Syndicat de l'enseignement de Champlain et Commission scolaire de la Vallée-des-Tisserands (grief syndical)

2014 QCTA 343

TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

 

No de dépôt :2014-5227

 

Date :

Le 31 mars 2014

 

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DEVANT L’ARBITRE :

Me MAUREEN FLYNN

 

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LE SYNDICAT DE L’ENSEIGNEMENT DE CHAMPLAIN

            Ci-après appelé « le Syndicat »

 

 

Et

 

LA COMMISSION SCOLAIRE DE LA VALLÉE-DES-TISSERANDS

 

Ci-après appelée « l’Employeur » ou « la Commission »

 

Et

 

LE MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION, DU LOISIR ET DU SPORT

            Ci-après appelé «  l’Intervenant patronal »

 

 

 

Numéro du grief : CSVT-05- 143

Numéro du greffe : 2002-0005796-5110

Conventions collectives : Convention collective intervenue entre le Comité patronal de négociation pour les Commissions scolaires francophones (CPNCF) et la Centrale de l’enseignement du Québec (CEQ) pour le compte des Syndicats d’enseignantes et d’enseignants qu’elle représente (2000-2002 et Entente intervenue entre ces parties le 8 novembre 2002)

            Ci-après appelée « la convention nationale »

Entente locale intervenue entre la Commission scolaire de la Vallée-des-Tisserands et le Syndicat de l’enseignement de Champlain (2000-2002)

            Ci-après appelée « la convention locale »

 

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

 

1.             LE GRIEF

[1]            Le 27 juin 2005, le Syndicat dépose un grief syndical. Il soutient que la Commission omet de tenir compte, dans la confection des horaires, des périodes de temps qui se situent entre deux assignations et réclament une compensation monétaire pour tous les enseignants concernés. Hormis les remèdes revendiqués, il allègue :

« Faits et correctifs :

Conformément aux dispositions des clauses 8.5.02 et 9-1.3 du chapitre 8.0.00 et de toute autre clause pertinente de la convention collective liant votre commission scolaire au Syndicat de l’enseignement de Champlain, ainsi que de l’article 57 paragraphe 1 de la Loi sur les normes du travail, nous vous informons de la naissance d’un grief.

Faits à l’origine du grief :

1.     L’article 57 de la Loi sur les normes du travail stipule que :

Un salarié est réputé au travail dans les cas suivants :

1.     Lorsqu’il est à la disposition de son employeur sur les lieux du travail et qu’il est obligé d’attendre qu’on lui donne du travail ;

[…]

2.     Dans la confection des horaires de travail pour l’année scolaire 2004-2005, les directions des écoles primaires et secondaires, des centres d’éducation aux adultes et de formation professionnelle en général, et plus particulièrement les directions de l’école secondaire des Patriotes de Beauharnois, de l’école St-Joseph-Artisan, du Centre de formation professionnelle de la Pointe-du-Lac et du Centre Jean XXIII d’éducation des adultes, n’ont pas tenu compte du fait que le temps compris entre deux périodes de tâche éducative devait être considéré comme du temps d’assignation par l’application de l’article 57 paragraphe 1 de la Loi sur les normes du travail.

3.     Ce faisant, les directions de ces écoles et de ces centres assignent une semaine de travail qui excède les paramètres de la clause 8-5.02 de l’entente nationale en ne reconnaissant pas le temps où l’enseignante ou l’enseignant est à la disposition de l’employeur, qu’il est sur les lieux du travail et qu’il est en attente de travail.

4.     […] »

 

[2]            Le 7 avril 2010, une première sentence à l’égard des objections préliminaires soulevées par la partie patronale a été rendue [1] . La Commission a essentiellement plaidé l’estoppel et que la présente instance n’avait pas la compétence pour interpréter une disposition de la Loi sur les normes du travail. La soussignée a rejeté les objections mais a maintenu en partie une objection à l’égard d’un deuxième grief.

[3]            Autrement, les parties ont convenu que la preuve soumise dans le cadre des objections préliminaires fait partie intégrante de celle administrée sur le fond.

[4]            Quant à l’administration de la preuve au fond, la partie patronale a soutenu en conférence préparatoire que la confection des horaires des enseignants variait d’un enseignant à l’autre et ne pouvait en conséquence admettre que la preuve soit faite par le biais de cas types. Devant cette prétention, la partie syndicale a décidé de soumettre cinq cas par secteur d’enseignement, à savoir : le primaire, le secondaire, l’éducation aux adultes et la formation professionnelle.

 

2.             LES QUESTIONS EN LITIGE

[5]            Est-ce que deux conventions locales convenues entre de tierces parties sont admissibles en preuve ?

[6]            Est-ce qu’un enseignant est réputé au travail, durant les récréations ou les pauses des élèves comprises entre deux périodes assignées à son l’horaire, selon l’article 57.1 de la Loi sur les normes du travail ? Dans l’affirmative, y a-t-il contravention à la convention collective ?

 

3.             LA PREUVE

[7]            M. Yves Guillemette est aujourd’hui retraité. Il a occupé des fonctions syndicales dont celle de conseiller aux relations du travail auprès des quelque 570 enseignants qui œuvrent au sein de la Commission.

[8]            M. Guillemette explique que le 8 novembre 2002, le Comité patronal de négociation pour les commissions francophones (CPNCF) et la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) pour le compte des Syndicats d’enseignantes et d’enseignants ont convenu d’une entente particulière. Ladite entente modifiait certaines dispositions encadrant les horaires de travail. Par cette entente, lesdites parties ont ajouté au temps rémunéré du temps de nature personnelle et appelé couramment « TNP ». Ainsi, à compter de l’année scolaire 2003-2004, deux heures [2] pour l’accomplissement de travail de nature personnelle étaient reconnues. Ce temps peut être pris à l’intérieur ou à l’extérieur du temps assigné par la direction de l’école mais doit être fixé à l’intérieur d’une certaine amplitude.

[9]            Il explique également que le temps d’accomplissement de travail de nature personnelle compris dans la semaine régulière de travail vise la fonction générale énoncée à l’article 8-2.01 de la convention nationale. [3]

[10]         L’article 8-2.01 de la convention nationale énonce que la fonction générale de l’enseignant comprend les attributions suivantes :

« 8.2.00 FONCTION GÉNÉRALE

8-2.01 L’enseignante ou l’enseignant dispense des activités d’apprentissage et de formation aux élèves et elle ou il participe au développement de la vie étudiante de l’école.

Dans ce cadre, les attributions caractéristiques de l’enseignante ou de l’enseignant sont :

1)     de préparer et de dispenser des cours dans les limites des programmes autorisés ;

2)     de collaborer avec les autres enseignantes ou enseignants et les professionnelles ou professionnels de l’école en vue de prendre les mesures appropriées pour servir les besoins individuels de l’élève ;

3)     d’organiser et de superviser des activités étudiantes ;

4)     d’organiser et de superviser des stages en milieu de travail ;

5)     d’assumer les responsabilités d’encadrement auprès d’un groupe d’élèves ;

6)     d’évaluer le rendement et le progrès des élèves qui lui sont confiés et d’en faire rapport à la direction de l’école et aux parents selon le système en vigueur ; ce système est un objet soumis à l’organisme de participation des enseignantes et enseignants déterminé dans le cadre du chapitre 4-0.00.

7)     de surveiller les élèves qui lui sont confiés ainsi que les autres élèves lorsqu’elles ou ils sont en sa présence ;

8)     de contrôler les retards et les absences de ses élèves et d’en faire rapport à la direction de l’école selon le système en vigueur ; ce système est un objet soumis à l’organisme de participation des enseignantes et enseignants déterminé dans le cadre du chapitre 4-0.00 ;

9)     de participer aux réunions en relation avec son travail ;

10) de s’acquitter d’autres fonctions qui peuvent normalement être attribuées à du personnel enseignant. » [4]

 

[11]         M. Guillemette note que les enseignants doivent surveiller les élèves conformément aux codes de vie de chaque école.

[12]         Vu l’ampleur des changements, M. Guillemette rédige un document explicatif des changements pour l’année scolaire 2003-2004 et les années suivantes. Il y détaille sa compréhension de l’application par secteur qui comporte des variables au niveau de l’aménagement et de la comptabilisation du temps (cycle de 5 ou 9 jours ou même annuel). Il précise que les documents transmis par la Commission et détaillant la tâche des enseignants par année scolaire ne révèlent pas l’horaire convenu avec chaque enseignant. À l’aide de son document, M. Guillemette explique qu’à son avis, l’horaire de travail tient compte de trois grandes composantes à savoir : du temps consacré à la tâche éducative, du temps de disponibilité et du temps de nature personnelle. Il comprend que la tâche éducative comprend des activités professionnelles expressément confiées par la Commission ou la direction de l’école dont celles-ci : présentation de cours et leçons, récupération, activités de formation et d’éveil (préscolaire), activités étudiantes, encadrement et surveillances autres que les surveillances de l’accueil et des déplacements. À cet effet, il réfère aux clauses 8 - 6.02 A) et 13-10.07B) de la convention nationale.

[13]         À son avis, le temps de disponibilité comprend la tâche éducative et d’autres attributions caractéristiques de la fonction générale de l’enseignant, dont celles de surveillance de l’accueil et des déplacements et des réunions. Il précise que ce temps de disponibilité s’effectue au lieu assigné par la Commission ou la direction de l’école. Il précise que ce temps de disponibilité doit se situer à l’intérieur d’une amplitude hebdomadaire de 35 heures et d’une amplitude quotidienne de 8 heures.

[14]         Enfin, le travail de nature personnelle peut à son avis comprendre des attributions caractéristiques de nature personnelle comme celles définies à la fonction générale décrite et cela conformément aux articles 8-2.01, 11-10.02 et 123-10.02, les dix rencontres collectives, les trois premières rencontres de parents. Il précise que l’enseignant détermine le travail qu’il va accomplir au cours de ce temps.

[15]         M. Guillemette souligne qu’aucune pause n’est prévue à la convention collective. Il y est prévu cependant, une période de repas de 75 minutes au primaire et de 50 minutes au secondaire. Cette période est exclue de l’horaire de travail. (Voir articles 8-7.05 et 8-5.03).

[16]         Enfin, par le biais du grief, M. Guillemette vise le temps fait par les enseignants à temps plein ou à temps partiel entre deux assignations prévues à leur horaire de travail et qui ne sont pas rémunérées. En contre-interrogatoire, il admet qu’au cours d’un comité de relation spécial tenu le 28 avril 2003, il a découvert qu’il y avait divergence d’opinions entre le Syndicat et la Commission. Il ajoute que ce comité est au cœur de son enquête au cours de laquelle il a eu des échanges avec plus d’une quinzaine d’enseignants et plusieurs délégués. Il précise que le temps de surveillance assignée par l’école est comptabilisé dans les 27 heures mais lorsqu’il n’est pas assigné, ce temps n’est pas rémunéré alors qu’il estime que l’enseignant est disponible. Il réclame donc ce temps. S’ajoutent aux périodes de récréations non assignées les battements de deux à cinq minutes (notamment à des fins de déplacement au secondaire).

[17]         M. Sébastien Campbell, conseiller syndical à temps plein, rapporte que la Commission compte vingt-six écoles primaires, sept secondaires, trois centres d’éducation aux adultes et deux centres d’éducation professionnelle.

[18]         Mme Odette St-Onge est retraitée depuis janvier 2010. Elle a débuté une carrière en ressources humaines en 1976 à la Commission et a été nommée directrice des ressources humaines en 2003. À ce titre, elle conseille les directions des établissements notamment sur l’application des conventions collectives et des lois.

[19]         Mme St-Onge explique qu’à tous les printemps, une évaluation des besoins et des effectifs est complétée et cette dernière est suivie d’une première séance d’affectation en mai et d’une deuxième en juin de chaque année. Avant le 15 octobre, les enseignants rencontrent les directeurs de leur établissement afin de compléter leur tâche complète pour l’année scolaire en cours.

[20]         Et, depuis l’année scolaire 2003-2004, du temps de travail de nature personnelle est ajouté à la semaine régulière du travail et donc pris en compte dans l’établissement de la tâche de chaque enseignant et cela en vertu d’une entente intervenue entre le Comité patronal de négociation pour les Commissions scolaires et la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) pour le compte des Syndicats d’enseignantes et d’enseignants qu’elle représente le 8 novembre 2002 (ci-après nommée « entente 2002 »).

[21]         À titre de directrice des ressources humaines, Mme St-Onge prépare du matériel pour conseiller les directeurs des établissements sur l’application des clauses négociées dans l’entente 2002.

[22]         Ainsi, le 8 octobre 2003, elle rappelle par mémo aux directeurs des écoles primaires et secondaires, que la tâche de chaque enseignant doit être complétée par écrit avant le 15 octobre et qu’à cet effet, le formulaire joint au mémo a été corrigé afin d’y inclure le temps de nature personnelle d’une durée de deux heures. Par ailleurs, elle souligne les éléments suivants :

«  TÂCHES DES ENSEIGNANTS

1. Les nouvelles modalités concernant la tâche des enseignants ont été négociées et agrées à l’échelle nationale, par les deux parties, patronale et syndicale. Elles ont convenu de nouvelles dispositions salariales en contrepartie d’une augmentation du nombre d’heures à l’école.

2. Tel que convenu à une rencontre du comité consultatif de gestion, la totalité des heures prévues à la semaine régulière de travail de l’enseignante et de l’enseignant pour l’année scolaire 2003-2004, soit 29 heures, doit se faire à l’école.

3. La tâche de l’enseignante et enseignant doit être déterminée dans une grille-horaire qui prévoit les moments où se situera chaque élément de la semaine régulière de travail (cours et leçons, tâche éducative, temps de présence assigné, travail personnel, …).

4. Le temps de récréation des élèves ne constitue pas automatiquement du temps comptabilisé comme tâche éducative ou temps de présence des enseignants, à moins que la directrice ou le directeur n’ait prévu d’assigner l’enseignante ou l’enseignant à une tâche pendant ce temps.

5. Le travail personnel s’effectue aux moments déterminés par l’enseignante ou l’enseignant, en dehors des moments déterminés par la directrice ou le directeur pour l’accomplissement des tâches reliées aux 27 heures, aux 10 rencontres collectives et aux 3 premières réunions avec les parents.

6. L’entente locale prévoit également que, dans la répartition des fonctions et responsabilités :

Ø   L’enseignante ou l’enseignant du secondaire ne peut être tenu d’effectuer de la récupération qu’auprès de ses élèves et seulement dans la matière ou les matières enseignées (clause 5-3.21.06) ;

Ø   Le temps déterminé par la direction d’école, consacré à l’organisation et la supervision des stages en milieu de travail, est assimilé à la présentation de cours et leçons (clause 5-3.21.07) ;

Ø   La répartition des tâches ne doit en aucun cas occasionner un changement de champ (5-3.21.08). »

 

[23]         Mme St-Onge précise que les surveillances effectuées à l’accueil, lors des déplacements ou des battements et durant les récréations peuvent constituer du temps de présence.

[24]         Le ou vers le 17 aout 2004, elle finalise l’élaboration d’un document dans lequel elle schématise l’ensemble de la tâche de l’enseignant par niveau scolaire. Ledit document est distribué aux directeurs d’école et constitue le document de référence dans l’aménagement des horaires et des tâches des enseignants de la Commission. En contre-interrogatoire, Mme St-Onge confirme que toutes les tâches énumérées audit document par secteur doivent être effectuées par les enseignants.

[25]         En contre-interrogatoire, elle reconnait que la surveillance des élèves qui sont confiés à l’enseignant ainsi que les autres élèves lorsqu’ils sont en sa présence fait partie de la fonction générale de l’enseignant décrite à l’article 8-2.01 de la convention nationale. Elle ajoute toutefois qu’il faut vérifier la convention locale. Enfin, elle admet qu’un enseignant en déplacement dans les corridors et qui constate une bataille entre des élèves doit intervenir et ce comme tout le monde incluant le concierge. Tout comme, en tant que citoyen, l’enseignant doit assister un élève blessé. Mme St-Onge note n’avoir jamais vu de mesure disciplinaire découlant du défaut d’un enseignant d’intervenir auprès d’un élève notamment impliqué dans une bataille et elle est d’avis que si cela se produisait, la direction de l’école devrait à tout le moins tenir une bonne jasette avec l’enseignant. Enfin, elle admet qu’un enseignant qui a une altercation avec un autre enseignant pendant une récréation sera discipliné. Il sera également discipliné s’il fait preuve d’insubordination à l’égard de son directeur.

