ARBITRAGE DE GRIEF

EN VERTU DU CODE DU TRAVAIL DU QUÉBEC (L.R.Q., c. C-27)

 

N o de dépôt : 2014-2050

 

ENTRE :

COMMISSION SCOLAIRE DE MONTRÉAL

 

 

L’ « EMPLOYEUR »

 

 

ET :

ALLIANCE DES PROFESSEURES ET PROFESSEURS DE MONTRÉAL

 

 

LE « SYNDICAT »

 

 

ET :                  MADAME C G

 

                                                                            LA « PLAIGNANTE »

 

 

GRIEF NO : 2010-0000383-5152 - Harcèlement-Suspension

 

 

 

SENTENCE

 

 

 

Tribunal :

M. Paul Charlebois, arbitre

 

Comparution pour l’Employeur :

M e Pierre Bégin

 

Comparution pour le Syndicat :

M e Chantal Poirier

 

Lieu de l’audience :

Montréal

 

 

Dates des audiences :                                  5 juin et 5 octobre 2009, 13 janvier, 10 février,       

                                                                     15mars, 16 mars, 9 avril et 3 novembre 2010

 

Dates du dépôt des plaidoiries :                   19 et 25 janvier 2011  

 

Date de la sentence :                                    27 décembre 2013

 

 

 

MXR 904-673-QED

I.              INTRODUCTION

 

[1]           Le Tribunal est saisi du grief no 2010-0383-5152, déposé par l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal contre l’Employeur, la Commission scolaire de Montréal.

[2]           Le grief, en date du 15 juin 2007, pièce S-2 , est, après amendement, ainsi libellé :

                        « Conformément aux clauses 9-1.03 et suivantes de l’entente nationale en vigueur, l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal donne avis à la Commission scolaire de Montréal du présent grief.

                        Sans limiter la généralité du présent avis, les faits principaux à son origine sont, à titre indicatif les suivants :

                        Le ou vers le 1 er mai 2007, la Commission scolaire avisait madame C G qu’elle a eu une conduite harcelante à l’égard de quatre personnes de l’école M-F.

                        Le ou vers le 8 mai 2007, madame G était suspendue avec solde pour une durée indéterminée par monsieur Robert Mathieu, directeur des établissements du Réseau Ouest de la CSDM.

                        L’Alliance des professeures et professeurs de Montréal estime que la décision de la Commission scolaire de conclure à une conduite de harcèlement psychologique de la part de madame C G à l’égard de 4 membres du personnel de l’école M-F est non fondée en faits et en droit.

                        Les correctifs requis sont les suivants et si la Commission scolaire ne s’y conforme pas, il sera demandé à l’arbitre de grief de :

1)      Annuler la décision de la Commission du 1 er mai 2007;

2)      Déclarer qu’il n’y a pas eu de harcèlement psychologique de la part de madame C G à l’égard des 4 personnes mentionnées dans la lettre de la Commission scolaire;

3)      Condamner la Commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer pour atteinte à ses droits fondamentaux;

4)      Condamner la Commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer pour compenser le stress et les inconvénients découlant de la décision du     1 er mai 2007 et des mesures prises à son égard;

5)      Condamner la Commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer à titre de dommages exemplaires;

6)      Ajouter les intérêts et l’indemnité prévus au Code du travail, à toute somme versée à madame C G. »


[3]           Le grief réfère aux lettres de l’Employeur en date du 1 er mai 2007, pièce S-4 , et du 8 mai 2007, pièce E-3 . Elles sont ainsi libellées :

-        En date du 1 er mai 2007 :

« Madame,

Faisant suite à la plainte que plusieurs collègues ont logée à votre endroit, la pré-sente a pour but de vous faire part des résultats de l’enquête effectuée en vertu de la Politique contre toute forme de violence ou de harcèlement au travail (P-2003-1)

Tel que mentionné dans la Politique, un comité ad hoc a été formé pour étudier la plainte et procéder à l’enquête. Les membres du comité ont analysé les faits reprochés en regard des critères énoncés dans la Politique.

Après avoir rencontré les personnes concernées ainsi que les témoins des faits et avoir procédé à un examen minutieux des informations recueillies, l’enquête a permis de conclure que vous avez eu une conduite harcelante à l’égard des personnes suivantes : Madame L J, madame J H, monsieur L G et madame S L notamment en ayant tenu des commentaires déplacés, en ayant une conduite intimidante, provocatrice et agressive envers vos collègues et en engendrant un milieu de travail néfaste.

En conséquence, vous êtes invitée à une rencontre au Service des ressources humaines le 1 er mai à 14h afin de rencontrer M e Marie-Pierre Renaud, enquêtrice et madame Sylvie Rivet qui vous présenteront les résultats de l’enquête. Vous pouvez être accompagnée par votre syndicat si vous le désirez. »

-        En date du 8 mai 2007 :

« Madame,

Nous avons été informés par le Service des ressources humaines des conclusions retenues par le comité ad hoc formé pour étudier la plainte de harcèlement psychologique logée à votre endroit par plusieurs de vos collègues. Considérant la nature de ces conclusions, nous vous demandons, par la présente, de rester chez vous jusqu’à nouvel ordre afin de nous permettre de procéder à l’analyse de la situation dans son ensemble. Une fois cette analyse terminée, nous vous convoquerons afin de vous faire part de nos orientations.

Veuillez prendre note que cette mesure n’est pas une mesure disciplinaire. Il ne s’agit que d’une mesure administrative provisoire. Par conséquent, vous continuerez de percevoir votre salaire. Nous vous demandons cependant de rester disponible au cours de cette période. »

[4]        Les parties ont convenu que le Syndicat présenterait sa preuve en premier sans qu’il y ait admission quant au fardeau de la preuve.

[5]        À la demande des parties, les intervenants ne seront identifiés que par leurs initiales.

[6]        Les parties ont reconnu que le Tribunal est valablement saisi du grief et n’ont soulevé aucune objection quant à la procédure suivie.

 

 

II.         RÉSUMÉ DES FAITS PERTINENTS

 

[7]        En plus de déposer 23 pièces énumérées à l’Annexe I, le Syndicat a présenté les témoins suivants :

            Madame J B , directrice de l’école, Mme L P-B, secrétaire, M e Marie-Pierre Renaud, enquêteur, Mme M-L B, déléguée syndicale, Mme Emond, conseillère syndicale, Mmes SL, JH et LJ, enseignantes et M. LG, enseignant et responsable d’école et Mme CG, enseignante et Plaignante.

            L’Employeur n’a pas présenté de nouveaux témoins et a déposé quatre (4) pièces énumérées à l’Annexe I

[8]        En date du 1 er mai 2007, l’Employeur conclut que Mme CG a eu « une conduite harcelante à l’égard des personnes suivantes : Mme L J, Mme J H, M. L G et Mme S L notamment en ayant tenu des commentaires déplacés, en ayant une conduite intimidante, provocatrice et agressive envers vos collègues et en engendrant un milieu de travail néfaste. » Mme CG était par la suite suspendue avec solde, à titre de mesure administrative provisoire.

[9]        Compte tenu du grief déposé par le Syndicat à cet effet, en date du 15 juin 2007, le Tribunal retient plus particulièrement les allégations relatives à Mmes S L, J H et L J et à M. L G parmi les 48 allégations, pièce S-6 , qui ont été considérées par l’enquêteur, M e Renaud, qui sont citées au long à l’Annexe III et qui ont été soumises au Tribunal.

[10]     Tel qu’il appert du rapport de l’enquêteur, pièce S-17, son mandat était « de recueillir les informations et de déterminer les circonstances entourant les plaintes de harcèlement formulées envers CG par dix-neuf (19) membres du personnel de l’école M-F de la CSDM »

[11]     L’ensemble de la preuve et des témoignages s’est articulé  autour de ces 48 allégations.

[12]     Toutefois,  après avoir présenté le contexte, nous ne traiterons que des 22 allégations retenues dans les considérations globales du rapport de l’enquêteur et qui  ne concernent que SL, LJ, JH et LG.

[13]     Les 26 autres allégations (voir paragraphe 343 de l’Annexe IV) « sont considérées non fondées parce qu’elles ne rencontrent pas l’ensemble des critères de la définition de harcèlement, parce qu’essentiellement, la conduite n’a pas été répétée envers la même personne, ou encore, parce que la personne victime de la conduite n’a pas porté plainte envers la mise en cause. »

[14]     En conséquence, le Tribunal s’attardera plus particulièrement aux allégations relatives à SL, LJ, JH et LG.


LE CONTEXTE

 

[15]     À l’emploi de la CSDM depuis 1984, dont deux ans à titre de suppléante et environ 20 ans à l’école Iona, CG arrive à l’école M-F à l’automne 2006. CG est suspendue avec traitement à compter du 8 mai 2007. Après sa suspension, CG est affectée à l’École Jeanne-Leber jusqu’en septembre 2009, alors qu’elle est affectée à l’école Charles-Lemoyne depuis cette date.

[16]     L’école M-F a ouvert ses portes à l’automne 2004 et la directrice en est JB. Selon MLB, déléguée syndicale, il existe à cette école un « noyau » de membres du personnel, comprenant LG, MB, MCA, JH, ST, LJ, SL, TL, LPB, JD, ED, MG, GD et PC qui constituent la majorité du personnel de l’école.

[17]     Du témoignage de CG, des pièces produites et des autres témoins entendus, il ressort que CG ne cadre pas avec le reste de l’équipe. Son caractère, sa personnalité, son attitude ne sont pas appréciées : LPB lui trouve des réactions différentes et inattendues, LJ ne lui parlait pas et n’était pas attirée par CG, elle la trouvait raide quand elle parlait et la trouvait bizarre etc.

[18]     Le 29 septembre 2006, la directrice JB fait état de plusieurs évènements relatifs à CG depuis son arrivée à l’école M-F, du 24 août au 28 septembre 2006. On en retrouve 13 notés par la directrice à compter du 11 septembre 2006,  à partir des rapports du personnel enseignant et dont certains indiquent même l’heure des incidents.

[19]     La directrice JB a tenu un registre de tous les évènements qui lui ont été signalés ou qui ont eu lieu pour la période du 24 août 2006 au 17 janvier 2007, pièce S-8 .

[20]     L’ensemble des 48 allégations de l’Annexe III sont une bonne illustration de ce qui est rapporté par les enseignantes et noté par la directrice.

[21]     La directrice JB est absente pour maladie du 11 décembre 2006 au 8 janvier 2007.

[22]     CG s’absente du travail à compter du 21 décembre 2006 jusqu’au 19 janvier 2007, CG alléguait au début avoir fait un AVC pour indiquer par la suite qu’il s’agissait d’une migraine. Le 16 janvier 2007, la directrice JB est informée que « sa demande au bureau de santé afin que CG aille en expertise psychiatrique, suite à son  message et aux évènements de l’année, n’est pas retenue. »

[23]     Le 21 décembre2006, LJ dépose une plainte, pièce S-16 , visant CG dont l’attitude et le comportement envers elle et d’autres enseignantes sont inacceptables : violence verbale, provocation, intimidation et harcèlement, Les allégations sous-tendant cette plainte sont détaillées en annexe de la pièce S-16 , pièce S-15 .

[24]     Le 22 décembre 2006, JH dépose une plainte, pièce S-14 , à l’endroit de CG alléguant les éléments suivants :

                        - regards menaçants et intimidants

                        - menaces non voilées à la suite de sa dénonciation à la direction (doigt                    pointé et menaces verbales)

                        - paroles à son endroit à la troisième personne, même si elle est présente.

[25]     L’ensemble des évènements et des allégations ont culminé le 17 janvier 2007 en une pétition, pièce S-11 , signée par l’ensemble du personnel de l’école M-F, faisant état d’un climat de tension qui s’est accentué au cours du congé de  maladie de la directrice JB. Selon cette pétition, la détérioration du climat de travail existe depuis l’arrivée de CG à l’école: commentaires insultants, calomnies de certaines personnes, intimidation allant jusqu’à des menaces. La pétition indique que CG harcèle de façon subtile certains membres du personnel, très souvent de façon non verbale en s’assoyant près de la personne et en la fixant longtemps. Selon les signataires de la pétition, cette situation a dégénéré à un point tel que le rendement et le moral du personnel en est  affecté et les signataires  réclament des mesures pour leur permettre de jouir d’un milieu de travail sans harcèlement.

 

CAS DE LG

 

[26]     Les allégations 3 et 4, annexe III, réfèrent à LG.

