Commission des normes du travail c. 9129 6558 Québec inc. |
2013 QCCQ 6232 |
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JL 4270
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
TERREBONNE |
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LOCALITÉ DE |
ST-JÉRÔME |
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« Chambre civile » |
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N° : |
700-22-026225-127 |
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DATE : |
21 mai 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
DENIS LAPIERRE, J.C.Q. |
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COMMISSION DES NORMES DU TRAVAIL |
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Demanderesse |
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c. |
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9129 6558 QUÉBEC INC. |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Monsieur Serge Côté a-t-il démissionné ou a-t-il été congédié? De la réponse à cette question dépendra le sort de ce litige, qui vise l'obtention par monsieur Côté du préavis de fin d'emploi prévu à l'article 82 de la Loi sur les normes du travail [1] .
Les faits :
[2] Dans la présente affaire, conformément à la loi, la demanderesse représente le salarié Serge Côté. Monsieur Côté a été à l'emploi de la défenderesse à compter de l'automne 2007, à titre de mécanicien.
[3] L'employeur a toujours été satisfait de ses services. Il est compétent et n'a fait l'objet d'aucune mesure disciplinaire depuis son embauche.
[4] Quelques mois avant les événements en litige, l'employeur a même augmenté son salaire et lui a fourni un téléphone cellulaire, en plus du camion de l'entreprise dont il avait l'usage depuis son embauche, tant pour son bénéfice personnel qu’aux fins de son emploi.
[5] Les relations entre l'employeur et le travailleur ont toujours été bonnes, voire cordiales. Du moins, ce fut le cas jusqu'en avril 2011, où la situation s'est subitement dégradée.
[6] Voici la chronologie des faits qui entourent ce revirement de situation.
Jeudi 7 avril 2011 :
[7] Ce jour-là, la journée de Serge Côté et de son adjoint, Christian Murray, se termine sur une difficulté. On est incapable d'extraire une pièce récalcitrante de la mécanique d'un véhicule en réparation. Monsieur Côté décide de laisser le tout en plan à la fin de la journée. Le travail reprendra le lendemain matin, alors que tout le monde sera en meilleure forme.
[8] Le soir, voyant que la pièce n'a pas été retirée, le président de la défenderesse, David Riddell, lance un pari à l'un de ses chauffeurs: s'il parvient à extraire la pièce, il recevra 50 $. Le chauffeur essaie, mais échoue à son tour.
Vendredi 8 avril 2011:
[9] Au matin, monsieur Côté est mécontent que quelqu'un d'autre ait tenté de finir son travail. Non seulement la tentative n'a pas réussi, mais les efforts de l'autre employé ont rendu la situation plus difficile encore. Monsieur Côté exprime son insatisfaction à David Riddell. Celui-ci lui explique qu'il ne s'agit pas d'un désaveu de sa part, mais il constate que monsieur Côté est mécontent. Le reste de la journée se déroule comme à l'habitude.
Samedi 9 avril 2011 :
[10] Monsieur Riddell prétend que Serge Côté ne s'est pas présenté au travail ce matin-là, même s'il avait été requis de le faire. Il l'a plutôt aperçu dans le village de Morin Heights, à travailler chez un de ses amis, avec le camion de l'entreprise.
[11] Monsieur Côté l'admet, mais nie avoir été appelé au travail ce jour-là.
Lundi 11 avril 2011 :
[12] Le matin, l'employeur est avisé que monsieur Côté est malade. Il n'est pas en mesure de se rendre à son travail.
[13] Ce que voyant, monsieur Riddell passe chez son employé pour prendre le camion de l'entreprise, comme il le fait parfois en cas de besoin quand monsieur Côté est absent du travail. Il n'a pas à rencontrer monsieur Côté puisque, comme il le fait habituellement, celui-ci a pris soin de laisser les clefs dans le véhicule déverrouillé.
Mardi 12 avril 2011 :
[14] Mardi matin, Serge Côté doit se présenter au travail à pied, puisqu'il n'a pas encore récupéré son camion. Monsieur Côté rencontre monsieur Riddell, mais ils ne se parlent pas. Curieusement, les deux témoignent avoir été de bonne humeur ce jour-là, mais chacun estime que l'autre avait l'air fâché.
[15] Monsieur Côté déclare avoir travaillé comme d'habitude.
[16] Monsieur Riddell et sa conjointe, la contrôleure de l'entreprise, Michelle Smith, rapportent avoir observé, via les caméras de surveillance installées dans l'entreprise, que monsieur Côté s'était plutôt occupé à ramasser ses outils.
