (15) jours;

16.6   Lorsqu'une personne salariée était en période d'initiation et d'essai ou n'avait pas commencé sa période d'initiation et d'essai et qu’elle obtenait dans le cadre d'un autre affichage un troisième poste, elle se voyait automatiquement nommée à ce dernier poste et elle était conséquemment retirée du poste dans lequel elle n'avait pas terminé ou commencé sa période d'initiation et d'essai;

16.7   En cas de désistement, la personne salariée était retournée à son poste d'origine et le poste ainsi devenu vacant était reporté en affichage au prochain cycle de dotation.

[17]     Le 19 mars 2012, l'Employeur faisait parvenir à l'ensemble des personnes salariées de la catégorie 2 et de la catégorie 3 un communiqué et un Guide de mise en candidature qui expliquaient la nouvelle procédure de dotation accélérée qu'il entendait mettre en application aux fins du cycle de dotation du 10 au 24 avril 2012. Ce guide, qui a été transmis autant aux personnes salariées de la catégorie 2 qu’à celles de la catégorie 3, était également disponible sur Intranet et sur Internet. Il avait pour utilité d'accompagner les personnes salariées dans toutes leurs interrogations concernant la dotation accélérée et ses implications. En raison d'erreurs commises ou de modifications à apporter, il y a par la suite eu plusieurs versions de ce guide entre le 22 février et le 14 mai 2012.

[18]     Certaines modalités contenues dans le guide adressé aux personnes salariées de la catégorie 3 en date du 19 mars 2012 n'ont jamais été appliquées. Par exemple, on y prévoyait que les inscrits au registre des postes avaient la responsabilité de postuler sur les postes affichés qui les intéressaient. L'équipe des "mouvements de main-d'œuvre" a plutôt transmis un formulaire aux gens inscrits sur le registre des postes en leur demandant de préciser leurs priorités eu égard aux postes affichés.

[19]     Aussi, il était stipulé au guide adressé aux personnes salariées de la catégorie 3 que le poste d'une personne candidate qui s'était désistée serait accordé à la deuxième personne candidate. Cette formule n'a jamais été appliquée, le poste devenu vacant à la suite d'un désistement étant de nouveau affiché lors du prochain cycle de dotation. Les corrections conséquentes ont été apportées dans le guide concernant les personnes salariées de la catégorie 3, mis à jour et daté du 16 avril 2012. Et enfin, dans le guide concernant les personnes salariées de la catégorie 2 comme de la catégorie 3, il est écrit que l'avis de nomination est affiché pendant dix (10) jours. Cependant, l'avis de nomination a toujours été affiché pendant quinze (15) jours par l'Employeur, et ce, conformément aux Dispositions localement négociées. Cette correction a d'ailleurs été apportée dans chacun de ces guides le 14 mai  2012.

[20]     Plusieurs séances d'information ont été tenues dans l'ensemble des sites par la Direction des ressources humaines tout au long de la période d'affichage du 10 au 24 avril 2012 afin d'accompagner les personnes salariées de la catégorie 2 dans les changements intervenus par la procédure de dotation accélérée.

[21]     Le cycle de dotation du 13 au 27 mars 2012 pour la catégorie 3 s'est traduit par l'affichage de onze (11) postes, par cent quarante-quatre (144) candidatures, par un (1) désistement et par aucun refus. L'ensemble des nominations aux postes ainsi affichés ont été complétées en deux (2) jours. Par ailleurs, le cycle de dotation du 10 au 24 avril 2012 pour la catégorie 2 a donné lieu à l'affichage de deux cent trente-huit (238) postes, à six cent soixante-treize (673) candidatures, à sept (7) désistements et à aucun refus. Les nominations relatives à l'ensemble de ces postes ont été complétées en trois (3) jours. L'affichage de ces postes de catégorie 2 n'a donné lieu à aucune séance de préqualification puisqu'aucun de ces postes n'exigeait d'avoir complété des tests ou toute autre forme de préqualification, étant précisé que seul le poste de cuisinier requérait une préqualification.

[22]     Au moment du dépôt des griefs, les parties étaient liées par la convention collective nationale (Dispositions nationales) qui est en vigueur depuis le 13 mars 2011 et qui le demeure jusqu'au 31 mars 2015. Les dispositions locales applicables à l'époque aux personnes salariées de la catégorie 3 étaient celles qu'ont convenues l'Employeur et le Syndicat et qu'ils appliquent depuis le 1 er octobre 2007. Pour ce qui a trait aux personnes salariées de la catégorie 2, elles étaient régies par la Lettre d'entente no 1 qui a été reconduite le 24 mai 2011.

[23]     Les questions qui font désaccord entre les parties et qui m'ont été soumises dans le cadre d'une procédure sommaire agréée le 24 mai 2012 ont été formulées de la façon suivante :

1)     Est-ce que l'Employeur contrevient à la convention collective en exigeant que la personne salariée soit préqualifiée avant les périodes d'affichage et que, si celle-ci ne l'est pas, l'Employeur ne retienne pas sa candidature au moment de faire les nominations?

2)     Est-ce que le formulaire de mise en candidature et son contenu, tel qu'il est exigé par l'Employeur pour les affichages du 13 au 27 mars 2012 pour la catégorie 3 et du 10 au 24 avril 2012 pour la catégorie 2, contreviennent à la convention collective?

3)     Le fait de procéder à la nomination automatique sur le ou les postes, qui est ou sont toujours disponible(s) au rang d'ancienneté de la personne salariée en fonction de la priorité exprimée par celle-ci sans lui permettre de faire un choix au moment des nominations parmi tous les postes lui revenant par ancienneté, contrevient-il à la convention collective?

4)     Selon l'Employeur, la quatrième question en litige devrait être formulée de la façon suivante: Les nouvelles modalités applicables aux personnes salariées inscrites sur le registre des postes contreviennent-elles à la convention collective?

Selon le Syndicat, la quatrième question devrait être formulée de la façon suivante: L'Employeur contrevient-il à la convention collective lorsqu'il modifie les règles d'application du registre des postes sans en convenir avec le Syndicat?

5)     À la suite du désistement d'une personne salariée ou si elle ne termine pas sa période d'initiation et d'essai à la suite de sa nomination à un poste affiché, l'Employeur contrevient-il à la convention collective en ne procédant pas à la nomination de la personne salariée qui est la suivante en ancienneté ayant postulé sur le même poste au moment de l'affichage?

6)     L'Employeur a-t-il refusé de reconnaître le Syndicat comme seul agent négociateur en changeant les règles de mutations volontaires par l'introduction du nouveau formulaire de mise en candidature et de sa nouvelle procédure de nomination?

7)     Est-ce que les engagements qui sont mentionnés sur le formulaire de mise en candidature que l'Employeur oblige à signer et à autographier par les personnes salariées au moment d'une mise en candidature sont une entente nécessitant l'approbation du Syndicat tel qu'il est prévu à la convention collective? (Pour l'Employeur, cette question est incluse dans la question 2)

8)     L'Employeur contrevient-il à la convention collective en affichant des postes avec des appellations d'emploi non prévues à la Nomenclature des appellations d'emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux lors de l'affichage du 13 au 27 mars 2012 dans la catégorie 3? (Il est convenu entre les parties que cette question ne concerne pas la dotation accélérée, mais il a néanmoins été convenu de me la soumettre dans le cadre de la présente procédure).

 

II - D'AUTRES ÉLÉMENTS DE PREUVE PERTINENTS

[24]     Aux fins d'établir leurs prétentions respectives, les parties ont administré une importante preuve en convenant d'admissions d'abord, en procédant par le dépôt d'affidavits ensuite et, finalement, en faisant entendre des témoins relativement à des points qui restaient litigieux ou qui méritaient d'être éclaircis ou complétés. Tous les affiants, à savoir monsieur Jocelyn Gauvin, mécanicien d'entretien Millright, agent de griefs et vice-président du Syndicat, madame Nadine Boutet, coordonnatrice aux programmes administratifs à la Direction des ressources humaines, madame Brigitte Gagnon, conseillère en gestion des ressources humaines, madame Anne-Sophie Blais, conseillère en gestion des ressources humaines, madame Josée Lebel, technicienne en administration, ont témoigné, sauf madame Janick Plourde, technicienne en administration, qui a strictement établi « avoir dit à madame Julie Cantin, membre de l'exécutif syndical, que les communiqués et guides émis par le CSSQN ne seraient plus acheminés au Syndicat des travailleuses et travailleurs de Québec Nord en raison du fait que ceux-ci étaient dorénavant disponibles sur Intranet, donc accessibles au Syndicat et à tous les salariés» . En plus des affiants qui ont témoigné, j'ai aussi entendu la déclaration de madame Julie Cantin, préposée au service alimentaire.

[25]     Si on y ajoute les soixante et une (61) pièces déposées par les parties, on comprendra que je m'en tienne à rapporter les principaux éléments de faits pertinents qui apparaissent être en lien avec les questions qu'on m'a adressées et qui viennent compléter la précédente présentation générale qui origine quant à elle des admissions et de certains des affidavits produits.

[26]     Monsieur JOCELYN GAUVIN a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[27]     Au souvenir de monsieur Gauvin, il n'y a pas eu de discussion entre les parties spécifiquement sur le sujet de la procédure de la dotation accélérée. Il en a été question dans le cadre d'un projet Kaisen qui portait également sur les améliorations à apporter à la liste de rappel et sur des moyens de faire en sorte que les personnes salariées soient plus heureuses au travail.

[28]     En bout de course, il n'y a eu aucune entente entre les parties quant à la procédure de dotation accélérée aussi bien que pour ce qui était de la liste de rappel. Avant de mettre en application la procédure de dotation accélérée qu'il a retenue, l'Employeur n'a fourni aucune explication particulière aux représentants syndicaux, si ce n'est la documentation qu'ils ont reçue comme toute autre personne salariée. Devant cet état de fait, le Syndicat n'a pas demandé que la situation soit corrigée.

[29]     La problématique que soulève la question de la préqualification tient du fait qu'au moment où on y procède, les postes potentiellement visés ne sont pas connus parce que non affichés encore. En ce qui a trait à la liste d'envoi des postes en affichage qui a remplacé le registre des postes, elle oblige les personnes salariées concernées à remplir un formulaire et à l'acheminer à l'Employeur, ce qui n'était pas le cas antérieurement puisque l'inscription au registre des postes emportait automatiquement une mise en candidature.