[26]         Le 21 octobre 2004, Mme St-Onge rencontre les directeurs des écoles secondaires de la Commission afin d’uniformiser leurs façons de faire. À cette fin, elle leur remet un document qui résume quelques paramètres qui doivent être pris en compte dans l’aménagement de la tâche des enseignants. Elle rappelle que la durée, le lieu et le moment sont déterminants :

 

« Entente convenue en novembre 2002 :

v   Détermination de la durée pendant laquelle l’enseignant est en « travail professionnel », soit :

Ø   Cours et leçons (moyenne : 17h5/sem. (1 845 min/9jrs))

Ø   Tâche éducative (20h/sem. (1 200 min/9jrs))

Ø   Autres tâches prévues à la fonction générale (27h/sem.) (2 916 min/9jrs)

v   Détermination du lieu , soit :

Ø   À l’école

v   Détermination du moment , soit :

Ø   Par la direction (27 heures)

Ø   Par l’enseignant (3 heures)

[…]

Notion de « déplacement » :

v   Convention collective : clause 8-6.05.01, entente locale

« Le temps requis pour la surveillance de l’accueil et des déplacements est comptabilisé à l’intérieur de la semaine régulière de travail. »

Il fait comprendre qu’il s’agit de l’accueil et des déplacements des élèves. »

 

[27]         Suite à cette rencontre du 21 octobre 2004, Mme St-Onge précise dans un mémo quelques aspects dans l’aménagement de la tâche dont les modalités entourant le travail de nature personnelle :

« […]

À la suite de notre rencontre du 21 octobre dernier, la présente est pour vous rappeler quelques éléments concernant la tâche des enseignants :

¨        Le temps de travail de 27 heures se fait au lieu et aux moments assignés par la direction ;

¨        Le temps et la nature du travail de nature personnelle (3 heures pour 2004-2005), habituellement effectué à l’intérieur de l’amplitude quotidienne de 8 heures, sont déterminés par l’enseignant ;

¨        Le travail de nature personnelle peut toutefois être accompli en dehors de l’amplitude quotidienne :

o    après entente avec la direction et l’enseignant ;

o    pour un maximum de 2 heures 30 minutes par semaine, soit 270 minutes par cycle de 9 jours, qui se situe 30 minutes précédant immédiatement le début ou suivant immédiatement la fin de l’amplitude quotidienne ;

o    il peut également être fixé pendant la période de repas du midi excédant 50 minutes accordées pour le repas, sans excéder 75 minutes par semaine, ou 135 minutes par cycle de 9 jours. […] »

[28]         Mme St-Onge ne peut affirmer si des directions d’école ont accepté de placer du temps de nature personnelle pendant les récréations et rappelle que la détermination du moment à l’intérieur de l’amplitude relève de l’enseignant. Toutefois, elle estime que la direction peut questionner l’enseignant notamment si cette dernière voit l’enseignant prendre un café pendant son temps de nature personnelle. Elle estime également qu’il serait difficile de diviser du temps de battement en temps de présence et en temps de nature personnelle. Enfin, elle est d’avis que la direction de l’école peut aviser un enseignant qui n’effectue pas le temps de nature personnelle fixé à son horaire.

[29]         Mme St-Onge explique que la tâche éducative de chaque enseignant est effectuée en tenant compte de l’intérêt de ce dernier et que les directions d’école essaient de répartir équitablement les surveillances. Le temps de présence est réparti en fonction de l’horaire et des cours et leçons. Elle estime que les directions d’école ont une certaine responsabilité à l’égard des tâches convenues avec les enseignants et qu’elles interviennent au besoin dans le respect de l’autonomie professionnelle des enseignants.

[30]         Mme St-Onge rapporte que la Commission n’a reçu aucune réclamation pour un dépassement de la tâche éducative au cours de l’année 2004-2005, hormis un seul cas dans le cadre d’une surveillance d’examens. La Commission n’a pas reçu de griefs réclamant de temps supplémentaire effectué pendant les récréations sauf le grief collectif visé par le présent litige.

[31]         Quant aux balises entourant les activités parascolaires ou les voyages, Mme St-Onge explique que le temps consacré à ces activités est généralement reconnu à raison d’une demi-heure par semaine et est annualisé. Elle n’a jamais été informée d’une problématique à cet égard.

[32]         En contre-interrogatoire, Mme St-Onge confirme que le plan de réussite ou le code de vie de chaque école s’applique pendant l’amplitude quotidienne et même au-delà de celle-ci.

[33]         Mme St-Onge se souvient d’un seul cas où un enseignant a demandé de placer du temps de travail de nature personnelle pendant une récréation non assignée.

[34]         Mme St-Onge admet que la Politique relative aux interventions auprès de l’élève en difficulté comportementale de la Commission s’applique à tout le personnel de la Commission et en tout temps, dont les extraits suivants soulignés par le procureur syndical :

« […]

2. LES VALEURS ET LES PRINCIPES PROPOSÉS

2.2.2 L’attitude professionnelle générale du personnel de la commission scolaire en est une de relation d’aide à l’égard de l’élève. Le personnel est invité à développer des attitudes d’attention, d’accueil et d’écoute active aux besoins de l’élève ;

[…]

4.     LES MODES HABITUELS D’INTERVENTION AURPÈS DE L’ÉLÈVE EN DIFFICULTÉ COMPORTEMENTALE

Les interventions du personnel auprès de l’élève se situent dans une perspective de relation d’aide, de soutien, de développement et de responsabilisation.

4.1   L’enseignant intervient dès qu’il observe une difficulté dans l’attitude ou le comportement de l’élève.

4.2   Si la situation ne s’améliore pas, l’enseignant communique l’information aux parents afin de demander leur collaboration aux actions correctives proposées. »

 

[35]         Toujours en contre-interrogatoire, Mme St-Onge reconnait que le Plan stratégique 2003-2006 de la Commission s’applique à tout moment et elle ajoute que ces objectifs font appel aux obligations de tout bon père de famille notamment en matière de sécurité. Elle admet que d’assurer la sécurité des élèves fait partie de la fonction de tout enseignant et qu’il doit en outre appliquer l’objectif suivant :

«   ORIENTATIONS

Assurer la réussite du plus grand nombre possible d’élèves des secteurs des jeunes, des adultes et de la formation professionnelle.

[…]

OBJECTIFS

1.5   Assurer aux élèves un climat sécuritaire et exempt de violence.

 

AXES D’INTERVENTION

Ø   Évaluer dans les établissements le niveau de violence auquel sont soumis les élèves de même que la problématique de consommation de drogue et établir un plan d’action pour corriger ces situations. »

 

[36]         Mme St-Onge n’a jamais été consultée par un directeur d’école sur les interventions pédagogiques ou personnelles qu’un enseignant effectue auprès des élèves pendant les périodes de récréation non assignées. Tout comme, elle n’a jamais émis de directive interdisant ces interventions. Mme St-Onge admet également que la Commission n’a jamais informé les directions des établissements de demander aux enseignants de conduire les élèves au local RETRAIT que pendant des périodes de temps assignées. Tout comme, la Commission n’a jamais émis de directive concernant les interventions qu’un enseignant peut ou ne pas faire lorsqu’il est témoin d’une bataille pendant une période de récréation non assignée. En somme, aucune directive n’a été écrite quant à l’utilisation du temps pendant les périodes de récréation non assignées.

[37]         Mme St-Onge admet également n’avoir jamais écrit de directive indiquant que les devoirs ou fonctions de l’enseignant énumérés à la convention collective cessaient de s’appliquer pendant les périodes de récréation non assignées. Elle ajoute, toutefois, que la direction ne peut rien exiger en retour. Enfin, elle admet que la Commission n’a jamais informé les enseignants que s’ils exécutaient une tâche d’enseignant pendant les récréations non assignées, ce temps ne serait pas reconnu et donc non rémunéré.

[38]         En ré-interrogatoire, Mme St-Onge confirme que toutes les périodes libres d’un enseignant à l’horaire ne sont pas nécessairement occupées en temps de travail de nature personnelle ou en temps de présence. Ainsi, un enseignant peut avoir des périodes totalement libres à son horaire.

 

Le secteur primaire

1.         École Montpetit

[39]         Mme Anne-Marie Dimuzio détient un baccalauréat en administration scolaire. Elle a débuté sa carrière à la Commission en 2001 et travaille depuis 2002 à l’école Montpetit située à Valleyfield. Au cours de l’année scolaire 2004-2005, elle a enseigné en 4 e année et à ce titre, elle a enseigné toutes les matières sauf l’anglais, l’éducation physique et la musique.

[40]         L’École Montpetit accueille près de 180 élèves. Elle offre tous les niveaux du primaire dont deux classes à la maternelle. Douze enseignants y travaillent, dont deux spécialisés en éducation physique, un en anglais et un en musique.

[41]         Le document intitulé « Tâche des enseignants 2004-2005 » préparé par la Commission et fourni au Syndicat indique que Mme Dimuzio détient une tâche globale de 1 800 minutes dont 1 620 en présence. Sa tâche est répartie de la manière suivante : 1 380 minutes en tâche éducative dont 1 230 minutes en cours et leçons et 150 minutes en encadrement, 240 minutes en tâche complémentaire et 180 minutes en temps personnel. L’Encadrement comprend : 60 minutes de récupération, 60 minutes de surveillance, 30 minutes d’activités. La tâche complémentaire comprend 90 minutes à l’accueil et déplacement et 150 minutes non spécifiées.

[42]         Mme Dimuzio dépose un document remis à tous les enseignants en début d’année scolaire par le directeur de l’école, M. Guy Lambert. Audit document, il indique que les enseignants doivent offrir de l’encadrement en dehors des périodes de cours et leçons à raison de 150 minutes par année. Se greffent à la tâche éducative, 240 minutes en tâche complémentaire et 180 minutes de travail de nature personnelle. Y est jointe une feuille de répartition du temps et les enseignants sont invités à la compléter. À cette fin, M. Lambert fournit des paramètres de référence :

« 1. Encadrement

4.3   Surveillance 60 minutes

4.4    Récupération

4.5    Activité

 

5.     Tâche complémentaire (240 minutes)

5.1   Accueil et déplacement 90 minutes

5.2    2 périodes de spécialistes 90 minutes

5.3    Travail par cycle 60 minutes

 

6.     Travail de nature personnelle (180 minutes)

6.1   2 jours par semaine (60 minutes) + 60 minutes cumulatives du vendredi pour …

1.     10 rencontres collectives

2.     3 rencontres de parents […] »

 

[43]         Mme Dimuzio précise que M. Lambert ne fournit aucune information quant au temps qui s’écoule entre deux assignations. Elle en discute donc avec lui et lui demande de reconnaitre les quinze minutes de récréation, estimant être disponible pendant cette période de temps. M. Lambert refuse et elle reçoit un écrit à cet effet. En contre-interrogatoire, elle soutient en avoir discuté en 2004-2005, ayant constaté la problématique au cours de la première année d’application des nouvelles règles.

[44]         L’horaire quotidien de travail de Mme Dimuzio se répartit comme suit :

-        1 ière période de 8h15 à 9h00 

-        2 ième période de 9h00 à 9h45 

-        récréation de 9h45 à 10h00

-        temps d’accueil de 10h00 à 10h05 [5]

-        3 ième période de 10h05 à 10h50

-        4 ième période de 10h50 à 11h35

-        dîner de 11h35 à 12h50

-        5 ième période de 12h50 à 13h35

-        battement de cinq

-        6 ième période de 13h40 à 14h35.

 

[45]         Mme Dimuzio explique qu’au début de la récréation de l’avant-midi, chaque enseignant aide les élèves à s’habiller pour la récréation et ce à partir du moment où la cloche sonne à 9 h 45. Elle précise que les enseignants font le même travail lorsque la cloche sonne pour annoncer le début et la fin de la période de récréation. Toutefois, l’horaire prévoit un battement rémunéré de cinq minutes à la fin de la période de récréation.

[46]         Pendant les périodes de récréation, Mme Dimuzio exécute diverses tâches. Au niveau pédagogique, elle demeure auprès d’un élève afin qu’il puisse terminer un travail non complété en avant-midi. Elle fait reprendre un travail par un élève qui est arrivé en retard. Elle fournit des explications particulières à un élève qui éprouve des difficultés. Sur le plan disciplinaire, elle en profite pour discuter du comportement d’un élève. Elle gère également les conflits qui surviennent dans les corridors et cela conformément au code de vie de l’école.

[47]         Le code de vie édicte notamment des orientations, des objectifs, des axes d’interventions et des moyens en la matière. À cet effet, il vise à assurer aux élèves un milieu de vie calme, sécuritaire et exempt de violence indispensable à la réussite éducative. Le code de vie s’applique en tout temps dans les aires de l’école. Ainsi, un élève peut recevoir une contravention pour manque de respect à l’égard d’un autre élève pendant les périodes de récréation et tout enseignant témoin d’un incident doit intervenir.

[48]         Sur le plan humain, lorsqu’elle a des doutes que l’environnement familial affecte l’enfant, elle profite de cette période pour en discuter avec l’enfant.

[49]         Mme Dimuzio profite également des périodes de récréation pour échanger avec les professionnels de l’école (psycho-éducateur, orthopédagogue et psychologue). Elle précise que le psycho-éducateur vient une à deux fois par semaine. L’orthopédagogue y est à 80 % de son temps et le psychologue vient une fois par semaine.

[50]         Mme Dimuzio utilise également cette période de temps pour réserver un autobus pour une sortie éducative, pour régler des questions administratives avec la secrétaire de l’école, pour faire des photocopies, pour reproduire du matériel enseigné afin de le remettre à un élève absent, pour appeler un parent à sa demande, pour installer un rétroprojecteur en classe, pour changer la disposition de la classe, pour installer le matériel requis pour le cours d’arts plastiques.

[51]         Pendant la récréation, elle rencontre également le directeur de l’école afin de fixer un rendez-vous avec un parent dans le cadre d’un plan d’intervention adapté ou pour discuter de toute autre question scolaire. Enfin, il arrive même que des rencontres avec des parents soient fixées durant ces périodes surtout lorsque la présence d’un spécialiste est requise.

[52]         Enfin, Mme Dimuzio estime qu’elle utilise très rarement la période de récréation pour elle-même. Généralement, lorsqu’elle arrive au salon du personnel, la cloche sonne peu de temps après son arrivée. Et, même au cours de ce temps, les enseignants en profitent pour échanger au sujet de leurs élèves. Elle estime consacrer 75 % du temps de récréation à son travail. En contre-interrogatoire, elle affirme que M. Lambert vient fréquemment chercher des enseignants pendant les périodes de récréation au salon du personnel afin de discuter d’affaires courantes. Elle admet que les enseignants jasent de sujets variés tout en prenant un café. Elle maintient que la direction de l’école n’a jamais informé les enseignants que cette période était libre et appartenait aux enseignants.

[53]         En contre-interrogatoire, Mme Dimuzio reconnait le contrat d’engagement convenu en aout 2001. Pour l’année scolaire 2004-2005, elle admet avoir reçu le traitement annuel prévu à la convention collective.

[54]         Mme Dimuzio précise que l’horaire est imposé par la direction de l’école. Elle précise qu’elle faisait, trois ou quatre fois par semaine, de la surveillance à l’arrivée des autobus le soir. Elle n’était pas assignée à la surveillance de récréation. Elle croit qu’il y avait quatre périodes de spécialistes et d’une durée de 45 minutes par semaine. Elle reconnait qu’il y avait quelques périodes de spécialistes fixées en fin de journée et que ce temps était comptabilisé dans la tâche complémentaire ou la tâche de nature personnelle. Elle ajoute qu’elle estime que, quelle que soit la répartition, elle était toujours disponible pour la direction ou les autres enseignants durant ces périodes.

[55]         Mme Dimuzio explique qu’elle a planifié son temps de nature personnelle à l’intérieur des 35 heures à l’école. Elle admet qu’il est possible de tenir des rencontres avec des parents ou des spécialistes durant le temps reconnu à la tâche complémentaire ou de nature personnelle tout en ajoutant qu’il arrive tout de même fréquemment que ces rencontres ont lieu durant les récréations. Tout comme il est possible de faire des photocopies durant ce temps reconnu mais que ce temps ne correspond pas toujours aux besoins. Enfin, elle soutient faire du travail à la maison et pour lequel, elle ne reçoit pas de rémunération. En réplique, elle précise que parfois le temps reconnu comme complémentaire est utilisé pour planifier avec des enseignants d’un autre niveau scolaire des sorties pédagogiques.

[56]         En contre-preuve, Mme Dimuzio soutient qu’il n’y avait aucune directive émise par la direction et interdisant les enseignants de discuter de cas d’élèves durant les pauses. Même qu’en guise symbolique, lorsque les enseignants allaient manger en soirée au restaurant, ils plaçaient un pot au centre de la table et tout enseignant qui parlait de l’école devait y verser 0,25 $.

