Grenier et Québec (Ministère des Ressources naturelles) |
2013 QCCFP 5 |
COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DOSSIER N o : |
1301122 |
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DATE : |
27 mars 2013 |
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DEVANT LE COMMISSAIRE : |
M e Robert Hardy |
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PHILIPPE GRENIER
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Appelant
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Et
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MINISTÈRE DES RESSOURCES NATURELLES
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Intimé |
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DÉCISION |
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(Article
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[1] Ingénieur forestier à la Direction régionale de la Mauricie et du Centre-du-Québec, du ministère des Ressources naturelles (ci-après le « MRN »), M. Philippe Grenier a interjeté appel, en date du 21 décembre 2012, de la décision du ministère à l’étape de la vérification de son admissibilité, de ne pas retenir sa candidature au concours (I-1) de promotion à un emploi de cadre, classe 3 [1] , pour pourvoir d’éventuels emplois de ce type, refus qui lui avait été communiqué par lettre du 5 novembre précédent.
[2] Dans son appel, M. Grenier prétend que ses expériences dans le secteur privé n’ont pas été considérées à leur juste valeur et qu’elles répondent, selon lui, aux critères d’admission du concours.
[3]
Le 16 janvier 2013, la procureure du MRN a informé la Commission qu’elle
entendait soulever un moyen préliminaire quant à la recevabilité de l’appel. Le
motif de l’objection est que M. Grenier n’a pas interjeté son appel dans le
délai légal de 15 jours ouvrables à compter de l’expédition de l’avis
l’informant qu’il n’était pas admissible au concours, délai prévu à l’article
[4] M. Grenier avait été prévenu de l’objection et les parties ont été entendues seulement sur cette question dont dispose maintenant cette décision.
[5] Les parties sont d’accord pour constater que si le délai de 15 jours ouvrables suivant le 5 novembre est applicable comme le prétend le MRN, il venait à échéance le 26 de ce mois-là.
[6]
Dans ce contexte et dans celui de toutes les circonstances de l’affaire
qui sont énoncées ci-après, la question en litige au stade du moyen
préliminaire est de déterminer si M. Grenier a droit à une prorogation de délai
parce qu’il aurait été dans l’impossibilité d’agir plus tôt, et ce, au sens de
l’article
[7] Au début de sa preuve, la procureure du MRN dépose un extrait de la brochure intitulée « Les recours devant le tribunal » et publiée par la Commission, où on peut lire, en page 5, ce qui suit :
« Quel est le délai pour faire appel ?
La Commission doit recevoir votre appel dans les 15 jours ouvrables suivant la date de l’expédition de la décision que vous voulez contester. Il est impératif que votre appel soit reçu à la Commission dans ce délai, même si vous avez présenté une demande de révision de votre dossier au responsable du concours ou de la réserve de candidatures. »
[8] La procureure dépose également un autre extrait, cette fois du site Internet de la Commission, où dans la rubrique « Foire aux questions » l’on retrouve un message similaire :
« 8. Quel est mon recours si j’ai participé à un concours de promotion ou à une réserve à la promotion ?
Si vous êtes fonctionnaire régulier, que vous avez participé à un concours de promotion ou à une réserve et que vous estimez que la procédure utilisée pour l’admission ou l’évaluation des candidats a été entachée d’une illégalité ou d’une irrégularité, vous pouvez faire appel devant la Commission.
Votre appel doit être reçu à la Commission dans un délai de 15 jours ouvrables à compter de la date de l’expédition de la décision que vous contestez. Le fait d’entreprendre des démarches auprès de la personne responsable du concours ou à une réserve n’a pas pour effet de suspendre ce délai. Il est donc important de déposer votre appel dans le délai prescrit pour préserver vos droits [2] . »
[9] Puis, M me Mylène D’Amours, conseillère en gestion de ressources humaines à la Direction générale adjointe des ressources humaines (ci-après la « DGARH »), au MRN et responsable du concours, explique le fil des événements liés au traitement de la candidature de M. Grenier et pertinents à son appel.
[10] Dans la lettre du 5 novembre 2012 (I-2) à M. Grenier qu’elle dépose, outre le fait que sa candidature n’était pas retenue, y étaient mentionnées entre autres les informations suivantes :
« Nous vous rappelons qu’en vertu de l’article
La date limite pour les demandes d’information ou de révision concernant votre candidature est le 23 novembre 2012. Après cette date, aucune demande ne sera considérée. Veuillez formuler votre requête par courrier électronique à l’adresse suivante : michelle.drolet@mrn.gouv.qc.ca en indiquant le numéro de concours 633D-6003047 dans l’objet de votre message. »
[11] Une lettre similaire a également été adressée à quelque 60 autres candidats, sur environ 120, qui n’ont pas non plus été admis.
[12] Le 14 novembre, elle a reçu un appel de M. Grenier, alors en désaccord avec la décision du comité du concours qui avait évalué sa candidature. Il voulait, dit-elle, faire valoir verbalement auprès d’elle qu’il avait des expériences qui pouvaient être évaluées différemment. Elle lui a mentionné que ce n’était pas elle qui prenait la décision, mais le comité d’évaluation et qu’il devait faire parvenir ses informations complémentaires, par courriel, à l’adresse indiquée dans la lettre du 5 novembre pour qu’elle puisse faire le point avec le comité afin que celui-ci fasse la révision de son offre de service.
[13] Lorsque la procureure du MRN lui demande si elle avait abordé avec M. Grenier la question de la distinction entre le délai pour faire appel et la révision, M me D’Amours répond :
« Non. J’ai demandé à M. Grenier de faire parvenir ses documents tel qu’indiqué dans la lettre. Je n’ai pas relu le contenu de la lettre du 5 novembre, mais je l’ai référé à la lettre. »
[14] Le 23 novembre 2012, M. Grenier a fait parvenir au MRN un document de cinq pages fournissant des précisions sur ses emplois dans le secteur privé. Dans sa lettre de présentation du document (I-3), adressée à M me D’Amours, M. Grenier mentionnait ceci :
« À la suite de la réception de votre lettre du 5 novembre 2012, et tel que discuté lors de notre conversation téléphonique de la semaine dernière, la présente vous est transmise afin de demander une réévaluation de mon dossier de candidature pour le concours de classe 3 portant le numéro 633D-6003047.
Ci-jointes, vous trouverez les précisions nécessaires concernant mes expériences et implications professionnelles pertinentes à l’évaluation des activités que j’ai exercées dans l’entreprise privée entre 1997 et 2010.
Étant convaincu que ces éléments sauront démontrer la pertinence de mon expérience en terme d’activités d’encadrement de niveau équivalent ou supérieur à celui de la classe 5, je demeure disponible pour répondre à toute question au sujet de mon cheminement professionnel. »
[15] Le même jour, M me Drolet, technicienne en administration de la direction de la dotation de la DGARH, accusait réception du document par courriel à M. Grenier, en lui disant qu’elle le faisait suivre au comité d’évaluation et qu’elle lui revenait sur le sujet dès que possible.
