TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

N o de dépôt : 2013-2324

 

Date : 25 janvier 2013

                                                                                                                                            

 

DEVANT L’ARBITRE :     M e MARCEL MORIN

                                                                                                                                            

 

 

SYNDICAT DÉMOCRATIQUE DES EMPLOYÉS DE GARAGES SAGUENAY—LAC-ST-JEAN (C.S.D.)

 

            Ci-après appelé « le Syndicat »

 

 

ET

 

 

LA CORPORATION DES CONCESSIONNAIRES D'AUTOMOBILES SAGUENAY—LAC-ST-JEAN-CHIBOUGAMAU INC. (ROCOTO LTÉE)

 

            Ci-après appelée « l’Employeur »

 

 

 

Plaignant : Éric Castonguay

 

Grief :             N o du Syndicat : 2012-018

 

Nature du grief : Perte d’ancienneté et congédiement

 

Convention collective : 2007-2013

 

                                                                                                                                            

 

SENTENCE ARBITRALE

(Art. 100 Code du Travail L.R.Q. c.C-27)

                                                                                                                                            

[01]        L'arbitre soussigné a été désigné par les parties pour décider du grief de Monsieur Éric Castonguay qui conteste la décision de son Employeur de mettre fin à son emploi. Les parties ont procédé aux admissions d'usage voulant que l'arbitre ait été régulièrement désigné, qu'il a compétence pour décider de ce grief lequel a été acheminé à l'arbitrage dans le respect de la procédure et des délais prévus à la convention collective.

 

 

LE GRIEF

 

 

[02]        Le 4 avril 2012, le plaignant, Éric Castonguay déposait un grief libellé en ces termes (S-2) :

 

« Description du grief :

 

En vertu des dispositions de la convention collective de travail et de manière générale et non limitative aux articles 1,03 4ieme, 2, 5 et 7 et tous ceux s'y rattachant, je, Éric Castonguay, dépose ce grief pour la raison suivante: je considère la mesure (congédiement) qui m'a été imposé le ou vers le 29 mars 2012 est injuste, illégale, abusive, inapproprié et non conforme à la convention collective de travail présentement en vigueur.

 

Description de la réclamation :

 

Je, Éric Castonguay, réclame l'annulation et le retrait de cette mesure à mon dossier (congédiement), mon rappel au travail dans mon occupation (préposé au service) et ce, avec pleine compensation pour le salaire et les avantages perdus et tous les autres droit ( sic ) que donne la convention collective de travail.

 

Et tous les autres droits et avantages que donne la convention collective de travail. »

 

[03]        Le grief contestait la décision du 29 mars 2012 qui lui a été signifiée (S-5) :

 

 

 

 

« Objet :                           Perte d'ancienneté

 

Monsieur Castonguay,

 

En vertu de l'article 5.05 alinéas 5 de la convention collective de travail en vigueur et du fait de votre absence au travail de plus de six (6) jours ouvrables consécutifs, et ce, sans avoir avisé votre employeur, nous vous signifions par la présente que vous avez perdu votre ancienneté chez Rocoto Toyota Ltée.

 

En effet, les 19-20-21-22--26- et 27 mars 2012, vous ne vous êtes pas présenté à votre travail, et au surplus, à aucun moment vous nous en avez avisé.

 

Nous constatons malheureusement que ce n'est pas la première fois que nous vous signifions vos absences répétées du travail.

 

D'ailleurs, un relevé de votre dossier nous indique que :

 

ü Un avis vous a été remis le 17 novembre 2011, concernant vos absences répétées et injustifiées ;

 

ü Un avis vous a été remis le 16 janvier 2012 concernant également vos absences répétées et injustifiées :

 

Dans ces circonstances, nous vous avisons que votre lien d'emploi avec Rocoto Toyota Ltée est définitivement rompu. Vous trouverez jointes à la présente toutes les sommes qui vous sont dues et vous demandent de rapporter tous les uniformes de travail que vous avez en votre possession. »

 

 

Disposition pertinente de la convention collective

 

[04]        La seule disposition visée par le grief est la suivante :

 

« 5.05 Perte d'ancienneté

 

L'ancienneté de tout salarié se perd :

 

1.    pour abandon volontaire de son emploi;

 

2.    pour congédiement pour cause juste et suffisante;

 

3.    pour tout salarié mis à pied pour une période excédant vingt-quatre (24) mois;

 

4.    pour défaut, à la suite d'une mise à pied, d'informer l'employeur dans les cinq (5) jours ouvrables de son rappel et de se rapporter au travail dans les dix (10) jours ouvrables de son rappel, par courrier recommandé ou autre moyen dont la preuve incombe à l'employeur;

 

5.    pour une absence de son travail de plus de six (6) jours ouvrables consécutifs sans avoir avisé son employeur ou son représentant, sauf si le salarié a un ou des motifs raisonnables quant au défaut d'avis;

 

6.    s'il a été absent de son travail pour cause de maladie ou accident, pendant une période dépassant trois (3) années. Toutefois, l'employeur peut prolonger le délai en informant le syndicat et le salarié par lettre.

 

7.    [...] »

 

La question en litige

 

[05]        Le plaignant s'est-il absenté de son travail plus de six (6) jours ouvrables consécutifs sans avoir avisé son Employeur ou son représentant et si oui avait-il un ou des motifs raisonnables pour ne pas avoir avisé ?

