Morin c. Garza |
2013 QCCQ 11760 |
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COUR DU QUÉBEC |
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Division des petites créances |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
Montréal |
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« Chambre civile » |
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N : |
500-32-127429-118 |
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DATE : |
9 octobre 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JEAN-F. KEABLE, J.C.Q.
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AURÈLE MORIN […]St-Léonard (QC) […]
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Partie demanderesse |
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c.
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ABRAHAM J. GARZA […] Montréal (QC) […]
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Partie défenderesse
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JUGEMENT
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La demande et la contestation
[1] Aurèle Morin poursuit le conseiller en immigration Abraham J. Garza pour lui réclamer 7 000 $ comprenant le remboursement des honoraires et déboursés encourus (2 050 $), des frais de voyage (1 335 $) et des dommages matériels (3 615 $) pour avoir « aggravé le cas et nui à la cause » [1] .
[2] M. Garza soutient avoir agi correctement compte tenu des informations données par le client.
La décision du 10 décembre 2007
[3] En décembre 2007, M. Morin reçoit la décision de la section d'appel de l'Immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié . L'importance de cette décision pour la compréhension du litige justifie qu'elle soit reproduite en entier :
Motifs de décision
[1] Aurèle MORIN («
l’appelant ») en appelle du refus de la demande de résidence permanente de son
épouse Yu HAN (« la requérante »), en vertu de l’article
[2] La demande de résidence de la requérante a été refusée le 30 avril 2007 , parce que la Première secrétaire (Noëlla Nincevic), du Bureau de l’immigration de l’Ambassade du Canada à Beijing, a conclu que le mariage de l’appelant et de la requérante n’était pas authentique , et qu’il visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège aux termes de la Loi .
[3] L’appelant n’était pas représenté lors de l’audience parce qu’il croyait pouvoir se représenter seul, et il a déclaré qu’il n’avait pas besoin d’un avocat pour dire la vérité.
[4] L’appelant, la soeur de la requérante, madame Hong Han, et un ami de l’appelant, Rashid Amdi, ont témoigné. Une nombreuse preuve documentaire a également été déposée (pièces A-1 à A-16).
Antécédents
[5] L’appelant est un citoyen canadien âgé de 78 ans. Enseignant de profession, il est retraité et au moment de l’audience, vivait seul. Il s’est divorcé à deux reprises et, de son premier mariage, a eu un fils.
[6] L’appelant a témoigné avoir une amie canadienne d’origine chinoise Hong Han qu’il rencontrait régulièrement à l’aréna de son quartier et chez qui il allait à l’occasion faire des réparations. L’appelant a expliqué que madame Hong Han, une dame mariée ayant deux enfants, était une personne qu’il respectait beaucoup, qui élevait bien ses enfants. Il lui aurait confié qu’il cherchait une dame dans la quarantaine qui pourrait travailler chez lui, afin de prendre soin de lui et de sa maison, qu’il prenait de l’âge et prévoyait éventuellement qu’il ne pourrait plus être aussi indépendant physiquement. Il lui aurait également mentionné qu’il avait fait des recherches par des annonces dans les journaux, mais n’était pas arrivé à trouver personne .
[7] L’appelant a spécifié que madame Hong Han lui aurait proposé de faire venir sa soeur, la requérante, comme aide-soignante (living care-taker) de Chine; celle-ci étant âgée de 41 ans . L’appelant a expliqué qu’ayant très confiance en madame Hong Han, il a trouvé la suggestion très bonne, et a fait la démarche d’immigration nécessaire avec offre d’emploi qui fut refusée parce que Yu Han ne parlait pas français. L’appelant, devant cet état de fait, a alors proposé de faire venir Yu Han comme visiteur, il a à nouveau refait la démarche d’immigration nécessaire avec une lettre d’invitation où il s’engageait à accueillir Yu Han chez lui . Cette demande fut également refusée, en raison du fait que les autorités d’immigration ne croyaient pas que madame Yu Han retournerait en Chine, une fois sa visite terminée. L’appelant s’est dit très choqué de ces réponses et a déclaré qu’il ne pouvait pas accepter de telles réponses de la part des autorités canadiennes, parce que cela ne respectait pas ses droits et ceux de madame Yu Han.
