Crapanzano c. Hopital Maisonneuve-Rosemont

2014 QCCQ 1429

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

JOLIETTE

LOCALITÉ DE

JOLIETTE

« Chambre civile »

N° :

730-32-007511-129

 

 

 

DATE :

14 février 2014

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

YVAN NOLET, J.C.Q.

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DIANA CRAPANZANO

          

           Partie demanderesse

c.

 

HOPITAL MAISONNEUVE-ROSEMONT

          

           Partie défenderesse

c.

 

GAMBRO INC.

          

           Partie appelée

 

 

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JUGEMENT

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[1]            Diana Crapanzano réclame 7 000 $ à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont («  l'hôpital  ») en dommages pour l'installation déficiente de diverses composantes devant servir à un traitement d'hémodialyse à domicile offert par la défenderesse.

[2]            En défense, l'hôpital fait valoir que l'installation des composantes visant le programme est de la responsabilité de Gambro inc. («  Gambro  ») en vertu d'un contrat intervenu entre cette entreprise et l'hôpital. Ainsi, l'hôpital considère que si l'installation est déficiente, la responsabilité en incombe à Gambro.

LES FAITS .

[3]            Lors de l'année 2011, Madame Crapanzano est patiente de l'hôpital et y reçoit régulièrement des traitements d'hémodialyse.

[4]            L'hôpital offre un programme d'hémodialyse nocturne à domicile (le «  programme  »). Une brochure préparée par l'hôpital expose sommairement les avantages du programme et le caractère sécuritaire de ce mode de traitement.

[5]            Madame Crapanzano accepte de participer au programme et à cette fin, elle reçoit plusieurs heures de formation afin de manipuler l'équipement de dialyse en toute sécurité. Elle consent également à ce que l'installation électrique et la tuyauterie requise pour le fonctionnement de l'équipement soient installées à sa résidence.

[6]            Le rendez-vous à sa résidence est organisé par l'infirmière au programme. Deux personnes se présentent donc à son domicile afin de réaliser les travaux d'électricité et de plomberie. Or, peu de temps après ces travaux, une prise de courant du comptoir de la cuisine de la demanderesse cesse de fonctionner.

[7]            Son conjoint se rend au panneau électrique et constate que l'installation lui semble déficiente. La demanderesse en informe la représentante de l'hôpital qui propose à la demanderesse de faire vérifier l'installation électrique par un électricien indépendant et de lui transmettre la facture.

[8]            Madame Crapanzano mentionne avoir tenté à plusieurs reprises d'obtenir de l'hôpital la confirmation à l'effet que les employés de Gambro étaient des électriciens certifiés. Sans nouvelles de l'hôpital ou de Gambro à ce sujet, elle communique avec un électricien afin de faire vérifier les récentes modifications au système électrique effectuées par les employés de Gambro.

[9]            Les vérifications de l'électricien de la demanderesse sont effectuées le 9 janvier 2012. Deux représentants de Gambro sont également présents et assistent à celles-ci. L'électricien de la demanderesse conclut que l'installation électrique n'est pas conforme et que des correctifs sont nécessaires. Cet électricien a témoigné lors de l'audience et a réitéré ses conclusions.

[10]         À la suite des conclusions de son électricien, madame Crapanzano perd confiance dans le programme et s'en retire.

[11]         Madame Crapanzano réclame, dans un premier temps, les frais qui lui ont été facturés par son électricien ainsi que par un plombier qui totalisent 1 302 $. Pour ses dommages moraux, elle réclame 5 698 $.

[12]         Elle témoigne avoir subi de nombreux troubles et inconvénients à la suite de la faute des employés de Gambro. Elle fait valoir qu'elle a consacré de nombreuses heures à sa formation et tout cela, en pure perte. Elle mentionne également tout le stress et l'incertitude qu'elle a vécue à ne pas savoir si l'installation électrique serait sécuritaire et l'incidence que tout cela pourrait avoir sur le fonctionnement d'un équipement dont sa vie dépendait.

[13]         Le représentant de Gambro fait valoir que normalement, les travaux électriques des employés sont certifiés par un électricien. Or, il découle de la preuve que cette information pourtant capitale n'a jamais été communiquée à la demanderesse lors des événements.