 

 

LA PREUVE

 

 

[06]        L'Employeur a fait entendre le plaignant Éric Castonguay, Messieurs Camil Tremblay, à l'époque directeur adjoint au service et Dany Fortin directeur du service alors que la partie syndicale a fait entendre Messieurs Dany Thompson, préposé au service et Normand Sergerie, proposé au service. Dans le cadre d'une contrepreuve, l'Employeur a fait réentendre Monsieur Dany Fortin.

 

[07]        Monsieur Castonguay est employé du garage depuis 10 ans et dans ses fonctions de préposé au service fait de la petite mécanique : changement de pneus, d'huile, etc.

 

[08]        Il n'a pas contesté les réprimandes qui lui ont été imposées pour ses absences du 14 novembre 2011 (S-7) et des 9, 10, 11 et 12 janvier 2012 (S-6).

 

[09]        Bien qu'il éprouve des problèmes de santé, il n'avait pas de médecin de famille et Monsieur Bergeron, directeur du département des pièces, lui avait suggéré d'aller dans une clinique privée, suggestion qu'il a rejetée en raison de son incapacité financière à assumer de tels coûts. Il a dû s'absenter par la suite mais avait avisé son Employeur. La liste préparée par Monsieur Fortin est à la base de la décision de l'Employeur (E-2) :

 

« Objet :               Détails du dossier employé

 

Le lundi 23 janvier 2012            Retard au travail

 

Le mardi 24 janvier 2012           Absence du travail avec avis le matin à son contremaître

 

Le mercredi 25 janvier 2012      Absence du travail avec avis le matin à son contremaître

 

Le jeudi 26 janvier 2012            Présente ( sic ) au travail et se dit malade, aucune justification, le renvoi chez eux et lui dit de revenir lundi, et doit régler son problème car ne peut plus tolérer, le tout en présence de son délégué Alain Hudon.

 

Le jeudi 9 février 2012               Absence du travail avec avis le matin à son contremaître

 

Le lundi 20 février                     Absence du travail sans avis. Rencontre avec l'employé et avisé verbalement que ( sic ) ne peut plus rien faire pour lui et que si la situation ne se corrige pas, il faudra qu'il vivre ( sic ) avec les conséquences.

 

Le lundi 19 mars 2012                Absence du travail sans avis à son employeur

 

Le mardi 20 mars 2012              Absence du travail sans avis à son employeur

 

Le mercredi 21 mars 2012         Absence du travail sans avis à son employeur

 

Le jeudi 22 mars 2012                Absence du travail sans avis à son employeur

 

Le lundi 26 mars 2012                Absence du travail sans avis à son employeur

Le mardi 27 mars 2012              Absence du travail sans avis à son employeur

 

Le mercredi 28 mars 2012         Présente ( sic ) au travail. Rencontre immédiate avec l'employé en compagnie de son délégué Alain Hudon pour demandé justification du défaut d'avis pour absence de 6 jours ouvrables. L'employé présente un papier disant qu'il a été chez le médecin la veille et qu'il a rendez-vous futur. J'ai fait mention à l'employé que cela ne justifiait pas son défaut d'avis et lui ai demandé pourquoi il n'a pas appelé, et il a répondu qu'il a essayé avant les heures de travail, mais en vain. Je lui ai demandé pourquoi il n'a pas avisé lors des heures d'ouverture, et il a répondu qu'il était parti de chez lui à cette heure. Je lui ai donc fait mention que du fait qu'il ne pouvait justifier ces absences et ces défauts d'avis pour 6 jours ouvrables, de quitter et que nous allons statuer sur sa situation. Il mention ( sic ) alors qu'il s'en fou et qu'il a déjà des CV de porte ailleurs. »

 

[10]        Monsieur Castonguay témoigne que pour le 19 mars 2012, il a tenté d'appeler mais qu'il n'a pas réussi à laisser un message dans la messagerie du téléphone tout comme pour le 20 mars. Il n'a pas tenté d'appeler par la suite sauf pour le 26 mars alors qu'il a fait aviser par sa conjointe qui a communiqué avec un confrère de travail, Dany Thompson, lequel a avisé l'Employeur. Il sait que le message s'est rendu à Monsieur Camil Tremblay.

 

[11]        Pour le mardi 27 mars, le plaignant affirme s'être présenté au travail, il a poinçonné le bon de travail et a débuté son travail en entrant un véhicule à son poste de travail en commençant à faire un changement d'huile. Environ cinq minutes après son arrivée, Monsieur Camil Tremblay lui a demandé de se rendre au bureau de Monsieur Fortin au sujet de ses absences. Monsieur Fortin lui a dit qu'il n'avait pas d'affaire là et qu'il n'avait pas de billet médical. Il a quitté le travail pour se rendre à l'hôpital. Il est revenu porter les documents médicaux en après-midi le jour même à 13h. Monsieur Fortin ne voulait rien savoir et il l'a renvoyé chez lui, en lui disant de s'arranger avec son Syndicat.

 

[12]        Il a obtenu le billet médical S-8, lequel billet atteste qu'il s'est présenté au service d'urgence de l'hôpital pour une consultation médicale le 27 mars 2012, qu'il s'y est présenté à 7h53 et a reçu son congé le jour même à 12h55. En sortant de l'hôpital, il s'est dirigé tout de suite au garage rencontrer Monsieur Fortin pour lui présenter les papiers médicaux S-8.