[17] La preuve prépondérante ne précise pas le temps qu'il a consacré à cette tâche, mais révèle qu'à la fin de la journée, son coffre et ses affaires avaient été transportés près de la porte de garage, loin de leur emplacement habituel.
[18] Monsieur Côté témoigne tout de même à l'effet que, sur son heure de dîner, il a vidé le camion de l'entreprise de ses effets personnels. Il n'en explique pas la raison.
[19] Le même jour, il rencontre madame Denise Leblanc, une employée de bureau, à qui il déclare en avoir assez de travailler pour David Riddell, qu'il qualifie de manière injurieuse. Madame Leblanc rapporte l'incident à monsieur Riddell, qui lui répond qu'il va s'en occuper.
[20] À la fin de la journée, monsieur Côté retourne chez lui à pied. Il ne remplit aucune feuille de temps pour cette journée-là.
Mercredi 13 avril 2011 :
[21] Ce jour-là, selon la version, soit monsieur Côté ne se présente pas au travail, soit il n'y est que dans l'avant-midi.
[22] Monsieur Riddell ne se souvient pas l'avoir rencontré. Monsieur Côté prétend au contraire avoir croisé son patron, à qui il a trouvé le même air renfrogné que la veille.
[23] Selon son témoignage, monsieur Côté retourne chez lui à la pause du dîner. Il le fait vraisemblablement à pied, puisqu'il dit n'avoir pas récupéré son camion. À ce moment, il prétend avoir tenté de rejoindre la Commission des normes du travail, sentant son congédiement imminent vu la mine de son employeur et le fait qu'il n'a pas récupéré son camion depuis le 11 au matin. Ce faisant, il constate que son téléphone cellulaire a été coupé. Il comprend alors qu'il a été congédié.
[24] La version de l'employeur diffère. Monsieur Riddell, constatant l'absence de son mécanicien dans la journée, tente de le joindre à quelques reprises sur son cellulaire. Compte tenu de son attitude depuis le 12 avril et de son absence inexpliquée le 13, la contrôleure Michelle Smith décide de couper sa carte de crédit et son téléphone cellulaire.
[25] Elle pourra le faire immédiatement quant à la carte de crédit, à l'insu de monsieur Côté, mais affirme n'avoir pas été en mesure d'obtenir l'interruption du service téléphonique avant le lendemain après-midi.
Jeudi 14 avril 2011 :
[26] Monsieur Côté témoigne s'être rendu chez son employeur ce jour-là, mais uniquement pour rencontrer monsieur Riddell afin de s'expliquer avec lui. En l'absence de celui-ci, il ne reprend pas le travail. Il quitte les lieux.
[27] Auparavant, il a toutefois le temps d'exprimer à son assistant, Christian Murray, sa frustration et son mécontentement à l'égard de l'employeur. Monsieur Murray est tellement impressionné par l'apparente colère de monsieur Côté qu'il prévient monsieur Riddell d'être prudent et qu'il part à la suite de son collègue.
[28] Il réussira à le rattraper dans le village de Morin Heights. Il entame alors avec lui une conversation qui sera couronnée de succès, puisque monsieur Côté ne cherchera pas à entrer en contact avec monsieur Riddell ce jour-là. À vrai dire, aucune preuve n'indique que la crainte subjective de monsieur Murray était fondée. Il n'y a heureusement eu ni violence ni menace.
[29] Tel que susdit, après avoir reçu le téléphone de Murray, monsieur Riddell et madame Smith continuent leurs démarches pour faire interrompre le téléphone cellulaire de monsieur Côté.
[30] Le même soir, monsieur Riddell demande à deux de ses employés de livrer à monsieur Côté ce qu'il reste de ses affaires personnelles, qui avaient été entreposées près de la porte du garage le mardi précédent. Les parties ne se reparleront pas.
[31] Ce jour-là où le lendemain, monsieur Riddell rencontre Christian Murray pour lui dire que Serge Côté n'est plus employé de l'entreprise. Monsieur Murray n'a pas un souvenir précis des mots exacts prononcés par monsieur Riddell.
Vendredi 15 avril 2011 :
[32] À ce moment, selon la preuve, monsieur Christian Murray, ébranlé du sort de son collègue de travail, décide de quitter son emploi.
[33] Il demande l'aide de Serge Côté pour l'aider à récupérer son coffre d'outils, ce que monsieur Côté accepte.