[30]     Le Comité national de négociation ayant revu les titres d'emploi de la catégorie 3 en janvier 2012, le ministère de la Santé et des services sociaux a envoyé un message et une annexe aux établissements le 23 janvier 2012 pour les informer des modifications apportées à la nomenclature des titres d’emploi. Toute cette information a incidemment été publiée par le Comité national de négociation sur le site Internet du CPNSSS.

[31]     Suivant une vérification qu'il a faite par Internet, monsieur Gauvin a été à même de constater que le Guide de mise en candidature adressé aux personnes salariées de la catégorie 2 le 19 mars 2012 faisait état dans sa page couverture d'appellations non conformes à la Nomenclature des titres d'emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux , ce qui a été corrigé quelques jours plus tard. Au surplus, monsieur Gauvin a observé, lors de l'affichage du 13 au 27 mars 2012 pour la catégorie 3, que l'Employeur a utilisé des titres d'emploi qui n'existaient plus en raison des modifications récemment apportées à la Nomenclature des titres d'emploi .

[32]     Madame JOSÉE LEBEL a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[33]     À partir du moment où on a commencé en juillet 2006 à effectuer la dotation des postes simultanément sur l'ensemble du territoire ou des sites opérés par l'Employeur, et ce, jusqu'en décembre 2009, on a constaté une augmentation substantielle des mouvements de main-d'œuvre internes. C'est ainsi que pour l'année 2007, il y a eu, au niveau de toutes les catégories, un total de quatre cent dix-huit (418) postes affichés en neuf (9) cycles de dotation, alors que pour l'année 2008 au complet, il y en a eu six cent quatre-vingt-douze (692) en sept (7) cycles de dotation.

[34]     Jusqu'à l'automne 2010, on a appliqué la procédure antérieure de dotation. Comme cela se produisait par le passé, le secteur des mouvements de main-d'œuvre internes n'a pas été en mesure de respecter en 2008 et en 2009 le délai de nomination de dix (10) jours prévu aux Dispositions localement négociées. Il est même arrivé que la dotation de postes ne soit pas terminée à l'arrivée d'un nouveau cycle de dotation.

[35]     Madame NADINE BOUTET a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[36]     En raison de l'augmentation du nombre d'affichages et du non-respect des délais prévus aux Dispositions localement négociées, l'Employeur a procédé, en avril 2010, à l'ajout d'une technicienne en administration responsable du recrutement et de la dotation en sus de madame Josée Lebel et de l'agente en administration qui la supportait occasionnellement. Avec le temps, cette nouvelle personne salariée embauchée en est venue à ne se préoccuper que de recrutement.

[37]     L'année 2010 s'est traduite, pour les personnes salariées de la catégorie 2, par l'affichage de six cent quarante-trois (643) postes, soit une augmentation de deux cent quatre-vingt-quatorze (294) postes par rapport à l'année précédente, par treize mille six cent soixante-cinq (13,665) candidatures, par cinq cent quatre-vingt-quatorze (594) refus, par soixante-trois (63) désistements et par un délai moyen de nomination de quarante-six (46) jours. Des six cent quarante-trois (643) postes affichés, il y en avait trois cent sept (307) qui provenaient d'un exercice ponctuel de stabilisation des postes de préposé aux bénéficiaires à l'équipe volante. Selon madame Boutet, le délai de nomination s'expliquait principalement par la difficulté de rejoindre les candidats et par le fait qu'il ne répondait pas immédiatement aux offres qui leur étaient faites.

[38]     Toujours en 2010, il y a eu, pour les personnes salariées de la catégorie 3, cinquante et un (51) postes affichés, mille trois cent soixante-treize (1,373) candidatures, cent vingt-cinq (125) refus, trois (3) désistements et un délai moyen de nomination de soixante-cinq (65) jours.

[39]     Pour la catégorie 2, on a affiché en 2011, quatre cent quatre-vingt-un (481) postes qui ont amené quatre mille neuf cent cinquante-deux (4,952) candida-tures, et qui ont provoqué mille six cent vingt-quatre (1,624) refus, soixante-treize (73) désistements et un délai moyen de nomination de soixante-deux (62) jours. En ce qui a trait à la catégorie 3, toujours en 2011, l'affichage de cinquante et un (51) postes a suscité mille trois cent quatre-vingt-quinze (1,395) candidatures et a provoqué cent trente-six (136) refus, six (6) désistements et un délai moyen de nomination de trente et un (31) jours.

[40]     Le cycle de dotation du 6 au 20 janvier 2012 pour la catégorie 2 s'est traduit par l'affichage de soixante-sept (67) postes, par mille vingt-neuf (1,029) candida-tures, par trois cent vingt-cinq (325) refus, par vingt-trois (23) désistements et par un délai moyen de nomination de vingt-sept (27) jours. Le même cycle pour la catégorie 3 a été l'occasion d'afficher dix-sept (17) postes qui ont amené trois cent quarante-trois (343) candidatures, trente-trois (33) refus, quatorze (14) désistements et un délai moyen de nomination de quarante (40) jours.

[41]     Le cycle de dotation du 13 au 27 mars 2012 pour la catégorie 3 a permis l'affichage de onze (11) postes et suscité cent quarante-quatre (144) candidatures, un (1) désistement, aucun refus et l'ensemble des nominations aux postes ainsi affichés ont été complétées en deux (2) jours. Le cycle de dotation du 10 au 24 avril 2012 pour la catégorie 3 s'est traduit par l'affichage de deux cent trente-huit (238) postes, par six cent soixante-treize (673) candidatures, par sept (7) désistements et aucun refus, les nominations relatives à l'ensemble de ces postes ayant été complétées en trois (3) jours.

[42]     Madame BRIGITTE GAGNON a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[43]     En 2009, on a affiché dans la catégorie 2 trois cent quarante-neuf (349) postes qui ont donné lieu à huit mille vingt-huit (8,028) candidatures, à mille neuf cent cinquante-six (1,956) refus, à cent vingt et un (121) désistements, à cent quarante-neuf (149) candidatures ne répondant pas aux exigences et à un délai qui a dépassé les dix (10) jours exigés par l'article 13.11 des Dispositions localement négociées. Pour ce qui concerne la catégorie 3, quarante-neuf (49) postes ont été affichés, cent quarante (140) candidatures ont été déposées, neuf (9) désistements ont été présentés, trois cent quatre-vingt-trois (383) candidatures ont été refusées parce que ne répondant pas aux exigences et encore là, le secteur des mouvements de main-d'œuvre internes a été incapable de faire le travail de nomination dans les dix (10) jours stipulés à la clause 13.11 précitée.

[44]     À partir de l'automne 2010, l'Employeur a entrepris une révision de son processus de dotation afin entre autre de diminuer les délais de nomination et de stabiliser les équipes en réduisant les mouvements internes.

[45]     C'est ainsi que le 21 septembre 2010, on a avisé les personnes salariées qu'il y a aurait ajout d'informations supplémentaires sur les avis d'affichage afin de leur permettre de postuler seulement sur les postes pour lesquelles elles auraient un véritable intérêt de manière à diminuer les candidatures; on les a également invitées à prendre connaissance des postes avant de postuler et à fournir toutes les coordonnées nécessaires en cas d'absence pendant la dotation. Le 14 janvier 2011, on a incité les personnes salariées à mettre à jour leurs dossiers par l'envoi d’un curriculum vitae à jour et des diplômes obtenus. Le 8 juillet 2011, on leur faisait savoir qu'il y aurait des séances de préqualification avant chaque cycle de dotation. Le 14 novembre 2011, on les informait de la mise en place d'un nouveau formulaire permettant de postuler sur plusieurs postes par le biais d'un seul document. Le 9 janvier 2012, on diffusait des informations relatives à la nouvelle modalité de préqualification qui serait dorénavant obligatoire pour les personnes salariées de la catégorie 3 pour qu'une candidature soit considérée. Si un échec en préqualification empêchait de retenir une candidature, sa réussite garantissait le titre d'emploi en cause et permettait l'examen d'une candidature sur un poste donné. Cette modalité n'a pas été négociée avant d'être mise en place.

[46]     Comme tous ces changements apportés à la procédure de dotation jusqu'en janvier 2012 n'avaient pas réduit suffisamment la pression que subissait le secteur des mouvements de main-d'œuvre internes, et comme les pourparlers menés avec le Syndicat n'avaient pas donné lieu à une entente sur le sujet, l'Employeur a informé les personnes salariées de la catégorie 3, le 28 février 2012, et celles de la catégorie 2, le 19 mars 2012, de l'entrée en vigueur du processus de dotation accélérée en spécifiant que son objectif était de faire connaître les nominations le plus rapidement possible et de respecter les délais stipulés aux fins de l'entrée en fonction. Cette procédure s'inspirait d'abord de ce qui avait été négocié avec la FIQ et ensuite d'une décision rendue par l'arbitre Francine Beaulieu à l'établissement CHUQ.

[47]     Madame ANNE-SOPHIE BLAIS a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[48]     Le 28 mars 2011, l'Employeur et le Syndicat ont débuté une série de rencontres dont l'objet était de revoir les pratiques en matière de listes de rappel et de dotation et d'améliorer les conditions d'exercice de l'emploi des personnes salariées. En définitive, il s'agissait d'un projet Kaisen dans le cadre duquel on cherchait à réduire la pression sur les listes de rappel, à améliorer les délais de nomination devenus inacceptables en raison des lenteurs causées par le processus de dotation et à trouver des moyens de rendre les effectifs plus heureux au travail.

[49]     De façon plus spécifique, le sujet de la dotation a été traité par les représentants des parties lors des rencontres du 11 avril 2011, du 30 juin 2011 et du 7 février 2012. Par ailleurs, la notion de préqualification a été discutée dans le cours de la réunion du 23 juin 2011. À cette dernière occasion, le Syndicat n'avait pas d'opposition à faire valoir quant au principe de la préqualification comme telle. Son désaccord portait plus particulièrement sur le fait qu'un échec en préqualification disposait du coup d'une candidature.

[50]     Dans le cours de la réunion du 7 février 2012, on a exprimé du côté syndical l'intention de réfléchir à certaines propositions patronales tout en convenant que l'Employeur pouvait entretemps préparer un projet d'entente. Le 21 février 2012, madame Blais a reçu un appel téléphonique du président du Syndicat, monsieur Gilles Lamontagne, qui l’a avisée, à la suite de la lecture du projet d'entente déposé, que les discussions sur la dotation étaient interrompues et que toute cette question était «mise sur la glace».

[51]     Suivant madame Blais, les représentants syndicaux qui ont participé à toutes ces rencontres ont reçu les informations qui pouvaient être nécessaires pour bien comprendre chacun des sujets abordés.

