9176-2211 Québec inc. (Voyage Vasco Évasion) c. Voyage Vasco inc. (Groupe Atrium) |
2013 QCCQ 7230 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-22-172718-101 |
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DATE : |
24 juillet 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
CHRISTIAN M. TREMBLAY, J.C.Q. |
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9176-2211 QUÉBEC INC., faisant affaires sous le nom de Voyage Vasco Évasion |
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Demanderesse |
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c. |
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VOYAGE VASCO INC., faisant affaires notamment sous le nom de Groupe Atrium |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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INTRODUCTION
[1] Au motif qu'il n'aurait pas respecté le contrat de franchise, le franchisé 9176-2211 Québec inc. (ci-après appelée Québec inc. ), faisant affaires sous le nom de Voyage Vasco Évasion (ci-après appelée Évasion ), poursuit le franchiseur Voyage Vasco inc. (ci-après appelée Vasco ), faisant affaires sous le nom de Groupe Atrium (ci-après appelée Atrium ). Puisque Évasion refusait d'être liée par le résultat du vote des franchisés, lesquels ont majoritairement décidé d'offrir à la clientèle un nouvel outil de marketing: les primes et carte de crédit HBC, Vasco soutient qu'elle était justifiée de retirer les privilèges de la bannière Vasco à Évasion pour la remplacer par une bannière Gama .
[2] Le présent litige tourne autour du respect du contrat de franchise (pièce P-3) et des dommages qu’ Évasion prétend avoir subi après avoir vu sa bannière Vasco être retirée et remplacée par une bannière Gama .
LES FAITS
[3] Vasco détient et administre un réseau de franchises d'agences de voyages (pièce P-2). Certains franchisés font affaires sous la bannière " Voyage Vasco " alors que d'autres relèvent de la bannière " Voyage Gama ". Les deux bannières ne bénéficient pas des mêmes avantages. Les agences Gama ont notamment moins de visibilité et de privilèges que les agences Vasco .
[4] Le 23 novembre 2006, Vasco et Québec inc. concluent une convention de franchise (ci-après appelée la « Convention ») en vertu de laquelle Québec inc. adhère au réseau de franchises oeuvrant sous la bannière « Voyage Vasco et l'univers de la croisière » (pièce P-3). Québec inc. verse alors 13 000 $ à Vasco afin d'acquérir le droit d'opérer une franchise (pièce P-3.1).
[5] Selon les termes de la Convention , celle-ci est en vigueur et lie les parties du 1 er février 2007 au 31 janvier 2011.
[6] En vertu de la Convention , Québec inc. a l'exclusivité sur le territoire suivant (pièce P-20):
- à l'Ouest: le boulevard Central;
- à l'Est: le boulevard Laurentien;
- au Nord: le boulevard Louix XIV;
- au Sud: le boulevard de la Capitale.
[7] Québec inc. elle, opère l'agence Évasion au 6655, boulevard Pierre-Bertrand à Québec.
[8] Le 17 juin 2009, Atrium transmet à tous les franchisés un avis de convocation à une assemblée générale extraordinaire prévue le 7 juillet 2009 au Golf du Boisé à Lachenaie. Une nouvelle importante sera diffusée à cette occasion. Cependant, l'avis de convocation est muet sur la nature de cette nouvelle (pièce P-4).
[9] Le même jour, le président et la vice-présidente d' Évasion écrivent au président d' Atrium (pièce P-5). Ils se montrent plutôt insatisfaits quant à leurs participations passées aux réunions des franchisés. Bien qu'ils se doutent que l'annonce concernera les cartes de points bonis HBC, ils demandent à voir l'ordre du jour de la réunion. Ils font également part de leur scepticisme par rapport à ce projet.
[10] Malgré qu'il n'y ait pas eu de suite au courriel P-5, Évasion assiste tout de même à la rencontre prévue le 7 juillet 2009.