[14]         Quant à l'hôpital, elle déplore les problèmes rencontrés par la demanderesse. Elle admet qu'elle assume la gestion du programme, mais fait valoir que ce sont les employés de Gambro qui n'ont pas fait correctement leur travail et qu'il revient donc à cette dernière d'en assumer la responsabilité.

DISCUSSION ET CONCLUSION

[15]         Lors de l'analyse des prétentions des parties, le Tribunal doit tenir compte des règles de preuve contenues au Code civil du Québec .

[16]         L'article 2803 du Code civil du Québec indique que «  Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention. […] ». Ainsi, il revient donc à la demanderesse de prouver que les travaux électriques réalisés à sa résidence dans le cadre du programme n'étaient pas conformes.

[17]         L'article 2804 du Code civil du Québec précise une règle importante qui doit guider le Tribunal dans l'analyse de la preuve présentée par les parties. Cet article précise :

2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.

[18]         Cet article consacre le principe à l'effet que dans un procès civil, la prépondérance d'une preuve concernant un fait est suffisante afin de prouver l'existence de ce fait. Le Tribunal doit donc analyser l'ensemble de la preuve en s'interrogeant sur l'existence d'une preuve prépondérante soutenant les prétentions que les parties ont fait valoir.

[19]         Lors de l'audience, la non-conformité des travaux électriques réalisés à la résidence de madame Crapanzano a été clairement démontrée. Cela a de quoi surprendre lorsque l'on sait l'usage auquel ces travaux électriques sont destinés.

[20]         L'approvisionnement sécuritaire en électricité d'un équipement médical servant à la dialyse à domicile d'un patient est une affaire sérieuse. Pour ce type d'équipement, il n'y a pas place à l'erreur et toutes les normes applicables doivent être scrupuleusement respectées. Cela requiert de l'entreprise qui assume la responsabilité de réaliser ces travaux électriques de le faire dans le respect des plus hauts standards d'excellence.

[21]         Il en découle que les irrégularités constatées par l'électricien de la demanderesse sont inacceptables et que cette situation justifie la perte de confiance de madame Crapanzano dans le programme et sa réclamation.

[22]         Le Tribunal accueille la demande à hauteur de 920,11 $ concernant ses dommages matériels reliés aux travaux électriques. Pour ce qui est de sa réclamation pour des correctifs aux travaux de plomberie, aucune preuve n'a été réalisée à l'audience permettant d'établir la non-conformité de ces travaux.

[23]         En ce qui concerne les dommages moraux de la demanderesse, ceux-ci doivent prendre en compte les événements qui ont conduit à la perte de confiance et non ceux survenus après sa décision de se retirer du programme. Dans les circonstances, le Tribunal accorde à la demanderesse une somme de 1 000 $ pour ses troubles et inconvénients.

[24]         Compte tenu que l'hôpital assume la gestion du programme, elle doit être condamnée au paiement des dommages réclamés par la demanderesse.

[25]         Toutefois, la responsabilité des problèmes rencontrés par la demanderesse revient aux employés de Gampro dont les travaux n'étaient pas conformes. Il y a donc lieu d'accueillir l'appel en garantie et de condamner Gambro inc. à rembourser à l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont les sommes dues à la demanderesse.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[26]         ACCUEILLE en partie la demande principale;

[27]         CONDAMNE l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont à payer à Diana Crapanzano la somme de 1 920,11 $ avec intérêts au taux légal de 5 % l'an, plus l'indemnité additionnelle prévue par la Loi, à compter du 15 juin 2012, ainsi que les frais judiciaires de 163 $ ;

[28]         ACCUEILLE la demande en garantie de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont contre Gambro inc.;

[29]         CONDAMNE la partie appelée Gambro inc. à rembourser à la partie défenderesse Hôpital Maisonneuve-Rosemont les sommes dues en capital, intérêts et frais, tant sur la demande principale que la demande en garantie.

 

 

 

 

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YVAN NOLET, J.C.Q.

 

 

 

 

Date d’audience :

21 novembre 2013