[52]     Les différentes versions du Guide de mise en candidature envoyées aux personnes salariées et placées sur Intranet et Internet n'ont pas été individuellement adressées aux officiers syndicaux et n'ont pas fait l'objet d'explications particulières à leur endroit.

[53]     Madame JULIE CANTIN a notamment porté à mon attention les informations qui suivent.

[54]     À l'époque des rencontres organisées par l'Employeur pour faire connaître la procédure de dotation accélérée, madame Cantin a adressé des questions à des représentants patronaux, tantôt pour recevoir une réponse qui ne la pas éclairée, tantôt pour provoquer une correction au Guide de mise en candidature dans sa version électronique uniquement, ce qui n'a toutefois fait l'objet d'aucun communiqué à l'adresse de l'ensemble des salariés.

 

III - LE DROIT

[55]     Les dispositions conventionnelles se lisent comme suit :

A)     DISPOSITIONS LOCALEMENT NÉGOCIÉES

"13.01 Tout poste vacant ou nouvellement créé couvert par l'accréditation est affiché, et ce, sous réserve des dispositions prévues à l'article 15.05 des dispositions nationales de la convention collective.

            Tout poste vacant doit être affiché dans les quatre-vingt-dix (90) jours de sa vacance.

            Toutefois, dans le cas où le poste vacant est visé par l'un des réaménagements prévus aux paragraphes 14.01 à 14.07 des dispositions nationales de la convention collective, l'affichage doit se faire dans un délai qui n'excède pas douze (12) mois de la date où l'Employeur a avisé le Syndicat conformément au paragraphe 14.09 des dispositions nationales de la convention collective. Cependant, tout poste qui devient vacant à compter du neuvième (9 e ) mois qui suit la transmission de cet avis demeure soumis à la règle prévue au deuxième (2 e ) alinéa du présent paragraphe.

            L'affichage se fait aux endroits habituels durant une période de quinze (15) jours. L'Employeur transmet copie de l'affichage au Syndicat. Les parties peuvent convenir de modifier les délais prévus au présent paragraphe.

13.06 La personne salariée peut, avant de solliciter un poste, prendre connaissance des candidatures à la Direction des ressources humaines.

13.07 Dè s qu’une personne salariée présente sa candidature, copie de sa demande est transmise par l'Employeur au Syndicat.

13.08 Un registre des postes est établi et les modalités d'application sont les suivantes :

§   La personne salariée peut s'inscrire au registre des postes lorsqu'elle prévoit être absente du travail pour une période de quatorze (14) jours et plus;

§   Le registre des postes inclut également les fonctions de chef d'équipe en conformité avec l'article 9.04 des dispositions nationales de la convention collective;

§   Tous les motifs d'absence prévus aux dispositions locales et nationales de la convention collective permettent à la personne salariée de pouvoir s'inscrire au registre;

§   L'inscription au registre est valable pour la durée de l'absence uniquement;

§   La personne salariée incapable de se déplacer pour s'inscrire au registre peut effectuer son inscription par téléphone; dans ce cas, l'Employeur confirmera l'inscription au registre à la personne salariée par courrier postal;

§   La personne salariée doit donner, au moment de son inscription, toutes les coordonnées nécessaires afin d'être rejointe. L'Employeur transmet copie des formulaires complétés au Syndicat.

13.09    L'inscription au re gi stre des postes est considérée comme une candidature au poste affiché.

13.10 Le poste devra être accordé et sera comblé par la personne salariée qui a le plus d'ancienneté parmi celles qui ont posé leur candidature, à la condition qu'elle puisse satisfaire aux exigences normales de la tâche. La personne salariée nommée à des fonctions de chef d'équipe doit provenir du service où la fonction de chef d'équipe est requise.

          Les exigences doivent être pertinentes et en relation avec la nature des fonctions.

13.11 L'Employeur affiche toute nomination dans les dix (10) jours suivant la période d'affichage ou l'utilisation du registre, et ce, pour une durée de quinze (15) jours. Il transmet copie de la nomination au Syndicat.

13.12 L'entrée en fonction sur le nouveau poste s'effectue dans un délai ne dépassant pas 30 jours de sa nomination; cependant, pour les périodes situées du 1 er juin au 15 septembre et du 15 décembre au 15 janvier, l'entrée en fonction peut excéder ce délai.

13.14 Le candidat auquel le poste est attribué en vertu du paragraphe 13.10 a droit à une période d'ini-tiation et d'essai d'une durée maximale de vingt (20) jours de travail.

          Si la personne salariée est maintenue dans son nouveau poste, au terme de sa période d'initiation et d'essai, elle est réputée, à ce moment-Ià, satisfaire aux exigences normales de la tâche.

13.15   L'Employeur achemine annuellement les cycles de dotation dans les différentes   installations de l'établissement; copie est acheminée au Syndicat. Toutefois, après entente avec le Syndicat, l'Employeur peut afficher tout poste vacant ou nouvellement créé en dehors de ces cycles de dotation établis.

B)     DISPOSITIONS NATIONALES

5.03     Aucune entente particulière relative à des conditions de travail différentes de celles prévues dans la présente convention collective, ou aucune entente particulière relative à des conditions de travail non prévues dans la présente convention collective, entre une personne salariée et l’employeur, n’est valable à moins qu’elle n’ait reçu l’approbation écrite du syndicat.

11.38   Les honoraires et les frais de l’arbitre de grief son assumés par la partie qui a soumis le grief si celui-ci est rejeté ou par la partie à qui le grief a été soumis si celui-ci est accueilli.

            (…)

11.39   Dans le cas où le grief est accueilli en partie, l’arbitre détermine la proportion des honoraires et des frais que doit assumer chacune des parties.

15.05 Procédure de replacement

            Le replacement se fait en tenant compte de l'ancienneté, laquelle s'applique dans la localité, dans un poste pour lequel la personne salariée rencontre les exigences normales de la tâche. Les exigences doivent être pertinentes et en relation avec la nature des fonctions. Le replacement se fait selon la procédure suivante:

        Établissement

                La personne salariée à temps complet bénéficiant du paragraphe 15.03 est considérée comme ayant posé sa candidature sur tout poste comparable et de même statut pour lequel elle répond aux exigences normales de la tâche, qui devient vacant ou qui est nouvellement créé dans l'établissement où elle est personne salariée. Dans le cas de la personne salariée à temps partiel, cette candidature s'applique pour tout poste comparable pour lequel elle répond aux exigences normales de la tâche dont le nombre d'heures est égal ou supérieur au nombre d'heures du poste qu'elle détenait.

            Si elle est la seule candidate ou si elle est la candidate ayant le plus d'ancienneté, le poste lui est accordé et un refus de sa part est considéré comme une démission volontaire.

            Si l'ancienneté d'un autre candidat à ce poste est supérieure à celle de la personne salariée bénéficiant du paragraphe 15.03, l'employeur accorde le poste con-formément aux dispositions relatives aux mutations volontaires, à la condition que ce candidat libère un poste comparable accessible à la personne salariée qui a le plus d'ancienneté bénéficiant du paragraphe 15.03.

            Dans le cas contraire, le poste est accordé à la personne salariée qui a le plus d'ancienneté sur l'équipe de remplacement et un refus de sa part est considéré comme une démission volontaire."

 

IV - LA POSITION DES PARTIES

[56]     À convenir d’une trentaine d’admissions, à présenter six (6) affidavits, à faire entendre six (6) témoins, à déposer une soixantaine de pièces et à plaider verbalement et par écrit, on m’a saisi d’une preuve impressionnante en terme de volume et on m’a fait valoir de nombreux arguments. Ce processus n’ayant nécessité que trois (3) jours d’audition, il va de soi que je souligne le remarquable travail des parties et de leurs procureurs tant pour le souci qu’ils ont démontré à me communiquer des informations de qualité pour m’assurer une compréhension complète des problématiques soumises que pour les énergies qu’ils ont mis à travailler de la façon la plus efficace possible. Cela dit, on comprendra qu’aux fins de faire connaître la position de chaque partie quant aux questions posées, je ne tente pas de synthétiser l’ensemble de leurs prétentions, mais que je m’en tienne plutôt à rappeler les arguments principaux qui illustrent leurs points de vue respectifs.

A)     LA POSITION SYNDICALE

[57]     De façon générale le Syndicat considère que l’Employeur, en adoptant unilatéralement la procédure de dotation accélérée qui est ici en discussion, n’a pas plus respecté la convention collective que les standards normalement appliqués en matière de négociation de conditions de travail. À cet égard, il soumet que, contrairement à ce que suggère l’Employeur, il n’y avait pas urgence en la demeure et qu’il y avait possibilité d’agir autrement dans les circonstances. Il ajoute par ailleurs qu’en mettant en œuvre de son seul chef une procédure qui n’était pas celle discutée avant que les négociations amorcées entre les parties achoppent, et qu’en négligeant par la suite de lui fournir à tout le moins par l’intermédiaire de ses représentants les modifications introduites au modèle retenu, l’Employeur a de toute évidence fait preuve d’une mauvaise foi qui devrait être dénoncée.

[58]     A            u strict plan pratique, le Syndicat estime que la question de la dotation des postes n’était pas plus problématique en 2012 qu’elle ne l’était dans les 4 ou 5 années précédentes, si bien qu’il y a lieu de questionner la justification de la décision que l’Employeur a prise en l’espèce. S’en référant aux multiples versions qu’il a fallu produire du Guide de mise en candidature en raison soit d’erreurs commises ou de changements de règles, d’une part, ainsi qu’à l’aveu que certaines d’entre celles n’ont pas été appliquées, d’autre part, le Syndicat soutient que l’improvisation qui en apparaît laisse clairement voir qu’on a procédé à l’aveuglette sans se soucier des droits des personnes salariées et des impacts qui étaient susceptibles de créer toutes ces méprises et empêche conséquemment l’Employeur d’invoquer à sa défense qu’elles sont compréhensibles puisqu’on était à l’époque dans une phase de transition.

[59]     Le reproche adressé par le Syndicat quant à la question de la préqualification tient du fait qu’elle est considérée comme étant un préalable pour qu’une candidature soit prise en compte, ce qui est susceptible d’être d’autant plus préjudiciable qu’aux périodes où les personnes salariées peuvent se préqualifier elles ne connaissent pas les postes qui risquent d’être disponibles. À tout événement, cette notion n’apparaît pas à la convention collective et s’inscrit en parfaite discordance avec l’idée qu’on y retrouve et qui veut que l’appréciation des compétences s’exerce au stade de la nomination.

