Robert c. Bergeron |
2013 QCCQ 5859 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
JOLIETTE |
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LOCALITÉ DE |
JOLIETTE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
705-32-010947-106 |
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DATE : |
22 mai 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
DENIS LE RESTE, J.C.Q. |
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MICHEL ROBERT, |
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Partie demanderesse |
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c. |
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PAULINE BERGERON, -et- PAULINE BERGERON, es qualités de liquidatrice à la succession de Feu Joseph Dziuszko, |
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame 7 000 $ pour des vices cachés affectant la résidence acquise de la défenderesse.
LES FAITS:
[2] Voici les faits les plus pertinents retenus par le Tribunal.
[3] Le 24 juillet 2008, par acte notarié, le demandeur, Michel Robert, acquiert la propriété de la défenderesse, Pauline Bergeron, et de son conjoint, Joseph Dziuszko.
[4] Cette vente est faite avec la garantie légale.
[5] Le demandeur, Michel Robert, explique qu'il a procédé à une visite préachat de cette propriété en avril 2008. Celle-ci a été d'une durée d'une heure ou deux.
[6] Il explique que le sous-sol n'était pas complété et que les trois quarts des murs étaient protégés par un isolant rigide. Au bas, nous pouvions apercevoir le ciment de la fondation.
[7] Il n'a pas requis les services d'un expert préachat. Il a, lui-même, par le passé, construit des maisons et détient une certaine expérience dans le domaine.
[8] Lors de sa visite préachat, il n'a pas vu de fissure ou d'indice particulier.
[9] Au printemps 2009, il constate de l'eau sur le plancher de ciment du sous-sol. Il retire un des panneaux isolants pour constater que le ciment n'est pas adéquat en ce qu'il est de forme irrégulière qu'il décrit en «nid d'abeille».
[10] Il voit le ruissellement de l'eau dans une petite fissure du solage. Il constate par la suite que la pompe submersible n'était pas branchée.
[11] Après une étude plus approfondie, il voit deux trous d'un diamètre d'environ trois quarts de pouce sur la dalle de béton du plancher près du réfrigérateur.
[12] Il contacte alors un avocat pour connaître la marche à suivre.
[13] Il a contacté les vendeurs qui sont venus vérifier et inspecter le tout.
[14] Le 3 juin 2009, il obtient de l'entreprise Mini Excavation LS la soumission suivante (pièce P-8).
«(…) SUJET: SOUMISSION POUR RÉPARATION DE SOLAGE ET DRAIN.
IL Y A PÉNÉTRATION D'EAU AU SOUS-SOL CÔTÉ EST AU NIVEAU DE LA SORTIE DE LA SÉCHEUSE.
DESCRIPTION DES TRAVAUX.
v PRÉPARATION DES TRAVAUX POUR ARRIVER À L'ENDROIT PROBLÉMATIQUE.
v ENLEVER LES MARCHES EN CIMENT DU BALCON AINSI QUE LE TROTTOIR D'UNE LONGUEUR DE 15 PIEDS.
v EXCAVATION JUSQU'À LA FAUTINE.
v VÉRIFIER LE DRAIN.
v SORTIR LE DRAIN DE LA POMPE D'UNE LONGUEUR DE 50 PIEDS.
v NETTOYER LE SOLAGE.
v RÉPARATION DU CIMENT SUR LE SOLAGE.
v POSE DE MEMBRANE.
v REFAIRE LE REMBLAIS.
v COMPACTION.
v REFAIRE LE TROTTOIR.
v REFAIRE LE BALCON.
v AU MONTANT DE 4110=$ TAXES EN SUS. »
[15] Le 11 juin 2009, le demandeur expédie une mise en demeure aux défendeurs dans laquelle nous pouvons lire:
« (…) Notre client nous a relaté les faits suivants : Vous avez vendu à notre client, un immeuble sis au (…) Saint-Esprit. Notre client nous a mentionné qu'il a découvert des vices cachés au niveau du sous-sol et de la salle de bain.
- Il y a infiltration d'eau au sous-sol au niveau de la sortie de la sécheuse.
- Il y a présence d'un trou dans le mur de ciment du sous-sol à mi-hauteur du mur (souvent appelé « trou d'abeille »).