 

[13]        Monsieur Castonguay précise qu'il n'était pas apte à travailler à compter du 19 mars car il avait beaucoup de saignements dans ses selles. Il est resté à la maison sauf pour conduire sa conjointe au travail et sa fille à la garderie.

 

[14]        Monsieur Camil Tremblay témoigne que le plaignant n'avait aucun problème lorsqu'il était au travail mais qu'il avait beaucoup d'absentéisme, la période la plus critique étant celle qui a mené à son congédiement. Pendant cette période, Monsieur Tremblay a tenté sans succès de rejoindre le plaignant à son domicile. Il a même contacté Monsieur Dany Thompson pour avoir des nouvelles et ce dernier lui a mentionné dans la deuxième semaine d'absence que la conjointe de Monsieur Castonguay lui avait dit que ce dernier l'appellerait. Il n'a pas eu de nouvelles du plaignant ni d'appel de sa conjointe. Le vendredi ou le lundi suivant, il a vu Monsieur Castonguay arriver au garage avec des papiers médicaux mais ce n'était pas la même journée que l'annonce de Dany Thompson. C'était la première fois que le plaignant se présentait au garage depuis le début de son absence. Le plaignant était vêtu de ses vêtements de tous les jours et non pas ceux qu'il porte pour le travail lesquels sont identifiés à Toyota. À son souvenir, Monsieur Castonguay n'avait pas ouvert de billet de travail lorsqu'il s'est présenté au travail et qu'il a été rencontré par Dany Fortin.

 

 

[15]        Contre interrogé, Monsieur Tremblay dira avoir parlé le 7 septembre 2012 à une personne du Syndicat à qui il a affirmé avoir reçu un appel de la conjointe d'Éric Castonguay annonçant que ce dernier n'entrerait pas au travail. Monsieur Tremblay mentionne qu'il était occupé à autre chose lors de la réception de cet appel. Il n'a peut-être pas bien compris la question. Le représentant syndical lui lit la question et la réponse donnée lors de cette conversation téléphonique sur main libre (S-9) alors qu'il affirmait avoir été avisé par Dany Thompson de l'absence d'Éric pour la journée et que ce dernier allait à l'urgence. Il dira ne pas s'en souvenir.

 

[16]        Monsieur Dany Fortin est directeur du service chez Rocoto Toyota depuis 2005. Il connait bien Éric Castonguay qui, au travail, est un très bon employé, mais qui présente un problème d'absentéisme important. Monsieur Castonguay était absent depuis le 19 mars 2012. En entrant au travail le 28 mars Monsieur Fortin a demandé à Monsieur Tremblay d'aller dire au plaignant de venir à son bureau ce qu'il a fait dans les minutes suivant son arrivée. Monsieur Fortin lui a demandé de justifier ses absences et le plaignant lui dit avoir un papier qu'il est allé chercher dans son auto. Il lui a dit qu'il avait consulté un médecin la veille. Monsieur Fortin lui a répondu que ce n'était pas une justification pour les autres journées d'absence. Il a regardé vaguement le document que lui présentait Éric Castonguay alors que celui-ci lui annonçait avoir d'autres rendez-vous médicaux de prévus. Monsieur Fortin n'a pas voulu recevoir ces documents car cela ne justifiait pas les six autres journées d’absence. Il a demandé au plaignant de partir et qu'on allait le recontacter. Éric Castonguay a ensuite quitté l’établissement.

 

[17]        Le lundi suivant, le plaignant a tenté de revenir au travail car il n'avait pas encore eu de nouvelle . À son arrivée Monsieur Fortin l'a intercepté et lui a demandé de retourner chez lui. Par la suite, un huissier a signifié au plaignant sa lettre de fin d'emploi.

 

[18]        Comme le plaignant lui avait dit avoir tenté d'appeler en dehors des heures d'ouverture, Monsieur Fortin précise que le système téléphonique comporte des boites vocales pour chaque poste et chacun prend ses messages. Pour la période visée par les absences de Monsieur Castonguay il n'y avait aucun problème sur la messagerie vocale. On ne lui a fait part d'aucun message de Monsieur Castonguay. De même, en réponse à l'affirmation du plaignant qu'il avait en main le bon de travail lorsqu'il s'est présenté au travail et qu'on lui a demandé de se rendre à son bureau, Monsieur Fortin dira n'avoir trouvé aucun bon de travail ouvert au nom du plaignant. Lors que le bon est ouvert on ne peut l'effacer du système. Il n'y a aucun rapport de changement pour les 27 et 28 mars 2012.

 

[19]        Contre interrogé, Monsieur Fortin dira avoir écrit perte d'ancienneté selon la clause 5.05 (5) de la convention collective après les absences du 19 au 27 mars 2012. Pour ses absences Monsieur Castonguay se disait malade et il avait du sang dans ses selles depuis deux ou trois ans . D'ailleurs, le plaignant lui avait déjà montré un sac contenant des excréments.

