Section des affaires sociales
En matière de services de santé et de services sociaux, d'éducation et de sécurité routière
Référence neutre : 2013 QCTAQ 0422
Dossier : SAS-M-208706-1302
HÉLÈNE BEAUMIER
c.
SOCIÉTÉ DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC
[1]
Le requérant demande, en vertu de l'article
[2] À l’audience tenue le 28 mars 2013, le requérant a été entendu. Essentiellement, il a fait valoir qu’il avait besoin de son permis de conduire en vue d’occuper un emploi où il serait appelé à conduire des véhicules, en plus de sa situation de travailleur autonome où il lui est difficile de se déplacer sans véhicule.
[3]
Le procureur de la partie intimé fait valoir que, accorder la présente
requête, reviendrait à suspendre à l’égard du requérant l’application de
l’article
[4] Il plaide qu’il ne saurait être considéré en l’espèce qu’il y a urgence ou risque d’un préjudice sérieux et irréparable, et que la balance des inconvénients doit s’apprécier en faveur de l’intérêt général, soit la protection du public, plutôt que l’intérêt personnel du requérant à bénéficier de son permis de conduire. Il soumet une jurisprudence du Tribunal en ce sens [2] où l’on peut lire :
« [17]
Le Tribunal doit apprécier la requête en
sursis à la lumière de l’article
« 107. Un recours formé devant le Tribunal ne suspend pas l’exécution de la décision contestée, à moins qu’une disposition de la loi ne prévoie le contraire ou que, sur requête instruite et jugée d’urgence, un membre du Tribunal n’en ordonne autrement en raison de l’urgence ou du risque d’un préjudice sérieux et irréparable.
Si la loi prévoit que le recours suspend l’exécution de la décision ou si le Tribunal rend une telle ordonnance, le recours est instruit et jugé d’urgence. »
[18] Dans la présente affaire, le Tribunal est d’avis que le requérant n’a pas démontré qu’il se trouve dans une telle situation.
[19] En effet, le seul motif sur lequel il se base pour justifier l’urgence est celui d’un préjudice économique à venir, lequel n’est aucunement reconnu par le Tribunal pour surseoir à l’exécution d’une décision.
[20] En somme, l’urgence ou le préjudice sérieux et irréparable cité à l’article 107 réfère à une situation exceptionnelle qui risque de conduire la personne au dénuement total ou de laisser craindre pour sa santé et sa sécurité.
[21] Or, le préjudice économique à venir ne peut correspondre à une telle situation d’autant plus que, en l’espèce, il n’est qu’hypothétique.
[22] Certes, en raison de la suspension de son permis de conduire, le Tribunal est conscient que le requérant vit certaines difficultés dans la gestion de son entreprise. Cependant, celui-ci n’a pas fait la démonstration que ses difficultés sont telles qu’il se retrouve dans une situation exceptionnelle.
[23] En fait, la manière dont le requérant exploite maintenant son entreprise ne semble pas nuire à sa santé financière puisqu’aucune preuve n’a été présentée au Tribunal à ce sujet.
[24] Devant ces faits, le requérant ne peut non plus prétendre qu’il subit un préjudice sérieux et irréparable.
[25] D’une part, le Tribunal ne dispose aucunement de preuve voulant que son entreprise soit sur le point de fermer ou de faire faillite. D’autre part, comme le requérant est déjà inscrit auprès de l’Association afin de se soumettre à une évaluation complète, ceci laisse présager qu’il récupérera son permis de conduire au plus tard l’été prochain.
[26] Dans ces conditions, le Tribunal estime qu’il n’y a pas d’urgence ou de risque de préjudice sérieux et irréparable au sens de l’article 107 précité.
[27] Enfin, au-delà de ces motifs expressément énoncés à l’article 107, le Tribunal doit également considérer deux autres critères dans l’appréciation d’une telle requête, à savoir l’apparence de droit suffisant ainsi que la balance des inconvénients.
(…)
[32] Enfin, quant à la balance des inconvénients, celle-ci joue en la défaveur du requérant puisque ses intérêts personnels ne sauraient prévaloir sur ceux du public.
[33] En effet, les dispositions du Code visent non seulement à protéger le détenteur d’un permis de conduire, mais également à assurer la sécurité de tous les individus sur nos réseaux routiers. Dans de telles conditions, l’intérêt du public doit primer sur l’intérêt d’un individu.
[34] Ces dispositions sont d’ordre public, ni le Tribunal, ni l’intimée ne peuvent y déroger. »
[5] Le Tribunal est d’accord avec la position de l’intimée.
[6] En effet, malgré les inconvénients que la situation peut engendrer, non seulement n’y a-t-il pas de preuve d’urgence ou de préjudice sérieux et irréparable, mais encore, et surtout, c’est le critère de la balance des inconvénients qui, en l’espèce, est prédominant.
[7] Ainsi, dans l’appréciation de ce critère, le Tribunal ne saurait, dans un cas comme celui ici en cause, préférer l’intérêt personnel du requérant à recouvrer son droit de conduire, à celui du public (et du requérant lui-même) d’être protégé, compte tenu qu’il s’agit ici d’une suspension de permis résultant d’une déclaration de culpabilité pour conduite avec les facultés affaiblies par l’alcool.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
- REJETTE la requête.
Raiche Pineault Touchette
Me Mario Forget
Procureur de la partie intimée