[16] Enfin, le 18 décembre 2012, M me D’Amours informait, par courriel (I-3), M. Grenier que le comité avait donné suite à sa demande de révision, qu’il n’avait pas évalué que les expériences précisées dans son document du 23 novembre étaient du niveau de la classe 5 et qu’il maintenait en conséquence sa décision qui lui avait été transmise le 5 novembre.
[17] Pour sa part, M. Grenier raconte que son emploi est localisé à la direction régionale de Trois-Rivières. Il était en vacances à l’extérieur du pays pour deux semaines lors de la publication de l’avis de concours et il avait demandé à M me Mireille Bordeleau, « qui est responsable des ressources humaines à notre bureau régional du ministère à Trois-Rivières », d’envoyer sa candidature au cas où il surviendrait un concours. C’est ce qu’elle a fait en temps utile, alors que lui-même n’est revenu au pays que le 14 octobre, soit la veille de la dernière journée de la période d’inscription.
[18] Selon M. Grenier, M me Bordeleau est la personne, au niveau de leur direction régionale, qui s’occupe des embauches, des concours, et qui fait des entrevues. Il croit qu’elle est technicienne, mais il n’est pas sûr si c’est bien son corps d’emplois.
[19] Le 15 octobre, elle lui a dit avoir transmis sa candidature au concours et qu’il serait intéressant qu’il communique avec M me D’Amours pour préciser des choses étant donné que c’était un curriculum vitae plutôt standard qui avait été envoyé.
[20] Dans la même semaine, M. Grenier dit avoir laissé un message dans la boîte vocale de M me D’Amours, mentionnant que s’il y avait besoin de précisions ou si sa candidature était incomplète, ils pourraient en discuter, mais sans nécessairement lui demander de le rappeler.
[21]
Quand
il a reçu la lettre du 5 novembre, il est allé lire l’article
[22] Selon lui, il a parlé avec M me D’Amours du rejet de son offre de service, notamment qu’il ne s’y trouvait pas d’indications que les emplois qu’il avait occupés comportaient des tâches de niveau équivalent à celui de la classe 5, et ce, parce que le document envoyé en son absence n’avait pas beaucoup de détails.
[23] C’est à ce moment-là qu’il a été discuté, comme l’a exposé M me D’Amours, de la possibilité d’envoyer des informations supplémentaires par écrit, et ce, pour le 23 novembre, la date mentionnée dans la lettre.
[24] Le 22 novembre, en relisant son dossier et avant d’envoyer son document explicatif, il a discuté à nouveau avec M me Bordeleau concernant la lettre du 5 novembre et lui a demandé son avis sur les deux paragraphes qui lui semblaient détachés l’un de l’autre, l’un demandant de faire appel à la Commission si on jugeait qu’il y avait un litige en vertu de l’article 35, l’autre demandant une révision.
[25] La question était de savoir s’il y avait nécessité d’envoyer à la fois une demande de révision aux ressources humaines du MRN et une demande d’appel à la Commission.
« À ma compréhension et à l’avis de M me Bordeleau, on n’était pas encore dans une situation d’irrégularité ou d’illégalité, on poursuivait le cheminement jusqu’à tant qu’on ait une réponse finale sur l’évaluation du dossier. »
Et encore :
« Je me suis dit : "Est-ce qu’il faut quand même envoyer une demande d’appel à la Commission, au cas où ?" C’est cette discussion-là qu’on a eu moi et M me Bordeleau. On en est arrivé les deux que ce n’était pas nécessaire. C’est comme cela que ça s’est passé. »
[26] À un autre moment, quand on lui demande s’il est bien certain que c’est ce que M me Bordeleau lui a répondu, M. Grenier dit que oui et qu’elle pourrait le reconfirmer.
[27] Interrogé pour savoir si M me Bordeleau lui avait suggéré alors d’appeler M me D’Amours, sa réponse est négative. La fois qu’elle lui avait dit de faire cette démarche, c’était à son retour de vacances, au 15 octobre, pour qu’il fasse part qu’il pouvait, au besoin, fournir des précisions relativement à certains emplois dont traitait son offre de service, soit la teneur du message qu’il a alors laissé dans la boîte vocale de M me D’Amours.
[28] M. Grenier ajoute au sujet de sa discussion avec M me Bordeleau du 22 novembre :
« Moi, j’étais déjà assez sûr de ma compréhension. Si j’avais insisté en lui disant : "Êtes-vous sûre ? Êtes-vous sûre ? Êtes-vous sûre ?" peut-être qu’elle m’aurait dit d’appeler aux ressources humaines. »
[29] Le 23 novembre, il a envoyé son document, a reçu le même jour l’accusé de réception de M me Drolet, puis, mardi, le 18 décembre, est arrivé le courriel lui annonçant que le comité d’évaluation maintenait sa décision initiale.
[30] Vendredi suivant, le 21 décembre, il a discuté à nouveau avec M me D’Amours pour connaître les raisons pour lesquelles on avait rejeté encore une fois sa candidature malgré les renseignements additionnels qu’il avait fournis. À cette occasion-là, M me D’Amours lui a parlé des deux options, l’appel et la révision, lui mentionnant qu’il y avait un délai de 15 jours pour inscrire le premier. Il a compris alors, disant même qu’il lui a été suggéré, que c’était la façon de faire pour obtenir une séance d’échanges et d’information portant sur son dossier et que par ailleurs il n’y avait pas possibilité de demander une révision additionnelle à celle à laquelle il avait eu droit. Le même jour, il a alors transmis son appel à la Commission. Au dossier du greffe, sont présentes deux copies de l’appel : une reçue par courriel le 21 décembre 2012 et une autre reçue par la poste le 3 janvier 2013.
[31] En complément de sa preuve, le MRN demande de faire réentendre M me D’Amours, sans indiquer souhaiter faire comparaître M me Bordeleau. Appelée à nouveau à témoigner, d’abord en rapport avec la question de l’échange entre M. Grenier et M me Bordeleau, M me D’Amours mentionne que les concours de promotion ne sont pas lancés à partir des régions, mais de la DGARH. Elle dit connaître très bien M me Bordeleau, mais elle ne sait pas si elle a des fonctions de technicienne ou d’agente de bureau. Elle explique son rôle comme suit :
« Il y a des bureaux administratifs du ministère dans toutes les régions du Québec. M me Bordeleau est la personne intermédiaire entre les gestionnaires de la région et la DGARH. Dans les régions, il n’y a pas de conseillère en gestion des ressources humaines. Ce sont des techniciens ou des agents de bureau qui exercent des responsabilités ou des rôles de support au niveau des ressources humaines. Pour nous, au niveau des régions, ce sont des intermédiaires. Leur rôle est un peu de soutenir les gestionnaires, de faire le pont entre la DGARH et les gestionnaires ou le personnel qui sont en région. Mais ce ne sont pas des gens qui sont en ressources humaines. Donc, tout ce qui est concours ou décision en lien avec les ressources humaines est pris soit par le gestionnaire, soit par la DGARH. »
[32] M me D’Amours n’a pas un souvenir précis de sa conversation du 21 décembre 2012 avec M. Grenier et elle dit, sans ne pouvoir jurer de rien, qu’il est possible qu’elle lui ait mentionné que l’appel à la Commission était un recours, ou encore qu’il ait été question que la Commission était un forum pour des échanges. Mais elle ajoute qu’elle serait très surprise de l’avoir invité à faire un appel à ce moment-là, car elle savait très bien qu’il était hors délai.