[8] Pour contrer cette situation, l’appelant, après avoir consulté, via internet, un circulaire d’immigration, a expliqué avoir alors fait le projet d’épouser Yu Han parce que, selon lui, une fois mariée à Yu Han, les autorités d’immigration ne pourraient pas la refuser puisqu’il aurait alors marié la requérante « pour fins d’immigration », tel qu’il est précisé dans la loi canadienne .
[9] Il s’est dit totalement en désaccord avec les questions posées par la Première secrétaire lors de l’entrevue à Beijing, selon lui, ce mariage « pour fins d’immigration » n’était pas un « mariage de relations », toutes les questions sur les circonstances de ce mariage n’étaient pas appropriées et ne respectaient pas ses droits et ceux de la requérante, soit de pouvoir venir au Canada.
[10] La requérante est une citoyenne chinoise âgée de 41 ans. Deux fois divorcée [2] , elle est mère d’un fils adulte dont elle n’avait pas la garde. Elle travaille comme gérante dans un magasin de vêtements. Elle a rapporté dans son formulaire [3] avoir travaillé comme infirmière pendant deux ans, bien qu’elle n’ait fait aucune étude dans ce domaine. Il s’agit de son troisième mariage.
Analyse
[11] Pour que l’appel
soit accueilli, l’appelant doit établir, selon la prépondérance de la preuve,
que la requérante n’est pas visée par l’article
« 4. Pour l'application du présent Règlement, l'étranger n'est pas considéré comme étant l'époux, le conjoint de fait, le partenaire conjugal ou l'enfant adoptif d'une personne si le mariage, la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux ou l'adoption n'est pas authentique et vise principalement l'acquisition d'un statut ou d'un privilège aux termes de la Loi. »
[12] Au début de l’audience, le représentant du Ministre n’a pas contesté la légalité du mariage [4] . Le tribunal n’examinera donc pas cet aspect.
[13] L’appelant a témoigné avec sincérité, mais il est devenu très vite évident que celui-ci ne comprenait pas le bien-fondé des différents articles portant, entre autres, sur le parrainage et les objectifs de la Loi . De son propre aveu, il a déclaré avoir marié madame Yu Han « pour fins d’immigration » , et était très irrité lorsque le représentant du Ministre l’a questionné sur l’authenticité de son mariage avec la requérante, réitérant qu’il n’avait pas pu développer une telle relation puisque les autorités canadiennes avaient refusé ses deux premières démarches d’immigration.
[14] Sur ce point, le tribunal note que lors des premières discussions avec la soeur de la requérante, il n’avait pas été question de mariage entre lui et sa soeur, mais plutôt d’un échange de services. Le tribunal a donc des difficultés à croire que ce mariage ait été le fruit d’une relation sincère entre deux personnes qui désirent unir leur vie. Le tribunal conclut que ce mariage a plutôt été une solution de rechange, suite aux échecs des autres démarches d’immigration et que ce mariage avait pour seul but d’immigrer au Canada et permettre à la requérante de venir rejoindre sa soeur .
[15] Le tribunal conclut que l’appelant n’a pas pu démontrer, selon la prépondérance de la preuve, que son mariage avec la requérante était authentique pour les raisons suivantes.
[16] Afin d’évaluer le caractère authentique d’une relation maritale, un grand nombre de facteurs peuvent être pris en considération, entre autres, l’origine ethnique, culturelle, sociale et religieuse de l’appelant(e) et de la requérant(e) et les conventions s’y rapportant s’il y a lieu, la rencontre des époux et l’évolution de leur relation, la durée de leurs fréquentations avant le mariage, leurs fiançailles et leur cérémonie de mariage, les contacts des époux entre eux avant et après leur mariage, leurs communications avant et après leur mariage, leur comportement après leur mariage, le niveau de connaissance mutuelle des antécédents des époux, la connaissance des familles sur les relations des époux, la connaissance des époux sur leur famille respective, la connaissance de leur vie quotidienne et leurs plans pour le futur.