 

La direction

[57]         M. Guy Lambert partageait son temps à titre de directeur d’école en 2004-2005 entre l’école Saint-Joseph-Artisan et l’école Montpetit. Il s’y rendait par alternance, une journée complète à la fois.

[58]         M. Lambert reconnait le document reproduit en annexe de la présente sentence et rapporte que la Commission souhaitait une application uniforme au sein des écoles. En 2004-2005, il appliquait les balises reproduites aux paragraphes 4 et 5 du mémo de Mme St-Onge et reproduit au paragraphe 22 de la présente sentence.

[59]         Tout en se référant au document dont les extraits essentiels sont reproduits au paragraphe 43 de la présente sentence, M. Lambert explique que les enseignants définissaient dans un premier temps la tâche éducative et complétaient les autres tâches en se référant au document qu’il avait préparé à cette fin. Les battements étaient donc compris dans la tâche complémentaire et les minutes indiquées au document ne constituaient que des indications. Ainsi, l’accueil et déplacement pouvaient représenter plus ou moins 90 minutes mais pas plus que 100 minutes. Également, certains enseignants consacraient plus de temps aux activités et d’autres à la récupération et le temps suggéré à ces fins variait donc d’un enseignant à l’autre. M. Lambert précise qu’une période de 60 minutes était reconnue et fixée à l’horaire en fin de journée afin que les enseignants puissent se réunir par cycle.

[60]         Quant aux récréations, la seule exigence provenant de la direction concernait la surveillance. Aucun temps de travail de nature personnelle n’était fixé durant les récréations non assignées. M. Lambert affirme également n’avoir reçu aucune demande pour fixer du temps de disponibilité pendant les récréations libres. M. Lambert reconnait qu’à l’occasion, des enseignants venaient le rencontrer pendant les récréations ou qu’il profitait de cette période pour faire des rappels dans le salon du personnel. Pendant les récréations, les enseignants en profitaient pour aller à la salle de bain, prendre un café, manger une collation et jaser de tout et de rien. Bien qu’ils se soient donnés comme consigne de ne pas parler de cas d’élèves, M. Lambert note qu’ils avaient de la difficulté à la respecter.

[61]         M. Lambert estime que les battements entourant les récréations servent à préparer les élèves et que le temps alloué à cette fin était suffisant. Il précise que lorsqu’un enfant se blesse, les personnes suivantes peuvent être appelées à intervenir : le surveillant, la secrétaire, les enseignants, le concierge et le directeur de l’école. En contre-interrogatoire, il confirme qu’un enseignant ne peut laisser ses élèves si à la fin du battement, ces derniers ne sont pas encore prêts pour la récréation et sous la surveillance du surveillant. Il confirme également qu’un enseignant non assigné peut être appelé à s’occuper d’un élève blessé et il ajoute qu’il y a toujours deux surveillants dans la cour d’école afin que l’un d’eux puisse justement conduire l’élève au secrétariat. En contre-interrogatoire, il admet que des enseignants demeurent avec des élèves pendant les récréations et qu’ils effectuent du travail d’enseignant.

[62]         M. Lambert admet qu’il doit à l’occasion durant les récréations, gérer des questions disciplinaires, faire des appels, contacter des parents et qu’il n’est donc pas toujours au salon du personnel durant ces périodes de temps. Il admet que les enseignants y sont plus souvent que lui-même.

[63]         M. Lambert considère que la tâche constitue un cadre de référence et que les enseignants pouvaient ponctuellement la modifier avec son accord. Ainsi, un enseignant pouvait rencontrer un parent concernant un plan d’intervention en fin de journée. Il souligne que les enseignants entre eux échangeaient à l’occasion leurs périodes de surveillance.

[64]         M. Lambert confirme que chaque enseignant avait quatre périodes occupées par les spécialistes par semaine. Quant à la surveillance, il remettait un tableau aux enseignants et ces derniers se répartissaient entre eux les périodes en fonction de leurs contraintes respectives.

[65]         M. Lambert reconnait le projet éducatif et le plan de réussite de l’école Montpetit. Ce dernier a été élaboré avec les enseignants et adopté par le conseil d’établissement. Ce document permet de fixer des objectifs de travail et fait partie intégrante de la tâche éducative de l’enseignant. En contre-interrogatoire, M. Lambert admet que le projet éducatif et le plan de réussite s’appliquent pendant les récréations non assignées. Il ajoute que ce document fait partie de ce que les enseignants doivent faire. Ainsi, tout enseignant doit intervenir lorsqu’il est témoin d’une bataille dans le corridor.

[66]         Il confirme que le Département des ressources humaines de la Commission envoyait l’horaire des professionnels à chaque école et cet horaire était affiché. Les enseignants pouvaient alors laisser un message et fixer au besoin des rencontres avec les professionnels.

[67]         En contre-interrogatoire, il confirme que Mme Dimuzio est une bonne enseignante. Il confirme également que la Politique relative aux interventions auprès de l’élève en difficulté comportementale de la Commission et dont des extraits sont reproduits au paragraphe 35 de la présente sentence, s’applique en tout temps même pendant les récréations non assignées.

 

2.         École Notre-Dame-de-l’Assomption [6]

[68]         M. Dominic Hébert détient un baccalauréat en enseignement et une maitrise en éducation. Depuis ses débuts dans l’enseignement en 1998, il a toujours enseigné au niveau primaire.

[69]         Au cours de l’année scolaire 2004-2005, il est à l’école Notre-Dame-de-l’Assomption située à Saint-Stanilas-de-Kostka. Près de 125 élèves fréquentent cette école qui dispose d’une classe par niveau scolaire. Sept enseignants y travaillent sans compter les spécialistes. Un psycho-éducateur vient à l’école une journée par semaine, un orthopédagogue, deux jours par semaine et un psychologue une journée à une journée et demie par semaine. Puis, un technicien en éducation spécialisée offre 25 à 28 heures par semaine.

[70]         M. Hébert enseigne la 5 e année et sa classe comprend 25 élèves. La grande majorité des élèves se situent dans la moyenne et quelques-uns affichent des difficultés alors que d’autres de la facilité.

[71]         M. Hébert dépose l’horaire hebdomadaire de l’école et à l’aide de ce dernier souligne sa répartition du temps. Ainsi, tous les lundis et mercredis, il est assigné à la surveillance de l’arrivée des élèves de 7 h 50 à 8 h. Il est également assigné à la surveillance des récréations des lundis et mercredis de 9 h35 à 9 h 50. Et, tous les lundis et mercredis, ses élèves vont à l’éducation physique après la période de récréation, soit de 9 h 55 à 10 h 40. Entre la récréation du matin et la période d’enseignement, une période de battement de cinq minutes est prévue à l’horaire.

[72]         Autrement, ses élèves ont une classe d’anglais tous les mardis de 8 h 50 à 9 h 35 et de musique les jeudis de 10 h 42 à 11 h 27. Pendant la période d’anglais du mardi, M. Hébert demeurait disponible et son temps est comptabilisé dans son temps de nature personnelle. Il précise qu’un bloc horaire est prévu pour l’enseignement moral les jeudis de 9 h 55 à 10 h 40 et il dispensait l’enseignement religieux aux élèves qui n’allaient pas au cours de morale. En somme, mis à part la période hebdomadaire de morale, M. Hébert était libre pendant les périodes d’enseignement spécialisé.

[73]         Toujours à l’aide de l’horaire hebdomadaire, il précise que trois minutes sont ajoutées à la quatrième période d’enseignement de l’avant-midi de 10 h 42 à 11 h 27. Ainsi, le diner débute 11 h 30. M. Hébert pense que ces trois minutes sont ajoutées afin de rencontrer le temps d’enseignement requis.

[74]         Puis, la période de diner débute à 11 h 30 et se termine à 12 h 45, ce qui représente 75 minutes. Cette période est suivie d’un battement de cinq minutes. La cinquième période de cours et leçon débute donc à 12 h 50 et se termine à 13 h 35 qui est suivie d’un battement de cinq minutes et d’une autre période d’enseignement de 13 h 40 à 14 h 25. Cette 6 e période d’enseignement est suivie d’un battement de cinq minutes, d’une période de déplacement pour le départ de 14 h 30 à 14 h 40. Pour sa part, M. Hébert est assigné à la surveillance de fin de journée que les lundis de 14 h 30 à 14 h 40.

[75]         Par ailleurs, il souligne qu’aucun enseignant spécialisé n’offre de cours les vendredis. Ainsi, les élèves sont en classe pendant les six périodes d’enseignement prévues à l’horaire.

[76]         Et, tout en se référant à un autre horaire, M. Hébert résume les battements quotidiens reconnus et comptabilisés : 3 minutes de 8 h à 8 h 03 ; 5 minutes de 9 h 50 à 9 h 55, 5 minutes de 12 h 45 à 12 h 50 et 5 minutes de 14 h 25 à 14 h 30. Ce temps est comptabilisé dans le temps accueil et déplacement. En contre-interrogatoire, M. Hébert reconnait que le temps de battement inclus dans les périodes d’enseignement a été comptabilisé dans la tâche éducative.

[77]         Il souligne qu’il n’y a pas de battement juste avant la récréation du matin et qu’il doit demeurer avec les élèves jusqu’à ce qu’ils soient tous dans la cour d’école. L’hiver, le temps requis pour s’habiller varie grandement en fonction du niveau scolaire, mais ça peut aller jusqu’à cinq minutes. Et, il ajoute que s’il est témoin d’une chicane dans le corridor, il doit intervenir tout comme s’il note qu’un élève est malade.

[78]         Quant au temps de récréation non assigné, M. Hébert a demandé que ce temps soit reconnu dans sa tâche comme étant du temps de disponibilité mais la Commission a refusé. Mme Chagnon, directrice de l’école en 2004-2005, confirme avoir reçu cette demande de M. Hébert et ne pas l’avoir accordée vu les consignes convenues à la table du primaire.

[79]         Pendant les périodes de récréation, M. Hébert exécute diverses tâches avec ses élèves : il demeure en classe afin de permettre à un élève de terminer un travail ; il demeure disponible à la demande d’un élève qui souhaite lui faire part de problèmes survenus à la maison, il en profite pour faire une mise au point avec un élève qui a eu un problème de comportement et le discipliner en conséquence, il répond aux questions d’un élève. Il prend ce temps pour appeler les parents à leur demande écrite dans l’agenda. M. Hébert rappelle qu’il n’a aucun autre temps libre les vendredis que les périodes de récréation. Il remplit les feuilles de route de comportements. Il estime consacrer 70 à 80 % de son temps aux élèves pendant les périodes de récréation.

[80]         Les périodes de récréation sont également utilisées pour discuter avec les professionnels ou les enseignants spécialisés qui ne sont pas nécessairement disponibles aux mêmes heures que M. Hébert. À titre d’exemple, il note que ses élèves sont en anglais tous les mardis, juste avant la récréation et si l’enseignant d’anglais veut échanger au sujet d’un élève rapidement, il va lui parler pendant la récréation. Cette période est également utilisée pour échanger sur des projets spéciaux regroupant des élèves de différents niveaux scolaires, pour vérifier le pigeonnier, pour faire des photocopies, installer le rétroprojecteur ou l’ordinateur, pour échanger avec la secrétaire de l’école, pour appeler des organismes à l’extérieur pour des sorties éducatives comme le théâtre. Il ajoute que la direction de l’école est partagée entre deux écoles et les jours prévus à son école, le directeur en profite pour discuter pendant l’heure du diner ou les récréations. Il arrive également que les rencontres concernant les plans d’interventions adaptés empiètent sur les périodes de récréation. Quatre ou cinq élèves avaient un plan d’intervention adapté dans sa classe.

[81]         En contre-interrogatoire, M. Hébert reconnait qu’il pouvait utiliser du temps de disponibilité prévu à son horaire pour rencontrer d’autres professionnels tout en rappelant que les horaires de l’un et l’autre ne concordaient pas toujours. Il ajoute également que le temps de surveillance à l’accueil et le temps de déplacement étaient comptabilisés dans son temps de disponibilité et qu’en principe, le temps de nature personnelle doit être utilisé à la préparation de ses cours et à la correction des devoirs et examens.

[82]         Enfin, M. Hébert dépose le plan de réussite de l’école et rappelle que tous les enseignants sont responsables de son application, même pendant les périodes de récréation. Les enseignants doivent assurer un milieu exempt de violence et respectueux en tout temps. Ainsi, si M. Hébert est témoin d’une bataille, il doit intervenir même en période non assignée.

[83]         En contre-interrogatoire, M. Hébert reconnait le contrat d’engagement convenu et finalisé en octobre 2000 et qui fut depuis renouvelé d’année en année. Il reconnait avoir reçu le plein traitement prévu à la convention collective et faire partie de l’exécutif syndical depuis 8 années. [7]

[84]         M. Hébert ajoute que la direction de l’école obligeait les enseignants à inclure un trente minutes dans le temps de nature personnelle à des fins de rencontres avec les collègues de 6 e année. Il estime que les enseignants ajustent régulièrement leur horaire afin de répondre aux besoins de la direction et des élèves. Enfin, très rarement M. Hébert a demandé de quitter plus tôt afin d’aller chez le médecin. Mme Chagnon confirme que M. Hébert était impliqué  dans un projet cycle et rencontrait ses collègues du même cycle au cours d’une période où ils étaient disponibles en même temps et que ce temps était comptabilisé comme du temps de travail de nature personnelle.

 

3.         École Jésus-Marie

Mme Josée Mongrain

[85]         Mme Josée Mongrain détient un baccalauréat en orthopédagogie et a signé son premier contrat d’engagement avec la Commission en 1992. Au cours de sa carrière, elle a enseigné dans plusieurs écoles primaires. Toutefois depuis 2004, elle enseigne à l’école Jésus-Marie

[86]         L’école Jésus-Marie a cinq ou six classes en adaptation scolaire et près d’une vingtaine d’enseignants y travaillent. Plus de 250 élèves fréquentent cette école qui dispense des cours de la maternelle à la 6 e année. Dans sa classe, plusieurs élèves ont des problèmes langagiers et ont même des difficultés marquées.

[87]         Mme Mongrain n’a pas retrouvé l’horaire mais se souvient qu’il y avait deux récréations. Une en matinée de 10 h à 10 h 15 et une autre en après-midi de 14 h 15 à 14 h 30. Elle pense que des périodes de battements étaient prévues avant et après les récréations. Seul le temps de surveillance assigné pendant les récréations était comptabilisé dans la tâche annuelle. Ainsi, les autres périodes de récréation n’étaient pas prises en compte. Mme Mongrain n’a jamais reçu de directive quant à l’utilisation de cette période de temps non assignée à l’horaire.

[88]         Pendant les périodes de récréation, Mme Mongrain exécute auprès des élèves les tâches suivantes : elle s’assure qu’ils sont bien habillés et ce temps varie de 5 à 10 minutes (elle ajoute que le désir de sortir influence grandement), elle garde un élève afin qu’il finisse un travail ou le garde avec un autre élève avec lequel il s’est chicané, elle veille à l’application du code de vie dans les corridors et surtout à l’égard des élèves de la titulaire de classe en surveillance de récréation, elle s’occupe d’un élève blessé qui entre à l’école pendant la récréation. Elle précise qu’elle gardait en retenue assez régulièrement un élève particulièrement turbulent et même deux à trois fois par semaine. Elle échangeait également régulièrement au sujet de cet élève avec la stagiaire technicienne en éducation spécialisée.

[89]         Pendant les périodes de récréation, Mme Mongrain en profitait pour consulter ou échanger avec les professionnels (psychologue, psycho-éducateur et orthophoniste). Elle ajoute, qu’elle courait après la psychologue pour la voir lorsqu’elle savait qu’elle était disponible car elle ne venait qu’une fois par semaine. Il en était de même avec les autres professionnels, car il n’y avait pas de moments spécifiques au cours desquels ils pouvaient se rencontrer. Mme Mongrain échangeait également avec les enseignants spécialisés [8] notamment sur les façons d’intervenir auprès des élèves. Elle planifiait également des sorties avec des collègues et discutait du matériel pédagogique. Elle faisait des appels, prenait ses messages au secrétariat, s’enquérait des motifs d’absence d’un élève.

[90]         Parfois, il est arrivé que Mme Mongrain discute de certaines problématiques avec la direction au cours de la récréation dont des troubles de comportement de certains élèves. Elle se souvient d’un incident impliquant un parent problématique. En contre-interrogatoire, Mme Mongrain soutient que la direction de l’école la convoque durant les périodes de récréation au moins une fois par semaine.