[60]     Du point de vue du Syndicat, le fait d’exiger au niveau du formulaire de mise en candidature qu’on exprime une priorisation et le fait d’obliger une personne salariée à s’en tenir à une priorité dans la mesure où elle est la plus ancienne et où elle rencontre les exigences requises constitue autant de dérogations à la convention collective. Suivant cette dernière, il est du droit de toute personne salariée de faire valoir son ancienneté sur chaque poste affiché, d’où l’obligation de permettre l’exercice d’un choix éclairé parmi toutes les possibilités qui se présentent et l’interdiction de procéder comme le fait l’Employeur à une nomination automatique.

[61]     En remplaçant le registre des postes formellement établi par la clause 13.08 par l’inscription sur une liste d’envoi et l’obligation de remplir un formulaire exprimant encore là des priorités, on contrevient encore à la convention collective. Il en va de même du fait que la procédure de dotation accélérée appliquée par l’Employeur fait en sorte qu’en cas de désistement d’une personne salariée ou lorsqu’elle ne termine pas sa période d’initiation et d’essai à la suite de sa nomination à un poste affiché, l’Employeur ne nomme pas la personne salariée candidate qui est la suivante en ancienneté mais renvoie plutôt le poste en cause au prochain cycle de dotation. Aux termes même de la clause 13.10 des Dispositions négociées localement, un processus d’affichage doit invariablement se terminer à une nomination à un poste, de telle sorte qu’il est impossible à l’Employeur d’en arrêter le cours avant d’en arriver à un pareil résultat.

[62]     Pour le reste, le Syndicat est d’avis qu’à modifier ainsi à son gré des dispositions conventionnelles établies, l’Employeur a négligé de le reconnaître comme étant le représentant accrédité des personnes salariées, d’une part, et qu’à introduire dans le formulaire de mise en candidature des modalités qui constituent des engagements des personnes salariées, il a convenu ainsi d’ententes particulières interdites par les Dispositions nationales, d’autre part.

[63]     Et finalement, le Syndicat invoque qu’en faisant appel à certaines occasions à des titres d’emploi qui étaient alors inexistants, l’Employeur a contrevenu à la Nomenclature des titres d’emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux intégrée à la convention collective, et s’est ainsi trouvé à agir illégalement.

B)     LA POSITION PATRONALE

[64]     L’Employeur suggère qu’il s’agit ici de déterminer uniquement si la procédure de dotation accélérée qu’il a mise en place au printemps 2012 contrevient à une quelconque disposition conventionnelle sous l’un ou l’autre de ses aspects. Autrement dit, il n’est pas question d’examiner s’il était justifié d’instaurer cette nouvelle procédure ou de s’intéresser à des cas particuliers qui n’ont pas fait l’objet de griefs.

[65]     Sommairement, l’Employeur estime avoir agi dans les circonstances dans le respect des limites que signifiaient les dispositions conventionnelles à l’égard de ses droits de direction, sans pour autant abuser des possibilités qu’ils lui valaient par ailleurs et sans procéder de façon discriminatoire ou arbitraire. Étant confronté à une nouvelle réalité qui l’obligeait à gérer un nombre significativement accru de candidatures à chaque cycle de dotation, il devait nécessairement ajuster ses méthodes en ayant pour seul objectif de réduire les délais inacceptables de nomination et de stabiliser les équipes de travail le plus rapidement possible.

[66]     Au sujet de la préqualification, l’Employeur indique qu’il s’agit-là d’une stricte question de moyen qui ne viole aucun interdit stipulé par la convention collective. Ayant le pouvoir de demander des compétences particulières, il estime avoir la possibilité d’en vérifier l’existence à tout moment, y incluant avant qu’il y ait dépôt formel de candidatures, de manière à éviter toute perte de temps.

[67]     Du point de vue de l’Employeur, il n’y a pas plus de contravention à la convention collective à demander aux personnes salariées intéressées de poser leur candidature à plus d’un (1) poste que de requérir qu’elles fassent connaître leurs priorités, ce qui correspond finalement à ce qui se faisait auparavant sous la forme d’un choix à faire pour fin de nomination. Autrement dit, la différence avec la procédure antérieure est simplement à l’effet que le choix s’exerce d’avance, étant par ailleurs précisé que cette priorisation peut être modifiée jusqu’aux derniers moments de la période d’affichage. Cela dit, il va conséquemment de soi que dans la mesure où une priorité est respectée, il peut et il doit inévitablement y avoir nomination automatique.

[68]     Quant à savoir si on peut considérer qu’une personne salariée qui obtient un poste alors qu’elle est en période d’essai sur un poste préalablement obtenu ou alors qu’elle est en attente de débuter une période d’essai est réputée se désister dudit poste préalablement obtenu, l’Employeur signale encore-là que rien dans la convention collective l’empêche de procéder ainsi. À cela il ajoute que, selon la preuve, il reste possible à la personne salariée en question de demander à son gestionnaire de mettre fin à sa période d’essai et de considérer qu’il conserve le poste en cause. Au cas de désistement il va de soi que le poste visé soit renvoyé au prochain cycle de dotation puisqu’il est devenu vacant et qu’il doit en conséquence nécessairement être réaffiché, ce qui le rend inaccessible aux autres personnes salariées qui l’aurait priorisé dans leur formulaire de mise en candidature.

[69]     À propos du registre des postes qu’on a remplacé par une liste d’envoi associée à une obligation de remplir un formulaire de mise en candidature avec priorisation, l’Employeur fait valoir qu’il reste toujours nécessaire pour la personne salariée qui prévoit s’absenter pendant une période de quatorze (14) jours ou plus de s’inscrire à un registre qui lui permet en définitive de poser sa candidature sur les postes affichés.

[70]     Pour ce qui est du reste, l’Employeur plaide que le Syndicat était parfaitement au fait de ses intentions relativement aux modifications qu’il fallait apporter à la procédure de dotation en raison de la multiplication des sites découlant de la fusion qui lui a donné naissance. Il considère avoir fait le nécessaire pour instrumenter ses représentants jusqu’à ce qu’il soit informé de la décision du Syndicat de surseoir aux négociations entreprises.

[71]     Partant, la situation était à ce point caractérisée qu’il lui fallait nécessairement réagir et mettre en place une nouvelle procédure de dotation de manière à raccourcir les délais de nomination et à stabiliser les équipes le plus rapidement possible. Ce faisant, il a fourni à toutes les personnes salariées visées, y incluant les représentants syndicaux, les informations utiles à assurer une bonne compréhension de la nouvelle façon de procéder, si bien qu’il n’y a pas lieu de croire qu’il a pu faire preuve de mauvaise foi à quelqu’égard que ce soit et qu’il a voulu à quelque moment que ce soit entraver le travail du Syndicat.

[72]     Tout en reconnaissant que l’élaboration du Guide de mise en candidature a donné lieu à certaines erreurs, l’Employeur rappelle qu’il les a rapidement corrigées, d’une part, et qu’elles n’ont été la cause d’aucun préjudice particulier, d’autre part. À cela il ajoute qu’à tout événement les problématiques soumises ne cherchent pas à faire déterminer s’il a, en tout temps pertinent, informé de façon exacte et sans erreur les personnes salariées, mais visent plutôt à faire décider si les nouvelles règles de la dotation accélérée sont contraires ou non à la convention collective et si elles sont d’une quelconque façon abusives, discriminatoires ou déraisonnables.

 

 

V - ANALYSE ET DÉCISION

[73]     En effectuant la dotation des postes à partir de juillet 2007 au niveau de la vingtaine de sites desservis par l’Employeur plutôt qu’à l’intérieur de chacun d’eux, on s’est trouvé à ajouter une pression sur le secteur des mouvements de main d’œuvre internes qui a notamment provoqué un accroissement des délais de nomination et des retards conséquents à stabiliser les équipes de travail. Malgré certaines modifications mises en place par l’Employeur comme l’affichage systématique des postes vacants, l’ajout d’informations supplémen-taires sur les avis d’affichage, l’incitation adressée aux personnes salariées de mettre leurs dossiers à jour et de se prêter, le cas échéant, à des exercices de préqualification selon un calendrier préétabli, l’introduction d’un formulaire élaboré pour poser sa candidature sur plusieurs postes à la fois, la situation ne s’est pas améliorée. Et comme des pourparlers menés avec le Syndicat ont achoppé, l’Employeur a annoncé le 9 janvier 2012 sa décision de rendre obligatoire la formule de préqualification et a informé les personnes salariées visées de la mise en application d’une nouvelle procédure de dotation accélérée.

[74]     Des huit (8) questions qui m’ont été adressées, six (6) concernent directement cette procédure de dotation accélérée et/ou ses possibles effets, les deux (2) autres étant relatives à la reconnaissance du Syndicat comme agent négociateur, pour l’une, et la dernière portant sur le fait qu’un Guide mise en candidature et des avis d’affichage référaient à des titres d’emploi non conformes à la Nomenclature des titres d’emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux . Ces questions sont toutes supportées par les six (6) griefs déposés, sauf la dernière qui met en cause le fait que la nomenclature en question prévoit dans sa version du 30 avril 2012 qu’elle "fait partie intégrante de toute convention collective" et que "toute dérogation par un établissement (…) est nulle de plein droit et sans effet" (Pièce S-19).

[75]     Cette dernière précision m’amène à signaler qu’exception faite de cette huitième et dernière question, mon intervention n’a rien de déclaratoire. J’ai ici à décider de la conformité avec la convention collective de certaines composantes de la procédure de dotation accélérée y incluant le volet de la préqualification obligatoire. Et les griefs tels que formulés m’autorisent à y répondre et à en tirer les effets conséquents en termes de sanction.

[76]     Cela dit, il m’apparaît néanmoins important de souligner qu’il ne s’agit pas de traiter de cas particuliers. Les griefs déposés visent strictement la procédure de dotation accélérée comme telle et l’application qu’on en a faite, et l’analyse qu’il faut faire doit demeurer au niveau des principes.

[77]     À cet égard j’ajouterai qu’il est fondamental de garder à l’esprit qu’on discute ici d’une procédure, d’une façon de faire qui n’est pas source de droit, mais qui sert à déterminer l’application des droits et obligations qui constituent le régime conventionnel de mutations volontaires (article 13 des Dispositions localement négociées pour le personnel de catégorie 2 et 3). Partant, sa conformité juridique doit prioritairement s’apprécier au regard du contenu de ces dernières modalités, ce qui affecte à priori la prétention syndicale voulant que la procédure de dotation accélérée contreviendrait à la clause 15.05 de la convention collective nationale qui consacre l’obligation de considérer la personne salariée mise à pied qui bénéficie de la sécurité d’emploi comme ayant posé sa candidature à tout poste vacant ou nouvellement créé dans son établissement.