[17] En plus de l’aveu de l’appelant que son mariage a été célébré pour des fins d’immigration, le tribunal a noté qu’il n’y avait pas eu de période significative de temps pour qu’ils apprennent à se connaître, l’appelant a pris la décision de se marier, avant même d’avoir rencontré la requérante. Il n’y a pas eu de fiançailles, aucun membre des familles n’a participé à la cérémonie de mariage. L’appelant a déclaré avoir cohabité, en Chine, avec la requérante pour une période de trois semaines durant laquelle ils ont enregistré le mariage et effectué une demande de visa pour résidence permanente pour la requérante .
[18] L’appelant a déclaré que son premier contact avec la requérante a eu lieu un mois avant qu’il n’arrive en Chine le 27 octobre 2006, qu’il a fait sa demande en mariage à cette date également par téléphone. Ils se sont mariés le 6 novembre 2006. Questionné sur le moment où cette relation était devenue romantique, l’appelant a d’abord déclaré «qu’il marchait par la logique», qu’à son arrivée en Chine, il a trouvé la requérante charmante et, selon lui, elle possédait de bonnes qualités telles l’intelligence, l’ordre, la propreté, la simplicité et la vaillance .
[19] Questionné s’il avait rencontré les parents de la requérante, l’appelant a déclaré « qu’il n’avait pas d’affaire à rencontrer ses parents, parce que ce n’était pas un mariage de relations ». Questionné s’il avait rencontré le fils de la requérante, l’appelant a répondu qu’il vivait à 300 km, qu’il ne s’agissait pas d’un mariage de relations et n’avait donc pas à le rencontrer. Questionné s’ils avaient fait une cérémonie de mariage, l’appelant a spécifié qu’il avait prévu faire cela lors de son arrivée au Canada, alors qu’en Chine il n’en voyait pas l’utilité puisqu’il ne connaît pas les Chinois.
[20] Suite à son retour de Chine, l’appelant a déclaré communiquer avec son épouse deux fois par jour par téléphone et il lui envoie de l’argent. Il a également déclaré qu’il aimait cette femme. L’appelante lui a envoyé des lettres écrites en chinois qui ont été traduites soit par sa soeur ou son frère, professeur d’anglais en Chine.
[21] Le tribunal convient que malgré toutes ses réponses où celui-ci a clairement fait état de l’objectif de ce parrainage, soit de permettre à la requérante d’abord et avant tout de venir au Canada, qu’il ait pu développer un certain attachement à la requérante ultérieurement à la demande de parrainage, mais, compte tenu du grand nombre d’incompatibilités entre l’appelant et la requérante, soit leur âge, leur culture, leur expérience de vie, de même que la langue puisque ceux-ci ne parlent pas très bien l’anglais, langue dans laquelle ils communiquent. L’appelant ne parle pas le chinois et très peu l’anglais et la requérante ne parle pas le français et très peu l’anglais. Le tribunal conclut que l’appelant n’a pas démontré, selon la prépondérance de la preuve, qu’il s’agit d’un mariage authentique et la requérante n’a pas démontré avoir un intérêt dans cette union autre que la possibilité de venir rejoindre sa soeur .
[22] Suite à l’audience,
le tribunal a pris note de plusieurs lettres envoyées par l’appelant dans
lesquelles il conteste toujours l’évaluation de sa situation. Malheureusement
pour l’appelant, le contenu de ses lettres ne fait que confirmer que celui-ci
ne comprend pas la portée et les objectifs de la
Loi
, en particulier
l’article
Conclusion
[23] La décision de l’agent des visas est bien fondée en droit. L’appelant n’a pas établi, selon la prépondérance de la preuve, que son mariage avec la requérante est authentique ou qu’il ne vise pas principalement à faire acquérir au requérant un statut ou un privilège aux termes du Règlement .
[24] L’appel est rejeté. […] [5]
(nos soulignés)
La rencontre du 15 janvier 2008
[4] Le 15 janvier 2008, M. Morin rencontre M. Garza, un conseiller d'expérience en immigration. À la suggestion de ce dernier, il accepte de signer un contrat pour le mandater afin d'entreprendre toutes les procédures nécessaires « to process my case of Sponsorship application for Spouse in China » [6] .