- Dans la salle de bain, il y a des tuiles qui décollent et le mur est pourri
À titre d'information seulement, notre client a demandé à des entrepreneurs, les coûts de réparations pour la salle de bain qui s'élèvent à 2 124.19 $ et pour la réparation de solage et drain s'élèvent à 4 110.00 $ pour un total de 6 234.19 $. Les présentes estimations pourront être modifiées suite à l'ouverture des murs et du creusage de la fondation.
Vous êtes formellement mis en demeure de venir constater lesdits vices cachés dans les (15) jours de la réception des présentes(…). » (sic)
[16] Dans les faits, le demandeur a assumé des coûts d'excavation de 1 557,68 $ et d'installation d'une membrane sur le mur de fondation de 479,72 $. Il réclame ces deux factures aux défendeurs.
[17] Le demandeur explique aussi au Tribunal que l'immeuble était affecté de vices cachés au niveau de la douche du sous-sol. Certes, il est conscient que la résidence a été construite il y a environ 25 ans.
[18] Un mois après l'achat, soit en août 2008, il constate des infiltrations d'eau au niveau de la céramique de la douche. Après avoir analysé la problématique, il constate de la moisissure et des champignons à l'arrière de cette céramique. Il réclame les déboursés suivants:
1. Facture du 25 mai 2009 de Céramique Montcalm de 2 124,19 $;
2. Le remplacement et l'achat de la douche de Liquidation plomberie Mascouche de 1 337,52 $;
3. Divers matériaux chez Harry Rivest & Fils Ltée pour 11,03 $;
4. Divers articles de plomberie chez A.C.P. enr. pour 824,15 $;
5. Une facture de location d'outils de 62,08 $ de Centre d'outils Rawdon .
TOTAL: 4 358,97 $ .
[19] Pour sa part, la défenderesse, Pauline Bergeron, explique que l'immeuble a déjà eu des problèmes d'infiltration d'eau dans le passé. Le tout était constaté notamment lors de la période de dégel.
[20] Lorsqu'elle était propriétaire de l'immeuble, la pompe submersible a toujours été branchée et elle ne comprend pas pourquoi, après la prise de possession par le demandeur de cet immeuble, celle-ci ne l'était plus.
[21] La défenderesse réfère le Tribunal à la clause 6.1 de la promesse d'achat des parties. Nous pouvons y lire (pièce D-2):
« (…) 6.1 DÉCLARATIONS Le VENDEUR déclare, à moins de stipulations contraires ci-après:
a) n'avoir connaissance d'aucun facteur se rapportant à l'immeuble susceptible, de façon significative, d'en diminuer la valeur ou les revenus ou d'en augmenter les dépenses, sauf; Possibilité d'infiltrations d'eau au sous-sol au printemps. »
[22] Madame Bergeron soutient donc qu'elle avait dûment divulgué la situation des infiltrations d'eau au sous-sol au demandeur avant la vente.
[23] Au surplus, elle ajoute que la situation était nettement visible pour tout acheteur prudent et diligent. En effet, elle réfère aux photos qui démontrent que le bas du mur n'était pas isolé et que des traces de calcaire ou d'infiltration d'eau étaient nettement visibles. La situation était la même pour les traces au sol.
[24] En regard de la douche, madame Bergeron précise que le demandeur était très pressé de se trouver une résidence. Il n'a pas remarqué la céramique, mais elle décrit, une fois de plus à l'aide des photos mise en preuve, que l'état de la douche n'était vraiment pas sans indice. La douche a été construite en même temps que la résidence en 1984 et la situation décrite par le demandeur était la même qu'au moment où elle a vendu l'immeuble.
[25] Des traces de moisissure, les joints noircis et décolorés de même que la surélévation de certaines tuiles de céramique étaient très perceptibles.
[26] Elle ne comprend pas l'empressement du demandeur à agir lors de ces visites préachat. D'ailleurs, elle lui avait suggéré de revisiter l'immeuble avant de faire l'offre d'achat, ce qu'il a refusé.