 

[20]        Monsieur Dany Thompson est préposé au service depuis 2003. Il affirme que c'est le 27 mars 2012 que le plaignant s'est fait congédier. C'était un mardi. Monsieur Thompson avait reçu un appel de la conjointe d'Éric Castonguay. Il produit à cet effet son relevé téléphonique pour le mois de mars 2012 (S-10) et pointe l'appel no 87, un appel arrivé le 26 mars à 8h34, de 23 secondes comme étant l'appel reçu de la conjointe du plaignant lui disant qu'Éric n'entrerait pas au travail car il était à l'urgence. Elle lui a demandé d'aviser Camil Tremblay. Lors de la réception de cet appel Monsieur Thompson était en compagnie de Normand Sergerie à fumer une cigarette à l'extérieur et c'est en sa compagnie qu'il a informé Camil Tremblay de l'absence d'Éric.

 

 

[21]        Monsieur Thompson dira que c'est le lendemain 27 mars que le plaignant a été congédié. En effet, Éric Castonguay avait commencé son travail lorsque Camil Tremblay est venu le chercher pour aller au bureau. Monsieur Thompson travaillait au poste juste à côté et c'est lui qui a terminé le travail du plaignant.

 

[22]        Il corrobore le contenu du document S-9 lors de l'appel fait le 7 septembre 2012 à Monsieur Tremblay.

 

[23]        Contre interrogé, Monsieur Thompson précise avoir avisé Camil Tremblay de l'absence d'Éric Castonguay lors du « dispatch » du 26 mars. C'est le lendemain 27 mars que le plaignant a été congédié vers 7h37-7h38 après s'être rendu au bureau de Dany Fortin.

 

[24]        Monsieur Normand Sergerie, préposé au service depuis huit ans a reçu un appel de Jean-Claude Caron au sujet d'Éric Castonguay. On voulait savoir s'il avait été témoin d'un  message que Dany Thompson avait fait à Camil Tremblay au sujet d'Éric Castonguay. En effet, Dany Thompson venait de recevoir un appel l'avisant qu'Éric serait absent pour la journée. On était alors dans le bureau de Camil Tremblay vers 7h30.

 

[25]        En contre preuve patronale, Monsieur Dany Fortin précise, rapports E-6 à E-9 en mains, que pour les 27 et 28 mars 2012, Monsieur Éric Castonguay n'a travaillé sur aucun bon de travail.

 

 

ARGUMENTATION DES PARTIES

 

A)        PATRONALE

 

[26]        La preuve est contradictoire au sujet de la date de certains événements de même que sur la date à laquelle Monsieur Castonguay a été retourné chez lui. Or, le plaignant s'est absenté six jours.

[27]        Le plaignant savait qu'il devait aviser son Employeur de ses absences et que le défaut de le faire avait un impact sur le service à la clientèle.

 

[28]        La pièce E-2 fait ressortir que Monsieur Castonguay avait déjà été avisé à trois reprises dans le passé. Or, le plaignant a admis ne pas avoir avisé pour ses absences des 19, 20, 21 et 22 mars 2012. Il a été négligent. Il savait qu'il devait aviser mais ne l'a pas fait. Pour la semaine suivante, il affirme avoir fait faire le message par Dany Thompson à Camil Tremblay.

 

[29]        Le délai de six jours ouvrables prévu dans la convention collective est un délai très long alors qu'on retrouve généralement un délai de trois jours dans plusieurs conventions collectives.

 

[30]        L'enjeu dans ce dossier, ce sont les 26 et 27 mars. Monsieur Castonguay a témoigné s'être présenté au travail le 27 et non le 28 mars tel que mentionné dans la pièce E-2. Il aurait poinçonné ce jour-là et entré un véhicule sur lequel il aurait commencé à faire un changement d'huile lorsqu'il a été requis de se présenter au bureau de Monsieur Fortin par Monsieur Tremblay. Il n'aurait alors pas complété le travail commencé. En quittant le bureau de Monsieur Fortin, il se serait rendu à l'hôpital pour avoir la preuve qu'il était malade et il aurait remis en après-midi les documents de nature médicale à Monsieur Fortin alors que ce dernier n'aurait pas voulu prendre le billet médical. Cette preuve a été corroborée par deux témoins. Dany Thompson a témoigné que le plaignant a été congédié le 27 mars puisque c'est le 26 mars qu'Éric Castonguay s'est rendu à l'urgence. Il produit son compte de téléphone (S-10) démontrant avoir reçu un appel de la conjointe du plaignant lui demandant d'aviser Camil Tremblay. Ainsi, pour Dany Thompson, c'est le 27 mars qu'Éric a été congédié car ce dernier avait commencé un travail et que c'est lui qui l'a terminé. S'il est certain que c'est le 27 mars c'est que le jeudi est sa journée de congé.

 

[31]        Que révèle la preuve matérielle ? Monsieur Thompson a produit le relevé de compte de son téléphone cellulaire (S-10) et prétend que l'appel 87 est celui de la conjointe d'Éric Castonguay, mais le relevé n'indique pas le numéro de téléphone de l'appelant. Monsieur Thompson a témoigné que cet appel est arrivé le lundi 26 mars et après l'avoir reçu il en a avisé Monsieur Camil Tremblay en présence de Monsieur Sergerie lors des « dispatch » du matin avant de commencer sa journée de travail. C'est donc vers 7h35 qu'il a avisé Monsieur Tremblay. Or, l'appel 87 est entré à 8h54. Comment pouvait-il à 7h35 avoir avisé Monsieur Tremblay que Monsieur Castonguay n'entrait pas au travail par un appel reçu une heure et demi plus tard ?