[27]     Pour l’allégation 3, LG cherche une affiche sur les Monarques, qui se retrouve sur la porte de classe de CG. Il en informe la direction qui devrait en informer CG.    LG précise : « Il n’y a aucune raison pour ne pas avoir demandé à CG directement plutôt que de parler directement à la direction. »

[28]     À la question soulevée par l’allégation 4, les enseignantes se sentent mal à l’aise et ont rapporté cela à la directrice JB. LG indique qu’il n’était pas présent à ce dîner de la semaine du 11 septembre 2006 et         que lorsqu’il l’a appris il n’y a pas donné suite et n’en a pas parlé à CG. Selon CG, son questionnement ne visait qu’à mieux connaître les membres du personnel, parce qu’elle ne connaissait personne; informée que Luc ne voulait pas parler de sa vie privée, ça s’arrête là.

 

CAS DE SL

 

[29]     Les allégations 7 et 8 concernent SL.

[30]     SL ayant rapporté l’incident 7, cela a donné lieu à l’allégation 8 où CG n’ayant pas apprécié que SL ait rapporté cet incident à la directrice, SL s’est sentie menacée et CG s’est mise en colère. SL et CG se sont rencontrées au bureau de JB et SL « ne se rappelle pas comment ça s’est terminé. Après trois ans, j’étais un peu moins fâchée. » De son côté, CG soutient qu’elle n’a pas dit ce qui se trouve à l’allégation 8 mais plutôt qu’elle n’avait pas apprécié qu’elle soit allée le rapporter à la directrice. CG indique qu’elle n’était ni agressive ni menaçante mais qu’elle avait un ton direct, moyenne-ment élevé, Elle voulait seulement faire valoir son point de vue de façon directe.

 

CAS DE JH

 

[31]     Les allégations 13, 14, 31, 35, 36, 38 et 39 impliquent JH.

[32]     Les allégations 13 et 14 concernent un incident relatif à une élève qui a perdu son collant (d'éducation physique) et qui pleure. CG va voir l’élève et demande à une autre si elle voulait bien lui donner son collant. Comme elle a dit oui, elle lui rend son collant. CG voulait seulement que l’élève cesse de pleurer. JH indique à CG qu’elle n’a pas apprécié qu’elle se mêle de sa gestion de classe, puisqu’il s’agit de sa classe, tandis que CG lui dit qu’elle voulait seulement consoler l’élève.

[33]     Selon JH, elles n’étaient pas d’accord sur un sujet et selon elle, l’évènement était fini. Selon CG, ça s’est terminé normalement, elles se sont expliquées et personne ne s’est excusé.

[34]     L’allégation 31 réfère à un incident qui a lieu le 13 décembre 2007 dans la salle des professeurs. Selon JH, CG parle fort en disant que LJ ne devrait pas s’occuper de la pizza, et que LJ a une attitude cavalière, qu’elle manque de savoir-vivre et qu’elle ne se laisserait pas parler comme ça. CG ne parle à personne en particulier. Selon JH, elle lui demande d’arrêter  : « C’est assez » sur un ton assez poli, selon son souvenir. CG s’est mise à lui crier en lui disant qu’elle ne lui parlait pas. CG lui a dit qu’elle n’avait pas à lui dire quoi faire. Selon CG, elle considère qu’elle était en droit de dire ce qu’elle pensait, qu’elle était nerveuse et qu’elle aurait eu besoin que quelqu’un l’aide.

[35]     LG arrive à la salle des professeurs et constate que CG semble parler à tout le monde. Il sait que CG en veut à des personnes. CG était assise dans un coin et les autres étaient autour de la table. LG va lui parler et essaie de savoir ce qui se passe. CG lui dit que ça ne va pas et qu’elle veut en parler. Selon LG, il s’agit du conflit avec LJ relatif à la pizza. (allégation 30)

[36]     Alors que le spectacle de Noël est organisé par LD, une discussion à la salle des professeurs entre JH et LD a lieu le 18 décembre 2006 sur la problématique relative aux micros et à la qualité des équipements. C’est alors que CG intervient et lui demande si elle (JH) fait partie du comité organisateur du spectacle pour ne pas se mêler de ses affaires. La réaction est alors venue de MB qui se lève et dit  : « Tu voulais me la faire péter ma coche, tu me la fais péter… Je suis écoeurée de dîner ici ! »       CG n’a pas réagi à la sortie de MB et par la suite elle a quitté,  tandis que JH essayait de lui expliquer qu’elle s’en mêlait parce qu’elle avait essayé le matin même d’aider LD avec son problème de micros. Une demi-heure plus tard JH raconte à LG ce qui s’est passé.

[37]     Ce même jour, après la récréation, CG interpelle JH en présence de ses élèves qui sont en période d’éducation physique et lui indique que si elle a un problème à régler, de le faire avec elle et non d’aller voir  LG. L’une et l’autre confirment la teneur de l’allégation 36 tandis que CG précise que les élèves étaient dans le gymnase et que JH était près de la porte. Selon CG, les élèves n’entendaient pas ce qu’elle disait.

[38]     Le lendemain, 19 décembre 2006, (allégation 38), alors que JH lave la vaisselle, seule dans la cuisine, CG, selon JH, est allée la voir et lui a dit, à deux reprises, avec un doigt menaçant, avec en sous-entendu qu’il allait lui arriver quelque chose : « Je ne veux plus que tu ailles à la directrice. » CG, de son côté, précise qu’elle lui a dit cela mais sans le doigt menaçant. Elle ne pense pas lui avoir dit deux fois.

[39]     Quant à l’allégation 39, que JH situe à la récréation de 14h45, le 19 décembre 2006, CG en nie même l’existence en soumettant qu’elle n’a jamais dit ça et que ça ne s’est jamais passé. Elle ne pense pas qu’en décembre elle aurait parlé d’un évènement qui était arrivé en octobre 2006.

 

CAS DE LJ

 

[40]     LJ est visée par les allégations 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 29, 30, 31, 34, 37 et 43.

[41]     Lors de son témoignage, LJ indique, en relation avec l’allégation 21, qu’à la fin octobre 2006, elle fait le ménage seule mais qu’elle ne reproche pas à GD de ne pas être là parce qu’elle n’utilisait pas le salon et ne le salissait pas et qu’elle n’a pas rappelé à CG qu’elle devait faire le ménage parce qu’elle ne lui parlait pas. « Je n’étais pas attirée par cette personne. » CG, de son côté indique qu’elle avait oublié. CG a constaté que LJ la dévisageait avec des yeux méchants, s’est demandée ce qu’elle avait et est allée voir la liste. CG n’a pas osé aller voir LJ dans l’état où elle était. La semaine suivante, LJ lui a crié dans le corridor : « quand ton nom est écrit gros de même pour faire le ménage, t’as d’affaire à le faire. » CG ajoute qu’elle ne s’est jamais fait parler de cette façon en milieu de travail et qu’elle lui a demandé de venir en parler dans sa classe. LJ a refusé.

[42]     En regard de l’allégation 22, LJ précise qu’en novembre 2006, CG s’assoit à côté d’elle et s’insère dans la conversation qu’elle a avec trois autres enseignantes et qu’elle la coupe pour faire dévier la conversation. Elle la trouve envahissante. C’est son interprétation. Cet incident n’est arrivé qu’une seule fois. CG, de son côté, indique qu’elle a parlé du problème qu’elle avait avec LJ parce qu’elle voulait avoir des solutions. Elle avait essayé d’en parler à LJ à deux reprises à l’intérieur du mois.

[43]     Quant à l’allégation 23, CG indique qu’elle avait un ton peut-être désagréable mais pas agressif. Elle l’a dit sèchement et ne se souvient pas de la réaction de LJ.

[44]     En ce même jour du 8 décembre 2006 à l’heure du dîner, alors que CG lui demande, selon LJ, de façon agressive « de cesser de siffler quand tu passes devant ma classe parce que ça me tombe sur les nerfs » , elle lui répond sur un ton affirmatif qu’elle sifflerait quand ça lui tenterait. LJ ne regardait pas si sa porte était ouverte. CG indique qu’elle avait fait cette demande à LJ parce qu’un de ses élèves lui demandait pourquoi les enseignants avaient le droit de siffler et pas lui.

[45]     Toujours sur l’heure du dîner du 8 décembre 2006, CG interpelle LJ selon les termes de l’allégation 25 parce qu’elle était exaspérée et qu’elle sentait que tout le monde était contre elle et que tout était rapporté à la directrice JB. C’est d’ailleurs ce qu’a fait LJ et la directrice JB lui a dit qu’elle voulait que ces choses-là se règlent.

[46]     CG et LJ sont d’accord avec le contenu de l’allégation 26, relative au 11 décembre 2006.

[47]     Selon la directrice JB, la rencontre du 11 décembre (allégation 27) avec CG et LJ, était houleuse. Selon la directrice JB, lors de la rencontre LJ a admis avoir sifflé et chanté en passant devant la classe de CG. Elle lui a fait part que c’était irrespectueux envers ceux qui enseignent. CG ne niait pas les propos mais disait que LJ l’avait poussée à bout. Le ton de la voix des deux enseignantes était assez émotif. Elles se sentent toutes les deux persécutées et s’accusent de harcèlement. La directrice JB met un terme à la discussion en leur demandant de ne plus se parler et d’éviter tout contact. CG et LJ sont d’accord.

[48]     Les 11 et 12 décembre 2006, allégation 29, selon LJ, CG ne lui parlait plus mais n’arrêtait pas de la fixer de façon agressive. Selon CG, elle ne se souvient pas de l’avoir fait de façon agressive mais qu’elle se demandait pourquoi elles ne pouvaient pas arriver à une entente.

[49]     En référence à l’allégation 30, relative au dîner-pizza du 13 décembre 2006, LJ ajoute que CG a quitté vers 11h30 et est revenue à 12h25 et a remis l’argent à SL. Selon LJ, CG fait exprès. Personne ne lui a demandé pourquoi elle donnait l’argent tard. LJ ne savait pas où CG était allée. Selon LJ, CG la fixait toujours de façon agressive depuis trois jours.

[50]     De son côté, CG explique qu’elle a tenté d’aller dîner chez elle parce qu’elle n’avait plus de plaisir à dîner à la salle des professeurs. Elle part donc le plus rapidement possible et oublie de donner l’argent pour la pizza. À son retour elle donne l’argent à SL parce que la directrice JB leur avait demandé de s’ignorer et que CG voulait le moins de contact possible avec LJ. Comme SL aidait LJ, CG a remis l’argent à SL. Ce sur quoi LJ s’est enflammée et s’est écriée que CG faisait exprès de remettre l’argent en retard.

[51]     Selon SL, qui ne se souvient pas si la commande de pizza avait été passée, LJ a dit à CG qu’il était trop tard. Par la suite, il y a  eu une engueulade entre LJ et CG. SL ne sait pas qui a dit quoi avant et LJ a ensuite dit À CG : « Pourquoi tu me fixes? Arrête de me regarder. » CG s’est levée et est allée à la cuisine pour ensuite se rendre dans sa classe. MB qui est aussi présente à ce moment-là corrobore le témoignage de SL. Elle ajoute toutefois que ça peut arriver que des professeurs oublient que l’argent doit être remis au début du dîner pour que la commande soit passée à la fin du dîner.

[52]     Selon LG qui était présent à compter de 12h25, CG remet l’argent à SL et par la suite LJ et CG se dévisageaient mais, selon sa perception, le regard de CG était plus persistant et LJ lui demande d’arrêter de la regarder sur un ton sec. LJ décide de s’en aller. Elle était frustrée.

[53]     Selon JH, il manque entre autres l’argent de CG et LJ est fâchée parce qu’il manque l’argent de CG. JH ne sait pas ce qui en est pour les autres. LJ avait le ton d’une personne non contente. Quand elle a parlé, elle s’adressait à tous ceux qui étaient autour de la table. CG a remis l’argent à 11h29. CG et LJ se parlaient fort mais JH n’a aucune idée de ce qu’elles se disaient parce quelle était à l’autre bout de la table et qu’elle n’a rien entendu. Selon JH, CG et JL ne s’entendaient pas. Elle en avait eu des échos avant et elle dit à JL de laisser tomber parce que ça ne vaut pas la peine.

[54]     L’allégation 31 réfère à la suite des évènements du 13 décembre 2006. Selon JL CG joue à la victime. Quand elle lui a dit : «Toi, tu vas arrêter de me fixer » , CG est partie voir G sur le divan et JL a quitté. Selon CG, G, lui ayant fait signe de s’asseoir à coté de lui, elle s’y rend. CG était hors d’elle de s’être fait parler de cette façon. JH a parlé fort et a dit; « Arrête, c’est assez » ; ce à quoi CG a répondu qu’elle avait le droit de dire ce qu’elle pense. Quand LG est arrivé, CG lui a raconté ce qui venait de se passer et celui-ci l’a écoutée.

