Plouffe c. Akyol |
2014 QCCQ 3353 |
JD2786
COUR DU QUÉBEC
« Division des petites créances »
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE LONGUEUIL
LOCALITÉ DE LONGUEUIL
« Chambre civile »
N° : 505-32-031161-137
DATE : 19 mars 2014
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE MONIQUE DUPUIS, J.C.Q.
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JEAN-GUY PLOUFFE
Demandeur
c.
HUSEYIN AKYOL
Défendeur
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JUGEMENT
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[1] Le demandeur poursuit le défendeur parce qu'en octobre 2012, celui-ci a reporté sans son consentement la date de procès fixée en avril 2013 dans un dossier l'opposant au promettant-acheteur de son immeuble, une courtière en immeuble et l'agence immobilière impliquées dans cette promesse de vente.
[2] Selon le demandeur, le défendeur ne l'a informé du report de la date de procès qu'en janvier 2013. Cela a brisé le lien de confiance qu'il entretenait jusque-là avec lui. En mars 2013, il met fin à son contrat de services professionnels.
[3] Le demandeur réclame 12 000,00$, soit le montant des honoraires payés à son nouvel avocat, chargé de continuer le dossier. Il réduit sa réclamation à 7 000,00$, pour bénéficier du recours à la Division des petites créances.
Analyse et décision
[4] Le défendeur a représenté le demandeur en défense dans une action intentée contre lui à compter de mars 2011, aux termes d'une convention de services professionnels intervenue en février précédent (pièce D-1).
[5] Le 5 octobre 2013, le défendeur se rend à une conférence préparatoire devant le juge André Denis, J.C.S., et le procès est fixé du 2 au 5 avril 2013. Dans les jours qui suivent, le défendeur se rend compte qu'une erreur s'est produite : il a déjà un procès fixé à cette date.
[6] Dès la mi-octobre, de concert avec les autres procureurs au dossier, il communique avec le juge Denis et une nouvelle date est fixée en novembre 2013.
[7] Selon le demandeur, il n'est avisé de ce changement qu'en janvier 2013. Le défendeur ne peut le contredire à ce sujet.
[8] Cela marque le bris du lien de confiance entre le demandeur et son avocat.
[9] En mars 2013, il l'avise qu'il lui retire son mandat et exprime sa déception suite au report de la date de procès. Surtout, il lui fait part des soupçons qu'il entretient à son égard à l'effet que le défendeur a ainsi avantagé ses adversaires (pièce P-1).
[10] Par la suite, le demandeur retient les services de Me Marc Brosseau pour continuer à le représenter dans cette affaire. Selon le compte d'honoraires déposé et son témoignage, il a dû payer 12 000,00$ pour qu'il prenne connaissance du dossier et effectue les premières démarches de son mandat dans ce dossier (pièce P-2).
[11]
Pour réussir dans son action, le demandeur doit démontrer par preuve
prépondérante le bien-fondé de ses prétentions non seulement quant à la faute
alléguée, mais également quant aux dommages qu'il prétend avoir subis et le
lien entre ces dommages et la faute, en application des dispositions des
articles
" Art. 2803 Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
Art. 2804 La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. "
[12] La preuve présentée à la Division des petites créances doit répondre aux règles habituelles de preuve. Ainsi, la partie à qui incombe la charge de la preuve doit l'établir de façon prépondérante au moyen d'éléments factuels pertinents en droit et en faits. La règle de la prépondérance de la preuve exige que celui à qui elle incombe démontre que l'existence des faits qu'il invoque est plus probable que leur inexistence. Il ne s'agit pas de démontrer par une certitude absolue ces faits. En l'absence de prépondérance de preuve, la partie qui ne peut se décharger de son fardeau perd sa cause.
[13] Certes, le fait de n'avoir avisé son client qu'en janvier 2013 du changement de date de procès survenu en octobre précédent, a brisé le lien de confiance entre les parties. Néanmoins, le Tribunal ne voit pas dans cette remise une faute ayant pu causer au demandeur les dommages allégués.
[14] Il n'est pas contredit que lorsque le défendeur fixe, en octobre 2012, le procès au mois d'avril 2013, il n'est pas disponible à ces dates. S'il avait consulté son agenda, le procès n'aurait jamais pu avoir lieu à cette date.
[15] Dès qu'il s'aperçoit de l'erreur, il communique avec les autres procureurs et avec le juge et dans les jours qui suivent, une nouvelle date de procès est fixée en novembre 2013, quelques mois à peine après la date initiale prévue.
[16] Le demandeur n'a pas démontré en quoi le report de quelques mois de la date de procès a favorisé les défendeurs dans ce dossier et lui a causé les dommages qu'il prétend avoir subis.
[17] Le plumitif du dossier de la Cour (pièce D-3) révèle que ce n'est que le 28 octobre 2013 que Me Marc Brosseau produit son avis de substitution de procureur. Il dépose, le 14 novembre 2013, une requête introductive d'instance en garantie amendée. Cela peut expliquer que le procès prévu en novembre n'a pas lieu et qu'une nouvelle conférence préparatoire est tenue.
[18] Rien dans la preuve ne permet d'attribuer l'annulation de la date de procès en novembre 2013 à une faute du défendeur.
[19] Par ailleurs, selon la preuve prépondérante, même après avoir été informé tardivement de la nouvelle date d'audition, le demandeur n'a pas mis fin immédiatement au mandat du défendeur : il lui a même donné des instructions, notamment quant aux propositions de règlement à faire à la partie adverse. À cet égard, le Tribunal retient la version donnée par le défendeur, notamment en raison de la documentation produite au soutien de ses affirmations (pièces D-3 et D-4).
[20] Le demandeur ne s'est donc pas déchargé du fardeau de preuve qui lui incombait et son action est rejetée, mais sans frais, vu les circonstances.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[21] REJETTE l'action du demandeur, sans frais.
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MONIQUE DUPUIS, J.C.Q.