 

[32]        Le deuxième problème concerne le billet médical S-8. Monsieur Thompson a témoigné que c'est le 27 mars qu'est survenu le congédiement, soit le lendemain de l'appel de la conjointe du plaignant alors qu'il se rendait à l'urgence ce qu'il a fait le 27 mars 2012 (S-8). Si, comme l'affirme Monsieur Thompson le congédiement s'est fait le lendemain de la vacation de Monsieur Labrecque à l'urgence de l'hôpital, c'est donc le 28 mars qu'il a été congédié, corroborant ainsi la version de Monsieur Fortin. La version du plaignant est que sa visite à l'hôpital découle de sa rencontre avec Monsieur Fortin ce qui exclut le 26 mars. Si, par hypothèse Monsieur Labrecque était entré au travail le 27 mars et qu'ensuite il se soit rendu à l'hôpital après avoir commencé à travailler sur un véhicule, avoir été interrompu par Monsieur Camil Tremblay pour lui demander de se rendre au bureau de Monsieur Fortin, il est invraisemblable qu'il soit arrivé à l'hôpital, se soit rendu à l'urgence, ait fait la file, passé le triage, qu'il ait détenu son numéro et qu'on indique sur S-8 une arrivée à 7h53. En effet, la rencontre avec Monsieur Fortin a duré moins de cinq minutes. Par la suite, il a ramassé ses outils, s'est lavé les mains, fait le trajet en voiture jusqu'à l'hôpital soit environ 15 minutes et  garé sa voiture. C'est impossible qu'entre 7h35 et 7h53 il ait pu faire tout cela. En réalité, le plaignant s'est effectivement rendu à l'hôpital le 27 mars au matin sans s'être présenté au travail. C'est le 28 mars qu'il est allé chercher la pièce S-8 dans sa voiture.

[33]        Ainsi, seulement à la lumière de la preuve syndicale, l'invraisemblance a été démontrée.

 

[34]        L'Employeur a démontré par le témoignage de Monsieur Camil Tremblay que c'est ce dernier qui a tenté sans succès de rejoindre le plaignant les quatre premières journées d'absence et il s’est informé à Monsieur Thompson pour avoir des nouvelles du plaignant et qu'il n'en avait pas. Jamais Monsieur Thompson ne lui a dit avoir reçu un appel l'informant que le plaignant n'entrait pas au travail. La pièce S-9 est du ouï-dire qui n'a pratiquement aucune valeur par rapport au témoignage de Monsieur Tremblay sur affirmation solennelle. Le contexte de cette déclaration (S-9) doit être pris en compte. Il a dit n'importe quoi. D'ailleurs, cette déclaration ne vaut rien au regard de la preuve matérielle non contredite.

 

[35]        Les bons de travail font ressortir que Monsieur Castonguay n'a pas travaillé depuis le 15 mars 2012. Aucun rapport d'activité n'indique un travail quelconque du plaignant pour les 26 et 27 mars 2012 et il est impossible d'effacer des activités dans le système informatique.

 

[36]        La lettre de congédiement a été rédigée le 29 mars et livrée le 3 avril après une première tentative de signification non réussie. C'est ainsi que Monsieur Labrecque s'est présenté au travail le 2 avril comme si de rien n'était. C'est à cette date qu'il s'est présenté et qu'il a commencé un changement d'huile qu'il n'a pu compléter. Mais on ne retrouve aucun bon de travail pour un changement d'huile amorcé par le plaignant et terminé par Monsieur Thompson.

 

[37]        Il n'y a aucune preuve que Monsieur Labrecque ait été dans une situation d'impossibilité d'agir. Pour les quatre premières journées, le plaignant l'a avoué, mais pour les deux autres journées, la preuve est contestée. Le mandat que le plaignant dit avoir donné à sa conjointe d'aviser Monsieur Thompson ne s'est pas réalisé.

[38]        Il n'y a également aucune preuve que le plaignant avait un motif raisonnable de ne pas aviser. Il n'a été que consulté à l'hôpital. Il n'a pas été hospitalisé dans un état l'empêchant d'appeler.

 

[39]        Ainsi, le Syndicat n'a pas assumé son fardeau de preuve de démontrer qu'il a avisé ou avait un motif raisonnable de ne pas aviser son Employeur.

 

[40]        La clause 5.05 (5) de la convention collective précise que le plaignant perd son ancienneté « pour une absence de son travail de plus de six (6) jours ouvrables consécutifs sans avoir avisé son Employeur ou son représentant, sauf si le salarié a un ou des motifs raisonnables quant au défaut d'avis. »

 

[41]        La preuve a démontré que le plaignant s'est absenté plus de six jours ouvrables consécutifs sans aviser et sans avoir de motifs raisonnables de ne pas aviser. Le billet médical S-8 n'a été reçu qu'après le délai. Monsieur Labrecque s'est présenté au travail le septième jour.

 

[42]        Le Tribunal, après avoir constaté les faits ne peut intervenir sur la sanction que les parties ont décidée conventionnellement.