[33]
La
procureure du MRN souligne que l’appel de M. Grenier a été interjeté suivant
l’article
[34] En moyen préliminaire à l’audition de l’appel, il est demandé à la Commission de constater que l’appel a été reçu tardivement par la Commission, soit le 21 décembre 2012, en conséquence de quoi l’appel doit être rejeté.
[35] La procureure réfère d’abord aux extraits de la brochure et du site Internet de la Commission en indiquant que le délai applicable y était bien indiqué et qu’il était loisible à M. Grenier d’en prendre connaissance.
[36]
Référant
à l’article
[37] La procureure renvoie la Commission à ce passage de la décision Moisescu , souvent cité, notamment dans les affaires Marine et Godbout [3] :
« La Commission s’est prononcée à de nombreuses reprises sur cet article 120 et considère que l’impossibilité dont il est fait mention dans cet article est une "impossibilité relative qui fait en sorte qu’un appelant puisse raisonnablement se considérer dans l’impossibilité d’agir malgré la diligence qu’il a manifestée" […] . Elle a aussi précisé que l’ignorance d’un recours ne constituait pas une impossibilité d’agir […] alors que le fait d’être induit en erreur quant à ses droits par un représentant d’un ministère pouvait y être assimilé […] ».
[38] La procureure réfère également à la décision Grégroire [4] dans laquelle la Commission disait qu’un « appelant ne devait cependant pas invoquer sa propre turpitude », s’appuyant en cela sur l’affaire Cité de Pont Viau [5] entendue par la Cour suprême, qui avait donné les exemples ci-après de cas où il ne serait pas approprié d’accorder une prorogation de délai :
« Il est facile de concevoir des cas où, par un exercice judicieux de cette discrétion, la Cour d’appel refuserait d’accorder la permission spéciale d’appeler alors que demande lui en a été faite dans les six mois du jugement par une partie qui a démontré "qu’elle a été, en fait, dans l’impossibilité d’agir plus tôt". Il en serait ainsi, si l’appel était manifestement futile ou vexatoire ou si la partie s’était elle-même placée par suite de son incurie coupable dans l’impossibilité d’agir plus tôt. »
[Nous soulignons]
[39] Sont soumises encore à la Commission, les décisions Leclerc et al. et Demers et al. [6] qui ont référé aux mêmes principes sur l’impossibilité d’agir.
[40] La procureure applique ces principes à la situation de M. Grenier pour suggérer que bien qu’il ait fait certaines démarches durant la période disponible pour faire son appel, notamment en échangeant avec M me D’Amours le 14 novembre, il ne lui a pas demandé à ce moment-là quelle était la distinction entre l’appel et la demande de révision. Il n’a pas alors été induit en erreur par la responsable du concours sur la façon d’exercer son recours. Dans leur conversation de ce jour-là sur la révision de son dossier, elle lui a dit de procéder comme c’était indiqué dans la lettre du 5 novembre, là où c’était mentionné explicitement comment il fallait faire.
[41] Le droit d’appel appartient au candidat et la façon de l’exercer était décrite dans la lettre du 5 novembre, comme elle l’est dans la brochure et dans le site Internet de la Commission. La procureure souligne que celle-ci précise même qu’il est impératif que l’appel soit reçu dans les 15 jours ouvrables de la décision même si on demande la révision de celle-ci.
[42] Pour la procureure, la lettre est claire : un paragraphe sur le droit d’appel et le suivant qui présente la façon d’exercer une demande de révision, en précisant la date limite pour le faire. Si pour M. Grenier, ce n’était pas clair, il fallait qu’il demande à M me D’Amours, la personne qui avait signé la lettre, la responsable du concours. Or, celle-ci dit qu’il ne lui a pas demandé la distinction entre les deux paragraphes.
[43] M. Grenier a préféré poser la question à M me Bordeleau qui est un tiers, comme tout autre tiers, par rapport au concours, lequel est mené par la DGARH. Pour la procureure, M me Bordeleau n’est pas une représentante de l’employeur en matière de concours. Elle devait se valider auprès des ressources humaines ou diriger M. Grenier vers la responsable du concours. Elle n’avait pas à se prononcer là-dessus. Il appartenait à M. Grenier de vérifier la nature de son droit d’appel, les conditions de son exercice conformément à la Loi, et ce, auprès de la bonne personne, ce qu’il n’a pas fait.
[44] Sur la notion d’induire en erreur, la procureure du MRN cite la décision Bessette [7] dans laquelle il a été constaté qu’il n’y avait pas d’obligation légale d’informer un candidat des recours disponibles :
« La Commission a également décidé à plusieurs reprises qu’un ministère ou un organisme qui tient un concours n’a pas une obligation légale d’informer un candidat qu’il possède un recours en appel à la Commission mais que, par ailleurs, s’il l’en informe, il ne peut l’induire en erreur […] . Toutefois, la Commission ne peut qu’encourager fortement les représentants de l’autorité qui tient un tel concours à donner à un candidat qui leur manifeste son insatisfaction relativement à son admissibilité ou à ses résultats, toute l’information pertinente, y compris et au premier chef, son recours en appel auprès de la Commission et le délai pour l’exercer. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un devoir légalement sanctionnable par la Commission, on pourrait s’attendre d’un représentant de l’État qu’en tout temps, il fournisse des services de qualité et agisse avec transparence et impartialité. Par conséquent, il apparaîtrait que de donner à un candidat à un concours de promotion une information complète et utile sur ses recours à la Commission ou, minimalement, le référer à celle-ci afin qu’elle l’en informe, constituerait une contribution positive à l’atteinte de ces objectifs de l’administration publique. »
[45] Sont déposées trois autres décisions, dans les affaires Coulombe , Desjardins et al. et Montminy [8] , qui établissent qu’une demande de révision d’une décision concernant l’admissibilité « ne peut servir de point de départ à la prescription du recours en appel à la Commission », la décision Coulombe précisant en plus l’exception d’à moins que la réponse obtenue à la suite de cette révision modifie la décision d’origine.
[46]
Enfin,
la procureure renvoie la Commission à trois dernières décisions de celle-ci,
Duguay
,
Houle et al.
et
Tremblay
[9]
,
qui ont rappelé que l’ignorance de la loi ne constitue pas une impossibilité
d’agir au sens de l’article
[47] En conclusion, la procureure du MRN demande à la Commission de déclarer l’appel de M. Grenier irrecevable et de le rejeter.
[48] M. Grenier rappelle d’abord les éléments suivants de son témoignage :
- Avant de partir en vacances, il avait demandé à M me Bordeleau de faire parvenir son offre de service standard au cas où surviendrait un concours;
-
Quand
il a reçu la lettre du 5 novembre, il est allé lire l’article
- Il a parlé à M me D’Amours le 14 novembre et la conversation a porté sur les informations pertinentes additionnelles qu’il pouvait fournir et elle lui a mentionné que la demande de révision était la procédure à suivre;
- En décembre, lorsqu’il a su que la révision n’avait pas mené à une décision différente, il a réagi rapidement. Il a discuté à nouveau avec M me D’Amours le 21 décembre et interjeté appel le même jour.