[78]     Si les droits et obligations sur lesquels porte la procédure de dotation accélérée se retrouvent dans les Dispositions localement négociées au titre des "Mutations volontaires", sa concordance avec toute autre stipulation conventionnelle doit nécessairement passer d’abord par ce régime de mutations volontaires. Or, il y est prévu dès le premier alinéa de la clause 13.01 que l’obligation d’afficher tout poste vacant ou nouvellement créé est établie "sous réserve des dispositions prévues à l’article 15.05 des dispositions nationales de la convention collective". Puisqu’il faut ainsi prendre en compte automatiquement la candidature de toute personne salariée mise à pied qui est bénéficiaire de la sécurité d’emploi en cas d’affichage de poste vacant ou nouvellement créé, il va de soi que la procédure de dotation qui met cette obligation en œuvre tienne cette donnée pour acquise et ne puisse d’aucune façon être comprise comme niant ce droit, d’où finalement l’impossibilité d’adhérer à cet argument syndical.

[79]     À mon sens, on doit réserver le même sort à cette autre prétention du Syndicat à l’effet que l’Employeur n’était pas justifié d’instaurer cette nouvelle procédure de dotation accélérée, encore qu’il serait même à se demander, selon lui, si, dans sa démarche, il n’aurait pas fait preuve de mauvaise foi.

[80]     Établissons d’abord à ce sujet que, dans la mesure où il le faisait en conformité avec le régime applicable en matière de mutations volontaires (article 13 des Dispositions localement négociées), l’Employeur n’était pas obligé de convenir avec le Syndicat de cette procédure de dotation accélérée. A-t-il d’une quelconque façon abusé de cette discrétion ? Je ne le crois pas.

[81]     Il est manifeste qu’assurer la dotation de postes au niveau d’une vingtaine de sites au lieu de le faire dans chaque site en mode fermé exige des ajustements dans les façons d’y procéder. S’il peut être un peu plus difficile de le voir par le nombre de postes affichés - en l’occurrence, il ressort des activités des cinq (5) dernières années, en prenant en compte l’explication mise en preuve pour justifier les 698 affichages de 2010, une tendance à combler ou à créer entre 400 et 500 postes par année - la nouvelle réalité devient incontournable quand on s’arrête aux importants délais de nomination qu’elle génère et à l’impressionnant nombre de candidatures que produisent ces affichages faits dans tous les sites opérés par l’Employeur. Et si l’on rajoute à cette réflexion l’effet de la procédure de dotation accélérée au regard des délais de nomination constatés lors des cycles du 13 au 27 mars 2012 et du 10 au 24 avril 2012, il n’y a plus aucune raison de douter de la nécessité et du bien-fondé d’adapter la façon de procéder à son nouvel environnement, ce à quoi en est incidemment arrivée ma collègue Francine Beaulieu en parlant ainsi de cette préoccupation :

"Il n’est pas difficile de comprendre qu’en regroupant ainsi trois établissements et en fusionnant plusieurs syndicats, aussi et surtout, il était important que les parties s’ajustent à cette nouvelles réalités. Les conséquences de ce changement ont fait en sorte que les parties devaient revoir le processus de dotation." [2]

[82]     En ce qui a trait au cheminement qu’a suivi l’Employeur pour finalement prendre l’initiative d’implanter cette nouvelle procédure de dotation accélérée, il y a lieu de rappeler que la question a d’abord fait l’objet de discussions entre les parties et que c’est finalement au constat du fait que le Syndicat ne souhaitait pas poursuivre les pourparlers que son vis-à-vis a décidé d’agir unilatéralement. Ce faisant, il a annoncé ses intentions aux personnes salariées visées, il a fourni de la documentation écrite et par voie électronique, et il a tenu des rencontres d’information.

[83]     Jusque-là, je ne pense pas qu’on puisse déceler dans les comportements de l’Employeur une quelconque volonté d’agir malicieusement qui attesterait de sa mauvaise foi.

[84]     Il y a bien eu par ailleurs ces erreurs commises dans le contenu du Guide de mise en candidature qui ont obligé d’en faire quelques versions successives. Il y a aussi eu ces décisions de ne pas en appliquer quelques mentions. Il y a eu en fin de compte le fait que les représentants syndicaux ont été traités en termes d’informations transmises non pas à ce titre, mais plutôt comme toutes les personnes salariées, étant précisé que l’Employeur a spécifiquement signifié au Syndicat qu’il pouvait prendre connaissance des communiqués et des guides sur Intranet.

[85]     Quant aux deux premiers de ces points, il est manifeste qu’il s’agissait là de méprises qui ne traduisaient aucune intention de tromper. Pour ce qui a trait au dernier, il y a lieu d’éclaircir certaines choses.

[86]     Fondamentalement, le Syndicat a argumenté en se basant sur le témoignage de son vice-président, monsieur Gauvin, qu’il n’avait pas été traité correctement par l’Employeur du fait qu’il a mis en œuvre une procédure de dotation différente de celle dont les parties avaient précédemment discuté sans l’aviser des modifications introduites. Contrairement à ce que semble avoir compris l’Employeur, cette prétention ne suggère pas que le Syndicat n’a pas eu d’informations ni discuté de façons d’accélérer le processus de dotation. Elle réfère strictement au fait qu’il n’a pas en tant que tel formellement informé ses interlocuteurs syndicaux habituels du contenu complet de la procédure de dotation accélérée avant qu’elle ne soit définitive.

[87]     Dans ce sens, il est clair que monsieur Gauvin a dit la vérité. Par contre, même si cette question ne m’a pas été spécifiquement adressée, je me permets de dire qu’il me semble étrange que l’Employeur ait changé sa façon de transmettre de la documentation au Syndicat précisément à l’époque de l’implantation de la procédure de dotation accélérée, ce qui ne m’autorise pas pour autant d’y voir l’expression d’une intention malveillance donnant à penser à la présence de mauvaise foi.

[88]     Voyons maintenant ce qu’il en est des droits et obligations qui constituent le régime conventionnel de mutations volontaires puisqu’ils sont au cœur du présent débat.

[89]     Dans l’ordre, on prévoit à l’article 13 des Dispositions localement négociées :

89.1       que l’Employeur doit afficher tout poste vacant ou nouvellement créé (clause 13.01, alinéa premier) ;

89.2       qu’à cet égard, il doit considérer que la personne salariée mise à pied et bénéficiant de la sécurité d’emploi a posé sa candidature sur tout poste comparable et de même statut pour lequel elle répond aux exigences (clause 13.01, alinéa premier et clause 15.05 des Dispositions nationales) ;

89.3       qu’une personne salariée a le droit de connaître les candidatures avant de solliciter un poste (clause 13.06) ;

89.4       que le Syndicat a le droit d’avoir copie des candidatures (clause 13.07);

89.5       que la personne salariée qui prévoit s’absenter quatorze (14) jours ou plus a le droit de s’inscrire à un registre des postes, ce qui lui vaut automatiquement une candidature au poste affiché (clause 13.09) ;

89.6       que l’Employeur doit accorder et combler le poste par la personne candidate la plus ancienne qui satisfait aux exigences normales de la tâche (clause 13.10) ;

89.7       que l’Employeur doit afficher toute nomination dans les dix (10) jours suivant la période d’affichage ou l’utilisation du registre des postes (clause 13.11) ;

89.8       que l’Employeur doit assurer l’entrée en fonction dans le nouveau poste dans les trente (30) jours suivant la nomination (clause 13.12) ;

89.9       que la personne salariée nommée à un poste a droit à une période d’initiation et d’essai d’au plus vingt (20) jours de travail et qu’au terme de cette période elle est réputée satisfaire aux exigences normales de la tâche (clause 13.14) et

89.10    que l’Employeur doit faire connaître chaque année les cycles de dotation dans les établissements et au Syndicat (clause 13.15).

[90]     Cet exercice nous aura permis de constater que ce régime a été élaboré en fonction de l’affichage d’un seul poste, ce qui n’empêche pas pour autant l’Employeur de procéder à plus d’un affichage à la fois et une même personne salariée de poser sa candidature sur plus d’un poste à la fois. Avant la mise en place de la nouvelle procédure de dotation accélérée, les candidatures d’une telle personne salariée étaient évaluées au regard de chaque poste et, dans l’éventualité où elle était la plus ancienne candidate qui remplissait les exigences de plus d’un poste, on lui donnait le choix du poste privilégié. Parce que la nomination était soumise à l’attente de ce choix et même à la possibilité que la période d’initiation et d’essai soit interrompue, il en résultait inévitablement une lourdeur administrative trop souvent nuisible et d’importants délais dans le comblement des postes qui justifiait qu’on revisite le processus de dotation.

[91]     Avec la procédure de dotation accélérée la nomination à un des postes auxquels une même personne salariée pose sa candidature n’est plus le fait du choix de cette dernière mais se réalise plutôt automatiquement à partir des priorités indiquées sur son formulaire unique de candidature au regard des postes affichés qui l’intéressent. D’où la nécessité de s’assurer que tous les éléments constitutifs du dossier en termes de qualifications et d’exigences est complet au moment du dépôt de la candidature, ce qui était tout aussi essentiel dans la formule antérieure, mais ce qui n’était pas susceptible d’entraîner le rejet d’une candidature dès ce stade.

[92]     Pour permettre une nomination automatique dans les quelques jours suivant la fin de la période d’affichage, il fallait exiger que ce qui la supportait au plan des qualifications et des exigences y apparaisse, sans quoi la candidature devenait déficiente et ne pouvait de ce fait être reconnue et traitée.

[93]     À bien y penser, c’est la faculté d’exercer un choix entre tous les postes convoités par une même personne plus ancienne qu’on a modifiée. Dans ces circonstances, il fallait quand même s’assurer que tous les prérequis étaient présents au stade du dépôt de la candidature, d’une part, et on devait au surplus pallier à l’impossibilité d’exercer un choix en cas de candidatures multiples en raison du mode automatique de nomination, d’autre part. D’où l’idée d’instaurer une phase de préqualification et de demander à la personne salariée qui souhaite appliquer sur plus d’un (1) des postes qu’elle connaît tous à ce moment faut-il le préciser, de prioriser ses attentes sur un formulaire unique.

