Article
TRIBUNAL D’ARBITRAGE
N o de dépôt : 2013-4653
Date : 19 avril 2013
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DEVANT L’ARBITRE : Pierre Cloutier ll.m
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Syndicat manuel des travailleurs et travailleuses de Vaudreul-Dorion (CSN)
« Le syndicat »
ET
Ville de Vaudreuil-Dorion
« L'employeur »
Grief no : 2011-06
Plaignant : M. Clayton West
Me Edward Kravitz
Pour le Syndicat
Me Charles Caza
Pour l'employeur
SENTENCE ARBITRALE
I - NATURE DU GRIEF
[1] Dans ce dossier, le syndicat, par son grief daté du 23 septembre 2011 , conteste une suspension de 15 jours ouvrables, imposée par l'employeur le 12 septembre 2011, au plaignant, M. Clayton West, un opérateur au Service des eaux de la Ville de Vaudreuil-Dorion et par ailleurs, président du syndicat.
II - HISTORIQUE DU DOSSIER
[2] Le 19 novembre 2011, le procureur de l'employeur, Me Charles Caza, m'informe que les parties m'ont désigné de consentement pour agir en qualité d'arbitre dans le présent dossier.
[3] Le 12 janvier 2012, je fixe avec le consentement des parties, une date d'audience pour le 5 avril 2012.
[4] Le 19 janvier 2012, le procureur du syndicat, Me Edward Kravitz, informe le procureur patronal, qu'il a l'intention de soulever une objection préliminaire lors de l'audience du 5 avril 2013, alléguant que l'employeur n'a pas respecté le paragraphe 21.03 de la convention collective liant les parties, en rencontrant le plaignant le 6 septembre 2011, sans la présence d'un représentant syndical et demandant l'annulation de la mesure disciplinaire. Il demande que le présent tribunal rende une décision écrite sur cette requête avant d'entendre le fond du litige.
[5] De façon subsidiaire, le procureur syndical dépose une requête en précisions sur les motifs qui ont amené l'employeur à prendre une mesure disciplinaire contre le plaignant.
[6] Le 20 janvier 2012, le procureur patronal allègue que l'objection préliminaire du syndicat est déposée de façon tardive et s'objecte à la scission de l'enquête en demandant que l'audience ait lieu sur le fond du dossier.
[7] Me Caza réclame de Me Karvitz qu'il dépose sa jurisprudence le plus tôt possible sur cette question et refuse, par ailleurs, de fournir les précisions demandées alléguant que son premier témoin sera le plaignant dont le témoignage peut être ainsi biaisé par la connaissance de la preuve en possession de l'employeur.
[8] Le 23 février 2012, Me Kravitz répond qu'il déposera sa jurisprudence lors de l'audience du 5 avril 2012.
[9] Le 5 avril 2012, comme prévu, je procède à l'audience sur l'objection préliminaire du syndicat et sur la requête en précisions.
[10] Le 13 avril 2012, je rends une décision interlocutoire dans laquelle je reporte l'étude de l'objection préliminaire lors de la preuve sur le fond du dossier, mais j'accueille la requête en précisions du syndicat et ordonne à l'employeur de fournir les précisions demandées dans les 15 jours suivants. J'ordonne aussi la tenue de l'audience sur le fond du dossier à une date déterminée avec l'accord des parties.
[11] Le 19 avril 2012, Me Caza fournit les précisions demandées par le procureur syndical. Ces précisions portent sur 4 items bien précis :
· L'utilisation d'Internet sur les lieux de travail au delà des pauses et des heures de repas, selon les aveux mêmes du plaignant (nombre de fois non mentionné ) ;
· L'achat d'outils à des fins personnelles pendant les heures de travail, selon les aveux mêmes du plaignant (en une occasion) ;
· Vacations pour des fins personnelles, une fois chez son père et une autre fois chez IGA, selon les aveux du plaignant ;
· Accompagnement, le 30 août 2011, d'un collègue de travail à sa résidence privée pendant les heures de travail, pour des fins étrangères au travail, pour une durée d'environ 1:30 heures.
[12] Il est pertinent de mentionner ici que d'un commun accord, les parties m'ont demandé lors de la 1ère journée d'audience sur le fond de ne pas identifier ce collègue de travail par son nom, pour ne pas lui causer préjudice, faisant suite à une entente intervenue entre l'employeur et lui. J'identifierai donc cette personne comme étant Monsieur X.
[13] Le 1er mai 2012, je fixe les audiences sur le fond du dossier au 20 septembre 2012 et au 3 octobre 2012.
[14] Le 5 juillet 2012, le procureur patronal, avec l'accord du syndicat, demande que ces dates soient reportées en février 2013.
[15] Le 17 septembre 2012, je fixe les audiences sur le fond du dossier aux 19 et 21 février 2013.
[16] Lors de la dernière audience, le 21 février 2013, après que la preuve ait été déclarée close de part et d'autre et lors de l'argumentation, le procureur syndical soulève une autre objection préliminaire alléguant cette fois, que, selon la preuve révélée lors de l'audience sur le fond, l'employeur avait en mains, le 30 août 2011, tous les faits pertinents pour imposer une mesure disciplinaire et qu'il aurait dû le faire dans le délai de 5 jours prévu au paragraphe 21.02 de la convention collective. Il conclut donc que tous ces faits ne sont pas recevables en preuve et que le fond du dossier doit donc être traité en conséquence.
[17] Ce même jour, les parties se mettent d'accord pour permettre à l'employeur de faire une preuve additionnelle sur cette objection préliminaire et je fixe au 14 mars 2013 l'audition de cette preuve.
[18] Le 12 mars 2013, le procureur patronal dépose une requête écrite en rejet de cette objection préliminaire avec documents et jurisprudence à l'appui et les parties s'entendent pour administrer la preuve par admissions.
[19] En résumé, je dois donc rendre une décision sur les 2 objections préliminaires soulevées par le syndicat, l'une portant sur l'ansence d'un délégué syndical lors de l'imposition d'une mesure disciplinaire, basée sur le paragraphe 21.03 de la convention collective et l'autre portant sur le délai de 5 jours exigé lors de l'imposition d'une mesure disciplinaire basée sur le paragraphe 21.02 de la convention collective. En cas de rejet de ces 2 objections préliminaires, je dois évidemment rendre une décision sur le fond du dossier.
III - LES FAITS
3.1 - Le plaignant
[20] Le plaignant, M. Clayton West, travaille comme opérateur-mécanicien d'entretien des eaux et assainissement au service des eaux de la Ville de Vaudreuil-Dorion, sur une base permanente depuis 1999. Il détient à cet effet un diplôme d'études professionnelles en opération d'usine en traitement des eaux, obtenu en avril 2006.
[21] Sa description de tâches, déposée en preuve sous la cote V-2, se résume comme suit :
Sous la responsabilité du contremaître - eaux et entretien, l'opérateur-mécanicien des eaux et assainissement joue un triple rôle au sein du Service des eaux. Son rôle principal consiste à effectuer l'entretien préventif et correctif de l'ensemble de l'équipement et composantes de tous les ouvrages d'assainissement municipaux. D'autre part, il effectue les tournées journalières et/ou hebdomadaires des installations de production d'eau potable et des postes de pompages sanitaires et pluviaux. Finalement, il est appelé à effectuer le remplacement d'opérateur d'usine de traitement d'eau potable.
[22] Les installations d'assainissement municipales comprennent 8 stations d'eau potable, 20 stations d'eaux usées, une usine de filtration et une usine d'épuration des eaux usées.
[23] L'horaire de travail habituel de M. West est de 7:30 heures à 16:00 heures, avec une pause de 15 minutes le matin entre 9:45 heures et 10:00 heures, une pause de 15 minutes l'après-midi entre 14:45 et 15 heures, plus la période de repas du midi, pour un total de 40 heures par semaine, du lundi au vendredi.
[24] Durant la période estivale, l'horaire est légèrement modifié. Du 24 juin jusqu'à la Fête du travail, le plaignant travaille de 7:00 heures à 16:30 heures du lundi au jeudi et jusqu'à midi le vendredi.
[25] Généralement, M. West entre au travail le lundi matin à l'usine d'épuration des eaux, mais il peut également se présenter à l'usine de filtration.
[26] Son supérieur immédiat, est le contremaître François Joly et le directeur du service est M. Christian Gendron.
[27] Il y a un salarié régulier affecté aux tournées générales d'inspection des diverses stations, mais il arrive fréquemment qu'on utilise les services de M. West pour effectuer aussi de telles tournées, en moyenne entre zéro et 2 fois par semaine. Habituellement, une telle tournée prend généralement 4 heures pour les stations d'eau potable et 4 heures pour les stations d'eaux usées. Il peut partager son temps entre 60% à l'extérieur et 40% à l'intérieur.
[28] Lors de telles tournées, M. West utilise un camion appartenant à la Ville et il peut communiquer en tout temps avec ses supérieurs par radio à ondes courtes ou par un téléphone cellulaire fourni par l'employeur.
[29] Lorsqu'il effectue de telles tournées, M. West bénéficie d'une assez large autonomie et de façon générale, il dit qu'il avertit toujours son supérieur immédiat lorsqu'il doit s'absenter plus de 5 minutes pour des raisons personnelles ou extérieures à son travail. Si son absence pour des raisons personnelles dépasse 5 minutes, il mentionne qu'il l'indique sur sa feuille de temps.
[30] En plus de son travail, M. West exerce aussi des fonctions syndicales. Il a d'abord été vice-président du syndicat pendant quelques années et il est président depuis 2006.
3.2 - L'incident du 30 août 2011
3.2.1 - La version du plaignant
[31] Le mardi 30 août 2011, M. West rentre au travail comme d'habitude, rue Paul-Gérin-Lajoie à Vaudreuil-Dorion. Le contremaître régulier, M. Joly étant absent, c'est le coordonnateur Jacques Cormier qui s'occupe des assignations du jour.
[32] M. Cromier donne le mandat à M. West d'aller chercher une génératrice en compagnie d'un certain M. X, un électricien au service de la Ville, qui est aussi le vice-président du syndicat.
[33] Le génératrice se trouve au puits du secteur Hudson Acres, une des installations sous la juridiction de la Ville de Vaudreuil-Dorion. Le puits est situé à environ 14 km de l'usine de filtration et cela prend généralement entre 17 minutes et 20 minutes pour s'y rendre.
[34] M. West précise que M. X et lui sont partis vers 8:00 heures avec le camion utilisé généralement par ce dernier et qui appartient à la Ville. C'est M. X qui conduit et M. West est passager. M. West mentionne que M. X n'est pas un compagnon de travail régulier et souligne également qu'il ne pas porte généralement de montre sur lui et que son estimation du temps est relative et peut être sujette à erreur.
[35] Ils arrivent au puits d'Hudson Acres vers 8:20 heures. Ils prennent 10-15 minutes pour débrancher la génératrice et un autre 10 minutes pour la fixer derrière le camion.
[36] Pendant leur travail, M. X mentionne à M. West qu'il voudrait en revenant faire un léger détour pour se rendre à sa résidence privée située à Saint-Lazare situé à quelques kilomètres du puits. M. X lui dit qu'il a commandé des armoires pour la résidence qu'il est en train de se faire construire et qu'il veut vérifier si le menuisier est sur les lieux et si les armoires ont été livrées.
[37] M. West accepte en prenant pour acquis que cela ne prendra que quelques minutes selon les affirmations de M. X. Ils quittent donc le puits d'Hudson Acres vers 8:40 heures et 15 minutes plus tard, ils sont chez M. X.
[38] Arrivés chez M. X, ils constatent que le menuisier est présent, mais que les armoires n'ont pas encore été livrées. M. X décide alors d'attendre les livreurs. Finalement, ces derniers arrivent et M. X décide de rester encore quelque temps pour vérifier si l'installation est faite correctement.
[39] M. West mentionne qu'ils sont restés environ 30-40 minutes chez M. X et qu'ils s sont arrêtés également 2 minutes chez Tim Hortons pour commander un café avant d'arriver chez M. X. Il admettra plus tard, après la preuve patronale, qu'ils ont commandé le café après avoir été chez M. X et non pas avant.
[40] Puis, ils sont allés porter la génératrice aux ateliers municipaux pour la remplir d'essence et sont revenus à leur lieu de travail vers 10:30 heures. Par la suite, ils ont poursuivi leur journée régulière de travail.
[41] MM. West mentionne qu'il n'était pas à l'aise avec cela, mais qu'il n'a pas pensé d'avertir le coordonnateur ou le directeur du service, ni par téléphone ni de vive voix.
[42] Il ne mentionne pas non plus qu'il ait enlevé cette perte de temps sur la feuille de temps. Il reconnaît cependant qu'il a fait une erreur en ne prévenant pas ses supérieurs de cet incident, mais il estime que la sanction disciplinaire qui lui a été imposée est trop sévère.
3.2.2 - La version de l'employeur
[43] La version de l'employeur est bien résumée dans une note de service préparée par le directeur du service des eaux de la Ville et envoyée le lendemain, 1er septembre 2011, à Me Isabelle Bureau, directrice du service des ressources humaines de l'employeur.
[44] Cette note de service se lit comme suit :
Au début du mois de mai 2011, j'ai remarqué que M.X parlait souvent au téléphone à son bureau. Étant au courant que M.X avait un projet de construction de maison, j'ai rencontre M.X pour lui mentionner qu'il ne devait pas faire ces appels personnels pour son projet de construction sur le temps de son travail. M.X m'a alors informé que lorsqu'il était au travail ces appels étaient reliés à son travail. De plus, M.X m'a confirmé son projet de construction et informé que son projet était situé sur la rue des Sablières à Saint-Lazare.
M. X occupe un poste…......au Service des eaux de la ville de Vaudreuil-Dorion depuis 2011. De par sa spécialisation et la nature de son travail, M. X jouit d'une grande autonomie dans l'exercice de ses fonctions. M. X réalise des mandats pour plusieurs services de la ville de Vaudreuil-Dorion. De plus, M. X est répondant pour la licence de constructeur-propriétaire en........,de la Régie du bâtiment pour la Ville de Vaudreuil-Dorion.
Au courant des journées du 22, 23 et 24 août 2011, j'ai remarqué que M. X était souvent absent aux pauses et aux périodes de dîner. Ces absences et le projet de construction de M. X ont été des motifs raisonnables de penser que M. X pouvait se rendre à sa résidence durant ces heures de travail. Par conséquent, le 30 août 2011, M. X m'ayant lui-même informé du fait qu'il se bâtissait une résidence sur la rue des Sablières à Saint-Lazare, je suis allé faire une vérification sur la rue des Sablières à Saint-Lazare pour m'assurer qu'il n'était pas à sa résidence.
· 9h30 : j'arrive à l'extrémité de la rue des Sablières à Saint-Lazare. Je remarque la présence du véhicule de service de M. X (véhicule de type Econoline). Une génératrice mobile est attachée à l'arrière du véhicule. Cette génératrice a été récupérée au puits Hudson-Acres situé au 56, rue Sandbridge à Vaudreuil-Dorion. La récupération de la génératrice était nécessaire suite au retour de l'électricité dans le secteur du puits Hudson-Acres.
· 9h35 ; Je contacte M. Martin Houde, directeur général adjoint, pour l'informer de la présence de l'employé à son domicile. M. Houde m'informe qu'il me rejoindra sur place.
· 10h05 : M. Houde m'informe qu'il est en direction et actuellement dans le centre du village de Saint-Lazare. Je l'informe que je serai à l'intersection de la rue des Sablières et du chemin Sainte-Anglique.
· 10h10 : Arrivée de M. Houde à l'intersection, je gare mon véhicule et je monte à bord du véhicule de M. Houde.
· 10h15 : Nous retournons à l'extrémité de la rue des Sablières, le véhicule (numéro du véhicule) et la génératrice sont toujours sur place. Je prends une photo du véhicule à partir du terrain de la maison voisine.
· 10h20 : Nous retournons attendre la sortie du véhicule à l'intersection de la rue des Sablières et du chemin Sainte-Angélique.
· 10h28 : Le véhicule (numéro du véhicule) sort de la rue des Sablières et se dirige direction ouest sur le chemin Sainte-Angélique. Nous suivons le véhicule (numéro du véhicule).
· 10h32 : Le véhicule (numéro du véhicule) arrête au restaurant Tim Horton situé à l'intersection du chemin Saint-Charles et de l'autoroute 40.
· 10h38 : Le véhicule (numéro du véhicule) quitte le Tim Horton et s'engage sur l'autoroute 40 en direction est. Nous remarquons alors la présence d'un passager. Nous suivons le véhicule (numéro du véhicule).
· 10h57: Le véhicule s'arrête au garage municipal de la rue Valois et s'installe aux pompes à essence. Le véhicule est conduit par M. X et le passager est M. Clayton West.
· 11h04 : Le véhicule (numéro du véhicule) quitte le garage municipal. Nous suivons le véhicule (numéro du véhicule).
· 11h08 : Le véhicule (numéro du véhicule) arrête à la station d'épuration. Lieu d'entreposage des génératrices mobiles.
En conclusion, les employés ont passé au minimum 58 minutes à la résidence présumée de M. X. Nous devons également ajouter le temps de déplacement, soit environ 34 minutes pour un aller/retour entre le puits Hudson-Acres et la rue des Sablières, selon Google Maps. De plus, ces déplacements furent effectués avec le véhicule de service de M. X.
Le 30 août en fin de journée, j'ai rencontré M. X à la station d'épuration. J'ai demandé à M. X s'il avait suffisamment de travail devant lui. M. X m'a répondu qu'il était en attente de soumission pour le projet de station Roche et qu'il avait quelques petits projets en cours. Je lui demande de regarder pour modifier l'installation d'une........à l'usine de filtration et je l'informe que, suite à l'inspection santé et sécurité des stations de pompage, plusieurs anomalies avaient été notées concernant des plaques manquantes sur des.......Je lui demande de faire une tournée des installations et de faire les correctifs nécessaires et je l'informe qu'une nouvelle inspection santé et sécurité doit avoir lieu prochainement.
