Résidence Chaîné enr. c. Construction Guy Germain inc.

2013 QCCQ 8086

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

SAINT-MAURICE

LOCALITÉ DE

SHAWINIGAN

« Chambre civile »

N° :

410-32-004958-132

 

DATE :

1 er août 2013

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

 PIERRE LABBÉ, J.C.Q.

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RÉSIDENCE CHAÎNÉ ENR.,

Demanderesse

c.

CONSTRUCTION GUY GERMAIN INC.,

Défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            Stéphane Chaîné exploite une résidence pour personnes âgées sous le nom de Résidence Chaîné enr. Monsieur Chaîné détient une licence d'entrepreneur général de la Régie du bâtiment du Québec depuis le 29 mars 2012 (D-1).

[2]            Stéphane Chaîné réclame à la défenderesse 7 000 $ à titre de remboursement pour des travaux correctifs qu'il a dû faire à la suite de travaux exécutés par la défenderesse.

[3]            La défenderesse nie responsabilité, précisant qu'elle n'a pas été avisée avant que les travaux correctifs soient exécutés.

[4]            Le Tribunal retient de la preuve les faits pertinents suivants.

[5]            Stéphane Chaîné a fait appel aux services de la défenderesse pour des travaux d'agrandissement et de rénovation à la Résidence située à Grand-Mère. Le 22 avril 2010, les parties ont signé un contrat décrivant les travaux prévus au coût de 161 981,26 $ taxes incluses (P-2).

[6]            Selon Guy Germain, président de la défenderesse, ce contrat prévoyait des travaux que Stéphane Chaîné devait contracter lui-même. Ils étaient inclus afin de faciliter une demande de financement.

[7]            Stéphane Chaîné a effectivement obtenu un financement dont les déboursés étaient supervisés par M e Louise Gélinas, notaire, ce que cette dernière a confirmé à l'audience.

[8]            La dernière facture de la défenderesse, adressée à Résidence Chainé et datée du 25 août 2010 (P-4), mentionne des ajouts au contrat de la résidence pour 7 385 $, des crédits au propriétaire pour 15 674,22 $ et d'autres crédits pour 1 101,69 $, le tout totalisant 10 599,99 $. À cette facture sont annexés un détail des ajouts au contrat de même qu'un détail des crédits pour les travaux payés par Résidence Chaîné. Ces crédits couvrent les éléments suivants : la démolition, l'électricité, l'alarme, l'escalier, la plomberie, la chaise élévatrice, la ventilation, la main-d'œuvre pour la finition extérieure (85 heures), le couvre-plancher, les portes et fenêtres et le nettoyage à la fin des travaux.

[9]            Ces éléments généraient pour monsieur Chaîné un crédit 10 279,11 $ que la défenderesse lui a payé par un chèque du 25 août 2010 (D-4).

[10]         Guy Germain a d'ailleurs témoigné que les travaux ci-dessus mentionnés et certaines fournitures avaient été exclus du contrat parce que monsieur Chaîné avait décidé de s'occuper lui-même de ces travaux ou de faire affaire directement avec les fournisseurs.

[11]         Patrick Grégoire de Portes et fenêtres Nouvel horizon a affirmé qu'il n'avait pas fait affaire avec la défenderesse pour la fourniture des portes et fenêtres. Il a fourni et installé une partie des fenêtres. Il a fait affaire directement avec monsieur Chaîné.

[12]         Stéphane Chaîné soutient que la défenderesse a mal installé certaines portes. Elles ouvraient de l'intérieur au lieu d'ouvrir de l'extérieur. Il se base sur un avis de correction de la Régie du bâtiment du Québec du 15 mai 2012 (P-7) qui exigeait certaines corrections aux portes.

[13]         Stéphane Chaîné a affirmé qu'il avait appelé Guy Germain à ce sujet, ce que ce dernier a nié. Guy Germain a admis avoir reçu un appel de Stéphane Chaîné en novembre 2012, et ce, pour la première fois. Ce dernier situe cet appel au 21 novembre 2012.

[14]         Stéphane Chaîné a fait parvenir à la défenderesse une mise en demeure par son avocat le 10 janvier 2013 pour l'ensemble de sa réclamation (P-9).

[15]         Stéphane Chaîné a changé les portes qui n'étaient pas conformes au coût total de 5 912,30 $ selon la facture de Portes et Fenêtres Nouvel horizon du 8 août 2012 (P-8).

[16]         Il a aussi changé une porte coupe-fumée pour le haut de l'escalier. Il l'a achetée de Les Portes Arco inc. de Trois-Rivières le 7 septembre 2012 au coût de 413 $.

