COMMISSION DES RELATIONS DU TRAVAIL

 

 

Dossier :

AQ-1003-6508

Cas :

CM-2013-1694

 

Référence :

2013 QCCRT 0337

 

Montréal, le

9 juillet 2013

______________________________________________________________________

 

DEVANT LES COMMISSAIRES :

Andrée St-Georges, juge administrative

 

Pierre Flageole, juge administratif

 

André Michaud, juge administratif

______________________________________________________________________

 

Phu Vu Le

 

Requérant

 

c.

 

Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec

 

Intimé

 

et

 

Gouvernement du Québec

Direction des relations professionnelles

Conseil du trésor

 

Mis en cause

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

[1]            Le 2 avril 2013, Phu Vu Le (le requérant ) dépose une demande de révision de la décision rendue par la Commission, le 21 mars 2013 ( 2013 QCCRT 0154 ). Par cette décision, la Commission rejette sommairement la plainte qu’il avait déposée contre Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (le  Syndicat ) en vertu de l’article 47.2 du Code du travail, RLRQ, c. C-27 (le Code ).

[2]            La demande de révision prend appui sur le paragraphe 3° du premier alinéa de l’article 127 du Code et soulève en conséquence que la décision doit être révisée parce qu’elle est affectée d’un vice de fond de nature à l’invalider.

Le contexte

[3]            Le Syndicat a déposé quatre griefs au nom du requérant entre les 18 août 2005 et 2 juin 2009. Tous ces griefs ont été déférés à l’arbitrage dans les délais prévus par la convention collective.

[4]            Par ailleurs, le 11 mai 2009, le requérant a déposé une plainte de discrimination auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (la  CDPDJ ), sans faire appel aux services du Syndicat pour l’y représenter ou l’appuyer.  

[5]            Le 8 juin 2012, la CDPDJ avise le plaignant qu’elle ferme son dossier étant donné qu’elle considère que les griefs déposés en son nom constituent «  un autre recours  » au sens de l’article 77 de la Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12.

[6]            Le 7 août 2012, le requérant apprend qu’il n’y a pas d’appel ni de révision possible de cette décision de la CDPDJ. Le même jour, il dépose à la Commission une plainte contre le Syndicat selon l’article 47.2 du Code. Il y allègue être victime de harcèlement de la part de son directeur et de ses collaborateurs et plaide que les griefs déposés par le Syndicat pour le défendre n’ont pas encore été entendus par un arbitre, malgré le délai écoulé depuis leur dépôt. L’audience portant sur cette plainte est convoquée pour le 12 février 2013.

[7]            Le 5 février 2013, le requérant dépose au dossier quelque 125 documents qu’il entend soumettre au soutien de sa plainte contre le Syndicat. Le 6 février 2013, le Syndicat demande le rejet sommaire de la plainte du requérant. La Commission entend les parties sur cette dernière demande le 12 février 2013.

[8]             Entre autres, le Syndicat soutient que deux des quatre griefs ont été réglés et que les deux autres, ceux qui concernent le harcèlement dont le requérant se dit victime, sont toujours actifs. De plus, la procédure interne du Syndicat n’a pas encore conduit à leur retrait définitif, même si le requérant a été prévenu à plusieurs reprises de l’insuffisance de sa preuve. La plainte serait donc sans objet à l’égard des deux premiers griefs et prématurée quant aux deux autres.

[9]            Alternativement, le Syndicat plaide que les événements pertinents à la plainte du requérant se sont tous produits plus de six mois avant le dépôt de la plainte, le 7 avril 2012, ce qui fait que celle-ci a été déposée hors délai, d’autant que le requérant a été avisé par écrit, dès le 14 janvier 2010, de l’intention du Syndicat de se désister de ses griefs de harcèlement. La lettre du Syndicat, reproduite au paragraphe [31] de la décision dont le requérant demande la révision, se lit comme suit :

Bonjour!

Je n’entends absolument rien sur la cassette numéro 1.

Je n’ai pas vraiment du temps à perdre et à moins que tu me donnes des preuves additionnelles claires concernant ton dossier, je n’aurai d’autres choix que de me désister de ton grief de harcèlement.

(Reproduit tel quel)

[10]         Dans un cas comme dans l’autre, selon les prétentions du Syndicat, le rejet sommaire de la plainte s’impose.