[94]     Passer d’une formule où on examinait une par une les candidatures d’une même personne salariée pour déterminer si elle se conformait aux exigences requises pour chaque poste convoité, d’une part, et dans le cadre de laquelle on laissait cette dernière choisir son poste parmi ceux où elle était la candidate la plus ancienne, d’autre part, à un modèle où la nomination automatique est supportée par une obligation de se préqualifier et est réalisée dans le respect des priorités énumérées au formulaire de mise en candidature, ne donne lieu à mon sens à aucune illégalité particulière.

[95]     Cette nouvelle façon de faire n’enlève rien aux droits stipulés à l’article 13 des Dispositions localement négociées au bénéfice de la personne salariée qui souhaite poser sa candidature sur un ou plusieurs postes affichés lors d’un cycle de dotation. Au texte, aucune de ces dispositions ne consacrait le processus de nomination par suite d’une évaluation à la pièce de chaque candidature et par l’effet du choix fait par la personne candidate, et aucune d’entre elles n’interdisait la formule de nomination automatique suivant une préqualification et découlant de priorités préalablement établies par cette dernière. Il s’agit de modes différents, mais de modes qui s’inscrivaient tout aussi bien l’un que l’autre dans le régime conventionné de droits qui s’y appliquait.

[96]     Antérieurement, il allait de soi que la nomination dépende du choix de la personne candidate puisque, rendue à cette étape, elle était réputée avoir les qualités pour prétendre à tous les postes pour lesquels elle était la plus ancienne à avoir postulé. Avec la nouvelle procédure, ce choix se fait également après que sa candidature à effets multiples a été reconnue, donc une fois qu’elle est réputée avoir les qualités pour prétendre à tous les postes pour lesquels elle est la personne candidate la plus ancienne, mais il s’opère sur la base des priorités qu’elle aura préalablement exprimées de manière à permettre une nomination automatique.

[97]     Dans l’un et l’autre cas, la personne candidate connaissait et connaît encore l’ensemble des postes affichés. Au fond, ce qui les différencie tient du fait qu’auparavant elle savait les postes pour lesquels elle était la plus ancienne salariée avant de faire son choix, alors qu’aujourd’hui elle ne le sait pas quand elle exprime ses priorités sur son formulaire de candidature. Mais faut-il rajouter que cet avantage dont on profitait antérieurement n’était pas spécifiquement protégé par une des clauses de l’article 13 des Dispositions localement négociées, mais résultait plutôt de la façon de faire du temps qui était à la fois logique et respectueuse du droit d’être nommé à un poste lorsqu’on est la personne candidate la plus ancienne qui possède les exigences normales d’une tâche.

[98]     Voilà qui m’amène à conclure que le fait de s’en remettre à une notion de nomination automatique qui exigeait forcément le remplacement de la possibilité de choisir un poste par l’expression de priorités au stade de la soumission d’une  candidature et que le fait d’ajuster le formulaire de candidature en conséquence n’ont contrevenu à aucune des dispositions applicables en matière de mutations volontaires. Au soutien de cette prise de position, je m’en tiendrai à rapporter les propos qu’a tenus l’arbitre Francine Beaulieu à ce sujet :

"En tout premier lieu, je ne vois pas comment cette procédure contrevient à la convention collective. Je n’ai aucun texte conventionnel qui dit que c’est interdit. Est-ce abusif, déraisonnable ou discriminatoire ? Certainement pas, bien au contraire.

(…)

Que peut-on reprocher à cette procédure ?

Je le répète. Autres réalités, autres façons de travailler. Peut-on exiger d’un employeur qu’il fasse, comme il le faisait autrefois par établissement, des appels téléphoniques à la personne salariée qui a posé sa candidature et qui est la plus ancienne, pour savoir si elle accepte le poste et, si cette dernière refuse, devoir appeler une autre personne jusqu’à ce qu’il y ait attribution du poste ?

Je crois, encore une fois, qu’à partir du moment où il n’y a rien dans la convention collective qui empêche l’Employeur d’agir d’une façon particulière, et qu’il n’agit pas de façon abusive, discriminatoire ou déraisonnable, il exerce son droit de direction correctement." [3]

[99]     À mon avis, cette conclusion à laquelle j’en arrive aux fins de la question de la priorisation et du formulaire qui la véhicule s’applique également à l’ajout d’une étape de préqualification à la procédure de dotation accélérée. Et le motif qui la supporte fondamentalement réfère également au fait que cette idée n’affecte aucun des droits auxquels peuvent prétendre des personnes candidates en contexte d’affichage de postes et ne contrevient d’aucune façon aux dispositions conventionnelles pertinentes.

[100]      J’ai compris de l’argumentation du Syndicat qu’il en n’avait pas tant contre la notion de "préqualification" comme telle que contre le fait qu’à ne pas s’y soumettre une candidature devient à toutes fins utiles irrecevable.

[101]      Disons d’abord à ce sujet que cette idée de "préqualification" est en lien étroit avec celle de la nomination automatique, ce qui la rend totalement irréconciliable avec la procédure antérieurement appliquée. S’agissant par ailleurs d’une façon de s’assurer qu’une personne candidate dispose des qualités (tests) et/ou possède les connaissances (diplômes) pour prétendre à un poste, on conviendra que, sauf le moment où cette activité devait et doit maintenant se réaliser, elle emportait et emporte toujours le même effet : la non-retenue ou, autrement dit, le rejet de la candidature.

[102]      On dira finalement, à juste titre d’ailleurs, que, contrairement à ce qu’il en était avant la mise en œuvre de la procédure de dotation accélérée, les personnes salariés doivent plus souvent qu’autrement se préqualifier sans connaître les postes qui pourront éventuellement les intéresser. À cet égard, il importe toutefois d’ajouter que la préqualification est, si je peux me permettre l’expression, attributive strictement du titre d’emploi et n’est a priori lié à aucun poste. Cela dit, il peut certainement arriver qu’une personne salariée se préqualifie inutilement parce que ne sera affiché le poste qu’elle souhaite ou parce qu’elle aura changé d’idée quant à son désir d’obtenir le titre d’emploi en cause. Convenons toutefois qu’il n’y a pas là matière à évacuer cette idée de "préqualification", encore qu’on devrait normalement s’intéresser prioritairement à la nature du travail (le titre d’emploi) avant de se soucier du lieu où il s’accomplit (le poste).

[103]      Enfin, il n’est certainement pas inintéressant de rapporter ici ce qu’en a pensé l’arbitre Francine Beaulieu et ce à quoi j’adhère d’emblée :

"(…) Mettre en place des séances de préqualification et exiger que la personne salariée soit préqualifiée pour qu’on considère sa candidature ne m’apparaissent nullement une procédure abusive, discriminatoire ou déraisonnable. Avec, maintenant, un plus grand nombre de personnes salariées qui peuvent poser leur candidature, cette façon de faire permet à l’Employeur de prévoir dans le temps le moment des préqualifications tout comme elle permet aux personnes de savoir si elles se qualifient pour un poste. Ces séances seraient inutiles si l’Employeur n’exigeait pas que les personnes salariées soient préqualifiées pour considérer leur candidature.

En conclusion, le Tribunal estime que l’Employeur ne contrevient pas à la convention collective en exigeant que la personne salariée soit préqualifiée pour que sa candidature soit considérée au moment de la nomination." [4]

[104]      Qu’en est-il maintenant des changements apportés au niveau du registre des postes ?

[105]      Souvenons-nous à ce propos que la clause 13.08 des Dispositions localement négociées consacre le droit pour une personne qui prévoit être absente du travail pour quatorze (14) jours et plus de s’inscrire sur un registre des postes et confirme par ailleurs que cette inscription vaut candidature pour la durée de l’absence. Bien que courte, cette dernière mention ne peut être comprise autrement que comme signifiant une intention d’autoriser aussi une inscription à plus d’un (1) poste, ce qui était de nature à emporter autant de candidatures à évaluer forcément.

[106]      Par la procédure de dotation accélérée, on a unilatéralement remplacé le registre des postes par l’inscription à une liste d’envoi qui provoque la transmission des affichages de postes et qui permet la mise en candidature par le dépôt du formulaire à cet effet qui requiert quant à lui une priorisation des postes au cas de candidatures multiples.

[107]      À mon point de vue, cette dernière formule n’est pas respectueuse des droits consentis par la clause 13.08. Selon cette disposition, l’inscription au registre des postes signifie le dépôt d’une candidature, alors que dans l’autre cas l’inscription à la liste d’envoi emporte uniquement l’obligation de remplir un formulaire de candidature et celle de prioriser ses préférences, si besoin est. Au seul constat du fait qu’on parle d’un côté d’un droit versus des obligations de l’autre, on a toute raison de penser que la nouvelle formule contrevenait à la clause 13.08 des Dispositions localement négociées et exigeait le concours du Syndicat pour la modifier par entente, le cas échéant.

[108]      Quant à savoir s’il y a violation de la convention collective dans le fait qu’on reporte au prochain cycle de dotation l’affichage d’un poste dont une personne salariée se désiste ou dont elle ne termine pas la période d’initiation et d’essai à la suite de sa nomination à un autre poste affiché, au lieu d’octroyer le poste délaissé à la personne candidate qui était, à l’époque de son affichage, la suivante en ancienneté, j’estime qu’il faut donner une réponse positive à cette question telle que posée.

[109]      Partant de l’idée que tout poste vacant doit être affiché selon la clause 13.01, on a établi à la clause 13.10 qu’un poste affiché doit être accordé et comblé par la personne candidate la plus ancienne qui satisfait aux exigences requises. Est-ce à dire qu’une fois enclenché ce processus ne peut être interrompu à quelque stade que ce soit ? Autrement dit, un affichage de poste doit-il invariablement se fermer par le comblement final du poste visé ?

[110]      De façon générale, la jurisprudence arbitrale confirme qu’à moins de stipulation au contraire il est toujours possible pour un employeur d’arrêter une démarche de dotation avant la fin de la période d’affichage, sous réserve évidemment qu’il le fasse sans faire preuve d’abus, de discrimination ou d’arbitraire. Lorsque, comme c’est le cas dans la situation proposée, il y a eu nomination et désistement par la suite, les arbitres ont réagi de deux façons différentes.

[111]      Il y a d’abord eu ceux qui considèrent, ainsi que l’illustrent les extraits qui suivent, qu’un poste attribué au terme d’un affichage se trouve comblé par son titulaire dès sa nomination, et ce, jusqu’à ce qu’il s’en désiste au cours de sa période d’initiation et d’essai. Du fait de ce désistement, ils estiment que le poste en question redevient vacant et doit dès lors faire l’objet d’un nouvel affichage.

