Tremblay c. Agence du revenu du Québec (Sous-ministre du Revenu du Québec) |
2013 QCCQ 15935 |
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JB-4370
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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LOCALITÉ D’ALMA |
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DISTRICT D’ALMA |
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N° : |
160-80-000049-092 |
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DATE : |
20 décembre 2013
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE MONSIEUR LE JUGE MICHEL BOUDREAULT |
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GHISLAINE TREMBLAY
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Demanderesse |
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AGENCE DU REVENU DU QUÉBEC
(en
substitution de Sous-ministre du revenu du Québec)
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Au départ, les parties conviennent de substituer le nom de Sous-ministre du revenu du Québec par l’Agence du revenu du Québec (création de l’Agence du revenu du Québec le 1 er avril 2011).
[2] Ghislaine Tremblay en appelle de deux cotisations émises par l’Agence du revenu du Québec :
o le 10 décembre 2008, l’Agence cotise Mme Tremblay en lui attribuant un revenu d’entreprise de 59 120 $ pour des ventes effectuées en 2007; avis de cotisation portant le numéro QR217615C01;
o le 19 janvier 2009, l’Agence cotise Mme Tremblay en lui attribuant un revenu d’entreprise de 27 135 $ pour la vente d’un terrain effectuée en 2005; avis de cotisation portant le numéro QW954553C02.
[3] Le 20 juin 2005, Ghislaine Tremblay acquiert un grand terrain et bâtisses situés à Chibougamau pour 70 200 $.
[4] Le ou vers le 3 août 2005, Mme Tremblay présente une demande de lotissement pour ce terrain auprès de la Ville de Chibougamau amenant une subdivision de celui-ci.
[5] Le 14 octobre 2005, un premier terrain subdivisé est vendu par l’entremise d’un courtier immobilier pour un montant de 35 000 $.
[6] Entre le 16 avril et le 9 octobre 2007, Ghislaine Tremblay se départit du reste de ses immeubles subdivisés qu’elle avait acquis le 20 juin 2005, pour un montant total de 225 500 $.
Prétention des parties
Ghislaine Tremblay
[7] Le profit résultant de ces ventes ne saurait être imposé à titre de revenu d’entreprise. Sa première intention, lors de l’acquisition des biens jusqu’à la vente, a toujours été celle de créer une entreprise d’entreposage de véhicules récréatifs et ce n’est qu’à la suite de difficultés techniques inhérentes à l’obtention d’une protection d’assurance qu’elle a reporté la mise en place de son entreprise, le manque de liquidité la forçant ensuite à se départir de ses immeubles subdivisés en 2007. C’est pourquoi elle estime que la nature des gains est un gain en capital.
Agence du revenu du Québec
[8] Elle soutient que les gains générés par la vente des immeubles de Ghislaine Tremblay en 2005 et 2007 sont du revenu d’entreprise; les cotisations pour ces années d’imposition bénéficient de la présomption de validité et Mme Tremblay n’a pas renversé son fardeau de preuve.
Questions en litige
[9] Le Tribunal doit déterminer si les gains provenant de la vente des immeubles de Ghislaine Tremblay au cours des années 2005 et 2007 constituent du revenu d’entreprise ou un gain en capital.
Les faits pertinents
[10] Au cours des années 2002 et 2003, Ghislaine Tremblay est travailleuse autonome en entretien ménager pour Ville d’Alma.
[11] En mars 2003, Mme Tremblay apprend qu’elle héritera d’une somme de 64 570,88 $, montant qui lui sera versé le 14 mai 2004.
[12] À cette période, ses contrats de conciergerie viennent à échéance et la compétition étant féroce, elle perd son emploi. Elle recherche donc un nouveau travail ou un investissement qui lui permettra d’assurer sa sécurité financière.
[13] Vers le mois d’août 2003, lors d’une visite à Chibougamau, elle voit un immense entrepôt à vendre dans ce secteur et rêve de l’acquérir, en plus du terrain, pour en tirer un revenu en louant des espaces pour entreposer des véhicules récréatifs. Mme Tremblay obtient l’aide du Centre local de développement (CLD) pour une étude à ce sujet.
[14] Toutefois, la finalisation de la transaction s’avère fastidieuse compte tenu des normes à respecter, particulièrement en matière environnementale. Elle est confiante de pouvoir opérer en 2003 et s’engage à effectuer un dépôt en fidéicommis de 4 000 $.
[15] Le 14 mai 2004, elle reçoit l’argent de son héritage.