[55]     Selon LG, CG n’avait pas l’air de s’adresser à G puisqu’il continuait à lire son journal. LG essaie de savoir ce qui se passe et CG lui dit que ça ne va pas et qu’elle veut lui en parler. Selon LG, il croit que le conflit est avec LJ parce qu’il a été témoin de l’incident relatif à la pizza.

[56]     Selon JH, CG va sur le divan, elle parle fort en disant que LJ ne devrait pas s’occuper de la pizza parce que ça la stresse trop. Quand JH lui demande d’arrêter, selon elle, sur un ton assez poli, CG lui a crié qu’elle ne lui parlait pas et que ce n’était pas à elle de lui dire quoi faire. Après l’arrivée de LG qui a joué le rôle de tampon entre CG et JH, JH finit par dire à CG de régler son problème avec LJ parce qu’Il faut que ça arrête. JH a aussi eu écho que LJ et CG étaient en désaccord sur une question de ménage, LJ lui avait rapporté des problèmes et le fait que CG l’avait traitée de folle.

[57]     Lors de la journée pédagogique du 25 décembre 2006, allégation 34, avant le dîner de Noël du personnel, environ une dizaine de personnes se trouvent dans la cuisine, CG passe derrière LJ, selon LJ, et l’accroche assez pour la déstabiliser. Rien n’est dit. Selon CG, elle n’a pas repris de façon ridicule et infantile la chanson que fredonnait LJ. À son avis, elle n’a pas bousculé LJ mais il est possible qu’elle l’ait touchée en passant mais ne l’a pas bousculée volontairement.

[58]     Le 18 décembre 2006, allégation 37, alors qu’il y a beaucoup d’enfants dans le corridor, selon LJ, MLB demande à ses élèves de se tasser du côté des casiers tandis que CG ne fait rien et reste au milieu du corridor. LJ lui a accroché le bras en passant. Il n’y a pas d’échange verbal. CG ne se souvient pas de ça.

[59]     La version de MLB diffère de celle de LJ. MLB demande à ses élèves de se  tasser. CG est en plein milieu du corridor et LJ lui  dit : « Pousse-toi » Son ton n’est pas tout à fait agréable, c’est comme un ordre. LJ a parlé fort pour pouvoir passer. CG s’est tassée un peu, les bras croisés et la foudroyait du regard. Le ton a monté entre les deux. MLB ne se souvient pas si LJ a accroché CG.

[60]     Le 29 décembre 2006, vers 7h20, allégation 43, LJ demande à MLB, représentante syndicale, pour lui parler d’un problème qu’elle vit à l’école avec CG. Selon LJ, elle dit à CG : « Tu vas sortir de ma classe » . Elle est restée dans la porte. LJ n’écoutait pas ce que CG disait. Elle ne voulait pas que CG lui parle. MLB l’a invitée à sortir et CG est sortie. LJ trouvait CG raide quand elle lui parlait. Elle la trouvait bizarre, ce n’était pas une personne avec laquelle elle pouvait s’entendre.

[61]     Selon MLB, rendue dans la classe de LJ, celle-ci lui explique qu’elle se sent harcelée et lui demande quels sont ses droits. La porte du local est fermée, CG entre et les invective. L’agressivité montait de façon malsaine d’un côté comme de l’autre et MLB s’est placée entre les deux.

[62]     Selon CG, elle n’est pas entrée dans la classe, elle était sur le seuil et la porte était ouverte. CG voulait demander, suite à l’incident de la pizza à LJ de cesser de lui parler comme ça et de prendre MLB à témoin lui convenait. Elle soutient qu’elle avait un ton catégorique mais qu’elle ne lui criait pas après. À son souvenir, c’est LJ qui lui a demandé de sortir.

 

III         PLAIDOIRIES

 

SYNDICAT

 

[63]     Les parties ayant convenu que le Syndicat présenterait sa preuve en premier sans qu’il y ait admission quant au fardeau de preuve, la procureure du Syndicat soutient que le fardeau de preuve incombe à l’Employeur. Elle se réfère à la décision SAE 7958 de l’arbitre Rodrigue Blouin qui souligne  : « Le fardeau de la preuve repose sur la personne qui allègue harcèlement psychologique et elle doit convaincre le Tribunal selon la prépondérance de preuve. » Dans le présent cas, c’est l’Employeur, qui, par ses décisions des 1 er et 8 mai 2007 conclut à une conduite harcelante de CG à l’égard de LJ, JH, LG et SL. Il revient donc à l’Employeur d’assumer le fardeau de preuve et non à l’employée qui conteste la décision de l’Employeur.

 

LE CONTEXTE

 

[64]     Du contexte dans lequel se sont produits les gestes reprochés à CG, le Syndicat retient diverses composantes qui éclairent différemment l’ensemble du dossier.

-           Au cours de l’année 2006-2007, CG est une nouvelle enseignante à l’école M-F. Elle n’y connaissait personne;

-           Il existe à l’école M-F un « noyau » de membres du personnel depuis l’ouverture de cette école;

-           Il existe des réticences à l’égard de CG depuis son arrivée à l’école;

-           Le caractère et la personnalité de CG ne sont pas appréciés par ses collègues; il y a une intolérance à son égard qui ne facilite pas son intégration;

-           Dès le 11 septembre 2006, soit à peine deux semaines après la rentrée scolaire, la directrice JB compile des notes, rétroactives au 24 août 2006, pièce S-8 ;

-           Plusieurs allégations de l’annexe III font état du fait que tout ce que CG fait ou dit est rapporté à la direction ou discuté, ou est interprété négativement ou associé à une intention malveillante;

-           Les explications de CG sont toutes jugées négativement par la direction de l’école, pièce S-7 ;

-           Un traitement différent de celui consenti aux autres enseignantes et réservé à CG;

-           La directrice JB est sceptique à l’égard de la maladie de CG et suggère même qu’elle fasse l’objet d’une expertise psychiatrique, pièce S-8 ;

-           La tension monte et CG se sent rejetée;

-           C’est sur cette toile de fond qu’est déposée la plainte collective, pièce S-11 , et que l’enquête demandée ne porte pas seulement sur une situation de harcèlement psychologique, mais sur la conduite et la prestation générale de CG, pièce S-17 .

[65]     Considérant que l’Employeur dans ses lettres des 1 er et 8 mai 2007 a fait son lit quant au harcèlement psychologique, la procureure du Syndicat allègue que la seule question en litige est de savoir si CG est responsable de harcèlement psychologique à l’égard de SL, LG, JH et LJ.

[66]     Selon la procureure, la grille d’analyse que le Tribunal doit retenir est celle basée sur la définition de harcèlement psychologique introduite par le législateur en 2004 dans la loi sur les normes du travail à l’article 81.18 :

« 81.18 Pour l’application de la présente loi, on entend par « harcèlement psychologique » une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste.

Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour le salarié. »

[67]     À la lumière de cette grille d’analyse et de celle de la jurisprudence présentée, la procureure du Syndicat présente ensuite son analyse de la preuve administrée sur le harcèlement psychologique.

 

CAS DE LG

 

[68]     Dans le cas de LG, on retrouve deux évènements, qui se situent en septembre 2006. L’allégation 3 concerne l’affiche des monarques que CG reconnaît avoir prise par mégarde. Il ne s’agit pas d’un geste hostile, il n’y a pas non plus de conduite vexatoire qui puisse blesser ou humilier quelqu’un dans son amour-propre. LG n’en fait pas état et n’en parle pas à CG.

            L’allégation 4 réfère aux questions posées par CG à une tierce personne quant au statut marital de LG. Là encore il n’y a pas atteinte à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychologique de LG et celui-ci n’est pas davantage blessé dans son amour-propre. Ce comportement n’est ni vexatoire ni répété et LG n’en fait pas état ni n’en a parlé à CG.

            Pour LG, on se retrouve avec deux comportements uniques qui ont seulement lieu en septembre et qui ne sont pas répétés. En conséquence, selon les termes de la définition de harcèlement psychologique et de la jurisprudence déposée, il n’y a pas de milieu de travail néfaste et donc de harcèlement psychologique dans ce cas.

 

CAS DE SL

 

[69]     Selon la procureure du Syndicat, il y a ici deux allégations, 7 et 8, mais qui réfèrent à un seul évènement, soit l’allégation 8. Selon la définition de harcèlement applicable dans ce cas, il faut que l’élément soit objectivement grave, d’une gravité exceptionnelle et qui comporte un effet nocif continu causé par l’évènement. Selon la preuve présentée, aucune de ces trois conditions ne se trouve  dans le cas de SL. Il s’agit donc d’un évènement ponctuel qui ne correspond pas à la définition applicable pour un évènement unique de harcèlement.

 

CAS DE JH

 

[70]     Les allégations 13 et 14 qui se situent en octobre 2006, sont reliées entre elles, la première faisant état de l’auto-collant de l’élève et la seconde de la confrontation de JH avec CG. Selon le témoignage de JH, il s’agissait d’une simple chicane entre deux enseignantes. JH et CG n’étaient pas d’accord sur un sujet et pour JH l’évènement était fini et chacune a gardé son point. C’était un geste isolé et JH elle-même considère que ce n’était pas vexatoire.

[71]     En décembre 2006, sur une période de six jours qui va du 13 au 19 décembre en passant par le 18, il y a d’abord le 13 décembre une altercation bilatérale entre CG et JH suite à des commentaires de CG sur LJ à l’effet que « LJ a une attitude cavalière, qu’elle manque de savoir-vivre et qu’elle (CG) ne se laissera pas parler comme cela. » alors que JH rétorque :        « Arrête, c’est assez. »

Le 18 décembre 2006, nouvelle altercation entre CG et JH en relation avec les problèmes de micros pour le spectacle de Noël, incident que JH a rapporté à LG (responsable d’école) et qui a donné lieu à une intervention de CG dans la classe de JH suivi d’un autre incident le 19 décembre 2006 alors que CG lui dit qu’elle ne voulait pas qu’elle rapporte leurs conversations à la direction. Dans ce dernier cas, les versions divergent, alors que JH parle de doigt menaçant, CG le nie.

On se retrouve donc avec 4 évènements sur trois jours, il n’y en a pas eu avant et  il n’y en a pas après. Selon la procureure du Syndicat, au sens de la définition applicable et de la jurisprudence, il n’y a pas de répétition suffisante pour pouvoir parler de harcèlement psychologique.

 

CAS DE LJ

 

[72]     Pour qu’il y ait harcèlement psychologique il faut qu’une personne en harcèle une autre. Si on se retrouve avec la participation de deux personnes qui s’asticotent l’une l’autre, il s’agit alors d’un problème de communication ou de personnalité et non de harcèlement psychologique. La limite du harcèlement psychologique c’est le conflit interpersonnel. Dès la première rencontre que LJ situe en septembre 2006, alors qu’elles ne se connaissent pas, à la question de CG : «Quand passe-t-on pour la photo d’école?» LJ lui répond sur le même ton : « Regarde sur la feuille sur le mur.» C’est là leur premier bonjour.

[73]     En regard des allégations 21 et 22 : LJ n’aime pas le tempérament de CG, elle ne s’adresse pas à elle, elle ne lui parlait pas parce qu’elle n’était pas attirée par cette personne. LJ ne mentionne pas de propos de victime ou de personne harcelée. Elle se comporte comme une personne en conflit et ça finit là.

[74]     L’allégation 24 fait aussi état qu’elles se répondent l’une l’autre, mais elles n’ont pas la même version des faits.

[75]     L’allégation 25, alors que CG est à bout, elle explose et traite LJ de folle et de caractérielle. CG attaque LJ mais il faut tenir compte de l’approche globale et de la trame qui existe entre les deux.

[76]     L’incident de l’allégation 24 connaît son dénouement au bureau de la directrice JB, qui décrit le comportement de CG et de LJ de la façon suivante:

« - Le ton de voix des deux enseignantes était émotif, elles se sentaient toutes deux persécutées et s’accusent de harcèlement.

   - C’était houleux de part et d’autre. Je mets un terme à la discussion en leur demandant de ne plus se parler et d’éviter tout contact. Elles sont d’accord et sortent de mon bureau. »

[77]     CG ne parle pas à LJ mais la regarde de façon agressive ce que nie CG.

[78]     Et le conflit perdure entre CG et LJ que ce soit au sujet de la pizza ou des regards. En regard de l’allégation 30, LG relate l’évènement en indiquant : « LJ et CG se dévisageaient mais plus CG. LJ n’apprécie pas son regard et lui demande d’arrêter de la regarder sur un ton sec. Ça ne change pas. Le regard de CG est plus persistant. C’est ma perception. »

            JH relate l’’incident ainsi : « LJ est fâchée, elle n’a pas l’argent de CG. Ça retarde son travail. Elle avait un ton pas contente. Quand elle a parlé, elle s’adressait à tous ceux autour de la table. CG et LJ se parlaient fort. J’ai aucune idée de ce qu’elles disaient. J’étais à l’autre bout de la table et je n’ai rien entendu. On sent que CG et LJ ne s’entendent pas .»