[91]         Mme Mongrain précise que tous les élèves de sa classe avaient un plan d’intervention adapté et les enseignants n’arrêtaient pas d’intervenir ou d’en discuter parce que la cloche de la récréation avait sonné. Elle ajoute que la période de récréation est un bon moment pour appeler les parents sachant qu’ils sont disponibles à ces heures. Enfin, elle fait des photocopies ou prépare le matériel nécessaire pour les arts plastiques ou les sciences.

[92]         Mme Mongrain dépose le projet éducatif et le plan de réussite de l’école et souligne que l’un des objectifs dudit projet consiste à « amener l’élève à utiliser des moyens pacifiques pour résoudre ses conflits ». Et, elle rappelle que tous les enseignants sont responsables de l’application dudit plan et doivent donc intervenir en tout temps, même au cours d’une période de récréation non assignée lorsqu’ils sont témoins d’une situation qui ne respecte pas le plan. Enfin, elle estime consacrer trois à quatre récréations sur cinq à des activités professionnelles. Et, il en est de même pour ses collègues.

[93]         En contre-interrogatoire, elle reconnait le contrat d’engagement convenu en 1992 et renouvelé depuis d’année en année. Elle admet également qu’elle disposait de temps libre notamment pendant les périodes d’enseignement spécialisé et qu’elle pouvait dans la mesure du possible rencontrer les professionnels durant ce temps. Tout comme, si possible, elle pouvait faire certaines tâches administratives. Elle admet également que les enseignants discutaient de sujets variés au salon du personnel comme de spectacles ou de vacances. Interrogée à nouveau sur la possibilité de déplacer du temps de disponibilité pendant les périodes de récréation, Mme Mongrain dit ne pas avoir considéré cela, estimant que c’est normal de travailler durant les récréations.

 

Mme Lara Quévillon (professionnelle)

[94]         Mme Quévillon obtient un baccalauréat en psychoéducation en avril 2000. Elle débute sa carrière de psycho-éducatrice avec la Commission en 2001. En 2004-2005, elle travaille deux jours par semaine à l’école Jésus-Marie et répartit les autres jours de la semaine au sein d’autres écoles primaires, à savoir : École Notre-Dame-de-la-Paix (une journée) ; École Saint-Eugène (une journée)  et École Saint-Paul (une journée).

[95]         Comme psycho-éducatrice, elle assure le suivi auprès de jeunes ayant des problèmes de comportement notamment en les réunissant afin qu’ils développent des habiletés sociales. Elle supporte et conseille les enseignants dans la gestion des élèves ayant des difficultés. Elle participe aux plans d’intervention et partage les objectifs avec les autres éducateurs spécialisés. Elle est présente aux rencontres avec les parents et communique avec eux au besoin. Elle tient aussi des rencontres individuelles avec les enseignants afin de faire des mises à jour et de développer au besoin de nouveaux moyens d’intervention. Enfin, elle supporte personnellement les enseignants et les appuie dans leur cheminement professionnel (entend leur joie, découragements ou difficultés comme enseignant).

[96]         Mme Quévillon entretient tous ces multiples contacts avec les enseignants à n’importe quel moment de la journée. Il arrive parfois que des rendez-vous soient fixés à l’avance toutefois elle ajoute que la majorité de son temps est consacré aux élèves. Elle échange donc avec les enseignants en début et fin de journée ou durant les récréations et le diner. Mme Quévillon estime parler presque tout le temps pendant les récréations avec les enseignants au sujet d’élèves spécifiques. Elle ajoute que les enseignants se présentent souvent à son bureau au début des récréations ou elle les attrape au vol. Mme Quévillon ajoute que les périodes de récréation représentent un bon moment pour échanger car elle sait que les enseignants sont libres. Enfin, elle estime échanger professionnellement près de 90 % du temps de pause.

[97]         Mme Quévillon ajoute que la direction est au courant et même qu’il arrive régulièrement que les rencontres entourant les plans d’interventions débordent sur le temps de récréation.

[98]         Des rencontres officielles sont fixées lorsqu’il y a des « POP UP », c’est-à-dire lorsque des élèves sont désorganisés ou que la situation explose et que des services nouveaux doivent être offerts.

[99]         Aucun enseignant ne lui a refusé de parler professionnellement en invoquant être en pause tout comme la direction n’a jamais soulevé un tel motif pour suspendre les discussions. Elle soutient même que des rencontres ponctuelles sont fixées avec l’enseignant et la direction durant les temps de récréation lorsque par exemple un élève est désorganisé. Enfin, à l’occasion, Mme Quévillon présente des ateliers de prévention de courte durée aux enseignants durant les récréations. 

[100]      En contre-interrogatoire, Mme Quévillon reconnait le contrat d’engagement à temps partiel convenu en 2001 et le contrat d’engagement à temps plein convenu en 2004.

[101]      Mme Quévillon confirme de bénéficier d’une pause de 15 minutes vers le milieu de chaque journée de travail et d’une période de repas sans traitement d’une durée continue d’au moins 60 minutes. [9]

[102]      Mme Quévillon débute sa journée de travail à 8 h et quitte à 16 h et elle est rémunérée sept heures.

[103]      Mme Quévillon soutient qu’elle fixe très rarement à l’avance des rendez-vous avec les enseignants, devant prioriser les élèves. Elle avise donc les enseignants une semaine à l’avance des rencontres qu’elle compte tenir avec les élèves afin qu’ils soient libérés. Et, au besoin, elle fait le suivi avec l’enseignant, notamment quand elle ramène l’enfant en classe.

[104]      Un enseignant qui souhaite la rencontrer lui laisse un message dans le pigeonnier ou se présente avec son agenda et ils fixent un rendez-vous.

[105]      Mme Quévillon affirme consacrer 90 % du temps des pauses du matin à discuter de cas d’élèves ou d’organisation en classe avec des enseignants.

 

4.         École intégrée Marie-Rose et Saint-André

[106]      Mme Marie-Josée Schmidt est détentrice d’un baccalauréat en éducation au primaire et préscolaire. Elle débute sa carrière comme suppléante en 1987 et depuis 1990, elle enseigne à l’école intégrée Marie-Rose et Saint-André. Plus ou moins 22 enseignants travaillent à cette école et en 2004, le nombre d’élèves s’élevait à plus ou moins 280.

[107]      En 2004-2005, Mme Schmidt a une tâche réduite à 80 % et enseigne en 3 e  année. Sa classe est composée de 25 élèves. Un élève est coté 12 pour trouble de comportement. Un autre est coté en raison d’un syndrome du x fragile. Ce syndrome affecte l’humeur. L’enfant est d’une sensibilité extrême et il a des troubles d’apprentissage. Un autre enfant était affligé d’un trouble envahissant du développement. Deux orthopédagogues assistaient les enseignants dont une suivait sept des élèves de sa classe.

[108]      Mme Schmidt n’a pas retrouvé son horaire mais elle soutient qu’il n’y a qu’une récréation à cette école et qu’elle est prise de 9 h 30 à 9 h 45. La période de récréation est précédée d’un battement de cinq minutes et suivi d’un battement de cinq minutes. Elle précise que si la période précédant la récréation était couverte par un spécialiste, la période de battement de cinq minutes précédant la récréation était assurée par l’enseignant spécialisé et n’était donc pas comptabilisée dans le temps de Mme Schmidt. Il en était de même à l’égard du battement qui suivait la récréation lorsque la période était offerte par un enseignant spécialisé.

[109]      Mme Schmidt ne faisait qu’une seule surveillance de récréation par semaine. Elle affirme que tous les enseignants devaient conduire les élèves à la porte après le battement et devaient s’assurer que l’enseignant en surveillance y soit et sinon elle devait attendre qu’il arrive. Elle estime que les enfants prenaient sept à huit minutes pour s’habiller et se rendre à la porte. Les enseignants n’avaient pas le droit de se rendre au salon du personnel tant qu’il y avait des élèves dans les corridors. En contre-interrogatoire, Mme Schmidt affirme que les enfants ne pouvaient se rendre seuls à la cour d’école pendant le battement. Tous devaient être habillés et s’y rendre en rang et l’enseignant devait attendre l’enseignant en surveillance. Elle admet que ces périodes de battement sont comptabilisées dans sa tâche.

[110]      Par ailleurs, elle ajoute que la direction de l’école invitait les enseignants à vider régulièrement leur pigeonnier notamment durant les récréations. Elle note également, qu’une journée par semaine, il n’y avait pas de spécialistes et qu’elle ne pouvait donc vider son pigeonnier qu’au cours de la récréation.

[111]      Elle utilisait régulièrement la période de récréation pour discuter avec l’élève affectée du syndrome x fragile car un rien la blessait. L’élève faisait également des tâches ou reprenait des travaux et Mme Schmidt en profitait pour écrire à la mère de l’élève. Mme Schmidt gardait également en retenue l’élève ayant des troubles de comportement pendant les récréations et ce même s’il avait besoin d’aller jouer, devant lui répéter les règles de la classe.

[112]      Mme Schmidt explique que lorsqu’un enfant se blessait dans la cour pendant la récréation, l’enseignant en surveillance demandait de l’aide des enseignants disponibles pour que l’un d’eux s’en occupe. Habituellement, l’enseignant de l’élève s’en occupe. La période de récréation est également utilisée pour qu’un élève puisse faire un devoir ou pour les calmer. Mme Schmidt utilise également ce temps pour disposer autrement la classe avec l’aide parfois d’élèves.

[113]      Régulièrement, Mme Schmidt discutait pendant les récréations avec l’orthopédagogue qui suivait sept de ses élèves tout comme elle discutait avec l’autre orthopédagogue qui travaillait avec deux autres élèves de sa classe. Elle discutait également avec la psychologue qui prenait rendez-vous avec elle notamment pour l’informer de la nouvelle médication prescrite à certains de ses élèves.

[114]      Mme Schmidt soutient que la direction de l’école la convoquait au moins une fois par semaine durant les périodes de récréation pour discuter des affaires courantes. Elle ajoute que la direction n’était pas disponible en même temps qu’elle l’était. Il en était de même avec la psychologue et qui était souvent partie en fin de journée. Puis, en fin de journée, Mme Schmidt avait de la récupération.

[115]      Par ailleurs, les enseignants spécialisés avaient de la difficulté à gérer sa classe alors ils la consultaient régulièrement et en particulier l’enseignant en anglais. Elle discutait également régulièrement des habiletés particulières des enfants ayant un plan d’intervention avec l’enseignant en éducation physique afin qu’il puisse ajuster son programme et les attentes. Autrement, les enseignants échangent beaucoup sur le matériel pédagogique et plusieurs lui demandaient des conseils pendant les récréations.  

[116]      Pendant les récréations, Mme Schmidt règle des questions administratives avec le secrétariat, s’informe des motifs d’absence d’un élève, regarde son pigeonnier, prend les messages du secrétariat, dont les messages laissés par les parents à l’égard d’un élève absent. La direction profitait de la récréation pour faire des rappels à tout au moins toutes les deux semaines. La récréation est également un bon moment pour retourner l’appel d’un parent ou pour rencontrer un parent qui se pointe à cette heure précise.

[117]      La période de récréation est également utilisée pour faire les appels à l’extérieur notamment aux fins des activités extérieures, pour préparer du matériel tel le rétroprojecteur placé sur le chariot avec le vidéo-téléviseur. Enfin, Mme Schmidt estime consacrer 70 % du temps de récréation à des tâches professionnelles et ce comme les autres.

[118]      Mme Schmidt rappelle également qu’elle doit en tout temps veiller à l’application du Guide administratif et pédagogique de l’école. Et, elle ajoute qu’elle a de la difficulté à s’imaginer dire à un enfant en pleurs et blessé qu’elle ne peut s’en occuper car elle est en pause. À son avis, l’engagement de l’enseignant débute du moment qu’il met les pieds dans l’école et se termine à la sortie. Elle précise qu’il y a trois surveillants dans la cour d’école et trois à la bibliothèque, ce qui donne un ratio de 90 élèves par surveillant. Avec un tel ratio, Mme Schmidt ajoute qu’il y a régulièrement des débordements.

[119]      En contre-interrogatoire, Mme Schmidt reconnait le contrat d’engagement convenu en 1993 et renouvelé depuis. Elle admet également avoir demandé très occasionnellement la permission de quitter plus tôt, ce qui lui a été accordé tout en ajoutant qu’au primaire, les enseignants n’ont pas de temps libre, ils sont toujours occupés.

 

5.             École Omer-Séguin

[120]      Mme Sylvie Lalonde détient un baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire et débute sa carrière d’enseignante en 1981. Elle avait une classe de première année en 2004-2005. L’école Omer-Séguin compte une centaine d’élèves, cinq enseignants, trois enseignants spécialisés à temps partiel, soit un en éducation physique (deux jours par semaine), un en musique (une journée et demie par semaine) et un en anglais (une journée et demie par semaine) et quatre professionnels, dont un psychologue (une demie journée par semaine), un orthopédagogue (deux jours et demi par semaine).

[121]      Les périodes de récréation étaient prises de 9 h 45 à 10 h tous les jours. Cette période n’était pas computée dans sa tâche, à moins qu’elle ne soit assignée à la surveillance. Elle ne souvient pas s’il y avait des battements avant ou après les périodes de récréation en 2004-2005, ajoutant que ça varie d’une année à l’autre. Puis, en contre-interrogatoire, devant quelques données, Mme Lalonde se souvient qu’il y avait deux battements de deux ou trois minutes pour permettre aux élèves de s’habiller et se déshabiller. Elle ajoute que ce temps n’est toutefois pas suffisant. Elle admet que les élèves restent dehors dix minutes et précise parfois moins.

[122]      Pendant les périodes de récréation, elle exécute les tâches suivantes auprès des élèves : les aider à s’habiller et les conduire à la cour de l’école ; discuter avec un élève manifestant un comportement inhabituel afin de sonder sa situation personnelle ; l’accompagner pour qu’il puisse terminer un travail ; reprendre une matière non comprise seule avec l’élève, à l’abri du regard des autres ; répéter une pièce théâtre ; vérifier l’état de santé d’un élève et sonder la possibilité de le retourner à la maison . Le temps d’habillement varie en fonction de la saison et prend de cinq à huit minutes alors que le temps pour se déshabiller prend moins de temps, environ quatre minutes.

[123]      La retenue en temps de récréation constitue une mesure pour discipliner un élève qui a mal travaillé. Mme Lalonde ajoute qu’elle consacre le trois quarts du temps de récréation à des interventions auprès de ses élèves.

[124]      Les enseignants profitent également de cette période pour échanger sur les projets, leurs méthodes d’enseignement et diverses questions dont les horaires, l’organisation.

[125]      Par ailleurs, Mme Lalonde était responsable d’un projet culturel subventionné. Des artistes de diverses disciplines viennent rencontrer les élèves et partager leur connaissance et leur expérience. Elle profitait de la période de récréation pour contacter les artistes et organiser les visites. À cet effet, elle devait coordonner la visite avec les autres enseignants et le meilleur moment pour ce faire est la récréation, ces derniers étant réunis. Les enseignants échangent également des meilleures façons d’intervenir auprès d’un élève éprouvant des troubles de comportement et cela plus particulièrement avec les spécialistes. Elle discute souvent avec les professionnels qui ne sont pas nécessairement disponibles au même qu’elle au cours d’une semaine, d’autant plus que leur temps passé à l’école est réduit.

[126]      Mme Lalonde discute régulièrement des plans d’intervention des élèves avec la direction pendant les récréations d’autant plus que la direction d’école partage son temps avec une autre école. Des questions administratives sont également réglées pendant ce temps avec la direction. Mme Lalonde précise que des rendez-vous réunissant professionnels et parents à l’égard d’un plan d’intervention sont souvent fixés au cours d’une période libre de l’enseignante avec la récréation mais il arrive qu’il y ait dépassement sur le temps de récréation.

[127]      Elle profite également du temps de récréation pour organiser des sorties scolaires, pour appeler des parents ou les rencontrer lorsqu’ils se présentent sans rendez-vous. Elle fait diverses tâches connexes comme : faire des photocopies, déplacer l’ordinateur, préparer le matériel pour le cours d’arts plastiques comme couper les cartons, mettre la gouache dans les pots, préparer les ciseaux. Globalement, elle estime consacrer 70 à 75 % du temps de récréation à des activités professionnelles. En contre-interrogatoire, Mme Lalonde reconnait qu’elle peut rappeler les parents à un autre moment que la récréation tout en ajoutant qu’elle essaie de les rappeler le plus rapidement possible.

[128]      En contre-interrogatoire, Mme Lalonde reconnait le premier contrat d’engagement à temps plein convenu en 1983 et renouvelé annuellement. Mme Lalonde précise qu’il y avait 22 élèves dans sa classe en 2004-2005.