[17]         Guy Germain a affirmé que les trois portes de Nouvel Horizon ont été bien installées par lui et ses employés. Elles ont été fabriquées pour ouvrir de l'intérieur. Il a dit à Stéphane Chaîné avant l'installation qu'elles n'étaient pas conformes, mais ce dernier lui a dit de les installer quand même.

[18]         Quant à la porte coupe-fumée, Guy Germain a affirmé que ce travail a été fait par Stéphane Chaîné lui-même. Il a précisé que la défenderesse ne faisait pas la gestion des travaux exécutés par Stéphane Chaîné ni la gestion de ses sous-traitants.

[19]         Stéphane Chaîné soutient aussi que la défenderesse est responsable des corrections que la Régie du bâtiment du Québec a requises au panneau-incendie. Il a fait exécuter les travaux correctifs requis par Alarmes Mauricienne. Il a produit à ce sujet trois factures :

§   une facture du 21 décembre 2010 de 2 186,44 $

§   une facture du 29 mai 2012 de 1 639,54 $

§   une facture du 16 août 2012 de 239,15 $.

[20]         Stéphane Chaîné a admis qu'il n'avait pas avisé la défenderesse avant de faire exécuter ces travaux. Il s'est dit qu'il « gobera la pilule » .

[21]         Il réclame maintenant ces factures.

[22]         Guy Germain a affirmé qu'il n'avait pas travaillé sur le panneau-incendie.

[23]         Enfin, Stéphane Chaîné a fait état de problèmes à un escalier de bois franc, mais il n'a pas été en mesure de produire de facture ou autre pièce justificative.

[24]         Stéphane Chaîné réclame 431,16 $ qu'il a payé à la firme d'architecte Locus 3 pour modifier les plans d'évacuation. La facture de Locus 3 est du 31 juillet 2012. L'architecte Richard Beauchamp a confirmé que ces travaux ont été demandés à sa firme par monsieur Chaîné et qu'il n'a jamais fait affaire avec la défenderesse.

[25]         Stéphane Chaîné a admis qu'il n'avait pas avisé la défenderesse avant de faire exécuter ces plans.

[26]         Stéphane Chaîné réclame 2 465,80 $ pour le déplacement d'un escalier. Il a produit une facture de Rampes et Balcons de la Mauricie du 29 novembre 2012. Il a admis qu'il n'avait pas avisé la défenderesse avant de faire exécuter ces travaux.

[27]         Le représentant de ce fournisseur, Philippe Côté, a confirmé qu'il avait fait affaire directement avec Stéphane Chaîné qui a payé les factures. Il n'a jamais eu affaire à la défenderesse.

ANALYSE

[28]         La relation juridique entre les parties relève du contrat d'entreprise défini ainsi à l'article 2098 du Code civil du Québec  :

2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.

[29]         En vertu de l'article 2100 C.c.Q., la défenderesse avait une obligation de résultat :

2100. L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.

[30]         L'article 1590 C.c.Q. exige que le débiteur soit mis en demeure par le créancier avant qu'il puisse exercer les recours qui y sont prévus :

1590. L'obligation confère au créancier le droit d'exiger qu'elle soit exécutée entièrement, correctement et sans retard.

Lorsque le débiteur, sans justification, n'exécute pas son obligation et qu'il est en demeure , le créancier peut, sans préjudice de son droit à l'exécution par équivalent de tout ou partie de l'obligation:

 1° Forcer l'exécution en nature de l'obligation;

 2° Obtenir, si l'obligation est contractuelle, la résolution ou la résiliation du contrat ou la réduction de sa propre obligation corrélative;

 3° Prendre tout autre moyen que la loi prévoit pour la mise en oeuvre de son droit à l'exécution de l'obligation.

[Soulignement ajouté]

[31]         La preuve prépondérante révèle que Stéphane Chaîné n'a pas mis la défenderesse en demeure avant d'exécuter ou de faire exécuter les travaux correctifs. Cette omission est fatale. Cette exigence de la loi a pour but de permettre au débiteur de pouvoir faire ses propres constatations et éventuellement, de faire les corrections nécessaires lui-même.

[32]         Au surplus, la preuve prépondérante révèle que les travaux ou les fournitures pour lesquelles Stéphane Chaîné réclame ne relevaient pas de la responsabilité de la défenderesse. La preuve révèle également que la défenderesse n'a fait aucune gestion des travaux exécutés par Stéphane Chaîné lui-même, des sous-traitants ou des fournisseurs avec lesquels il a fait affaire.

[33]         La réclamation est donc mal fondée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL  :

[34]         REJETTE la demande;

[35]         CONDAMNE la partie demanderesse à payer à la défenderesse les frais de contestation de 204 $.

 

 

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PIERRE LABBÉ, J.C.Q.

 

 

 

Date d’audience :

11 juillet 2013