Tremblay c. Inspections Vard-On inc.

2014 QCCQ 150

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

CHICOUTIMI

LOCALITÉ DE

CHICOUTIMI

« Chambre civile »

N° :

150-32-008665-131

 

 

 

DATE :

7 janvier 2014

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SOUS LA PRÉSIDENCE DU

JUGE PIERRE SIMARD

 

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JACINTHE TREMBLAY

 

Demanderesse

 

c.

 

LES INSPECTIONS VARD-ON INC.

et

BERNARD PATOINE

 

Défendeurs

 

 

 

 

 

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JUGEMENT

JS1236

 
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[1]            La demanderesse Jacinthe Tremblay a acheté une résidence au bord du Lac-St-Jean sur la pointe de Chambord. Elle acquiert cet immeuble du défendeur Bernard Patoine.

[2]            Ayant découvert ce qu'elle pense être un problème majeur à la structure, elle poursuit le défendeur Patoine en vices cachés.

[3]            Les vices découverts par la demanderesse concernent les poutres du toit qui sont lourdement pourries. Elle réclame 6 921,36 $, montant qu'elle a payé pour faire réparer les poutres en question.

[4]            Elle poursuit également la codéfenderesse Les Inspections Vard-On inc. à qui elle avait confié le mandat d'une inspection préachat de l'immeuble et qui ne l'aurait pas avisée de l'existence du problème des poutres.

LES FAITS

[5]            La vente de la maison a été complétée le 6 août 2010, avec la garantie légale. Au préalable, la demanderesse Jacinthe Tremblay a visité la résidence en question, mais surtout, elle l'a fait expertiser par la codéfenderesse Vard-On. Après avoir procédé à un examen visuel de l'immeuble, les Inspections Vard-On remettent à la demanderesse un rapport ne signalant rien de particulier.

[6]            La demanderesse prend possession immédiatement après l'achat de la résidence. Ce n'est cependant que deux ans plus tard, le 18 juillet 2012, qu'elle découvre que les poutres soutenant son toit, au nombre de trois, sont pourries.

[7]            Chacune des trois poutres traverse la maison dans sa longueur et à l'intérieur de l'immeuble elles sont apparentes. Elles sortent du périmètre de la toiture. L'extrémité des poutres est donc exposée aux intempéries. Elles sont recouvertes de tôle à l'extérieur. Le 18 juillet 2012, la demanderesse constate un phénomène de pourriture sur la partie extérieure des poutres. Le phénomène est suffisamment avancé pour s'être répandu jusqu'à l'intérieur de la maison.

[8]            La demanderesse avise de la situation le défendeur Patoine ainsi que la codéfenderesse Les Inspections Vard-On. Lors de la mise en demeure initiale, la demanderesse indique que la réparation d'une seule des poutres dépasserait le 3 000 $, ceci sans compter les travaux qui devraient être faits aux deux autres poutres.

[9]            Finalement, la demanderesse confie la réparation des poutres à la firme Construction Rénovation GBR au coût de 6 925,36 $, montant qu'elle paie.

ANALYSE ET DÉCISION

[10]         Pour que sa réclamation soit reçue par le Tribunal, la demanderesse doit démontrer que le bien vendu était affecté d'un vice qui était grave, inconnu de l'acheteur, antérieur à la vente et caché. L'acheteur qui invoque la garantie légale doit en aviser par écrit le vendeur pour permettre à celui-ci de procéder aux examens qu'il juge à propos et, s'il le désire, de prendre les mesures correctrices qu'il juge appropriées.

[11]         La demanderesse a prouvé que la résidence était affectée d'un vice. Il s'agit de la pourriture des poutres qui soutiennent le toit. La demanderesse s'est présentée en cour sans le soutien d'aucun expert pour décrire le vice. Elle était donc d'opinion que le Tribunal devait conclure à l'existence d'une présomption forte et irrésistible à l'effet que la pourriture sur la poutre était un vice important et qu'il était antérieur à la vente.