[79]     Quant à l’incident du 13 décembre 2006, allégation 31, LG indique : « Je sais que le conflit est avec LJ parce que j’ai été témoin de la pizza »

 Ce à quoi JH ajoute : « J’ai eu écho que LJ et CG étaient en désaccord sur une question de ménage. LJ m’a rapporté ce problème. LJ m’avait dit qu’elle s’était fait traitée de folle par CG. C’est les seuls éléments que j’ai. »

[80]     Le 15 décembre 2006, CG touche ou bouscule LJ en passant mais ne le  fait pas volontairement. Le 18 décembre 2006, LJ accroche le bras de CG en passant. MLB qui est présente dans le corridor, décrit la scène comme suit : « CG est en plein milieu et LJ lui dit : « Pousse-toi. » Son ton n’est pas tout à fait agréable, c’est comme un ordre, LJ a parlé plus fort pour pouvoir passer. CG s’est tassée un peu, les bras croisés et la foudroyait du regard. Le ton a monté entre les deux. Je ne me souviens pas si LJ a accroché CG. »

[81]     En regard de l’incident du 20 décembre 2006, LJ indique : « Je la trouvais raide. Je la trouvais bizarre. Ce n’est pas une personne avec qui je pourrais m’entendre. » MLB qui se trouvait dans le local de LJ, ajoute : « L’agressivité montait de façon malsaine d’un coté comme de l’autre. Je me suis placée entre les deux. »

[82]     De ce qui précède, il ressort qu’il s’agit bien davantage d’un conflit de personnalité entre CG et LJ que de harcèlement psychologique de la part de CG à l’endroit de LJ.

[83]     La procureure du Syndicat demande donc au Tribunal d’accueillir le grief et de réserver sa juridiction quant aux dommages moraux.

 

EMPLOYEUR

 

[84]     Selon le procureur de l’Employeur, tant le libellé du grief que la gestion de l’audition par les parties lui laissaient croire que l’Alliance avait décidé d’assumer le fardeau de démontrer que, contrairement aux conclusions de M e Renaud (pièce S-17 ), CG n’avait pas eu de conduite harcelante. Une recherche dans la jurisprudence et la doctrine s’est avérée peu concluante mais le procureur en retient que les tribunaux ne doivent pas se hâter de faire succomber la partie sur laquelle reposerait le fardeau : la recherche de la vérité est plus importante que la détermination du fardeau de la preuve à une partie.

[85]     Selon le procureur de l’Employeur, celui-ci en raison des obligations qui lui incombent en vertu, entre autres, de l’article 81.19 de la Loi sur les normes du travail :

« 81.19 Tout salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique. L’Employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une conduite est portée à sa connaissance, pour la faire cesser. »

 se devait d’agir.

[86]     Conformément à sa politique contre toute forme de violence ou de harcèlement au travail, pièce S-5 , l’Employeur s’est adjoint un comité ad hoc, présidé par M e Renaud, afin que celle-ci étudie la plainte.

[87]     En se basant sur le rapport de M e Renaud, pièce S-17 , l’Employeur suspend avec traitement CG pour procéder à l’analyse de la situation dans son ensemble, pièce S-4 et E-3 , en raison d’une conduite harcelante à l’égard de LJ, LG, JH et SL.

[88]     Compte tenu du contexte et des allégations spécifiques à l’endroit de LJ, JH, LG et SL, l’Employeur se devait d’agir et il a agi.

 

LE CONTEXTE

 

[89]     Avant l’arrivée de CG à l’école M-F, il existe à cette école une atmosphère de camaraderie et d’échange entretenue par un noyau d’enseignantes qui y sont présentes depuis l’ouverture de l’école et qui se retrouvent pour la période du lunch pour échanger.

[90]     CG a obtenu un poste vacant suite à la retraite d’une enseignante. Selon LG, CG aurait changé d’école à la suggestion du Syndicat en raison de difficultés avec son ancien directeur, qu’elle critique publiquement lors de la journée pédagogique du 24 août 2006.

[91]     Selon la directrice JB, plusieurs évènements qui lui sont rapportés s’ajoutent à compter de cette date et justifient que la directrice les notent à compter du 11 septembre 2006, pièce E-2 . En date du 29 septembre 2006, JB considère la situation et les comportements de CG suffisamment graves pour justifier une suspension disciplinaire de CG, pièce E-2 .

[92]     Selon le procureur de l’Employeur, les interventions, attitudes et comportements de CG ne sont ni justifiés ni anodins. Le procureur se demande d’ailleurs pourquoi CG s’obstine avec tout le monde, pourquoi elle fait des « niaiseries » , pourquoi elle dérange toutes ses collègues? Le problème qui existe c’est l’attitude et le comportement de CG à l’égard des autres.

[93]     À cet égard, le procureur comprend à la fois que la directrice JB demande à l’Employeur de la suspendre en septembre 2006, et qu’elle suggère à CG d’avoir recours au PAP (Programme d’aide au personnel) le 3 octobre 2006, pièce E-4 et que le 17 janvier 2007, à peine 5 mois depuis l’arrivée de CG à l’école M-F, pièce S-11 , tout le personnel de l’école a signé une pétition (ou une plainte) faisant état d’une importante détérioration du climat de travail comprenant des commentaires insultants, de la calomnie, de l’intimidation et des menaces. Ses agressions non verbales accompagnées de regards mauvais et menaçants constituent aussi du harcèlement même si c’est plus subtil.

[94]     Selon le procureur, la décision de l’Employeur n’est pas déraisonnable en ce qu’elle a suivi les recommandations du rapport de l’enquêteur, pièce S-17 et que ce rapport établit que l’enquête a respecté les principes d’équité; CG a pris connaissance des allégations,  a pu témoigner et faire valoir sa version des faits.

 

CAS DE LG

 

[95]     En plus des allégations 3 et 4 qui concernent, l’une l’affiche des monarques qui n’est pas grave en soi et l’autre les questions sur sa vie privée posées à une tierce personne qui ne sont peut-être pas importantes pour LG mais qui causent un malaise certain dont tous sont conscients. Pourquoi poser de telles questions?

[96]     Il faut toutefois ajouter à cela le commentaire que CG fait à LG en tant que responsable d’école : « Si tu ne fais pas ton travail, je vais porter plainte contre toi » alors que CG exige des excuses de la part de LJ et que LG lui indique qu’il ne peut quand même pas la forcer à s’excuser. Pour le procureur, il s’agit là d’une menace et que cela constitue du harcèlement même s’il n’y a pas répétition. En référence à la pétition, pièce S-11 , le procureur conclut que quelque chose ne marche pas dans cette école et que cela est attribuable à CG.

 

CAS DE SL

 

[97]     L’intervention de CG à l’endroit d’une élève, allégation 7, a bouleversé SL parce que CG était en colère. SL a par la suite rapporté l’évènement à la directrice JB, ce qui a entraîné la réaction de CG.

[98]     Selon le procureur, la réaction de CG, allégation 8, « C’est ce genre de personne qui jacasse à la direction » , « La prochaine fois, au lieu d’aller jacasser dans mon dos à la directrice, tu viendras me voir, sinon… » constitue une menace directe à SL à savoir qu’il va lui arriver quelque chose. Il s’agit ici d’un fait unique qui porte atteinte à la dignité de SL, telle qu’elle s’est plainte à la directrice. Elle était humiliée de la situation qui se déroulait en présence d’élèves. La directrice JB considère qu’il s’agit d’intimidation et elle est intervenue. Selon l’Employeur, il s’agit d’une conduite grave, comprenant intimidation et menace en présence d’élèves qui constitue harcèlement. La présence et les comportements inappropriés de CG à l’école perturbent  l’harmonie qu’il y avait à l’école et entraîne un climat intolérable dans l’école.

 

CAS DE JH

 

[99]     Il est vrai qu’il existe deux blocs d’évènements en regard de JH,  l’un en octobre et l’autre en décembre, Il n’est toutefois pas nécessaire que les évènements soient répétitifs et rapprochés. Si c’est assez grave il n’est pas nécessaire qu’il y ait répétition pour que ce soit du harcèlement.

[100]   La plainte formelle de JH, pièce S-14 , fait état de :

            - regards menaçants et intimidants

            - menaces non voilées (doigt pointé et menaces verbales)

            - CG parle de JH à la 3 ième personne même si elle est présente.

[101]   JH a signé la pétition S-11 parce que « CG vient la chercher » , qu’elle n’arrête pas de la déranger, ce qui entraîne qu’elle se remet en doute, se sent mal, pleure et a des maux d’estomac.

[102]   Pour l’Employeur, est-il normal que dans une école où tout va bien jusqu’à l’arrivée de CG, les énoncés précédents sont maintenant présents dans cette école? Selon le procureur, il y a quelque chose de fondamentalement incorrect dans cette situation. L’Employeur a l’obligation de s’assurer que le milieu de travail de son personnel soit exempt de ce type de situations-là.

[103]   Même si les allégations 13 et 14 se concentrent selon JH sur le fait qu’il s’agit d’une chicane entre deux enseignantes et que chacune a gardé son point, il ne faut pas conclure trop rapidement qu’il s’agit tout simplement d’un conflit entre deux personnes ou d’un conflit de personnalités.

[104]   L’allégation 31 constitue pour JH une situation humiliante alors que CG lui fait savoir vertement devant tout le monde de se mêler de ses affaires, alors que CG critique LJ, et qu’ensuite elle l’applaudit de façon sarcastique.

[105]   JH est démunie face à ce type d’attaque et se plaint ensuite à la direction et au Syndicat.

[106]   Les allégations 38 et 39 font encore état du fait que CG continue d’abaisser JH et d’avoir une conduite vexatoire. Combien de fois, ces comportements doivent-ils être répétés pour qu’ils constituent du harcèlement?

 

CAS DE LJ

 

[107]   La plainte formelle déposée par LJ, pièces S-16 et S-15 , réfère à l’attitude et au comportement de CG à l’endroit de LJ et d’autres enseignantes comprenant violence verbale, provocation, intimidation et harcèlement.

[108]   La thèse soutenue par le Syndicat dans ce cas est à l’effet qu’il s’agit d’un conflit de personnalité entre deux personnes, entre deux «petits coqs ».

[109]   Selon l’Employeur, le fait qu’une personne harcelée, en l’occurrence LJ, réagisse et ne se laisse pas « marcher sur les pieds » ne transforme pas le harcèlement en un simple conflit de personnalité.

[110]   Il n’est pas nécessaire que les attitudes et comportements harcelants soient répétés si la gravité qu’ils comportent constitue un évènement grave.

[111]    À cet égard, l’Employeur réfère aux allégations 24 et 25 où CG traite LJ de folle et de caractérielle.

[112]   L’Employeur retient aussi plus particulièrement les regards menaçants de CG à l’endroit de LJ, ou encore des éléments de dérision qui se retrouvent aux allégations 33 et 34. Le ton de CG est sec, désagréable et obsessif, ses regards sont durs, menaçants, fixes. CG n’est pas une personne fine ou gentille, Ses comportements et attitudes comprennent trop souvent des éléments de méchanceté qui en font une personne méchante.

 

III.            ANALYSE ET DÉCISION

 

QUANT AU FARDEAU DE PREUVE

 

[113] En tout premier lieu, le Tribunal doit se pencher sur la question préalable posée par la procureure du Syndicat quant au fardeau de preuve et, quant à cette question, nous considérons qu’il n’y a aucune ambiguïté sur l’existence et la pertinence de la question posée.

[114] En effet, il semble évident pour le Tribunal que l’acceptation par la partie syndicale d’initier la présentation des preuves (voir alinéa 4) résultait d’un consensus entre les parties et ne signifiait pas pour autant une acceptation du fardeau de preuve avec les éventuelles conséquences qui peuvent y être rattachées.

[115] Quant à cette question, le Tribunal partage l’opinion de l’arbitre, Me Rodrigue Blouin, citée par la procureure du Syndicat : «  Le fardeau de la preuve repose sur la personne qui allègue harcèlement psychologique et elle doit convaincre le Tribunal selon la prépondérance de preuve.  » (SAE 7958).

[116] De plus, il nous semble évident que l’Employeur doit ici nous convaincre que les mesures qu’il a administrées sont justifiables au vu et au su des circonstances de cette affaire.

[117] La seule nuance que le Tribunal tient à faire à ce sujet consiste à dire qu’il appartient à l’autre partie, en l’occurrence ici, la Plaignante au grief que l’on a identifiée ici comme CG, de démontrer qu’elle a fait les efforts nécessaires pour s’intégrer harmonieusement dans le milieu, nouveau pour elle, de l’école M-F.