[11] Atrium et la Compagnie de la Baie d'Hudson (ci-après appelée La Baie) annoncent qu'elles ont négocié une entente en vertu de laquelle de nouvelles agences Vasco seront ouvertes dans les magasins Zellers appartenant à La Baie (pièce P-17). Cette nouvelle entente commerciale permettra également aux agences Vasco d'offrir désormais des Points Prime HBC aux clients possédant la carte de points. De plus, les agences honoreront tous les Points Prime HBC cumulés sur les cartes des clients des magasins Zellers.
[12] Le lendemain, M. Proulx transmet un long courriel au président de Vasco , M. Lastère, (pièce D-4). Il critique sa façon de faire relativement à divers dossiers ainsi que les décisions prises dont celle annoncée la veille à Lachenaie.
[13] Malgré qu'il ait sollicité une réponse de la part de M. Lastère, il ne sera pas donné suite à ce courriel par le président de Vasco .
[14] Le 15 juillet 2009, un article concernant l'entente passée par Atrium avec les magasins Zellers est publiée dans le média spécialisé Expressvoyage.ca. Le tout fait suite à une conférence de presse tenue la veille.
[15] Ce même jour, M. Proulx appelle M. Lastère afin de lui exprimer son désaccord et sa remise en question de la décision d'imposer aux détenteurs de la bannière Vasco l'obligation d'adhérer au programme de points HBC. M. Lastère lui laisse comprendre qu'il n'a pas le choix. S'il refuse d'adhérer au programme, il lui est alors proposé de modifier sa bannière pour celle de Gama .
[16] Le 28 juillet 2009, les deux administrateurs d' Évasion écrivent à Atrium (pièce P-6). Plusieurs griefs sont formulés dans cette lettre, dont le programme de points HBC. M. Proulx et Mme Tiano réfèrent à la Convention pour faire valoir qu'on ne peut leur imposer ce programme.
[17] Les deux administrateurs d' Évasion reviennent sur la proposition qui leur a été faite de quitter le réseau avant la fin de la convention. Ils exigent le versement d'une somme forfaitaire de 70 000 $ pour ce faire.
[18] Le 10 août 2009, une journée de formation est organisée (pièce P-26). Est prévu à l'horaire le programme de fidélisation avec les magasins Zellers.
[19] Le 20 août 2009, les franchisés sont conviés à une rencontre devant se tenir deux jours plus tard à l'Hôtel Chéribourg afin d'y tenir un vote relatif à la question suivante: "Est-ce que toutes les agences du réseau Voyage Vasco devraient donner et accepter les Points Prime HBC?" (pièce P-18).
[20] Le 22 août, un vote est tenu. Parmi les 36 franchisés présents, seul deux votes défavorables sont comptés. Quant aux franchisés absents mais ayant pu être joints par téléphone, cinq des 16 franchisés ont répondu de manière défavorable à la question. Parmi eux, on compte Évasion (pièce D-1).
[21] Le lendemain, Mme Tiano écrit à Vasco ce qui suit: "En ce qui nous concerne, nous ne donnerons pas et n'accepterons pas les points HBC car on ne nous a jamais informé correctement sur le sujet en plus de prendre des décisions unilatérales" (pièce D-5).
[22] Par l'entremise de ses procureurs, le 12 novembre 2009, Évasion transmet à Vasco une lettre de mise en demeure où il est notamment demandé à M. Lastère de répondre aux questions posées par Évasion dans sa lettre du 28 juillet 2009 (pièce P-6) laquelle avait, jusqu'alors, été ignorée par celui-ci (pièce P-7).
[23] Le 30 novembre 2009, M. Lastère, président d' Atrium , répond à la lettre du 12 novembre des procureurs d' Évasion (pièce P-8). Monsieur Lastère affirme avoir répondu à toutes les questions de M. Proulx lors de leur conversation téléphonique du 15 juillet 2009. Malgré cela, il apporte des réponses aux différentes questions. Quant au programme de points HBC, M. Lastère invoque la clause 6.13 de la Convention . Il affirme que 98 % des participants ont voté favorablement afin d'adopter le programme. Par conséquent, tous les franchisés doivent mettre en oeuvre le programme. De plus, il confirme qu'à l'expiration de la Convention , celle-ci ne sera pas renouvelée.