[129]      Elle reconnait qu’elle pouvait rencontrer les professionnels ou les autres enseignants également disponibles pendant ses périodes de disponibilité. Elle a également rencontré la direction de l’école pendant ce temps.

[130]      Quant à la confection des horaires, Mme Lalonde explique que Mme Josée Barette soumettait aux enseignants une grille de cours (comprenant les cours spécialisés) et à l’aide de cette grille, elles déterminaient la répartition du temps de disponibilité et de nature personnelle. Ces moments étaient habituellement fixés pendant les cours spécialisés ou en début et fin de journée lorsque Mme Lalonde n’avait pas de surveillance.

[131]      Mme Lalonde maintient que si un parent se présente à l’improviste durant la récréation et demande de la rencontrer qu’elle va le faire. Elle ne demande pas d’ajustement d’horaire en contrepartie. Elle ajoute qu’elle doit empiéter sur les récréations car le temps de disponibilité et de nature personnelle ne suffit pas à accomplir toutes les tâches.

 

6.         École Des Jeunes-Riverains

[132]      Mme Nancy Brunet a suivi une formation en éducation au préscolaire et en enseignement au primaire. Elle enseignait en 6 e année en 2004-2005. Dix enseignants dispensent des cours à près de 120 élèves à l’école Des Jeunes-Riverains, dont trois spécialisés respectivement en musique, anglais et éducation physique. Quatre professionnels à temps partiel offrent également des services : psychologue (une journée par semaine) ; une psycho-éducatrice (une demi-journée par semaine) ; une orthopédagogue (trois jours et demi par semaine) et une technicienne en éducation spécialisée (deux ou trois jours par semaine).

[133]      Les périodes de récréation se prenaient de 9 h 35 à 9 h 50 du lundi au vendredi. Ce temps n’était pas computé dans sa tâche à moins qu’elle ne soit assignée à de la surveillance. Mme Brunet a retrouvé l’horaire de l’école au secrétariat. Ledit horaire comprend plusieurs battements quotidiens, soit un premier de 5 minutes entre l’arrivée des élèves et le début de la première période, un deuxième de 4 minutes entre les deux périodes suivantes, un troisième de 2 minutes avant la récréation, un quatrième de 3 minutes après la récréation, un cinquième de 4 minutes entre les deux prochaines périodes, un sixième de 2 minutes avant le diner, un septième de 3 minutes au retour du diner, un huitième de 4 minutes entre les deux périodes suivantes et un dernier de 3 minutes avant le départ des élèves. Tous ces battements sont reconnus à la tâche de Mme Brunet.

[134]      Mme Brunet était considérée en disponibilité pendant les cours dispensés par les spécialistes à ses élèves, soit de 13 h 34 à 14 h 19 le mardi, de 8 h 05 à 8 h 50 le mercredi et de 8 h 54 à 9 h 39 le vendredi. Pendant ces moments de disponibilité, Mme Brunet demeure habituellement dans sa classe à moins d’être en rencontre avec la direction. Elle peut utiliser ce temps pour accomplir différentes tâches. En contre-interrogatoire, elle précise que ce temps était computé en temps de disponibilité ou en temps de nature personnelle. Elle admet qu’il y avait également du temps de disponibilité ou de nature personnelle fixé en fin de journée mais pas les matins sans surveillance. Ainsi, Mme Brunet pouvait ces journées arriver à 8 h au lieu de 7 h 50.

[135]      Selon l’horaire, l’enseignant en éducation physique venait les mardis et les vendredis à l’école. L’enseignant d’anglais venait tous les avant-midis des mercredis et vendredis et l’enseignant de musique enseignait les avant-midis des mercredis et les après-midis des vendredis.

[136]      Pendant les périodes de récréation, Mme Brunet effectue les interventions suivantes auprès des élèves : organiser son départ de l’école en raison d’un malaise physique ; aider des élèves à résoudre un conflit (et Mme Brunet ajoute que c’est arrivé souvent en 2004-2005) ; les faire réfléchir sur leurs comportements ; les accompagner pour qu’ils finissent leurs devoirs ou travaux ; accueillir des blessés de la cour ; les aider à s’habiller (la durée du battement étant trop courte l’hiver). Mme Brunet précise qu’elle ne peut laisser les élèves seuls dans le corridor et doit donc les accompagner jusqu’à la sortie dans la cour.

[137]      Les récréations sont également utilisées pour répéter et plus particulièrement dans les semaines précédant le spectacle de Noël.

[138]      Elle profite des récréations pour discuter avec d’autres enseignants de la performance des élèves, devant faire du classement pour le passage au secondaire. Mme Brunet souligne qu’à cet effet, l’enseignante de 5 e année n’est pas disponible en même temps qu’elle. [10] En contre-interrogatoire, elle précise que le classement des élèves s’apprécie sur plusieurs mois, soit du mois de février à la fin de l’année.

[139]      Mme Brunet utilise ce temps pour organiser des sorties scolaires ou discuter de projets avec la direction. Elle précise que la direction partage son temps entre deux écoles et que cette dernière discute donc régulièrement de projets avec les enseignants pendant l’heure du diner ou les périodes de récréation. Mme Brunet échange également avec les professionnels qui ne viennent qu’à temps partiel à l’école et même qu’en avant-midi. Ainsi, il ne reste que les périodes de récréation pour échanger avec ces derniers. Il en est de même avec les enseignants spécialisés.

[140]      Mme Brunet participe à la demande de la direction à des rencontres concernant les plans d’intervention avec des parents et ces dernières sont généralement fixées les vendredis de 8 h 54 à 9 h 39 alors que les enfants suivent un cours d’anglais. Toutefois, Mme Brunet ajoute que ces rencontres empiètent souvent sur le temps de récréation. En contre-interrogatoire, elle admet que la direction lui a déjà offert de reprendre le temps pris sur le temps de récréation à des fins de rencontres parentales.

[141]      Mme Brunet note également qu’elle peut retourner des appels auprès des parents durant les périodes de disponibilité à l’horaire. Toutefois, elle souligne que les lundis et jeudis, elle n’a pas de périodes libres et elle ne peut donc retourner ses appels qu’au cours de la récréation du matin.

[142]      Mme Brunet ajoute que le temps de récréation peut également servir à accueillir un visiteur extérieur comme ce fut le cas avec un agent de la faune.

[143]      Mme Brunet utilise les périodes de récréation pour installer du matériel d’arts plastiques, du matériel de manipulation (blocs, etc.) ou de l’équipement audio-visuel. Elle fait également au besoin des photocopies. Enfin, elle consacre près de 75 % de son temps à des activités professionnelles pendant les pauses de récréation.

[144]      En contre-interrogatoire, Mme Brunet admet bénéficier d’une certaine souplesse et autonomie professionnelle. Elle reconnait avoir quitté plus tôt occasionnellement, avec la permission de la direction, au cours de la dernière période du mardi, soit de 13 h 34 à 14 h 19. La direction lui demandait alors à quel moment, elle comptait reprendre ce temps. Enfin, elle reconnait le contrat d’engagement convenu en 1999 et renouvelé annuellement. Elle n’a jamais récupéré le temps de récréation consacré à des activités professionnelles.

 

La direction

[145]      Mme Marie Chagnon est retraitée depuis juillet 2009 et travaille encore à l’occasion comme directrice d’école primaire. Elle débute comme enseignante d’éducation physique en 1976 et commence à assumer des fonctions de direction en 1992 et a agi à ce titre aux écoles primaires suivantes : Baie-Saint-François, Notre-Dame-de-l’Assomption, Des Jeunes-Riverains et Langlois. En 2004-2005, Mme Chagnon partageait son temps entre l’école Des Jeunes-Riverains et Notre-Dame-de-l’Assomption. Volontairement, un enseignant assumait alors les fonctions de direction en son absence. M. Jacques Lefort la remplaçait donc à l’école Notre-Dame-de-l’Assomption et Mme Marie Claude Dieu Donné à l’école Des Jeunes-Riverains. Mme Chagnon essayait d’être présente dans les deux écoles quotidiennement. Ainsi, une journée, elle était en matinée dans une école et en après-midi dans l’autre et inversement le lendemain.

[146]      Le directeur d’école veille principalement à la réussite éducative des élèves. À cette fin, il accomplit notamment les tâches suivantes : s’assure que le climat de l’école est propice aux apprentissages, coordonne les tâches des enseignants avec le personnel de soutien et les professionnels, s’assure que le climat soit sécuritaire pour les enfants et les enseignants. Le directeur d’école répond également aux besoins des parents.

[147]      Mme Chagnon explique que la direction des ressources humaines de la Commission conseille les directions des écoles. Toutefois, sur le terrain, les directeurs sont responsables. Ainsi, aux fins de la détermination des tâches des enseignants, la Commission a fourni aux directions des établissements des tableaux pour les aider dans cette responsabilité. Mme Chagnon reconnait les schémas préparés par Mme St-Onge et soutient que la Commission les transmettait annuellement.

[148]      Elle reconnait également le mémo transmis par Mme St-Onge le 8 octobre 2003 aux directions des écoles. [11] Mme Chagnon ajoute que le personnel avait beaucoup de questions sur l’application des derniers changements négociés et en particulier à l’égard de la notion de temps de travail de nature personnelle. Cette notion a d’ailleurs fait l’objet de discussions au sein de la table réunissant les directions des écoles primaires. Les directeurs questionnaient l’étendue de l’amplitude quotidienne, à savoir à quelle heure débutait-elle et finissait-elle ? Comprenait-elle les récréations et la période du diner ? Enfin, les directeurs se demandaient si les enseignants pouvaient placer du temps de travail de nature personnelle pendant les récréations. Finalement, les directeurs d’école se sont entendus sur une ligne directrice. Aucune tâche ne serait assignée pendant les récréations sauf de la surveillance. Les directeurs ont convenu de ne pas fixer de temps de travail de nature personnelle pendant les récréations et que le temps assigné en surveillance serait comptabilisé comme du temps de disponibilité. Enfin, à la demande de la Commission, les directeurs d’école devaient s’assurer que les enseignants respectent le temps de travail de nature personnelle convenu à leur horaire.

[149]      Globalement, les directeurs d’école respectaient les consignes suivantes dans la détermination du temps de travail de nature personnelle : l’enseignant choisissait le moment et la direction permettait que ce moment soit fixé en début de journée pour une période de 15 à 20 minutes, au cours du diner pour une période de 30 minutes et en fin de journée vers 15h . L’enseignant pouvait également placer du temps de nature personnelle ou du temps de disponibilité pendant les périodes libres à son horaire. En contre-interrogatoire, Mme Gagnon admet que malgré ces directives, les enseignants travaillaient et travaillent toujours pendant les récréations.

[150]      Quant aux récréations, la direction exigeait que l’enseignant assigné à de la surveillance soit prêt à se rendre à la cour dès que la cloche sonne et cela afin que les élèves puissent partir le plus rapidement possible. Ainsi, les enseignants doivent préparer les élèves avant que la cloche sonne.

[151]      Autrement, Mme Chagnon explique que les horaires des autobus dictent l’horaire des écoles et en 2004-2005, vu l’heure d’arrivée des autobus et des autres contraintes, la direction de l’école Notre-Dame-de-l’Assomption ne pouvait fixer de battement entre la fin du deuxième cours et le début de la récréation.

[152]      Mme Chagnon rapporte qu’elle regardait avec chaque enseignant sa tâche pour l’année en cours et que la direction et l’enseignant devaient la compléter pour le 15 octobre. Cette tâche constituait un cadre de référence et Mme Chagnon était souple dans l’application du temps de disponibilité ou de nature personnelle. Avec l’accord de l’enseignant, à l’occasion, la répartition était modifiée. Enfin, Mme Chagnon n’a jamais eu à sortir le tableau résumant la tâche d’un enseignant en 17 ans de carrière comme directrice d’école. Mme Chagnon ajoute que les enseignants mettent plus de temps que ce qui est demandé tout comme les directions d’école. En contre-interrogatoire, elle se souvient d’une demande de permission pour quitter plus tôt. L’enseignante, Mme France Lebeau a demandé de quitter pendant du temps de disponibilité.

[153]      Mme Chagnon sondait les enseignants sur leurs préférences quant aux périodes libres ou les surveillances et à partir des choix exprimés, elle répartissait les tâches à l’intérieur d’un horaire. Cet horaire était discuté en assemblée générale en début d’année. Elle souligne que la majorité des enseignants préféraient avoir une surveillance contigüe à une période libre afin de pouvoir souffler. Dans l’aménagement des horaires, elle tenait compte également du matériel requis dans certains cours spécialisés. Par exemple, elle essayait de placer les cours d’éducation physique et de musique du même niveau en continu, et ce afin de limiter les changements de matériels. En contre-interrogatoire, elle reconnait que des enseignants d’éducation physique doivent déplacer du matériel pendant les récréations ou les battements.

[154]      Quant aux récréations, Mme Chagnon exigeait que l’enseignant assigné à la surveillance soit en poste à l’arrivée des élèves et que les enseignants dans le salon du personnel ne discutent pas de cas d’élèves afin de se libérer l’esprit et de protéger la confidentialité de ces derniers. En contre-interrogatoire, Mme Gagnon estime que la consigne relative au respect de la confidentialité était en quelque sorte un ordre. Elle reconnait toutefois qu’il n’y avait pas d’ordre interdisant aux enseignants de discuter des cours, ou d’activités pédagogiques ou extérieures, des examens à venir. Mme Gagnon n’empêchait pas les enseignants de faire compléter un travail pendant la récréation mais pouvait intervenir à l’occasion à l’effet contraire. Elle n’a jamais dit aux enseignants qu’ils ne pouvaient écouter les élèves qui désirent se confier pendant les récréations non assignées. Tout comme, elle n’a pas émis de directive rappelant que les enseignants ne doivent pas intervenir dans une bataille pendant une période de récréation non assignée. Somme toute, aucune directive n’a été émise afin d’interdire les interventions suivantes pendant les récréations non assignées : écrire une note à l’agenda, communiquer avec un parent, accompagner un enfant malade à la réception, parler aux spécialistes ou aux professionnels. Enfin, la consigne de ne pas parler d’affaires professionnelles pendant les récréations constituait plus un conseil qu’un ordre.

[155]      Après discussions avec les autres directions d’école, Mme Chagnon reconnaissant du temps à la tâche aux fins des activités parascolaires (activités sportives, sorties, etc.). Selon l’investissement, elle répartissait le temps sur l’année (15 à 30 ou même 45 minutes par semaine). Et, ce temps pouvait être comptabilisé dans le temps de nature personnelle en présence des élèves.

[156]      Mme Chagnon précise que les sorties scolaires sont souvent planifiées une année à l’avance et qu’il arrivait donc très rarement que du temps devait être aménagé à cette fin.  

[157]      Elle estime que le plan de réussite ou le projet éducatif adopté dans chaque école n’ajoute rien à la tâche de l’enseignant. Ces plans ou projets ne font que préciser ou orienter les interventions des enseignants. En contre-interrogatoire, elle admet que le plan de réussite vise notamment à assurer un climat sain, respectueux et exempt de violence et que tout le monde collabore à son application. Elle admet que ce plan s’applique en tout temps. Ainsi, si un enseignant constate une bataille, il doit intervenir sinon la direction de l’école va le rencontrer.

[158]      Mme Chagnon précise que l’horaire des psychologues affectés aux écoles primaires était affiché au salon du personnel. Ainsi, les enseignants peuvent planifier des rencontres avec les professionnels, en laissant un message dans le pigeonnier ou en demandant à la secrétaire de l’école de faire le lien. Mme Chagnon faisait à l’occasion le lien entre l’enseignant et le professionnel.

[159]      Mme Chagnon confirme que la secrétaire ou tout enseignant ou même elle-même sont appelés à intervenir auprès d’un enfant blessé ou malade pendant les récréations non assignées. En contre-interrogatoire, Mme Chagnon reconnait que les enseignants, Mme Nancy Trudel et M. Dominic Hébert, sont des personnes honnêtes et crédibles.

[160]      Elle soutient que les enseignants se rendent peu souvent à son bureau pour régler des questions disciplinaires à moins que la situation ne soit urgente ou qu’elle affecte le climat de la classe.

 

6.             École Élisabeth-Monette

[161]      M. Sébastien Daoust-Charest détient un certificat en gestion des ressources humaines et un baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire. Il débute sa carrière d’enseignant comme suppléant en 1995. En 2004-2005, il était titulaire d’une classe de 3 e année.