"Il est par ailleurs en preuve qu’à la suite de sa nomination, monsieur Tremblay, s’autorisant des dispositions de la clause 15.12, a décidé de se désister du poste qu’il venait d’obtenir. Son départ rendait donc ledit poste vacant.

L’employeur est-il alors tenu, tel que le soumet le syndicat, de nommer à ce poste un autre salarié à partir de la liste des salariés qui avaient présenté leur candidature lors de l’affichage du 8 janvier 1990 ?

De l’avis de la soussignée, aucune disposition de la convention collective n’obligeait l’employeur à ce faire, bien au contraire.

En effet, les dispositions de la clause 15.01 ne laissent guère d’autre choix à l’employeur que celui d’afficher à nouveau un poste laissé vacant par son titulaire : il est clairement stipulé à ladite clause que "tout poste vacant doit être affiché". La seule exception à cette règle apparaît à la clause 15.11 qui édicte que "les vacances qui procèdent des promotions, transferts ou rétrogradations occasionnées par les deux (2) premiers affichages sont affichées à la discrétion de l’employeur".

Comme il ne s’agit pas d’une telle situation en l’espèce, la soussignée estime donc que l’employeur n’avait pas la discrétion, aux termes de la présente convention collective, d’offrir le poste en question aux salariés qui s’étaient portés candidats lors de l’affichage du 8 janvier 1990. L’employeur devait plutôt affiché à nouveau ce poste si ledit poste devait être comblé." [5]    

 

"Car un poste cesse d’être vacant, en vertu de la convention, dès qu’il a un titulaire. Un poste n’est pas vacant lorsque son titulaire complète sa période d’initiation et d’essai. Un poste doit en conséquence être affiché à nouveau lorsque son titulaire le quitte à la fin de sa période d’initiation et d’essai.

(…)

Le Syndicat ne pouvait donc pas obliger l’Employeur à désigner les nouveaux titulaires des quatre postes en litige parmi les salariés qui s’étaient porté candidats dans le cadre de l’affichage S-3 du 9 novembre 1992. Et aucune des décisions citées par le Syndicat ne contredit cette interprétation que l’on doit donner aux dispositions pertinentes de la convention. [6]

 

"Si je relis attentivement la clause 39.06 L, les parties ont voulu que le poste soit accordé et comblé par la personne salariée qui a le plus d’ancienneté parmi celles qui ont posé leur candidature. Quant à la clause 39.09 L, elle prévoit que tout poste vacant doit être affiché. (…)

(…) À partir du moment où les parties conviennent qu’un poste est accordé à la personne salariée la plus ancienne qui a posé sa candidature, sous réserve du respect des exigences de la tâche, et que celle-ci refuse ou ne termine pas sa période d’initiation, le poste redevient vacant. Le processus doit recommencer et l’Employeur devra réafficher le poste." [7]

[112]      Il y en a d’autres qui se rallient à des propos du genre de ceux qui suivent :

"Si l’Employeur peut annuler avant son terme l’affichage d’un poste vacant, le Tribunal estime cependant qu’il ne peut le faire une fois close la période d’affichage de quinze jours, à moins qu’il n’ait reçu aucune candidature. En effet, l’affichage au sens de la convention collective est l’acte par lequel l’Employeur porte à la connaissance des personnes salariées qu’un poste dûment identifié est vacant, et invite celles et ceux qui sont intéressés à l’occuper à faire application en-deçà du terme de quinze jours dont les parties ont convenu. Une fois ce terme passé, le poste n’est plus affiché. Les exigences de la clause 13.01 ont été remplies et l’on passe à la deuxième étape du processus de sélection, qui est prévue à la clause 13.05. Il y a alors obligation qui lie les parties que sont, d’une part, l’Employeur qui doit accorder le poste à "la personne salariée qui a le plus d’ancienneté parmi celles qui ont posé leur candidature" et, d’autre part, à la personne à qui le poste est accordé, qui doit "satisfaire aux exigences normales de la tâche".

S’enchaîne alors l’étape qui est prévue à la clause 13.06, c’est-à-dire la nomination dans un délai n’excédant pas trente jours, à défaut de quoi la personne est "réputée occuper ce nouveau poste"." [8]

[113]      J’ai pour ma part déjà décidé qu’une disposition semblable à la présente clause 13.10 empêchait l’employeur de mettre un terme à un processus de dotation même après la fin de la période d’affichage. L’assise de cette décision apparaît de ce qui suit :

"Par ailleurs, on a la clause 13.07 qui spécifie, aux fins du choix à faire entre les candidats, que le poste "doit être accordé et est comblé" par la personne salariée ayant la plus grande ancienneté dans la mesure où elle rencontre les exigences normales de la tâche.  Enfin, il s'y trouve la clause 13.09 qui exige qu'il y ait nomination dans les dix (10) jours de la fin de la période d'affichage.

En tant que tel, ce lien qu'on crée entre la phase de nomination et celle de l'affichage en faisant commencer le délai de l'une avec la fin de celui de l'autre donne à penser qu'on y voyait un tout indivisible qui devait se terminer par une nomination une fois la période d'affichage complétée.  Mais il y a encore plus révélateur à ce propos en ce qu'on précise clairement à la clause 13.07 qu'au terme de l'affichage "le poste doit être accordé".

Compte tenu de l'objet de cette disposition, on pourrait peut-être se demander si l'intention des rédacteurs n'était pas de signifier uniquement qu'un poste vacant ou nouvellement créé et dûment affiché devait être octroyé à la personne salariée la plus ancienne qui remplissait les exigences requises.  Si tel avait été le cas, il aurait certainement été suffisant de dire : "le poste est comblé par …" ou encore, et ce malgré la redondance, "le poste est accordé et comblé par …".  Avec l'ajout de l'expression "doit être accordé", on a certainement voulu dire plus que ce que traduit déjà le reste de la phrase, à savoir l'obligation de le combler par la personne salariée la plus ancienne ayant les exigences.  Cette façon de concevoir les choses s’impose d’ailleurs d’autant plus qu'on s'en est significativement remis à des temps de verbe différents.

À la réflexion, cette formule rédactionnelle ne laisse pas de doute dans mon esprit quant au fait que la clause 13.07 s’intéresse à deux réalités complémentaires mais différentes.  Dans un premier temps, on a voulu signifier que l'Employeur avait l'obligation d'octroyer un poste dont la phase d'affichage était terminée.  Dans l'autre, on entendait préciser que, parmi les candidats, l'Employeur était obligé par la personne salariée qui disposait de l'ancienneté la plus importante tout en satisfaisant aux exigences normales de la tâche.  À mon point de vue, il y a donc indubitablement là matière à comprendre qu'on avait l'intention d'interdire à l'Employeur d'interrompre un processus de dotation, à tout le moins une fois l'affichage venu à terme et ce, jusqu'à ce qu'il y ait nomination.

Est-ce à dire que la faculté d'abolir le poste en cause s'en trouverait affectée dans la même mesure ?  Ne serait-ce que du fait qu'on ne peut logiquement faire disparaître d'une main ce qu'il faut octroyer de l'autre, on doit en toute cohérence déduire de cette obligation d'accorder un poste dont l'affichage est terminé qu'elle rend inopérant le pouvoir qu'a l'Employeur de l'abolir, au moins jusqu'à ce qu'il y ait nomination.  Si on concluait au contraire, on modifierait impunément le texte et le sens de la clause 13.07 au point de lui enlever toute utilité et on donnerait sans assise une priorité à un pouvoir qu'on a généralement énoncé aux dépens d'un droit qu'on a voulu concéder mais suivant des paramètres précis qui venaient manifestement en limiter la portée." [9]

 

[114]      Je suis toujours d’opinion qu’une disposition qui est rédigée comme l’est la clause 13.10 des Dispositions localement négociées empêche formellement de penser qu’une procédure d’affichage d’un poste vacant amorcée par l’effet de la clause 13.01 peut ne pas se terminer par le comblement du poste en cause à même le bassin de candidatures, à moins qu’il y en n’ait aucune qui satisfasse aux exigences. Ne s’agit-il pas fondamentalement de la finalité de tout processus d’affichage interne que de trouver le plus rapidement possible une personne salariée qui répond aux critères? À bien y penser, l’intention de la clause 13.10 n’est pas d’accorder et de combler un poste vacant nécessairement par la personne candidate la plus ancienne parmi toutes celles qui remplissent les exigences requises; il s’agit plutôt de faire en sorte que le poste soit, au terme du processus, comblé par la personne la plus ancienne du bassin de candidats qui pourraient y prétendre via les exigences.

[115]      Doit-il nécessairement s’agir d’un comblement ou d’une nomination finale? Je le crois, et ce, en raison de ce qui suit.

[116]      On sait que la nomination de la personne candidate la plus ancienne à un poste affiché lui vaut, de par l’application de la clause 13.14, le droit de bénéficier d’une période d’initiation et d’essai d’une durée maximale de vingt (20) jours ouvrables. Ainsi que l’expriment les termes utilisés (initiation et essai), cette période a pour objet d’accorder à la personne salariée nommée un temps de familiarisation susceptible de l’aider à évaluer si le travail correspond à ses attentes et de permettre à l’Employeur d’apprécier l’ensemble de ses aptitudes et de ses lacunes, y incluant les exigences requises lors de l’affichage.

[117]      En rajoutant au niveau de la clause 13.14 que le maintien de la personne salariée nommée jusqu’à la fin de la période d’initiation et d’essai fait en sorte qu’elle est dès lors "réputée satisfaire aux exigences normales de la tâche", on a donné une indication claire que la nomination à un poste n’avait rien de définitif avant l’épuisement de cette période et on a du même coup confirmé que la dotation d’un poste n’est pas complète et qu’une nomination n’est pas finale tant qu’il n’est pas certifié ainsi qu’elle possède les exigences requises.

[118]      C’est dire que, pour qu’on puisse considérer qu’un poste affiché a été "accordé et comblé par la personne salariée qui a le plus d’ancienneté (…) (et qui) satisfai(t) aux exigences normales de la tâche" au sens de la clause 13.10, il faut que cette personne salariée la plus ancienne "parmi celles qui ont posé leur candidature" ait complété sa période d’initiation et d’essai et ait de ce fait acquis un droit réel sur le poste en cause. À défaut de raisonner de cette façon, on devrait forcément conclure notamment que le second alinéa de la clause 13.14 n’est d’aucune utilité, ce qui répugne en termes d’interprétation.