[24] Le 9 décembre 2009, le procureur d' Évasion écrit de nouveau au président de Vasco . Il invoque l'insatisfaction de ses clients au regard des réponses données par M. Lastère aux questions posées et l'absence d'explications quant aux manquements à la Convention (pièce P-9).
[25] Étant déterminé à prendre action, Évasion invite néanmoins Vasco à une rencontre afin de solutionner le litige d'une autre façon (pièce P-9).
[26] Monsieur Lastère refuse de se présenter à la rencontre prévue le 15 décembre. Il délègue plutôt Mme Linda Saint-Laurent, laquelle tente de convaincre les actionnaires d' Évasion de transformer leur franchise Vasco en une franchise Gama .
[27] Le 21 décembre 2009, le président de Vasco , M. Lastère, écrit à M. Proulx et Mme Tiano pour leur imposer un choix (pièce P-10). Voici ce qui est proposé:
Suite aux échanges que nous avons eus, directement ou par l'entremise de vos procureurs, relatifs à différents sujets incluant les Points Prime HBC et attendu votre refus sans équivoque d'appliquer une politique devenue obligatoire suite à son adoption par la très grande majorité des membres, nous suggérons de régler une fois pour toutes nos litiges de la façon suivante:
Soit vous acceptez de transférer votre contrat Voyage Vasco en contrat Voyage Gama jusqu'au terme du contrat de franchise actuel, de cette façon vous ne serez plus tenu d'offrir les points prime HBC.
Soit vous acceptez la résiliation immédiate de votre contrat de franchise Vasco contre un remboursement de 4 333.33 $ des droits de franchises initialement déboursés.
À défaut de nous faire parvenir par écrit, d'ici le 4 janvier 2010, votre décision finale quant aux options que nous vous offrons, prenez note que nous prendrons pour acquis que vous décidez de faire transférer votre contrat Voyage Vasco en contrat Voyage Gama et nous agirons en conséquence .
Il est entendu que la présente offre de règlement est faite sans préjudice et sans admission aucune de la part du franchiseur, attendu qu'elle est faite dans le seul but de régler une situation litigieuse.
[Soulignements ajoutés]
[28] Le 4 janvier 2010, Patrice Oliveira du service de comptabilité d' Atrium , transmet un courriel à tous les franchisés afin de fournir de plus amples explications en ce qui concerne l'adhésion au système de Points Prime HBC (pièce P-27). Il confirme que l'adhésion est obligatoire pour les franchisés Vasco uniquement. Dans ce long courriel, M. Oliveira explique comment le système de comptabilité PC Voyages sera modifié. Il écrit: "Bien entendu, il y aura des coûts à défrayer et selon les options que vous choisirez, le coût variera. Vous aurez cependant un coût de base à défrayer dont voici les détails (…).".
[29] Le 19 janvier 2010, Vasco donne suite aux lettres P-8 et P-10. Elle transmet la mise en demeure suivante à Évasion (pièce P-11):
Pour faire suite à notre lettre du 30 novembre dernier, nous tenons à vous mentionner que n'ayant reçu aucun suivi, tant de votre part que de la part de vos avocats, dans le délai que vous nous aviez pourtant réclamé (semaine du 11 janvier 2010), vous devrez exécuter les étapes suivantes d'ici le 29 février 2010:
- Retirer de votre agence tout affichage de la bannière Voyage Vasco
- Retirer l'affiche routière mentionnant le nom Voyage Vasco
- Ne plus utiliser le nom de Voyage Vasco dans vos publicités
- Retirer tout enregistrement légal auprès des différents organismes (OPC, etc…)
À compter du 1 mars 2010, votre agence sera affiliée à la bannière Voyage Gama et ce jusqu'à la fin de son contrat
[30] Le 4 février 2010, Mme Tiano écrit à M. Lastère pour l'aviser que dorénavant les redevances versées en vertu de la Convention le seront sous protêt (pièce P-12).
[31] Le jour même, Vasco modifie l'accès Intranet d' Évasion (pièce P-13). L'accès d' Évasion est désormais limité à celui des franchisés Gama .