 

QUANT AU FOND DU DOSSIER

 

[118] Sans reprendre la preuve décrite en début de cette décision, le Tribunal tient à préciser que sa juridiction repose essentiellement sur le grief dont il est saisi et que le libellé dudit grief détermine la portée du débat et la ou les questions auxquelles il doit répondre.

[119] Essentiellement, le grief, pièce S-2 , repose sur deux lettres adressées à la Plaignante CG par l’Employeur et il conteste les décisions qui y sont inscrites, à savoir :

·         La formation d’un comité ad hoc pour procéder à l’analyse des faits reprochés à la plaignante;

·         La convocation de la plaignante à une rencontre avec l’enquêtrice, Me Marie-Pierre Renaud, et Mme Sylvie Rivet du service des ressources humaines le 1 er mai 2007;

·         La suspension administrative avec salaire pour permettre de procéder à l’analyse du dossier dans son ensemble.

De plus, le grief demande les correctifs suivants :

1.     Annuler la décision de la Commission du 1 er mai 2007;

2.     Déclarer qu’il n’y a pas eu de harcèlement psychologique de la part de madame CG à l’égard des 4 personnes mentionnées dans la lettre de la commission scolaire;

3.     Condamner la commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer pour atteinte à ses droits fondamentaux;

4.     Condamner la commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer pour compenser le stress et les inconvénients découlant de la décision du 1 er mai 2007 et des mesures prises à son égard;

5.     Condamner la commission scolaire au paiement d’une somme à déterminer à titre de dommages exemplaires;

6.     Ajouter les intérêts et l’indemnité prévus au Code du travail, à toute somme versée à madame CG.

[120] Afin de bien situer la réflexion du Tribunal, il faut se rappeler que cette affaire se déroule sur une période en réalité assez courte et sur un fond de harcèlement psychologique allégué dans un milieu relativement petit et fermé sur lui-même où la vie communautaire revêt, selon la preuve administrée, une importance particulièrement importante.

[121] Quant à la trame de fond, rappelons que la Loi sur les normes du travail citée dans l’argumentation syndicale définit le harcèlement psychologique comme «  une conduite vexatoire se manifestant par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste.

Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour le salarié.  »

[122]   Rappelons également, pour compléter la trame de fond, que le législateur a aussi inscrit dans la loi l’article 81.19 qui stipule ce qui suit :

Art 81.19

[Droit du salarié] L’employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, pour le faire cesser.

[Les soulignés sont du soussigné]

[123] L’interprétation jurisprudentielle donnée à ce dernier article (81.19) a déterminé que l’existence connue et mise en application d’une politique pour contrer le harcèlement pouvait constituer un moyen raisonnable pour prévenir le harcèlement psychologique et que l’employeur doit faire enquête lorsque de telles situations sont portées à sa connaissance. À ce sujet, nous nous référons entre autres, aux décisions suivantes citées comme références au volume «  Loi sur les normes du travail » de la collection Alter Ego, 7 e édition de 2007.

·         Clair Foyer inc. c. Syndicat régional des travailleuses et travailleurs de Clair Foyer inc. (CSN) Marie-Hélène Dubois D.T.E. 2500T-1119 (T.A.)

·         SCFP, section locale 2294 c. Chateauguay (Ville de) (grief syndical), D.T.E. 2006T-104 (T.A.) requête en révision judiciaire : No 500-17-029543-066

[124] Dans notre affaire, il est démontré que la CSDM s’est effectivement dotée d’une telle politique et que cette politique comporte des dispositions lui permettant de procéder à une enquête lorsqu’un signalement lui est fait quant à une situation de harcèlement psychologique allégué.

[125] Il est également en preuve que, très tôt après son arrivée et même, pourrait-on dire, immédiatement après son arrivée à l’école M-F, des incidents, non désirés et dérangeants, impliquant et tirant leur origine de la Plaignante CG sont signalés à la direction de l’école.

[126] Il est également en preuve que cette école représentait, avant l’arrivée de CG, un milieu de travail stable et sans histoire où il faisait bon vivre.

[127]   La preuve démontre également que deux plaintes formelles de harcèlement psychologique ont été dûment déposées par deux membres du personnel enseignant de l’école les 21 et 22 décembre 2006. Une pétition signée par l’ensemble du personnel a également été produite à la direction de l’école le 17 janvier 2007 pour exprimer leurs reproches à l’encontre de CG.

[128]   Dans ce cadre factuel et formel, conformément aux dispositions pertinentes et impératives de l’article 81.19 de la loi ci-avant citée, l’Employeur se devait de procéder à une enquête et de prendre les moyens pour assurer à toutes les personnes oeuvrant dans l’école M-F un milieu de travail sain.

[129] Ainsi, suite aux deux plaintes des 21 et 22 décembre 2006 et de la pétition reçue le 17 janvier 2007, l’Employeur mettait sur pied un comité ad hoc et mandatait une enquêtrice spécialisée en matière de harcèlement psychologique pour rencontrer toutes les personnes impliquées identifiées explicitement dans le mandat qui lui était confié par les termes suivants :  «  …de déterminer les circonstances entourant les plaintes de harcèlement formulées envers CG par dix-neuf (19) membres de l’école M-F de la CSDM. ».

[130] Il est en preuve, pièce S-17 , que les deux personnes ayant porté individuellement plainte ont été rencontrées les 20 et 21 février 2007 et que la personne mise en cause CG a été rencontrée le 27 février 2007 et, qu’en fin de compte toutes les personnes signataires de la pétition à l’exception d’une seule ont été rencontrées. Il est également en preuve que CG a pu produire une réponse écrite aux allégués invoqués contre elle le 8 mars 2007 et que, le 10 avril 2007 l’enquêtrice produisait son rapport et ses recommandations.

[131] Il est enfin en preuve, pièce S-17 que l’enquêtrice est arrivée à des conclusions modulées et à des recommandations conséquentes à ses conclusions.

[132] Ainsi, sur la base que près de la moitié des allégations étaient fondées pour les deux plaintes individuelles en harcèlement et pour les cas de LG et SL, signataires de la pétition, l’enquêtrice en vient à la conclusion qu’il y avait effectivement eu «  une conduite harcelante » à l’égard de ces quatre personnes plaignantes individuellement ou signataires de la pétition.

[133] Elle conclut également que la quasi-totalité des allégations sont corroborées par les témoins rencontrés et que les allégations non retenues ont été écartées sur la base d’une non concordance avec les critères de la définition du harcèlement dont, entre autres, la non répétition des signalements ou le fait que les signalements ne visaient pas les auteurs des plaintes.

[134] L’enquêtrice conclut cependant que, bien que non assimilables à du harcèlement, ces comportements de la Plaignante au grief, constituaient de réels manquements que l’on peut croire dérangeants pour le milieu-école. Elle identifie ainsi cinq (5) types de manquements opposables à CG :

·         Manque de professionnalisme dans l’accomplissement de ses responsabilités d’enseignante;

·         Insouciance à l’égard du bien d’autrui;

·         Remarques, questions ou commentaires déplacés ou insultants, insultes verbales envers ses supérieurs hiérarchiques et plusieurs collègues;

·         Conduite agressive et menaçante à l’égard de plusieurs collègues de travail leur reprochant d’avoir rapporté à la direction ses conduites déplacées;

·         Manque de jugement et conduite déplacée envers certains de ses élèves.

[135] La preuve présentée quant à la gestion de cette situation démontre enfin que l’Employeur a agi à l’intérieur de délais raisonnables compte tenu des circonstances.

[136] Dans ce cadre formel et factuel, le Tribunal est d’avis que l’Employeur a agi correctement quant à la gestion procédurale de ce dossier et quant aux mesures administratives prises pour respecter ses obligations légales.

[137] Ainsi, sans égard aux conclusions tirées quant à l’existence de harcèlement sur lesquelles nous reviendrons plus loin, le Tribunal est d’avis que les deux lettres des 1 er et  8 mai 2007 étaient correctes et justifiées en ce qu’elles permettaient à la plaignante CG, dans un premier temps, de prendre connaissance des conclusions du rapport d’enquête et que, dans un deuxième temps, elles permettaient à l’Employeur de garantir au milieu un climat sain et exempt de toute menace potentielle à la santé et à la sécurité.

[138] La mesure administrative d’isolement et de séparation des protagonistes, ainsi appliquée et sans perte de salaire pour CG, permettait à toutes les parties impliquées de vivre raisonnablement en paix et elle permettait à l’Employeur de compléter son analyse de la situation et de se pencher sur les recommandations du rapport d’enquête.

[139] Quant à la conclusion que la Plaignante au grief, «  a fait preuve d’une conduite harcelante » inscrite au rapport de l’enquêtrice et reprise dans la lettre du 1 er mai 2007, le Tribunal a certaines réserves, non pas quant aux comportements observés et analysés, mais quant au sens et  à la réelle portée qui leur ont été donnés compte tenu du contexte pourrait-t-on dire « historique » des événements pertinents à cette affaire.

[140] Pour les besoins des propos qui vont suivre, rappelons brièvement certains éléments pertinents de la preuve présentée au Tribunal.

[141] À son arrivée à l’école M-F en fin août 2006, CG doit s’intégrer dans un milieu-école « tissé serré » qui existe depuis quelques années et qui est constitué d’un noyau d’au moins quatorze (14) personnes habituées à travailler et vivre ensemble dans un climat d’harmonie et de collaboration.

[142] Il apparaît plus qu’évident de la preuve présentée au Tribunal que l’arrivée de CG vient déranger cet équilibre et cette sérénité. Dès le premier jour de son arrivée, il saute aux yeux qu’elle ne cadre pas dans le décor. Son caractère, ses attitudes et sa personnalité ne sont pas appréciés et la sortie en règle contre la direction de sa précédente école ne contribue pas à infirmer ces sentiments.

[143] La preuve au dossier démontre d’ailleurs que la direction de l’école M-F prend systématiquement note de tous les éléments négatifs qui pourraient être reprochés à CG depuis le 24 août 2006 soit : la première journée de son arrivée dans l’école . La preuve démontre également qu’à peine un mois après son arrivée, pas moins de treize (13) éléments avaient ainsi été notés et que ce nombre avait atteint quarante-huit (48) au moment de la signature de la pétition de l’ensemble du personnel.

[144] Compte tenu du fait que, selon l’enquêtrice, ces éléments furent tous corroborés par les témoins, on peut facilement déduire que CG n’a pas vraiment fait grand-chose pour faciliter son intégration harmonieuse dans son nouveau milieu de travail. On peut même conclure comme l’a fait l’enquêtrice que CG a eu une «  conduite harcelante » mais, peut-on,  de cette conclusion ainsi libellée, étirer la sauce jusqu’à conclure carrément à l’existence de harcèlement psychologique au sens de la loi et de la politique de l’Employeur?

[145] Le Tribunal est plutôt d’avis contraire pour les raisons suivantes :

En tout premier lieu, l’analyse de la preuve présentée au Tribunal démontre que les reproches adressés à CG par LG et SL concernent des événements sans aucune gravité et sans réelle répétition qui relève plus d’un manque de civilité que du harcèlement.

[146] En second lieu, la jurisprudence a établi que l’évaluation des allégations de harcèlement psychologique devaient être appréciées en fonction du point de vue d’une personne raisonnable placée dans la même situation que la présumée victime.

[147] Cette approche analytique a d’ailleurs été largement développée dans une jurisprudence marquante citée par les deux procureurs au dossier : « C.H. régional de Trois-Rivières c. Syndicat professionnel des infirmières et infirmiers de Trois-Rivières, (T.A.) 2004-9453, 5 janvier 2006 ».

[148] Nous nous permettrons de citer ici de larges extraits de l’arbitre, François Hamelin, qui font école quant à cette question :

« …

C) Critères d’appréciation

Puisque le concept de harcèlement psychologique met en cause certaines variables de nature psychologique, il est nécessaire de les baliser en identifiant des critères objectifs d’appréciation afin d’éviter de sombrer dans la subjectivité et l’arbitraire.

Certaines personnes peuvent en effet considérer harcelante telle conduite, alors que d’autres ne s’en formaliseront pas. En outre, il y a une différence importante entre le fait de se sentir harcelé et celui de l’être véritablement, d’où l’importance de définir des principes fiables et objectifs d’évaluation.

C’est dans cette perspective que la doctrine et la jurisprudence ont dégagé certains critères afin d’apprécier la conduite de la personne qui harcèle ainsi que celle de la personne qui se dit harcelée.