(S) Christian Gendron
Christian Gendron T.P.
Directeur du service des eaux
Ville de Vaudreuil-Dorion
Annexes
· Photo
· Itinéraire Google maps entre le puits Hudson-Acres et la rue des Sablières
· Licence RBQ
[45] Lors de l'audience, l'employeur dépose également en preuve 2 cartes géographiques, l'une pour visualiser les lieux et le trajet parcouru par les 2 employés et l'autre contenant des indications précises relatives à la distance, aux temps de déplacement, aux endroits visités et aux heures approximatives fixées par l'employeur.
[46] Il ressort de ces cartes, les renseignements suivants : l'employeur estime que les employés sont partis de leur lieu de travail à 7:15 heures. Ils se sont rendus au puits du secteur Hudson Acres distant de 13.5 km et cela leur aurait pris environ 17 minutes.
[47] Ils seraient donc arrivés au puits vers 8:02 heures. De là. Ils se sont rendus à la résidence de M. X située à environ 9.7 km du puits et cela leur aurait pris environ 15 minutes. Ils sont repartis de la résidence de M. X vers 10:28 heures, se sont arrêtés au restaurant Tim Hortons, situé à 5.8 km de la résidence, ont commandé un café (6 minutes), ont pris l'autoroute 40 (1.8 km et 2 minutes), se sont dirigés aux ateliers municipaux (14.8 km et 13 minutes) puis sont retournés à leur lieu de travail (2.5 km et 6 minutes) où ils sont arrivés à 11:08 heures.
3.3 - Les actes posés par l'employeur entre le 30 août 2011 et le 6 septembre 2011
[48] Dans l'après-midi du 30 août 2011, la directrice du service des ressources humaines de la Ville, Me Isabelle Bureau communique avec Me Robert Boyd du bureau Dunton Rainville, avocats, de Montréal. Un document intitulé « Journal des feuilles de temps détaillé » (document V-15-1) nous apprend qu'il y alors « discussion avec Mme Bureau concernant une enquête en cours relativement à une possible fraude d'un salarié ».
[49] Le document indique que le même jour, il y a une « opinion sur le congédiement » et des « discussions sur le suivi du dossier ».
[50] Une note manuscrite rédigée par M. Bernard Bourget, de l'agence d'enquête et protection Sirco (document V-14-1), nous apprend ensuite que Me Boyd a téléphoné à M. Bourget pour lui demander d'entrer en contact avec Me Bureau, ce qu'il fait vers 15.42 heures le même jour.
[51] Le même jour, à 19:06 heures, Me Bureau envoie par courriel à M. Bourget un mandat pour procéder à la filature de M. X, soupçonné de « vol de temps », à compter du lendemain vers 6:30 heures jusqu'à la fin de la journée de travail à 16:30 heures. Me Bureau lui demande de faire part de ses observations à M. Martin Houde, directeur-adjoint de la Ville en lui mentionnant qu'une 2e journée de filature pourrait être envisagée.
[52] Le lendemain matin, 31 août 2011, la surveillance de M. X commence vers 5:45 heures et se poursuivra finalement les 1er, 2 et 6 septembre 2011 (document V-14-8).
[53] Entre le 31 août 2011 et le 6 septembre 2011, l'étude juridique Dunton Rainville conseille constamment Me Bureau dans les démarches à suivre (document V 15-1) : recherche de doctrine et jurisprudence (le 30 août 2011 et 1er et 2 septembre 2011), rédaction d'un avis de convocation (2 septembre 2011), confection et rédaction des plans d'entrevue avec les personnes impliquées dans l'enquête (2 septembre 2011) , préparation des avis de convocation, avis de suspension pour fins d'enquête et plans d'interrogatoire (6 septembre 2011), analyse complémentaire sur la jurisprudence en matière de sanctions (6 septembre 2011) et révision des faits révélés par l'enquête (7 septembre 2011).
[54] Le 2 septembre 2011, une note manuscrite rédigée vraisemblablement par M. Bourget de la firme Circo nous apprend que le directeur-adjoint de la Ville, M. Houde, souhaite la présence d'une 2e équipe pour effectuer la filature de M. Clayton West à compter du 6 septembre 2011.
[55] Dans le cas de M. West, cette surveillance s'effectue à compter de 5:58 heures en face son domicile et se termine vers 14:28 heures (document V 14-7). Il faut mentionner toutefois que, dans les faits, la filature s'est terminée vers 10:14 heures, moment où M. West est entré à son lieu de travail. Comme il n'a pas été vu depuis 10:14 heures, M. Houde a demandé l'arrêt de la filature. Décision qui s'applique également dans le cas de M. X.
[56] Le rapport de filature de M. X (document V 14-8) contient certains faits qui sont pertinents aux soupçons entretenus pas la Ville et aux informations obtenues le 30 août 2011.
[57] Ainsi, le 31 août 2011, les enquêteurs voient M. X s'immobiliser, à 11:20 heures au volant du camion de la ville dans le stationnement du Centre de vrac Denis Vivarais (terre, pierre et paillis). À 14:40 heures, il immobilise son véhicule en face d'un petit centre commercial où il discute avec un individu.
[58] Le lendemain, 1er septembre 2011, vers 11:30 heures, il loue un camion au Centre de location Discount à Vaudreuil-Dorion et il se rend dans l'après-midi dans un bâtiment industriel pour y charger du matériel avant de se rendre à résidence vers 16:00 heures.
[59] Le lendemain matin, 2 septembre 2011, avant de rentrer au travail, il va reporter le camion. Il rentre à l'usine vers 7:46 heures, mais retourne chez lui à 8:22 heures. Il retourne au travail, mais à 11:07 heures, il va à la banque et ensuite dans le terrain de stationnement d'un centre de rénovation Home Dépôt où il discute avec une autre personne.
[60] Dans le cas de M. West, le rapport de la filature qui a été effectuée une seule fois le 6 septembre 2011, ne contient toutefois aucun élément pouvant compromettre ce dernier.
[61] Pendant ce temps, la Ville effectue des vérifications sur les feuilles de temps des 2 employés. Dans le cas de M. X, cette vérification s'effectue pour 6 semaines, comprises entre 31 juillet 2011 et le 10 septembre 2011 et dans le cas de M. West, pour une seule semaine, comprise entre le 28 août 2011 au 3 septembre 2011.
[62] Dans le cas de M. West, la feuille de temps et la carte de poinçon (documents V-5 en liasse) indiquent qu'il a effectué 40 heures régulières de travail durant la semaine comprise entre le 28 août 2011 et le 3 septembre 2011 et 4 heures supplémentaires. Il en est de même pour M. X pour les 6 semaines susmentionnées, en ce qui concerne les heures régulières, avec quelques variantes pour les heures supplémentaires.
3.4 - La rencontre du 6 septembre 2011
[63] Après avoir fait les vérifications des feuilles de temps et des cartes de poinçon de M. X et de M. West, après avoir pris conseil et avoir reçu des directives de la firme juridique Dunton Rainville et après avoir reçu les premières informations concernant les filatures, la Ville décide alors de convoquer les 2 employés.
3.4.1- La version du plaignant
[64] M. West mentionne qu'il est à son travail dans l'après-midi du 6 septembre 2011, lorsque M. Gendron, le directeur du service des eaux de la Ville, lui demande de venir dans son bureau. Il s'y rend. Il y avait une autre personne avec lui, M. Richard Duhaime, directeur du service de l'informatique.
[65] M. Gendron l'informe alors que M. Houde, le directeur adjoint et Me Bureau, la directrice du service des ressources humaines, désirent le rencontrer et qu'ils l'attendent dans une petite salle de réunion au 2e étage.
[66] Après quelques minutes d'attente, il s'y rend. Il ne sait pas alors que ces 2 personnes ont rencontré M. X juste avant lui.
[67] M. West leur demande d'entrée de jeu s'il doit être accompagné d'un délégué syndical et on lui répond que non. Puis, on lui pose des questions. On lui demande en premier lieu s'il a effectué des activités personnelles pendant ses heures de travail au cours de l'été.
[68] En fouillant dans sa mémoire, il mentionne 4 occasions au cours desquelles il pouvait avoir vagué à certaines occupations personnelles alors qu'il était au travail. Il dit qu'il lui est arrivé quelques fois d'utiliser l'Internet pendant ses pauses et sa période de repas et qu'il peut avoir dépassé le temps prévu.
[69] Il mentionne aussi qu'en faisant une tournée des stations et en revenant à son lieu de travail, il lui est arrivé 2 fois d'arrêter chez son père, une fois pour prendre une scie ronde dont il avait besoin pour le travail et une autre fois pour vérifier si son père se portait bien, ayant été malade récemment.
[70] Il dit aussi que 2 fois, en allant chercher des outils pour la Ville chez Rona, il en a profité pour regarder les prix de certains outils qu'il voulait acheter pour des fins personnelles.
[71] Il mentionne enfin qu'un fois, ayant effectué un quart de travail de 12 heures, il est allé se chercher de quoi manger vers 11:15 heures et qu'il avait rencontré à cette occasion Me Bureau, la directrice du service des ressources humaines de la Ville.
[72] Après cela, de façon plus particulière, on lui demande s'il s'est déjà livré à des activités personnelles avec un autre employé de la Ville, au cours de la semaine précédente.
[73] Il leur répond d'abord que, si on a des choses particulières à lui reprocher, qu'on lui dise carrément et qu'il va répondre à toutes les questions, Puis il répond non à la dernière question, en précisant qu'il n'a pas pensé sur le coupe à l'incident survenu avec M. X, le 30 août 2011.
[74] Après cet interrogatoire, on lui remet une lettre écrite d'avance qui lui impose une suspension dite « administrative » pour fins d'enquête. Cette lettre se lit comme suit :
Vaudreuil-Dorion, le 6 septembre 2011
En mains propres
Monsieur Clayton West
Objet : Votre suspension provisoire pour fins d'enquête
Monsieur,
Nous procédons actuellement à une enquête concernant des manquements que vous pourriez avoir commis dans le cadre de vos fonctions à la Ville.
Compte tenu de la nature des reproches qui pourraient être formulés contre vous, nous n'avons d'autres choix que de vous suspendre provisoirement immédiatement jusqu'à ce qu'une décision finale soit prise.
Pendant la durée de votre suspension provisoire avec solde, vous ne pouvez accéder aux locaux de la Ville ni communiquer d'aucune façon avec ses membres, représentants, employés ou cadres. Vous devez également nous remettre immédiatement toutes les clefs et tous les autres biens en votre possession appartenant à la Ville.
Par ailleurs, nous vous avisons que la présente mesure est exclusivement une mesure administrative visant à nous permettre d'établir et d'analyser les faits qui pourraient vous être reprochés en vue d'orienter notre position ultérieure.
La présente mesure ne préjuge en aucune façon de la décision finale qui sera prise dans votre cas.
En toutes circonstances, vous vous aviserons de l'issue de votre enquête dans les meilleurs délais.
La directrice générale
(S) Manon Bernard
Manon Bernard
[75] Cette lettre, dans sa forme, est semblable en tous points au modèle de lettre suggéré à la Ville par le bureau d'avocats Dunton Rainville, document déposé en preuve sous la cote V 15-4 (en liasse).
3.4.2 - La version de l'employeur
[76] La version de la Ville est résumée dans un document intitulé : « Rencontre de nature administrative à des fins d'enquête », déposé en preuve sous le cote V-8. Ce document se lit comme suit :
6 SEPTEMBRE 2011 14H30 SALLE DU 2E ÉTAGE À L'USINE DE FILTRATION
TYPE DE RÉUNION Rencontre administrative pour fins d'enquête
PRÉSENTS M. Martin Houde, directeur général adjoint,
Isabelle Bureau, directrice des ressources humaines
Clayton West, opérateur-mécanicien d'entretien des eaux et assainissement
DISCUSSION
D'entrée de jeu, Monsieur Houde informe Monsieur West que la rencontre est de nature administrative et est effectuée à des fins d'enquête. Elle vise à vérifier certains éléments relatifs à son assiduité au travail.
Monsieur Houde demande à Monsieur West s'il a mené des activités étrangères à son travail ou des activités personnelles pendant les heures de travail au cours de l'été 2011.
Monsieur West répond affirmativement et mentionne qu'il a utilisé l'Internet pendant ses pauses et à l'heure du dîner et qu'à l'occasion il a empiété « sur les heures de la Ville ». Il ajoute qu'alors qu'il procédait à l'achat d'outils pour là Ville chez Rona, il a quelques fois vérifié le prix d'un outil. Il dit que « ce n 'était pas long».
Monsieur West ajoute qu'une autre fois, après un « call » il s'est arrêté chez IGA vers 11 h 15 pour faire l'achat de son lunch. À une autre occasion, il s'est arrêté chez son père pour lui emprunter une scie ronde. Madame Bureau lui demande où habite son père. Monsieur West répond « à Vaudreuil ». Elle lui demande combien de temps, il est resté chez lui. Il répond « qu'il a parlé avec lui cinq (5) minutes à l'extérieur.
Madame Bureau lui demande quand cela s'est-il passé. Il répond « la semaine passée ou l'autre avant » Il mentionne que cela s'est produit à une seule occasion.
Monsieur Houde demande à Monsieur West s'il y a eu d'autres activités personnelles. Monsieur West répond qu'il « ne pense pas ».
Monsieur Houde demande à Monsieur West s'il a récemment, plus précisément dans la semaine du 29 août au 2 septembre 2011, mené des activités étrangères au travail ou des activités personnelles pendant les heures de travail.
Monsieur West répond « Non, qu'il ne pense pas ».
Monsieur Houde demande à Monsieur West s'il informait son supérieur lors de ses activités personnelles.
Monsieur West lui répond qu'au-delà de cinq (5) minutes, il informait toujours son supérieur immédiat en l'occurrence Monsieur Christian Gendron et « qu'il coupait son temps »
CONCLUSION
Monsieur Houde termine la rencontre en informant Monsieur West qu'il est suspendu immédiatement de façon administrative avec solde à des fins d'enquête. Madame Bureau lui remet par la suite la lettre signée par Madame Manon Bernard, directrice générale, confirmant la suspension provisoire pour fins d'enquête.
Monsieur West demande à Monsieur Houde s'il peut connaître la raison de la suspension. Monsieur Houde répond que l'enquête est reliée à l'assiduité au travail. Ce dernier réitère qu'il s'agit actuellement d'une enquête administrative. Madame Bureau ajoute qu'ultérieurement, le cas échéant, une convocation sera transmise conformément à la convention collective.
LEVÉE DE LA RENCONTRE
HEURE
Levée de la rencontre à 14:45 approximativement
(S) Martin Houde (S) Isabelle Bureau
Martin Houde, directeur général adjoint Isabelle Bureau directrice des
ressources humaines
3.5 - Déclaration écrite du plaignant
[77] Dans son témoignage, M. West mentionne que, c'est lorsqu'il a vu M. X en sortant de la rencontre du 6 septembre 2011 avec les 2 représentants de l'employeur, « qu'il a allumé » et qu'il a fait le lien entre sa suspension provisoire et l'événement du 30 août 2011, au domicile de M. X.
[78] Il a donc décidé, avec M. X, de prendre conseil auprès d'un conseiller syndical de la CSN., M. Angelo Vendetti. Ce dernier leur a alors conseillé de prendre rendez-vous avec un représentant de l'employeur et d'aller s'expliquer. Ce qu'ils ont fait. Ils ont appelé M. Houde, le directeur général adjoint qui leur a donné rendez-vous le 8 septembre 2011.
[79] M. West a préparé une lettre écrite résumant les faits et est allé la porter à M. Houde. Cette lettre manuscrite se lit comme suit :
Le 8 septembre 2011
Je soussigné Clayton West déclare ce qui suit : le 29 ou le 30 au matin en allant chercher la génératrice au puits Hudson-Acres, après les travaux terminés, nous avons passé à la demeure de mon collègue de travail situé non loin de là pour la raison suivante : il devait recevoir des dessus d'armoires. Nous avons attendu les livreurs. Ensuite nous sommes repartis pour reprendre notre travail. Nous sommes allés au garage municipal remplir la génératrice de son carburant. Durée de l'événement : environ 30 minutes Le collègue cité plus haut est M.X demeurant à Saint-Lazare. Je ne pense pas à ce moment avoir mené une autre activité de ce genre pendant les heures de travail.
(S) Martin Houde (S) Clayton West
Martin Houde Clayton West
Signée à Vaudreuil-Dorion le 8 septembre 2011, à 13h40.
3.6 - La sanction disciplinaire concernant le plaignant
[80] Le 8 septembre 2011, Me Bureau, la directrice du service des ressources humaines, informe les membres du conseil exécutif de la Ville de l'évolution du dossier (document déposé en preuve sous la cote V-10).
[81] Le lendemain, 9 septembre 2011, M. Martin Houde, envoie 2 avis de convocation à M. West et à M. X. L'avis envoyé à M. West se lit comme suit :
Vaudreuil-Dorion, le 9 septembre 2011
Monsieur Clayton West
[…] Rivière-Beaudette (Québec) […]
Objet : Avis de convocation (21.02 et 21.03)
Monsieur,
Par la présente, vous êtes convoqué à une rencontre qui aura lieu le lundi 12 septembre 2011, à 14 h 30 è l'Hôtel de Ville au 2555, rue Dutrisac à Vaudreuil-Dorion.
Cette rencontre vise è vous informer des résultats de notre enquête concernant votre assiduité au travail et à vous faire part de notre intention de recommander l'imposition d'une mesure disciplinaire à votre endroit.
Conformément à l'article 21.03 de la convention collective, vous devez être accompagné d'un représentant syndical au cours de cette rencontre. Nous vous demandons de bien vouloir nous confirmer, avant la tenue de la rencontre, l'identité du représentant syndical.
Nous vous remercions de votre collaboration.