[16] Le 20 juin 2004, Ghislaine Tremblay acquiert le terrain (30 200 $) et les bâtiments (40 000 $) pour un montant total de 70 200 $.
[17] Immédiatement après la vente, la mise en place du commerce est compromise en raison des difficultés à obtenir une couverture d’assurance. Mme Tremblay relate qu’étant donné la nature du projet, tel l’entreposage de véhicules récréatifs, les compagnies d’assurance refusent d’assurer une protection.
[18] Entre-temps, Mme Tremblay paie les taxes municipales et les études de sol effectuées, sans compter les honoraires professionnels du notaire et les droits de mutation immobilière. Le premier compte de taxes municipales s’élevait à 8 300 $ qu’elle fait rectifier par la suite pour un montant de 4 000 $.
[19] À l’été 2005, elle reçoit une offre d’achat de Richard Leblanc pour acheter une parcelle de son terrain. Elle refuse.
[20] À l’automne 2005, M. Leblanc réitère son offre. Elle accepte sa proposition qui lui permet d’acquitter les dettes accumulées depuis l’amorce du projet.
[21] L’arpenteur-géomètre consulté, Paul Roy, lui suggère alors de prévoir un morcellement complet de la propriété, même si elle n’a pas l’intention de procéder à des ventes parcellaires. Selon elle, la proposition de l’arpenteur-géomètre se veut une économie de frais; Mme Tremblay accepte cette offre et maintient toujours son projet d’établir un commerce d’entreposage de véhicules récréatifs.
[22] Le 14 octobre 2005, elle procède à la vente du terrain subdivisé pour un montant de 35 000 $ et paie ses dettes accumulées.
[23] Ensuite, elle continue toujours ses recherches pour obtenir une protection d’assurance; elle demeure confiante de réaliser son projet. Toutefois, en raison de la tardiveté de la période automnale et en l’absence d’une couverture d’assurance, elle ne loue aucun espace pour entreposer des véhicules récréatifs.
[24] En 2006, pour survivre, Ghislaine Tremblay se voit contrainte d’accepter un emploi de gardienne de nuit dans une maison d’accueil en santé mentale (Corporation le Zéphir Chibougamau-Chapais). Elle travaille cinq nuits par semaine, de minuit à 8 h.
[25] Le 16 octobre 2006, elle réussit enfin à obtenir une couverture d’assurance de Canada-Vie. Elle doit payer une prime annuelle de 5 654,50 $. Une fois de plus, et vu la saison automnale tardive, elle ne peut louer ses espaces pour entreposer des véhicules récréatifs.
[26] En 2007, elle éprouve des problèmes de santé qui l’obligent à cesser de travailler. Elle retire alors des prestations d’assurance-emploi maladie pour une période de six mois et ensuite des prestations d’assurance-emploi régulières.
[27] Ainsi, étant donné son état de santé et les charges sur l’immeuble, notamment les taxes et les primes d’assurance élevées et, par surcroît, d’un manque de liquidité, Ghislaine Tremblay se voit contrainte d’abandonner son projet et met en vente sa propriété.
[28] Elle donne mandat à un agent d’immeuble de procéder à la vente de son terrain subdivisé et ses bâtiments et par son intermédiaire, procède aux ventes suivantes :
Dates |
Ventes |
Prix |
16 avril 2007 |
terrain |
35 000 $ |
30 avril 2007 |
terrain |
33 500 $ |
1 er mai 2007 |
terrain et résidence |
75 000 $ |
8 mai 2007 |
terrain |
13 000 $ |
9 octobre 2007 |
terrain et entrepôt |
69 000 $ |
Total : |
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225 500 $ |
[29] Ghislaine Tremblay reconnaît qu’elle ne connaissait rien dans le domaine immobilier et qu’elle n’a jamais eu l’intention de faire le commerce des immeubles. Elle estime avoir agi honnêtement. D’ailleurs, elle revient sur le fait qu’elle a acheté ces bâtiments et ce grand terrain sans même avoir contracté préalablement une assurance parce qu’un courtier immobilier lui avait mentionné que « tout s’assure ».
[30] Contre-interrogée par le procureur de l’Agence du revenu du Québec sur les raisons l’ayant amenée à la subdivision de son terrain (index des immeubles daté du 15 septembre 2005, lot subdivisé - pièce D-5), Mme Tremblay réitère qu’une fois ces lots lotis, cela pouvait devenir pour elle une solution de rechange.