[11]         La Commission, par sa décision du 21 mars 2013 rejette sommairement la plainte du requérant. Elle conclut, entre autres, que deux des quatre griefs du requérant sont réglés et que la plainte du requérant est tardive quant aux deux autres. Les reproches que le plaignant adresse au Syndicat remontent en effet aux années 2009 et 2010 et la plainte déposée le 7 août 2012 déborde largement le délai de six mois prévu par l’article 47.3 du Code pour son dépôt.

la demande de révision

[12]         La demande de révision du requérant est déposée à la Commission le 2 avril 2013. Elle comporte 22 longs paragraphes sur 10 pages de texte bien serré. Elle fait référence aux 125 pièces déjà déposées au soutien de la plainte originale et à quelques pièces additionnelles.

[13]         Le 3 mai 2013, se prévalant du deuxième alinéa de l’article 128 du Code, le Syndicat conteste la demande de révision par écrit.

[14]         Le 14 juin 2013, le requérant répond aux commentaires du Syndicat par un document qui reprend, en bonne partie, le texte du document du 2 avril 2013 en y ajoutant d’autres affirmations. Le document fait 18 pages, sans compter les nouvelles pièces. Le requérant y expose l’ensemble de ses revendications tant à l’égard de l’employeur, Gouvernement du Québec, Direction des relations professionnelles, Conseil du trésor que du Syndicat.   

[15]         L’audience portant sur la demande de révision se tient le 21 juin 2013. Puisque le requérant n’est pas assisté d’un procureur, la Commission lui explique la façon de procéder et le fardeau qui est le sien. Plus précisément, la Commission indique au requérant qu’elle est saisie uniquement de sa demande de révision de la décision qui rejette sa plainte de façon sommaire et non de la totalité de son dossier.

[16]         La Commission lui précise aussi qu’elle a reçu sa demande de révision, sa réponse aux commentaires du Syndicat et les documents y joints et que le point principal sur lequel elle souhaite l’entendre est celui de la prescription.

[17]         Lors de l’exposé de ses prétentions, le requérant éprouve de grandes difficultés à s’en tenir à ce qui est pertinent à sa demande de révision. Il doit être ramené à l’essentiel à plusieurs reprises pendant sa présentation.

[18]         Malgré cette difficulté, la Commission procédera à l’analyse détaillée des prétentions du requérant qui peuvent être reliées à la question en litige, soit celle de la présence, dans la décision par laquelle la Commission rejette sommairement sa plainte pour cause de prescription, d’un vice de fond au sens donné à cette expression dans l’affaire Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 4479 c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des Centres jeunesse de Montréal (STTCJM-CSN) , 2003 QCCRT 142 .

[19]         Précisons, d’entrée de jeu, qu’il n’y a pas lieu de revenir sur le grief contestant l’évaluation de rendement ou sur celui portant sur une réprimande. Dans le premier cas, le grief a été réglé par une nouvelle évaluation. Dans le deuxième cas, la lettre de réprimande a été retirée du dossier. Si tant est qu’un syndicat puisse aller en arbitrage dans l’un ou l’autre de ces cas, ce n’est certainement pas un défaut de représentation de ne pas le faire puisqu’une telle décision entre facilement dans le cadre de sa discrétion.  

Analyse des prétentions du requérant

[20]         Une lecture attentive de la demande du 2 avril 2013 et de la réplique du 14 juin 2013 permet à la Commission d’identifier les éléments pertinents soulevés par le requérant quant à la question du rejet sommaire de sa plainte pour cause de prescription.

[21]         Ainsi, au deuxième alinéa du sous-paragraphe [5] du paragraphe [12] du document du 14 juin 2013, à la page 9, on peut y lire ceci :

Contrairement aux commentaires mensongers du SPGQ à la page 4 du Par. 13,14,19 à 22 et à la page 7 du Par.4, aucune décision officielle du SPGQ n’est communiquée par écrit au plaignant au début de 2010 et rien n’est clair et complètement contradictoire . Le conseiller syndical Guy Mercier a demandé verbalement au plaignant de : « reprendre tous les cassettes et faire la transcription ». Le conseiller syndical n’a jamais communiqué son refus écrit en janvier 2010  : « sans preuve additionnelle, le syndicat n’avait pas l’intention de porter les griefs de harcèlement psychologique à l’arbitrage ».

