Paul-Hus c. 4058569 Canada inc. (Longueuil Kia)

2013 QCCQ 15481

JD2786

 
COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE  LONGUEUIL

LOCALITÉ DE LONGUEUIL

« Chambre civile »

 

N° :            505-32-030264-122

 

DATE :      2 octobre 2013

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE MONIQUE DUPUIS, J.C.Q.

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CHARLES PAUL-HUS

                        Demandeur

c.

4058569 CANADA INC. (Longueuil Kia)

                        Défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            Charles Paul-Hus (" Paul-Hus ") [1] réclame 3 303,87$ à 4058569 Canada inc. (" Longueuil Kia "), en raison de dommages causés au véhicule qu'il lui avait confié pour des réparations.

[2]            Paul-Hus est propriétaire d'un véhicule de marque Kia, modèle Rondo, qu'il a acheté neuf en 2011. En 2012, il demande à Longueuil Kia d'effectuer diverses vérifications et réparations à son véhicule. Il demande notamment de vérifier la cause d'un bruit qui provient du tableau de bord et d'effectuer les réparations nécessaires.

[3]            C'est ainsi que le 1 er mars 2012, il remet son véhicule à Longueuil Kia qui le gardera, tant et aussi longtemps que toutes les vérifications et réparations n'auront pas été complétées.

[4]            Ce n'est que le 8 mars suivant que Paul-Hus reprend son véhicule. Il constate alors une importante fissure dans le pare-brise, qu'il dénonce immédiatement aux représentants de Longueuil Kia.

[5]            Le 9 mars, il constate que la fissure a pris de l'ampleur. Il en attribue l'entière responsabilité à Longueuil Kia, puisqu'il lui a remis le véhicule en parfait état, le 1 er  mars.

[6]            Malgré plusieurs conversations avec les représentants de la défenderesse, il ne peut obtenir satisfaction. Le 12 mars, il lui transmet par huissier une mise en demeure (pièce P-3), exigeant le remplacement à ses frais du pare-brise. Longueuil Kia refuse de l'indemniser et le 19 mars, il fait remplacer le pare-brise au coût de 748,48$ (pièce P-5).

[7]            Paul-Hus réclame ce montant, de même qu'une compensation de 500,00$ pour les dommages et inconvénients subis et 2 000,00$ en dommages punitifs. Il allègue que les représentants de la défenderesse lui ont fait de fausses représentations quant à la cause du bris du pare-brise pour lui en imputer l'entière responsabilité.

[8]            Dans sa contestation écrite, Longueuil Kia allègue que Paul-Hus aurait dû faire la réclamation auprès de ses assureurs : les experts en sinistre en seraient venus à conclure qu'elle n'encourait aucune responsabilité. Au procès, les témoins de Longueuil Kia tentent d'établir qu'un point d'impact qui s'est ensuite aggravé, était déjà présent sur le pare-brise lorsque Paul-Hus lui confie son véhicule le 1 er mars.

Analyse et décision

[9]            Paul-Hus allègue une faute de la part de Longueuil Kia, dans la garde du véhicule qu'il lui remet le 1 er mars, alors qu'il était en parfait état : la fissure qu'il constate le 8 mars est entièrement attribuable à la défenderesse.

[10]         Lors de la remise du véhicule pour réparations, le 1 er  mars 2008, Longueuil Kia en devient dépositaire; le contrat de dépôt est défini à l'article 2280 du Code civil du Québec (" C.c.Q. ") :

" 2280.  Le dépôt est le contrat par lequel une personne, le déposant, remet un bien meuble à une autre personne, le dépositaire, qui s'oblige à garder le bien pendant un certain temps et à le restituer.

Le dépôt est à titre gratuit; il peut, cependant, être à titre onéreux lorsque l'usage ou la convention le prévoit. "

[11]         À titre de dépositaire, Longueuil Kia doit agir avec prudence et diligence (art. 2283 C.c.Q.), et rendre à Paul-Hus le véhicule tel qu'elle l'a reçu, selon l'article 2286 C.c.Q. :

" 2286.  Le dépositaire doit rendre le bien même qu'il a reçu en dépôt.

S'il a reçu quelque chose en remplacement du bien qui a péri par force majeure, il doit rendre au déposant ce qu'il a ainsi reçu. "

[12]         Or, Longueuil Kia prétend que le pare-brise du véhicule était abîmé lorsque Paul-Hus le lui remet. Ce dernier et sa conjointe Véronique Pigeon (" Pigeon ") affirment qu'il ne l'était pas.

[13]         Paul-Hus en est certain : le matin du 1 er mars, il déneige son véhicule; il porte une attention particulière au pare-brise, et ne constate rien d'anormal.

[14]         Par ailleurs, Sylvain Dagenais (" Dagenais "), mécanicien chez Longueuil Kia, déclare d'abord qu'il prend la voiture le matin du 1 er mars, pour un premier test de route. Il roule pendant deux ou trois kilomètres et revient au garage. C'est alors qu'il note la présence d'un point d'impact ou d'une petite fissure sur le pare-brise, et en avise immédiatement Sébastien Di Mauro (" Di Mauro "), directeur des opérations chez Longueuil Kia.