[49] Il plaide que lors de l’échange téléphonique du 14 novembre avec M me D’Amours, il n’a pas été fait mention du site Internet ou d’un autre document relié à la procédure d’appel. De plus, le 21 décembre, on ne lui a pas dit non plus que le délai pour faire son appel était épuisé. Il a plutôt compris qu’il fallait qu’il interjette appel pour pouvoir obtenir la séance d’échanges et d’information qui allait lui permettre de comprendre pourquoi le comité d’évaluation avait refusé sa candidature.
[50] M. Grenier fait remarquer par ailleurs que le libellé de l’article 35 est à l’effet que pour interjeter appel, il faut « une demande écrite qui doit être reçue à la Commission dans les 15 jours ouvrables de l’expédition d’un avis l’informant qu’il n’est pas admissible au concours » et il insiste sur l’utilisation par le législateur de l’article « un », article indéfini, et non de l’article « l’ », article défini.
[51] Or, soutient-il, dans son dossier, il y a eu deux avis qu’il n’était pas admissible : la lettre du 5 novembre et le courriel du 18 décembre et, lui, il a envoyé son appel le 21 décembre, reçu le même jour par la Commission, dans le délai de 15 jours ouvrables du second avis.
[52] En appui à cet argument, M. Grenier mentionne qu’en mai 2012, un projet de loi modifiant la Loi sur la fonction publique [10] a été déposé à l’Assemblée nationale. Or, ce projet de loi venait modifier l’article 35 pour notamment remplacer l’article « un » par « l’ ». Bien que le projet de loi n’ait pas été adopté avant l’ajournement de la session pour l’été et ni par la suite, M. Grenier dit se sentir conforté dans son opinion, par cette modification envisagée, que l’article 35, dans son libellé actuel, peut référer à plus d’un avis.
[53] Sur le plan de la jurisprudence, M. Grenier réfère la Commission à la décision Bessette , en insistant sur le passage, également relevé par la procureure du MRN, qui fait état qu’elle ne peut qu’encourager le représentant de l’autorité d’un concours à bien informer les candidats.
[54] M. Grenier conclut en demandant de rejeter le moyen préliminaire du MRN et d’ordonner la tenue d’une séance d’échanges et d’information. Il lui est expliqué par la Commission que la décision à rendre ne peut porter que sur l’acceptation ou le rejet du moyen préliminaire.
[55] La procureure du MRN rappelle qu’il n’y a pas eu deux décisions dans le dossier de M. Grenier, il n’y a eu que celle annoncée dans la lettre du 5 novembre 2012. Le courriel du 18 décembre ne constitue pas une seconde décision, car elle ne modifie pas la décision initiale.
[56] Pour elle, la Loi est à la base de tout et nul n’est censé ignorer la loi.
[57] M. Grenier a interjeté appel de la décision du MRN de ne pas l’admettre au concours de promotion visant à constituer un bassin de candidatures de personnes aptes à pourvoir d’éventuels emplois réguliers de cadre, classe 3, au ministère.
[58]
Son
droit d’appel est prévu par l’article
« Un candidat peut, s’il estime que la procédure utilisée pour l’admission ou l’évaluation des candidats, lors d’un concours de promotion ou lors de la constitution d’une réserve de candidatures à la promotion [11] , a été entachée d’une irrégularité ou d’une illégalité, interjeter appel devant la Commission de la fonction publique, par une demande écrite qui doit être reçue à la Commission dans les 15 jours ouvrables de l’expédition d’un avis l’informant qu’il n’est pas admissible au concours, à la réserve de candidatures ou à l’examen ou l’informant des résultats de ceux-ci.
Les éléments d’un moyen d’évaluation qui ont fait l’objet d’une certification en vertu du troisième alinéa de l’article 115 ne peuvent être contestés lors de l’appel. »
[59] De façon préliminaire, le MRN s’oppose à l’audition sur le fond de l’appel de M. Grenier parce qu’il serait évident que sa demande, reçue par la Commission le 21 décembre 2012, est tardive : la décision pertinente lui a été adressée le 5 novembre 2012 et il s’est écoulé bien davantage que 15 jours ouvrables entre cette date et le 21 décembre 2012. De fait, il est convenu qu’en principe le délai expirait plutôt le 26 novembre 2012.
[60]
Toutefois,
l’article
« La Commission peut proroger un délai fixé par la loi lorsqu’elle considère qu’un fonctionnaire a été dans l’impossibilité d’agir plus tôt ou de donner mandat d’agir en son nom dans le délai prescrit. »
[61] La Commission doit donc décider si dans le cas de M. Grenier il est opportun de proroger le délai dont il disposait pour faire son appel.
[62] L’adage « Nul n’est censé ignorer la loi », sur lequel le MRN fonde en partie son argumentation, est une maxime qui remonte au moins au droit romain [12] d’où origine, en passant par le droit français, notre propre droit civil. C’est un principe de base sans l’application duquel il serait difficile de faire respecter les lois, tout un chacun pouvant y échapper en prétendant qu’il n’en connaît pas les règles.
[63]
Mais
pour la Commission, il ne s’agit pas ici d’un cas d’ignorance de la loi. M.
Grenier connaissait l’existence de l’article 35 et davantage. Il savait par
exemple qu’il lui était loisible de mandater quelqu’un pour soumettre sa
candidature à un concours susceptible d’être annoncé pendant son absence. De
plus, après avoir reçu la lettre du 5 novembre, il dit être allé prendre
connaissance de l’article 35, et ce, avant l’expiration de délai du 26
novembre. Dans ces circonstances, les décisions
Duguay
,
Houle et al.
et
Tremblay
soumises pour faire état de l’adage précité, sont à écarter.
Le litige dans cette affaire est un cas d’application de l’article
[64] Dans la lettre du 5 novembre, le MRN informait M. Grenier non seulement que sa candidature n’avait pas été retenue mais également de deux options qui s’offraient à lui. Il pouvait interjeter appel suivant l’article 35, et ce, par une demande écrite qui devait être reçue dans les 15 jours ouvrables de l’expédition de l’avis qu’il venait de recevoir. On l’informait par ailleurs que la date limite pour les demandes d’information ou de révision concernant sa candidature était le 23 novembre 2012 et qu’après cette date aucune demande ne serait considérée.
[65] Selon le MRN, les deux paragraphes de la lettre étaient clairs. Selon M. Grenier, la lettre ne l’était pas, au point que c’est à partir de l’information qu’il a obtenue le 21 décembre à cet égard qu’il a été amené à faire parvenir sa demande d’appel le même jour.
[66] Le litige n’est pas alors l’ignorance de la loi, mais la question est plutôt de déterminer si l’information donnée à M. Grenier, la lettre incluse, a été de nature à l’induire en erreur quant à la conduite à adopter relativement au moment opportun de faire parvenir sa demande d’appel.