Le Directeur général adjoint
(S) Martin Houde
Martin Houde
[82] La lettre est envoyée en copies conformes à 2 représentants de l'employeur, à 3 officiers du syndicat local et à un conseiller syndical de la CSN. M. Angelo Vendetti.
[83] Il faut mentionner également que la lettre est conforme au modèle de lettre d'un avis de convocation, préparé par le bureau d'avocats Dunton Ranvaille et transmis à Me Bureau (voir doucment V 15-4 en liasse). Seule l'expression «votre prestation de travail » a été remplacée par « votre assiduité au travail ».
[84] Le même jour, M. Vendetti envoie un courriel au service des ressources humaines de la Ville pour l'informer que, lors des rencontres du 12 septembre 2011, concernant les mesures mesures disciplinaires, M. West et M. X seront accompagnés par M. Simon Bélanger, membre de l'exécutif syndical.
[85] Le 12 septembre 2011, on remet au plaignant la lettre suivante :
Le 12 septembre 2011
EN MAINS PROPRES
Monsieur Clayton West
[…] Rivière-Beaudette (Québec) […]
Objet : Avis de recommandation de votre suspension sans solde pour une
période de quinze (15) jours ouvrables.
Monsieur,
Le 6 septembre dernier, nous vous avons rencontré dans le cadre d'une enquête concernant votre prestation de travail. Compte tenu de la nature des informations dont nous disposions et de vos réponses à nos questions, nous vous avons avisé de votre suspension administrative pour la durée de notre enquête.
Au cours de la rencontre du 6 septembre, nous vous avons adressé certaines questions et préoccupations relativement à votre prestation de travail. Nous vous avons demandé entre autres si vous aviez mené des activités personnelles pendant les heures de travail au cours de l'été 2011. À cet effet, vous avez nié avoir mené de telles activités, si ce n'est qu'à de très rares occasions pour des périodes n'excédant pas cinq (5) minutes. Pour une période excédant cinq (5) minutes, vous avez par ailleurs mentionné que vous informiez toujours votre supérieur.
Or, notre enquête révèle entre autres que vous avez mené des activités personnelles pendant les heures de travail, alors que vous étiez pourtant rémunéré afin de fournir votre prestation de travail, et ce, sans jamais aviser votre employeur de votre absence ni demander une quelconque permission d'absence. Au surplus, notre enquête démontre qu'à au moins une occasion, vous étiez en présence d'un autre collègue de travail et que vous n'avez jamais rapporté une telle situation.
Cette situation est aggravée par le fait que vous avez mené des activités personnelles en utilisant le véhicule de la Ville.
Également, il appert que vous avez fait de fausses déclarations, notamment en complétant une feuille de temps sans jamais tenir compte du temps au cours duquel vous avez mené des activités personnelles. De tels agissements constituent du vol de temps puisque vous avez réclamé une rémunération pour du temps non travaillé.
Le 8 septembre dernier, vous nous avez remis une déclaration dans laquelle vous admettez finalement avoir mené des activités personnelles au cours de la semaine du 29 août, admission que nous devons considérer comme tardive vu notre première rencontre du 6 septembre, ne reflète pas totalement la réalité, notamment en ce qui concerne la durée de l'activité en question.
Par vos agissements, vous avez contrevenu à vos obligations fondamentales de salarié, notamment votre obligation d'agir avec bonne foi, honnêteté, intégrité et loyauté.
Vos agissements sont d'autant plus graves que vous ne pouviez ignorer vos obligations compte tenu de vos années d'expérience à la Ville.
En procédant à du vol de temps, en procédant à une fausse déclaration relativement à votre feuille de temps et en niant avoir mené des activités personnelles pendant vos heures de travail, nous considérons que vous avez commis de graves manquements qui ont pour effet d'ébranler le lien de confiance avec votre employeur.
Par conséquent, nous vous avisons de notre intention de recommander votre suspension pour une période de quinze (15) jours ouvrables, pour vol de temps, fausse déclaration et propos mensongers à la séance extraordinaire du conseil municipal qui aura lieu le 13 septembre 2011 à 18h30. Le cas échéant, lors de l'adoption de la résolution confirmant votre suspension sans solde, celle-ci sera rétroactive à la date du présent avis.
Nous espérons que cette mesure disciplinaire suffira à vous faire comprendre la gravité de votre manquement. Toutefois, en cas de récidive, nous vous avisons que nous devrons avoir recours à des mesures plus sévères pouvant aller jusqu'au congédiement.
Recevez, Monsieur, nos salutations distinguées.
Le directeur général adjoint
(S) Martin Houde
Martin Houde
3.7 - Preuve syndicale
[86] Outre quelques précisions apportées par le plaignant sur la durée de l'événement survenu le 30 août 2011, au domicile de M.X, le syndicat dépose également en preuve 3 mesures disciplinaires imposées par la Ville dans des cas qu'il juge similaires au présent litige et pour lesquels l'employeur a imposé un simple avis disciplinaire à 2 salariés, dans le premier cas et une suspension d'une seule journée ouvrable à un salarié dans le 2e cas (documents déposés en preuve sous la cote S-16, S-17 et S-18).
[87] Le syndicat a également déposé un 4e document contenant un avis de convocation relatif au 2e cas et dans lequel la Ville a procédé à une rencontre de nature disciplinaire respectant les dispositions du paragraphe 23.03 de la convention collective qui exige la présence d'un délégué syndical (document déposé en preuve sous la cote S-19).
[88] Ces documents ont fait l'objet d'une objection à leur production, de la part du procureur patronal, pour des motifs de pertinence. J'ai toutefois accepté la production de ces documents - et les témoignages afférents - sous réserve de pertinence et j'évaluerai cette pertinence au moment jugé opportun.
[89] Le premier cas concerne un incident survenu le 8 décembre 2006, au cours duquel 2 journaliers-chauffeurs du service des travaux publics ont été surpris dans un secteur de la Ville autre que celui où on leur avait demandé d'effectuer des travaux,
[90] La Ville, selon le syndicat, a traité ces cas, non pas comme du « vol de temps ». mais comme une « perte de temps » et un simple avertissement écrit fut imposé aux 2 salariés, qui ne l'ont pas contesté par voie de grief.
[91] Dans le 2e cas, il s'agit d'un salarié du service des travaux publics qui avait décidé, par lui-même et sans en parler à ses supérieurs, de localiser une conduite d'égout pour une résidence privée, qui ne relève pas de la juridiction de la Ville, d'avoir mobilisé sans permission un technicien en génie civil et d'avoir perdu toute une journée de travail dans cette opération.
[92] Dans ce cas, survenu le 14 novembre 2012 - soit après le dépôt du présent grief - un avis de convocation relatif à cette affaire démontre que la Ville n'a pas convoqué le salarié fautif dans le cadre d'une enquête dite « administrative », mais a procédé directement à une rencontre de nature disciplinaire et permis la présence d'un délégué syndical, conformément au paragraphe 21.03 de la convention collective (document S-19).
IV - L'ARGUMENTATION DES PARTIES
4.1 - L'argumentation des parties sur les moyens préliminaires du syndicat
4.1.1 - L'argumentation du syndicat sur le 1er moyen préliminaire
[93] Les arguments soulevés par le syndicat sont essentiellement ceux
qui ont été débattus lors de l'audience du 5 avril 2012 et qui sont exposés
dans la décision que j'ai rendue le 13 avril 2012 et qui fait partie intégrante
de la présente décision. Pour plus de précisions, cette décision est
répertoriée de la façon suivante :
Syndicat manuel des travailleuses et
travailleurs de Vaudreuil-Dorion et Ville de Vaudreuil-Dorion (Clayton West),
T.A. 2012-5661
que l'on peut trouver aussi à
[94] L'argumentation du syndicat est basé sur le paragraphe 21.03 de la convention collective qui se lit comme suit :
21.3 - Dans le cas où l'Employeur, par ses représentants autorisés, décide de convoquer un salarié pour des raisons disciplinaires, ce salarié doit recevoir un préavis d'au moins vingt-quatre (24) heures. Le salarié doit être accompagné d'un représentant syndical.
[95] Le procureur du syndicat, Me Kravitz, plaide en premier lieu qu'on doit donner une interprétation large et libérale à l'expression « pour des raisons disciplinaires » et ne pas limiter l'application de ce paragraphe au seul cas où l'employeur impose une sanction de nature disciplinaire.
[96] Le paragraphe 21.03, ajoute Me Kravitz, doit être interprété comme devant permettre à un salarié d'éviter précisément une sanction disciplinaire en lui donnant l'opportunité de réfléchir et d'être conseillé par un représentant syndical.
[97] La violation de ce principe, dit-il, doit entraîner automatiquement l'annulation de la mesure disciplinaire , car aucun remède n'est possible étant donné que le plaignant n'a pas été en mesure d'éviter la sanction.
[98] Me Kravitz réfère également le tribunal au paragraphe 7.06 de la convention collective qui prévoit la présence d'un représentant syndical lors de toute rencontre ou convocation chez un représentant de l'employeur, « pour toute matière ayant trait à la convention collective ».
[99] À l'appui de son argumentation, Me Kravitz dépose la jurisprudence suivante :
· Syndicat des employés de soutien du Collège Sainte-Foy c. Collège Sainte-Foy [2005] 12 avril 2005, Michaël H. Cain, arbitre ;
· Collège de Sainte-Foy c. Cain , [2005] C.S.Q. 200-17-0005747-050, 29 septembre 2005 ;
· Syndicat des employés (es) de soutien du CEGEP DU VIEUX-MONTRÉAL c. CEGEP DU VIEUX-MONTRÉAL , [2007] 30 JUIN 2007, Marc Plamondon, arbitre ;
·
Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal c. Ville de
Montréal,
[2005]
· Ville de Montréal c. Dufresne , [2005] D.T.E., 2005T-1038 (C.S) ;
· Syndicat des travailleurs de Cedrico (CSN) c. Bois d'oeuvres Cedrico inc. [2011] D.T.E ., 2011T-790 (T.A.).
·
Syndicat des travailleurs et travailleuses du cimetière
Notre-Dame-des-Negies (CSN) c. Fabrique de la paroisse Notre-Dame de Montréal
et Ladouceur
, C.S. Mtl,
4.1.2 - L'argumentation de l'employeur sur le 1er moyen préliminaire
100] Le procureur patronal. Me Charles Caza, plaide tout d'abord que le moyen préliminaire n'a pas été soulevé à la 1ere opportunité raisonnable.
[101] En effet, dit-il, il s'est écoulé un délai de 4 mois entre le dépôt du grief et la lettre du procureur syndical l'avisant qu'une telle objection préliminaire serait soulevée, délai qui est déraisonnable selon lui.
[102] Il ajoute que le paragraphe 21.03 ne s'applique pas en l'espèce puisque le 6 septembre 2011, le plaignant n'a pas été convoqué pour des raisons disciplinaires, mais dans le cadre d'une enquête administrative déclenchée par l'employeur pour vérifier son assiduité au travail.
[103] Il nie aussi l'application du paragraphe 7.06 de la convention collective puisque ce paragraphe ne fait pas référence de façon spécifique aux mesures administratives dont l'application relève des droits de gérance de l'employeur prévus au paragraphe 3.01 de la convention collective.
[104] À l'appui de son argumentation, il dépose la jurisprudence suivante :
·
Galloway Lumber Co Ltd v Labour Relations
Board of British Columbia
,
· TUAC, section locale 510 et Frères Greif inc. , D.T »E » 2006-543 T.A. Para. 24 et 25.
· Compagnie de la Baie d'Hudson et Union des employés du transport local et industries diverses, section locale 931 , D.T.E ., 99T-722 (T.A. Pp 34-35 ;
·
Travailleuses et travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 509 et Sobey's Québec (IGA Trois-Rivières no 442)
,
4.1.3 - La réplique du syndicat sur le 1er moyen préliminaire
[105] Me Kravitz dit que le moyen préliminaire a été soulevé à la 1ere occasion raisonnable puisqu'il a fait parvenir une lettre au procureur patronal, dès qu'il a été saisi du dossier, le ou vers le 19 janvier 2012.
[106] Il mentionne également qu'il s'agit d'une question de juridiction matérielle de l'arbitre qui peut être soulevée en tout temps.
[107] Il ajoute que c'est aussi une question de justice naturelle, car on a privé le plaignant de son droit d'éviter une sanction disciplinaire et de se faire conseiller adéquatement.
[108] Il dit aussi qu'il n'y a pas eu de rencontre préalable entre les parties et qu'en conséquence le délai de 4 mois entre le dépôt du grief et l'annonce du moyen préliminaire n'est nullement déraissonnable.
[109] Il dépose la doctrine et la jurisprudence suivantes concernant ces arguments :
Doctrine
· Rodrigue BLOUIN et Fernand MORIN, Droit de l'arbitrage de grief , 5e éd, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2000, pp. 348-351 ;
Jurisprudence
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
1800 c. Université du Québec à Trois-Rivières
,
·
Pavillon du Parc inc et Syndicat des employés-e-s du C.E.V
d'Aylmer (CSN)
,
·
Syndicat des employés de la Ville de Brossard (CSN) c.
Ville de Brossard
.
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier (SCEP, section locale 80 (techniciennes auxiliaires) et Exportech
Bâtisseur de réseaux
,
4.1.4 - Réponse de l'employeur
[110] Sur la rencontre de nature administrative, le procureur patronal mentionne tout d'abord que le droit d'un salarié d'être accompagné d'un représentant syndical n'existe que si la convention collective le prévoit expressément. Or, dit-il, la convention collective ne prévoit la présence d'un représentant syndical que pour les rencontres de nature disciplinaire.
[111] Me Caza mentionne ensuite qu'il est bien reconnu par les arbitres de griefs que l'employeur a le droit de convoquer un employé pour d'autres raisons que celle de lui imposer une mesure disciplinaire.
[112] Il dit aussi que le cadre de la rencontre préliminaire pour fins d'enquête administrative entre l'employeur et le salarié a pour unique but de recueillir des renseignements à l'occasion d'une enquête à caractère purement administratif et souligne que, dans le présent cas, l'employeur a demandé à rencontrer le salarié afin de lui adresser certaines questions et préoccupations relativement à sa prestation de travail.
[113] Il affirme aussi qu'il est bien établi que la rencontre de nature administrative ne nécessite pas la présence d'un délégué syndical.
[114] Pour appuyer ses prétentions, il dépose les décisions suivantes :
· Syndicat national des travailleurs de Saint-Thomas Didyme (C.S.N.) c. Donohue Saint-Félicien inc., D.T.E. 82T-184 (C.A.), p. 5 ;
·
Société des loteries du Québec c. Blais
, D.T.E.,
·
Régie intermunicipale de police de la région de Joliette et
Fraternité des policières et policiers de Joliette inc.
,
· CP Express &Transport and Transportation Communications Union , ( L.A.C. (4 th ) 445, para. 9 et 11 ;
·
Réseau de transport de Longueuil (R.T.L.) et Société des
chauffeurs d'autobus et des services connexes de la Société de transport de la
Rive-Sud de Montréal, section locale 3333 (S.C.F.P.),
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier, division Corru-gué inc et Induspac, division Corrugué inc.
,
[115] Me Caza mentionne, d'autre part, que, dans le domaine des relations du travail, prendre une approche trop formaliste quant à la procédure de grief empêche d'atteindre les buts visés par la convention collective.
[116] Il n'y a donc pas lieu, dit-il, d'accorder un caractère de déchéance à la prétention syndicale.
[117] Quoi qu'il en soit, ajoute Me Caza, le plaignant peut difficilement invoquer l'absence d'un représentant syndical comme « vice de forme » lorsqu'il est lui-même délégué syndical et surtout lorsque l'employeur a suivi à la lettre les prescriptions de la convention collective;
[118] Le procureur patronal ajoute qu'en rencontrant le salarié, l'employeur doit être de bonne foi. Ici, dit-il, l'employeur a pris le temps de recueillir la version du salarié et ce, à 2 reprises et il lui a amplement donné la chance de justifier ses agissements ;
[119] Me Caza souligne aussi qu'en rencontrant l'employeur, le salarié ne doit subir aucun préjudice. Ici, dit-il, le salarié n'a subi aucun préjudice puisque la rencontre de nature administrative s'est effectuée sans pression indue de la part de l'employeur et le salarié a eu la chance de s'expliquer à au moins 2 occasions.
[120] En conclusion, Me Caza estime que, puisque l'employeur était de bonne foi et que le salarié n'a subi aucun préjudice, la balance des inconvénients favorise l'employeur.
[121] Pour appuyer son argumentation, Me Caza ajoute la décision arbitrale suivante :
·
Syndicat du préhospitalier (FSSS-CSN) et Corporation
d'Urgences-santé
,
4.1.5 - L'argumentation du syndicat sur le 2e moyen préliminaire
[122] Le 2e moyen préliminaire soulevé par le syndicat est basé sur le paragraphe 21.02 de la convention collective qui se lit comme suit :
21.2 - Un salarié dont la conduite est sujette à un avis ou une mesure disciplinaire est avisé dans les cinq (5) jours suivant l'infraction ou de la connaissance par l'employeur de l'infraction qui justifie cet avis ou cette mesure disciplinaire avec copie au syndicat.
[123] Essentiellement, le procureur syndical souligne que, le 30 aout 2011, après les observations de MM. Gendron et Houle au domicile de M. X, l'employeur avait déjà en mains tous les faits lui permettant d'appliquer une sanction disciplinaire au plaignant.
[124] Or, dit-il, la sanction disciplinaire n'a été appliquée de façon rétroactive que le 12 septembre 2001, par le conseil exécutif de la Ville, à la suite de la recommandation de la directrice générale et l'avis de convocation du plaignant.
[125] Me Kravitz ajoute que les autres motifs soulevés par l'employeur dans sa lettre de suspension ne sont que des peccadilles et que la vérification des feuilles de temps et de la carte de poinçon du plaignant pouvait aisément se faire dans le délai de 5 jours prévu au paragraphe 21.02 de la convention collective.