[27] La défenderesse a produit une expertise en bâtiment préparée par Denis Bourque. Nous pouvons lire dans son rapport ce qui suit (pièce D-1):
« (…)INTRODUCTION
Le 27 juillet 2009, j'ai effectué une vérification concernant l'infiltration d'eau provenant du mur de fondation situé à l'arrière du sous-sol non fini et une vérification de la condition de la douche présente dans la salle de bain située au niveau des garages.
L'immeuble en bois de style unifamilial à palier multiples est âgé de 24 ans, il a donc été construit en 1984-85, voir photos #1-2-3-4 à l'annexe #1
Lors de mon expertise, la vendeuse Mme. Pauline Bergeron était présente. M. Michel Robert, le propriétaire actuel et son père étaient aussi présents. M. Michel Robert m'a affirmé qu'il n'avait fait aucun travail et aucun dégarnissage sur les murs du sous-sol non fini et sur la douche depuis qu'il est propriétaire de l'immeuble, soit environ 1 an (…).
[…]
CONSTATATIONS
FONDATION:
Lors de ma vérification, j'ai constaté la présence d'efflorescence (poudre blanche) et de traces d'infiltration d'eau provenant du mur en béton situé à l'arrière du sous-sol non fini, à environ 20 pieds du coin arrière gauche de la résidence, voir photos #5 et #6.
J'ai aussi constaté que des nids d'abeilles étaient présents dans le mur en béton, à cet endroit. Ce phénomène communément appelé "nid d'abeilles" est causé par un mauvais mélange des agrégats du béton et par une mauvaise mise en place du béton dans les coffrages lors de la construction de l'immeuble, voir photos #7 et #8 à l'annexe 1.
Le béton n'est pas homogène à cet endroit et même si l'extérieur de la fondation est imperméabilisé avec du goudron, au fil des ans des infiltrations d'eau se produisent.
Les "nids d'abeilles" sont présents depuis la construction de cette résidence. l'efflorescence et les traces d'infiltration d'eau sur le mur en béton situé à l'arrière du sous- sol non fini sont présentes depuis plusieurs années.
Une déclaration avait aussi été inscrite à la page I de la promesse d'achat à l'article 6.1 et je cite: Possibilité d'infiltration d'eau au sous-sol au printemps. Voir page 1 article 6.1 de la promesse d'achat à l'annexe 2.
De plus, la vendeuse Mme. Pauline Bergeron affirme que lors de la deuxième visite de l'acheteur M Michel Robert effectuée au mois de mai 2008. Mme. Pauline Bergeron et M. Michel Robert sont allés au sous-sol non fini et Mme. Bergeron a expliqué à l'acheteur que des infiltrations d'eau se produisaient à cet endroit au printemps lors de la fonte des neiges et lors de fortes pluies. D'ailleurs, les vendeurs avaient percé deux ouvertures (petits trous) pour évacuer l'eau provenant du mur de fondation en béton situé à l'arrière de la résidence vers le bassin de captation de la pompe à éjecter, voir photos #9 et #10 à l'annexe 1.
DOUCHE:
La douche présente dans la salle de bain située au niveau des garages est originale, elle est âgée de 24 ans, voir photos # 13 et # 14 à l'annexe I.
Plusieurs joints de coulis présents autour des tuiles de céramique de cette douche sont détériorés, des tuiles se détachent des murs de la douche et de la vieille moisissure est présente au bas du seuil de l'entrée de la douche, voir photos #15-16-17 à l'annexe I.
CONCLUSION
Évidemment, des travaux devront être effectués à l'arrière gauche pour réparer cette fondation adéquatement. D'autres travaux devront aussi être effectué sur la douche.
Par contre, les traces d'infiltration d'eau, l'efflorescence et les "nids d'abeille" sont facilement visibles: selon la vendeuse Mme. Pauline I3ergeron, des informations avaient été communiquées à l'acheteur M. Michel Robert au sujet de cette infiltration d'eau et une déclaration à cet effet a été inscrite à l'article 6.1 de la promesse d'achat, voir promesse d'achat page 1 à l'annexe 2.
La détérioration et la vieille moisissure présentes sur la douche sont aussi facilement visibles par un acheteur prudent et diligent.