[67]
Pour
répondre à cette question, il est utile de voir d’abord comment la
jurisprudence sur l’article
[68] Pour cerner la question de la prorogation de délai dans le contexte où un appelant invoque qu’il a été induit en erreur et pour l’application des faits relatifs à cette affaire-ci, la Commission, pour fonder son opinion, retient les trois décisions Leclerc , Trudel et Bessette.
[69] Il y a déjà fort longtemps, en 1985, qu’a été établie la règle de base voulant qu’une demande de révision de dossier ne modifie pas le début du délai d’appel. Dans l’affaire Leclerc et al. [13] , la Commission s’exprimait ainsi :
« Le soussigné ne croit pas utile de s’attarder
longuement ici pour se demander quel avis doit être considéré comme le point de
départ du délai de 30 jours
[14]
:
s’agit-il du premier avis communiquant aux appelants la décision de l’Office
refusant leur candidature ou s’agit-il du second avis les informant des résultats
de la révision de leur dossier par le comité de sélection. L’article
[70] Selon les faits rapportés de cette affaire qui regroupait les cas de trois appelants, deux d’entre eux, après avoir été avisé que leur candidature était refusée, avaient demandé que leur dossier soit réétudié et ce n’est qu’après le deuxième refus qu’ils avaient décidé d’interjeter appel, lequel était parvenu tardivement à destination. Rien n’est dit cependant sur la nature des échanges qui avaient pu se tenir au moment de leur demande de réétudier leur dossier. La décision fait seulement état que les raisons fournies en audience pour justifier, selon eux, la tardiveté de leurs appels ne rencontraient pas les exigences de la loi, d’où le rejet de leur appel.
[71] Si comme le mentionne la décision Leclerc , la Loi ne donne ouverture à aucune révision, ce qui est encore le cas aujourd’hui, force est de constater que ne pas connaître l’existence de la procédure de révision ne peut être un cas d’ignorance de la loi.
[72] L’idée qu’être induit en erreur quant à ses droits par un représentant d’un ministère pouvait être assimilé à une impossibilité d’agir est par ailleurs bien ancrée dans la jurisprudence de la Commission, comme en font foi les décisions Moisescu , Marine et Godbout , auxquelles le MRN a fait référence comme on l’a vu précédemment dans son argumentation.
[73] Cette idée origine de l’affaire Trudel et al. [15] , qui remonte elle aussi à 1985 et dans laquelle il avait été admis que M. Trudel avait « été détourné de son intention de loger un appel à la Commission de la fonction publique par l’action directe du responsable du concours […]. » L’admission, rapportée dans la décision, était à l’effet que le responsable avait « induit le plaignant en erreur en lui disant qu’il devait d’abord soumettre une demande de révision, puis soumettre un appel sur le résultat de cette révision [16] . »
[74] De ce qu’avaient plaidé les quatre autres appelants dans ce dossier-là, il s’avérait qu’il n’y avait, aux yeux de la Commission, « aucune preuve que le responsable du concours les ait induits en erreur en leur disant qu’ils devaient faire une demande de révision avant de loger leur appel. Il ressort de leurs témoignages qu’ils ont tous eu l’intention de demander une révision et d’attendre l’issue de cette demande avant de loger un appel [17] . »
[75] De ces appelants, un premier ne se rappelait pas s’il avait été question d’un appel lors d’un échange avec le responsable du concours qu’il avait appelé pour savoir s’il devait faire une demande de révision, deux autres appelants n’avaient pas fait appel parce qu’ils croyaient qu’il en était dans leurs cas comme dans celui d’un bénéficiaire de l’aide sociale qui doit aller en révision avant de faire appel, et enfin le dernier appelant avait admis qu’il savait qu’il avait un droit d’appel mais qu’il ne l’avait pas fait car il était convaincu que son dossier n’était pas fini car il savait aussi qu’il avait un recours en révision. Dans cette affaire, les quelques bribes rapportées quant au contenu de la lettre ne précisent pas si la lettre les avisant du refus de leur candidature comportait de l’information relative à un appel ou à une révision.
[76] La Commission note tout de suite que la décision Trudel et al. est cependant également intéressante en rapport avec un autre aspect. Le procureur de quatre appelants avait argumenté, comme M. Grenier ici, à propos du libellé de l’article 35, qu’en retenant la formulation « d’un avis » plutôt que « de l’avis », le législateur avait voulu indiquer qu’il pouvait y en avoir plus d’un à prendre en compte dans le calcul du délai pour transmettre son appel, dont l’avis qui pouvait suivre l’opération de révision.
[77] À cet argument, la Commission avait alors entre autres répondu ce qui suit :
« […] La Commission ne croit pas que le Législateur ait voulu que ce délai raisonnable soit prolongé par le seul fait d’une demande de révision à laquelle il faudrait répondre et qui aurait pour effet de faire repartir le délai à compter de cette réponse, sans prévoir explicitement un tel pouvoir de révision et les délais pour y recourir . »
[Nous soulignons]
[78] La Commission fait toujours sien ce commentaire et décide qu’il dispose de l’argument similaire de M. Grenier. La déduction, à laquelle le mène le projet de loi de l’an dernier modifiant la Loi sur la fonction publique , n’est pas du tout convaincante, notamment à défaut de s’appuyer sur quelque commentaire dans le sens qu’il suggère et qui aurait pu survenir, par exemple, lors de débats parlementaires, qui de toute façon n’ont pas eu lieu.
[79] Enfin, soulignons que c’est dans cette même affaire Trudel , que la Commission avait précisé que si une révision avait pour effet de modifier les résultats en transformant une réussite en un échec, il était évident que la date de ce nouvel avis était celui à considérer dans l’établissement du début du délai d’appel de l’article 35 [18] , principe repris plus tard dans la décision Coulombe , à laquelle il est fait référence au paragraphe 45 de cette décision-ci.
[80] En 2003, dix-huit ans après les décisions Leclerc et Trudel , la Commission s’est à nouveau penchée sur un cas où l’appelant prétend avoir été induit en erreur quant à son recours. Dans l’affaire Bessette , à la réception de l’avis l’informant, en date du 12 novembre 2002 que sa candidature n’était pas retenue parce qu’il n’avait pas atteint la note de passage de son examen, l’appelant avait communiqué immédiatement par téléphone à un assistant du responsable du concours pour manifester son insatisfaction et celui-ci l’avait informé qu’il pouvait demander une révision de son résultat, demande que l’appelant avait transmise le jour même par télécopieur. Une réponse téléphonique que la décision demeurait inchangée parvint à M. Bessette le 10 décembre, soit après le délai pour faire appel qui était fixé alors à 15 jours ouvrables. Une réponse écrite plus détaillée lui fut adressée le 18 décembre, fut reçue le 30 décembre et finalement l’appel de M. Bessette, interjeté le 3 janvier, ne fut reçu par la Commission que le 9 suivant.
