Bélanger c. Corbeil |
2014 QCCQ 1724 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
R ouyn-Noranda |
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LOCALITÉ DE |
R ouyn-Noranda |
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« Chambre civile » |
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N° : |
600-32-003263-134 |
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DATE : |
3 mars 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE JOSÉE BÉLANGER, J.C.Q. |
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denis bélanger, domicilié et résidant au […]à Rouyn - Noranda, district de Rouyn-Noranda (Québec) […] |
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Demandeur |
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c. |
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Serge Corbeil , domicilié et résidant au […]à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda (Québec) […] |
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Défendeur |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame du défendeur la somme de 6 522,74 $ au motif que la résidence qu'il a acquise de ce dernier est atteinte d'un vice caché.
[2] La réclamation se détaille de la façon suivante :
Détails |
Matériaux et main-d'œuvre $ |
Changer le poteau de soutien et autres |
3 108,38 |
Estimation pour la réparation de la salle de bain |
3 414,36 |
Total |
6 522,74 |
[3] Le défendeur conteste la réclamation du demandeur et allègue que la vente de l'immeuble s'est faite sans la garantie de qualité.
[4] Le Tribunal retient les faits suivants comme étant pertinents à la résolution de la question en litige.
Les faits
[5] Le 16 avril 2012, le demandeur achète du défendeur un immeuble sis au […] à Rouyn-Noranda.
[6] Quant à la garantie, on y lit ce qui suit :
« Garantie
Cette vente est faite avec garantie légale sauf et excepté celle de la qualité qui est formellement excluse (sic).
L'acquéreur déclare avoir été informé qu'il y a des infiltrations d'eau par la fondation, que la toiture a été réparé (sic) suite à (sic) dégât d'eau et que la maison nécessite des réparations en raison de son âge avancée (sic), situations qu'il accepte telles quelles. »
[7] Avant d'acquérir l'immeuble, le demandeur l'a fait examiner par un inspecteur en bâtiment.
[8] Le 26 novembre 2012, le demandeur remarque que de l'eau coule du plafond du sous-sol. Le demandeur enlève un panneau de préfini du plafond et constate que la surface est mouillée et qu'il y a de la moisissure. Il y a aussi de l'eau qui s'infiltre abondamment par les murs du sous-sol.
[9] Dans la salle de bain, il constate aussi, en enlevant les panneaux de fibre de verre autour du bain, qu'il y a de la moisissure tout autour de celui-ci ainsi que sur les murs de la pièce.
[10] L'examen de la plomberie de la résidence révèle qu'elle est inadéquate. Selon les observations du demandeur, la plomberie semble avoir été réparée à la va-vite, tantôt avec des bouts de cuivre, tantôt avec des bouts de plastique.
[11] En bref, selon le demandeur, la source du problème est attribuable à la pourriture des solives et à une plomberie déficiente.
[12] Une soumission de Construction Charpentier et Pouliot établit qu'il en coûte 3 108,38 $ en matériaux et main-d'œuvre pour changer les solives.
[13] Puisqu'il était urgent d'agir, le demandeur a fait procéder immédiatement auxdits travaux.
[14] Quant à la salle de bain, le demandeur produit une soumission au montant de 3 414,36 $ en matériaux et main-d'œuvre.
[15] Le 5 décembre 2012, le demandeur dénonce la situation au défendeur et lui donne un délai de sept jours pour agir.
[16] Le demandeur allègue que l'immeuble était atteint d'un vice caché au moment de l'achat et qu'en conséquence, le demandeur, à titre de vendeur est responsable du dommage subi.
[17] Le 12 avril 2013, le demandeur met en demeure le défendeur et lui réclame 5 000 $. À cette date, les solives sont remplacées et les travaux de la salle de bain restent à faire.
[18] Selon le défendeur, cette réclamation est mal fondée, car l'immeuble a été vendu sans la garantie de qualité. Il allègue qu'il n'était pas au courant des vices qui font l'objet de la demande.
Le droit applicable
[19]
La garantie légale comporte deux volets tel qu'on peut le lire à
l'article
« 1716. Le vendeur est tenu de délivrer le bien, et d'en garantir le droit de propriété et la qualité.