(Reproduit tel quel, à l’exception du gras qui a été omis)

[22]         Or, dans la décision dont le requérant demande la révision, la Commission écrit ce qui suit :

[74]      La Commission a rendu de nombreuses décisions dans lesquelles elle déclare que le délai de six mois de l’article 47.3 est un délai de rigueur (voir, Tremblay c. Syndicat des employés-es de la santé et des services sociaux de la Baie (CSN) , 2008 QCCRT 0450 , au paragraphe 22). Cela veut dire que la Commission ne peut examiner une plainte qui est déposée après ce délai.

[75]      Il faut déterminer le point de départ de ce délai. Ce point de départ, c’est la date où le plaignant savait ou devait savoir l’existence du manquement qu’il reproche au syndicat. Donc, avant même de se demander si le plaignant a raison, il faut se demander à quel moment il a appris le manquement reproché.

[76]      Dans notre cas, la presque totalité des reproches que le plaignant adresse au SPGQ remonte à 2009 et 2010. Ces reproches sont contenus dans l’annexe de 32 pages de sa plainte déposée le 7 août 2012. En voici quelques exemples tirés de cette annexe :

M. Mercier a indiqué au plaignant clairement et à plusieurs reprises qu’il va fermer le dossier si le plaignant n’a pas trouvé cette preuve d’enregistrement. Par conséquent, le plaignant ne croit plus et le plaignant ne fait plus confiance à son syndicat . Malgré la conclusion de l’enquête commandée par le MDEIE du 16 décembre 2009 est partiale, biaisée et injuste, le SPGQ considère la fermeture du dossier de plaintes du plaignant et a demandé au plaignant de reprendre toutes les preuves d’enregistrement fournies.  (page 1 de l’annexe, voir aussi page 3)

Le 27 octobre 2010, le plaignant a fait parvenir à la CDPDJ une lettre de réponse pour les questions de Madame [ ], enquêtrice. De plus, une Déclaration du plaignant a été prise par Madame [ ] en date du 11 novembre 2010 qui atteste que le SPGQ va fermer le dossier du plaignant en se basant uniquement sur l’enquête partiale, biaisée et injuste du consultant de l’employeur et le plaignant a opté pour un recours en matière de droits de la personne plutôt que pour un recours, foncé sur l’article 47.2 C.t., pour manquement de son syndicat à son devoir de juste représentation  : « Lorsque j’ai rencontré l’enquêteur et le consultant du MDEIE, j’étais en présence de monsieur Mercier.. Je n’étais pas autorisé de parler de discrimination raciale . J’aurais pu en parler davantage mais l’enquêteur ne voulait que des faits succincts et essentiels sur le harcèlement psychologique et non de harcèlement racial . En référence au paragraphe a) de la lettre datée du 28 octobre 2010 de monsieur Mercier, la cassette d’enregistrement a terminé avant que monsieur [ ] dise : «  je vais continuer de te harceler .. ». Si je n’ai pas cette preuve, monsieur Mercier m’a dit qu’il va fermer le dossier de plaintes pour insuffisance de preuve . (…) (page 3 de l’annexe)

(…) Maintenant, j’ai fait la transcription nécessaire sur la cassette No. 1 comportant l’ensemble des propos de harcèlement de M. [ ], mais je n’ai pas donné suite à ce sujet avec monsieur Mercier. Depuis ce temps là, je me suis concentré avec ma plainte à la Commission … [la CDPDJ] (page 4 de l’annexe)

(Reproduit tel quel, à l’exception des données nominatives)

[77]      Autrement dit, s’il y a eu des manquements du SPGQ, ce sur quoi la Commission ne se prononce pas, il est clair qu’ils sont survenus en 2009 et 2010. Le délai de six mois prescrit par l’article 47.3 du Code est largement dépassé lors du dépôt en août 2012.

[23]         Ainsi, sur la base de ses propres aveux, il faut conclure que le requérant savait, dès 2010, que le Syndicat n’entendait pas aller de l’avant avec ses griefs faute de preuve jugée suffisante et le requérant admet même que c’est la perte de confiance envers son Syndicat qui a fait en sorte qu’il «  a opté pour un recours en matière de droits de la personne plutôt que pour un recours, fondé sur l’article 47.2 C.t., pour manquement de son syndicat à son devoir de juste représentation ».