[32] Dans les jours qui suivent, Vasco désactive certains services offerts en exclusivité aux franchisés Vasco .
[33] Le 6 février, il n'est plus fait référence à Évasion dans la publicité régionale (pièce P-14).
[34] Le 10 février, la localisation d'agences Vasco ne contient plus les coordonnées d' Évasion (pièce P-15).
[35] Ce même jour, Évasion ne bénéficie plus du numéro 1-888-628-2726 destiné à rediriger automatiquement l'appel d'un client, et ce, sans frais pour ce dernier, à l'agence Voyage Vasco la plus près.
[36] Le 10 février a également lieu une rencontre au Club de golf Le Boisé. Sont présents 55 franchisés Vasco et 10 franchisés Gama . Divers sujets sont abordés dont l'association avec Zellers et le programme de points HBC. Diverses explications sont données par M. Gilles Larrivée de Zellers et M. Lastère. Des questions sont posées. M. Proulx intervient et fait valoir son point de vue. Il y a un échange avec M. Lastère et un nouveau vote est alors tenu. Selon le procès-verbal de la réunion (pièce D-2), 55 des 65 franchisés Vasco sont favorables au projet.
[37] Le 11 février, Évasion fait signifier à Vasco une lettre de mise en demeure (pièce P-16). Vasco est sommé de rétablir immédiatement tous les droits rattachés au statut de franchisé Vasco .
[38] Vasco ne donne pas suite à la lettre P-16.
[39] Ayant appris de tiers qu'un franchisé Vasco allait ouvrir ses portes au printemps aux Galeries de la Capitale, le 24 février, Mme Tiano et M. Proulx transmettent deux courriels à Atrium (pièce P-29). Selon M. Proulx, d'autres agences Vasco ont refusé l'entente avec HBC et n'ont pas perdu leur bannière pour autant. Il ajoute: "Nous supposons que vous aviez besoin de notre territoire pour vendre une franchise Zellers, c'est pour cette raison que nous avons été les seuls à devenir Gama sans notre accord?".
[40] Selon Vasco , il s'agit d'un franchisé Gama . Le contrat aurait été signé le 12 mai 2010 et l'ouverture des portes a eu lieu le 3 octobre 2010 (pièce P-21).
[41] Afin de contredire la version de Vasco , Évasion produit divers documents qui tendent à démontrer que le franchisé des Galeries de la Capitale fait affaire sous les deux bannières (pièces P-22, P-23 en liasse, P-24 en liasse).
[42] Pour sa part, Vasco produit une facture datée du 9 juin 2010 (pièce D-6A) qui démontre que l'enseigne de la bannière Gama a été confectionnée à cette époque. Une seconde facture datée du 17 avril 2011 démontre que la bannière a été modifiée et est devenue Vasco (pièce D-6B).
[43] Le 18 mars 2010, Atrium avise Évasion que ses ventes effectuées via le centre d'appels ont diminué (pièce P-30). Elles se situent sous la moyenne.
[44] Le 20 juillet 2010, Évasion introduit le présent recours en justice.
[45] Le 1 er octobre 2010, Atrium met en demeure Évasion et ses administrateurs de cesser de s'afficher publiquement sous la raison sociale Vasco . Ils doivent cesser d'utiliser le nom Vasco et rétrocéder tous les moyens d'identification Vasco . Ils doivent également modifier leur raison sociale (pièce P-19).
QUESTIONS EN LITIGE
[46] La première question qui se pose ici est de déterminer s'il y a eu ou non violation de la Convention ?
[47] S'il y a eu violation, il faudra alors aborder la question des dommages. Évasion a-t-elle subi un préjudice et si oui, quelle en est sa valeur?
ANALYSE
A) Prétention des parties
[48] Les deux parties ont soumis au Tribunal des plaidoiries écrites fort détaillées. Il serait fastidieux de reprendre en détail tous les arguments avancés par les procureurs des parties. Le Tribunal se limitera donc aux grandes lignes des prétentions des parties. Au besoin, le Tribunal pourra référer plus en détail aux prétentions des parties.