[15]         Contrairement à la procédure habituelle, il ne l'inscrit pas sur le bon de travail qu'il remplit lorsqu'il fait les premières vérifications et réparations.

[16]         Plus loin dans son témoignage, Dagenais se reprend et affirme que c'est plutôt avant de faire le test de route qu'il aperçoit la fissure.

[17]         Quant à Di Mauro, il affirme avoir vu le point d'impact après avoir été alerté par Dagenais. Il demande immédiatement, le 1 er mars, à Annie-Claude Rivet (" Rivet "), conseillère technique chez Longueuil Kia, d'en aviser Paul-Hus. Il réitère cette demande plusieurs fois entre le 1 er mars et le 8 mars. Il est plutôt invraisemblable que malgré toutes ces demandes, Rivet ait omis d'aviser Paul-Hus avant le 8 mars.

[18]         Rivet témoigne, à la demande de Paul-Hus. En tant que conseillère technique, lorsqu'elle reçoit Paul-Hus, elle remplit le bon de commande, qui fait l'énoncé des vérifications et réparations demandées par celui-ci. Habituellement, elle fait le tour du véhicule avec le client avant de le rentrer au garage pour vérifier s'il y a des éléments abîmés. Ce matin là, pour des raisons inexpliquées, elle ne le fait pas et ne peut donc elle-même confirmer la présence ou l'absence de fissure ou de point d'impact sur le pare-brise.

[19]         Elle confirme que si un technicien constate une partie abîmée sur un véhicule avant de commencer les réparations, il le note immédiatement sur un bon de travail, et cette mention est éventuellement reproduite dans la facture qu'elle remet au client. Or, en aucun temps entre le 1 er et le 8 mars, le technicien Dagenais ou tout autre technicien n'a inscrit une telle mention sur le bon de travail concernant le véhicule de Paul-Hus.

[20]         Elle affirme que ce n'est que le 8 mars que Di Mauro lui demande d'informer Paul-Hus avant qu'il ne vienne chercher son véhicule, de la présence de la fissure sur le pare-brise. Elle reconnaît qu'elle a omis de le faire, et le demandeur l'a constatée lui-même lorsqu'il a repris son véhicule.

[21]         Le Tribunal considère que la preuve de Longueuil Kia, quant à la présence d'une fissure ou d'un point d'impact sur le pare-brise lors de la remise du véhicule le 1 er mars, n'est pas probante. Trop d'invraisemblances et de contradictions ponctuent les témoignages des employés et représentants de Longueuil Kia. Notamment, le témoignage de Dagenais est hésitant, lorsqu'il affirme avoir noté la fissure sur le pare-brise, le premier matin où il prend possession du véhicule de Paul-Hus. De plus, il est singulier qu'il n'ait pas suivi la procédure habituelle, et n'a pas noté immédiatement cette information sur le bon de travail.

[22]         Par ailleurs, la lecture de la facture remise à Paul-Hus (pièce P-7) indique qu'à de nombreuses reprises, les techniciens affectés aux vérifications et réparations de son véhicule ont manipulé et démonté une partie du tableau de bord (" dash "), ce qui pourrait expliquer le bris du pare-brise.

[23]         Vu ce qui précède, le Tribunal n'a pas de raison d'écarter le témoignage de Paul-Hus et de sa conjointe Pigeon, lorsqu'ils affirment qu'ils remettent un véhicule dont le pare-brise est en parfait état, le 1 er mars. Vu l'état dans lequel Paul-Hus récupère son véhicule, il a le droit de recouvrer le prix de remplacement du pare-brise, soit 748,48$.

[24]         Il a également le droit de recouvrer les frais de signification de la mise en demeure (30,39$). Quant au montant réclamé pour perte de temps, usant de son pouvoir discrétionnaire et vu la preuve, le Tribunal lui octroie la somme de 250,00$.

[25]         Le Tribunal ne lui accorde cependant par les dommages punitifs, puisqu'ils ne sont octroyés que lorsque la Loi le prévoit expressément (art. 1631 C.c.Q.). Même si Longueuil Kia est responsable du bris du pare-brise, et même si Paul-Hus pouvait lui reprocher un certain manque de transparence quant au moment et à la cause de ce bris, il ne s'agit pas d'un cas où la Loi prévoit de tels dommages.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[26]         ACCUEILLE en partie l'action du demandeur;

[27]         CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 1 028,87$ avec intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code Civil du Québec à compter du 12 mars 2012, date de la mise en demeure;

[28]         CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur les frais judiciaires de 132,00$.

 

 

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MONIQUE DUPUIS, J.C.Q.



[1]     L'utilisation des seuls noms ou prénoms dans le présent jugement a pour but d'alléger le texte et il ne faut y voir aucune discourtoisie à l'égard des personnes concernées.