Coderre c. Éthier |
2014 QCCQ 25 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
LABELLE |
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LOCALITÉ DE |
MONT-LAURIER |
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« Chambre civile » |
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N° : |
560-32-004065-138 |
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DATE : |
8 janvier 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
YVAN NOLET, J.C.Q. |
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DANIEL CODERRE et DANIÈLE FORTIN |
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Partie demanderesse |
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c. |
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NICOLE ÉTHIER et FRANÇOIS PAQUETTE et FIDUCIE FRANÇOIS PAQUETTE |
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Daniel Coderre et Danielle Fortin réclament 7 000 $ à Nicole Éthier, François Paquette et Fiducie François Paquette pour des vices cachés à la propriété qu'ils ont achetée des défendeurs le 3 avril 2010.
[2] Les défendeurs plaident, dans un premier temps, que les problèmes dont se plaignent les demandeurs ne sont pas cachés. Ils soutiennent de plus ne pas avoir pu constater par eux-mêmes les problèmes ni avoir pu les réparer.
[3] En ce qui concerne la Fiducie François Paquette, monsieur Paquette confirme qu'elle a été dissoute en 2011 et que ses biens lui ont été remis à titre de bénéficiaire.
LES FAITS
[4] Le 28 mai 2010, les demandeurs achètent des défendeurs leur propriété située sur le chemin de la Lièvre sud à Mont-Laurier (la « propriété »).
[5] Peu de temps après leur acquisition, les demandeurs constatent des problèmes avec les installations électriques de la maison et de l'écurie.
[6] Les problèmes qui concernent la maison sont réglés à la satisfaction des demandeurs.
[7] Toutefois, concernant le fil électrique reliant la maison et l'écurie, celui-ci a été enfoui sous terre alors que le fil utilisé ne peut servir à cette fin. De plus, compte tenu de l'importance de la distance entre l'écurie et la maison, le fil utilisé n'a pas la bonne dimension et doit être remplacé.
[8] Le 1 er décembre 2010, les demandeurs avisent par écrit les défendeurs de la nécessité de remplacer le fil électrique entre l'écurie et la maison. Une autre lettre est transmise aux défendeurs en avril 2011 et les met en demeure d'exécuter ces travaux.
[9] Le samedi 21 avril 2012, les demandeurs constatent différentes infiltrations d'eau dans la chambre des maîtres, la garde-robe et la salle de bain. Les demandeurs soutiennent que des travaux doivent être exécutés rapidement afin de minimiser les dommages à la propriété.
[10] Dès le 25 avril, les demandeurs effectuent les réparations définitives à la toiture, et ce, avant qu'une mise en demeure ne soit transmise aux défendeurs.
[11] Le 24 septembre 2012, d'autres infiltrations d'eau sont constatées dans le salon. Selon la facture déposée en preuve, quatre noues doivent être refaites. Toutefois, pour ces travaux, la preuve ne révèle pas clairement en quoi les noues d'origine n'étaient pas conformes ni pourquoi il était urgent de les remplacer sans délai.
[12] Concernant le fil électrique entre la maison et l'écurie, monsieur Paquette fait valoir que ce fil ne devait pas être enfoui. Il admet toutefois qu'au moment des visites de la propriété, les demandeurs n'ont pu voir le fil qui avait été enfoui.
[13] En ce qui concerne les infiltrations d'eau, monsieur Paquette fait valoir que les travaux n'étaient pas urgents. Il soutient qu'il aurait dû avoir l'occasion de vérifier le problème avant que les réparations ne soient effectuées.
DISCUSSION ET CONCLUSION
[14] Lors de l'analyse des prétentions des parties, le Tribunal doit tenir compte des règles de preuve contenues au Code civil du Québec .
[15]
L'article
[16]
L'article
2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.
[17] Cet article consacre le principe à l'effet que dans un procès civil, la prépondérance d'une preuve concernant un fait est suffisante afin de prouver l'existence de ce fait. Le Tribunal doit donc analyser l'ensemble de la preuve en s'interrogeant sur l'existence d'une preuve prépondérante soutenant les prétentions de monsieur Coderre et madame Fortin.
[18]
Les conditions relatives à l'application de la garantie de qualité d'un
bien sont plus amplement prévues à l'article
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.
Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
[19] Pour qu'un vice soit considéré caché, cinq conditions doivent être remplies. Ces conditions se résument comme suit
1. Le vice doit posséder une certaine gravité;
2. Le vice doit être antérieur à la vente;
3. Le vice doit être inconnu de l'acheteur;
4. Le vice doit être caché.
5. Une dénonciation du vice doit être transmise au vendeur.
[20] À la lecture de ces conditions, le Tribunal considère que le problème du fil électrique constitue un vice caché.
[21] Il s'agit d'un problème d'une certaine gravité compte tenu que le type de fil électrique installé ne pouvait être enfoui. De plus, ce fil n'avait pas la bonne dimension compte tenu de l'usage auquel il était destiné.
[22] La preuve démontre que ce problème est antérieur à la vente, inconnu de l'acheteur et caché au moment de l'achat de la propriété. Il a été dénoncé aux défendeurs et il y a lieu de faire droit à cette réclamation des demandeurs au montant de 2 494,80 $
[23] En ce qui concerne les infiltrations d'eau d'avril et de septembre 2012, les causes de celles-ci répondent également aux critères mentionnés ci-dessus. Toutefois, aucune dénonciation de ces vices cachés n'a été transmise aux défendeurs.
[24] Le juge Jean-Yves Lalonde de la Cour supérieure écrit ce qui suit concernant la dénonciation des vices cachés par l'acheteur au vendeur [1] :
« [39] Le Tribunal en comprend que les objectifs poursuivis par le législateur sont les suivants :
39.1 une dénonciation faite dans un délai raisonnable;
39.2 une dénonciation suffisamment précise qui permettra au vendeur d'identifier la nature du vice et les correctifs requis pour y remédier;
39.3 permettre au vendeur d'établir que le vice était antérieur à la vente, comme le prétend l'acheteur;
39.4 permettre au vendeur de remédier lui-même au vice caché. »
[25] Dans l'arrêt Immeubles de l'Estuaire phase III inc. c. Syndicat des copropriétaires de l'Estuaire Condo phase III [2] , la juge Marie-France Bich de la Cour d'appel mentionne les cas d'exception au défaut de transmettre la dénonciation :
« [161] Par exception à la règle du préavis, la jurisprudence a reconnu qu'en certaines circonstances, le défaut de préavis, en matière de vice caché, pouvait n'être pas fatal au recours de l'acheteur (et ce, que le vendeur ait connu le vice ou pas) : ainsi, en cas d'urgence, le bien étant menacé d'un dépérissement immédiat , le défaut de dénonciation préalable ne pourra être opposé à l'acheteur, et de même si le vendeur a répudié sa responsabilité à l'égard du vice ou renoncé à se prévaloir du défaut d'avis. »
(notre soulignement)
[26] Ainsi, en matière de vices cachés, la règle est la dénonciation des vices par l'acheteur avant d'effectuer les travaux de réparations. Bien que les infiltrations d'eau d'avril et septembre 2012 affectent quatre pièces de la propriété, il n'y a que deux causes à ces infiltrations. De plus, aucune preuve ne démontre l'urgence d'effectuer les travaux correctifs.
[27] Il est certain qu'en matière d'infiltration d'eau, des travaux temporaires s'imposent afin de protéger la propriété et faire cesser l'infiltration d'eau. Si l'infiltration d'eau résulte d'un vice caché, le coût de ces travaux temporaires pourra être réclamé au vendeur.
[28] Or, dans les deux cas d'infiltration d'eau dont il a été question dans le présent dossier, des travaux temporaires de protection pouvaient être effectués afin de protéger la propriété. Ces travaux auraient permis aux demandeurs d'aviser les défendeurs et ainsi permettre à ces derniers de constater les problèmes, la nature de ceux-ci et le cas échéant, de les corriger à moindre coût.
[29] Ainsi, à défaut de prouver l'urgence à effectuer les travaux de réparations à la toiture, il y a lieu de rejeter ce volet de la réclamation des demandeurs.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[30] ACCUEILLE en partie la demande;
[31]
CONDAMNE
solidairement Nicole Éthier et François Paquette à payer
conjointement à Daniel Coderre et Danielle Fortin la somme de
2 494,80 $
avec intérêts au taux légal de 5 % l'an, plus l'indemnité additionnelle
prévue à l'article
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__________________________________ YVAN NOLET, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
12 novembre 2013 |
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