[81] Il est rapporté dans cette décision que lors de l’audience M. Bessette avait soutenu que le ministère concerné aurait dû l’informer de la possibilité d’interjeter appel et qu’on l’avait induit en erreur dans le but de laisser expirer le délai d’appel. Il ajoutait avoir agi avec diligence et s’être occupé de ses affaires et que c’est à partir du moment où on lui avait donné les bonnes informations qu’il avait fait les démarches dans le délai prescrit.
[82] C’est dans ce contexte, après le rappel de ce qu’avait permis d’établir notamment les affaires Moisescu et Coulombe , que doit se lire le passage suivant de la décision Bessette :
« La Commission a également décidé à plusieurs reprises qu’un ministère ou un organisme qui tient un concours n’a pas une obligation légale d’informer un candidat qu’il possède un recours en appel à la Commission, mais que, par ailleurs, s’il l’en informe, il ne peut l’induire en erreur […] [19] . »
[83] Et dans l’affaire Bessette , comme dans l’affaire Trudel , rien de ce qui en a été rapporté n’indique que la lettre transmettant le refus de candidature comportait des renseignements ambigus relatifs à la façon d’interjeter un appel ou de faire une demande de révision ou les deux options.
[84] Puis s’ensuit, dans cette décision Bessette , un encouragement soutenu de la Commission, repris au long au paragraphe 44 de cette décision, pour qu’une autorité qui tient un concours donne toute l’information pertinente à un candidat qui manifeste son insatisfaction relativement à son admissibilité ou à ses résultats d’examens.
[85] Quant à M. Bessette, son appel a été rejeté au motif qu’il n’avait fait, après avoir envoyé sa demande de révision, aucune autre démarche avant l’expiration du délai de 15 jours ouvrables.
« De cette preuve, il apparaît clair à la Commission que jusqu’au 3 janvier 2003, M. Bessette ignorait l’existence de la possibilité d’un recours à la Commission et qu’il n’était, par ailleurs, pas dans l’impossibilité de l’exercer s’il l’avait connu. »
[86] De ces enseignements de la jurisprudence de la Commission, le soussigné retient les paramètres suivants :
-
De
l’affaire
Leclerc
, que la règle de base est qu’un avis consécutif à une
révision de l’analyse d’un dossier ne peut servir de point de départ dans le
calcul du délai de 15 jours ouvrables prévu à l’article
-
De
la décision
Trudel
, que le fait pour un appelant d’être induit en erreur
par l’autorité qui tient le concours peut constituer une impossibilité d’agir
au sens de l’article
- Enfin de l’affaire Bessette , qu’il n’y a pas d’obligation légale d’informer un appelant du recours à sa disposition si sa candidature est refusée, mais que si on l’en informe, on ne peut le faire d’une manière qui l’induise en erreur.
[87] Pour paraphraser cette leçon à tirer de l’affaire Bessette , la Commission ajoute que si l’on choisit d’informer un candidat, tant du recours en appel de l’article 35, qui origine de la Loi, que de la procédure de révision qui n’en découle pas, il faut tout également le faire d’une manière non équivoque.
[88] La notion d’impossibilité d’agir, à laquelle le MRN a référé en citant l’affaire Moisescu rapportée au paragraphe 37 de cette décision, a été étayée elle aussi dans la décision Leclerc [20] :
« Nous devons nous rappeler que la loi ne permet à la Commission de proroger un délai que dans un cas d’"impossibilité". La Cour suprême s’est déjà prononcée sur le sens qu’il fallait donner à ce mot dans le cadre d’une disposition similaire se trouvant au Code de procédure civile […] Sans retenir la notion exigeante d’impossibilité absolue, le tribunal exige quand même une impossibilité relative qui fait en sorte qu’un appelant puisse raisonnablement se considérer dans l’impossibilité d’agir malgré la diligence qu’il a manifestée. »
[89] La décision de la Cour suprême à laquelle référait la Commission dans l’affaire Leclerc est celle de la Cité de Pont Viau c. Gauthier Mfg. Ltd. [21] , dans laquelle le plus haut tribunal du pays disait :
« […] il n’est donc pas nécessaire que la partie démontre qu'elle a été empêchée d'agir par un obstacle invincible et indépendant de sa volonté; il lui suffit d'établir une impossibilité de fait, relative. […] L'on doit donc dire que le plaideur qui demande une permission spéciale d'appeler en vertu de cet article n'a pas à prouver une impossibilité absolue, mais seulement une impossibilité relative.
Il n'est pas possible de préciser à l'avance chacun des faits d'où peut résulter l'impossibilité relative; chaque espèce doit être jugée selon les circonstances qui lui sont propres, puisque c'est vraiment d'une impossibilité de fait qu'il s'agit. »
[90] Ce qu’il faut donc retenir c’est que l’impossibilité d’agir n’a qu’à être relative et celui qui l’invoque n’a pas à prouver une impossibilité absolue. Enfin, ne peuvent être retenues comme situations d’impossibilités d’agir, celles où l’appel serait « manifestement futile ou vexatoire ou si la partie [se serait] elle-même placée par suite de son incurie coupable dans l’impossibilité d’agir plus tôt », comme le soulignait encore la Cour suprême dans C ité de Pont Viau , dans l’extrait rapporté au paragraphe 38 de cette décision.
[91] Dans la lettre du 5 novembre 2012, avisant M. Grenier que sa candidature avait été refusée au stade de l’admission, c’est le MRN qui a pris l’initiative de l’informer et, ce faisant, les renseignements qu’il fournissait se devaient d’être complets. La lettre mentionne qu’il a deux options : un appel et une demande de révision, chacune faisant l’objet d’un paragraphe.
[92] Chacun des deux paragraphes pris séparément est clair, mais lus ensemble il s’en dégage une ambiguïté :
« Nous vous rappelons qu’en vertu de l’article
La date limite pour les demandes d’information ou de révision concernant votre candidature est le 23 novembre 2012. Après cette date, aucune demande ne sera considérée. Veuillez formuler votre requête par courrier électronique à l’adresse suivante : michelle.drolet@mrn.gouv.qc.ca en indiquant le numéro de concours 633D-6003047 dans l’objet de votre message. »
[93] Dans un cas, on informe l’appelant qu’il dispose d’un droit d’appel et de 15 jours ouvrables à compter de la date à partir de laquelle l’avis lui a été adressé et dans l’autre, qu’il y a une date limite pour demander de l’information ou une révision concernant sa candidature. De l’avis de la Commission, dans un cas de renseignements ainsi formulés et juxtaposés, ce qui était limpide devient équivoque. Or, ce qui est équivoque peut s’interpréter de plus d’une manière et n’est par conséquent plus clair.
[94] Le MRN a fait le bon choix en décidant d’informer les personnes dont la candidature était refusée qu’il y avait plus d’un moyen à leur disposition pour contester la décision ou en demander la révision. C’est une excellente pratique de gestion en matière de concours qui s’inscrit dans l’approche à privilégier, bien que non légalement imposée, de donner à ces personnes toute l’information pertinente dans les circonstances. Mais, dans ce cas-ci, et avec respect pour l’opinion contraire, le MRN l’a fait d’une manière qui pouvait induire en erreur.