Lundi 18 avril 2011 :
[34] Tant Serge Côté que Christian Murray se sont trouvé un nouvel emploi.
[35] Monsieur Murray déclare avoir accepté une offre qui lui avait été faite quelque temps auparavant par son ancien employeur.
[36] Quant à monsieur Côté, il témoigne être lui aussi retourné au service de son ancien employeur, qui aurait été mis au courant de sa disponibilité par le bouche à oreille propre à une petite municipalité.
Mardi 19 avril 2011 :
[37] La défenderesse prépare les documents de cessation d'emploi D-1. Sous la rubrique « raison du présent relevé d'emploi », on inscrit la lettre « K » (« autre raison ») de préférence à la lettre « E » (« départ volontaire ») ou « M » (« congédiement ) .
[38] Madame Smith et monsieur Riddell expliquent que ce choix est justifié par l'absence d'explication entre les parties quant à la fin de l'emploi et à leur volonté de provoquer un retour d'appel des services gouvernementaux ou de l'employé lui-même, afin de pouvoir donner leur version des faits.
[39] Le même jour, on prépare la dernière paye de monsieur Côté ainsi que son chèque d'indemnité de départ (« 4 % »). Les documents indiquent que le dernier jour travaillé par monsieur Côté est le 8 avril, en raison de l'absence de feuilles de temps pour les journées du 12 et du 13 avril.
[40]
Monsieur Côté ne réclame pas le paiement de ces deux journées de
travail, mais réclame le préavis de fin d'emploi prévu à l'article
Le droit :
[41]
L'article
[42]
L'avis est requis quelle que soit la raison de l'employeur de mettre fin
à l'emploi
[3]
,
sauf dans les cas exprimés à l'article
[43] Par contre, le texte de l'article 82 implique forcément que l'avis n'est pas requis si le salarié démissionne [4] .
[44] La jurisprudence détermine généralement qu'une démission comporte à la fois un élément objectif (intention de rompre le lien d'emploi) et un élément subjectif (acte positif par lequel le salarié exprime sa volonté) [5] .
[45] La démission doit être volontaire. Elle ne se présume pas et l'on doit préférer une autre interprétation en cas d'ambiguïté [6] . La démission ne peut être déduite que d'une preuve de volonté claire et sans équivoque, le fardeau de la preuve revenant à l'employeur [7] .
Les motifs :
[46] La pente est donc abrupte pour l'employeur, sur lequel repose le fardeau de la preuve.
[47] Mais il est risqué pour le travailleur de se contenter de se retrancher derrière le fardeau de la preuve. Il doit au moins proposer des moyens qui le justifient de prétendre avoir été congédié. Dans le cas contraire, il risque fort de voir l'employeur rencontrer son fardeau.
[48] La présente affaire a ceci de particulier que ni l'employeur, ni le salarié n'ont expressément exprimé leur intention de congédier ou de démissionner. Aucune rencontre n'a eu lieu entre les parties à ce sujet avant que l'emploi de monsieur Côté ne prenne fin. Le Tribunal doit donc évaluer une preuve circonstancielle, tant à l'égard des prétentions de l'employeur (démission du salarié), qu'à celle du travailleur (congédiement). Il doit garder à l'esprit que le doute doit favoriser la thèse du congédiement, ou plutôt de l'absence de démission.
[49] Le Tribunal examinera donc les événements qui ont précédé la décision de monsieur Côté de ne pas retourner au travail, à la recherche d'une raison ou d'un indice de congédiement l'ayant justifié d'agir ainsi. La jurisprudence reconnaît en effet qu'une absence au travail sans justification peut constituer une démission [8] , tout comme un départ volontaire du lieu de travail [9] .
La preuve du travailleur :
[50] Selon la preuve, monsieur Côté a été présent sur les lieux du travail toute la journée du mardi 12 avril. Il déclare y avoir travaillé, mais n'a pas rempli de feuille de temps. L'employeur prétend plutôt qu'il a consacré sa journée à ramasser ses affaires pour les apporter près de la porte du garage.
[51] Le mercredi 13 avril, selon la version, soit monsieur Côté ne s'est pas présenté au travail soit il s'y est présenté le matin pour quitter les lieux sur l'heure du dîner.
[52] Au soutien de sa décision de ne pas rentrer au travail dans l'après-midi, la procureure de la Commission soulève trois motifs. Il y a lieu de les examiner.