[5] Dans le cadre de ce mandat, le conseiller peut représenter son client devant les autorités provinciales, fédérales et internationales. Les honoraires sont de 2 500 $, plus déboursés connexes. M. Morin verse un acompte de 1 250 $ et acquitte subséquemment des déboursés de 550 $ auprès des autorités fédérales [7] , le 8 février 2008, et de 250 $ auprès des autorités provinciales, le 18 avril 2008 [8] .
[6] Le conseiller suggère à M. Morin de préparer une lettre relatant son « histoire d'amour » pour appuyer une nouvelle demande destinée à être éventuellement acheminée aux autorités de l'immigration. Un peu plus tard, il transmet aux autorités de l'immigration la lettre du 23 janvier 2008 («notre histoire d'amour» [9] ) ainsi que le formulaire prescrit, apparemment signé par Mme Yu Han, le 15 janvier 2008 [10] .
[7] Le 30 juin 2008, l'agent des visas conclut au rejet de la demande puisqu'elle n'apporte pas de faits nouveaux par rapport à la situation antérieure. En bref, il s'estime lié par la décision du 10 décembre 2007 :
« I am not satisfied that your relationship with Aurèle Morin is genuine. After a thorough review of the documents that you submitted in support of your application, your previous immigration application, and the review of the dismissed decision rendered by the Immigration Appeal Division (IAD) on December 10, 2007, I believe this marriage was entered into primarily for the purpose of acquiring status or privilege under the Act. » [11]
Analyse
[8]
Le
conseiller en immigration M. Garza propose un contrat de service. Même si son
obligation en est une de moyens et non de résultats, il doit fournir à son
client toute l'information utile et agir avec prudence et diligence, selon les
articles
2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.
1991, c. 64, a. 2098.
2100. L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.
Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.
1991, c. 64, a. 2100.
2102. L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute information utile relativement à la nature de la tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi qu'aux biens et au temps nécessaires à cette fin. [12]
1991, c. 64, a. 2102.
[9] M. Morin reproche aujourd'hui à M. Garza de ne pas lui avoir suggéré une requête en révision judiciaire en Cour fédérale, mais plutôt de lui avoir conseillé de soumettre une nouvelle demande avec des faits nouveaux.
[10] Compte tenu des circonstances de la consultation, il est plus que probable que M. Morin ait remis au conseiller une copie de la décision du 10 décembre 2007, comme il le prétend. Par ailleurs, le conseiller n'est pas en mesure de nier cette affirmation puisqu'il indique ne pas avoir souvenir que son client lui avait parlé précisément de la décision du 10 décembre 2007, mais il reconnaît avoir appris qu'une décision défavorable avait été rendue en décembre 2007. La destruction de son dossier de l'époque l'empêche d'être plus précis.
[11] Le Tribunal conclut que le conseiller devait nécessairement examiner la décision dont lui parlait son client avant de lui fournir des conseils. Comme son travail se limite à dactylographier en 2008 le formulaire déjà rempli par Mme Yu Han, le 18 novembre 2006 [13] , les honoraires perçus sont très exagérés.
[12] En outre, le conseiller a mal avisé son client en lui recommandant de rédiger son « histoire d'amour » pour appuyer une nouvelle demande, manifestement vouée à l'échec. Les premiers paragraphes de cette lettre, du 23 janvier 2008, ne font que reprendre des faits déjà considérés antérieurement par les autorités pour les amener à juger le mariage de 2006 non authentique :
Notre histoire d'amour
J'ai rencontré Hong Han et ses deux filles jumelles sur la patinoire de l'aréna à St-Léonard. Elles arrivaient d'Australie. La mère avait pris là un doctorat en Biologie, elle travaillait à l'institut de Cardiologie de Montréal et ses deux filles jumelles fréquentaient l'école primaire où elles suivaient des cours en immersion française. J'ai développé une grande attirance par cette femme et ses deux filles attachantes, sportives et toujours de bonne humeur.