[31] Dans un document qu’elle fait parvenir à Pierre Martel au service du contrôle fiscal de l’Agence du revenu du Québec le 8 juin 2009 (pièce D-7), elle décrit les circonstances entourant la vente des bâtiments et du terrain subdivisé :
« […] En juillet 2005, je fais la rencontre de M. Richard Leblanc, ce dernier me demande de lui vendre une partie de mon lot. À ce moment je n’avais pas envisagé de morceler mon terrain.
Ayant un besoin de liquidité due aux dépenses incessantes causées par l’acquisition de cet entrepôt (notaire, avocat, arpenteurs…) Je décide de considérer son offre.
J’ai donc contacté la ville pour vérifier s’il était possible de vendre une partie de ce lot. Le comité d’urbanisme m’a confirmé que « oui » il était possible de morceler.
Par la suite j’ai contacté Paul Roy arpenteur-Géomètre et, lui ai demandé de venir arpenter, pour séparer un terrain. Ce qui ne compromettait en rien mon projet initial. M. Roy m’a proposé de faire le piquetage en morcelant mon lot en plusieurs terrains et ainsi économiser des frais dans l’éventualité ou je déciderais de vendre ce lot morcelé. Il m’a aussi expliqué que de toutes façons il devait démarrer la subdivision à partir de l’entrepôt celle-ci étant le point central du Bloc F. J’ai accepté cet option et j’ai commencé à percevoir cette solution sous un angle acceptable.
J’ai réalisé que cela pouvait être un compromis convenable. Ceci ne me procurerait pas le revenu à long terme que j’escomptait mais au moins je récupérerais mon investissement - n’oublions pas, à ce moment je n’ai toujours pas d’assureur.
En octobre 2005 j’ai vendu la partie # F-4 du bloc F., ce qui m’a permis de payer mes dettes […] »
[32] Questionnée sur la signification pour elle dans cette lettre de « percevoir cette solution » sous un angle acceptable, Ghislaine Tremblay répond que cela lui permettrait d’économiser des frais, tel que proposé par l’arpenteur-géomètre, en morcelant immédiatement son lot en plusieurs terrains.
[33] Également questionnée sur ce que signifiait un « compromis convenable », elle déclare que la vente d’un terrain lui permettait de payer ses dettes tout en réitérant vouloir conserver son projet. Elle insiste sur le fait qu’elle « ne voulait rien savoir de vendre les autres terrains ».
[34] L’Agence du revenu du Québec ne produit aucune preuve en défense.
Analyse et décision
Les règles de droit applicables
[35]
L’article
« «entreprise» comprend une profession, un métier, un commerce, une manufacture ou une activité de quelque genre que ce soit, y compris, sauf aux fins du paragraphe a du premier alinéa de l'article 164, de l'article 250.4 et du paragraphe i du deuxième alinéa de l'article 726.6.1, un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial, mais ne comprend pas une charge ni un emploi; »
[36]
Selon les dispositions de l’article
[37] Le gain en capital, selon les dispositions de l’article 232, provient de l’aliénation d’un bien. Le bénéfice tiré de l’aliénation d’un bien dans le cadre d’une entreprise peut cependant constituer un revenu d’entreprise plutôt qu’un gain en capital.
[38] La jurisprudence est abondante sur la question de la détermination du revenu d’entreprise par rapport au gain en capital en cas de transaction immobilière. Le juge Desmarais, dans l’affaire Lavallée [1] , se réfère à un jugement antérieur qui recense les critères généralement reconnus pour l’analyse de cette question et en retient l’énumération suivante :
« La meilleure synthèse des conditions requises pour juger s'il y a gain de capital a été établie par le juge Jean Filion qui écrit 5 :
« Parmi les éléments de preuve susceptibles d'aider à la solution d'un litige de cette espèce, la jurisprudence a, entre autres, retenu les suivants:
a) L'intention originelle du contribuable lors de l'acquisition des biens;
b) L'intention qui prévalait lors de leur aliénation, parce que l'intention originelle peut varier;
c) L'existence, dès l'acquisition, d'une intention alternative ou subsidiaire;
d) La possibilité de réaliser un profit d'une façon différente de celle originellement envisagée;
e) Les connaissances acquises en la matière par le contribuable et résultant de son expérience dans le domaine immobilier;
f) Le comportement ou la conduite du contribuable tant avant que postérieurement à la transaction qui donne lieu au litige;
g) Les pouvoirs corporatifs, lorsque le contribuable est une compagnie;
h) La relation qui peut exister entre les activités ordinaires de l'entreprise et la transaction effectuée;
i) La profession ou l'occupation principale du contribuable, qui n'est pas nécessairement un critère déterminant;
j) La répétition des transactions de même nature, soit par le contribuable ou par des personnes ou compagnies qui lui sont reliées. » »
5
[39] Cette liste n’est pas exhaustive. Ces critères constituent en fait l’élaboration d’une grille qui se veut la plus objective possible pour procéder à l’analyse de la question dans chaque cas d’espèce. Chacun de ces critères a une importance relative et aucun ne devrait être perçu comme étant déterminant en soi.