[53] Premier motif: le travailleur estime que l'humeur renfrognée de son patron, le mardi et le mercredi matin, lui faisait craindre un congédiement
[54] Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce motif est peu convaincant, voire même farfelu. L'humeur du patron, selon la perception subjective du travailleur, peut être causée par un si grand nombre de raisons qu'elle ne saurait suffire à justifier la moindre crainte chez le travailleur, surtout dans un contexte ou elle n'a été précédée d'aucun reproche, d'aucune mesure, d'aucun litige. Seule la conversation du vendredi précédent, somme toute assez anodine, a pu être rapportée comme inhabituelle. Cet élément n'a donc aucune valeur probante, qu'il soit considéré isolément ou avec d'autres motifs.
[55] Deuxième motif: monsieur Côté rapporte que, contrairement à l'habitude, on ne lui a pas rendu son camion le lundi 11 avril au soir. L'employeur explique qu'il a agi ainsi car il ignorait si monsieur Côté rentrerait le lendemain, puisqu'il n'a pas eu de communication de sa part dans la journée du 12.
[56] Le travailleur rétorque qu'il n'a pas davantage eu accès à son camion le 12 avril, ni le 13, malgré son retour au travail.
[57] Pourtant, la preuve révèle autre chose. En effet, le mardi 12 avril, sur l'heure du dîner, monsieur Côté a eu accès au camion puisqu'il l'a lavé, nettoyé et vidé de ses outils personnels.
[58] Pourquoi, après avoir fait cela, ne l'a-t-il pas conservé, s'obligeant à retourner chez lui à pied et à revenir au travail à pied le lendemain? La preuve ne le révèle pas. Tout ce que le Tribunal peut constater, c'est que monsieur Côté semble bien avoir eu accès à son camion et qu'il n'avait donc, jusque-là, aucun indice de congédiement imminent.
[59] Troisième motif: finalement, l'élément culminant qui a incité monsieur Côté à demeurer chez lui le mercredi après-midi plutôt que de retourner au travail est la découverte, en essayant d'appeler la Commission des normes du travail, du fait que l'on avait interrompu le service de son téléphone cellulaire. Pour lui, combiné aux deux motifs précédents, cela ne pouvait signifier que son renvoi.
[60] Mais il y a une importante limite à cette prétention, même si on accepte l'idée que monsieur Côté avait des raisons pour appeler la Commission des normes du travail, ce qui est douteux. En effet, si l'employeur reconnaît avoir interrompu dès le mercredi 13 avril l'usage de la carte de crédit, ce dont le travailleur n'a pas eu conscience, il affirme n'avoir réussi à faire de même à l'égard de la ligne téléphonique que le lendemain, le jeudi 14 avril.
[61] Devant cette preuve contradictoire, le Tribunal doit préférer une version à l'autre. Quelques motifs incitent le Tribunal à préférer la version de l'employeur.
[62] Madame Smith a un souvenir très précis de la séquence d'interruption des deux services précités. Pour la carte de crédit, habituée à réagir rapidement en cas de fraude, la compagnie émettrice a agi immédiatement. Dans le cas du téléphone cellulaire, c'était plus compliqué. Il a fallu attendre au lendemain.
[63] Par ailleurs, la chronologie des événements n'est pas un élément pour lequel la mémoire de monsieur Côté semble très fiable.
[64] Il indique en effet au Tribunal avoir reçu dès le vendredi 15 avril son indemnité de vacances et ses documents de cessation d'emploi. Or, ces documents ont été clairement rédigés le 19 avril. Le témoignage de madame Smith est corroboré en cela par le libellé de la pièce P-4, le talon du chèque de vacances, qui démontre à sa face même avoir été rédigé après le 16 avril 2011, date de la fin de la période de paie concernée. Il a en fait probablement été rédigé le 19 ou le 20, puisqu'il était payable le 21.
[65] De plus, monsieur Côté a eu parfois tendance à nier des éléments que le Tribunal considère établis par une preuve prépondérante. C'est le cas de l'intervention de Christian Murray pour le calmer, le 14 août, car il était furieux contre monsieur Riddell. Monsieur Murray, témoin en demande, est apparu sincère et crédible aux yeux du Tribunal.
[66] De même, la conversation rapportée par madame Denise Leblanc, qui l'a elle-même racontée à deux autres témoins, apparaît crédible au Tribunal et a été carrément niée par monsieur Côté.
[67] Pour toutes ces raisons, le Tribunal préfère la version avancée par l'employeur et considère que le téléphone de monsieur Côté n'a été coupé que le 14 avril, et non le 13.