[162]      Dix-huit enseignants dispensent des cours à près de 300 élèves dont trois spécialisés respectivement en musique, anglais et éducation physique. Trois professionnels à temps partiel assistaient les enseignants, soit : un technicien en éducation spécialisée (20 heures par semaine dont 10 heures dans la classe de M. Daoust-Charest) ; un psychologue (un jour par semaine) et une psycho-éducatrice (un jour par semaine).

[163]      Les récréations étaient prises de 9 h 35 à 9 h 50 du lundi au vendredi. Cette période n’était pas computée dans sa tâche à moins qu’il ne soit assigné à de la surveillance. À compter du mois de janvier 2005, M. Daoust-Charest est assigné comme surveillant à deux récréations de 9 h 40 à 9 h 50 les jeudis et vendredis. Il est également assigné à la surveillance du matin de 7 h 45 à 8 h les mercredis et à la surveillance de fin de journée de 14 h 37 à 14 h 52 les jeudis.

[164]      En début d’année scolaire, M. Daoust-Charest a reçu un horaire général. Pour 2004-2005, la répartition du temps était la suivante :

«   08 :00 à 08 :05       Accueil

     08 :05 à 09 :35       Cours

     09 :35 à 09 :50       Récréation

     09 :50 à 09 :55       Battement

     09 :55 à 11 :25       Cours

     11 :25 à 11 :30       Battement

     11 :30 à 12 :45       Diner

     12 :45 à 12 :50       Accueil

     12 :50 à 13 :35       Cours

     13 :35 à 13 :40       Pause

     13 :40 à 14 :37       Cours

     14 :37 à 14 :42       Battement »

[165]      Le battement de 9 h 50 à 9 h55 sert à placer les enfants en rang, à se rendre vers les classes et à se déshabiller. Les enfants sont en classe à 9 h 55. Les surveillants placent les enfants en rangs et les titulaires de classe les accueillent lorsqu’ils entrent dans l’école. M. Daoust-Charest note que le battement de cinq minutes suffit l’été mais pas l’hiver. Ce processus qui se déroule au cours du battement situé à la fin de la récréation est le même au début de la récréation mais à l’inverse.

[166]      En 2004-2005, les cours dispensés par des spécialistes à ses élèves avaient lieu aux jours et aux périodes suivantes de septembre à décembre 2004 : le lundi de 12 h 50 à 13 h 35, le mardi de 9 h 55 à 10 h 40, le jeudi de 8 h 50 à 9 h 35 et le vendredi de 8 h 05 à 8 h 50. Et, aux jours et aux périodes suivantes de janvier à juin 2005 : le lundi, de 12 h 50 à 13 h 35, le mardi de 10 h 40 à 11 h 25, le jeudi de 8 h 05 à 8 h 50 et le vendredi de 8 h 50 à 9 h 35. Les vendredis de 8 h 50 à 9 h 35, il était en temps de nature personnelle. M. Daoust-Charest ajoute que s’il se passe quelque chose pendant le cours d’éducation physique dispensé de 8h 50 à 9 h 35 le vendredi, les enseignants en discutent pendant la récréation qui suit.

[167]      En contre-interrogatoire, M. Daoust-Charest explique qu’il distribuait son temps de disponibilité et de nature personnelle à partir de l’horaire général et des spécialistes qui lui étaient remis en début d’année scolaire. À cet effet, la direction demandait que les enseignants fixent au moins une période de disponibilité pendant une période de spécialiste, soit 45 minutes. À cette période de temps, s’ajoutaient tous les battements à l’horaire (comprenant les pauses de 5 minutes) qui totalisaient 30 minutes par jour ou 150 minutes par semaine. Il ne restait donc plus que 45 minutes sur les 240 minutes en temps de disponibilité à placer et M. Daoust-Charest les distribuait en début et en fin de journée. Il utilisait ce temps à des rencontres avec des spécialistes, des parents ou des comités de travail. Quant au temps de nature personnelle de trois heures, M. Daoust-Charest pouvait le distribuer à sa guise. Il partageait donc ce temps entre les périodes de spécialistes libres et à la fin de la journée à partir de 14 h 42.

[168]      Pendant les récréations non assignées, M. Daoust-Charest exécute les tâches suivantes concernant les élèves : révise avec l’élève une notion non comprise comme en mathématiques, en profite pour encadrer un élève qui a présenté des troubles de comportement au cours de l’avant-midi, remplit les agendas et répond aux parents, s’il est témoin d’une bagarre dans le corridor, il rapporte la situation à la direction de l’école et y amène les élèves.

[169]      Il profite de cette période pour s’arrimer avec l’autre enseignante qui enseigne le même niveau scolaire. Ils échangent sur les examens, sur des trucs d’enseignement. M. Daoust-Charest note qu’ils travaillaient beaucoup ensemble.

[170]      M. Daoust-Charest note qu’au moins une des périodes couvertes par des spécialistes est généralement utilisée pour échanger avec la direction et quant aux trois autres, il peut les utiliser avec les professionnels dans la mesure où ils sont disponibles en même temps, ce qui n’était pas le cas avec l’orthopédagogue. Enfin, quand l’un ou l’autre souhaite une réponse rapide, il reste les récréations. Par ailleurs, une technicienne en éducation spécialisée aidait M. Daoust-Charest avec un élève intégré à raison de dix heures par semaine. Ils profitaient de la récréation pour faire le point lorsque l’enfant désorganisait le groupe au cours de l’avant-midi.

[171]      Au cours des récréations, M. Daoust-Charest ramasse des papiers au secrétariat ou de l’argent pour des fournitures scolaires ou prend la correspondance qui se trouve dans son pigeonnier. M. Daoust-Charest ajoute que tous les lundis matin, la direction distribuait une « feuille de chou » qui informait les enseignants des activités de la semaine et les enseignants la lisaient pendant la récréation. À l’occasion, la direction convoque un enseignant pour discuter d’affaires courantes (renseignements sur une bataille, mise au point sur une sortie scolaire, etc.) ou pour convenir d’un rendez-vous au cours des prochains jours. M. Daoust-Charest soutient que la direction ne lui a jamais offert de reprendre ce temps de récréation utilisé à des fins professionnelles.

[172]      M. Daoust-Charest appelle également les parents pendant les récréations, ajoutant qu’il connait les parents de ses élèves et leur disponibilité. Lorsqu’un enfant a perdu un devoir, M. Daoust-Charest fait une copie supplémentaire pour l’élève pendant la récréation. À moins, d’être en disponibilité, il déplace au besoin le matériel spécialisé tel l’audio-visuel. Enfin, il estime consacrer 40 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[173]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat convenu avec la Commission en 1997 et renouvelé depuis.

[174]      M. Daoust-Charest admet que la direction appliquait l’horaire avec souplesse. Il ajoute que les deux parties en retiraient des bénéfices. Il admet également, avoir demandé des échanges de temps et ce conformément à la convention collective, c’est-à-dire moyennant un préavis de 24 heures.

[175]      Enfin, M. Daoust-Charest siégeait à huit comités, soit ; accueil, Halloween, Noël, St-Valentin, Carnaval, fin d’année et voyages. Le temps consacré à ces comités était annualisé et compris dans sa tâche. Toutefois, le temps qu’il a consacré volontairement à la révision du plan de réussite de l’école n’a pas été pris en compte dans sa tâche.

 

7.         École Notre-Dame-du-Rosaire

[176]      Mme Isabelle a suivi une formation en enseignement préscolaire et primaire à l’Université de Sherbrooke. Elle débute sa carrière en 1999 et enseigne la 6 e année depuis l’année scolaire 2002-2003 à l’école Notre-Dame-du-Rosaire. Cette école dessert une clientèle défavorisée.

[177]      Près de 180 élèves fréquentent cette école. Huit enseignants y travaillent dont trois spécialistes. Trois professionnels à temps partiel aident les élèves dont : une psycho-éducatrice (une demi-journée par semaine) ; un orthopédagogue (deux jours par semaine et un psychologue (une journée par semaine).

[178]      Les périodes de récréation étaient prises de 9 h 41 à 9 h 51 et précédées d’un battement de 2 minutes de 9 h 39 à 9 h 41 et suivies d’un battement de 5 minutes de 9 h 51 à 9 h 54. Les périodes de récréation de 10 minutes n’étaient pas computées dans sa tâche sauf celles où elle était assignée à de la surveillance, notamment les mardis et jeudis. Par ailleurs, Mme Isabelle surveillait l’entrée des élèves de 7 h 50 à 8 h les mardis et la sortie des élèves de 14 h 25 à 14 h 33 les jeudis. En contre-interrogatoire, Mme Isabelle admet qu’elle peut commencer la préparation aux récréations avant le battement soit vers 9 h 37. Elle admet l’avoir fait occasionnellement.

[179]      Les élèves de sa classe suivaient des cours spécialisés les jours suivants : éducation physique de 13 h 37 à 14 h 22 le lundi, anglais de 10 h 43 à 11 h 28 le mercredi, éducation physique de 8 h 05 à 8 h 50 le jeudi et anglais de 9 h 45 à 10 h 39 le vendredi. [12] Mme Isabelle pense que la période d’anglais de 9 h 45 à 10 h 39 était probablement computée en temps de nature personnelle.

[180]      Pendant les périodes de récréations non assignées, Mme Isabelle exécute les tâches suivantes auprès des élèves : aider à s’habiller (le battement de deux minutes ne suffisant pas et surtout en hiver), mettre en rang les élèves et descendre vers la sortie, assister l’élève qui réalise qu’il a oublié sa boite à lunch pour le diner et qui n’a pas de collation, intervenir auprès d’élèves qui se disputent, garder un élève pour terminer un travail ou un examen, animer des pratiques dans le cadre du concours oratoire, accompagner un élève qui se blesse, garder en retenue un ou des élèves ayant eu des problèmes de comportement.

[181]      Mme Isabelle profite des récréations pour discuter avec ses collègues notamment sur des activités partagées entre les classes ou des sorties scolaires, pour récupérer du matériel situé dans une autre classe. Les enseignants échangent également au sujet de certains élèves ayant des problèmes de comportement. Mme Isabelle fait de la rétroaction auprès des stagiaires assignés dans sa classe. Elle échange également avec les enseignants spécialisés ou les professionnels, qui ne sont pas disponibles en même temps qu’elle. Elle ajoute qu’il faut maintenir des suivis rapprochés avec certains professionnels dont l’orthopédagogue. Elle rencontre également la direction au sujet de cas pressants et principalement au sujet d’élèves turbulents et susceptibles d’être disciplinés en vertu du code de vie de l’école. La direction ne lui a jamais offert de reprendre ce temps consacré à des activités professionnelles pendant les récréations.

[182]      Elle explique que des rencontres concernant des plans d’intervention sont si possible fixées durant ses temps de disponibilité comme le mardi avant la récréation mais si les discussions ne sont pas terminées, la rencontre se poursuit au cours de la récréation.

[183]      Mme Isabelle relate que les récréations sont également utilisées pour diffuser des messages qui concernent tous les enseignants comme ce fut le cas au cours de la semaine précédente son témoignage.

[184]      Fréquemment, la secrétaire lui remet des messages reçus au cours de l’avant-midi et lorsque la situation est urgente, Mme Isabelle appelle le parent durant la récréation. La secrétaire lui soumet pour approbation des communications écrites destinées aux parents. Mme Isabelle prend également connaissance des messages laissés dans son pigeonnier. S’il y a un bris de matériel dans sa classe, comme l’aiguisoir, elle avise le concierge pendant la récréation. Elle demande également au concierge de nettoyer, pendant la récréation, un casier dans lequel un jus a coulé.

[185]      Mme Isabelle reçoit annuellement un organisme qui offre des ateliers de préparation au secondaire. Les animateurs arrivent habituellement durant la récréation et profitent de cette période pour s’installer. Lors des sorties scolaires, Mme Isabelle souligne que les enseignants demeurent toute la journée avec les élèves. Elle installe du matériel spécialisé tel que celui requis pour le cours d’arts plastiques ou de l’audio-visuel. Elle décore la classe pour des fêtes particulières. Elle fait très souvent des photocopies. Mme Isabelle précise qu’elle photocopie du matériel afin de reprendre du matériel qui n’a pas été compris. Enfin, elle estime consacrer, facilement, 75 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[186]      En contre-interrogatoire, Mme Isabelle précise qu’elle organisait avec l’enseignant de 5 e année un voyage à Ottawa. Dix minutes par semaine étaient prises en compte dans sa tâche à cette fin, pour un total de 400 minutes pour l’année scolaire.

[187]      Quant aux rencontres concernant les plans d’intervention adaptés, Mme Isabelle souligne que des rencontres devaient même être fixées pendant ses heures de classe et ce afin de permettre la présence de toutes les personnes concernées dont la psychologue. Dans ces cas, une suppléante était engagée. Par ailleurs, elle admet qu’elle peut profiter des périodes de disponibilité ou de nature personnelle pour rencontrer des collègues également disponibles aux mêmes moments. Elle ajoute que la direction respectait dans la mesure du possible ces périodes de temps de disponibilité ou de nature personnelle.

[188]      En contre-interrogatoire, Mme Isabelle reconnait le contrat d’engagement convenu en 2001 et renouvelé depuis. Enfin, elle ajoute que des surprises ou des urgences surviennent presque tous les jours au primaire et qui méritent une attention immédiate, comme un enfant qui se blesse, qui a faim, qui se chicane, etc.

 

8.         École Saint-Urbain et École Sacré-Coeur

[189]      M. Marc Jazienicki détient un baccalauréat en enseignement de l’activité physique et a débuté sa carrière d’enseignant en éducation physique en 1996. En 2004-2005, il partageait son temps entre les écoles Saint-Urbain (25 %) et Sacré-Cœur (75 %). Il enseignait l’éducation physique en 4 e et 5 e année à l’école Saint-Urbain et tous les niveaux à l’école Sacré-Cœur.

[190]      Environ 230 élèves fréquentent l’école Sacré-Cœur et une quinzaine d’enseignants y travaillent, incluant les enseignants spécialisés. L’école Saint-Urbain accueille une centaine d’étudiants et environ huit enseignants dispensent des cours.

[191]      La période de récréation à l’école Sacré-Cœur est de 20 minutes alors que ladite durée est de 15 minutes à l’école Saint-Urbain. Lesdites périodes de récréation n’étaient pas computées dans sa tâche soit à l’intérieur des 27 heures à moins qu’il ne soit assigné comme surveillant. Autrement, dans les deux écoles, les récréations étaient suivies d’un battement de deux minutes et demie à trois minutes. Au cours du battement, les élèves entraient à l’école et se déshabillaient. M. Jazienicki estime que le battement était trop court et que ça prenait donc cinq bonnes minutes d’autant plus qu’il doit les accompagner jusqu’à leur casier.

[192]      Après ses cours d’éducation physique et durant les périodes de récréations, M. Jazienicki exécute les tâches suivantes ; attend que les élèves se changent tout en demeurant près de la porte du vestiaire, prend à part quelques élèves pour leur souligner leur bonne performance, intervient auprès d’élèves turbulents afin de prévenir pour le prochain cours, aide fréquemment les élèves à retrouver un vêtement perdu. M. Jazienicki ajoute que des enfants requièrent souvent un entretien avec lui afin de discuter de leur performance et il ajoute qu’il est important de répondre à leurs interrogations ou doutes, l’éducation physique pouvant affecter leur estime de soi. Il profite également de la récréation pour revoir certains mouvements enseignés notamment ceux qui relèvent du cirque. Et, lorsqu’un enfant se blesse légèrement, M. Jazienicki profite de la récréation pour examiner la situation de plus près.

[193]      Si un élève a été impliqué dans un conflit au cours de la matinée dans l’une de ses classes et que le code de vie doit être appliqué en conséquence, M. Jazienicki profite de la récréation pour écrire une note à son titulaire ou pour lui en faire part de vive voix.

[194]      Deux à trois périodes étaient libres à son horaire et ce temps était utilisé à voyager entre les écoles.

[195]      M. Jazienicki supervise des équipes sportives impliquées dans des tournois inter-écoles et demandait des autorisations de sorties auprès des enseignants concernés pendant les récréations. Il utilisait également ce temps pour discuter avec la direction des écoles d’affaires courantes, dont le comportement d’élèves turbulents. La direction de l’école ne lui a jamais offert de reprendre le temps consacré aux activités professionnelles pendant les récréations.

[196]      Comme enseignant en éducation physique, il a peu de rapport avec les professionnels. Toutefois, à l’occasion le volet sportif représente une composante particulière pour certains élèves et à cet effet, il rencontre occasionnellement le psychologue de l’école. Il a toutefois des contacts avec les parents et les appelle habituellement durant les périodes de récréation, que ce soit au sujet de la performance de son enfant ou dans le cadre de son implication dans une fédération sportive.