[40] Le critère concernant l’intention du contribuable (originelle, alternative ou subsidiaire, selon les sous-paragraphes a) à d) mentionnés ci-dessus) donne aussi lieu à une jurisprudence abondante. Il revêt souvent, comme c’est le cas en l’espèce, d’une grande importance [2] .
Le fardeau de la preuve
[41] La règle à cet égard est claire et bien établie : la cotisation est présumée valide. Le contribuable a le fardeau de la preuve. Il doit établir la preuve nécessaire pour démontrer que la cotisation est incorrecte en faits et en droit [3] .
[42] Dans l’affaire 9027-5967 Québec inc. [4] , la Cour rappelle les conséquences de cette présomption sur le fardeau de la preuve, aux paragraphes 13 et 14 :
«
[13] Dans
l'arrêt Durand c. Québec (sous-ministre du Revenu), la Cour a réitéré les
règles relatives à la présomption de validité de la cotisation fiscale et des
fardeaux de preuve qui en découlent. Reprenant les principes énoncés par la
Cour suprême dans Hickman Motors Ltd. c. Canada, la Cour dit :
- La cotisation fiscale jouit d'une présomption de validité
(art.
- Le fardeau initial du contribuable consiste à « démolir » l'exactitude de la présomption en présentant une preuve prima facie.
- Lorsque le contribuable présente une telle preuve, il y a renversement du fardeau de la preuve.
- Le fisc doit alors réfuter la preuve prima facie et prouver la cotisation établie par présomption.
[14] Règle générale, la preuve prima facie se définit comme une preuve suffisante pour établir un fait jusqu'à preuve du contraire. Dans Stewart c. M.R.N., le juge Cain mentionne qu'«une preuve prima facie est celle qui est étayée par des éléments de preuve qui créent un tel degré de probabilité en sa faveur que la cour doit l'accepter si elle y ajoute foi, à moins qu'elle ne soit contredite ou que le contraire ne soit prouvé ». »
Analyse de la preuve
[43] Ghislaine Tremblay s’est-elle acquittée de son fardeau de preuve?
[44] L’examen des pièces produites au dossier, l’analyse du témoignage de Ghislaine Tremblay, l’examen des dispositions pertinentes de la loi et également après avoir pris connaissance de la nombreuse jurisprudence fournie par chacune des parties, le Tribunal conclut que l’acquisition et la revente du terrain (subdivisé par la suite en lots) et les bâtiments ne peuvent être considérés comme une entreprise au sens de la loi.
[45] Le 20 juin 2005, Ghislaine Tremblay procède à l’achat d’un grand terrain et d’un entrepôt portant le numéro civique 1210, Route 167 Sud, à Chibougamau. La preuve révèle que la raison de cette acquisition provient du fait qu’elle apprend qu’elle hérite d’une somme de 64 570,88 $ et également, parce que ses contrats de conciergerie sont à échéance et qu’elle recherche un investissement qui pourrait lui permettre de se donner une certaine sécurité financière.
[46] Elle n’a aucune expérience et par le fait même aucune compétence dans le domaine immobilier ni même personne pour la conseiller, à l’exception d’un agent d’immeuble qui l’informe que tout bien s’assure. La preuve est à l’effet qu’elle procède à cette acquisition sans même avoir une couverture d’assurance.
[47] Cette transaction s’élève à 70 200 $ (bâtisses et terrain), de sorte que tout son héritage y est investi. Alors que le compte de taxes municipales s’élève à 8 300 $, elle le fait rectifier pour un montant de 4 000 $, sans compter les frais pour les études de sol, les honoraires professionnels du notaire et les droits de mutation immobilière; elle n’a donc pas la capacité financière pour faire vivre cet entrepôt et ce grand terrain.
[48] Ainsi, lorsqu’une offre d’achat, non sollicitée de sa part, lui est faite d’acheter une partie de son terrain, la preuve révèle qu’elle y voit une solution d’acquitter les dettes accumulées depuis l’amorce de ce projet.
[49] La seule fin de son intention de revendre un investissement à profit ne peut en soi transformer la possibilité éventuelle d’un gain en capital en revenu d’entreprise. En réalité, si c’était le cas, il n’y aurait plus, à toutes fins utiles, de gain en capital possible.