[95] La preuve démontre que M. Grenier a constaté le caractère équivoque de l’avis du 5 novembre. Mais il a été prouvé également qu’il n’a pas été le seul à interpréter son contenu différemment de ce qu’il est censé vouloir dire. M me Bordeleau, la personne de sa direction régionale responsable de faire le lien entre d’une part les gestionnaires et le personnel de la direction régionale et d’autre part, la DGARH, a compris la même chose que lui, ce qui n’a pas été contredit. La Commission a pris bonne note que cette personne n’est pas une conseillère en gestion des ressources humaines et qu’elle ne fait pas partie du personnel de la DGARH, mais pour la direction régionale, c’est elle qui s’occupe localement du suivi des embauches, des concours et des examens.
[96] Cette personne ne peut être considérée ici comme un tiers au même titre que n’importe quel autre membre du personnel de la direction régionale. Le témoignage de M. Grenier est à l’effet que, dans sa région, c’est à elle qu’on s’adresse en matière de concours parce que c’est de cela qu’elle s’occupe, ce qui n’a pas été contredit non plus.
[97] Dans son témoignage, la responsable du concours dit bien connaître cette personne et confirme que « ce sont des techniciens ou des agents de bureau qui exercent des responsabilités ou des rôles de support au niveau des ressources humaines. Pour nous, au niveau des régions, ce sont des intermédiaires. Leur rôle est un peu de soutenir les gestionnaires, de faire le pont entre la DGARH et les gestionnaires ou le personnel qui sont en région. »
[98] La Commission prend bien acte du fait que la personne qui, dans une région, fait le pont avec la DGARH en matière de ressources humaines n’est pas une employée de cette direction générale. Mais il demeure que c’est une représentante du MRN et l’opinion qu’elle a donnée à M. Grenier, et à propos de laquelle le MRN ne l’a pas appelée à témoigner, doit être appréciée du point de vue d’une personne raisonnable dans les mêmes circonstances et ce test favorise ce qu’en a compris M. Grenier, à savoir qu’à son avis, le dossier en était encore au stade de la révision et non pas à celui d’interjeter son appel.
[99] Le MRN suggère que cette personne aurait dû inviter M. Grenier à se renseigner auprès de la responsable du concours plutôt que lui donner elle-même une réponse. Peut-être, mais ce n’est pas ce qui s’est produit et ce manque, s’il devait en être un, ne peut être retenu contre M. Grenier.
[100] Le MRN invoque également qu’il y avait d’autres sources d’information auxquelles M. Grenier aurait pu se référer pour trouver réponse à ses interrogations et il renvoie la Commission à cet égard à des extraits de son site Web.
[101] Peut-être que M. Grenier aurait pu ne pas se fier à la réponse qu’on lui a donnée, mais cette réponse provenait tout de même d’une personne, en théorie à tout le moins, informée en la matière sur laquelle elle était interrogée.
[102] De plus, la Commission ne peut s’empêcher de noter que les extraits des renseignements auxquels le MRN réfère dans sa preuve comportent la précision importante dont la lettre du 5 novembre n’informait pas M. Grenier, soit que la demande de révision ou les démarches auprès du responsable d’un concours n’interrompent pas le délai pour faire appel. Dans le cas du guide sur « Les recours devant le tribunal », il est écrit qu’« il est impératif que votre appel soit reçu à la Commission dans ce délai, même si vous avez présenté une demande de révision de votre dossier […] », et encore, dans la section Foire aux questions de son site Internet, que « le fait d’entreprendre des démarches auprès de la personne responsable du concours ou à une réserve n’a pas pour effet de suspendre ce délai. Il est donc important de déposer votre appel dans le délai prescrit pour préserver vos droits. »
[103] La simple mention que la révision n’interrompt pas le délai d’appel est le type de renseignement qui, s’il eut été inclus dans la lettre du 5 novembre, aurait fait en sorte que M. Grenier n’aurait pas été induit en erreur, car alors le message n’aurait pas été ambigu ou équivoque.
[104] Lui-même admet que s’il avait insisté auprès de M me Bordeleau, elle aurait peut-être fini par lui dire d’appeler la responsable du concours. Mais ce commentaire de la part de M. Grenier, qui peut sembler le desservir, ne peut être retenu contre lui dans le contexte que l’impossibilité d’agir que sa preuve doit démontrer n’a pas à être absolue, mais relative, comme l’a énoncé la Cour suprême tel qu’il a été vu précédemment.
[105] Et encore il faut apprécier la preuve à partir du point de vue de la personne raisonnable qui ne doit pas avoir démontré un comportement assimilable à une incurie coupable dans les circonstances. Cela aurait pu être le cas, par exemple, si M. Grenier avait adopté une attitude d’aveuglement volontaire, une volonté de ne pas chercher de réponse à l’équivoque de la lettre du 5 novembre. Dans ce cas-ci, la preuve n’est aucunement à cet effet, au contraire.
[106] Croyant que le refus dont on l’avisait pouvait dépendre du fait que le contenu de son offre de service « standard » n’avait pu être apprécié à sa juste valeur, M. Grenier a appelé la responsable du concours le 14 novembre. Celle-ci dit qu’il voulait faire valoir verbalement auprès d’elle son point de vue parce qu’il avait des expériences qui pouvaient être évaluées différemment de ce que le comité d’évaluation avait retenu.
[107] Il n’apparaît pas, selon la preuve, que M. Grenier lui aurait parlé d’appel, mais pas de révision non plus. Dans la décision Montminy [22] , il est mentionné que M. Montminy avait laissé entendre à la responsable du concours qu’il allait déposer un appel, ce qui n’est pas le cas dans ce dossier-ci. Dans ce cas-ci, c’est plutôt l’interlocutrice de M. Grenier qui dit l’avoir simplement référé à la lettre du 5 novembre, sans la relire avec lui, en lui précisant que c’était le comité d’évaluation qui pouvait considérer, en révision, des renseignements complémentaires. La question de la distinction entre un appel et une révision n’a pas été abordée.
[108] L’omission de M. Grenier, le 14 novembre, de faire éclaircir l’équivoque constaté ne peut lui être fatale, car l’obligation première, au sens de la décision Bessette , appartenait au MRN qui avait choisi de l’informer par écrit de son recours et qui ne pouvait, ce faisant, l’induire en erreur en omettant de lui donner toute l’information pertinente, soit que la révision ne suspendait pas le délai du droit d’appel.
[109] Le 22 novembre, s’interrogeant toujours sur l’ambiguïté de la lettre du 5 novembre, M. Grenier a vérifié ce qu’il en était auprès de M me Bordeleau. Celle-ci l’a alors conforté dans son opinion qu’il en était à la phase de révision mentionnée dans la lettre du 5 novembre et non au temps d’interjeter appel.
[110] De l’avis du soussigné, qui a à apprécier les faits et le contexte dans lequel ils se sont déroulés, il n’y a pas de démonstration d’une incurie coupable de la part de M. Grenier qui avait reçu un avis équivoque.
[111] Le 18 décembre, il a reçu un courriel de la responsable du concours confirmant que le comité d’évaluation, après révision de son dossier, avait maintenu sa décision de ne pas l’admettre.