[197]      Les cours d’éducation physique demandent beaucoup de matériel et il y a souvent des bris. M. Jazienicki signifie les bris au concierge de l’école pendant les récréations. Il utilise également ces périodes pour récupérer du matériel livré et laissé près de la porte de livraison.

[198]      M. Jazienicki utilise le temps de récréation pour changer le matériel dans le gymnase ou pour le placer adéquatement pour les classes suivantes. Autrement, M. Jazienicki profite des périodes de récréation pour faire pratiquer certains élèves à exécuter des prouesses de cirque et ces derniers se sentent valorisés. M. Jazienicki le fait sur son temps estimant que c’est bon pour les élèves.

[199]      Il prend ses messages et discute à l’occasion avec les autres enseignants de certains cas d’étudiants ou de projets collectifs. Enfin, il estime consacrer 60 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[200]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat convenu en 1997 et depuis renouvelé d’année en année. Il admet qu’une partie du temps qu’il alloue aux compétitions inter-écoles est compensée en temps de présence-élève. Il estime que les activités parascolaires complètent les tâches éducatives. Enfin, s’il manque de temps pour faire certaines activités ponctuelles, comme aviser le concierge d’un bris de matériel, il le fait sur l’heure du diner.

 

9.         École Sainte-Agnès

[201]      Mme Nathalie Dupuis a suivi une formation au baccalauréat en éducation préscolaire et primaire. Elle commence sa carrière d’enseignante en 1988. En 2004, elle enseignait à l’école Sainte-Agnès. Cette école compte 200 à 225 élèves et une douzaine d’enseignants dont certains spécialisés. Ces derniers étaient assistés de trois professionnels, soit : un psychologue (une journée par semaine), une psycho-éducatrice (une journée par semaine) et un orthopédagogue (cinq jours par semaine).

[202]      Il y avait deux récréations par jour, soit une prise en avant-midi et l’autre en après-midi et d’une durée respective de 15 minutes. Ces périodes n’étaient pas computées dans la tâche de Mme Dupuis à moins qu’elle ne soit assignée à de la surveillance. Lesdites récréations étaient suivies d’un battement de cinq minutes et  ces battements étaient inclus dans sa tâche. En tout et partout, Mme Dupuis assurait quatre ou cinq surveillances par semaine.

[203]      Mme Dupuis estime que la durée des battements n’était pas suffisante. Elle note que les enseignants doivent régulièrement intervenir auprès des élèves afin de faire des mises au point.

[204]      Pendant les récréations non assignées, Mme Dupuis profitait de ces périodes avec le conseil de classe pour organiser la classe aux fins d’activités ou d’évènements particuliers tel l’anniversaire d’un élève.

[205]      Elle faisait également des photocopies. Fréquemment, elle devait gérer un conflit pendant les récréations ou encore assister un élève blessé. En 2004-2005, elle devait régulièrement préparer un élève souffrant d’autisme et anxieux, aux activités particulières à venir. Également, elle utilisait la période de récréation pour désamorcer une crise ou une escalade dans laquelle cet élève était pris. Mme Dupuis faisait également le lien avec la technicienne spécialisée qui intervenait auprès de cet élève en particulier. Mme Dupuis souligne que la plupart des crises ou des conflits requièrent une intervention immédiate et qu’elle ne pouvait donc les reporter à ces périodes de disponibilité prévues à l’horaire.

[206]      Elle échangeait régulièrement avec ses collègues de travail au sujet de conflits impliquant des élèves de leurs classes respectives ou encore profitait de ce temps pour coordonner avec ses collègues des sorties scolaires. Elle échangeait également avec les spécialistes et les professionnels surtout à l’égard de situations qui demandaient une intervention immédiate.

[207]      Mme Dupuis soutient également, que la direction la rencontre régulièrement durant les récréations afin de parler d’un parent ou de faire un suivi de classement d’un élève. Et, Mme Dupuis demande également des rencontres avec la direction afin de discuter notamment d’un incident survenu en matinée et qui nécessite une intervention disciplinaire immédiate telle une suspension ou encore pour faire le point sur des activités en cours. Mme Dupuis souligne qu’elle siégeait au comité de bibliothèque et que ledit comité organisait une semaine de lecture en collaboration avec la bibliothèque de Valleyfield. Elle échangeait avec les représentants de cette bibliothèque au cours des récréations.

[208]      Mme Dupuis explique que des parents se présentent à l’heure de la récréation et demandent de la rencontrer, ce qu’elle faisait. En 2004-2005, elle ajoute qu’il y a eu plusieurs rencontres de ce genre notamment à l’égard de l’élève autistique.

[209]      Elle profite des périodes de récréations pour modifier l’horaire de la journée ou encore pour placer du matériel spécialisé comme celui requis pour les cours d’arts plastiques ou le matériel audio-visuel.

[210]      Elle estime consacrer près de 75 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[211]      En contre-interrogatoire, elle reconnait le contrat convenu en 1995 et renouvelé annuellement. Elle reconnait qu’il y avait cinq périodes libres à son horaire par semaine et qu’elle pouvait y placer du temps de disponibilité ou de nature personnelle et que certaines de ces périodes étaient contigües à des récréations.

[212]      Mme Dupuis affirme également que la direction acceptait que les enseignants prennent du temps d’enseignement avant les récréations, surtout en hiver, afin de préparer les élèves aux récréations. Elle reconnait également que des rencontres concernant les plans d’intervention adaptés étaient fixées durant ces périodes libres. Enfin, elle admet que les interventions des parents ou de la direction durant les périodes de récréations étaient plutôt ponctuelles. Elle admet également que son implication aux comités des fêtes comme l’Halloween ou Noël était volontaire tout comme au comité bibliothèque.

[213]      Mme Dupuis a une seule fois demandé la permission de quitter plus tôt afin de s’occuper d’un parent malade et la direction lui a accordé. Enfin, Mme Dupuis explique qu’elle devait formellement computer son temps et le répartir en fonction de ses engagements. Toutefois, elle ajoute que cette computation était plutôt théorique car elle dépassait toujours le temps prévu et particulièrement sur le temps des récréations.

 

 

Secteur secondaire

1.         École Notre-Dame-de-la-Paix

[214]      M. Daniel Bribeau a complété trois années à l’Université de Concordia en enseignement des matières de géographie et d’histoire et une année à l’Université d’Ottawa en enseignement. Il débute sa carrière d’enseignant en 1997 et en 2004-2005, il enseigne en 5 e et 6 e années du secondaire à l’école Notre-Dame-de-la-Paix.

[215]      Cette école accueille 170 élèves et 8 enseignants y travaillent. Ces derniers sont assistés d’un psychologue et d’une psycho-éducatrice qui consacrent respectivement six heures par semaine à cette école. Trois enseignants spécialisés dispensent les cours d’éducation physique, d’anglais et de musique.

[216]      En 2004-2005, il y a une récréation de 9 h 35 à 9 h 50 et cette période n’était pas computée dans la tâche de M. Bribeau à moins qu’il ne soit assigné à de la surveillance. Il était assigné à une récréation par semaine.

[217]      M. Bribeau affirme qu’il n’y eut aucune directive ou communication de quelque nature que ce soit de la Commission ou de la direction de l’école sur l’utilisation de la période de récréation alors que les enseignants ne sont pas assignés à de la surveillance. [13]

[218]      M. Bribeau affirme également que le code de vie ou le projet éducatif s’applique en tout temps à l’école. L’enseignant est responsable de son application et ce, même lors des périodes de récréations sans surveillance. [14]

[219]      M. Bribeau estime que ses collègues de travail à l’école, lors des périodes de récréations sans surveillance, font le même travail et des activités comparables en pourcentage de travail relié au travail. [15]

[220]      Durant les récréations, M. Bribeau va profiter à l’occasion de cette période pour remplir diverses tâches, comme : régler des problèmes de discipline avec un élève qui a été turbulent, ce temps permettant une communication de qualité avec l’élève ; faire compléter un travail par un élève ; entendre les confidences des élèves sur des problèmes qui surviennent dans la cour d’école ; accompagner un élève qui s’est blessé au secrétariat à la demande de l’enseignant surveillant et à la cour d’école.

[221]      Si un élève est impliqué dans une bagarre, le surveillant conduit l’élève à son enseignant qui le conduit à son tour à la salle de pause et là le responsable de la discipline gère la situation. Toutefois, en tant qu’enseignant titulaire, M. Bribeau assiste à l’enquête.

[222]      Si des activités de football ou de soccer sont organisées pendant les récréations, les enseignants s’assurent que tout se passe bien. En contre-interrogatoire, M. Bribeau reconnait que des élèves sont chargés de la sortie du matériel sportif.

[223]      Toutefois, M. Bribeau se rend habituellement au salon du personnel durant les périodes de récréations.

[224]      M. Bribeau profite de cette période de temps pour faire le suivi avec les professionnels sur les dernières interventions effectuées avec ses élèves n’ayant pas de période de temps prévue à cet effet à l’horaire. Les enseignants spécialisés le consultent également sur des problèmes de comportement de ses élèves afin de bénéficier de sa connaissance. M. Bribeau ajoute qu’en 2004-2005, il avait deux élèves en particulier ayant des troubles de comportement.

[225]      Pendant les récréations, M. Bribeau complète diverses tâches administratives, telles que : prendre les messages de parents laissés dans son pigeonnier ; organiser des sorties scolaires qu’il pilote durant les récréations, dont un voyage annuel à Québec et des sorties au théâtre, ce qui comprend réserver le transport ou les locaux et planifier des collectes de fonds ; retourner les appels des parents ; récupérer et placer le matériel requis pour le cours d’arts plastiques qui est habituellement placé après la récréation ; chercher la vidéo ou le téléviseur lorsque requis, faire des photocopies au secrétariat. En contre-interrogatoire, M. Bribeau estime que de placer le matériel d’arts plastiques en classe plus tôt constitue une source de distraction. Il en est de même pour le matériel audio-visuel et M. Bribeau note que les élèves sont des experts pour poser des questions qui peuvent retarder les travaux.

[226]      Il rencontre également la direction afin de faire le suivi disciplinaire d’élèves ou encore pour leur imposer une tâche punitive comme faire une copie. M. Bribeau précise que les conséquences doivent être données rapidement après l’évènement fautif, sans quoi l’impact est diminué. Il discute d’achat de matériel avec la direction pendant ces périodes ou d’idées de sorties scolaires. Enfin, sur quatre pauses non assignées par semaine, M. Bribeau estime en consacrer trois au travail. En contre-interrogatoire, M. Bribeau estime discuter avec la direction de cas d’élèves ou d’autres sujets durant la récréation, une à deux fois par semaine.

[227]      En contre-interrogatoire, M. Bribeau reconnait le contrat d’engagement convenu en 2000 et renouvelé depuis. M. Bribeau précise qu’il n’a pas le droit de quitter les cours en présence d’élèves. Il reconnait qu’il y a un battement de cinq minutes prévu avant le début de la récréation mais il n’est pas certain qu’il y ait un battement à la fin de la récréation. Il ajoute que la durée du battement ne suffit pas toujours surtout en hiver. M. Bribeau précise que les élèves ont le droit de sortir lorsque le surveillant est arrivé.

[228]      M. Bribeau admet que son horaire prévoit du temps de disponibilité et de nature personnelle, mais ne peut affirmer combien. Il admet qu’il y a quatre périodes de spécialistes à son horaire et que pendant ces périodes, du temps de disponibilité est prévu. M. Bribeau reconnait avoir rencontré la direction, des parents ou des spécialistes pendant ces périodes libres, dans la mesure toutefois où ces périodes de temps convergent avec leur disponibilité.

[229]      Toujours en contre-interrogatoire, M. Bribeau admet que du temps de nature personnelle a été fixé en début et en fin de journée, mais il ne se souvient pas exactement des moments. M. Bribeau reconnait qu’il disposait donc de quatre périodes de 45 minutes et du temps de nature personnelle pour exécuter différentes tâches et ce dans la mesure où il peut les planifier. Il ajoute qu’il y beaucoup d’imprévus au cours d’une semaine scolaire. Il reconnait, qu’il existe un système d’intercom pour les situations d’urgence. Enfin, M. Bribeau affirme n’avoir jamais utilisé du temps de nature personnelle ou du temps de disponibilité à des fins personnelles.

 

2.         École Edgard-Hébert

M. Sébastien Campbell

[230]      M. Sébastien Campbell détient un baccalauréat bidisciplinaire en enseignement de l’histoire et de la morale. Il débute sa carrière d’enseignant en 1998 et est libéré à temps plein comme conseiller syndical depuis 2010.

[231]      Près de mille élèves fréquentent l’école secondaire Edgard-Hébert et une soixantaine d’enseignants y dispensent des cours de secondaire I et II. Ces derniers sont assistés de deux psycho-éducateurs, d’une psychologue et d’une travailleuse sociale. M. Campbell souligne qu’à son avis, la capacité de l’école est de 750 élèves et qu’il y avait donc des casiers placés un peu partout dans l’école. Il compare l’école à une fourmilière.

[232]      À l’aide de l’horaire et de son projet de tâche pour l’année scolaire 2004-2005, M. Campbell souligne qu’il y a deux récréations par jour et que lesdites récréations sont suivies d’un battement de cinq minutes. Les récréations d’une durée de dix minutes sont prises de 9 h 55 à 10 h 05 et de 14 h 00 à 14 h 10. Cependant, pour les élèves, la durée des récréations était de15 minutes. Ainsi, seul le temps de battement de cinq minutes était reconnu dans la tâche de l’enseignant de 27 heures, à moins qu’il ne n’était assigné à de la surveillance. Il faisait de la surveillance au cours de deux récréations par cycle de neuf jours et une heure au cours du lunch dans la salle de ping-pong.

[233]      À cette époque le temps de nature personnelle était de trois heures et tel qu’il appert du projet de tâche, ce temps a été distribué en début de journée, au cours de l’heure du diner et en fin de journée soit à compter de 15 h 30.

[234]      Lorsque la cloche de la récréation sonne, les élèves ne se dirigent pas nécessairement vers l’extérieur. Certains jasent en classe alors que d’autres s’arrêtent dans les corridors. Certains élèves en profitent pour discuter du cours, du dernier examen, de ses questionnements sur la matière ou même pour se confier (peines d’amour). M. Campbell estime qu’au début du secondaire, le temps de récréation consacré aux élèves se répartit également entre des interventions de nature disciplinaire et de nature pédagogique.

[235]      Sur le plan disciplinaire, l’enseignant doit assurer un suivi en inscrivant de l’information sur une feuille à cet effet et en rédigeant une note à l’agenda de l’élève à l’attention de ses parents et du tuteur de l’élève et ce afin qu’il assure le suivi nécessaire. Par ailleurs, M. Campbell ajoute que si un élève faisait perdre du temps pendant le temps d’enseignement, il profitait de la récréation pour faire perdre du temps de loisir à l’élève.

[236]      M. Campbell prenait du temps pendant les récréations pour faire un suivi auprès de l’élève concernant un travail non remis et ce avant de communiquer avec ses parents. Il enchaine en expliquant qu’il est très fréquent que des élèves restent en classe afin de poser des questions surtout en périodes d’examens.

[237]      M. Campbell rapporte que cette école est située dans un milieu défavorisé et qu’il se procurait à la cafétéria des galettes et les offrait en cours de récréation à des élèves qui ne mangeaient pas à leur faim. Alors qu’il était en déplacement, M. Campbell devait intervenir auprès des élèves lorsqu’il était témoin d’une altercation ou d’un comportement inapproprié et contraire au code de vie. Ainsi, il devait régulièrement rappeler aux élèves âgés de 13 ou 14 ans, qu’il est inapproprié de s’embrasser ou de s’enliasser sans retenue aux vues et sus de tous. M. Campbell devait également demeurer aguerri à l’égard de toutes situations intimidantes.

[238]      Bien que du temps était prévu aux fins de rencontres entre les enseignants qui dispensaient le même cours, M. Campbell souligne que les enseignants devaient régulièrement faire le point entre eux et particulièrement à l’égard des examens. Par ailleurs, il profitait des périodes de récréation pour conseiller des enseignants moins expérimentés, notamment une voisine de classe toute nouvelle qui éprouvait toutes sortes de difficultés.

[239]      M. Campbell discutait également avec les professionnels auxquels il référait des élèves ayant des troubles de comportement.

[240]      Il estime que le matériel était en piètre état et il devait donc faire régulièrement des photocopies et monter du matériel. À cet effet, ni le temps de disponibilité ou de nature personnelle ne suffisait et il ajoute qu’il devait remplir une réquisition à chaque fois. M. Campbell explique que le visuel est apprécié des élèves et les enseignants profitent de la récréation pour se partager le matériel et l’équipement à cet effet.