Je crois donc que tous les problèmes mentionnés dans ce rapport étaient facilement visibles lors de l'achat de cette propriété. » (sic)
[28] L'expert produit également des photos à l'appui de son rapport.
[29] Le Tribunal doit donc déterminer si l'immeuble, au moment de la vente, était affecté de vices cachés.
LE DROIT APPLICABLE:
[30] Le Tribunal souligne les articles suivants du Code civil du Québec .
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver
les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
2804.
La preuve qui rend l'existence d'un fait
plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige
une preuve plus convaincante.
ANALYSE JURIDIQUE DE LA GARANTIE DE QUALITÉ:
[31] Le législateur a adopté un cadre juridique spécifique prévoyant des responsabilités pour le vendeur, afin qu'il assure à l'acheteur la pleine jouissance du bien vendu. Une des garanties du droit de propriété est la garantie légale de qualité, souvent appelée la garantie contre les vices cachés.
[32] Le Tribunal reprendra donc dans ce qui suit l'une ou l'autre des deux appellations sans distinction.
[33]
L'article
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.
Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni
le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur
prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
[34] L'auteur Jacques Deslauriers, dans son ouvrage intitulé Vente, louage, contrat d'entreprise ou de service [1] définit en ces termes les vices cachés:
«
L'article
S'il s'avère que, malgré sa
connaissance du vice, l'acheteur aurait quand même acheté le bien mais à un
prix moindre, il peut demander une diminution de prix (art.
[35] L'auteur décrit ainsi les caractéristiques du vice donnant ouverture au recours. Il ajoute:
«
Pour réussir un recours fondé sur
des défauts cachés, l'acheteur doit prouver toutes les caractéristiques
permettant de conclure au caractère caché du défaut, telles qu'énoncées ci
après: son caractère caché, sa gravité, l'ignorance qu'avait l'acheteur de son
existence et l'existence de ce défaut au moment de la vente. Les recours pour
vices cachés peuvent être intentés malgré la bonne foi du vendeur; des
dommages-intérêts pourront s'ajouter au remboursement du prix, total ou partiel
selon le cas, si le vendeur connaissait ou ne pouvait ignorer les défauts dont
le bien vendu était affecté (art.
[36]
Le Tribunal estime donc que pour répondre aux exigences de la garantie
légale prévue à l'article
1) Le vice doit être caché.
2) Le vice doit être inconnu de l'acheteur.
3) Le vice doit être important.
4) Le vice doit être antérieur à la vente.
5) Le vice doit avoir fait l'objet d'une dénonciation suffisante.
[37] Le caractère caché d'un vice s'apprécie objectivement en examinant, entre autres, le degré d'inspection du bien faite par l'acheteur, suivant les critères d'un acheteur prudent et diligent [2] .
[38] Il nous faut analyser le caractère caché d'un vice, en tenant compte du niveau de connaissance de l'acheteur [3] .
[39] Pour déterminer si le vice est caché, nous devons savoir si l'acheteur connaissait ou aurait dû connaître le défaut lors de l'acquisition [4] .
[40] Les protections juridiques pour la garantie légale de qualité ne constituent pas un système de protection pour un acheteur qui serait imprudent ou incompétent [5] .
[41] Un acheteur a une obligation de prudence et de diligence lors de l'acquisition du bien et doit l'inspecter raisonnablement. Il doit apporter une attention particulière à tout indice pouvant lui laisser présager un problème quelconque [6] .
[42] Le comportement d'un acheteur doit être examiné selon les circonstances de chaque cas et nous devrons prendre en considération la nature, l'âge et le prix du bien ainsi que le type de vice dont il est affecté [7] .
[43] Un vice sera considéré comme apparent si un acheteur raisonnable avait pu le découvrir et la garantie ne s'appliquera pas si l'acheteur fait défaut d'exécuter son devoir d'inspection convenablement [8] .
[44] Il ne doit pas avoir pu être décelé par un acheteur prudent et diligent avant ou au moment de la vente [9] .