 

[43]        L'Employeur réfère le tribunal aux autorités jurisprudentielles suivantes : Ritz Carlton Inc. c. Syndicat des travailleurs (euses) du Ritz Carlton, 1987, AZ-87141137 , Me François Hamelin; Syndicat des travailleuses et travailleurs de Aramark (École Polytechnique)-CSN c. Aramark Québec Inc., 2011, AZ-50759648 , Louise Viau; Messagerie A.D.P. inc. c. Syndicat international des communications graphiques, section locale 555 Montréal, 2006, AZ-50373131 , Me François Hamelin; Union des salariés de la Scierie Clermond Hamel Ltée c. Scierie Clermond Hamel Ltée, 2008, AZ-50472281 , Me Jean Gauvin; Union des employés et employées de service, section locale 800 FTQ et Canmec industriel inc. et Stéphane Proulx, 2011, AZ-50718880 , Me Carol Girard; La section locale 700 du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (FTQ) vs Pival international inc., 2011, AZ-50715366 .

 

B)        SYNDICALE

 

[44]        L'Employeur dans sa lettre de perte d'ancienneté (S-5) datée du 29 mars 2012 fait référence à la clause 5.05 (5) en disant que les 19, 20, 21, 22, 26 et 27 mars 2012 que le plaignant ne s'est pas présenté au travail et n'a pas avisé de son absence.

 

[45]        De plus, l'Employeur affirme que le salarié n'a pas avisé durant ces six jours, mais la preuve démontre bien que Dany Thompson a reçu un appel de la conjointe de Monsieur Éric Castonguay, soit Madame Andréa Deschênes, qui l’a informé qu'Éric Castonguay n'entrerait pas au travail aujourd'hui parce qu'il était malade et la preuve démontre que l'appel a été fait le 26 mars 2012 à 8h54 (S-10).

 

[46]        La preuve démontre aussi que Monsieur Thompson a bel et bien avisé Monsieur Camil Tremblay selon le témoignage de Monsieur Thompson corroboré par Monsieur Normand Sergerie qui était présent sur place quand Monsieur Thompson a avisé Monsieur Camil Tremblay qu'Andréa, la femme d'Éric Castonguay a appelé et qu'Éric ne rentrera pas aujourd'hui, car il est malade (S-9).

 

[47]        Monsieur Thompson a aussi eu connaissance, le lendemain, le 27 mars 2012, qu'Éric a été congédié. De plus, c'est lui-même qui a dû terminer le changement d'huile de l'auto qu'Éric Castonguay avait commencé (S-9) et que penser du témoignage de Monsieur Camil Tremblay qui vient dire que lorsqu'il a reçu un appel du Syndicat, le 7 septembre 2012 et qu'on lui a demandé s'il se souvenait que Dany Thompson l'avait avisé qu'Éric Castonguay était malade et n'entrerait pas travailler, il a répondu OUI, mais aujourd'hui, il dit qu'il a peut-être dit oui, et que ça devait être pour se débarrasser ? Il faut le faire! Mais pour se débarrasser, il aurait pu dire NON au lieu de dire OUI.

 

[48]        Monsieur Dany Fortin a essayé de convaincre qu'il est impossible de faire du supprimé (DELETE) même avec un exemple de changement de travail entre salariés. Après, il  dit oui si le WO n'est pas fermé, et après coup, dit qu'il a vérifié auprès du comptable et que rien n’a été modifié au système pour le 27 et 28 mars 2012, et tout ça avec un document daté du jour de la première journée d'audition, soit du 2 novembre 2012. Pas très près de la date contemporaine.

 

[49]        Monsieur Dany Fortin a témoigné et confirmé qu'il a mis fin à l'emploi de Monsieur Éric Castonguay en vertu de la clause de convention perte d'ancienneté à cause du nombre de jours consécutifs sans avis (S-5, E-1). Sur le relevé d'emploi, il y a mention « perte d'ancienneté » à la case 18. On ne retrouve dans aucun document le terme « congédiement ».

 

[50]        Mais finalement, l'Employeur a fait un congédiement administratif qui est déjà déterminé à la convention collective pour absence sans avis pour plus de six jours ouvrables consécutifs. Il a même suspendu le salarié le 27 mars 2012 pour prendre le temps de statuer sur sa situation (E-2) - l'Employeur s'est campé derrière la clause 5.05 perte d'ancienneté.

 

[51]        La clause invoquée par l'Employeur est plus de six jours ouvrables consécutifs (S-1), mais l'Employeur a écrit six jours dans sa lettre du 29 mars 2012 (S-5). Il aurait fallu une 7 e journée pour être en mesure de dire qu'il a été absent plus de six jours. Même l'Employeur dans son document E-2, témoigne que le 28 mars 2012, il était à l'entreprise pour travailler même si la preuve syndicale confirme que c'était le 27 mars 2012. Mais, de toute façon que ce soit le 27 ou le 28, le plus de six jours n'est pas atteint. Donc, la mesure imposée au salarié Éric Castonguay, soit l'application de la PERTE D'ANCIENNETÉ remise au salarié par huissier, datée du 29 mars 2012, doit être déclarée non valide (S-5) et permettre au salarié de reprendre son travail comme demandé dans le grief 2012-018 (S-2).D'autant plus que même si le salarié avait perdu son ancienneté, il n'aurait pas dû perdre son emploi.

