Fortin c. Aurel Harvey & Fils inc. |
2013 QCCQ 1472 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE CHARLEVOIX LOCALITÉ DE LA MALBAIE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
240-32-000324-124 |
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DATE : |
1 er mars 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q. (JL 4155) |
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JEAN FORTIN , […], Clermont (Québec) […]
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Demandeur |
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c.
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AUREL HARVEY & FILS INC. , 555, rue St-Étienne, La Malbaie (Québec) G5A 1J3
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Jean Fortin (M. Fortin) réclame 3 200,00$ à Aurel Harvey & Fils inc. (Aurel Harvey), à titre de loyer pour un dépôt de pierres sur son terrain (3 000,00$) et pour le bris d'une clôture (200,00$).
[2] Aurel Harvey conteste la réclamation et nie avoir déposé ou entreposé des pierres ou des roches sur le terrain de M. Fortin de même que d'avoir endommagé sa clôture.
LES FAITS
[3] Les parties sont propriétaires d'immeubles contigus.
[4] Aurel Harvey exploite une carrière sur sa propriété. Le terrain de M. Fortin est pour une bonne partie boisé et pour l'autre partie en culture.
[5] À l'aide de photographies qu'il a prises (P-3) , M. Fortin explique au Tribunal que Aurel Harvey a déposé des roches sur son terrain en 2011, qu'une partie a été enlevée en avril 2012 et qu'il en reste encore.
[6] Il soutient aussi que Aurel Harvey, avec sa déneigeuse, a endommagé sa clôture qui sépare sa propriété du chemin public, le long du chemin des Lacs.
[7] Ce bris survenu à l'hiver 2010-2011 a dû être réparé par M. Fortin qui y a consacré quatre heures d'ouvrage au printemps 2011. Il réclame 50,00$ de l'heure.
[8] Bernard Harvey (M. Harvey), le représentant de Aurel Harvey, déclare qu'à la suite d'un litige avec M. Fortin en 2001 ou 2002, relativement à l'exploitation de la carrière, Aurel Harvey a fait piqueter son terrain par un arpenteur-géomètre et il réfère le Tribunal au certificat de piquetage de Ghislain Tremblay, arpenteur-géomètre, daté du 1er novembre 2002 (D-5) .
[9] Deux photographies (D-4) permettent de voir distinctement la présence de piquets rouges délimitant les terrains des parties, piquets correspondant aux repères d'arpentage piquetés les 29 et 30 octobre 2002.
[10] Ces mêmes photographies, prises au printemps 2012, permettent de voir un amas de roches sur le terrain de Aurel Harvey, juste à côté de la ligne séparative des lots mais aucun amas de pierres ou de roches sur le terrain de M. Fortin.
[11] M. Harvey ajoute qu'il n'y a jamais eu de roches au-delà des piquets rouges et les dommages à la clôture de M. Fortin ont été causés par des tiers puisqu'elle est proche de la route.
DISCUSSION ET DÉCISION
[12] M. Fortin ne peut réclamer du loyer impayé de Aurel Harvey puisqu'il n'y a pas de bail entre les parties. Il s'agit ici plutôt d'une réclamation en dommages pour dépôt sans droit de pierres sur son terrain. La victime d'un abus de droit de voisinage peut exiger une compensation pour le dommage subi.
[13]
Les articles
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.
[14] C'est à celui qui veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention et cette preuve doit être prépondérante.
[15] M. Fortin doit donc prouver que Aurel Harvey a utilisé sans droit son terrain et qu'il en subit un préjudice. Il doit aussi prouver que Aurel Harvey est bien l'entreprise qui a endommagé sa clôture.
[16] M. Fortin affirme que Aurel Harvey a déposé des pierres chez lui et a endommagé sa clôture. M. Harvey affirme le contraire.
[17] M. Fortin ne s'est pas déchargé de son fardeau de preuve.
[18] La preuve ne permet pas d'établir de façon prépondérante qu'un amas de roches ou de pierres s'est retrouvé sur le terrain de M. Fortin en 2011 et 2012.
[19] Aussi, les photographies que celui-ci a produites ne sont pas très explicites et ne démontrent rien qui puisse appuyer cette prétention. Au contraire, celles produites par Aurel Harvey sont très explicites mais elles datent d'avril 2012.
[20] Le professeur Léo Ducharme, dans son livre Précis de la preuve , écrit :
« S'il est nécessaire de savoir sur qui repose l'obligation de convaincre, c'est afin de pouvoir déterminer qui assume les risques de l'absence de preuve. En effet, si par rapport à un fait essentiel la preuve offerte n'est pas suffisamment convaincante ou encore si la preuve est contradictoire et que le juge est dans l'impossibilité de déterminer où se situe la vérité, le sort du procès va se décider en fonction de la charge de la preuve : celui sur qui reposait l'obligation de convaincre perdra. ». [1]
(Références omises)
[21] Considérant la preuve contradictoire quant à la présence de pierres sur son terrain et l'impossibilité pour le Tribunal de déterminer où se situe la vérité, le Tribunal conclut que la demande de M. Fortin, qui avait l'obligation de convaincre, ne peut réussir sur ce point.
[22] M. Fortin n'a pas non plus réussi à démontrer de façon prépondérante la responsabilité de Aurel Harvey pour le bris de sa clôture qui peut avoir été causé par des tiers. Rien ne permet de relier Aurel Harvey à ce bris.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
REJETTE la demande du demandeur.
CONDAMNE le demander à payer à la défenderesse les frais judiciaires fixés à 169,00$.
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DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q . |
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Date d’audience : |
11 juin 2012 |
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