Immo SI inc. c. Dubé |
2014 QCCQ 531 |
|||||||
JG2338
|
||||||||
« Division des petites créances » |
||||||||
CANADA |
||||||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||||||||
DISTRICT DE |
BEAUHARNOIS |
|||||||
LOCALITÉ DE SALABERRY-DE-VALLEYFIELD « Chambre civile » |
||||||||
N° : |
760-32-015473-137 |
|||||||
|
|
|||||||
|
||||||||
DATE : |
Le 6 février 2014 |
|||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
CÉLINE GERVAIS, J.C.Q |
||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
|
||||||||
IMMO SI INC. |
||||||||
demanderesse
|
||||||||
c. |
||||||||
CHANTAL DUBÉ |
||||||||
défenderesse |
||||||||
|
||||||||
|
||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
JUGEMENT |
||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||
|
||||||||
[1] Il s'agit d'une action en diminution de prix de vente de 5362,15 $ fondée sur l'existence de vices cachés, à savoir la non-conformité des installations sanitaires.
LES FAITS :
[2] Le 21 décembre 2011, Immo Si Inc. (Immo Si), représentée par son vice-président, M. Stéphan Denis, achète un triplex situé sur la rue des Érables à Salaberry-de-Valleyfield de Mme Chantal Dubé, pour la somme de 317 000 $. Il s'agit d'un immeuble qui a été construit en 1945.
[3] Avant l'achat, Immo Si a procédé à une inspection de l'immeuble par le biais d'un inspecteur en bâtiment.
[4] Il s'agit d'un immeuble qui est loué, et que M. Denis n'habite pas personnellement. Madame Dubé a habité cet immeuble entre 2002 et le moment de la vente.
[5] Le 20 mars 2012, M. Denis est informé d'un refoulement d'égout par l'une de ses locataires, au sous-sol de l'immeuble. Il fait le nécessaire pour les travaux d'urgence, et encourt alors des coûts de 458,75 $. [1] La facture de l'égoutier mandaté à ce moment indique qu'il a procédé à déboucher l'égout principal, qui était bloqué sous la maison. Il a procédé à une inspection avec la caméra et a ainsi pu constater la présence d'une serviette humide dans le tuyau.
[6] Immo Si n'en informe pas alors Mme Dubé, considérant qu'il s'agit d'un événement mineur et isolé.
[7] Le 1 er août 2012, alors qu'il se trouve chez sa locataire, celle-ci informe M. Denis de l'existence d'un autre problème au niveau de la toilette du sous-sol. Monsieur Denis décide de procéder lui-même aux vérifications d'usage, et alors qu'il a retiré la toilette, un refoulement survient, probablement dû au fait qu'au même moment, un autre locataire aurait utilisé sa laveuse. Les dommages sont alors considérables, et Immo Si fait appel à ses assureurs, qui mandatent le même égoutier qui était venu faire la vérification au printemps précédent. À ce moment, l'égoutier débouche et inspecte la conduite de la toilette du sous-sol pour constater que la connexion sous la toilette n'est pas habituelle, et que le tuyau est "déjointé". Une facture est émise au montant de 281,69 $. [2]
[8] Monsieur Denis avise Mme Dubé de la situation le 4 août, et celle-ci se rend sur les lieux deux jours plus tard avec son plombier pour constater l'état des lieux.
[9] L'assureur de Immo Si transmet un avis de dénonciation à Mme Dubé le 8 août 2012, alléguant la présence d'un vice caché qui serait à l'origine du sinistre.
[10] Immo Si est indemnisée des dommages subis au sous-sol de l'immeuble par ses assureurs, mais réclame par la présente action le coût de correction de la situation, selon une soumission préalablement transmise à Mme Dubé, qui évaluait le coût des travaux requis à la somme de 3150 $ plus taxes (3621,71 $); les travaux ont effectivement été faits le 5 décembre 2012. [3]
[11] Dans sa réclamation, Immo Si réclame donc le montant des trois factures ci-haut mentionnées, en plus d'une somme de 1000 $ représentant le montant de sa franchise.
[12] Dans sa contestation, Mme Dubé prétend n'avoir effectué aucun travail relié à la modification de la tuyauterie sanitaire, ce qui a été démontré lors de l'audition. Elle soutient également que le rapport d'inspection préachat obtenu par Immo Si était suffisamment explicite quant au fait que la plomberie n'était pas conforme.