 

[52]        Iil faut quand même analyser l'attitude patronale face à la situation d'Éric Castonguay. D'abord Monsieur Dany Fortin, directeur du service témoigne n'avoir rien à reprocher au salarié Éric Castonguay pour son travail de préposé au service, mais que régulièrement, il ne se présentait pas au travail, et ce, depuis au moins 2006. Il faut aussi se souvenir qu'il a refusé de prendre et de voir ses papiers médicaux datés du jour même, soit le 27 mars 2012. Monsieur Camil Tremblay, ancien directeur adjoint a témoigné qu'il n'avait aucun problème avec son travail, mais qu'il avait beaucoup d'absences.

 

[53]        Il n'a jamais été mis en preuve que le salarié avait un problème d'absentéisme chronique, référence à 2006. Non, c'est le problème de santé de Monsieur Éric Castonguay qui a été mis en preuve dans la période, plus particulièrement, de septembre 2011 à mars 2012.

 

[54]        Il n'y a pas eu de preuve sur la quantité des absences de Monsieur Castonguay depuis 2006. Mais si c'était exact, il faudrait tenir compte du laxisme, « la tolérance » de l'Employeur à l'égard de ce type de comportement et de son obligation de respecter le principe de la progression des sanctions pour que le salarié se gouverne en conséquence.

 

[55]        Ce qu'on retrouve dans son dossier avant le congédiement pour perte d'ancienneté, ce sont deux réprimandes écrites datées, et il faut bien voir, du 17 novembre 2011 (S-7) et du 16 janvier 2012 et après c'est le congédiement camouflé derrière la clause de la convention qui ne s'applique pas et pourtant qui est la pierre angulaire du congédiement.

 

[56]        On a deux réprimandes écrites et immédiatement après un congédiement et tout ça dans un laps de temps de quatre mois.

 

[57]        En pratique, on a bafoué le principe de la progression des sanctions et l'article 2.02 de la convention collective, soit la considération face aux problèmes de santé dont Monsieur Castonguay est victime

 

[58]        Oui, Monsieur Castonguay a démontré de la négligence face à sa responsabilité d'aviser l'Employeur, et ce, à plusieurs reprises - ce qu'il a avoué dans son témoignage, mais il faut tenir compte de la maladie du salarié comme étant un facteur atténuant.

 

[59]        Même si le tribunal ne retient pas la preuve que Monsieur Thompson a donné l'avis à Camil Tremblay, il n'en demeure pas moins que Monsieur Castonguay ne s'est pas absenté plus de six jours ouvrables consécutifs.

 

[60]        L'Employeur a fait une erreur manifestement déraisonnable en s'appuyant sur la clause 5.05 (5) alors que le plaignant n'a pas été absent plus de six jours ouvrables consécutifs.

 

[61]        À l'appui de son argumentation, le représentant syndical dépose les autorités jurisprudentielles suivantes : Syndicat des métallos, section locale 7625 et Uniboard Canada inc., sentence de Me Louis B. Courtemanche du 8 août 2011; Union des salariés de la Scierie Clermond Hamel Ltée et Scierie Clermond Hamel Ltée de Me Jean Gauvin du 7 février 2008; Syndicat des salariés de Planchers Remorque Prolam (CSD) et Prolam, sentence de l'arbitre soussigné du 1 er décembre 2005; Les Bateaux Princecraft inc. et Syndicat des salariés des pontons Princecraft (CSD), sentence de Me Marc Boisvert du 21 septembre 2004; Syndicat des employées et employés professionnels-les et de Bureau, section locale 578 et Commission scolaire Marie-Victorin, sentence de Me Richard Guay du 15 juin 2012.

C)        RÉPLIQUE

 

[62]        Quant à l'argument voulant que le plaignant ne se soit pas absenté plus de six jours ouvrables consécutifs, Monsieur Camil Tremblay a témoigné que le jour où le plaignant s'est présenté le 28 mars au travail, il n'a pas fait de changement d'huile et il n'était pas habillé pour le travail. On n'est pas dans le cas d'un salarié bien intentionné à qui il faudrait donner une chance.

 

 

MOTIFS ET DÉCISION

 

 

[63]        La décision de l'Employeur est fondée sur l'article 5.05 (5) de la convention collective précitée. La jurisprudence arbitrale enseigne que ce type de disposition doit être interprétée de façon restrictive à l'égard de l'Employeur : Syndicat des métallos, section locale 7625 et Uniboard Canada inc., précitée, au paragraphe 23 :

 

« [23]        Bref, ce n'est pas parce que la sanction est prévue à la convention collective que la faute reprochée au salarié devient non-disciplinaire. Nous restons indubitablement en matière de faute disciplinaire et l'arbitre doit apprécier dans ce cadre les actions portées à son attention bien qu'il n'ait pas le choix de la sanction. S'applique ici le passage suivant de la sentence Gamma industries ( VITRIERS, TRAVAILLEURS DU VERRE, S.L. 1135 DU SYNDICAT INTERNATIONAL DES PEINTRES ET MÉTIERS CONNEXES -et- GAMMA INDUSTIRES INC. [2002] r.j.d.t. 1358 , AZ02141221 , D.T.E. 20021-863, l'arbitre Jean Gauvin)

 

« 5-  Une disposition comme celle faisant l'objet de la clause 8.04 (a) de la convention collective en raison de son effet draconien parce qu'entraînant pour le salarié la perte de son emploi, doit recevoir une interprétation plus favorable au salarié qu'à son employeur, donc restrictive à l'endroit de ce dernier. Or, une telle interprétation oblige l'arbitre à agir avec équité et justice en prenant en compte toutes les circonstances qui peuvent expliquer et justifier le comportement du salarié, établir sa bonne foi et démontrer le caractère déraisonnable d'une application sans nuance et étriquée du libellé de cette clause. »

 

[64]        Bien que la clause ne fasse état que de la perte d'ancienneté, la jurisprudence arbitrale citée par le procureur patronal fait clairement ressortir que la perte d'ancienneté entraîne la perte d'emploi malgré le fait que la convention collective n'en fasse pas expressément mention : Union des employés et employées de service, section locale 800 FTQ et Canmec Industriel inc., précitée.