[49] Évasion reproche à Vasco/Atrium d'avoir adopté un comportement inacceptable allant à l'encontre de son obligation d'agir de bonne foi.
[50] Vasco/Atrium aurait contrevenu à la convention en forçant l'implantation des points HBC au sein du réseau Vasco . Évasion a été placée devant le fait accompli. Le vote invoqué par Vasco/Atrium était illégal.
[51] La Convention n'autorisait aucunement Atrium à imposer une bannière Gama à Évasion .
[52] Puisque la Convention n'a jamais été résiliée par Vasco avant son échéance, le franchiseur se devait de respecter les obligations contractuelles y prévues.
[53]
Quant aux dommages,
Évasion
rappelle les principes de l'article
[54] Finalement, Évasion demande au Tribunal d'octroyer un honoraire spécial de 2 000 $ conformément à l'article 15 du Tarif des honoraires judiciaires des avocats [1] . Évasion considère qu'il s'agit ici d'une cause importante et complexe.
[55] Passons maintenant aux prétentions du procureur de Vasco . Dans sa plaidoirie écrite, celui-ci revisite les faits et répond point par point aux prétentions d' Évasion .
[56] Pour Vasco , la décision d'accepter les points HBC a été prise par la majorité des franchisés. Le vote n'était pas illégal.
[57] Face au refus d' Évasion d'accepter les résultats du vote, Vasco a, de bonne foi, pris les mesures les moins dommageables pour Évasion .
[58] Relativement aux dommages, Vasco conteste le bien-fondé de ceux-ci. Les documents soumis par Évasion ne sont pas fiables selon elle.
B) Clauses importantes de la Convention
[59] Le Tribunal croit essentiel de reproduire ci-après certaines clauses de la Convention pouvant être utiles, voire même essentielles, à la solution du présent litige:
2.1 Pour la durée de la présente convention et tant et aussi longtemps que le FRANCHISÉ respecte toutes et chacune des clauses , conditions et stipulations contenues aux présentes, le FRANCHISEUR accorde au FRANCHISÉ l'exclusivité d'une franchise VOYAGE VASCO et L'UNIVERS DE LA CROISIÈRE sur le territoire délimité de la façon suivante: Voir document «1» en annexe.
2.2 Pour la durée de la présente convention, le FRANCHISEUR s'oblige et s'engage à ne pas opérer ou établir une autre agence de VOYAGE VASCO et L'UNIVERS DE LA CROISIÈRE et/ou ne pas accorder de nouveaux contrats de franchise pour l'opération d'une franchise VOYAGE VASCO et L'UNIVERS DE LA CROISIÈRE à l'intérieur du territoire exclusif accordé au FRANCHISÉ par cette convention.
(…)
3.1 Sauf résiliation suivant les termes et conditions énoncés ci-après, cette convention est valable pour une période de quatre (4) ans, commençant le 1 er février 2007 et se terminant le 31 janvier 2011, renouvelable par périodes quadriennales, sans autres frais d'adhésion;
3.2 Dans l'éventualité où une des parties ne désire plus renouveler cette entente, un avis de cessation devra être adressé par courrier recommandé ou par notification à l'autre partie au plus tard un (1) an avant la fin de cette convention ou de son renouvellement;
3.3 Advenant la résiliation de la présente convention pour quelque cause que ce soit , le FRANCHISÉ devra alors cesser, à ses frais et dans les trente (30) jour qui suivent, de faire usage de la bannière VOYAGE VASCO sur tout moyen d'identification de son entreprise et, le cas échéant, devra modifier sa dénomination ou sa raison sociale de façon à y retrancher les mots «VOYAGE VASCO» et/ou « L'UNIVERS DE LA CROISIÈRE » .
3.4 Advenant la résiliation de la présente convention pour quelque cause que ce soit , le FRANCHISÉ s'oblige, à ses frais, à rétrocéder, dans le même délai, toutes les enseignes et autres moyens d'identification, tous les supports publicitaires et autres choses qui sont la propriété du FRANCHISEUR ou sur lesquels ce dernier a des droits.