En matière de harcèlement psychologique, il faut apprécier la situation dans une perspective globale, à partir du point de vur objectif de la victime présumée, c’est-à-dire en fonction de la notion de « personne raisonnable placée dans la même situation ». Il n’est d’ailleurs pas pertinent de s’interroger sur l’intention malicieuse du harceleur… »

« … 2) Le point de vue de la victime raisonnable

En matière de harcèlement, c’est d’abord et avant tout la conduite de la victime présumée qui doit être examinée, parce que la définition de harcèlement psychologique introduit des éléments qui ne se comprennent que du point de vue de cette dernière. Il en va de la conduite vexatoire, du caractère non désiré de la conduite, de l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychologique de la victime, et de la dégradation de son milieu de travail. Tous ces éléments ne peuvent être compris que dans la perspective de la victime présumée.

L’appréciation de la conduite de la victime présumée ne doit toutefois pas être purement subjective si l’on veut éviter de sombrer dans la pure subjectivité. La conduite de la victime présumée doit être appréciée objectivement et le critère retenu sera celui de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances que la victime présumée.

Cette dernière perspective évite de se placer dans la situation trop subjective de la victime elle-même qui, à partir de facteurs très personnels, peut considérer telle conduite harcelante alors qu’elle ne l’est pas ou ne le serait pas pour une personne raisonnablement et normalement informée, diligente et prudente. On évite ainsi l’appréciation trop subjective qu’entraîne l’évaluation avec les yeux de la seule victime… »

[149] Les importantes nuances développées dans cette approche analytique et largement suivies par les tribunaux d’arbitrage qui ont subséquemment eu à traiter de tels cas auraient dû amener l’enquêtrice et l’Employeur à mieux nuancer leur conclusion quant à la présence d’une situation de « conduite harcelante » à l’égard de quatre personnes de l’école M-F.

[150] En troisième lieu, la chronologie particulière des événements, telle que mise en preuve, nous porte à croire que l’approche analytique ci-avant citée trouverait dans notre affaire une application utile certaine.

[151] Comment en effet croire sans aucune forme de nuance que, dès le premier jour de son arrivée dans le milieu, CG pouvait être à ce point harcelante pour qu’il soit justifié, utile et nécessaire de noter en détails ses comportements. Ce seul fait aurait dû, selon le Tribunal, amener l’enquêtrice et l’Employeur à se poser des questions sur la véritable portée à donner aux perceptions ressenties par les présumées victimes.

[152] Ainsi, sans pour autant dénier toute perception de harcèlement ressenti par les auteurs des plaintes, il semble au Tribunal que cette conclusion de « conduite harcelante » aurait dû être modulée et nuancée de telle sorte qu’elle tienne compte de ce caractère pour le moins très hâtif, sujet ainsi à caution et passablement subjectif quant à sa réelle importance ce qui est largement démontré par la quasi absence de réelles conséquences physiques ou psychologiques.

[153] Au risque de se répéter, le Tribunal est convaincu, de la preuve administrée devant lui, que l’attachement au climat serein de l’école vécu auparavant, la crainte de voir ce climat se dégrader par l’arrivée perturbante de CG joint à la hâte apparente à tout noter et à ne rien laisser passer à CG auraient au moins dû amener un traitement plus nuancé des conclusions qui ont été tirées de l’enquête du comité ad hoc.

[154] Ceci dit, le Tribunal ne raye pas d’un trait cette conclusion, pas plus qu’il n’excuse les comportements reprochés à CG. Le Tribunal, quant à cette question est d’avis que CG a effectivement eu des comportements dérangeants et inappropriés envers les quatre (4) présumées victimes assimilables à un manquement à son devoir de civilité inclus au contrat de travail. Le Tribunal est ainsi d’avis que par ce manquement, CG a contribué à la dégradation du climat de travail, sain par ailleurs, auquel le personnel de l’école était en droit de tenir.

[155] Dans ce contexte, le Tribunal estime que les décisions administratives prises par l’Employeur à l’égard de la Plaignante CG étaient justes et raisonnables dans les circonstances.

 

En conséquence de tout ce qui précède, le Tribunal :

 

ACCUEILLE       en partie le grief no 2010-0383-5152 de la Plaignante CG;

 

DÉCLARE          qu’il n’y a pas eu de harcèlement psychologique de la part de CG à l’égard des quatre personnes mentionnées dans la lettre de la Commission scolaire;

 

DÉCLARE          que les mesures administratives prises par l’Employeur, à savoir de procéder à une enquête et de suspendre provisoirement la Plaignante avec traitement, afin de procéder à l’analyse de la situation dans son ensemble, étaient justes et raisonnables;

 

CONSERVE       juridiction s’il y a lieu,  pour l’adjudication d’éventuels dommages dont la preuve incombe à la Plaignante CG.

 

 

Sainte-Julie,  le  27 décembre  2013

 

 

___________________________

 Paul Charlebois, arbitre

 

Pour l’EMPLOYEUR : M e Pierre Bégin

Pour le SYNDICAT : M e Chantal Poirier

MXR 904-673-QED

Sentence n° 13-216

ANNEXE    I

PIÈCES DÉPOSÉES PAR LE SYNDICAT :                                                       

S-1 :     Convention collective E 1, 2005-2010

S-2 :     Grief no 2010-0000383-5152, en date du 15 juin 2007

S-3 :     Accusé de réception du grief en date du 19 juin 2007

S-4 :     Lettre du 1 er mai 2007 :

            Résultats de l’enquête suite à la plainte de harcèlement pédagogique

S-5 :     Politique contre toute forme de violence ou de harcèlement au travail, en date du                         18 juin 2003           

S-6 :     Énoncé des allégations (48) du 24 août 2006 au 8 janvier 2007

S-7 :     Version annotée de S-6, contenant la version de la mise en cause

S-8 : et S-8.1 :  Notes de la directrice, du 24 août 2006 au 17 janvier 2007

S-9.1 :  Rappel du 25 octobre 2006. Objet : Déplacement lors des récréations

S-9.2 :  Rappel du 25 octobre 2006. Objet : Surveillance dans la cour

S-10 :   Ordre du jour de la réunion du 19 septembre 2006

S-11 :   Pétition du 17 janvier 2007 de membres du personnel de l’école M-F adressée à   ladirectrice de l’école

S-12 :   Lettre de L D du 27 novembre 2007

S-13 :   Note de C G

S-14 :   Plainte pour violence ou harcèlement au travail de J H en date du 22 décembre    2006

S-15 :   Relation par L J d’évènements du 8 décembre au 20 décembre 2006

S-16 :   Plainte pour violence ou harcèlement au travail de L J en date du 21 décembre    2006

S-17 :   Rapport d’enquête administrative sur la plainte de harcèlement déposée par le personnel de l’école M-F envers C G, déposé par M e Marie-Pierre Renaud, enquêteur en      harcèlement, en date du 10 avril 2007

S-18 :   Déclaration solennelle de C G en date du 28 février 2007

S-19 :   Lettre de M-L B remise à la  directrice au cours de la semaine du 21 septembre 2006

S-20 :   Carte d’une élève. T B

S-21 :   Certificat médical du 21 décembre 2006

S-22 :   Tableau relatif au transfert des enseignants pour les écoles R et S

S-23 :   Liste sélective des employés par lieu de travail, corps d’emploi

PIÈCES DÉPOSÉES PAR L’EMPLOYEUR:

E-1 :     Horaire des surveillances 2007-2008, École M-F

E-2 :     Lettre du 29 septembre 2006 de J B à B R relative à une problématique de détérioration du          climat de travail découlant de certains agissements d’une enseignante

E-3 :     Lettre du 8 mai 2007 de M. R M avisant C G d’une suspension administrative provisoire

E-4 :     Note du 30 octobre 2006 de J B à C G

ANNEXE   II

 

AUTORITÉS CITÉES PAR LE SYNDICAT :

 

Loi sur les normes du travail , L.R.Q. c. N-1.1 (extraits)

1               LAMY, F., Le harcèlement psychologique : un terreau fertile à l’imprévisibilité , Barreau du             Québec, Développements récents en droit du travail 2009, Cowansville, Yvon Blais, 20009

2               C. H. RÉGIONAL DE TROIS-RIVIÈRES   c. Syndicat professionnel des infirmières et       infirmiers de Trois-Rivières , (T.A.) 2004-9453, 5 janvier 2006

3               BANGIA   c.  Nadler Danino S.E.N.C., 2006 QCCRT 0419 , 24 août 2006

4               BRETON   c.  Compagnie d’échantillons «National» ltée . 2006, QCCRT 0601, 5 déc. 2006

5               LIZOTTE   c.  Alimentation Coop Lapocatière , 2008 QCCRT 0521 , 5 décembre 2008

6               CHAMPLAIN REGIONAL COLLEGE ST-LAWRENCE CAMPUS   c.  Champlain Regional College St-Lawrence Campus Teacher’s Union , SAET 7958, 6 septembre 2006

7               [COMPAGNIE A]   c.  L….B…. , 2007 QCCRT 332 , 4 juillet 2007

 

AUTORITÉS CITÉES PAR L’EMPLOYEUR :

 

1.           Loi sur les normes du travail , L.R.Q. c. N-1.1

2.           Code civil du Québec , L. Q., 1981, c. 64

3.           Charte des droits et libertés de la personne , L.R.Q., c. C-12

4.           POIRIER GUY et RIVEST L. ROBERT, « Les nouvelles normes de protection en cas de harcèlement psychologique au travail : une approche moderne », Développements récents en droit du travail, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais, 2004,

5.           LAMY FRANCINE,  « Définir le harcèlement et la violence psychologique en milieu syndiqué : les hésitations des uns, les difficultés des autres », Développements récents en droit du travail, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais, 2003,

6.           CENTRE HOSPITALIER RÉGIONAL DE TROIS-RIVIÈRES (PAVILLON ST-JOSEPH) et  Syndiat professionnel des infirmières et infirmiers de Trois-Rivières , 2005A-267 , François Hamelin, président, 5 janvier 2006,

7.          HÔPITAL LAVAL   et  Association professionnelle des inhalothérapeutes du Québec , 2004A-226 , Jean-Guy Ménard, arbitre, 13 septembre 2004 

8.          NEAL BANGIA   et  Nadler Danino S.E.N.C., [2006] QCCRT 0419 , M. Guy Roy, commissaire, 24 août 2006

9.          FONTAINE   et  Syndicat des employés de métiers d’Hydro-Québec, section locale 1500 (SCFP, FTQ), EYB 2004-1383 (C.S.) juge Carole Julien, j.c.s.

10.        BRETON c.  Compagnie d’échantillons «National» ltée, 2006 QCCRT 0601 , Jean Paquette, commissaire, 5 décembre 2006

11.        UNIVERSITÉ McGILL   et  McGill University non Academic Certified Association (M.U.N.A.C.A.) , AZ-50395043 , M e Jean-Pierre Lussier, 12 octobre 2006

12.        L’UNION INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS UNIS DE L’ALIMENTATION ET DE COMMERCE, SECTION LOCALE 766-P   et  Kraft Canada inc ., no de dépôt 2002-9342,    M e  Lyse Tousignant, arbitre, 5 mai 2004


ANNEXE   III

 

ENONCÉ DES ALLÉGATIONS :

 

1.       24 août 2006. C G lors d’une pause durant la journée pédagogique du 24 août commence à dénigrer son directeur.

2.       Début septembre 2006. Dans le salon du personnel en début d’année. C G entend M dire qu’elle fume en cachette de son mari. C G lui dit « mais tu lui fais des cachettes. Est-ce que tu le trompes en plus? »

3.       L G cherche son affiche sur les Monarques. M en parle à C G. Elle ne réagit pas. L’affiche se retrouve sur sa porte. C G croyait que l’on pouvait la prendre, car elle était sur l’étagère dans le salon du personnel.

4.       11 septembre 2006. Lors d’un dîner au salon du personnel dans la semaine du 11 septembre, C G demande à une enseignante si L G a des enfants ou s’il est marié ou s’il a une blonde. L’enseignante est très mal à l’aise et ne veut pas parler de la vie privée de quelqu’un d’autre et lui répond que L G n’aime pas parler de sa vie privée.

5.       18 septembre 2006. Lors d’un dîner au salon du personnel dans la semaine du 18 septembre. C G commence en disant qu’elle connaît une direction qui boit du vin dans son bureau, La veille elle avait vu la directrice, dîner sur une terrasse et prendre un verre de vin. La directrice lui répond que des qu’en dira t’on, il y en a sur tous les corps d’emploi, même chez les enseignants.

6.       21 septembre 2006. Lors de la rencontre de parents du 21 septembre, les enseignants sont dans le salon du personnel, M-L B arrive coiffée. C G lui dit «Tu es allée chez le coiffeur?» M-L B lui répond que non, qu’elle s’est coiffée elle-même. C G lui dit « menteuse » à trois reprises devant tout le personnel. La directrice a rencontré C G à ce sujet le 28 septembre 2006.