Je patine encore très bien malgré mon âge. J'en surprends plusieurs. J'ai vite remarqué sur la patinoire cette femme chinoise et ses deux filles qui débutaient en patins. Je les ai accostées poliment par curiosité et nous avons fait connaissance. Étant débutantes, elles aimaient patiner avec moi. Ça les rassurait et elles progressaient beaucoup plus rapidement avec mon aide. Je patinais un moment avec les deux filles à la fois et je continuais avec la mère. Nous recommencions tous les dimanches. C'est ainsi que notre amitié a commencé, notre amour n'a fait qu'augmenter jusqu'à devenir ma belle-sœur. J'aime cette famille ordonnée pour leur caractère de douceur, de vaillance et aux nombreux talents. L'amour et l'honnêteté sont sincères chez elles. C'est la paix quand nous sommes ensemble.
Hong Han a offert ses services à l'Université Mc Gill pour un meilleur salaire. Elle a trouvé moyen de faire suivre des cours privés en peinture et en musique à ses deux filles malgré son travail et les voyageait toutes les semaines à un professeur spécial dans le domaine. Leurs cours spéciaux n'empêchaient pas ses filles de maintenir moyenne de bulletin scolaire dans les premières de classe. Elles ont des talents enviables et destinées à un brillant avenir.
Elle restait à loyer quand je l'ai connue. Peu après, elle achète un cinq logements. Elle engage un homme pour faire des réparations dans son logement parce qu'elle aime le beau et le propre. Elle a tombé sur un ouvrier malhonnête qui se faisait payer les matériaux et le travail à l'avance mais qui installait les produits sans précaution. Elle ne peut pas travailler et surveiller l'ouvrage en même temps, il a fait du gâchis et elle n'a jamais récupéré ses pertes parce que c'était un escroc., J'ai tout réparé gratuitement les dégâts causés par cet escroc par amitié pour elle et ses deux filles. Elle a découvert mes talents d'habileté, de générosité et d'homme responsable. Elle est demeurée reconnaissante à mon égard et son amitié et son estime ont encore augmenté.
Un jour, en parlant avec elle, Je lui dis que je cherchais une femme pour demeurer avec moi à la maison. J'ai veux une personne avec laquelle je me sens bien et qui se plairait avec moi et qui serait toujours en mesure de m'aider. Je souhaite qu'elle soit dans la quarantaine pour éviter d'être deux personnes âgées à vivre ensemble plus tard. J'ai été bien surpris mais content d'apprendre que sa sœur en Chine vivait aussi la solitude et serait heureuse de venir. Et de fait, les informations de sa sœur lui ont plu et elle a voulu immédiatement venir vivre chez moi. Aussitôt, Hong s'est mise en frais de nous aider dans nos démarches pour que sa sœur Yu vienne vivre avec moi à Montréal.
[…]
(texte reproduit intégralement)
(nos soulignés)
[13] En somme, par son erreur, sa négligence ou son incompétence, le conseiller a donné de vains espoirs à un client; il doit donc lui rembourser les honoraires perçus de 1 250 $ ainsi que le paiement des déboursés effectués auprès des autorités gouvernementales, soit 850 $.
[14] La réclamation du remboursement d'un voyage en Chine, en février-mars 2008, pour 1 335 $ est rejetée. Il est évident que M. Morin a tiré des avantages personnels importants de ce séjour (réceptions, visites touristiques, repas, et diverses attentions de nature plus personnelle).
[15] Contrairement aux affirmations de M. Morin, le Tribunal ne croit pas que la nouvelle demande de 2008 ait aggravé son « cas ». Ce dernier a d'ailleurs choisi lui-même de poursuivre sans succès ses démarches administratives et judiciaires. L'examen de la décision de la section d'appel de l'Immigration de la Commission de l'Immigration et du statut de réfugié du 8 janvier 2009, et le jugement de la Cour fédérale du 24 août 2011 ne démontrent pas que les mauvais conseils de M. Garza aient eu une influence pour l'analyse de la suite des demandes de M. Morin, toutes rejetées sur la base des faits connus le 10 décembre 2007 :
Décision de la section d'appel de l'Immigration de la Commission de l'Immigration et du statut de réfugié du 8 janvier 2009 concernant la demande d'autorisation du 7 avril 2008, transmise par M. Garza:
Motifs de décision
[1]
L’appelant
Aurèle MORIN, en appelle du refus de la demande parrainée d’établissement
[14]
en date du 7 avril 2008 de
son épouse
, Yu HAN (la demandeure).