3.5 Le FRANCHISEUR aura le droit de résilier unilatéralement, sans avis et sans préjudice , la présente convention, les droits et la franchise consentie ici au FRANCHISÉ, dès l'arrivée de l'un des événements suivants:
(…)
D. Dans l'éventualité où le FRANCHISÉ ne se conforme pas aux exigences imposées par la présente convention et qu'il n'ait pas remédié à ce défaut trente (30) jours après qu'un avis écrit du défaut a été donné par le FRANCHISEUR au FRANCHISÉ;
(…)
4.1 Le FRANCHISÉ reconnaît devoir payer à la signature de la présente convention une somme de 13 000.00 $ + taxes au FRANCHISEUR à titre de droit de franchise, non remboursable .
(…)
4.6 Dans l'éventualité où cette convention est résiliée en cours de terme pour une des raisons prévues à cette convention, aucun remboursement de droit de franchise , de redevances ou de frais perçus par le FRANCHISEUR ne sera accordé;
(…)
5.8 Le FRANCHISEUR fera régulièrement des propositions publicitaires lors des réunions de franchisés:
Les publicités proposées sont de deux types:
- Celles nécessitant la participation de toutes les agences . Dans ce cas, la décision des membres présents à la réunion d'information sera appliquée, de facto , à tous les franchisés et chaque franchisé paiera immédiatement au FRANCHISEUR les sommes dues pour la réalisation de la dite publicité;
- Celles ne nécessitant pas la participation de toutes les agences . Dans ce cas, les franchisés concernés paieront immédiatement au FRANCHISEUR les sommes dues pour la réalisation de la dite publicité;
(…)
6.13 Le FRANCHISÉ a comme obligation d'assister aux réunions du FRANCHISEUR et des franchisés afin de participer au développement du réseau . Les décisions adoptées par les participants, à la majorité des présents , sont acceptées et mises en oeuvre par tous les franchisés ;
(…)
11.1 Advenant une transaction avec des tiers, aucune des deux parties aux présentes ne pourra lier l'autre partie;
(…)
12.2 Le FRANCHISÉ reconnaît avoir reçu copie de la convention de franchise avant sa signature, avoir eu toute l'opportunité pour en prendre connaissance, l'étudier et la soumettre à ses conseillers légaux et formuler au FRANCHISEUR ses commentaires et éléments de discussion . Le FRANCHISÉ reconnaît également avoir eu le loisir et l'opportunité de discuter librement avec le FRANCHISEUR du contenu et de la portée des dispositions de la présente convention préalablement à sa signature.
[Tous les soulignements ont été ajoutés.]
C) Y a-t-il eu violation de la Convention ?
[60] Comme nous y invite Évasion abordons tout d’abord la question à savoir si la Convention est un contrat d'adhésion ou non.
[61]
Le contrat d'adhésion est défini à l'article
1379. Le contrat est d'adhésion lorsque les stipulations essentielles qu'il comporte ont été imposées par l'une des parties ou rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instructions, et qu'elles ne pouvaient être librement discutées.
Tout contrat qui n'est pas d'adhésion est de gré à gré.
[62] Or, la clause 12.2 de la Convention va à l'encontre des prétentions d' Évasion .
[63]
Il ne s'agit pas en l'espèce d'un contrat d'adhésion. Il est donc
inutile de recourir aux règles d'interprétation des articles
[64] Deux dispositions de la Convention font appel à l'approbation des franchisés. Il s'agit des clauses 5.8 et 6.13.
[65] L'entente passée avec La Baie et Zellers pour l'ouverture de nouvelles franchises et l'adhésion des franchisés afin d'accepter dorénavant les points HBC constitue en quelque sorte un outil de promotion ou de marketing.
[66] Nous ne sommes pas face à une proposition publicitaire (clause 5.8). Il s'agit plus vraisemblablement d'une décision visant le développement du réseau (clause 6.13).
[67] Évasion remet en question la légalité du vote obtenu des franchisés par Atrium . Avec respect pour l'opinion contraire, le Tribunal considère qu'il n'est pas utile de trancher cette question puisqu'une autre clause de la Convention permet de solutionner le litige. Il s'agit de la clause 11.1.
