Charbonneau c. Entreprises de construction Manocchio inc. |
2013 QCCQ 15967 |
||||||
COUR DU QUÉBEC |
|||||||
« Division des petites créances » |
|||||||
CANADA |
|||||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
|||||||
DISTRICT DE |
LAVAL |
||||||
LOCALITÉ DE |
LAVAL |
||||||
« Chambre civile » |
|||||||
N° : |
540-32-024974-121 |
||||||
|
|
||||||
|
|||||||
DATE : |
20 décembre 2013 |
||||||
______________________________________________________________________ |
|||||||
|
|||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
YVAN NOLET, J.C.Q. |
|||||
______________________________________________________________________ |
|||||||
|
|||||||
|
|||||||
LUCIE CHARBONNEAU et RÉJEAN ROUSSEAU |
|||||||
Partie demanderesse |
|||||||
c. |
|||||||
LES ENTREPRISES DE CONSTRUCTION MANOCCHIO INC. |
|||||||
Partie défenderesse |
|||||||
|
|||||||
|
|||||||
______________________________________________________________________ |
|||||||
|
|||||||
JUGEMENT |
|||||||
______________________________________________________________________ |
|||||||
|
|||||||
[1] Lucie Charbonneau et Réjean Rousseau réclament 7 000 $ en dommages à Les Entreprises de construction Manocchio inc. (« Construction Manocchio ») pour des vices de construction aux travaux de maçonnerie qu'elle a réalisés à leur résidence.
[2] Construction Manocchio plaide que les travaux exécutés à la résidence des demandeurs l'ont été conformément aux règles de l'art. Elle soutient que les fissures sont tout au plus de nature esthétique.
LES FAITS
[3] En 2007, les demandeurs achètent une maison neuve de Construction Manocchio.
[4] Dès le printemps 2009, ils constatent plusieurs fissures dans le mortier utilisé pour poser les briques de leur résidence. La largeur des fissures varie d'un endroit à l'autre.
[5] Malgré des demandes répétées à Construction Manocchio afin de réparer ces fissures, cette dernière considère qu'elle n'a rien à se reprocher et soutient que ses travaux ont été effectués conformément aux règles de l'art.
[6] Les demandeurs produisent une expertise dont les conclusions se lisent comme suit :
« Opinion et conclusion
Au jour de notre visite nous avons constaté un grand nombre de fissures dans les joints délimitant les éléments de maçonnerie des façades latérales gauche, avant et latérale droite de l'immeuble sis au […], Laval, Québec.
Le soussigné est d'opinion que les causes les plus probables de la formation desdites fissures sont les suivantes :
- Pour ce qui est des segments de maçonnerie superposés à la porte du garage et à la porte frontale avant (arche décorative) les fissures sont d'ordre structural pour cause très probable de la flexion des linteaux. Il en est de même pour les fenêtres de la façade latérale droite lesquelles démontrent également des fissures d'ordre structural en lézarde.
- Les autres fissures délimitant les pierres des joints de mortier ont été causées par un retrait excessif du mortier lors de séchage, en toute probabilité.
- Il en est de même pour les fissures retrouvées dans la maçonnerie composant les murets de l'entrée principale extérieure avant.
Le soussigné est d'opinion que ces retraits constatés dans la maçonnerie de l'immeuble sous étude est hautement excessif.
En ce sens cela déroge des règles de l'art.
Il en va de même pour les fissures structurales fissurant les segments de maçonnerie superposés aux ouvertures des façades avant et latérale droite.
Un grand nombre de fissure tel que constaté à la maison sous étude, permet l'infiltration d'eau excessive au travers de l'enveloppe verticale du bâtiment et sollicite de façon tout aussi excessive l'écran par pluie sous jacent.
Le soussigné est également d'opinion que les fissures retrouvées auprès de toit des murets bordant l'escalier avant sont également causées en raison absorption d'eau par effet de mèche et capillarité desdits parements mal drainés et en raison de gélifraction.
En ce sens, les eaux captées par les murets ne sont pas évacuées normalement vers l'extérieur.
L'efflorescence concentrée retrouvée sur les pierres composant lesdits murets en témoigne.
Il sera donc nécessaire de procéder aux travaux correctifs tels que décrits à l'item 6.0 du présent rapport d'expertise visant essentiellement à repointer tous les joints fissurés et la reconstruction des linteaux surplombant les ouvertures.
Les travaux inclus également la reconstruction complète des murets bordant l'escalier frontal extérieur.
[…] »
[7] La défenderesse produit également une expertise qui conclut que les fissures n'ont pas l'importance que l'expert des demandeurs indique à son rapport. Selon cet expert, les fissures dans le mortier sont mineures et rien ne justifie de refaire tous les joints de mortier comme le recommande l'expert des demandeurs.
DISCUSSION ET CONCLUSION
[8] Tel que mentionné aux parties lors de l'audience, le Tribunal doit tenir compte des règles de preuve contenues au Code civil du Québec lors de l'analyse de leurs prétentions.
[9]
L'article
[10]
L'article
2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.
[11] Cet article consacre le principe à l'effet que dans un procès civil, la prépondérance d'une preuve concernant un fait est suffisante afin de prouver l'existence de ce fait.
[12] En présence de versions contradictoires, le Tribunal doit donc analyser l'ensemble de la preuve en s'interrogeant sur l'existence d'une preuve prépondérante appuyant l'une ou l'autre des versions des parties.
[13] D'autre part, le contrat régissant les parties est un contrat d'entreprise qui est régi par le Code civil du Québec .
[14]
L'article
2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.
[15]
De plus, les obligations de l'entreprise devant fournir les services
sont plus amplement décrites, à l'article
2100. L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.
Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.
[16] Afin de soutenir leurs prétentions, chaque partie a déposé une expertise. Or les conclusions des experts sont contradictoires quant à savoir si les travaux de maçonnerie ont été effectués dans le respect des règles de l'art ou non.
[17] L'analyse des photos permet toutefois de constater que certaines des fissures sont petites et ne présentent aucun risque de détérioration du bâtiment. Pour ces fissures, l'expert de la défenderesse a raison de dire qu'il n'y a pas lieu d'entreprendre des travaux correctifs.
[18] Cependant, d'autres fissures, dont celles dites d'ordre structural en lézarde, sont des fissures qui ne sont pas seulement un problème esthétique. Il en est de même pour les fissures des murets de l'escalier. Ainsi, dans ces cas, il y a lieu de retenir les conclusions de l'expertise des demandeurs.
[19] Quant aux dommages auxquels les demandeurs ont droit, la soumission déposée en preuve ne permet pas de partager les réparations attribuables aux fissures dites esthétiques à celles d'ordre structural. Dans les circonstances, le Tribunal arbitre donc le montant des dommages auxquels les demandeurs ont droit à 3 500 $.
[20] Quant aux frais des experts, chaque partie assumera ses propres frais.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[21] ACCUEILLE partiellement la demande;
[22]
CONDAMNE
Les Entreprises de construction Manocchio inc. à payer
conjointement à Lucie Charbonneau et Réjean Rousseau la somme de
3 500 $
avec intérêts au taux de 5 % l'an, plus l'indemnité additionnelle prévue
à l'article
|
||
|
__________________________________ YVAN NOLET, J.C.Q. |
|
|
||
|
||
|
||
|
||
|
||
|
||
Date d’audience : |
18 octobre 2013 |
|