Ces garanties existent de plein droit, sans qu'il soit nécessaire de les stipuler dans le contrat de vente. »
[20]
La garantie de qualité du vendeur se retrouve à l'article
« 1726. Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.
Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert. »
[21] Si l'immeuble a été vendu avec cette garantie de qualité, l'acheteur peut se prévaloir d'un recours en vices cachés contre le vendeur aux conditions prévues par la loi, la doctrine et la jurisprudence.
[22]
Les parties peuvent aussi convenir entre elles de limiter cette garantie
ou encore de l'exclure, ce qui est expressément prévu à l'article
« 1732. Les parties peuvent, dans leur contrat, ajouter aux obligations de la garantie légale, en diminuer les effets, ou l'exclure entièrement, mais le vendeur ne peut, en aucun cas, se dégager de ses faits personnels. »
[23] Même si la garantie de qualité a été exclue, l'acheteur peut néanmoins plaider qu'il a été victime d'un vice de consentement et invoquer le dol.
[24]
L'article
« 1401. L'erreur d'une partie, provoquée par le dol de l'autre partie ou à la connaissance de celle-ci, vicie le consentement dans tous les cas où, sans cela, la partie n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions différentes.
Le dol peut résulter du silence ou d'une réticence. »
[25] Quand l'acheteur réclame sur la base du dol, il doit prouver que le vendeur avait l'intention de le tromper. Ainsi, il doit prouver la mauvaise foi du vendeur au moment de la vente.
[26] « En particulier, la mauvaise foi du vendeur lorsqu'il décrit l'état du bien, constitue un dol. » [1]
[27]
Le dol peut résulter du silence ou d'une
réticence du vendeur (article
[28] Le dol peut également être négatif. Le professeur Jeffrey Edwards le décrit ainsi [3] :
« 214.1 - Les tribunaux ont souvent reconnu que le vendeur connaissant un fait important qui pourrait influencer la décision de l’acheteur de contracter ou les conditions auxquelles l’acheteur accepterait de contracter, et sachant pertinemment que l’acheteur ignore ce fait, doit le dénoncer à l’acheteur avant la vente : faire autrement constituerait un dol négatif 489.1 . »
[29] Le professeur Edwards réitère également le principe de base lorsque l'acheteur décide de se pourvoir en dol, à savoir, qu'il « doit toujours faire la preuve de l'intention qu'avait le vendeur de le tromper. » [4]
[30]
Rappelons finalement que c'est à celui qui
veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention
(article
[31]
Enfin, la bonne foi se présume toujours à
moins que la loi n'exige expressément de la prouver (article
Analyse et décision
[32] Le Tribunal doit déterminer si la vente de l'immeuble acquis par le demandeur a été faite avec la garantie de qualité. Or pour ce faire, le Tribunal doit s'en remettre à la clause du contrat de vente qui traite de la garantie.
[33] Le Tribunal est d'avis que cette clause acceptée des deux parties exclut expressément la garantie de qualité. Le premier paragraphe de la clause précise que la vente de l'immeuble est faite avec la garantie légale « sauf et excepté celle de la qualité qui est formellement excluse (sic) ». Un deuxième paragraphe fait mention des informations qu'a reçues l'acquéreur quant à l'état de l'immeuble.
[34] La garantie de qualité étant exclue, le demandeur ne peut se prévaloir d'un recours en vices cachés.
[35] De plus, il n'y a aucune preuve de dol.
Par ces motifs, Le Tribunal :
[36] Rejette la demande;
[37] Condamne le demandeur Denis Bélanger à payer au défendeur Serge Corbeil, les frais judiciaires de 156 $.
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__________________________________ JOSÉE BÉLANGER, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
25 novembre 2013 |
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[1] Précité note 1, p. 113. La cour cite également les décisions suivantes:
Chouinard c. Lamy,
Sylvain c. Vaudreuil,
Proulx c. Bouliane,
[2] Précité note 1, p. 114. La cour cite également les décisions suivantes:
Creighton c.
Grynspan,
Dominion
Restaurant inc. c. Dominion Restaurant et Bar-B-Q. inc
.
[3] Edwards, Jeffrey. La garantie de qualité du vendeur en droit québécois . Montréal: Wilson et Lafleur, 2 e éd. 2008, p. 214.1
[4] Précité note 4, p. 215