7.       27 septembre 2006 à 10h05. S L, (technicienne spécialisée), va chercher les élèves, pour la retenue dans la classe de C G. Elle voit C G fouiller dans le sac d’une élève, T, en la chicanant. S L demande à C G ce qui se passe. C G lui répond que T lui a volé ses lunettes fumées. C G est très fâchée.  Les autres élèves dans la classe sont témoins de la scène. T pleure et nie les allégations. Le jeudi 28 septembre 2006 à 11h30, lors du dîner, S L demande à C G si finalement elle a retrouvé ses lunettes. C G lui répond oui, que finalement elle les avait mises ailleurs. La directrice a donné un avertissement verbal à C G dans son bureau.

8.       Par la suite, S L passe dans le corridor et C G lui dit devant les élèves « Mais oui! C’est ce genre de personnes qui  bavassent  à la direction. » S L  lui dit « Est-ce que c’est à moi que tu parles? » C G répond « La prochaine fois, au lieu d’aller bavasser dans mon dos à la directrice, tu viendras me voir, sinon… ». C G était agressive et menaçante envers S L.

9.       28 septembre 2006. A-M cherche son tupperware. Elle a vu C G le prendre et y mettre de la glace le lundi. Elle dit au personnel qu’elle cherche son tupperware. C G est dans la salle, mais ne dit rien. Le lendemain midi, A-M retrouve son tupperware contenant le lunch de C G. La directrice rencontre C G  à cet effet le 28 septembre.

10.     28 septembre 2006. C G accroche M-L B à l’extérieur, car elle fumait et lui dit « Je dois te donner une période pour de la récupération dans ta classe, laquelle veux-tu? » M-L B lui répond qu’elle est déjà jumelée avec L. C G devait parler à ses collègues de cycle afin de se jumeler à une classe afin de faire de la récupération avec une autre classe durant une de ses périodes de spécialistes (approuvé à l’unanimité lors de la réunion du personnel et approuvé par le CPEPE). Mais C G n’avait fait aucune démarche dans ce sens le 28 septembre  ce qui devait être fait depuis le 22 septembre.

11.     28 septembre 2006. C G remet à la directrice sa tâche en main propre lui disant qu’elle était dans son pigeonnier, en laissant sous-entendre que c’est la directrice qui ne l’avait pas trouvé. La directrice l’avait avisé le 27 septembre qu’elle ne lui avait pas remis sa tâche, tel que demandé le 22  septembre. La directrice lui répond qu’elle n’était pas là la veille. C G répond   « ah, non effectivement ».

12.     En octobre 2006. G, le nouvel enseignant d’éducation physique achète un oeillet pour une campagne de financement pour la sclérose en plaque. Il décide de le donner à L P en lui disant que comme il ne voulait pas faire de chicane entre les enseignantes et qu’elle est la seule secrétaire, il a pensé le lui donner à elle afin que toutes puissent en profiter. Par la suite C G taquine la secrétaire sans arrêt insinuant que G flirtait avec elle. Puis le soir, C G demande à la secrétaire « Vas-tu le dire à ton mari? » L P lui répond  « Dire quoi? » C G lui répond « Ben que G t’a donné un oeillet » Le lendemain, C G donne à L P un collant en fleurs en lui disant « Ha! Comme t’aime les fleurs… » Pendant 3 jours, C G n’arrête pas de la taquiner en disant  « Ton œillet… Ha! Tu dois être contente… » Plus tard, L P dit à C G de cesser de transposer ses fantasmes sur elle, lui rappelant qu’elle est mariée depuis 26 ans et qu’elle aime son mari. C G faisait des insinuations devant les autres dans la salle des profs.

13.     Octobre 2006. J H, enseignante en éducation physique, donne des collants à chaque enfant à la fin du cours pour se rendre à l’école à pied ou en vélo. Les enfants se changent et un élève perd son collant et pleure. J H lui dit que c’est à elle de faire attention, que cela ne fait même pas 5 minutes qu’elle  lui a remis, L’enfant pleure de plus belle et J H lui demande d’arrêter, que le collant est sa responsabilité. J H la laisse à l’autobus et va reconduire les autres enfants à l’extérieur. J H croise C G qui lui demande qui pleure comme cela. J H lui nomme l’élève et lui dit de laisser faire. Lorsqu’elle revient elle croise un élève retardataire au bord des larmes qui lui dit que C G lui a demandé de donner son collant à l’autre enfant parce qu’elle pleurait. J H lui donne un autre collant.

14.     Le lendemain matin, J H va voir C G et lui dit qu’elle n’a pas apprécié qu’elle se mêle de sa gestion de classe. Elle lui répond que c’est sa gestion puisque c’est sa classe. J H réplique qu’il y avait des consignes avec les collants et que les enfants devaient apprendre à se responsabiliser et que demander à un autre enfant, cela ne faisait que déplacer le problème. C G lui répond que l’enfant devait s’en foutre un peu puisqu’elle l’avait collé sur son chandail    (comme l’a fait J H toute la semaine). C G dit ensuite à J H qu’elle devait comprendre que les enfants étaient petits et seulement en 2 ième année  et qu’elle (J H) n’avait qu’à lui en donner un autre au lieu de faire toute une histoire. J H lui rappelle encore une fois que ce qui se passe en éducation physique ne la concerne pas. C G la dévisage. Fin de la discussion.

15.     12 octobre 2006. C G ne remet pas les bulletins aux élèves car elle les a chez elle. C G ne dit rien à la direction.

16.     16 octobre 2006.  (Journée pédagogique de 8h00 à 15h00). À 14h00, C G lit son livre Bouillon de poulet pour l’âme dans le salon du personnel dans le sofa. À 14h35, C G lit toujours son livre mais cette fois bien étendue au soleil.

17.     17 octobre 2006. La direction rencontre C G suite à son comportement non professionnel de la journée du 16 octobre. C G accuse d’autres collègues de faire pire et ne s’excuse pas.

18.     23 octobre 2006.      La directrice annonce au personnel que M, enseignante, a eu un gros accident de voiture et qu’elle ne sera pas à l’école pour un bon moment. C G dit lors du départ de la directrice « Est-ce que M était sur la drogue? ».

19.     Le 24 octobre 2006. C G mentionne à la secrétaire qu’une se ses élèves (F) a peut-être des poux. La concierge vérifie la tête de l’enfant et confirme qu’elle en a. La secrétaire rassure l’enfant qu’on ne dira pas à toute la classe qu’elle a des poux. En retournant l’enfant en classe, C G dit haut et fort « Pis, a-t-elle des poux ! » Par la suite, C G profite de cette situation pour faire une expérience scientifique. Elle demande à tous les élèves de prendre une loupe pour examiner les poux de F. Tous les enfants de la classe sont mis au courant que F a des poux et rient d’elle. L’enfant est rejetée et isolée.

20.     25 octobre 2006. La directrice remet un mot dans le pigeonnier de C G pour  lui demander de respecter la procédure lors des déplacements pour les récréations. Plusieurs collègues lui ont demandé mais C G refuse de la respecter. La directrice lui remet également une note lui demandant de porter un manteau lorsqu’elle surveille à l’extérieur afin de donner l’exemple aux élèves, il fait 8 degrés Celcius.

21.     Fin d’octobre 2006. C G inscrit son nom avec L J et G pour faire le ménage de la cuisine de la même semaine. Par la suite, L J se retrouve à faire le ménage seule, sous les yeux de C G qui était assis dans la cuisine à la regarder faire. L J dit avec des mots sous-entendus que c’est la semaine du ménage. C G l’ignore. L J a dit devant des enseignants des mots que C G n’a pas appréciés.

22.     Au mois de novembre 2006. C G fixe L J du regard continuellement. CG entre dans la cuisine, ouvre le four micro-ondes, puis le referme sans raison apparente. Selon L J c’est de la provocation. C G essaie de régler ses comptes avec L J en passant par d’autres enseignants afin de les embarquer dans son conflit. C G parle fort afin que L J puisse les entendre. Les autres enseignantes lui disent qu’elles ne désirent pas faire l’intermédiaire et d’aller voir la personne concernée.

23.     Vendredi le 8 décembre 2006. L J est dans le salon du personnel et fait des blagues avec S T. Elle s’occupe du comité pizza et elle dit à S T  en blague « Je deviens obsessionnelle avec la pizza » parce qu’elle ne veut aucune perte de pointe de pizza. Elle discute avec S T, mais C G répète avec un air et un ton désagréable et agressif « C’est vrai que tu es  obsédante … » L J ne l’écoute déjà plus. Elle regarde S T qui la regarde avec surprise.

24.     Plus tard, toujours à l’heure du dîner, L J la regarde dans le snack pour se choisir du chocolat. C G vient la rejoindre et lui dit avec un ton sec : « J’ai quelque chose à te dire » L J répond « Oui » C G : « Je vais attendre que tu me regardes » L J  la regarde. C G dit « J’aimerais que tu arrêtes de siffler quand tu passes devant ma classe parce que ça me tombe sur les nerfs » . Son ton est très sec. L J lui répond : « Je sifflerai quand çà me tentera » et elle est partie. C G lui dit « J’ai  pas fini » L J  répond « Moi, j’ai fini ».

25.     Toujours sur la même heure de dîner, à 12h40, la cloche sonne pour le primaire. C G attend   L J à la porte de sortie du salon du personnel. Elle la fixe du regard avec un air agressif. L J part à rire en trouvant cela ridicule, qu’elle est surprise par cette attitude qui la rend nerveuse. C G lui dit « T’es une câlisse de folle pis une caractérielle. Pis  il y a bien du monde ici qui me l’a confirmé. Pis si tu sais pas ce que çà veut dire, va voir dans ton dictionnaire ». Elle continue à parler de façon agressive, mais L J ne l’écoute plus parce qu’il y a des enfants dans le corridor. L J marche vite et dit «Bonjour » à haute voix à des enfants qu’elle connaît pour faire diversion. Elle en parle ensuite à la directrice.

26.     Lundi 11 décembre 2006. L J fume une cigarette devant l’école avant que la cloche sonne    C G est conduite à l’école par son conjoint dans son véhicule automobile; elle est assise dans le siège du passager. Elle se penche et fixe L J du regard. L J la regarde. C G a eu la même attitude envers elle  la semaine précédente.

27.     La  directrice rencontre C G pour lui dire son mécontentement face à la situation, qu’il est inacceptable de faire de telle remarque (à L J) et surtout devant les élèves. C G dit que c’est    L J qui la pousse à de tels comportements, qu’elle la harcèle et l’intimide.

28.     L J entre dans l’école et la directrice lui demande  si elle veut se joindre à la rencontre avec C G au sujet de ce qui s’est passé le vendredi 8 décembre. L J acquiesce et les rejoint. La rencontre n’est pas agréable. Elles concluent que L J et C G ne devront plus s’adresser la parole pour le moment.

29.     Lundi et mardi le 11 et le 12 décembre 2006. C G ne parle pas à L J, mais quand elle en a l’occasion, elle la fixe du regard de façon agressive. C’est une situation stressante, mais L J ne parle pas.

30.     Mercredi 13 décembre 2006. Le mercredi est le jour où les enseignantes donnent à L J l’argent pour la commande de la pizza. L J demande aux enseignantes de lui remettre l’argent au début du dîner ou le plus tôt possible. Les enseignantes la payent avant 12h00 normalement. Le mercredi 13 décembre 2006, C G vient s’habiller face à L J dans le salon du personnel. L J est en train de compter l’argent de la pizza. C G ne lui donne pas l’argent qu’elle a ramassé auprès des enfants pour la pizza. Elle sort à l’extérieur. Elle revient à 12h25 et remet l’argent à S L (également responsable de la pizza) pour ne pas le donner à L J. Puis, C G s’assoit et fixe L J du regard. L J est debout habillée, prête à partir pour aller commander la pizza, L J comprend que C G fait exprès pour payer à la  toute dernière minute. L J est fâchée plus particulièrement par le regard fixe de C G. L J dit à C G : « Toi, tu vas arrêter de me fixer » C G joue à la victime auprès des autres enseignants. L J quitte la salle.