[12]         La demanderesse aurait sans doute été présomptueuse si elle n'avait été confirmée dans les aspects essentiels de sa prétention par le témoin Bruno Gagnon propriétaire de la codéfenderesse Les Inspections Vard-On inc. Il ressort donc du témoignage de la demanderesse Tremblay et du témoin Gagnon que le vice était grave et antérieur à la vente.

[13]         Le témoignage de Jacinthe Tremblay démontre qu'elle ignorait, au moment de l'acquisition, la présence de ce phénomène.

[14]         Le caractère caché du vice est toutefois au coeur du débat et ce de façon assez particulière.

[15]         Les poutres étaient élevées et recouvertes de tôle et un examen visuel ne permettait pas de constater l'existence du phénomène. De son côté, Bernard Patoine, qui procédait à l'examen à la suite d'un mandat qui visait justement à déterminer l'état de la résidence que la demanderesse projetait acheter, indique que les inspections préachat ne sont que visuelles, qu'elles ne peuvent être destructives et que quant à lui il croyait que les poutres étaient trop hautes pour pouvoir être inspectées de proche.

[16]         Or, la demanderesse Jacinthe Tremblay reproche à Vard-On de ne pas avoir découvert cette problématique. Elle pense qu'il aurait été possible de faire un examen de la poutre arrière de sa résidence où il y a une galerie à l'étage ce qui rend considérablement plus facile l'accès à la poutre.

[17]         Si la prétention de la demanderesse Tremblay doit être retenue contre Inspections Vard-On, ceci remettrait sérieusement en question le recours qu'elle exerce contre son vendeur puisque le vice était détectable à la suite d'un examen sérieux.

[18]         La demanderesse ne réussira pas son recours contre la défenderesse Vard-On. En effet, il n'a pas été démontré par une preuve prépondérante que Les Inspections Vard-On inc. a commis une faute dans l'exécution du mandat qu'elle a reçu de la demanderesse Tremblay. Pour réussir un recours contre Vard-On il ne suffit pas de prouver qu'il y a l'existence d'un vice. En effet, par définition un vice étant caché, il l'est aussi pour un inspecteur. Le véritable problème se pose plutôt de la façon suivante: est-ce qu'en raison des connaissances qu'il a, l'inspecteur aurait dû remarquer la présence d'un phénomène trouble qu'il aurait eu le devoir de divulguer à sa cliente?

[19]         Il n'y a pas de preuve convaincante à cet effet. Le défendeur Patoine soutient avoir pratiqué une inspection selon les règles de l'art. Il dépose d'ailleurs au soutien de son argumentation un document intitulé «Norme de pratique professionnelle pour l'inspection visuelle de bâtiments principalement résidentiels» publié par l'Association des inspecteurs en bâtiments du Québec. La seule affirmation de la demanderesse Jacinthe Tremblay que Patoine n'a pas respecté les règles de l'art n'est pas suffisante et, dans les circonstances, le recours contre la défenderesse Vard-On ne sera pas accueilli. Le vice n'étant pas détectable, le recours contre Bernard Patoine sera donc accueilli.

[20]         En ce qui concerne le montant de la réparation il est clair qu'il est à 6 925,36 $.

[21]         Le Tribunal doit cependant considérer que la construction a été faite en 1995 et qu'au moment de l'acquisition elle avait une quinzaine d'années.

[22]         Le Tribunal tiendra donc compte d'une dépréciation qu'il fixe à 30%.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

CONDAMNE le défendeur Bernard Patoine à payer à la demanderesse Jacinthe Tremblay la somme de 4 847,75 $ avec intérêt au taux légal de 5 % l'an et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter du 12 décembre 2012;

CONDAMNE le défendeur Bernard Patoine à payer à la demanderesse les frais judiciaires de 167 $;

REJETTE l'action de la demanderesse Jacinthe Tremblay contre la codéfenderesse Les Inspections Vard-On inc.;

CONDAMNE la demanderesse Jacinthe Tremblay à payer à la codéfenderesse Les Inspections Vard-On inc. les frais de 204 $.

 

 

 

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       PIERRE SIMARD, j.c.q.

 

 

date d'audience:       7 novembre 2013