[126] Me Kravitz mentionne aussi que l'employeur ne peut pas se retrancher derrière ses droits de gérance prévus aux paragraphes 3.01 et 3.02 de la convention collective puisque ceux-ci doivent être exercés dans le respect des autres articles de la convention, notamment le paragraphe 21.02.
[127] Il souligne enfin que le délai de 5 jours prévu au paragraphe 21.02 est un délai de rigueur dont l'inobservance entraîne automatique l'annulation de la mesure disciplinaire.
[128] Pour appuyer ses dires, Me Kravitz cite les décisions arbitrales suivantes :
·
L'Association des travailleurs du préhospitalier (ATPH) -
Les Syndicats de techniciens ambulanciers (R.E.T.A. - F.S.S.S - C.S.N. ) et
Coopérative des techniciens abulanciers du Québec métropolitain
,
· Banque Laurentienne du Canada c. Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 434 ;
·
Syndicat des travailleuses et travailleurs du Four Points
Sheraton Centre-Ville - CSN et Sheraton Four Points Montréal
,
4.1.6 - L'argumentation de l'employeur sur le 2e moyen préliminaire
[129] Pour Me Caza, il est bien reconnu en droit du travail que les relations industrielles doivent se dérouler de manière juste et équitable afin de ne pas miner le climat de confiance et l'esprit de collaboration entre le syndicat et la partie patronale.
[130] Il cite à ce sujet une décision de la Cour suprême du Canada dans
Nor-Man
Regional Health Authority inc. c. Manitoba Association of Health Care
Professionnals
,
[131] Il ajoute que la partie qui doit soulever une objection préliminaire doit le faire à la 1ere occasion et que le défaut d'agir ainsi laisse croire à l'employeur que le syndicat n'entendait pas soulever l'objection et il est donc forclos de le faire.
[132] Sur ce principe, il cite les décision suivantes :
· Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Ville de Montréal , D.T.E. 82T-839 (C.A.) p 5 ;
·
Bondex international et Métallurgistes unis d'Amérique,
local 7625
,
·
Matador Convertisseurs Cie et Syndicat canadien des
communications, de l'énergie et du papier, section locale 145,
·
Regroupement des techniciens ambulanciers du Québec (CSN)
et Coopérative des technicens ambulanciers du Québec métropolitain,
·
Union internationale des travailleurs et travailleuses de
l'alimentation et du commerce, section locale 500 et Maxi Châteauguay
,
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
3709 et Municipalité de Saint-Joseph-du-Lac
,
·
Université du Québec à Montréal et Syndicat des professeurs
et professeures de l'Université du Québec à Montréal (S.P.U.Q.-C.S.N.)
,
·
Société canadienne des postes c. Blouin
,
· E, Harnois Ltée et Syndicat des employés de la biscuiterie Harnois de Joliette (CSN) , D.T.E. 82T-75 (T.A.) p. 3 ;
·
Union des routiers, brasseries, liqueurs douces et ouvriers
de diverses industries, section locale 1999 et L'Oréal Canada inc.
,
· Syndicat des employées et employés de Vidéotron ltée, section locale 1417, SCFP et Vidéotron ltée, D.T.E. 2009-408 (T.A.) para 82, 91 et 92.
[133] De façon plus précise, Me Caza souligne que le syndicat aurait dû annoncer son 2e moyen préliminaire le ou vers le 19 avril 2012 lorsqu'il a fourni au syndicat les précisions demandées par requête, particulièrement celle relative à l'événement survenu le 30 août 2011 où M. West s'en rendu au domicile de M. X pour des fins étrangères à son travail.
[134] Sur l'interprétation du paragraphe 23.02 de la convention collective, Me Caza mentionne que l'employeur a le droit d'effectuer une enquête afin de prendre connaissance de tous les faits entourant le grief et que cette enquête suspend le délai prévu pour imposer la mesure disciplinaire.
[135] Il cite à ce sujet les décisions suivantes :
·
Syndicat des employées du C.E.V. D'Aylmer c. Pavillon du
Parc inc.
,
·
Travailleuses et Travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 500 et Provigo Distribution inc.
,
·
Brasserie Molson du Québec ltée et Syndicat des employés de
Molson
,
·
Union internationale des travailleurs et travailleuses unis
de l'alimentation et du commerce, section locale 500 et Maxi Châteauguay
,
·
Centre de réadaptation La Maison inc. et Syndicat canadien
de la fonction publique, section locale 2659 (FTQ)
,
·
Syndicat démocratique des employés de garage Saguenay
Lac-Saint-Jean (CSD) et Maison Mazda
,
·
Syndicat des salariées et salariés de la Coopérative de
service à domicile Lac-Saint-Jean-Est (CSD) et Coopérative de services à
domicile Lac-Saint-Jean-Est
, D.T.E.,
·
Syndicat des employées et employés de la bibliothèque de
Québec (FISA) et Institut canadien de Québec
,
·
Ville de Trois-Rivières et Association des
policiers-pompiers de Trois-Rivières inc.
,
· Sanimax EEI inc. Et Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleuses et travailleurs du Canada , 2012 EXPT-2341 (T.A.) p. 10.
4.2 - L'argumentation des parties sur le fond du dossier
4.2.1 - L'argumentation de l'employeur
[136] D'entrée de jeu, Me Caza mentionne que la faute ou le manquement du plaignant a été amplement prouvé, en particulier par le témoignage de M. Gendron, le directeur du service des eaux et par l'aveu même du plaignant dans sa déclaration écrite du 8 septembre 2011.
[137] Donc, dit Me Caza, l'évaluation du dossier doit se faire sur la sanction et uniquement sur la sanction qui doit être appliquée au plaignant.
[138] À ce sujet, il mentionne tout d'abord que ce qu'il appelle le « vol de temps » est toujours considéré par la jurisprudence arbitrale comme une faute grave qui peut aller et qui aurait pu aller, dans le présent dossier, jusqu'au congédiement.
[139] C'est une faute, dit-il, qui ébranle le lien de confiance entre l'employeur et l'employé et qui justifie l'imposition d'une sanction exemplaire et sévère.
[140] Dans le présent dossier, dit-il, l'emploi détenu par le plaignant fait en sorte que celui-ci jouit d'un grand degré d'autonomie, ce qui correspond à une obligation de loyauté et d'honnêteté beaucoup plus importante.
[141] En effet, ajoute-t-il, son emploi nécessitant des déplacements en dehors des établissements et immeubles de l'employeur lui demande une présence constante sur la route, loin du regard de son employeur et fait que son travail est en quelque sorte incontrôlable.
[142] La préméditation du geste posé, dit-il, est un autre facteur qui aggrave la nature de la faute alléguée.
[143] Nier catégoriquement et à plus d'une reprise, dit Me Caza, la teneur de son manquement professionnel aggrave la nature de la faute.
[144] Dans le cas présent, ajoute le procureur patronal, le salarié plaignant a non seulement menti à son employeur lors de la 1ere rencontre de nature administrative du 6 septembre 2011, mais il a aussi menti en effectuant sa déclaration écrite du 8 septembre 2011.
[145] De plus, dit-il, il est bien établi que le fait d'agir depuis un certain nombre d'années à titre de représentant syndical est un autre facteur aggravant et demande une responsabilité accrue de la part du plaignant.
[146] Sur le «vol de temps », il cite les décisions suivantes :
·
Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section
locale 301 SCFP et Ville de Pointe-Claire
,
·
Furfaro et Costco Canada inc.
,
·
Provigo Distribution inc.(Centre de distribution de
Bourcherville) et Travailleuses et Travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 501
,
·
Corporation d'Urgences-Santé de la région de Montréal
métropolitain et Rassemblement des employés techniciens ambulanciers du Québec
(CSN),
·
Syndicat des employées et employés de techniques
professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP/FTQ) et
Hydro-Québec, section relève de compteurs, région Le Noroît
,
·
Syndicat des fonctionnaires municipaux et Ville de Montréal
,
· Syndicat des employés et employées du Centre de santé et des services sociaux de Saint-Jérôme et Centre de santé et de services sociaux de Saint-Jérôme , A.A.S. 2008A-099 (T.A.), para. 59, 66, 68 et 69 ;
·
Syndicat du personnel de soutien de la Commission scolaire
des Patriotes c. Commission scolaire des patriotes
,
·
Syndicat des employés de Videotron Ltée, section locale
2815 et Vidéotron ltée
, D.T.E.,
·
Association des contremaîtres municipaux employés par la
Ville de Montréal inc.
et
Montréal,
·
Syndicat national des employées et employés de l'hôpital
Jean-Talon et Hôpital Jean-Talon
,
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
3055 et Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu
,
·
Centre d'accueil Marcelle-Ferron et Syndicat des employés
(ées) du Centre d'accueil Marcelle-Ferron
,
[147] Sur le fait qu'en droit une faute commise par un officier syndical constitue un facteur aggravant et que dans tous les cas, elle doit être sanctionnée plus sévèrement, Me Caza cite les décisions suivantes :
·
Saargumi Québec, division encapsulation et Métallurgistes
unis d'Amérique, section locale 9414
,
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier, section locale 2995 et Max Meilleurs et fils ltée
,
·
Papineau et Dufour Ltée et Union des bûcherons et employés
de scieries, section locale 2399
,
·
Métro-Richelieu Inc. Et Travailleuses et Travailleurs unis
de l'alimentation et du commerce, section locale 500
,
·
Syndicat démocratique des salariés de la Co-op de
Dorechester (CSD) et Exceldot, Coopérative avicole (Usine Saint-Anselme)
,
·
Syndicat des métallos, section locale 9278 et Laflamme
Portes &Fenêtres inc.
,
· L'Union des employés d'hôtels, restaurants et commis de bar, local 31 (C.T.C.) et Best Western Aéroport de Montréal , S.A. 07-03048 ;
· Meunier et Industries Di Marcantonio inc., division de Talon Mears-Metro Heel , D.T.E. 83T668, pp 25 et 26.
4.2.2 - L'argumentation du syndicat
[148] Outre les 2 moyens préliminaires plaidés précédemment, le procureur syndical, Me Kravitz mentionne que l'employeur a traité le plaignant de manière discriminatoire puisqu'il lui a appliqué une mesure disciplinaire sévère parce qu'il était un officier syndical, en l'occurrence le président du syndicat, ce qui entraîne selon lui l'annulation de la sanction pour ce seul motif.
[149] Me Kravitz mentionne qu'il est interdit à l'employeur de considérer le statut d'officier syndical comme un facteur aggravant dans l'imposition d'une mesure disciplinaire.
[150] Il cite à ce sujet les 3 décisions suivantes :
· La compagnie Price Ltée (appelante) c. René Gagné et al et Syndicat national des travailleurs de la pulpe et du papier de Kégogami inc.(intimés) , [1982] T.T. 471 ;
·
John Silva c. Centre hospitalier de l'Université de
Montréal - Pavillon Notre-Dame
,
·
Douglas Aircraft Co of Canada c. McConnell
,
[151] Il cite également certains extraits de l'ouvrage des auteurs Linda Bernier, Guy Blanchet, Lukasz Granosik et Éric Séguin, Les mesures disciplinaires et non disciplinaires dans les rapports collectifs de travail, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2012
[152] Me Kravitz mentionne ensuite qu'en matière de vol, l'employeur doit prouver l'intention du salarié fautif, intention qui n'existe pas, selon lui, dans le présent dossier.
[153] En effet, le plaignant a été pris à l'improviste par son collègue de travail, il a accepté à contre-coeur de se rendre à son domicile en pensant que cela ne prendrait que quelques minutes et il n'existe, selon Me Kravitz, dans le cas du plaignant, aucune preuve de collusion, de stratagème ou d'entente planifiée et délibérée pour frauder l'employeur.
[154] Il cite sur le sujet, les décisions suivantes :
· S.C.F.P. c. Ville de Deux-Montagnes , [2005] D.T.E. 2005T-750 (T.A.) ;
· Sondargée c. Commission des relations du travail , [2012] D.T.E. 2012T-201 (C.S.)
· Centre d'hébergement Arsyle c. SQEES [2006] D.T.E. 2006T-430 (T.A.) ;
·
Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin inc. c. Syndicat
démocratique des salariés de Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin
,
[1999]
·
Impark Stationnement Impérial Ltée c. Union des employés et
employées de service
, [1996]
[155] Me Kravitz plaide ensuite que la suspension de 15 jours ouvrables imposées par l'employeur dans le cas du plaignant est déraisonnable pour les motifs suivants :
1. L'employeur a voulu tendre un piège au plaignant et il a joué à la cache-cache avec lui en refusant de le confronter sur l'incident du 30 août 2011 et en lui posant des questions générales dont l'unique but était de rechercher la commission d'autres fautes ;
2. On ne peut pas reprocher au plaignant d'avoir menti puisqu'on a choisi délibérément de ne pas le confronter directement concernant l'événement du 30 août 2011 et le plaignant a répondu du mieux qu'il pouvait ;
3. Le plaignant n'a pas menti sur sa déclaration du 8 septembre 2011. Il a tout au plus mal évalué le temps, car il ne porte pas de montre sur lui ;
4. Il faut faire une différence entre un « vol de temps » et une « perte de temps » et l'employeur a fait cette distinction en imposant des sanctions disciplinaires beaucoup moins graves pour des pertes de temps, dans des circonstances similaires au présent dossier ;
5. En tout temps, le plaignant ne savait pas combien de temps le détour au domicile de M. X prendrait de temps et il pensait de bonne foi que ce ne serait pas long ;
6. Il n'y a aucune preuve au dossier que le plaignant a manipulé les feuilles de temps puisque ces feuilles de temps sont souvent préparées à l'avance ;
7. Le plaignant a 18 ans d'ancienneté et il n'a aucun dossier disciplinaire ;
8. Le seul reproche que l'on peut faire au plaignant est de n'avoir pas averti son supérieur et de ne pas avoir déduit le temps perdu sur ses feuilles de temps, ce qui constitue selon lui une seule et même faute, qui mérite tout au plus 3 jours de suspension.
[156] À l'appui de ses prétentions sur le caractère déraisonnable de la sanction imposée au plaignant, Me Kravitz cite les décisions suivantes :
·
Résidence Les Floralies Lachine c. Syndicat canadien des
communications, de l'énergie et du papier
, [2011]
· Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier c. Purolator , [2007] D.T.E. 2007T-1029 (T.A.) ;
· Nellson Neutratical Canada inc. c. T.U.A.C. , [2008] D.T.E. 2008T-697 (T.A.) ;
· Collège Ahuntsic c. Syndicat du personnel de soutien du Collège Ahuntsic , [2007] D.T.E. 2007T-889 (T.A.) ;
· Syndicat national des employés du bois ouvré de Warwick (CSD) c. Roland Boulanger et Cie Ltée, [2008] D.T.E. 2008T-229 (T.A.).
V- DÉCISIONS ET MOTIFS
5.1 - Décision sur la 1ère objection préliminaire
[157] Le syndicat reproche à l'employeur d'avoir forcé une rencontre avec le plaignant, le 6 septembre 2011, pour lui poser des questions sur sa prestation de travail, sans la présence d'un délégué syndical et demande l'annulation de la mesure disciplinaire.
[158] Dans son témoignage, le plaignant mentionne qu'il a demandé au début de la rencontre s'il devait être accompagné d'un représentant syndical et on lui aurait répondu que ce n'était pas nécessaire. La plaignant a par la suite répondu aux questions.
[159] Dans sa version des faits sur cette rencontre (document V-8), l'employeur mentionne qu'il s'agit d'une rencontre de nature « administrative » à des fins d'enquête.
[160] Le syndicat invoque principalement le paragraphe 21.03 de la convention collective en disant qu'il s'agit d'une rencontre tenue pour « des raisons disciplinaires » et qui exige la présence d'un représentant syndical.
[161] Le syndicat invoque aussi le paragraphe 7.06 qui exige, lors d'une rencontre avec un salarié, la présence d'un représentant syndical pour « toutes matières relevant de la convention collective » .
[162] L'employeur plaide au départ que cette objection préliminaire doit être rejetée prima facie parce qu'elle n'a pas été soulevée à la 1ère opportunité raisonnable. Pour disposer de cet argument, il faut d'abord avoir une connaissance très claire des faits, notamment les délais relatifs à ce dossier, à partir des éléments de preuve recueillis lors des audiences de ce grief, mais également la correspondance échangée entre les parties dont j'ai reçu copie. Ensuite il faut analyser les règles de droit applicables en l'espèce et tirées de la doctrine et de la jurisprudence, notamment celles soumises par les parties.
[163] D'abord les faits. Le grief (S-2) est déposé le 23 septembre 2011 et l'employeur en accuse réception le 27 septembre 2011 (S-7). Le syndicat référe le grief en arbitrage le 6 octobre 2011 (S-8).
[164] Le 19 décembre 2011, j'apprends par une lettre de Me Caza, le procureur de l'employeur, que je suis proposé par les parties pour agir comme arbitre dans le présent dossier et j'accepte ce mandat par courriel le lendemain 20 décembre 2011.
[165] La lettre de Me Caza du 19 décembre 2011, contient une copie conforme adressée à Me Edward Kravitz, qui est conseiller syndical à la Fédération des employées et employés des services publics de la CSN.
[166] On ne connaît toutefois pas la date exacte où le dossier a été confié à Me Kravitz, mais on sait qu'au 19 décembre 2011, son nom apparaît au dossier.
[167] Le 12 janvier 2012, je fixe la date d'audience, avec le consentement des parties, au 5 avril 2012.
[168] Le 18 janvier 2012, le procureur patronal, Me Caza nous informe du lieu de l'audience.
[169] Le lendemain 19 janvier 2012, Me Kravitz envoie une lettre à Me Caza lui mentionnant qu'il a l'intention de soulever une objection préliminaire basée principalement sur le paragraphe 21.03 de la convention collective alléguant, entre autres, que le plaignant a été convoqué le 6 septembre 2011 à une rencontre avec l'employeur sans la présence d'un représentant syndical. La lettre contient également une requête en précisions.