[13] Le Tribunal a eu le bénéfice d'entendre le témoignage des plombiers de chacune des parties. Il semble que l'une des causes des refoulements ait été la présence d'un tuyau qui se serait déplacé à l'intérieur d'un autre tuyau d'un diamètre plus large, vraisemblablement parce qu'il n'avait pas été bien collé lors de son installation. Un autre facteur qui a permis le refoulement serait l'absence de clapet, et le Tribunal retient à cet effet les explications du plombier de Mme Dubé, qui étaient plus claires. Monsieur Denis a cependant précisé lors de l'audition qu'il ne réclamait pas à Mme Dubé le coût d'installation du clapet principal qu'il a fait ajouter, bien que la facture comprenne le coût d'installation des clapets reliés aux appareils sanitaires et de lavage situés sous le niveau du sol, ce qui ne représente qu'une mince part de la facture.
ANALYSE ET DÉCISION :
[14] Pour conclure à l'existence d'un vice caché, on doit retrouver la présence des quatre éléments suivants :
- Le vice doit être grave, c'est-à-dire qu'il doit causer des inconvénients sérieux à l'usage du bien de sorte que l'acheteur n'aurait pas payé le prix convenu s'il l'avait connu;
- Le vice doit être inconnu de l'acheteur au moment de la vente;
- Le vice doit être caché, c'est-à-dire qu'il ne peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans devoir recourir à un expert;
- Le vice doit être antérieur à la vente, puisque la garantie porte sur l'état du bien au moment de la vente.
[15] Le rapport d'inspection préachat comporte les observations suivantes :
- Quant aux conduits d'évacuation, l'inspecteur note que certaines des conduites de drainage situées dans les murs et les planchers datent d'une cinquantaine d'années et que des travaux de rénovation sont à prévoir puisqu'elles ont atteint la fin de leur vie utile. Il croit fort probable que des réparations soient à faire régulièrement;
- L'absence de valves sur les conduits de distribution de certains appareils de plomberie est notée. Il recommande qu'un plombier installe de telles valves, puisqu'en cas de débordements ou de fuite d'eau, il vaut mieux fermer la valve de l'appareil de plomberie plutôt que la valve principale d'entrée d'eau;
- Il n'a pas localisé de dispositifs anti-refoulement pour les installations de plomberie au sous-sol. L'inspecteur l'a cherché, mais ne l'a pas trouvé.
[16] Il a été démontré lors de l'audition qu'un tel dispositif anti-refoulement n'existait pas.
[17] Si la seule cause du refoulement avait été l'absence de clapet anti-retour, le recours de Immo Si n'aurait pas été recevable, puisque cet état de fait n'était pas inconnu de l'acheteur, l'une des conditions requises pour conclure à la présence d'un vice caché.
[18] Si, cependant, la présence d'un clapet aurait pu empêcher la survenance des dommages, elle n'est pas la cause du refoulement, qui est plutôt la présence d'un morceau de tuyau décollé qui s'est retrouvé en travers d'un autre tuyau. Cette situation constitue un vice caché dont Mme Dubé est responsable, même si elle l'ignorait et même si ce n'est pas elle qui a mandaté l'entrepreneur qui a procédé à la mauvaise installation de ce tuyau.
[19] Reste à évaluer la valeur de la réclamation. Il faut noter que le Code civil du Québec , à son article 1739, oblige l'acheteur à dénoncer le vice au vendeur pour lui donner la possibilité d'aller examiner les lieux et de procéder lui-même aux réparations s'il le désire.
[20] Il en découle que la valeur des travaux effectués avant l'envoi de la dénonciation ne peut ici être réclamée et la facture antérieure de 458,75 $ le 20 mars 2012 ne peut être remboursée.
[21]
Le recours de Immo Si est en diminution du prix de
vente de l'immeuble, puisqu'on peut croire que l'acheteur n'aurait pas payé le
même prix s'il avait connu l'existence du vice caché. (article
[22] Si cette diminution de prix peut parfois correspondre à la valeur des travaux correctifs, il n'en est pas toujours ainsi.
[23] Considérant l'âge de la maison achetée, ainsi que l'état de la tuyauterie, le Tribunal, exerçant sa discrétion, évalue la réduction du prix de vente à la somme de 1500 $.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE en partie l'action;
CONDAMNE
la défenderesse,
Chantal DUBÉ, à payer à la demanderesse,
Immo
Si Inc
., la somme de 1500 $, en plus des intérêts au taux légal et
de l'indemnité additionnelle prévue à l'article
LE TOUT avec les frais judiciaires de 218 $.
|
|
|
__________________________________ CÉLINE GERVAIS, J.C.Q. |
|
|
|