[68]
En vertu de l'article
[69]
De plus, l'article
1432. Dans le doute, le contrat s'interprète en faveur de celui qui a contracté l'obligation et contre celui qui l'a stipulée. Dans tous les cas, il s'interprète en faveur de l'adhérent ou du consommateur.
[70] Ainsi, en cas de doute sur l'interprétation de la clause 6.13, le Tribunal doit retenir l'interprétation favorable à celui qui a contracté l'obligation, soit Évasion .
[71] Il est facile d'imaginer que Vasco/Atrium puissent développer un projet de développement du réseau sans nécessairement avoir recours à un tiers. Conformément à la clause 6.13, le franchiseur doit alors faire adopter son projet par la majorité des franchisés présents. Tous les franchisés sont alors liés.
[72] Cependant, si le projet de développement passe par une transaction avec un tiers, il ne peut être imposé aux franchisés qui ne veulent pas y adhérer.
[73] Le terme transaction n'est pas défini à la Convention . Le Tribunal doit donc référer à la définition du dictionnaire Larousse:
· Opération commerciale ou boursière
· Contrat par lequel les parties terminent une contestation ou en préviennent une autre, moyennant un prix ou des concessions réciproques;
· Accord entre le fisc et le contribuable en cas de fraude fiscale, qui empêche ou interrompt toute procédure contentieuse;
· En informatique, opération élémentaire de saisie ou de consultation d'une information.
[Soulignement ajouté]
[74] Il semble assez évident que la première définition doit être privilégiée en l'espèce.
[75] Vasco était pleinement justifiée de transiger avec La Baie et Zellers. Elle pouvait présenter à ses franchisés ladite entente, en faire la promotion auprès d'eux, mais elle ne pouvait l'imposer (clause 11.1).
[76] Évasion était totalement justifiée de s'opposer au projet de points HBC et Vasco avait tort de vouloir imposer ce projet à tous les franchisés.
[77] Compte tenu de la conclusion à laquelle en vient le Tribunal, à savoir que Vasco n'a pas respecté la Convention , il n'est pas pertinent de recourir à la théorie de l'abus de droit en l'espèce. Nous ne sommes pas dans le contexte où Vasco avait le droit d'agir comme elle l'a fait, mais a abusé de son droit. Ici, la situation est différente. Vasco n’avait pas le droit de procéder comme elle l’a fait.
[78] Aucune clause de la Convention n'autorisait Vasco à retirer ses droits de franchise à Évasion . Rien n'autorisait Vasco à imposer à Évasion d'être considérée dorénavant comme un franchisé Gama .
[79] Si Vasco croyait qu' Évasion était en défaut de respecter la Convention , elle n'avait qu'une seule option: la résiliation unilatérale (clause 3.5 D)).
[80] Vasco n'a pas osé opter pour la résiliation fort probablement parce qu'elle n'était pas certaine d'être dans son droit. Elle a opté pour une solution moins drastique, mais néanmoins illégale.
[81] Plutôt que d'imposer une "rétrogradation" à un franchisé récalcitrant, voir même problématique en raison de ses nombreuses critiques et autres manifestations d'insatisfaction, Vasco aurait plutôt dû attendre la fin du contrat de franchise puisqu'elle avait signifié en temps utile son intention de ne pas renouveler la Convention .
[82] Passons maintenant à la question des dommages.
D) Évasion a-t-elle subi un préjudice ?
[83] Tout d'abord, la perte de profits entre le 4 février 2010 et le 31 janvier 2011. Évasion soutient avoir perdu la somme de 39 936.33 $. Les pièces P-16 et 16.1.1 sont produites au soutien de cette réclamation. Elles se composent de tableaux compilant les ventes par agents, les profits par fournisseur, les états financiers de l'entreprise.
[84] Seul M. Proulx a témoigné au sujet des dommages subis. Lors du contre-interrogatoire, le témoin a été incapable d'expliquer comment le montant des ventes était établi; il a été incapable d'expliquer les écarts d'une année à l'autre. M. Proulx ne pouvait expliquer les chiffres avancés dans les pièces P-16 et P-16.1.1. Par conséquent, le Tribunal ne peut considérer lesdits documents comme étant fiables.