[45] Il faut qu'une personne prudente et diligente n'ait pas été en mesure de déceler le vice avant la vente. L'auteur Denys-Claude Lamontagne résume ainsi le type d'examen auquel l'acheteur doit se livrer [10] :
« L'acheteur doit faire préalablement un examen normal, courant, pas exagérément poussé, mais plus que sommaire, sinon il est privé de son recours. Ainsi, en matière d'immeuble, il n'est pas obligé de creuser le sol ou d'ouvrir les murs, sauf indices révélateurs (saillie dans un mur, etc.). Par contre, il pourrait devoir enlever la neige recouvrant une galerie, mais non pas une piscine creusée (ce qui requiert beaucoup plus d'efforts!) »
[46] L'acheteur doit procéder à un examen raisonnable, sans pour autant être extrêmement long et approfondi.
[47] L'acheteur qui veut être prudent et diligent doit effectuer quelques efforts dans la découverte d'un vice et la simple possibilité de découvrir un vice suffit pour qu'il ne soit pas considéré caché [11] .
[48] L'âge du bien acheté est également pris en considération par les tribunaux. Un acheteur qui acquiert un bien usagé à bas prix doit se poser davantage de questions quant aux vices qui pourraient l'affecter.
[49] L'état de la jurisprudence actuelle démontre que l'acheteur doit procéder à un examen raisonnable du bien et seuls les vices qui échappent à un tel examen sont jugés cachés. Il doit cependant être attentif et sérieux, quoique plutôt rapide et non approfondi.
[50] Les tribunaux considèreront aussi la nature de la défectuosité, les circonstances de l'examen préalable, la nature et l'âge du bien, la pratique habituelle dans le domaine concerné ainsi que le prix de vente.
[51] L'honorable André Rochon, j.C.s., dans l'affaire Lavoie c. Comtois [12] écrit :
« L'acheteur prudent et diligent d'un immeuble procède à un examen visuel attentif et complet du bâtiment. Il est à l'affût d'indice pouvant laisser soupçonner un vice. Si un doute sérieux se forme dans son esprit il doit pousser plus loin sa recherche. D'une part, on ne peut exiger d'un acheteur prudent et diligent une connaissance particulière dans le domaine immobilier. D'autre part, on ne peut conclure au vice caché si le résultat d'un examen attentif aurait amené une personne prudente et diligente à s'interroger ou à soupçonner un problème. À partir de ce point l'acheteur prudent et diligent doit prendre des mesures raisonnables, selon les circonstances, pour connaître l'état réel du bâtiment. Il ne saurait se replier sur son manque de connaissance si son examen lui permet de soupçonner une anomalie quelconque.
Il faut donc examiner, suivant chaque cas d'espèce, la conduite d'un acheteur
prudent et diligent. Antérieurement à 1994 on exigeait également de l'acheteur
qu'il soit prudent et diligent. Sans revenir à l'ancienne règle
jurisprudentielle au sujet des experts, il est possible dans certains cas que
le fait de ne pas recourir à un expert pourra être perçu en soi, comme un
manque de prudence et de diligence. Le tribunal ne veut pas réintroduire dans
notre droit une exigence spécifiquement exclue par le législateur en 1994. Par
ailleurs, cette exclusion ne saurait être interprétée comme autorisant
l'acheteur à agir de façon insouciante ou négligente. Cet acheteur ne fera pas
preuve de prudence et de diligence alors qu'il existe des indices perceptibles
pour un profane, s'il ne prend pas les moyens (y compris le recours à des
experts le cas échéant) de s'assurer que l'immeuble est exempt de vice(…).
»
[52] Dans l'affaire Tilquin c. Rubinstein [13] , l'honorable juge Handman s'exprime ainsi:
« [48] De plus, un vice est aussi considéré apparent lorsque, échappant aux yeux d'un acheteur inexpérimenté, son existence peut être constatée immédiatement par quelqu'un de plus compétent.
[49] Comme la Cour d'appel l’a souligné dans l'affaire Naud c. Normand , l'exclusion de l'exigence de recourir à un expert ne saurait être interprétée comme autorisant l'acheteur à agir de façon insouciante ou négligente: « Cet acheteur ne fera pas preuve de prudence et de diligence alors qu'il existe des indices perceptibles pour un profane, s'il ne prend pas les moyens (y compris le recours à des experts le cas échéant) de s'assurer que l'immeuble est exempt de vice. »
[50] En plus, les critères sont plus exigeants lorsqu'il s'agit d'un vieil immeuble, comme dans le cas présent; une particulière prudence s'impose lors de l'achat d'un immeuble d'un certain âge.