[112] Le 21 décembre, M. Grenier a eu un nouvel échange téléphonique avec la responsable du concours au cours duquel cette fois-là il a été question des deux options mentionnées dans la lettre du 5 novembre, tant de l’appel que de la révision. M. Grenier dit qu’il cherchait comment s’y prendre pour aller plus loin pour encore faire valoir son point de vue. On lui a expliqué qu’il ne pouvait pas y avoir d’autre révision. Sur ce qui a suivi la preuve est contradictoire. M. Grenier témoigne qu’on lui a expliqué que c’était dans le cadre d’un appel qu’il pouvait être invité à une séance d’échanges et d’information et il dit avoir été incité alors à faire un appel à cette fin. La responsable du concours témoigne pour sa part qu’elle ne se rappelle pas tous les propos qui ont pu être échangés, mais elle dit qu’elle serait très surprise d’avoir incité M. Grenier à faire un appel car elle savait très bien qu’il était hors délai.
[113] Le 21 décembre, M. Grenier a adressé son appel à la Commission, lequel a été reçu par celle-ci le même jour par courriel, et le 3 janvier 2013 par la poste.
[114]
En tenant compte
du droit applicable et des faits mis en preuve, la Commission est d’avis que la
lettre ambigüe du 5 novembre 2012 et les renseignements incomplets, voire
inexacts dans le cas de l’opinion de M
me
Bordeleau, obtenus du MRN
ont induit M. Grenier en erreur et l’ont placé, au sens de l’article
[115] En considérant toutes les circonstances particulières de cette affaire, la Commission juge approprié de fixer le début de ce délai au 22 décembre 2012, soit le lendemain du moment à compter duquel a été dissipée, à tout le moins en partie, dans un nouvel échange avec M me D’Amours, l’équivoque de la lettre du 5 novembre 2012 quant à la distinction entre un appel et une révision de dossier et à la portée de cette distinction sur la conduite qu’un candidat doit adopter.
[116]
Puisque l’appel
de M. Grenier a été reçu ce même 21 décembre par la Commission, soit même avant
le début du délai de 15 jours ouvrables de l’article
[117] POUR CES MOTIFS , la Commission :
·
DÉCLARE
que les informations qui ont été fournies à M.
Philippe Grenier, dans les circonstances particulières décrites au long de
cette décision, l’ont induit en erreur et ont constitué pour lui une
impossibilité relative d’agir, au sens de l’article
· PROROGE au 22 décembre 2012 le début du délai dont disposait M. Grenier pour interjeter appel;
· CONSTATE que l’appel de M. Grenier, reçu par la Commission le 21 décembre 2012, a été validement interjeté;
· REJETTE le moyen préliminaire du ministère des Ressources naturelles;
· ORDONNE que l’audition au fond de l’appel de M. Grenier soit tenue à une date à être déterminée par la Commission, et ce, suivant la procédure habituelle.
Original signé par :
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_____________________________ Robert Hardy, avocat Commissaire |
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M. Philippe Grenier |
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Appelant non représenté |
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M e Sandra Landry |
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Procureure pour l’intimé |
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Lieu de l’audience : |
Québec |
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Date de l’audience : |
26 février 2013 |
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[1] Concours de promotion n° 633D-6003047.
[2] http://www.cfp.gouv.qc.ca/ , onglet Foire aux questions, question 8.
[3] Moisescu c. Ministère de la Famille et de l’Enfance , [2001] 18 n° 2 R.D.C.F.P. 303, p. 308308; Marine c. Ministère du Revenu , [2007] 24 n° 2 R.D.C.F.P. 355, par. 31; Godbout c. Ministère de la Sécurité publique , [2005] 22 n° 2 R.D.C.F.P. 437, p. 442.
[4] Grégroire c. L’Office de la langue française , [1993] 10 n° 2 R.D.C.F.P. 225, p. 226.
[5]
Cité de Pont Viau
c.
Gauthier Mfg. Ltd.
,
[6] Leclerc et al. c. Ministère des Transports , [1985] 2 n° 2 R.D.C.F.P. 243, p. 244; Demers et al. c. Centre de services partagés du Québec , [2011] 28 n° 1 R.D.C.F.P. 47, par. 63.
[7] Bessette c. Ministère de la Sécurité publique , [2003] 20 n° 1 R.D.C.F.P 97, p. 102-103.
[8]
Coulombe
c.
Ministère de la Sécurité publique
,
[1993] 10 n° 2 R.D.C.F.P. 445, p. 450;
Desjardins et al.
c.
Ministère
de la Sécurité publique
, [2011] 28 n° 1 R.D.C.F.P. 51, par. 57;
Montminy
c.
Régie du bâtiment du Québec
, [2012]
[9]
Duguay
c.
Commission de la santé et de la sécurité
du travail
, [2000] 17 n° 1 R.D.C.F.P. 103, p. 105;
Houle et al.
c.
Ministère
de l’Emploi et de la Solidarité sociale
, [2010] 27 n° 1 R.D.C.F.P. 71, par.
23;
Tremblay
c.
Ministère des Transports du Québec
, [2012]
[10] Projet de loi n° 72, Loi modifiant la Loi sur la fonction publique principalement en matière de dotation des emplois , présenté le 15 mai 2012 par la ministre responsable de l’Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor.
[11] Précisons qu’un concours de promotion pour constituer un bassin de candidatures aptes à pourvoir d’éventuels emplois réguliers, comme c’est le cas ici, est une opération différente de la constitution d’une réserve de candidatures. Les personnes déclarées aptes à partir d’un concours de promotion peuvent être choisies pour directement pourvoir un emploi. Celles qui sont déclarées aptes à l’occasion de la constitution d’une réserve de candidatures acquièrent la possibilité de soumettre leur candidature à tout concours de promotion qui sera tenu par la suite à partir de la réserve. À la différence d’une personne inscrite sur une liste de déclaration d’aptitudes constituée après un concours et qui peut être nommée directement à un emploi, la personne inscrite sur une liste de déclaration d’aptitudes constituée consécutivement à la tenue d’une réserve de candidatures ne peut l’être; elle n’est qu’en attente de pouvoir s’inscrire à un concours qui ne visera cependant que les personnes déjà inscrites à cette réserve.
[12] Se lisait en latin, « Nemo legem ignorare censetur ».
[13] Leclerc et al. c. Ministère des Transports , précitée, note 6, p. 243-244.
[14] Modifié pour 15 jours ouvrables depuis.
[15] Trudel et al. c. Office des ressources humaines , [1985] 2 n° 2 R.D.C.F.P. 213, p. 217.
[16] Id. , p. 213.
[17] Précitée, note 15.
[18] Trudel et al. c. Office des ressources humaines , précitée, note 15, p. 218.
[19] Bessette c. Ministère de la Sécurité publique , précitée, note 7, p. 102.
[20] Leclerc et al. c. Ministère des Transports , précitée, note 6, p. 244.
[21] Précitée, note 5, p. 526-527.
[22] Montminy c. Régie du bâtiment du Québec , précitée, note 8, par. 7.