[24]         Et, dans la décision sous révision, la Commission ajoute :

[74]      Le plaignant soumet qu’il ignorait l’existence d’un recours contre son syndicat lorsqu’il a entrepris les démarches à la CDPDJ. L’ignorance de la loi n’est pas un motif admissible pour justifier le dépassement des délais ( Malo c. Syndicat de la fonction publique du Québec , 2008 QCCRT 0033 ). Dans le même sens, le dépôt d’un recours devant une autre instance ne justifie pas davantage ce retard ( Ramsaroop c. Syndicat des employé-es du Centre universitaire de santé McGill-CSN/Mc Gill University Health Center employees’ union-CSN , 2010 QCCRT 0335 ).

[25]         Cette autre affirmation du requérant lors de l’audience en première instance contredit, elle aussi, l’argument qu’il tente de faire valoir maintenant, en révision, en prétendant que la position du Syndicat n’était pas claire à l’époque pertinente, soit plus de six mois avant le dépôt de sa plainte le 7 août 2012.

[26]         Plus loin, au deuxième alinéa du sous-paragraphe [7] du paragraphe [18], page 14 du document du 14 juin 2013, le requérant soutient ce qui suit :

Pour des fins de la justice , contrairement aux commentaires du SPGQ et contrairement à la décision Turcotte, le calcul du point de départ de la décision Turcotte est injuste , déraisonnable et arbitraire en prenant la date dans laquelle le conseiller syndical Mercier du SPGQ a refusé verbalement plusieurs demandes légitimes du plaignant en 2009 et 2010. Ceci constitue une erreur de droit grave de la part du commissaire Turcotte dans sa décision.

En 2009 et 2010, officiellement rien ne permet au plaignant de croire que le SPGQ contrevient à l’article 47.2. Seulement en date du 15 janvier 2013 le SPGQ a fait parvenir au plaignant une lettre recommandée signée par conseillère syndicale Danielle Archambault avisant qu’elle recommande au SPGQ de procéder au désistement des griefs 46399 et 46395 (Voir P127)

Selon la décision Turcotte au paragraphe 79, le SPGQ n’a pas pris toujours une décision définitive sur le désistement des griefs 46399 et 46395 depuis 2009 soit environ 4 ans . Les deux autres griefs portant No. 45749 (depuis 18 août 2005) et No. 46400 (depuis 2009) sont fermées définitivement et unilatéralement par le SPGQ sans motif valable, sans consultation et sans avis écrit pour le plaignant. Cette preuve écrite du SPGQ a permis au plaignant de croire officiellement que le SPGQ contrevient à l’article 47.2 du Code du travail .

Par conséquent, le calcul du point de départ du délai de prescription doit être le 15 janvier 2013.

(Reproduit tel quel, à l’exception du caractère gras qui a été omis)   

[27]         Comme il a été mentionné plus haut, le Syndicat plaidait que la plainte du requérant déposée le 7 août 2012 était soit prématurée, soit tardive. Dans un cas comme dans l’autre, elle devait être rejetée sommairement. La Commission a décidé qu’elle était prescrite et la question devant la formation en révision porte sur cette décision. Ce n’est pas en plaidant que le délai de prescription ne pouvait commencer avant le 15 janvier 2013 que le plaignant améliore son sort : il plaide plutôt lui-même que sa plainte déposée le 7 août 2012 était prématurée.

[28]         Enfin, au cinquième alinéa du sous-paragraphe [7] du paragraphe [18], page 14 du document du 14 juin 2013, le requérant soutient ce qui suit :

De  plus, en ce qui concerne la suspension de la prescription , l’article 2904 du Code civil du Québec édicte que « la prescription ne court pas contre les personnes qui sont dans l’impossibilité d’agir soit par elle-même, soit en se faisant représenter par d’autres » : SPGQ ne consulte jamais le plaignant, ne communique jamais au plaignant les résultats des griefs jusqu’au 15 janvier 2013, date à laquelle le SPGQ a fait parvenir au plaignant, une lettre recommandée signée par la conseillère syndicale Danielle Archambault avisant qu’elle recommande au SPGQ de procéder au désistement des griefs 46399 et 46395 (Voir P127). 