[119]      Que faut-il maintenant répondre à ces deux autres questions qui ne sont pas sans rapports entre elles. La première cherche à faire établir si l’introduction d’un nouveau formulaire de mise en candidature et l’implantation de la procédure de dotation accélérée ont ou non donné lieu, par les changements qu’ils ont signifiés, à un refus de reconnaître le Syndicat comme seul agent négociateur. L’autre vise à faire décider si le formulaire de mise en candidature constitue ou non une entente particulière que devrait approuver le Syndicat puisqu’il doit être signé et autographié par chaque personne salariée.

[120]      J’ai déjà longuement expliqué qu’en autant que la procédure de dotation accélérée et que les moyens utilisés pour en assurer l’application apparaissent conformes à la convention collective, il n’y a pas matière à en questionner juridiquement l’existence. J’ai aussi clairement rappelé au passage que, dans la mesure où cette contrainte était respectée, l’Employeur n’avait pas à convenir de quoi que ce soit avec le Syndicat. Et en toute cohérence, j’ai par exemple conclu au contraire lorsqu’il m’est apparu que les modalités qui ont remplacé le registre des postes me semblaient en-deçà de ce que prévoit la clause 13.08 des Dispositions localement négociées.

[121]      Autrement dit, tant que l’Employeur ne contrevenait pas à la convention collective, il était en terrain dit administratif et agissait en fonction de ses droits de direction. Eu égard à cet état de fait qui le dispensait d’obtenir des consensus avec le Syndicat - bien qu’ils aient essayé de le faire et qu’il aurait certainement été préférable qu’ils le réussissent - il est pour le moins difficile d’imaginer que l’Employeur pourrait maintenant être taxé d’avoir refusé de reconnaître le Syndicat comme seul agent négociateur. Agirait-il unilatéralement en maintenant son modèle de liste d’envoi aux personnes salariées qui prévoient être absentes du travail pendant quatorze (14) jours et plus ou en continuant de reporter au prochain cycle de dotation un poste qui est objet de désistement avant la fin d’une période d’initiation et d’essai qu’on pourrait alors le prétendre. Mais certainement pas pour ce qui touche les autres objets que j’ai précédemment déclarés conformes à la convention collective.

[122]      En ce qui concerne le formulaire de mise en candidature, il m’est difficile sinon impossible d’y avoir une entente en termes juridiques. Pour qu’il s’agisse d’une entente, il faut d’abord parler d’un échange de consentements relativement à un objet donné, ce qui n’est manifestement pas le cas. Par ailleurs, il appert que ce formulaire de mise en candidature n’est rien de plus qu’une forme d’application à un poste qui ne peut d’aucune façon s’apparenter au genre d’entente particulière qui nécessite la caution syndicale précisément pour éviter qu’ainsi l’Employeur favorise certaines personnes salariées au détriment des autres en leur reconnaissant des avantages supérieurs ou différents, tel que le prévoit la clause 5.03 des Dispositions nationales.

[123]      Au sujet finalement de la question des affichages de postes avec des titres d’emploi non-conformes à la Nomenclature des titres d’emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux applicables à tout époque pertinente, il y a peu à dire si ce n’est qu’il s’agit manifestement là d’erreurs, mais qu’il n’empêche qu’elles étaient de nature à rendre nuls et inopérants les actes sur lesquels elles ont porté.

[124]      La preuve démontre en effet qu’il y a eu méprise dans chaque cas et qu’il ne semble pas en avoir résulté de préjudice particulier. Bien qu’elles aient été involontaires, ces erreurs ne constituaient pas moins autant de dérogations à ladite nomenclature qui, quant à elle, est limpide et ne mérite pas d’être interprétée : toute dérogation à la nomenclature comme telle est "sanctionnable" de nullité. Cela dit, je rappellerai qu’en l’absence de grief sur le sujet, il m’est impossible de donner plus qu’un caractère déclaratoire à ces dernières observations.

[125]      Même si j’estime avoir complété le mandat pour le moins particulier qu’on m’a donné, il me reste une dernière question à régler : celle du paiement de mes honoraires et frais.

[126]      Puisqu’on est ici en présence de parties qui sont soumises à l’application de la règle du "Qui perd paie" et puisque je me trouve par toute cette analyse à conclure dans l’ensemble de leurs objets au rejet de plus que trois (3) des six (6) griefs déposés et à répondre négativement à cinq (5) des huit (8) questions posées, je devrais normalement donner pleine application à la clause 11.38 des Dispositions nationales et imposer un partage en conséquence. Mais étant donné qu’on a décidé de procéder par des questions qui étaient fondamentalement communes, considérant que les sujets traités intéressent également les parties et que les réponses données vont profiter autant à l’une qu’à l’autre, et vu que les parties ont ensemble mis d’importants efforts à convenir d’admissions, à déposer des affidavits, … pour efficientiser le plus possible le processus d’arbitrage, il m’apparaît plus équitable et plus respectueux de la nature de ce que les parties me semblent avoir considéré comme étant un seul dossier et de la façon qu’elles ont voulu d’un commun accord le traiter, de dévier un tant soit peu de la règle conventionnelle et d’accepter un partage moitié/moitié de mes honoraires et frais.

 

VI - LA CONCLUSION

[127]      Compte tenu de toute cette analyse,

127.1    JE RÉPONDS comme suit aux huit (8) questions qui m’ont été adressées :

1)     Est-ce que l'Employeur contrevient à la convention collective en exigeant que la personne salariée soit préqualifiée avant les périodes d'affichage et que, si celle-ci ne l'est pas, l'Employeur ne retienne pas sa candidature au moment de faire les nominations?

      NON

2)     Est-ce que le formulaire de mise en candidature et son contenu, tel qu'il est exigé par l'Employeur pour les affichages du 13 au 27 mars 2012 pour la catégorie 3 et du 10 au 24 avril 2012 pour la catégorie 2, contreviennent à la convention collective?

      NON

3)     Le fait de procéder à la nomination automatique sur le ou les postes, qui est ou sont toujours disponible(s) au rang d'ancienneté de la personne salariée en fonction de la priorité exprimée par celle-ci sans lui permettre de faire un choix au moment des nominations parmi tous les postes lui revenant par ancienneté, contrevient-il à la convention collective?

NON

4)     Selon l'Employeur, la quatrième question en litige devrait être formulée de la façon suivante: Les nouvelles modalités applicables aux personnes salariées inscrites sur le registre des postes contreviennent-elles à la convention collective?

      Selon le Syndicat, la quatrième question devrait être formulée de la façon suivante: L'Employeur contrevient-il à la convention collective lorsqu'il modifie les règles d'application du registre des postes sans en convenir avec le Syndicat?

      OUI, dans ces deux (2) formulations.

5)     À la suite du désistement d'une personne salariée ou si elle ne termine pas sa période d'initiation et d'essai à la suite de sa nomination à un poste affiché, l'Employeur contrevient-il à la convention collective en ne procédant pas à la nomination de la personne salariée qui est la suivante en ancienneté ayant postulé sur le même poste au moment de l'affichage?

      OUI

6)     L'Employeur a-t-il refusé de reconnaître le Syndicat comme seul agent négociateur en changeant les règles de mutations volontaires par l'introduction du nouveau formulaire de mise en candidature et de sa nouvelle procédure de nomination?

      NON

7)     Est-ce que les engagements qui sont mentionnés sur le formulaire de mise en candidature que l'Employeur oblige à signer et à autographier par les personnes salariées au moment d'une mise en candidature sont une entente nécessitant l'approbation du Syndicat tel qu'il est prévu à la convention collective? (Pour l'Employeur, cette question est incluse dans la question 2)

      NON

8)     L'Employeur contrevient-il à la convention collective en affichant des postes avec des appellations d'emploi non prévues à la Nomenclature des appellations d'emploi, des libellés, des taux et des échelles de salaire du réseau de la santé et des services sociaux lors de l'affichage du 13 au 27 mars 2012 dans la catégorie 3? (Il est convenu entre les parties que cette question ne concerne pas la dotation accélérée, mais il a néanmoins été convenu de me la soumettre dans le cadre de la présente procédure).

      OUI, mais de façon déclaratoire.

127.2    JE REJETTE à toutes fins que de droit les griefs portant les numéros 186232, 186235 et 186289 ;

127.3    J’ACCUEILLE partiellement le grief portant le numéro 186288 quant au volet "registre des postes" et les griefs portant les numéros 186285 et 186286 quant au volet "procédure de dotation des postes" par référence uniquement à la question 5) ci-haut rapportée ;

127.4    JE CONSTATE ET DÉCLARE que les modifications apportées par la nouvelle procédure de dotation accélérée contrevenaient à la clause 13.08 des Dispositions localement négociées pour ce qui est du grief numéro 186288 et à la clause 13.10 pour ce qui concerne les griefs numéros 186285 et 186286 et

127.5    JE CONSERVE compétence pour le cas où ces derniers paragraphes poseraient problème en termes d’application, étant toutefois acquis qu’à ce jour il n’y a eu aucune preuve de préjudice.

________________________________________________________________

EN FOI DE QUOI , j’ai signé à Québec, le 17 ième jour de septembre 2012.

 

                                                                      

M e Jean-Guy Ménard, arbitre

 

                                                                      



[1]     Comité patronal de négociation du Secteur de la santé et des services sociaux et Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS/CSN), D.T.E 2005T401

[2]     Syndicat canadien de la Fonction publique (SCFP) et Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ), arbitre Me Francine Beaulieu, 26 septembre 2011, par. 54.

[3]     Syndicat canadien de la Fonction publique (SCFP) et Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ), arbitre Me Francine Beaulieu, 26 septembre 2011, par. 73, 75, 76 et 77.

 

[4]     Syndicat canadien de la Fonction publique (SCFP) et Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ), arbitre Me Francine Beaulieu, 26 septembre 2011, par. 69 et 70.

 

[5]     Centre hospitalier Saint-Joseph de La Tuque c. Syndicat démocratique des salariés de l’Hôpital Saint-Joseph de La Tuque, arbitre Me Francine Gauthier-Montplaisir, 26 août 1992

[6]     Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke et Syndicat des salariés du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, arbitre Me Marc Boisvert, 30 mai 1997, p. 14 et 15

 

[7]     Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) c. Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 1108 (SCFP), arbitre Me Francine Beaulieu, 26 septembre 2011, parag. 87 et 88

[8]     Centre de services sociaux Laurentides-Lanaudière et Syndicat des personnes salariées du CSSLL - région Lanaudière, arbitre Me Richard Guay, 6 mars 1992, p. 15 et 16

[9]     Syndicat québécois des employées et employés de service, section locale 298 (FTQ) et Centre santé Kamouraska, arbitre Me Jean-Guy Ménard, 5 février 2003, p. 22 et 23