L’agent des
visas a déterminé, le 30 juin 2008
[15]
, qu’au titre de l’article
[2]
L’article
« 4. Pour l'application du présent Règlement, l'étranger n'est pas considéré comme étant l'époux, le conjoint de fait, le partenaire conjugal ou l'enfant adoptif d'une personne si le mariage, la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux ou l'adoption n'est pas authentique et vise principalement l'acquisition d'un statut ou d'un privilège aux termes de la Loi. »
[3] La demandeure s’était auparavant vue refuser un visa d’immigrant à trois reprises, soit suite à une première démarche d’immigration effectuée par l’appelant en vue de la faire venir comme aidesoignante ( live-in caregiver ), cette demande fut refusée car la demandeure ne rencontrait pas les critères nécessaires pour se qualifier ne parlant pas français; suite à une deuxième démarche effectuée par l’appelant afin que celle-ci puisse venir en tant que visiteur, cette demande fut refusée parce que l’agent des visas ne croyait pas que celle-ci retournerait en Chine une fois sa visite terminée; et troisièmement en tant que l’épouse de l’appelant, cette fois l’agent de visa ne croyait pas que ce mariage était authentique, mais qu’il s’agissait plutôt d’un mariage de convenance ayant été célébré dans le but que celle-ci puisse venir rejoindre sa soeur vivant au Canada. Le 10 décembre 2007, la Section d’appel de l’immigration (SAI) a rejeté l’appel que l’appelant a interjeté contre cette décision. La Commissaire a tiré des conclusions défavorables contre l’appelant et la demandeure relativement au fait qu’il ne s’agissait pas d’un mariage authentique et qu’il s’agissait plutôt d’un mariage qui a été célébré dans le but d’accorder un statut au Canada à la demandeure afin de lui permettre de venir rejoindre sa soeur .
[…]
[18] Le caractère final du processus décisionnel est au coeur de ce principe, lequel empêche la réitération des litiges, processus qui exerce nécessairement une ponction sur les ressources, et préserve également la cohérence des décisions en évitant les situations où une conclusion découlant d’un appel réitéré pourrait miner le fondement d’une décision antérieure.
[19] Dans ce deuxième appel, le tribunal conclut que la question soulevée par l’appelant, soit l’authenticité de son mariage, a déjà été évaluée lors d’un premier appel, que la décision du 10 décembre 2007 est finale puisque l’appelant n’a pas demandé de révision judiciaire auprès de la Cour fédérale et, troisièmement, les parties de cette décision sont les mêmes que les parties engagées dans ce deuxième appel .
[…]
[22] Dans un premier temps, le tribunal se doit de préciser que l’appelant fait montre d’une incompréhension qu’il qualifierait de presque complète du domaine du droit de l’immigration. Toute la correspondance envoyée depuis le rejet de son premier appel ne contient que des déclarations fondées sur une analyse erronée des instruments et principes juridiques en vigueur touchant les demandes de parrainage d’une épouse.
[…]
[25] Le tribunal aimerait rappeler que la « Loi » applicable n’est choisie ni par les appelants ou les agents des visas. Le seul choix est la Loi présentement en vigueur ci-haut citée qui est une loi votée par le Parlement et le Règlement et les Règles de la Section d’appel de l’immigration ( Règles ) ainsi que la jurisprudence s’y rapportant qui sont utilisés pour évaluer une demande, entre autres, de parrainage.
[26] Le tribunal conclut que les arguments de l’appelant sur ce point ne peuvent donc constituer de nouvelle preuve décisive.
[…]
[29] Un
mariage qui n’est pas authentique et qui a été célébré dans le seul but de
procurer à un étranger un statut au Canada n’est pas acceptable selon l’article
[30] L’appelant a le fardeau de la preuve de démontrer que sa relation avec la demandeure est de bonne foi et repose sur un certain nombre de facteurs tels les conventions se rapportant au mariage selon l’origine ethnique, culturelle, sociale et religieuse de l’appelant(e) et du demandeur(e), la rencontre des époux et l’évolution de leur relation, la durée de leurs fréquentations avant le mariage, leurs fiançailles et leur cérémonie de mariage, les contacts des époux entre eux avant et après leur mariage, leurs communications avant et après leur mariage, leur comportement après leur mariage, le niveau de connaissance mutuelle des antécédents des époux, la connaissance des familles sur les relations des époux, la connaissance des époux sur leur famille respective, la connaissance de leur vie quotidienne et leurs plans pour le futur .