[170] Le lendemain 20 janvier 2012, Me Caza répond qu'il va s'opposer à cette objection préliminaire pour le motif principal qu'il s'est écoulé 4 mois depuis le dépôt du grief et qu'elle aurait dû être soulevée à la 1ère opportunité raisonnable. Me Caza s'oppose également à la requête en précisions. Il demande également à Me Karvitz de lui acheminer ses autorités sur les 2 requêtes.
[171] Le 23 janvier 2012, Me Kravitz répond qu'il soumettra tous ses arguments et autorités lors de l'audience prévue pour le 5 avril 2012.
[172] Le 28 janvier 2012, Me Caza répond que tous les arguments seront soulevés devant moi le 5 avril 2012.
[173] Le 5 avril 2012, j'entends la preuve et l'argumentation des parties sur les 2 questions soulevées par le syndicat et le 13 avril 2012, je rends une décision interlocutoire accueillant la requête en précisions et reportant l'étude de l'objection préliminaire après l'enquête sur le fond du dossier.
[174] Dans ma décision interlocutoire du 13 avril 2012, j'ai brièvement distingué, à l'aide des auteurs Blouin et Morin [1] , les diverses sortes d'objections préliminaires (pp 14-15 de la décision) et je suis arrivé à la conclusion que l'objection préliminaire soulevée par le syndicat était une question visant la compétence matérielle de l'arbitre et non pas sa compétence personnelle ni la compétence formelle du processus d'arbitrage.
[175] De façon plus précise, je reprends ici un passage assez clair des mêmes auteurs qui apparaît dans la dernière édition de leur livre : [2]
VI.21 - La notion de compétence matérielle embrasse toutes le situations où l'on peut raisonnablement douter de l'existence même du grief. Il peut en être ainsi en raison de la nature de la réclamation, des personnes impliquées ou encore parce qu'il n'y aurait pas ou plus de litige à trancher. Le grief serait en quelque sorte, une coquille vide. Parmi les nombreuses hypothèses qui porte sur la compétence ratione materiae d'un arbitre de giref, nous soulignons notamment ces situations :
- la mésentente n'est pas qualifiable de grief ;
- il y a eu règlement ou désistement du grief ;
- l'affaire est déjà tranchée ;
- la personne visée au grief n'est pas assujettie à la convention collective ;
- l'employeur n'a pas respecté les conditions préalables à l'imposition d'une mesure disciplinaire ;
- le grief est prescrit ;
- etc.
(Je souligne)
[176] Ici, le syndical prétend que l'employeur n'a justement pas respecté les conditions préalables à l'imposition de la mesure disciplinaire puisqu'il aurait - je dis bien aurait - forcé le plaignant à assister à une rencontre de nature disciplinaire, sans la présence d'un représentant syndical, ce qui aurait pour effet de vicier tout le processus décisionnel de l'employeur et justifier l'annulation de la mesure disciplinaire.
[177] Dans le paragraphe qui suit, les auteurs Blouin et Morin discutent du moment où cette objection préliminaire doit être soulevée, de la façon suivante :
VI.22 - La compétence matérielle de l'arbitre peut être attaquée, en principe, en tout temps . À maintes reprises, les tribunaux ont rappelé que bien qu'il soit vrai qu'en certaines circonstances le défaut de soulever une objection préliminaire en temps opportun peut faire perdre le privilège de la soulever postérieurement, cette règle ne vaudrait pas en matière de compétence ratione materiae. Il en est ainsi parce que les parties ne peuvent pas reconnaître à l'arbitre par simple consentement express ou tacite ou par défaut de procédure, une juridiction qu'il n'a pas, ni par suite d'une erreur commune. L'arbitre peut-il soulever d'office une telle question même si aucune objection ne lui a été formulée? Nous sommes d'avis aussi qu'il peut pour assurer ainsi la bonne administration de la justice, prendre une telle initiative bien qu'il se doit d'être prudent alors qu'il peut ne pas alors disposer de tous les éléments de cette problématique, et ce, au-delà des premiers apparences. Il est possible que les éléments de la preuve jusqu'à alors administrés fournissent une compréhension incomplète de la situation. Si l'arbitre de grief nourrit un doute raisonnable concernant sa compétence ratione materiae , il peut certes en informer les parties pour leur permettre qu'elles soient entendues sur ce point de droit.
(Je souligne)
[178] Et plus loin, on dit ceci :
(...) En somme, le défaut de compétence matérielle peut être soulevé en tout temps. Il est néanmoins d'usage que la partie qui envisage de soulever éventuellement un tel point de droit en avise la partie adverse dès le début de l'enquête (...)
(Je souligne)
[179] Ceci étant dit, je ne suis pas sans savoir qu'il existe en droit arbitral du travail des théories tirées de notre droit civil et de la common law qui permettent aux arbitres de sanctionner par une fin de non recevoir le comportement d'une partie qui a laissé croire par son silence ou des gestes précis qu'il n'entendait pas utiliser un moyen que lui procurent les modalités de la convention collective.
[180] C'est ce que prétend ici l'employeur en disant que le syndicat est forclos de soulever l'application des paragraphes 21.03 et 7.06 étant donné qu'il a laissé croire à l'employeur pendant une période de 4 mois qu'il n'entendait pas la soulever puisque, selon l'employeur, il aurait dû la soulever à la 1ere occasion raisonnable.
[181] Même si je prenais pour acquis qu'il fallait soulever la question de la présence d'un représentant syndical à la 1ère opportunité raisonnable, ce qui n'est pas le cas pour les raisons que j'ai mentionnées, dans les faits, on ne peut pas conclure que le syndicat ait par son silence indiqué à l'employeur qu'il avait renoncé à utiliser ce moyen lors de l'audience.
[182] Il est vrai qu'entre le référé en arbitrage le 6 octobre 2011 et l'entrée présumée de Me Kravitz au dossier le ou vers le 19 décembre 2011, il s'est écoulé une période de 2 mois, mais ce délai ne m'apparait pas déraisonnable si on considère que le dossier du plaignant n'a pas été traité au niveau local ou régional, mais a été confié au niveau national à un conseiller syndical de la Fédération des employées et employés du secteur public, qui, en plus, est avocat.
[183] Le 19 décembre de chaque année se situe au début de la période de Noël et du Nouvel An, une période où il y a beaucoup de congés et les gens reprennent généralement le travail dans la 2e ou la 3e semaine de janvier.
[184] Or, le procureur syndical a avisé Me Caza le 19 janvier 2012 qu'il entendait soulever cette question de l'absence d'un représentant syndical et ce, dans la semaine qui a suivi la fixation, le 12 janvier 2012, de la date d'audience au 5 avril 2012. On ne peut certes pas conclure que ce délai est déraisonnable, même s'il fallait appliquer la règle de la 1ere opportunité raisonnable, qui ne s'applique pas de toute façon en l'espèce.
[185] De toute façon, l'employeur n'a subi aucun préjudice puisqu'il a eu amplement le temps de se préparer pour répondre à ce moyen préliminaire entre le 19 janvier 2012 et le 5 avril 2012, date de la 1ere audience et il a eu l'occasion de le faire 2 fois plutôt qu'une puisque la décision sur cette question a été reportée après l'audition sur le fond du dossier. L'objection patronale est donc rejetée.
[186] Ceci étant dit, il convient d'examiner la portée des paragraphes 7.06 et 21.03 de la convention collective. Ces articles se lisent comme suit :
7.0.6 - Pour toute matière ayant trait à la convention collective , tout membre du Syndicat doit être accompagné d'un représentant syndical lors d'une convocation ou d'une rencontre chez un représentant de l'Employeur. Cependant, le salarié peut indiquer qu'il refuse la présence syndicale en présence de l'Employeur. La présente n'a pas pour effet de limiter les relations normales entre l'Employeur et les salariés.
21.03 - Dans le cas où l'Employeur, par ses représentants autorisés, décide de convoquer un salarié pour des raisons disciplinaires , ce salarié doit recevoir un préavis d'au moins vingt-quatre heures. Le salarié doit être accompagné d'un représentant syndical.
(Je souligne)
[187] Le paragraphe 7.0.6 utilise l'expression « pour toute matière ayant trait à la convention collective » qui est assez large et on ne peut certes pas dire à priori que la rencontre du 6 septembre 2011 entre l'employeur et le plaignant ne relevait pas « d'une matière ayant trait à la convention collective ».
[188] En ce qui concerne le paragraphe 21.03, l'expression « pour des raisons disciplinaires » est plus ambigüe, car l'employeur a convoqué le plaignant à une rencontre le 6 septembre 2011, pour l'interroger dans le cadre d'une enquête de nature administrative qu'il a déclenchée après avoir pris connaissance de certains faits impliquant le comportement problématique du plaignant et d'un collègue, M. X, concernant leurs prestations de travail.
[189] De toute façon, le problème ne consiste pas uniquement à déterminer s'il y a eu violation de ces paragraphes par l'employeur, mais surtout de se demander si une telle violation pourrait entraîner, comme le demande le procureur syndical, l'annulation pure et simple de la mesure disciplinaire prise par l'employeur à l'endroit du plaignant.
[190] Il faut donc déterminer, dans un premier temps, si l'utilisation du verbe « doit » impose une règle de valeur simplement indicative ou, au contraire, impérative et si, oui, elle emporte avec elle, comme sanction, l'annulation pure et simple de la mesure disciplinaire.
[191] Sur le choix du verbe « devoir » voici ce que disent les auteurs Blouin et Morin à ce sujet :
(…) La convention collective peut établir des nuances sur le caractère impératif, incitatif ou facultatif d'une règle que les parties se donnent. Souvent ces variations, ces nuances ou ces distinctions sont énoncées à l'aide des verbes « pouvoir » et « devoir et en y apportant différents qualificatifs. Malgré leur connotation première, le verbe « pouvoir » peut ne pas toujours revêtir un sens purement facultatif, tout comme le verbe « devoir » est susceptible de traduire des degrés variables d'impératif. Tout dépend de l'intention manifestée par l'ensemble de la disposition ou du sous-groupe de modalités complémentaires. Si la formulation de la modalité, sans égard à l'usage des verbes ''pouvoir » ou « devoir », traduit une règle de conduite purement indicative, le fait de ne pas la suivre ne produit pas d'effets juridiques directs puisque c'est là l'intention présumée des parties. Si une autre formulation offre une autre alternative, la liberté de manoeuvre se limite à cette alternative et lorsque le titulaire a choisi l'un de ses volets, la règle de conduite retenue devient contraignante, sauf indication contraire à la convention. Il est vrai que généralement l'usage du verbe « devoir » donne lieu à une règle de nature impérative. On peut parfois l'utiliser aussi pour établir une disposition dite directe ou incitative . Ces quelques variations sur ces deux verbes illustrent le nombre considérable de nuances quant à la fonction effective et quant aux effets réels des obligations et des droits qui résultent du libellé d'une disposition de la convention collective. En chaque cas, une analyse des verbes et des expressions doit être faite pour respecter la portée générale de l'ensemble de la disposition . Il faut surtout éviter l'automatisme et croire que la seule présence de tel verbe ou de telle formulation plus ou moins consacrée engage nécessairement un type donné et exclusif d' obligation ou de droit. Tous les négociateurs ne sont pas nécessairement de « savants légistes » et ils n'élaborent pas toujours la convention collective dans des officines feutrées.
(Je souligne)
[192] En ce qui concerne le paragraphe 7.06, je ne peux pas conclure avec certitude que l'utilisation du verbe « doit » par les parties indique de façon certaine qu'il s'agit d'une disposition impérative entraînant une sanction automatique contre l'employeur en cas de violation.
[193] La raison est fort simple : l'expression « pour toute matière ayant trait à la convention collective » est très large et couvre une infinie de situations qui ne conduisent pas nécessairement à une prise de décision de la part de l'employeur.
[194] D'autre part, le paragraphe 7.06 fait partie d'un chapitre intitulé « Affaires professionnelles et syndicales » qui concernent surtout les responsabilités syndicales et permettent aux représentants du syndicat de veiller à l'application efficace de la convention collective.
[195] Le droit pour un représentant syndical d'être présent lorsque l'employeur convoque un salarié pour une matière ayant trait à la convention collective est d'abord un droit accordé au représentant syndical, qui agit comme mandataire des salariés plutôt qu'un droit direct accordé aux salariés.
[196] S'il n'y a aucune décision prise contre un salarié, mais une simple demande d'information de la part de l'employeur, l'absence du délégué syndical n'est pas fatale, car la violation de ce paragraphe n'entraîne aucune décision de l'employeur qui serait sujette à sanction.
[197] Je considère ainsi que l' utilisation du verbe « doit » au paragraphe 7.06 a une valeur plus indicative qu'impérative pour s'assurer que toutes les rencontres entre l'employeur et ses salariés aient lieu, en principe, en présence d'un représentant syndical à moins que les salariés renoncent à cette présence.
[198] Je remarque également qu'il n'y a à ce sujet aucune clause spécifique entraînant la déchéance de l'action patronale et on comprend aisément pourquoi dans des situations où la rencontre est uniquement de nature informationnelle.
[199] Même si j'arrivais à la conclusion que le paragraphe 7.06 est de nature impérative, ce qui n'est pas le cas, pour les raisons susmentionnées, il faut comprendre qu'elle ne conduirait pas nécessairement à une mesure de déchéance de l'action patronale. Voici ce que disent les auteurs Blouin et Morin sur le sujet : [3]
V.45
-
Une
disposition conventionnelle serait impérative s'il ressort de son libellé la
volonté claire des parties qu'elle soit d'application stricte. Une procédure
impérative n'est cependant pas toujours de déchéance. En certaines
circonstances, les vices de fond sont en effet qualifiés comme irrégularités
réfragables, c'est-à-dire que l'on peut éventuellement corriger, par opposition
aux vices irréfragables (de déchéance) dans le sens que l'on ne peut
ultérieurement bonifier.
Pour qu'il y ait perte de droit à la suite du
défaut du respect de la procédure, la convention collective devrait, de quelque
manière préciser cet effet alors que l'on peut présumer qu'elles connaissent le
sens et la portée de l'article
(…)
V.46
- Lorsqu'il
appert que la procédure n'est pas de déchéance, que l'irrégularité n'a pas été
soulevée à la première occasion et qu'il ne résulterait aucun préjudice majeur
de procéder à la correction du manquement ou de l'omission,
l'arbitre
devrait alors adopter une approche qui atteste que le fond l'emporte sur la
forme
(art.
(Je souligne)
[200] Dans le présent dossier, il n'y a pas de clause expresse indiquant que le non respect du paragraphe 7.06 emporte la déchéance de l'action patronale et le préjudice subi par le plaignant est nul puisque il a admis, par la suite, la survenance de l'événement du 30 août 2011.
[201] En ce qui concerne le paragraphe 21.03, les parties ont exigé que, lorsqu'un employeur convoque un salarié, pour des raisons disciplinaires , il doit envoyer à ce salarié un préavis écrit de 24 heures et doit s'assurer que ce salarié est accompagné d'un représentant syndical.
[202] Encore là, il n'y pas de clause spécifique de déchéance et la preuve révèle que de toute façon, le plaignant a été dûment convoqué le 12 septembre 2011, par un préavis de 24 heures à une rencontre où on lui a donné les motifs d'une sanction disciplinaire et pour laquelle il était accompagné d'un représentant syndical.
[203] L'argument-clef du syndicat est de dire que le plaignant a été privé du droit à une défense pleine et entière puisqu'il n'a pas eu l'opportunité, le 6 septembre 2011, d'être conseillé et de faire valoir son point de vue de façon à éviter la mesure disciplinaire.
[204] La rencontre du 6 septembre 2011 revêtait plus les aspects d'une rencontre d'une nature administrative, puisque la preuve révèle que l'employeur avait entrepris depuis le 30 août une enquête visant à déterminer la qualité de la prestation de travail du plaignant et d'un collègue de travail, M. X, que les 2 salariés ont été l'objet de filature et que l'employeur désirait les interroger sur certaines activités personnelles qu'ils pouvaient avoir mené pendant leurs heures de travail.
[205] Je comprends que l'expression « pour des raisons disciplinaires » est ambigüe et qu'il faut l'interpréter, mais j'estime que cette interprétation doit être conforme à la finalité même du régime d'arbitrage en s'assurant, comme le disent les auteurs Blouin et Morin, « que la question principale du grief soit tranchée et non pas voie indirecte ou circonstancielle à la suite de simples accidents de parcours ».
[206] Ceci est d'autant plus vrai qu'il y a eu de toute façon une rencontre de nature disciplinaire avec préavis et présence d'un représentant syndical et que le préjudice subi par le plaignant est minime puisqu'il a eu l'occasion de se faire entendre en présence d'un représentant syndical et qu'il a produit une déclaration écrite admettant une partie des faits. L'objection préliminaire du syndicat basée sur les articles 21.03 et 7.06 est donc rejetée.
5.2 - Décision sur la 2e objection préliminaire du syndicat
[207] La 2e objection préliminaire du syndicat est basée sur le paragraphe 21.02 de la convention collective qui se lit comme suit :
21.02 - Un salarié dont la conduite est sujette à un avis ou une mesure disciplinaire est avisé dans les cinq (5) jours ouvrables suivant l'infraction ou de la connaissance par l'Employeur de l'infraction qui justifie cet avis ou cette mesure disciplinaire avec copie au Syndicat.
[208] L'employeur encore là soulève la « tardivité » de ce moyen préliminaire en alléguant que c'est seulement dans le cadre de son argumentation finale qu'il a soulevée cette objection alors qu'il aurait dû le faire à compter du moment où des précisions lui ont été fournies par l'employeur, dans une lettre datée du 19 avril 2012, contenant, en particulier le passage suivant :
Le 30 août 2011, Monsieur West s'est rendu à la résidence de M. X à Saint-Lazare en matinée en compagnie de ce dernier pour des fins étrangères à son travail, pour une durée minimale de 1h30 en incluant le temps de déplacement. D'autres précisions peuvent être apportées par Monsieur West lors de son témoignage.