[50] En fait, pour Ghislaine Tremblay, outre que de régler des dettes, cette transaction ne faisait aucunement son affaire. Ainsi, les circonstances de la vente du terrain incitent à conclure que cette transaction n’a jamais été faite dans le but d’augmenter sa capitalisation.
[51] Rien dans la preuve ne laisse voir que Ghislaine Tremblay entendait créer, notamment lors du lotissement du terrain en 2005, une entreprise pour faire, à l’état professionnel, le commerce de vente de son terrain subdivisé.
[52] Les raisons de ces lotissements étaient uniquement justifiées par les conseils de l’arpenteur-géomètre consulté ayant suggéré à Mme Tremblay de prévoir un morcellement complet de la propriété dans le but d’économiser, et ce même si elle n’avait pas l’intention de procéder à des ventes parcellaires.
[53] D’ailleurs, son comportement par la suite confirme son témoignage à la Cour :
o après l’arpentage, elle ne retient aucunement les services d’un courtier immobilier pour la vente du terrain subdivisé;
o elle continue à vouloir réaliser son projet en cherchant à obtenir une couverture d’assurance afin de louer l’entrepôt pour des véhicules récréatifs; elle voulait alors se créer un emploi;
o le 16 octobre 2006, elle réussit à obtenir une couverture d’assurance-vie en payant une prime de 5 654,50 $.
[54] Le Tribunal est d’avis que compte tenu de ses revenus modestes, si Mme Tremblay avait eu l’intention de faire du commerce et spéculer avec son lot subdivisé, elle n’aurait jamais fait le nécessaire pour obtenir une couverture d’assurance au montant de 5 654,50 $.
[55] La preuve lors de l’audition révèle alors que le comportement de Ghislaine Tremblay, tant avant qu’après la vente du lot subdivisé et des bâtisses, fut justifié par les coûts reliés, telles les taxes, la prime d’assurance élevée et sans aucun doute son inexpérience à gérer ce genre d’immeuble, ce qui expliquait le mandat donné à un agent d’immeuble.
[56] Ainsi, le Tribunal ne peut conclure que son comportement a créé une présomption que les transactions en litige constituaient des transactions immobilières faites à l’état professionnel.
[57] L’achat de ce grand terrain et des bâtisses en question et les circonstances qui ont amené Ghislaine Tremblay à procéder à la vente par la suite ne permettent pas au Tribunal d’en arriver à pareille conclusion.
[58] Le Tribunal considère que Mme Tremblay a rendu un témoignage clair et précis dont ses intentions sont conformes à certaines pièces déposées lors de l’audition, notamment celles faisant référence aux dates de vente des immeubles, de sorte que son témoignage ne peut être mis en doute.
[59]
Mme Tremblay s’est déchargée de son fardeau de démontrer que son projet
immobilier de départ et même par la suite ne peut être considéré comme une
entreprise au sens de l’article
[60] Avant de conclure, il y a lieu de traiter de l’argument de l’avocat de l’Agence du revenu du Québec selon lequel la déclaration que « les ventes sont effectuées dans le cadre de son entreprise » qui se retrouve dans les actes de vente constitue un aveu de Ghislaine Tremblay à l’effet qu’elle se livre à une activité commerciale de vente de terrains. Cette seule mention ne peut constituer un aveu puisqu’un aveu ne peut porter sur le droit ni sur une question mixte de droit et de fait [5] .
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[61] ACCUEILLE la requête introductive d’instance en appel.
[62] ANNULE la cotisation portant le numéro QR217615C01 datée du 10 décembre 2008.
[63] ANNULE la cotisation portant le numéro QW954553C02 datée du 19 janvier 2009.
[64] AVEC DÉPENS contre la défenderesse.
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__________________________________ MICHEL BOUDREAULT Juge à la Cour du Québec |
cain lamarre casgrain wells M e Jacques J. Villeneuve Procureurs de la demanderesse |
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larivière meunier M e Pier-Olivier Julien Procureurs de la défenderesse |
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Date d’audience : 13 novembre 2013 |
[1]
Lavallée
c.
Québec (Sous-ministre du revenu)
,
[2]
Jurisprudence citée par la partie défenderesse :
St-Georges
c.
Québec
(Sous-ministre du Revenu)
,
[3]
Plumbing and Heating Ltd
c.
Québec (Sous-ministre du revenu)
,
[4]
9027-5967 Québec inc.
c.
Québec (Sous-ministre du revenu)
,
[5]
Fiducie Charbonneau
c.
Québec (Sous-ministre du revenu)
,