[31] Le tribunal note que dans une de ses lettres reçues à la CISR le 7 novembre 2008, l’appelant réitère que ce mariage est un échange de services [18] entre lui et la demandeure .
[…]
[33] Le tribunal ne peut pas accepter ces déclarations qui sont contradictoires par rapport à ce qu’il a déclaré lors du premier appel et est d’avis que cela soulève des doutes sur la crédibilité de l’appelant .
[…]
[35] Le tribunal note que l’appelant après avoir dit que son mariage n’était pas un mariage de « relations », maintenant tente de faire croire que son mariage en est devenu un, que lui et la demandeure sont en amour et que les nouvelles preuves ci-haut énumérées en sont la démonstration mais le tribunal conclut que les nouvelles preuves soumises, après le 10 décembre 2007, ne peuvent constituer de nouvelles preuves décisives en ce qu’elles n’ajoutent rien qui puisse permettre au tribunal de conclure à l’authenticité de ce mariage. Ce mariage demeure toujours une solution de rechange, il a été célébré en toute vitesse sans que les époux ne se connaissent et le tribunal ne croit pas que l’appelant et la demandeure soient capables de communiquer de manière significative compte tenu de leur langue respective et de leurs incompatibilités. Ce tribunal est d’avis que cela constitue également un abus de procédures , comme la Cour fédérale l’a d’ailleurs énoncé dans l’affaire Kaloti [19] :
« [12] En conséquence, je dois conclure qu’en général, le principe de res judicata s’applique en droit public. Autrement, les demandeurs pourraient présenter de nouveau la même demande ad infinitem et nauseam , ce qui constituerait un recours abusif aux tribunaux administratifs. (…)»
[36] Le tribunal ne croit donc pas qu’il soit nécessaire d’entendre cette affaire au fond parce qu’on ne peut invoquer en l’espèce l’exception des circonstances spéciales, inhérente au principe de la chose jugée, et il s’agit d’un abus de procédures étant donné que la preuve présentée comme une nouvelle preuve n’est ni décisive ni convaincante sur la question de l’authenticité de leur mariage et sur l’intention de la demandeure et de l’appelant au moment du mariage.
Conclusion
[37] L’appel de Aurèle MORIN est rejeté au motif que la chose a déjà été jugée. Il est également rejeté pour abus de procédures. [20]
[…]
(nos soulignés)
* * *
Jugement de la Cour fédérale du 24 août 2011 concernant une demande d'autorisation antérieure, transmise par M. Morin:
JE
CERTIFIE
qu'à la suite d'une demande de la partie
demanderesse en vertu de l'article
[…]
(nos soulignés)
* * * * *
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
ACCUEILLE en partie la demande;
CONDAMNE
Abraham J. Garza à payer à Aurèle Morin la somme de 2 050 $ avec
intérêt au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article
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__________________________________ Jean-F. Keable, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
23 septembre 2013 |
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[1] Mise en demeure du 14 février 2011.
[2] Cahier d’appel, pages 93-110.
[3] Cahier d’appel, page 11.
[4] Cahier d’appel, pages 40-49.
[5] 2007 CanLII 66922 (CISR), 10 décembre 2007.
[6] P-8.
[7] P-9.
[8] P-10.
[9] P-3.
[10] P-5.
[11] P-6.
[12] Supra note 9.
[13] P-12.
[14] Pièce R-2.
[15] Pièce R-3.
[16] Règlement sur l’immigration et la protection des réfugisé , (DORS/2002-227), tel qu’amendé.
[17] Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés , L.C. 2001, ch. 27, telle qu’amendée.
[18] Pièce A-3, page 4.
[19]
Kaloti c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de
l'Immigration)
,
[20] 2009 CanLII 82019 (CISR).
[21] P-17.