[209] Le défaut par l'employeur d'aviser un salarié dans les 5 jours ouvrables suivant l'infraction ou de la connaissance par cet employeur qui justifie cet avis, est, à mon avis, encore là, une question qui relève de la compétence matérielle de l'arbitre puisque le syndicat allègue que l'employeur n'a pas respecté les conditions préalables à l'imposition d'une mesure disciplinaire, un des exemples mentionnés par les auteurs Blouin et Morin sous cet item. [4]
[210] Cette objection peut donc être soulevée en tout temps et il est préférable qu'elle soit soulevée au début de l'audition, en autant bien sûr qu'on ait en mains tous les éléments de cette problématique afin d'avoir une compréhension complète de la situation,
[211] Ici, ce n'est pas exactement le cas. Le syndicat avait été informé, grosso modo, de l'événement du 30 août 2011, au cours duquel le plaignant se serait rendu à la résidence de M. X, pendant ses heures de travail, mais le portrait global de cet événement s'est précisé par la suite, surtout avec le témoignage du directeur du département des eaux, M. Christian Gendron, complété par celui de Me Isabelle Bureau, directrice des ressources humaines de l'employeur.
[212] Comme le souligne avec justesse le procureur syndical, le syndicat savait que l'employeur reprochait au plaignant de s'être rendu à la résidence de M. X le 30 août 2011, mais il n'était pas au courant de l'ampleur de la connaissance de ces faits, dans tous leurs détails, comme on l'a appris à la suite des témoignages de M. Gendron et de Me Bureau.
[213] On ne peut donc pas reprocher au procureur syndical d'avoir pris le temps qu'il fallait pour bien maîtriser tous les détails de l'ampleur de la connaissance patronale sur cet événement avant de soulever cette objection.
[214] On pourrait peut-être à la rigueur reprocher au procureur syndical d'avoir attendu la fermeture de la preuve, patronale et syndicale, et d'avoir soulevé l'objection seulement lors de l'argumentation, mais cette légère erreur de parcours a été rapidement corrigée puisque le syndicat ne s'est pas objecté à ce que l'employeur ait l'occasion de bonifier sa preuve et de faire toutes les représentations pertinentes pour répondre à cette objection.
[215] En conséquence, l'employeur n'a subi aucun préjudice de ce petit incident de parcours, d'autant plus que sa preuve additionnelle portait sur des faits qu'il connaissait et qu'il avait jugé bon de ne pas révéler en preuve principale, notamment toute la preuve se rapportant à la filature de M. X entre le 1er et le 6 septembre 2011 et celle du plaignant le 6 septembre 2011.
[216] Cette preuve est importante dans la mesure où l'employeur prétend qu'il n'a eu une connaissance complète du dossier que le 6 septembre 2011, après avoir interrogé le plaignant et M. X sur leurs prestations de travail. La fin de non recevoir patronale à l'objection préliminaire du syndicat basée sur le paragraphe 21.02 est donc rejetée.
[217] Ceci étant dit, je vais disposer maintenant de l'objection préliminaire syndicale.
[218] D'abord, il est clair dans mon esprit, qu'à la suite de la connaissance de certains faits survenus le 30 août 2011, impliquant 2 salariés qui étaient en même temps président et vice-président du syndicat, l'employeur avait toutes les raisons du monde de ne pas précipiter les choses et de déclencher une enquête visant à déterminer l'ampleur de la conduite de ces 2 salariés, de vérifier s'il n'y avait pas à ce sujet, un « système » organisé mis en place au plus haut niveau syndical pour frauder l'employeur sur des prestations inexistantes de travail ou à tout le moins une collusion ou une complicité planifiée entre ces 2 salariés.
[219] C'est pour cela que l'employeur, en suivant les recommandations de ses procureurs, a décidé de faire une vérification plus poussée des allées et venues des 2 salariés, en particulier M. X, celui que l'employeur visait le plus, mais également le plaignant.
[220] Après avoir recueilli certains éléments de preuve additionnels, notamment lors de la filature de M. X, l'employeur a voulu rencontrer les 2 salariés, dans le cadre de cette enquête, pour sonder leur honnêteté en leur posant des questions sur la nature de leurs prestations de travail, ce qui était tout à fait légitime.
[221] La preuve a démontré par la suite que M. X était le principal coupable dans tous ces événements et que sa filature a permis à l'employeur, comme je l'ai mentionné, de découvrir des éléments de preuve additionnels contre lui.
[222] Mais il faut comprendre aussi que l'employeur, avec les faits qu'il avait en mains le 30 août 2011, avec la participation apparente du plaignant, ne pouvait pas séparer les dossiers et se devait de vérifier la présence ou non d'un système organisé ou à tout le moins une complicité entre les 2 salariés.
[223] Autrement dit, le plaignant a été « emporté », si je puis dire, par l'ampleur de l'enquête dirigée principalement contre M. X et on ne peut pas reprocher à l'employeur d'avoir agi comme il l'a fait.
[224] Ce n'est pas parce que l'employeur n'a pas découvert des faits incriminants contre le plaignant, entre le 1er septembre 2011 et le 6 septembre 2011, avant son interrogatoire, qu'il faille conclure qu'il devait agir précipitamment contre le plaignant, dans les 5 jours ouvrables suivants les événements du 30 août 2011.
[225] D'autre part, la filature entreprise par l'employeur a permis à ce dernier de poser un juste regard sur la différence de degré respectif de responsabilité des 2 salariés et de lui permettre de leur imposer des sanctions disciplinaires qui tiennent compte de cette différence.
[226] L'employeur a pu également tester la crédibilité du plaignant par son interrogatoire du 6 septembre 2011 et prendre connaissance d'un aveu écrit de ce dernier, le 8 février 2011, donc d'être en mesure d'avoir un « portrait global » du dossier afin de prendre la bonne décision concernant la juste mesure disciplinaire à être appliquée.
[227] L'employeur a déposé plusieurs décisions jurisprudentielles qui reconnaissent l'existence d'un pouvoir d'enquête de l'employeur et qui mentionnent que ce pouvoir d'enquête interrompt généralement la computation des délais qui sont généralement prévus dans les conventions collectives dans l'imposition des mesures disciplinaires.
[228] Je pense, entre autres, à la décision rendue par la Cour d'appel dans l'affaire Pavillon du Parc (sur le droit pour l'employeur de mener une enquête de nature administrative) et celle rendue par l'arbitre Jean-Louis Dubé, dans l'affaire Provigo Distribution (Maxi Rosemère . (sur l'interruption de la computation des délais).
[229] Je cite également un résumé d'une décision rendue par l'arbitre François Hamelin, dans l'affaire Brasserie Molson où on dit ceci :
La « connaissance » d'une infraction implique davantage que la réception d'une information brute, objective et factuelle, comme les rapports hebdomadaires de l'enquêteur. L'employeur doit d'abord avoir une connaissance complète de la nature et des principales caractéristiques de cette infraction, et ce, afin d'en saisir l'ampleur, la gravité et la portée en vue d'imposer une sanction appropriée . Certains manquements du salariés peuvent être chroniques et répétés . Chacune des infractions n'est pas en soi importante, mais la répétition systématique de celles-ci peut donner lieu à une mesure disciplinaire. En ce sens l'expression « prendre connaissance de l'infraction » qu'on trouve à la clause de la convention collective relative au délai d'imposition de la mesure disciplinaire implique que l'employeur doit avoir une connaissance de la nature et des circonstances particulières de chaque situation déviante . La gravité réelle de certaines infractions ne pouvant être appréciées qu'avec une vue d'ensemble, on ne peut conclure que le délai court à compter de chaque incident noté , surtout pas lorsqu'un comportement chronique est en cause. Tant que l'employeur peut raisonnablement établir que son enquête est en cours et qu'il ne l'a pas réellement terminée, on ne peut conclure qu'il a pris juridiquement connaissance de l'infraction. Cette évaluation est une question de fait qui s'apprécie dans chaque cas. En l'espèce, l'employeur a respecté le délai d'imposition de la mesure.
(Je souligne)
[230] C'est exactement le cas ici. L'employeur avait tout à fait le droit, comme je l'ai mentionné, « d'avoir une vue d'ensemble » du comportement présumé déviant des 2 salariés et de vérifier si ce comportement pouvait être le résultat d'une complicité planifiée ou d'une collusion ou d'un système bien organisé pour frauder l'employeur.
[231] D'ailleurs, cette enquête a permis à l'employeur de faire la part des choses et de traiter le plaignant de manière beaucoup moins sévère que M. X, qu'il ne l'aurait fait s'il avait agi de manière rapide et impulsive.
[232] Le délai à l'intérieur duquel l'employeur a mené son enquête n'est pas déraisonnable puisque cette enquête a duré environ 4 jours ouvrables entre le 1er septembre 2011 et le 6 septembre 2011.
[233] Le plaignant a été suspendu avec solde le 6 septembre 2011, a été convoqué par écrit le 9 septembre 2011 et la rencontre disciplinaire a eu lieu le 12 septembre 2011, soit 4 jours ouvrables après la fin de l'enquête le 6 septembre 2011. En conséquence, la « connaissance » de l'employeur de l'infraction reprochée au plaignant qui justifie la mesure disciplinaire a eu lieu le 6 septembre 2011 et l'employeur a donc respecté le délai de 5 jours ouvrables prévu au paragraphe 21.02. L'objection préliminaire syndicale est donc rejetée.
5.3 - Décision sur le fond du dossier
[234] En matière disciplinaire, il y a 2 grands items : la faute (ou le manquement) et la sanction.
[235] La faute (ou le manquement) comporte 2 éléments : un acte ou un comportement précis et prouvé, qui représente un élément objectif et une conduite moralement répréhensible, qui représente un élément subjectif.
[236] De façon générale, la doctrine et la jurisprudence reconnaissent qu'en matière disciplinaire, l'employeur a le fardeau de la preuve, qui est double, soit le fardeau de présentation de la preuve, mais aussi le fardeau de persuasion.
[237] Dans le présent dossier, le paragraphe 21.07 de la convention collective mentionne expressément ce fardeau et ce paragraphe est clair et ne souffre d'aucune interprétation :
21.07 - Si un salarié formule un grief au sujet d'une mesure disciplinaire, l'Employeur doit établir par preuve le bien fondé, les motifs d'un tel avis ou mesure disciplinaire.
[238] Nul ne saurait nier que la suspension sans solde de 15 jours ouvrables imposée au plaignant dans le présent dossier constitue une mesure disciplinaire.
[239] Au départ, il faut avoir bien en vue la lettre envoyée au plaignant le 12 septembre 2011. Elle se lit comme suit :
Le 12 septembre 2011
EN MAINS PROPRES
Monsieur Clayton West
[…] Rivière-Beaudette (Québec) […]
Objet : Avis de recommandation de votre suspension sans solde pour une
période de quinze (15) jours ouvrables.
Monsieur,
Le 6 septembre dernier, nous vous avons rencontré dans le cadre d'une enquête concernant votre prestation de travail. Compte tenu de la nature des informations dont nous disposions et de vos réponses à nos questions, nous vous avons avisé de votre suspension administrative pour la durée de notre enquête.
Au cours de la rencontre du 6 septembre, nous vous avons adressé certaines questions et préoccupations relativement à votre prestation de travail. Nous vous avons demandé entre autres si vous aviez mené des activités personnelles pendant les heures de travail au cours de l'été 2011. À cet effet, vous avez nié avoir mené de telles activités, si ce n'est qu'à de très rares occasions pour des périodes n'excédant pas cinq (5) minutes. Pour une période excédant cinq (5) minutes, vous avez par ailleurs mentionné que vous informiez toujours votre supérieur.
Or, notre enquête révèle entre autres que vous avez mené des activités personnelles pendant les heures de travail, alors que vous étiez pourtant rémunéré afin de fournir votre prestation de travail, et ce, sans jamais aviser votre employeur de votre absence ni demander une quelconque permission d'absence. Au surplus, notre enquête démontre qu'à au moins une occasion, vous étiez en présence d'un autre collègue de travail et que vous n'avez jamais rapporté une telle situation.
Cette situation est aggravée par le fait que vous avez mené des activités personnelles en utilisant le véhicule de la Ville.
Également, il appert que vous avez fait de fausses déclarations, notamment en complétant une feuille de temps sans jamais tenir compte du temps au cours duquel vous avez mené des activités personnelles. De tels agissements constituent du vol de temps puisque vous avez réclamé une rémunération pour du temps non travaillé.
Le 8 septembre dernier, vous nous avez remis une déclaration dans laquelle vous admettez finalement avoir mené des activités personnelles au cours de la semaine du 29 août, admission que nous devons considérer comme tardive vu notre première rencontre du 6 septembre, ne reflète pas totalement la réalité, notamment en ce qui concerne la durée de l'activité en question.
Par vos agissements, vous avez contrevenu à vos obligations fondamentales de salarié, notamment votre obligation d'agir avec bonne foi, honnêteté, intégrité et loyauté.
Vos agissements sont d'autant plus graves que vous ne pouviez ignorer vos obligations compte tenu de vos années d'expérience à la Ville.
En procédant à du vol de temps, en procédant à une fausse déclaration relativement à votre feuille de temps et en niant avoir mené des activités personnelles pendant vos heures de travail, nous considérons que vous avez commis de graves manquements qui ont pour effet d'ébranler le lien de confiance avec votre employeur.
Par conséquent, nous vous avisons de notre intention de recommander votre suspension pour une période de quinze (15) jours ouvrables, pour vol de temps, fausse déclaration et propos mensongers à la séance extraordinaire du conseil municipal qui aura lieu le 13 septembre 2011 à 18h30. Le cas échéant, lors de l'adoption de la résolution confirmant votre suspension sans solde, celle-ci sera rétroactive à la date du présent avis.
Nous espérons que cette mesure disciplinaire suffira à vous faire comprendre la gravité de votre manquement. Toutefois, en cas de récidive, nous vous avisons que nous devrons avoir recours à des mesures plus sévères pouvant aller jusqu'au congédiement.
Recevez, Monsieur, nos salutations distinguées.
Le directeur général adjoint
(S) Martin Houde
Martin Houde
[240] Le même jour, le directeur adjoint de la Ville, M. Martin Houde et Me Isabelle Bureau, la directrice des ressources humaines, dans un document intitulé « Avis d'inscription » (document V-13) envoie la recommandation de suspension de 15 jours ouvrables pour approbation par le Conseil de Ville et le lendemain, le Conseil de Ville adopte la résolution no 11-09-824 officialisant le tout.
[241] Les 2 documents font référence aux faits énumérés dans l'avis de recommandation (document S-5), sauf qu'on ajoute que le plaignant, lors de sa convocation du 12 septembre 2001 et à « toute autre occasion » n'a pas fourni d'explications permettant de contrer la preuve des manquements qui lui sont reprochés.
[242] L'avis de recommandation daté du 12 septembre 2011 (document S-5) est le document le plus important pour bien comprendre les manquements reprochés au plaignant, car les 2 autres documents (l'avis d'inscription et la résolution du Conseil de Ville) y réfèrent directement.
[243] Cet avis de recommandation constitue donc, dans les faits et pour employer une image tirée du droit criminel, « l'acte d'accusation » de la Ville à l'endroit du plaignant, chacun de ses éléments devant être prouvé par une preuve de nature prépondérante.
[244] En analysant le document, on peut conclure qu'il contient 4 manquements bien précis :
· conduite d'activités personnelles pendant les heures de travail ;
· utilisation d'un véhicule de la Ville pour faire ces activités personnelles ;
· fausses déclarations sur des feuilles de temps ;
· fausse déclaration écrite de l'aveu du 8 septembre 2011.
[245] Dans un premier temps, il s'agit de déterminer si la preuve dans son ensemble démontre la survenance de ces manquements de manière prépondérante.
[246] La preuve démontre qu'effectivement le 30 août 2011, le plaignant s'est rendu au domicile de M. X, pendant ses heures de travail, non pas pour se livrer à des activités personnelles, mais à des activités étrangères à son travail puisqu'il a accepté de se rendre au domicile de M. X qui voulait vérifier si des journaliers engagés pour la construction de sa résidence privée étaient arrivés et faisaient leur travail correctement.
[247] Pour ce faire, le plaignant n'a pas utilisé le véhicule qui lui est généralement fourni par la Ville, puisqu'il n'était qu'un simple passager dans celui de M. X.
[248] En rapport avec cet événement du 30 août 2011, la preuve révèle que le plaignant a indiqué, sur sa feuille de temps, qu'il avait travaillé ce jour-là, 8.75 heures, soit le nombre d'heures d'une journée régulière de travail et qu'en conséquence, il n'a pas déduit de sa feuille de temps, le temps utilisé pour des activités étrangères à son travail.
[249] Enfin, son aveu daté du 8 septembre 2011 contient une évaluation du temps perdu lors de cet événement qui est inférieure à l'évaluation de l'employeur.
[250] D'autre part, lors de sa rencontre du 6 septembre 2011, le plaignant a admis qu'il lui est arrivé à quelques reprises d'avoir empiéter légèrement sur ses heures de travail pour se livrer à des activités personnelles : l'utilisation d'Internet dépassant légèrement ses temps alloués pour les pauses et les repas, un achat à l'épicerie pour son repas du midi, une vérification de la valeur d'un outil personnel, lors d'un achat pour son employeur et 2 courtes visites chez son père, l'un pour prendre un outil nécessaire à son travail et l'autre pour vérifier rapidement l'état de santé de son père.
[251] Dans de telles occasions, il est probable qu'il se soit servi du véhicule qui lui est fourni par la Ville pour faire ses tournées d'inspection, mais la preuve est imprécise à ce sujet.
[252] La preuve ne révèle pas cependant si les feuilles de temps remplies à ces occasions par le plaignant, contenaient les corrections pertinentes qui tenaient compte du temps perdu.