[51] La Cour d'appel, dans l'affaire Naud c. Normand précitée, s'est référée à la cause de Gélinas c. Beaumier , où la Cour a souligné l'importance d'un examen soigneux lorsqu'il s'agit d'une veille maison:
« L'acheteur le moindrement prudent et avisé se sentira obligé, avant d'acquiescer à l'achat d'une veille maison, de l'examiner soigneusement…Les intimés devaient ainsi faire le nécessaire pour vérifier l'état des lieux et voir ce qui était visible. »
[52] L'importance qu'il faut accorder aux indices est une règle bien établie par nos tribunaux. Un acheteur ne peut négliger les indices par une absence de vérification pour ensuite se plaindre de vices cachés. Cela est encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'un immeuble âgé. »
(Références omises)
[53] Bien que la loi écarte l'obligation pour un acheteur de recourir à un expert, cela ne signifie pas qu'il ne doive jamais faire appel à ce dernier lorsque les circonstances s'y prêtent en guise de précaution [14] .
[54] Lorsqu'un bien présente des indices permettant de soupçonner un vice, un acheteur prudent et diligent devrait recourir à l'expert afin que ce dernier puisse procéder à une inspection plus approfondie [15] .
ANALYSE ET DÉCISION:
[55] Les anomalies alléguées par le demandeur étaient nettement présentes lors de la vente.
[56] La situation n'a pas évolué et ne s'est pas détériorée entre la signature de l'acte notarié en juillet 2008 et la dénonciation effectuée par le demandeur un an plus tard.
[57]
La condition principale contenue à l'article
[58] Ici, les nombreuses photographies mises en preuve démontrent clairement la situation.
[59] Quant aux infiltrations d'eau par les murs de fondation, les cernes et les traces constatées sur le mur de ciment et au plancher étaient des indices nettement suffisants pour mettre en garde tout acheteur prudent placé en pareilles circonstances. Ces indices auraient dû mener le demandeur à requérir les services d'un expert compétent avant d'acheter.
[60] La problématique ici, c'est que le demandeur s'est fié sur ses propres compétences.
[61] S'il avait inspecté plus consciencieusement l'immeuble avant de s'en porter acquéreur, il aurait très certainement vu les signes évidents que le Tribunal a lui-même visualisés sur les photos.
[62] Au surplus, le demandeur n'a fait aucune recherche malgré la clause 6.1 de la promesse d'achat qui indique très clairement la possibilité d'infiltrations d'eau au sous-sol au printemps. Avec une telle dénonciation valablement faite par les vendeurs, l'acheteur aurait dû investiguer davantage la situation.
[63] La réclamation portant sur la douche et l'état de la céramique est aux mêmes effets. Une douche en céramique dans un sous-sol a atteint sa durée de vie utile après 25 ans.
[64] Au surplus, les photos mises en preuve démontrent, là encore, l'état de la situation. Il est évident que des travaux importants étaient à prévoir pour cette douche.
[65] Le Tribunal ne peut accueillir la réclamation.
[66] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
[67] REJETTE la réclamation.
[68] CONDAMNE le demandeur à rembourser à la partie défenderesse les frais de sa contestation au montant de 146 $.
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__________________________________ DENIS LE RESTE, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
4 avril 2013 |
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[1]
Jacques DESLAURIERS,
[2]
ABB Inc. c. Domtar Inc.,
[3]
ABB Inc. c. Domtar Inc.,
[4]
Tambourgi c. Ambroise, 1990
[5]
Rivest c. Vachon,
[6]
Placement Jacpar Inc. c. Benzakour, 1989
[7]
Vennat c. Axler-Feifer, 2005
[8]
Cloutier c. Létourneau, 1992
[9]
9165-2115 Québec inc. c. 2425-0599 Québec inc.,
[10] Denys-Claude LAMONTAGNE, Le droit de la vente , 3 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2005, par. 230.
[11]
Laperrière c. Lahaie,
[12]
[13]
[14]
Naud c. Normand,
[15]
St-Louis c. Morin,