[68] Cela ne laisse donc à monsieur Côté, pour justifier sa décision de ne pas retourner au travail le 13 avril, que les deux premiers motifs, qui apparaissent au Tribunal insuffisants, voire négligeables.
[69] Mais il y a plus. Si faible soit-elle, la preuve du travailleur est contrée par celle de l'employeur.
La preuve de l'employeur :
[70] Celui-ci a établi à la satisfaction du Tribunal que, dès le 12 avril, le travailleur a ramassé ses affaires de son poste de travail pour les apporter près de la porte, prêtes à partir (geste positif).
[71] Le même jour, il a vidé le camion de ses effets personnels.
[72] Lors d'une conversation avec madame Denise Leblanc, il évoque son désir de ne plus travailler pour monsieur Riddell (expression d'une intention).
[73] Il ne s'est pas présenté au travail le 13 avril, du moins en après-midi. Il n'a pas tenté de rejoindre l'employeur pour lui en expliquer la raison. Il n’a pas répondu aux tentatives de l'employeur pour le rejoindre. Il ne réclame pas le paiement des journées du 12 et du 13 avril.
[74] Il s'est bien rendu à son lieu de travail le jeudi 14 avril, mais c'était uniquement pour avoir une conversation avec monsieur Riddell et non pour reprendre le travail. Pour preuve, vu l'absence de monsieur Riddell, Serge Côté repart, courroucé, poursuivi par monsieur Murray. Il a donc de lui-même décidé non seulement d'être absent le 13 en après-midi, mais également le 14 au matin.
[75] Dès le lundi matin suivant, il travaillait pour un autre employeur, tout comme son collègue Christian Murray.
[76] Bien sûr, l'employeur a démontré peu d'empressement à retenir son employé. Dès le 13, il décide d'annuler la carte de crédit du travailleur et d'interrompre le service de son téléphone cellulaire. Mais le travailleur ignorait cela. C'est donc sans égard à ces gestes de l'employeur qu'il a décidé de ne pas rentrer au travail.
[77] On pourra reprocher à l'employeur d'avoir limité ses efforts pour joindre son employé à quelques téléphones le 13. Il faut toutefois rappeler que, le 14, on lui avait fait part, à tort ou à raison, du fait que des menaces avaient été proférées à son endroit par monsieur Côté.
[78] Il est possible que l'employeur ait eu, quelque part entre le 12 et le 14 avril 2011, l'intention de congédier monsieur Côté. Mais il n'a pas eu le temps de le faire. Le travailleur a au préalable posé des gestes incompatibles avec toute autre interprétation qu'une démission de sa part.
[79] C'est probablement en raison de ces particularités du présent dossier que l'employeur a choisi d'indiquer la mention « autre » comme motif de cessation d'emploi à D-1. Pour le Tribunal, cette décision, prise une semaine après les événements, ne lui est pas très utile pour déterminer l'intention des parties, comme l'aurait été la mention « départ volontaire » ou « congédiement ».
[80] Le code utilisé, en l'absence d'une déclaration expresse de l'une ou l'autre des parties à l'égard de ses intentions, reflétait sans doute la nécessité de soumettre la question à un Tribunal.
[81] Cela incite le Tribunal à disposer de la présente affaire sans frais.
[82] Par ces motifs, le Tribunal:
[83] REJETTE la demande de la demanderesse;
[84] LE TOUT sans frais.
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__________________________________ Denis Lapierre, j.C.Q. |
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Me Karine Morin |
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Procureure de la demanderesse |
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Me Jacques Laferrière |
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Procureur de la défenderesse |
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Date d’audience : |
1 er et 2 mai 2013 |
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[1] L.R.Q. chapitre N-1.1
[2]
Article
[3]
Commission des normes du travail c. Chantiers Davie Ltée (C.A.,
1987-09-08),
[4]
Commission des normes du travail c. Quesnel (C.Q., 1999-06-01),
[
[6]
Roy et Constructions paysannes inc, précitée note 1; Commission des normes
du travail c. J.E. Mondou ltée (C.Q., 1998-11-26),
[7]
Boucher et Commission scolaire de l'Énergie (C.R.T., 2003-02-19),
2003
QCCRT 0118
,
[8]
Auto Photo Canada Ltée et Banon (T.A., 1988-05-22),
[9]
Sabbah et Valisa inc. (Esso), (C.T., 1997-08-21),