[253] Dans l'ensemble, on peut donc conclure que les manquements reprochés à M. West ont été prouvés de manière prépondérante, sous réserve de certaines nuances qui seront apportées lors de l'analyse de la sanction imposée au plaignant.
[254] En matière de sanction, on connait assez bien les grands paramètres qui prévalent dans son évaluation et qui se résument généralement dans la formule suivante : la sanction imposée au plaignant est-elle proportionnelle à la gravité de la faute commise, compte tenu de toutes les circonstances propres au dossier?
[255] Pour répondre à cette question, il faut de la façon la plus rigoureuse et disciplinée qui soit, analyser les divers facteurs aggravants et atténuants qui doivent s'appliquer avant de tirer une conclusion définitive sur le caractère juste et raisonnable de la sanction qui a été imposée par l'employeur.
[256] Nul ne peut mettre en doute le fait qu'un salarié qui reçoit une rémunération pour un travail qu'il n'a pas accompli ou un laps de temps pour lequel il n'a pas travaillé peut constituer une faute sérieuse, qui est au coeur même du contrat de travail qui lie un employeur et un salarié.
[257] En effet, le contrat de travail défini à l'article
[258] C'est simple à comprendre. Pas de travail, pas de rémunération.
[259] Si un salarié s'arrange par supercherie, mensonge ou autre moyen dolosif à se faire rémunérer par l'employeur un travail qu'il n'a pas accompli ou une période de temps pendant laquelle il n'a pas travaillé, il commet un acte répréhensible de la nature d'une fraude.
[260] Évidemment, il faut toujours tenir compte des circonstances propres à chaque cas, mais il n'est pas interdit de penser que plus le travail ou le laps de temps frauduleusement rémunéré sera important ou plus l'acte répréhensible, même mineur, sera répété et régulier, plus la réaction de l'employeur risque d'être sévère.
[261] Ici, dans le présent dossier, le fait répréhensible le plus important commis par le plaignant c'est surtout sa décision d'accompagner M. X le matin du 30 août 2011 à la résidence privée de ce dernier et plus particulièrement celle de ne pas avoir déduit de sa feuille de temps, le temps qui a été utilisé pour ces activités non pas personnelles, mais étrangères à son travail.
[262] Si le plaignant, malgré ce détour impromptu et dont il n'est pas l'instigateur, avait indiqué sur sa feuille de temps, qu'il ne réclamait pas de rémunération pour ce temps perdu, je suis persuadé que l'employeur en aurait tenu compte.
[263] Donc, l'acte répréhensible commis par le plaignant est sérieux et mérite une sanction qui échappe en soi à la doctrine de la gradation des sanctions, par laquelle l'employeur doit toujours utiliser, au début, la sanction la moins sévère afin d'amener le salarié à prendre conscience de sa faute et modifier son comportement.
[264] En passant, certaines décisions arbitrales font référence, pour ce type d'actes répréhensibles à du « vol de temps », mais cette expression n'est pas tout à fait exacte bien qu'elle puisse être utilisée comme une image forte : on ne peut pas voler en principe une chose immatérielle comme le temps. Il est plus exact de parler plutôt d'un acte à caractère frauduleux, puisqu'on soutire alors un avantage pécuniaire sans y avoir droit et en utilisant un moyen dolosif.
[265] On ne peut pas cependant retenir, pour ce manquement du 30 août 2011, le fait que le plaignant ait utilisé le véhicule de la Ville, puisqu'il est en preuve qu'il s'agissait du véhicule utilisé habituellement par M. X dans lequel le plaignant n'était qu'un simple passager.
[266] Je retiens comme facteur atténuant le fait que le plaignant a été un spectateur passif plus qu'un complice actif dans cet événement du 30 août 2011. La preuve révèle qu'il a été pris par surprise et manière impromptue par M. X qui lui a demandé au puits d'Hudson Acres de l'accompagner chez lui pour vérifier si les travaux de construction de sa maison allaient bon train.
[267] L'erreur de M. West a été d'accepter cette proposition et de s'embarquer ainsi dans une aventure, sans en mesurer sur le coup les conséquences et qui a failli lui faire perdre son emploi.
[268] Je retiens aussi le fait que M. West croyait de bonne foi que le détour ne prendrait que quelques minutes et il était loin de se douter que M. X allait décider d'attendre les journaliers qui n'étaient pas arrivés et de prendre du temps additionnel pour surveiller les travaux une fois que ceux-si sont finalement arrivés sur les lieux.
[269] D'autre part, l'enquête menée entre le 1er et le 6 septembre 2011 par la Ville n'a démontré aucune collusion, aucune complicité planifiée et aucun système organisé conjointement par les 2 salariés pour frauder la Ville.
[270] La preuve, au contraire, démontre que le principal instigateur de tout cela est sans l'ombre d'un doute M. X, qui de façon solitaire, avait décidé de lui-même, de « gruger » le temps de travail qu'il devait consacré à la Ville pour se livrer à des activités personnelles reliées à la construction de sa maison.
[271] D'autre part, il n'y aucun lien entre le statut d'officiers syndicaux des 2 salariés et la faute commise le 30 août 2011. Il en aurait été autrement et à titre d'exemple, si les 2 salariés avaient profité de leurs statuts d'officiers syndicaux et des avantages qui y sont attachés, pour faciliter de quelque façon que ce soit la commission de l'acte répréhensible.
[272] Entre le 1er septembre 2011 et le 6 septembre 2011, avant l'interrogatoire, la Ville n'a rien trouvé qui puisse incriminer M. West dans des actes répréhensibles reliés à des activités personnelles effectuées pendant les heures de travail.
[273] Le 6 septembre 2011, M. Houde et Me Bureau ont interrogé longuement M. West sur des activités personnelles qu'il aurait pu mener durant ses heures de travail.
[274] M. West a répondu spontanément et il a identifié de bonne foi certaines occasions brèves où il aurait pu empiéter sur ses heures de travail pour se livrer à des activités personnelles :
· 2 fois chez son père en revenant de tournée pour aller cherche un outil de travail et vérifier rapidement son état de santé (quelques minutes) ;
· 1 fois pour aller se chercher un repas du midi chez IGA parce qu'il avait travaillé 2 quarts en ligne ;
· 1 fois chez Rona où il aurait vérifié le prix d'un outil à des fins personnelles alors qu'il achetait des outils pour le Ville ;
· quelques fois il a dépassé le temps alloué pour ses pauses ou ses heures de rapas pour naviguer un peu sur Internet.
[275] Je ne pense pas, en tout respect pour l'employeur que ces actes certes techniquement répréhensibles, mais mineurs, puissent constituer les éléments les plus importants du dossier.
[276] Voilà le genre de manquements où la doctrine de la gradation des sanctions doit trouver application afin de permettre au salarié de prendre conscience de l'importance de toujours fournir une prestation de travail équivalente à la rémunération reçue.
[277] On ne peut certes pas blâmer l'employeur de ne pas l'avoir su - sauf l'incident au IGA où le plaignant a été aperçu par Me Bureau - mais, d'autre part, il faut tenir compte aussi du fait que le plaignant a répondu franchement aux questions qui lui étaient posées avec honnêteté et franchise, ce qui est tout en son honneur.
[278] Reste la délicate question de son absence de réponse sur l'événement du 30 août 2011.
[279] Je ne veux blâmer l'employeur d'aucune façon, car il fallait faire preuve d'une certaine dose d'habileté et de doigté pour parvenir à avoir toute la vérité dans une affaire assez sérieuse mettant en cause le président et le vice-président du syndicat et qui pouvait apparaître à priori comme une collusion, une complicité planifiée ou un système bien organisé de fraude à l'endroit de la Ville.
[280] Par contre, je suis mal à l'aise - et je l'ai mentionné lors de l'audience - avec le fait que l'employeur se soit contenté de poser au plaignant des questions ouvertes concernant l'événement du 30 août 2011 alors qu'il avait en mains une preuve solide pour le confronter directement en lui posant des questions fermées et en le mettant devant le fait accompli.
[281] Ceci est d'autant plus vrai que le plaignant a pris la peine de dire aux 2 représentants de la Ville qui l'interrogeaient, que « s'ils ont d'autres choses à lui reprocher, ils n'ont qu'à le dire » et qu'il répondrait.
[282] L'explication du plaignant à ce sujet n'est pas déraisonnable : sur le coup il n'a pas « allumé » et c'est uniquement lorsqu'il a vu M. X à la fin de l'entrevue qu'il a compris où la Ville voulait en venir.
[283] Il aurait été plus simple, comme je l'ai mentionné, de parler directement de l'incident du 30 août 2011, de confronter directement le plaignant avec les faits que l'employeur avait déjà au dossier et de permettre ainsi au plaignant d'admettre ces faits tout en donnant des explications qui auraient certes pu améliorer son sort.
[284] Pour les questions portant sur des faits dont il n'avait pas connaissance, l'employeur pouvait certes utiliser la méthode des questions ouvertes, où dans le jargon du métier (juridique) on dit « aller à la pêche », dans le but de vérifier la qualité générale de la prestation de travail du plaignant. On ne peut rien reprocher à l'employeur à ce sujet, d'autant plus qu'il n'existe pas en droit du travail, comme en droit criminel, un droit fondamental au silence et une protection contre l'auto-incrimination.
[285] Cependant, pour l'événement du 30 août 2011, le contexte est fort différent. Le 6 septembre 2011, l'employeur est parfaitement au courant des faits grâce aux observations effectuées au domicile de M. X par MM. Gendron et Houde.
[286] Il ne manque que la version du plaignant. S'il avait été confronté avec les faits observés par MM. Gendron et Houde, le plaignant aurait eu 2 choix très clairs devant lui : où il niait ou il s'expliquait. S'il avait nié, l'employeur avait en mains une preuve en « béton armé » qui lui aurait permis de recueillir une preuve de mensonge et de mauvaise foi évidente et qui l'aurait justifié à appliquer une sanction très sévère contre le plaignant.
[287] D'autre part, si le plaignant s'était expliqué immédiatement, cela aurait permis à l'employeur de comprendre la nature du dossier dans une juste perspective et de cibler son attention sur M.X, en ayant en mains une déclaration du plaignant qui aurait incriminé M. X.
[288] En posant des questions ouvertes alors qu'il avait tous les faits en mains, en « tournant autour du pot », pour employer une expression consacrée, l'employeur ne s'est pas rendu service puisqu'il s'est privé d'une occasion importante de tester la crédibilité du plaignant et il a dû se contenter d'une déclaration ambigüe qui peut toujours s'expliquer et qui ne révèle pas nécessairement la mauvaise foi du plaignant.
[289] Dans de telles circonstances, l'employeur avait tout intérêt à être le plus transparent possible et à « mettre les cartes sur la table », non pas dans le but de piéger le plaignant, mais de tester sa crédibilité de façon directe.
[290] Il ne l'a pas fait et il est donc plus difficile pour lui d'affirmer que le plaignant a menti ou a nié sa participation à cet événement d'autant plus que le plaignant, rappelons-le, a pris la peine de dire aux représentants de l'employeur : « Si vous avez d'autres choses, dites-le et je vais vous répondre ».
[291] On ne peut pas donc conclure de façon certaine que le plaignant a menti ou était de mauvaise foi et, à mon avis, l'employeur ne peut pas invoquer cet argument comme facteur aggravant pour justifier la rigueur de sa sanction.
[292] Il y a un doute raisonnable et une zone grise à ce sujet et ce doute doit profiter au plaignant puisque l'employeur a le fardeau de preuve en tout temps en matière disciplinaire.
[293] Il en est de même pour l'aveu du 8 septembre 2011. M. Houde n'a pas posé aucune question au plaignant alors qu'il y avait là une autre occasion d'exposer au plaignant les faits recueillis lors de l'événement du 30 août 2011, d'autant plus que l'employeur avait en mains beaucoup de précisions à ce sujet, notamment les heures d'arrivée et de départ de la résidence de M. X, les distances parcourues et le temps assez détaillé pour les parcourir.
[294] Comme l'a fait remarquer avec justesse le procureur syndical, la différence entre le temps évalué par l'employeur et celui donné par le plaignant - qui ne porte pas de montre sur lui - n'est pas en soi significatif pour justifier une sanction plus sévère.
[295] Pour toutes ces raisons et en toute justice pour le plaignant, je ne pense pas que l'employeur était justifié d'affirmer dans sa lettre du 12 septembre 2011 que ce dernier avait nié avoir mené des activités personnelles durant ses heures de travail.
[296] Au contraire, il a identifié spontanément au moins 5 événements où il aurait pu se livrer à de telles activités pour de courtes périodes de temps et l'employeur ne l'a pas confronté sur l'événement du 30 août 2011 alors qu'il avait en mains toutes les informations pertinentes pour le faire et ce, à 2 reprises, lors de la rencontre du 6 septembre 2011 et celle de la courte rencontre du 8 septembre 2011.
[297] Reste la question de savoir s'il faut considérer le statut du plaignant comme officier syndical comme un facteur aggravant justifiant l'employeur de lui imposer une peine plus sévère qu'il aurait imposée à un simple salarié.
[298] Je remarque au départ que cette question n'a pas été soulevée par l'employeur dans sa lettre du 12 septembre 2011 comme un des motifs justifiant la sévérité de la sanction prise contre le plaignant.
[299] L'employeur se contente simplement de mentionner que le plaignant avait contrevenu à ses obligations fondamentales de salarié , notamment l'obligation d'agir de bonne foi, l'honnêteté, l'intégrité et la loyauté.
[300] Par contre, comme ce sujet a été abordé dans le témoignage de Me Bureau qui a admis avoir considéré cet élément comme un facteur aggravant et comme les parties ont senti le besoin de me fournir une jurisprudence détaillée sur cette question, je vais donc en disposer.
[301] À priori, comme le mentionne avec justesse la Cour suprême du Canada dans l'affaire Douglas Aircraft , il n'existe pas d'obligation supérieure d'un officier syndical envers l'employeur qu'un simple salarié, à moins que la convention collective y pourvoit expressément, ce qui n'est pas le cas en espèce.
[302] Ceci signifie qu'on ne peut pas imposer à un officier syndical une sanction plus sévère pour le simple fait qu'il soit un officier syndical. Si c'était le cas, cela aurait pour effet de créer 2 classes de salariés et permettrait ainsi à l'employeur d'agir de façon discriminatoire envers des salariés légitimement nommés par leurs confrères pour les représenter et aurait aussi comme effet de placer une épée de Damoclès sur la tête des dirigeants syndicaux pour la moindre peccadille tout en décourageant les salariés d'occuper des postes syndicaux. Cela n'aurait aucun sens.
[303] Il n'est pas interdit toutefois de penser qu'un dirigeant syndical peut abuser de son statut de dirigeant syndical pour faciliter la commission d'une faute, ou d'un manquement à ses obligations de salarié.
[304] Je pense, entre autres, à un officier syndical qui profiterait d'une certaine forme de pouvoir ou d'influence pour poser des gestes d'intimation ou de harcèlement envers d'autres salariés, comme dans l'affaire Saargumi Québec . Ou un officier syndical qui inciterait des salariés, menaces à l'appui, à ralentir le travail et à commettre des actes de sabotage, comme dans l'affaire Papineau et Dufour Ltée .
[305] J'estime que la bonne attitude à avoir à ce sujet consiste à se demander s'il existe un lien direct entre le statut d'un officier syndical et la commission d'un manquement ou d'un acte répréhensible qui peut être sanctionné par l'employeur.
[306] Certains arbitres considèrent que les officiers syndicaux ont une obligation de civilité plus grande envers l'employeur que les simples salariés, mais je ne partage pas ce point de vue, car l'obligation de civilité existe dans le contrat de travail à cause du lien de subordination qui existe entre tous les salariés et l'employeur. Voir les opinions de ces arbitres dans les affaires Exceldor Coopérative avicole (Me Denis Provençal, arbitre), Laflamme Portes &Fenêtres (Me Côme Poulin, arbitre) et Best Western (Me Nicolas Cliche, arbitre).
[307] De toute façon, dans le présent dossier, il n'est nullement question d'obligation de civilité envers l'employeur, mais d'une obligation d'honnêteté, d'intégrité et de loyauté.
[308] Toutes ces obligations sont incluses dans le contrat de travail et s'appliquent à tous les salariés de manière égale pour tous, qu'ils soient simples salariés ou officiers syndicaux.
[309] Dans le présent dossier, il n'y a aucun lien direct entre le statut syndical du plaignant et les manquements qu'on lui reproche. Il en aurait été autrement si la preuve avait démontré l'existence d'un système bien organisé mis en place par des officiers syndicaux et impliquant plusieurs salariés. Mais tel n'est pas le cas.
[310] Donc, je ne retiendrai pas le fait que le plaignant soit président du syndicat comme facteur aggravant pour analyser la justesse de la sanction appliquée par l'employeur.
[311] Je retiendrai cependant comme facteur atténuant le fait que le plaignant n'a pas de dossier disciplinaire.
[312] Quant à l'ancienneté, c'est un facteur neutre. Autant on peut reprocher à un salarié, comme le fait l'employeur, que le nombre d'années d'expérience induit automatiquement une meilleure connaissance de ses obligations, autant le nombre d'années d'ancienneté dans le respect intégral de ses obligations de salarié peut être un facteur atténuant.
[313] Ceci étant dit, que nous reste-il comme portrait global du plaignant, des manquements commis et de son attitude générale?
[314] D'abord et ceci est fondamental, le plaignant n'a jamais eu l'intention planifiée, délibérée et prématurée de participer à une fraude envers l'employeur. Il a été entraîné, malgré lui, dans une « aventure » dont il n'a pas eu le temps de mesurer toutes les conséquences. Il croyait de bonne foi que le détour par la maison de M. X ne prendrait que quelques minutes sur le chemin du retour.
[315] Ensuite, il était au mauvais endroit au mauvais moment et le hasard a fait en sorte que le président et le vice-président du syndicat se retrouvent dans une situation gênante et observée directement par 2 supérieurs de la Ville.