 

[65]        Ceci étant dit, la question à laquelle le tribunal doit répondre est la suivante : Monsieur Éric Castonguay s'est-il absenté plus de six jours ouvrables consécutifs sans aviser son Employeur et sans avoir de motifs raisonnables de ne pas l'avoir fait ?

 

[66]        Une partie de la preuve a porté sur un avis qui avait été donné pour le 26 mars par l'entremise de Monsieur Thompson. Or, la preuve syndicale sur cet avis ne résiste pas à l'analyse qu'en a faite le procureur de l'Employeur dans son argumentation. Et pour les mêmes motifs, le Tribunal est d'avis qu'aucun avis n'a été donné pour le 26 mars 2012.

 

[67]        Ainsi, pendant six jours le plaignant n'a pas avisé son Employeur de son absence. La convention collective exige toutefois plus de six jours d’absence. Or, le plaignant s'est présenté au travail le 28 mars. Ce fait est indiscutable selon la pièce E-2.

 

[68]        L'affirmation de Monsieur Camil Tremblay que le plaignant se soit présenté au travail dans ses habits de tous les jours et non en portant les vêtements de travail identifiés à Toyota n’est pas fatale. Monsieur Dany Fortin a témoigné que Monsieur Castonguay s'est présenté au travail ce jour-là et qu'informé de ce fait, il a demandé à ce que le plaignant vienne à son bureau. Monsieur Fortin lui a demandé de justifier ses absences ce que le plaignant a fait en allant chercher l'attestation médicale S-8 dans son véhicule et en précisant avoir vu un médecin la veille. Monsieur Castonguay a déposé le document sur le bureau de Monsieur Fortin qui l'a regardé vaguement précisant que le document n'était pas une justification pour les autres journées d'absence. Monsieur Fortin a refusé de recevoir le document et a demandé au plaignant de quitter les lieux et qu'il serait contacté ultérieurement. Monsieur Castonguay a obtempéré, fâché.

 

[69]        Monsieur Fortin avait tout à fait raison d'affirmer que le dépôt d'une attestation médicale le 28 mars 2012 ne constituait pas une justification valable au défaut d'avis pour les jours précédents. La sentence de notre collègue Me François Hamelin dans Messagerie A.D.P. inc. c. Syndicat international des communications graphiques, section locale 555 Montréal, précitée, est très éloquente à ce sujet et fort bien documentée en autorités jurisprudentielles.

 

[70]        Toutefois, même si le Tribunal arrive à la conclusion que le plaignant n'a pas avisé pour chacune des six journées ouvrables d'absence et que l'attestation médicale montrée le 28 mars 2012 ne justifie pas le défaut d'avis, un fait matériel s'impose : Monsieur Castonguay est présent au travail le 28 mars 2012, la 7 e journée de sorte qu'il ne s'est pas absenté plus de six jours ouvrables consécutifs. Il était présent au début du quart de travail ce qui interrompait le calcul du délai permettant à l'Employeur de mettre en œuvre la sanction prévue à la clause 5.05 (5) de la convention collective.

 

[71]        La situation aurait pu être bien différente si le plaignant s'était présenté au travail le 28 mars 2012 à 10h au lieu d'être présent à 7h30. Il se serait alors absenté plus de six jours ouvrables consécutifs de sorte que le Tribunal n'aurait eu aucune discrétion pour substituer une autre décision à celle de l'Employeur. Or, les faits reprochés ne permettent pas d'appliquer la sanction convenue à la clause 5.05 (5) de la convention collective de sorte que le Tribunal n'a aucune discrétion, il doit accueillir le grief.

 

 

 

POUR CES MOTIFS , le tribunal :

 

FAIT DROIT au grief;

 

ANNULE la décision de l'Employeur de faire perdre à Monsieur Éric Castonguay son ancienneté;

 

ORDONNE la réintégration de Monsieur Éric Castonguay dans son poste dans les 15 jours de la présente sentence;

 

ORDONNE à l'Employeur, Rocoto Ltée, de rembourser au plaignant tout le salaire dont il a été privé déduction faite des sommes gagnées dans un autre emploi, le tout avec intérêt au taux prévu au Code du travail;

 

RÉSERVE COMPÉTENCE pour fixer l'indemnité due au plaignant si demande lui en est faite par l'une ou l'autre des parties.

 

 

                                                                      

                                                                                          Me Marcel Morin

                                                                                     Arbitre de griefs C.A.Q.

 

 

 

 

Pour le Syndicat :        Monsieur Raynald Ferland

 

 

Pour l’Employeur :      Me Denis Bonneville

 

 

Dates d’audience :     2 et 27 novembre 2012