[85] Malheureusement, le Tribunal considère qu' Évasion n'a pas été en mesure de faire la preuve qu'elle a subi une réelle perte de profits.
[86] Cependant, puisque Vasco admet une perte de commissions brutes de 2 122 $ (pièce D-8), le Tribunal retiendra ce montant.
[87] Par ailleurs, Vasco réclame 3 250 $ représentant une fraction des droits de franchise de 13 000 $ car elle n'a pu bénéficier des services de Vasco en 2010.
[88] En vertu des clauses 4.1 et 4.6, les droits de franchise ne sont pas remboursables en cas de résiliation. Cependant, dans ce cas-ci, il n'y a pas eu résiliation de la Convention .
[89] Vasco a rétrogradé Évasion . Il l'a muté de force afin qu'elle soit considérée comme une bannière Gama environ un an avant la fin de la Convention .
[90] Selon la preuve, les droits de franchise d'une bannière Gama sont de 9 000 $.
[91] Même si Vasco n'avait pas le droit de retirer les privilèges de la franchise Vasco à Évasion , celle-ci a tout de même bénéficié de la bannière Gama durant un an.
[92] Évasion réclame le remboursement d'un quart des droits de franchise comme s'il y a avait eu résiliation complète, purement et simplement. Or, ce n'est pas ce qui s'est produit.
[93] Le Tribunal accordera à Évasion un quart de la différence entre les deux droits de franchise, soit un quart de 4 000 $: 1 000 $.
[94] Quant aux redevances mensuelles de 299 $ (pièce P-16.2) versées sous protêt, Évasion en demande le remboursement soit 3 588 $.
[95] En vertu de la Convention , les redevances mensuelles étaient de 460 $ (avant taxes). Vasco a réduit les redevances mensuelles en raison de la rétrogradation forcée d' Évasion . Or, celle-ci a bénéficié des avantages offerts aux autres franchisés Gama pendant près d'un an. Elle est donc mal fondée de réclamer le remboursement des redevances mensuelles dans les circonstances.
[96] Évasion réclame également le remboursement de divers déboursés:
- remplacement de la bannière............................................ 1 875 $
- nouvelle papeterie................................................................. 605 $
- nouvelles cartes d'affaires.................................................... 460 $
[97] Selon les factures P-16.3, P-16.4 et P-16.5, ces changements sont survenus après l'expiration de la Convention . Or, puisque Vasco a signifié en temps utile son intention de ne pas renouveler la Convention , ce sont des déboursés qu' Évasion aurait dû encourir de toute façon. Il n'y a aucun lien de causalité entre ces débours et la faute commise par Vasco .
[98] Il ne reste plus maintenant que la réclamation pour ristournes dues à Évasion , soit un montant estimé à 5 000 $. Cependant, aucune preuve n'a été présentée par Évasion pour soutenir cette réclamation. En outre, dans les notes et autorités du procureur d' Évasion , ce poste de dommages semble avoir été abandonné.
[99] En terminant, en raison de ce qui précède, il n'y a certes pas lieu d'accorder un honoraire spécial prévu à l'article 15 du Tarif .
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
ACCUEILLE en partie la demande.
CONDAMNE
Voyage Vasco inc. à payer à 9176-2211
Québec inc. la somme de 3 122 $ avec intérêts au taux légal ainsi que
l'indemnité additionnelle prévue à l'article
LE TOUT , avec dépens.
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__________________________________ CHRISTIAN M. TREMBLAY, j.c.Q. |
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Me Dave Robitaille |
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Fasken Martineau DuMoulin, S.E.N.C.R.L., s.r.l. |
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Procureurs de la demanderesse |
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Me Michael Pandev |
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Pandev Longpré |
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Procureurs de la défenderesse |
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Date d’audience : |
13 et 14 septembre 2012 |
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Pris en délibéré: |
à compter du 26 novembre 2012 |
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