[316] Il est clair aussi dans mon esprit que le principal responsable de cet incident est sans contredit M. X et la preuve démontre amplement et que le plaignant est tombé « sous le radar » de l'employeur, parce que ce dernier a déclenché une enquête d'envergure qui n'est pas étrangère non plus au statut d'officiers syndicaux du plaignant et de M. X.
[317] Il n'est évidemment pas question de blâmer l'employeur d'avoir déclenché une telle enquête parce qu'il avait l'obligation de vérifier, comme je l'ai mentionné, s'il n'était pas confronté à une fraude d'envergure de la nature d'une collusion, d'une complicité impliquant le syndicat ou ses officiers ou d'un système bien organisé.
[318] Par contre, la preuve démontre que la participation du plaignant a été assez minime dans cet événement et son erreur fondamentale a été de ne pas avoir modifié par la suite sa feuille de temps pour tenir compte du temps qu'il a perdu pour faire le détour chez M. X. On parle ici d'une heure ou 2 au maximum qui n'auraient pas dû être réclamées par le plaignant.
[319] Entre le 1er septembre 2011 et le 6 septembre 2011, l'employeur n'a rien trouvé contre le plaignant et ce dernier, lors de la rencontre du 6 septembre 2011, a livré spontanément à l'employeur d'autres circonstances dans lesquelles il a pu effectuer certaines activités personnelles mineures durant ces heures de travail.
[320] J'ai eu l'occasion d'entendre le plaignant témoigner et je prends acte du fait qu'il a admis sa faute ou son erreur, mais qu'il considère que ce manquement ne justifie pas l'employeur de lui imposer 15 jours ouvrables de suspension qui représente une perte de salaire équivalent à 120 heures à son taux horaire de 27,33$/l'heure (taux de 2011 en vertu de l'annexe D de la convention collective) ce qui représente une perte monétaire d'environ 3 279,60$.
[321] Vu sous un autre angle, on peut dire que pour une perte de temps d'environ au maximum 2 heures, soit environ 54,66$, l'employeur a imposé au plaignant une amende de 3 279,60$, une somme qui représente environ 60 fois la somme payée en trop par la Ville.
[322] Quant aux autres activités personnelles qui ont été mentionnées par le plaignant lors de la rencontre du 6 septembre 2011, il est difficile d'en évaluer la perte par la Ville, mais ce sont des épisodes assez courts qui peuvent avoir duré entre 5 et 10 minutes.
[323] Je comprends parfaitement que la Ville ne pouvait pas passer cela sous silence et qu'elle se devait de sanctionner le plaignant dans le but assez évident de tuer dans l'oeuf tout comportement de ce genre, mais il n'en demeure pas moins, qu'en tenant compte de toutes les circonstances propres à ce dossier, cette sanction m'apparaît disproportionnée par rapport aux manquements allégués.
[324] Pour souligner le caractère sérieux du manquement, je crois cependant qu'il ne serait pas déraisonnable de réduire la sanction imposée par l'employeur de 15 jours ouvrables à 5 jours ouvrables, ce qui représente pour le plaignant une perte monétaire d'environ 1 093,20$.
[325] Cette sanction m'apparait juste et raisonnable si on tient compte du fait également que toute cette saga aura été une épreuve importante pour le plaignant susceptible de nuire à sa réputation.
POUR CES MOTIFS, LE PRÉSENT TRIBUNAL :
REJETTE les objections préliminaires du syndicat ;
ACCEUILLE partiellement le grief déposé par le syndicat ;
CASSE ET ANNULE la suspension de 15 jours ouvrables imposée au plaignant ;
SUSBTITUE à cette sanction une suspension de 5 jours ouvrables ;
ORDONNE à l'employeur de verser au plaignant le salaire et autres avantages perdus le tout avec intérêts et l'indemnité additionnelle prévue au Code civil du Québec à compter de la date de la présente décision.
Lawrenceville, le 19 avril 2013
___________________________
Pierre Cloutier ll.m
Arbitre unique
ANNEXE « A »
LISTE DES TÉMOINS
PAR LA PARTIE PATRONALE
M. Clayton West, opérateur-mécanicien au service des eaux, Ville de Vaudreauil-Dorion ;
M. Christian Gendron, directeur du service des eaux, Ville de Vaudreuil-Dorion ;
Me Isabelle Bureau, directrice du service des ressources humaines, Ville de Vaudreuil-Dorion ;
M. Martin Houde, directeur général adjoint, Ville de Vaudreauil-Dorion ;
PAR LA PARTIE SYNDICALE
M. Clayton West, opérateur-mécanicien au service des eaux, Ville de Vaudreauil-Dorion et président du syndicat ;
M. Simon Bélanger, préposé aux égouts et à l'aqueduc, Ville de Vaudreuil-Dorion et agent de griefs du syndicat.
ANNEXE « B »
LISTE DES AUTORITÉS
PAR LE SYNDICAT
· Syndicat des employés de soutien du Collège Sainte-Foy c. Collège Sainte-Foy [2005] 12 avril 2005, Michaël H. Cain, arbitre ;
· Collège de Sainte-Foy c. Cain , [2005] C.S.Q. 200-17-0005747-050, 29 septembre 2005 ;
· Syndicat des employés (es) de soutien du CEGEP DU VIEUX-MONTRÉAL c. CEGEP DU VIEUX-MONTRÉAL , [2007] 30 JUIN 2007, Marc Plamondon, arbitre ;
·
Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal c. Ville de
Montréal,
[2005]
· Ville de Montréal c. Dufresne , [2005] D.T.E., 2005T-1038 (C.S) ;
· Syndicat des travailleurs de Cedrico (CSN) c. Bois d'oeuvres Cedrico inc. [2011] D.T.E ., 2011T-790 (T.A.).
·
Syndicat des travailleurs et travailleuses du cimetière
Notre-Dame-des-Negies (CSN) c. Fabrique de la paroisse Notre-Dame de Montréal
et Ladouceur
, C.S. Mtl,
Doctrine
· Rodrigue BLOUIN et Fernand MORIN, Droit de l'arbitrage de grief , 5e éd, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2000, pp. 348-351 ;
Jurisprudence
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
1800 c. Université du Québec à Trois-Ribières
,
·
Pavillon du Parc inc. Et Syndicat des employés-e-s du C.E.V
d'Aylmer (CSN)
,
·
Syndicat des employés de la Ville de Brossard (CSN) c.
Ville de Brossard
.
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier (SCEP, section locale 80 (techniciennes auxiliaires) et Exportech
Bâtisseur de réseaux
,
·
L'Association des travailleurs du préhospitalier (ATPH) -
Les Syndicats de techniciens ambulanciers (R.E.T.A. - F.S.S.S - C.S.N. ) et
Coopérative des techniciens abulanciers du Québec métropolitain
,
· Banque Laurentienne du Canada c. Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 434 ;
·
Syndicat des travailleuses et travailleurs du Four Points
Sheraton Centre-Ville - CSN et Sheraton Four Points Montréal
,
· S.C.F.P. c. Ville de Deux-Montagnes , [2005] D.T.E. 2005T-750 (T.A.) ;
· Sondargée c. Commission des relations du travail , [2012] D.T.E. 2012T-201 (C.S.)
· Centre d'hébergement Arsyle c. SQEES [2006] D.T.E. 2006T-430 (T.A.) ;
·
Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin inc. c. Syndicat démocratique
des salariés de Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin
, [1999]
·
Impark Stationnement Impérial Ltée c. Union des employés et
employées de service
, [1996]
· S.C.F.P. c. Ville de Deux-Montagnes , [2005] D.T.E. 2005T-750 (T.A.) ;
· Sondargée c. Commission des relations du travail , [2012] D.T.E. 2012T-201 (C.S.)
· Centre d'hébergement Arsyle c. SQEES [2006] D.T.E. 2006T-430 (T.A.) ;
·
Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin inc. c. Syndicat
démocratique des salariés de Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin
,
[1999]
·
Impark Stationnement Impérial Ltée c. Union des employés et
employées de service
, [1996]
·
Résidence Les Floralies Lachine c. Syndicat canadien des
communications, de l'énergie et du papier
, [2011]
· Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier c. Purolator , [2007] D.T.E. 2007T-1029 (T.A.) ;
· Nellson Neutratical Canada inc. c. T.U.A.C. , [2008] D.T.E. 2008T-697 (T.A.) ;
· Collège Ahuntsic c. Syndicat du personnel de soutien du Collège Ahuntsic , [2007] D.T.E. 2007T-889 (T.A.) ;
· Syndicat national des employés du bois ouvré de Warwick (CSD) c. Roland Boulanger et Cie Ltée , [2008] D.T.E. 2008T-229 (T.A.).
· La compagnie Price Ltée (appelante) c. René Gagné et al et Syndicat national des travailleurs de la pulpe et du papier de Kégogami inc.(intimés) , [1982] T.T. 471 ;
·
John Silva c. Centre hospitalier de l'Université de
Montréal - Pavillon Notre-Dame
,
·
Douglas Aircraft Co of Canada c. McConnell
,
·
Résidence Les Floralies Lachine c. Syndicat canadien des
communications, de l'énergie et du papier
, [2011]
· Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier c. Purolator , [2007] D.T.E. 2007T-1029 (T.A.) ;
· Nellson Neutratical Canada inc. c. T.U.A.C. , [2008] D.T.E. 2008T-697 (T.A.) ;
· Collège Ahuntsic c. Syndicat du personnel de soutien du Collège Ahuntsic , [2007] D.T.E. 2007T-889 (T.A.) ;
· Syndicat national des employés du bois ouvré de Warwick (CSD) c. Roland Boulanger et Cie Ltée, [2008] D.T.E. 2008T-229 (T.A.).
PAR L'EMPLOYEUR
·
Galloway Lumber Co Ltd v Labour Relations
Board of British Columbia
,
· TUAC, section locale 510 et Frères Greif inc. , D.T »E » 2006-543 T.A. Para. 24 et 25.
· Compagnie de la Baie d'Hudson et Union des employés du transport local et industries diverses, section locale 931 , D.T.E ., 99T-722 (T.A. Pp 34-35 ;
·
Travailleuses et travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 509 et Sobey's Québec (IGA Trois-Rivières no 442)
,
· Syndicat national des travailleurs de Saint-Thomas Didyme (C.S.N.) c. Donohue Saint-Félicien inc., D.T.E. 82T-184 (C.A.), p. 5 ;
·
Société des loteries du Québec c. Blais
, D.T.E.,
·
Régie intermunicipale de police de la région de Joliette et
Fraternité des policières et policiers de Joliette inc.
,
· CP Express &Transport and Transportation Communications Union , ( L.A.C. (4 th ) 445, para. 9 et 11 ;
·
Réseau de transport de Longueuil (R.T.L.) et Société des
chauffeurs d'autobus et des services connexes de la Société de transport de la
Rive-Sud de Montréal, section locale 3333 (S.C.F.P.),
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier, division Corrugué inc et Induspac, division Corrugué inc.
,
·
Syndicat du préhospitalier (FSSS-CSN) et Corporation
d'Urgences-santé
,
· Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Ville de Montréal , D.T.E. 82T-839 (C.A.) p 5 ;
·
Bondex international et Métallurgistes unis d'Amérique,
local 7625
,
·
Matador Convertisseurs Cie et Syndicat canadien des
communications, de l'énergie et du papier, section locale 145,
·
Regroupement des techniciens ambulanciers du Québec (CSN)
et Coopérative des technicens ambulanciers du Québec métropolitain,
·
Union internationale des travailleurs et travailleuses de
l'alimentation et du commerce, section locale 500 et Maxi Châteauguay
,
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
3709 et Municipalité de Saint-Joseph-du-Lac
,
·
Université du Québec à Montréal et Syndicat des professeurs
et professeures de l'Université du Québec à Montréal (S.P.U.Q.-C.S.N.)
,
·
Société canadienne des postes c. Blouin
,
· E, Harnois Ltée et Syndicat des employés de la biscuiterie Harnois de Joliette (CSN) , D.T.E. 82T-75 (T.A.) p. 3 ;
·
Union des routiers, brasseries, liqueurs douces et ouvriers
de diverses industries, section locale 1999 et L'Oréal Canada inc.
,
· Syndicat des employées et employés de Vidéotron ltée, section locale 1417, SCFP et Vidéotron ltée, D.T.E. 2009-408 (T.A.) para 82, 91 et 92.
·
Syndicat des employées du C.E.V. D'Aylmer c. Pavillon du
Parc inc.
,
·
Travailleuses et Travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 500 et Provigo Distribution inc.
,
·
Brasserie Molson du Québec ltée et Syndicat des employés de
Molson
,
·
Union internationale des travailleurs et travailleuses unis
de l'alimentation et du commerce, section locale 500 et Maxi Châteauguay
,
·
Centre de réadaptation La Maison inc. et Syndicat canadien
de la fonction publique, section locale 2659 (FTQ)
,
·
Syndicat démocratique des employés de garage Saguenay
Lac-Saint-Jean (CSD) et Maison Mazda
,
·
Syndicat des salariées et salariés de la Coopérative de
service à domicile Lac-Saint-Jean-Est (CSD) et Coopérative de services à
domicile Lac-Saint-Jean-Est
, D.T.E.,
·
Syndicat des employées et employés de la bibliothèque de
Québec (FISA) et Institut canadien de Québec
,
·
Ville de Trois-Rivières et Association des
policiers-pompiers de Trois-Rivières inc.
,
· Sanimax EEI inc. Et Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleuses et travailleurs du Canada , 2012 EXPT-2341 (T.A.) p. 10.
·
Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section
locale 301 SCFP et Ville de Pointe-Claire
,
·
Furfaro et Costco Canada inc.
,
·
Provigo Distribution inc.(Centre de distribution de
Bourcherville) et Travailleuses et Travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 501
,
·
Corporation d'Urgences-Santé de la région de Montréal
métropolitain et Rassemblement des employés techniciens ambulanciers du Québec
(CSN),
·
Syndicat des employées et employés de techniques
professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP/FTQ) et
Hydro-Québec, section relève de compteurs, région Le Noroît
,
·
Syndicat des fonctionnaires municipaux et Ville de Montréal
,
· Syndicat des employés et employées du Centre de santé et des services sociaux de Saint-Jérôme et Centre de santé et de services sociaux de Saint-Jérôme , A.A.S. 2008A-099 (T.A.), para. 59, 66, 68 et 69 ;
·
Syndicat du personnel de soutien de la Commission scolaire
des Patriotes c. Commission scolaire des patriotes
,
·
Syndicat des employés de Videotron Ltée, section locale
2815 et Vidéotron ltée
, D.T.E.,
·
Association des contremaîtres municipaux employés par la
Ville de Montréal inc.
et
Montréal,
·
Syndicat national des employées et employés de l'hôpital
Jean-Talon et Hôpital Jean-Talon
,
·
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale
3055 et Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu
,
·
Centre d'accueil Marcelle-Ferron et Syndicat des employés
(ées) du Centre d'accueil Marcelle-Ferron
,
·
Saargumi Québec, division encapsulation et Métallurgistes
unis d'Amérique, section locale 9414
,
·
Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du
papier, section locale 2995 et Max Meilleurs et fils ltée
,
·
Papineau et Dufour Ltée et Union des bûcherons et employés
de scieries, section locale 2399
,
·
Métro-Richelieu Inc. Et Travailleuses et Travailleurs unis
de l'alimentation et du commerce, section locale 500
,
·
Syndicat démocratique des salariés de la Co-op de
Dorechester (CSD) et Exceldot, Coopérative avicole (Usine Saint-Anselme)
,
·
Syndicat des métallos, section locale 9278 et Laflamme
Portes &Fenêtres inc.
,
· L'Union des employés d'hôtels, restaurants et commis de bar, local 31 (C.T.C.) et Best Western Aéroport de Montréal , S.A. 07-03048 ;
· Meunier et Industries Di Marcantonio inc., division de Talon Mears-Metro Heel , D.T.E. 83T668, pp 25 et 26.
· S.C.F.P. c. Ville de Deux-Montagnes , [2005] D.T.E. 2005T-750 (T.A.) ;
· Sondargée c. Commission des relations du travail , [2012] D.T.E. 2012T-201 (C.S.)
· Centre d'hébergement Arsyle c. SQEES [2006] D.T.E. 2006T-430 (T.A.) ;
·
Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin inc. c. Syndicat
démocratique des salariés de Boulangerie Gadoua - Saint-Augustin
,
[1999]
·
Impark Stationnement Impérial Ltée c. Union des employés et
employées de service
, [1996]
PAR LE TRIBUNAL
· Rodrigue BLOUIN et Fernand MORIN, Droit de l'arbitrage de grief , 5e éd, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2000, pp. 348-351 ;
·
Pavillon du Parc inc. Et Syndicat des employés-e-s du C.E.V
d'Aylmer (CSN)
,
·
Brasserie Molson du Québec ltée et Syndicat des employés de
Molson
,
·
Travailleuses et Travailleurs unis de l'alimentation et du
commerce, section locale 500 et Provigo Distribution inc.
,
·
Saargumi Québec, division encapsulation et Métallurgistes
unis d'Amérique, section locale 9414
,
·
Papineau et Dufour Ltée et Union des bûcherons et employés
de scieries, section locale 2399
,
·
Syndicat démocratique des salariés de la Co-op de
Dorechester (CSD) et Exceldor, Coopérative avicole (Usine Saint-Anselme)
,
· L'Union des employés d'hôtels, restaurants et commis de bar, local 31 (C.T.C.) et Best Western Aéroport de Montréal , S.A. 07-03048 ;.
·
Douglas Aircraft Co of Canada c. McConnell
,
[1] Rodrigue BLOUIN et Fernand MORIN, Droit de l'arbitrage de grief ,5e éd, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2000, pp-348-351 ;
[2] Rodrigue BLOUIN et Fernard MORIN, Droit de l'arbitrage de grief, 6e éd.,Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2012, pp. 385 et 386
[3] op.cit., note 2, pp 330-331
[4] op. cit., note 2 page 386