31.     Mercredi 13 décembre 2006. C G est assis dans le fauteuil avec G qui lit la Presse. J H est assise au bout de la table. C G continue à dire que L J a une attitude cavalière, qu’elle manque de savoir-vivre et qu’elle ne se laissera pas parler comme cela. Elle ne s’adresse  à personne en particulier, mais tout le monde l’entend. J H se tourne et  lui dit «Arrête, c’est assez!» C G crie qu’elle ne lui parle pas. J H lui dit qu’elle parle à tout le monde. C G réplique qu’elle ne lui adresse pas la parole et qu’elle (J H) n’a pas le droit de lui dire cela puisqu’elle elle est une collègue de travail et non sa supérieure et que c’est à L G de lui parler et non elle. L G entre dans la salle des profs et C G raconte que J H n’a pas d’affaire à lui parler comme çà et qu’elle ne l’a pas dit À L J. J H répond calmement qu’elle lui avait parlé poliment et qu’elle avait dit la même chose à L J. C G l’applaudit de manière sarcastique. J H lui explique que si elle a quelque chose à régler avec L J,  qu’elle le fasse autrement et qu’un moment donné il faut savoir s’arrêter. C G lui propose ensuite de connaître tout le récit du début du malentendu avec L J (histoire du ménage). C G lui raconte alors toute l’histoire que J H écoute poliment.

32.     C G sort de la salle des profs et raconte son histoire à L G. C G dit à L G qu’elle veut des excuses de L J.

33.     Jeudi, 14 décembre 2006. L J rencontre L G dans le bureau de la direction. Il lui dit que C G demande des excuses. L J refuse. Elle lui dit que jamais elle ne s’excusera. C G demande plus tard à L G s’il a rencontré L J. Il lui répond qu’oui et qu’il lui a transmis son message, mais qu’il ne pouvait pas la forcer à faire des excuses. C G n’aime pas la réponse de L G et lui réitère sa demande à plusieurs reprises.

34.     Vendredi le 15 décembre 2006. (journée pédagogique) Avant le dîner de Noël, L J est dans le salon du personnel et elle fredonne une chanson. C G reprend sa chanson de façon ridicule et infantile. C G la provoque. L J arrête de chanter. L J retourne vers d’autres enseignantes qui terminent le sapin de Noël au mur. C G fixe L G du regard à plusieurs reprises. Après le dîner, L J fait la vaisselle dans la cuisine. C G passe derrière elle, l’accroche et la bouscule.

35.     18 décembre 2006. Discussion autour de la problématique du spectacle de Noël avec les micros et la qualité des équipements loués. J H dit à L D que le personnel ne fait pas vraiment de différence dans la qualité si cela fonctionne. J H propose à L D d’aller l’aider à nouveau avec les micros sans fils. C G lui fait un commentaire lui demandant  était son expertise dans ce domaine. J H ne réplique pas. J H répète à L D que ce ne doit pas être sorcier de faire fonctionner les micros que ce devrait être une question de fils et répète qu’elles vont aller essayer. C G dit à J H « Coup donc, es-tu dans le comité spectacle de Noël pour ne pas te mêler de tes affaires de même! Personne n’a d’ordre à  recevoir de personne! » Marianne se lève et dit : « Tu voulais me la faire péter ma coche, tu me la fais péter… Je suis écoeurée de dîner ici! » J H explique alors à C G qu’elle  essayait d’aider L D puisqu’elle avait travaillé avec elle durant une heure le matin. L D ne comprenait pas ce qui se passait. Elle croyait avoir dit quelque chose déplacée. Quelqu’un la rassure. Mais personne n’explique. J H quitte une demi-heure plus tard, elle raconte à L G ce qui s’est passé.

36.     Lundi, le 18 décembre 2006. Après la récréation, devant ses élèves  (en éducation physique) C G dit à J H que si elle a un problème à régler de le faire avec elle et non d’aller bavasser à  L G. J H lui dit qu’on ne règle pas cela devant les élèves. Elle lui dit que si elle (J H) a un problème à régler avec elle (C G), de le faire avec elle. « Tu es déjà allée te plaindre 2 fois à J B et à L G. » J H commence à lui dire qu’elle avait tenté de lui expliquer ce midi puis elle se ravise et lui dit qu’elle ne réglera pas devant les enfants. C G recommence encore. J H aperçoit L G et lui demande de venir. Il arrive et J H lui dit que C G n’arrête pas de la déranger.

37.     Lundi, le 18 décembre 2006. L J retourne dans la classe avec ses élèves après la générale de Noël. Les élèves de M-L et les élèves de C G sont dans le corridor. Ils s’habillent, En les voyant arriver, M-L demande à ses élèves de se ranger un peu du côté des casiers. C G ne dit rien à ses élèves et se place elle-même de façon à ne pas laisser passer L J. Arrivée à elle,    L J doit arrêter et attendre qu’elle se déplace pour continuer son chemin. Puisqu’elle n’apprécie guère son comportement avec elle, L J décide de continuer son chemin. L J accroche C G parce qu’elle n’a pas de place pour passer. Elle la regarde avec un air furieux. L J continue son chemin.

38.     19 décembre 2006. Lorsque J H lavait la vaisselle, seule dans la cuisine vers 12h00, C G est allée la voir pour lui dire avec un doigt menaçant qu’elle ne voulait plus qu’elle aille rapporter leurs conversations à la direction. J H écoute sans rien dire et C G répète au moins deux fois.

39.     C G s’est assise pour écouter les conversations de J H et d’autres enseignantes en fixant J H avec des yeux méchants. Vers 14h45 dans la salle des profs, C G parle de J H en l’appelant     « elle » comme si elle n’était pas là. « Ça se peux-tu faire toutes ces niaiseries là pour des collants… Elle se prend vraiment pour une autre. Elle se prend pour la directrice… »

40.     19 décembre 2006. Les trois classes de 2 ième sont dans une salle adjacente au gymnase lors d’une représentation du spectacle de Noël. Ma-L prend en charge de placer les élèves avant leur entrée. Les élèves de 1 ière sont en train de donner leur spectacle, donc M-L B fait attention de ne pas parler trop fort. C G donne alors une consigne et M-L B lui fait signe de parler moins fort en disant « C, les 1 ière chantent! » C G répond « il faut bien que je parle pour que les élèves m’entendent »

41.     Plus tard, C G passe près de M-L B et cette dernière lui offre des excuses pour ce qui s’était passé car elle réalise qu’elle n’aurait pas dû lui dire de baisser la voix. C G lui répond qu’elle commence à être tannée de tous ces enfantillages et que de toute façon elle est le souffre douleur de l’école. M-L B laisse tomber. Son ton était très agressif ainsi que son non verbal.

42.     À la fin de la journée, M-L B tente une autre réconciliation mais obtient un « Achale-moi pas ».

43.     Mercredi, 20 décembre 2006, vers 7h20. L J demande à M-L B, en tant que représentante syndicale, si elle peut lui parler d’un problème qu’elle vit à l’école. Elle explique qu’elle est harcelée par C G. Durant l’entrevue qui se tient dans la classe de L J, C G fait irruption dans la classe sans cogner. C G se met à crier après L J et à l’engueuler de ne plus jamais lui adresser la parole, puis lui ordonne d’arrêter de salir sa réputation. Plusieurs sacres s’en suivent. L J ne cesse de répéter à C G de sortir. M-L B voyant le refus de C G de sortir, elle lui demande de quitter. C G dit à M-L B d’un ton menaçant de  ne pas se mêler de ça car elle pourrait le regretter. C G continue de s’adresser à L J en lui disant de ne plus parler d’elle et qu’elle devra s’excuser pour lui avoir fait des reproches pour un incident qui s’était passé il y a de cela plusieurs semaines. C G dit qu’elle est fatiguée de ces enfantillages et demande à L J de cesser de la harceler.

44.     Quelques minutes plus tard, M-L B est dans sa classe. C G demande à lui parler, Elle le fait d’une façon tout à fait courtoise. C G demande d’avertir L J de cesser de la harceler sinon elle fera une plainte de harcèlement. M-L B lui demande si elle veut qu’elle l’informe de la procédure en tant que représentante syndicale. C G répond que ce n’est pas la peine car elle est déjà passée par là et connaît la marche à suivre.

45.     À l’heure du dîner, le psychologue de la CSDM arrive à l’école pour évaluer une des élèves de M-L B et de C G. C G et le psychologue se disent bonjour. M-L B est à l’autre bout de la salle des profs, se lève et se dirige vers eux. En arrivant près d’eux, le psychologue la regarde et  M-L B s’adresse à lui. C G part en furie et M-L B se retire. M-L B conclut qu’elle a dû être maladroite et qu’elle a dû couper la conversation. À l’heure du dîner, M-L B va s’excuser auprès de C G. Elle sait très bien que ses excuses ne seront probablement pas bien reçues, mais c’est la chose à faire. Dès qu’elle ouvre la porte de sa classe, C G se met à crier qu’elle ne peut plus vivre tout le monde est sur son dos, on la harcèle, elle ne dort plus, nous la rendons malade. C G ajoute que dès ce moment, elle s’isolait et ne voulait plus parler à qui que ce soit parce que c’est fou ici!

46.     Le 20 décembre 2006, après la récréation de l’après-midi. M-L B retrouve ses élèves dans un état de panique. Elle leur demande ce qui se passe. Les élèves lui disent que C G veut renvoyer Samantha de sa classe car elle a peur d’elle et que C G dit à tout le monde de sa classe qu’elle choisirait une élève de la classe de M-L B à la place de S. Une enfant (T) rapporte également que C G a crié après S qui pleurait et lui a dit « Tu as peur de moi comme de ta mère qui te bat alors je ne te veux plus dans ma classe ».

47.     Le 21 décembre 2006. C G laisse 2 messages à la secrétaire sur le répondeur de l’école. Elle parle doucement, lentement, comme si elle était médicamentée. Elle dit qu’elle a fait un ACV. Elle mentionne « Tu peux dire à L J qu’elle a gagné » « Ma mère voulait que j’aille la rejoindre, mais pas mes enfants ».

48.     De retour, le 8 janvier 2007, C G dit qu’elle a fait un ACV et qu’elle est paralysée d’un côté.


ANNEXE   IV

 

RAPPORT DE L’ENQUÊTEUR :

 

CONCLUSIONS GLOBALES :

 

341       Sur quarante-huit (48) allégations, vingt (20) allégations sont fondées pour les plaignants   L J, J H et L G, soient les numéros 4, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 35, 36, 37, 38, 39, 43, 44.

342       On peut conclure que C G a fait preuve d’une conduite harcelante répétée, puisqu’elle a :

            a) a fait des remarques, posé des questions ou tenu des commentaires déplacés ou        insultants et fait des insultes verbales envers ses collègues de travail L J, J H et L G; (4,         23, 24, 25, 26, 32, 35)

            b) a dévisagé du regard de manière agressive et a démontré une conduite intimidante,      provocatrice et agressive à l’égard de ses collègues L J et J H; (22, 23, 24, 25, 26,30, 31,          37, 39)

            c) a proféré des menaces à l’égard de ses collègues de travail S L, L J et J H en leur        reprochant d’avoir été rapporté des incidents à la direction avoir proféré des menaces de           porter plainte envers L J et L G pour harcèlement; (8, 32, 33, 36, 38, 43, 44)

            d) a maintenu sa conduite agressive envers L J, malgré l’avertissement de sa directrice.   (27, 28, 29)      

343       Par ailleurs, presque la totalité des allégations a été démontrée par la preuve en raison des nombreuses admissions de la mise en cause ou par la grande corroboration des témoignages recueillis. Les allégations qui sont non fondées ne rencontrent pas l’ensemble des critères de la définition du harcèlement, parce qu’essentiellement, la conduite n’a pas été répétée envers la même personne, ou encore, parce que la personne victime de la conduite n‘a pas porté plainte envers la mise en cause.

344       Sans qu’il s’agisse de harcèlement, on peut toutefois conclure que la mise en cause :

            a) a fait preuve d’un manque de professionnalisme dans l’accomplissement de ses           responsabilités à titre d’enseignante;

            b) a fait preuve d’insouciance à l’égard du bien d’autrui;

            c) a fait des remarques, posé des questions ou tenu des commentaires déplacés ou        insultants et fait des insultes verbales envers ses supérieurs hiérarchiques ainsi que   plusieurs de ses collègues de travail (ancien directeur, J B, M L-G, L G, M-L B, L P-B, M,            L J et J H);

d) a eu une conduite agressive menaçante à l’égard de plusieurs collègues de travail, leur reprochant d’aller rapporter ses conduites déplacées à la direction ou en menaçant son collègue de ne pas obtenir des excuses (S L, L G, L J et J H)         

e) a fait preuve d’un manque de jugement et d’une conduite déplacée envers trois de ses élèves.

345       L’enquêteur accorde peu de crédibilité à la mise en cause de revenir travailler à l’école M F et prête à s’excuser auprès de ses collègues de travail. À notre avis, ses agissements au cours de la période de septembre à décembre 2006 ont démontré au contraire qu’elle faisait preuve de manque de sensibilité, de civilité et de respect envers autrui, d’un manque de jugement important quant à la résolution des conflits en milieu de travail, et d’une absence de remords ou de regret. Le caractère intentionnel et prémédité des gestes n’a toutefois pas été démontré.