(Reproduit tel quel)

[29]         Cet argument ne peut être retenu.

[30]         D’abord, l’écoute attentive de l’enregistrement de l’audience tenue par la Commission le 12 février 2013 permet de conclure que cet argument n’a pas été soulevé. On ne peut pas plaider en révision un argument que l’on n’a pas soumis à la première occasion. Dans l’affaire Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Fontaine, 2005 QCCA 775 , la Cour d’appel s’exprime ainsi à ce sujet :

[56]      Enfin, le recours en révision «ne doit […] pas être un appel sur la base des mêmes faits» : il s’en distingue notamment parce que seule l’erreur manifeste de fait ou de droit habilite la seconde formation à se prononcer sur le fond, et parce qu’une partie ne peut «ajouter de nouveaux arguments» au stade de la révision.

[31]         Ensuite, et surtout, le requérant n’était pas du tout dans l’impossibilité d’agir au sens de l’article 2904 du Code civil du Québec pendant toute la période pertinente. Selon la jurisprudence de la Commission, cette notion d’impossibilité d’agir doit être interprétée de façon restrictive. Voici ce que la Commission écrit à ce sujet dans l’affaire Béliveau c. Syndicat du personnel de soutien et de réadaptation du Centre-Jeunesse , 2007 QCCRT 0627  :    

[86]      Le plaignant peut-il prétendre que ce délai de 30 jours pour déposer un grief devait être prolongé jusqu’en janvier 2006, compte tenu de son état de santé? L’article 2094 du Code civil du Québec prévoit, en certaines circonstances, la prolongation des délais de prescription. Cet article édicte :

« La prescription ne court pas contre les personnes qui sont dans l’impossibilité en fait d’agir soit par elles-mêmes, soit en se faisant représenter par d’autres. »

[87]      Selon la jurisprudence, seule une incapacité absolue d’agir peut autoriser une dérogation aux délais de prescription. Or, le plaignant ne peut alléguer avoir été dans l’impossibilité d’agir pendant toute la période du 22 février 2005 au 19 janvier 2006. D’abord, entre le 22 février 2005, date de sa fin d’emploi, et le 5 mars 2005, date de son accident, le plaignant pouvait agir.

[88]      Puis, sans remettre en question les souffrances et les difficultés d’adaptation du plaignant, il en est de même pour la période de juillet 2005 à décembre 2005. À compter de la fin juin 2005, le plaignant est de retour chez ses parents. Il peut parler. Il est lucide, diront son père et sa mère. Il se déplace régulièrement à l’hôpital avec l’aide de ses parents ou par transport adapté. Il peut donner des mandats. Son frère a une procuration pour s’occuper de ses affaires bancaires. Sa mère s’occupe des relations avec les assureurs et son père de ses immeubles à revenus. Ceux-ci lui font rapport régulièrement. De plus, il n’y a aucune preuve médicale démontrant une incapacité d’agir. Ni le plaignant, ni ses représentants ne sont dans l’impossibilité absolue d’agir.

[32]         Le requérant ne soulève aucune circonstance qui s’approcherait, même un tant soit peu, de la situation décrite dans cette affaire et qui n’a pas été déclarée suffisante pour constituer une impossibilité d’agir.

Conclusion

[33]         La Commission, après avoir étudié de façon attentive la demande de révision du requérant et entendu ses représentations, en vient à la conclusion qu’il n’a pas démontré que la décision, par laquelle sa plainte en vertu de l’article 47.2 du Code avait été rejetée pour cause de prescription, était affectée d’un quelconque vice de fond.

 

EN CONSÉQUENCE, la Commission des relations du travail

REJETTE                      la demande de révision.

 

 

________________________________ __ ___

Andrée St-Georges, présidente de la formation

 

___________________________________ __

Pierre Flageole

 

___________________________________ __

André Michaud

 

M e France Saint-Laurent

Trudel Nadeau , S.E.N.C.R.L.

Représentante de l’intimé

 

M e Gabriel Lemay

Crevier, Royer (Justice-Québec)

Représentant du mis en cause

 

Date de l’audience :

21 juin 2013