[241]      M. Campbell rencontrait la direction de l’école durant les récréations surtout pour discuter des cas disciplinaires qui méritaient une intervention immédiate. Il note que la direction ne lui a jamais offert de reprendre ce temps. Par ailleurs, sur appel logé par le secrétariat à travers l’intercom, il se rendait durant les récréations auxdits bureaux pour répondre à toute demande de la direction ou de l’administration. Enfin, il estime qu’il consacrait 80 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[242]      En contre-interrogatoire, M. Campbell reconnait le contrat convenu en 2001. M. Campbell note qu’il n’a jamais eu à substituer du temps de nature personnelle pour du temps de disponibilité. Il ajoute n’avoir jamais demandé d’accommodements d’horaire à des fins personnelles.

 

M. Marc Lafontaine

[243]      M. Lafontaine détient un baccalauréat en enseignement en éducation physique. Il débute une carrière dans l’enseignement en 1995 à la Commission. En 2004-2005, il est à l’école Edgard-Hébert et enseigne aux élèves de secondaire I et II.

[244]      M. Lafontaine explique qu’il demeure à son bureau situé à côté du gymnase pendant les récréations, ce dernier étant situé trop loin de la salle des professeurs.

[245]      Autrement, pendant les récréations non assignées, il répond aux questions des élèves, rassurent les élèves qui n’ont pas bien performés, assistent les élèves qui se sont blessés, retient en retenue des élèves qui ont participé à un conflit au cours de la classe précédant la pause. M. Lafontaine demeure également près des vestiaires et s’assure qu’il n’y a aucun vandalisme, il gère la circulation et vérifie qu’il n’y a pas de conflits, de vols ou d’intimidation. Somme toute, entre deux cours, il surveille. Enfin, les élèves se confient également pendant les pauses. Ils parlent de leur peine d’amour ou autres difficultés.

[246]      Il profite des récréations pour prendre possession du plateau requis pour les cours à venir. M. Lafontaine souligne qu’il ne peut laisser un groupe sans surveillance même que pour cinq minutes car il risque de retrouver un groupe désorganisé. Il inscrit des notes à l’agenda de l’élève notamment lorsqu’il s’est présenté sans les vêtements requis. M. Lafontaine souligne qu’il ne peut remplir les agendas pendant les cours.

[247]      Étant responsable de plusieurs activités sportives parascolaires, M. Lafontaine est régulièrement questionné par les élèves au sujet des matchs à venir ou de toutes autres questions entourant ces activités. Il reconnait que du temps est reconnu dans sa tâche à cet effet mais estime que ce temps ne couvre jamais le temps réel effectué. Il ajoute que cinq minutes par semaine sont également reconnues aux fins de l’organisation de voyages (golf et ski).

[248]      M. Lafontaine a peu de contacts avec les autres enseignants. Il doit cependant discuter à l’occasion avec le psycho-éducateur ou le technicien en éducation spécialisée et il profite des pauses pour le faire.

[249]      Pendant les pauses, à l’occasion, le secrétariat appelle M. Lafontaine afin qu’il prenne connaissance d’un message de la direction ou pour compléter des formulaires. Il ajoute qu’à la demande de la direction, il doit vérifier son pigeonnier au moins une fois par jour. Il le fait durant les pauses ou sur l’heure du midi. Il arrive également que la direction l’appelle au cours d’une pause et ce afin de répondre à l’appel d’un parent. La direction le convoque alors par le système Multi Vox. Il participe également à l’occasion à des plans d’intervention en présence de la direction durant les pauses.

[250]      M. Lafontaine profite des pauses pour placer des appels à l’extérieur et requis aux fins des activités parascolaires qu’il coordonne.

[251]      Enfin, il estime consacrer 75 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[252]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat d’engagement à temps plein convenu en 1999.

[253]      En 2004-2005, M. Lafontaine confirme que sa tâche comprenait 26 périodes d’enseignement. M. Lafontaine confirme les périodes de surveillance à son horaire et qu’il était libre à compter de 14 h ou 14 h 10 les jours 2, 4, 6 et 9 de quitter l’école. Il précise qu’il devait demeurer disponible pendant les périodes réservées à des rencontres par famille (réunissant des enseignants qui dispensent les mêmes matières). 

 

M. François Quenneville

[254]      M. Quenneville détient un baccalauréat en enseignement de la géographie au secondaire. Il débute sa carrière d’enseignant à l’école Edgard-Hébert comme enseignant en informatique et depuis quelques années enseigne la géographie et l’histoire.

[255]      Les deux périodes de récréation n’étaient pas computées dans sa tâche à moins qu’il n’ait à faire de la surveillance ou qu’il devait changer de local. En 2004-2005, deux périodes de dix minutes correspondant à la récréation de l’avant-midi et deux périodes similaires en après-midi étaient reconnues dans sa tâche puisqu’il devait changer de classe. Ce temps représentant 40 minutes par cycle de 9 jours était reconnu comme du temps de présence ou de nature personnelle.

[256]      Puis, à l’aide de l’horaire de temps de présence déposé en preuve et convenu avec la direction de l’école, M. Quenneville démontre que du temps de disponibilité ou de nature personnelle était placé en début ou fin de journée et le midi, et la durée de chacune de ces périodes variait de 10 à 25 minutes. Il note qu’une période complète de 75 minutes était reconnue le jour 6 à des fins de rencontres optionnelles réunissant des enseignants dispensant les mêmes cours. Une autre période était également reconnue au même effet le jour 7 mais était obligatoire. Cette dernière période réservée pour des rencontres regroupant les enseignants relevant de la « famille 7 » et obligatoire était considérée aux fins de l’horaire comme étant assignée.

[257]      Durant les récréations, M. Quenneville soutient qu’il doit intervenir fréquemment pour discipliner des élèves dans les corridors, surtout auprès des élèves en secondaire I et II. Il doit intervenir également auprès d’un élève qui ne s’est pas bien comporté pendant le cours. Il fournit l’information qu’un élève a manqué en raison d’une absence. Il répond aux questions posées par les élèves alors qu’il est en déplacement.

[258]      Dans le cadre du programme de tutorat, il profite des pauses pour écrire à l’agenda des notes à l’intention des parents. Les enseignants d’une même famille échangent brièvement afin d’harmoniser l’enseignement de certaines matières qui demande plus de coordination entre eux.

[259]      Lorsqu’il constate qu’un élève ne semble pas bien aller, il partage ses constats avec le professionnel pouvant être concerné pendant les pauses. Il consulte son pigeonnier, dépose des réquisitions de photocopies.

[260]      En 2004-2005, M. Quenneville était impliqué dans des activités parascolaires dont l’organisation de voyages et de joutes de hockey cosom.

[261]      À la demande de la direction, il fait rapport à cette dernière de toute situation disciplinaire urgente dont les cas d’expulsion le plus rapidement possible incluant durant le temps de récréation.

[262]      Par ailleurs, pendant les récréations, M. Quenneville vérifie son pigeonnier, retourne des appels logés par des parents, complète des lettres d’alerte et que la direction signe avant l’envoi aux parents. Il contacte au besoin des conférenciers invités dans ses classes, en l’occurrence M. Pierre Groulx dans son cours d’archéologie. Enfin, il évalue à 75 % le temps de pause réservé à des fins professionnelles.

[263]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat d’engagement convenu en 1999. Il reconnait également l’horaire final déposé en preuve et confirme que cet horaire est établi après discussion avec la direction de l’école.

[264]      M. Quenneville ne peut affirmer si la direction lui a remis l’horaire final en même temps que la description finale de sa tâche éducative mais admet le contenu du document déposé en preuve. Selon ce document, en 2004-2005, la tâche éducative de M. Quenneville totalisant 2 160 minutes sur un cycle de 9 jours et était répartie de la manière suivante : enseignement (24 périodes ou 1 800 minutes) ; surveillance (140 minutes) ; encadrement (60 minutes) ; retenue (10 minutes) ; activités étudiantes (hockey 90 minutes et voyage ou golf 60 minutes). À la tâche éducative s’ajoutait du temps de présence/école totalisant 1 080 minutes et réparti comme suit ; battement (120 minutes) ; rencontre par famille (150 minutes) ; rencontre matière (75 minutes) ; supervision hockey (154 minutes) et supervision voyage et golf (60 minutes) ; temps de présence de nature personnelle ( 324 minutes) et temps de présence (197 minutes).

[265]      Le battement de 120 minutes par cycle de 9 jours correspondait aux cinq minutes de battement à la fin de toutes les périodes de récréation. Par ailleurs, M. Quenneville admet bénéficier d’une certaine autonomie dans la gestion de son temps et ajoute toutefois, qu’il doit respecter les balises de temps indiquées à son horaire.

 

3.         École Arthur-Pigeon

[266]      M. Bernard Jalbert détient un baccalauréat en enseignement de la géographie. Il a débuté sa carrière d’enseignant en 1999. En 2004, il est à l’école Arthur-Pigeon et enseigne l’informatique en adaptation scolaire et en cheminement particulier à des élèves de secondaire I à V. Il enseigne également le cours de cuisine et d’hôtellerie. À cette fin, M. Jalbert demeurait toujours dans le même local sauf pour le cours de cuisine.

[267]      En 2004-2005, il y avait deux récréations d’une durée de 20 minutes incluant un battement de 5 minutes à la fin de la période. Celle de l’avant-midi s’étalait de 10 h 25 à 10 h 45 et celle de l’après-midi de 14 h 25 à 14 h 42. La période de récréation, excluant les battements, n’était pas comprise dans la tâche de 27 heures à moins qu’il ne soit assigné à de la surveillance pendant ces périodes. Il était assigné à la surveillance des vestiaires trois jours sur neuf durant les récréations de l’avant-midi et un jour en après-midi. M. Jalbert précise que les enseignants doivent être à leur local au début du battement afin d’accueillir les élèves.

[268]      Lorsqu’il n’était pas en surveillance durant les récréations, M. Jalbert exécutait les tâches suivantes auprès des élèves : fréquemment, à la fin du cours, M. Jalbert demande aux élèves d’imprimer un travail fait pendant le cours et le temps requis à cette fin déborde toujours sur la période de récréation, il supervise la fermeture des ordinateurs, avec les élèves, il complète la remise en état de la cuisine, il règle des problèmes, des inquiétudes ou des conflits avec les élèves. Ainsi, si un élève en raison de son comportement a fait perdre du temps à la classe, M. Jalbert lui fait perdre son temps sur la récréation. Il en est de même pour les élèves qui arrivent en retard.

[269]      Lorsque requis, même à l’heure du midi, il demeure disponible pour écouter les élèves raconter leur vie, leurs amours, leurs bons et mauvais coups. Ainsi, il développe un lien avec les élèves. Lien qui s’avère particulièrement bénéfique sur le plan scolaire surtout avec des élèves ayant des difficultés d’apprentissage ou de comportement.

[270]      M. Jalbert supervise la coopérative d’étudiants (librairie) qui ouvre ses portes durant la récréation et le midi. Fréquemment, M. Jalbert est appelé sur les lieux, les élèves ne pouvant ouvrir le cadenas défectueux.

[271]      En cours de déplacement durant les périodes de récréation, M. Jalbert en profite pour saluer amicalement des élèves ou faire des interventions de courte durée.

[272]      Au besoin, au cours de la récréation, il signifie au tuteur d’un élève des problèmes de comportement et tente de trouver des solutions adaptées. Il ajoute que les enseignants n’ont pas de moments prévus à cette fin et qu’ils échangent donc pendant les pauses. Autrement, M. Jalbert a peu de contact avec les professionnels. Il participe à l’occasion à l’élaboration du plan d’intervention adapté de certains élèves.

[273]      Pendant les récréations, il vérifie les motifs d’absence et si lesdites absences ont été justifiées par les parents. Également, au besoin, il conduit un élève à la direction afin que des sanctions appropriées soient exercées. Il présente alors la problématique et une solution est adoptée. M. Jalbert rappelle qu’il n’est pas le tuteur et qu’il a donc peu de contact avec les parents des élèves.

[274]      Quant au contenu des cours en informatique, M. Jalbert développait beaucoup de programmes et des sites Web. Il profitait du temps de récréation pour mettre en place le matériel requis pour les cours à venir. Il en était de même pour le cours de cuisine. Il préparait les aliments et les espaces de travail pendant les récréations.

[275]      Il profitait également du temps de récréation pour prendre les communications laissées dans son pigeonnier. Puis, conformément au code de vie de l’école, tout enseignant devait intervenir auprès des élèves qui portaient un couvre-chef à l’intérieur de l’enceinte de l’école et ce en tout temps. Somme toute, M. Jalbert estime consacrer 70 % du temps de récréation non assigné à des activités professionnelles.

[276]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat convenu en 2000 et renouvelé depuis. De mémoire, le temps de disponibilité et de nature personnelle était distribué à l’intérieur de l’horaire, entre des périodes d’enseignement. Il précise que peu de temps était placé en fin de journée. Face à un document produit par la Commission, il admet qu’à titre de complément de tâches, étaient prises en compte les activités suivantes : Coopérative (3), Suivi d’élèves (1), Récré. (8), Support aux profs TIC (Informatique), Comité Fonds Jeunesse.

[277]      M. Jalbert reconnait qu’il peut en théorie rencontrer les tuteurs ou la direction pendant les périodes libres à son horaire. Il ajoute que c’est possible mais mathématiquement, les personnes ne sont pas souvent libres aux mêmes moments. Il admet bénéficier d’une certaine autonomie dans la gestion de son temps. Enfin, il reconnait les données indiquées sur un document préparé par la direction de l’école et selon lequel, deux périodes par cycle de neuf jours étaient reconnues comme de nature personnelle, trois autres en disponibilité et une période à des fins de suivis auprès d’élèves.

[278]      Interrogé sur l’application de l’horaire, M. Jalbert affirme que les enseignants doivent respecter l’horaire et qu’ils ne peuvent arriver en retard ou omettre de se présenter sans qu’il n’y ait de conséquence.

 

La direction

[279]      Mme Nicole Raymond est aujourd’hui retraitée. Elle a débuté sa carrière dans le secteur de l’éducation comme enseignante au primaire. Elle a par la suite agi comme conseillère pédagogique et autour de l’année 1990, assume une fonction de direction dans une école primaire. Puis, elle accepte le poste de directrice adjointe à l’école Arthur-Pigeon et devient directrice de cette école en 1993.

[280]      Mme Raymond reconnait le document produit par Mme Ste-Onge. Au mois d’aout 2004, elle a présenté en assemblée générale les grandes lignes entourant la définition de la tâche. Les enseignants questionnaient beaucoup l’application entourant le temps de nature personnelle.

[281]      Elle reconnait également le mémo de la direction et dont des extraits sont reproduits au paragraphe 22 de la présente sentence. Quant au temps de récréation, Mme Raymond comprend que ce temps ne doit pas être comptabilisé dans la tâche éducative à moins que l’enseignant ne soit assigné.

[282]      Mme Raymond a assisté à la rencontre organisée par la Commission le 27 octobre 2004. Lors de cette rencontre, les directeurs ont convenu que le temps de récréation ne pouvait être comptabilisé comme du temps de nature personnelle ou du temps assigné à moins que le temps de récréation ne suive une période libre. Ainsi, si un enseignant avait une période de 75 minutes libre à son horaire avant la récréation, on pouvait reconnaitre 90 minutes. Les battements étaient en conséquence computés dans le temps de présence obligatoire. Mme Raymond demandait aux enseignants d’être présents à leur local au début du battement. Autrement, les directeurs ont également compris que les enseignants n’avaient pas de temps de pause comme le personnel de soutien.

[283]      Mme Raymond reconnaissait également un forfait de minutes pour couvrir les activités que les enseignants exécutaient entre les cours (14 minutes). En contre-interrogatoire, elle explique que les battements sont définis à la convention collective et comprend le temps de circulation entre la salle de classe et la salle de travail ainsi que le temps d’accueil des élèves. Elle estime que ce temps est toujours effectué en présence d’élèves. Mme Raymond exigeait que l’enseignant se rende à sa classe dès que la cloche sonnait. Chaque récréation était donc suivie d’un battement de cinq minutes.

[284]      Mme Raymond a préparé un document de quatre pages et l’a remis aux enseignants. La première page rappelle le temps devant être alloué au sein de trois grandes catégories, à savoir ;

«     Tâche éducative :                          2160 minutes par 9 jours

     (20 heures/semaine)

Présence à l’école :                       2916 minutes par 9 jours

(27 heures/semaine)

Temps personnel à l’école :           3240 minutes par 9 jours

(30 heures/ semaine) »

 

[285]      Puis, dans le même document, elle recommande une répartition du temps de présence s’élevant à 1080 minutes par cycle de 9 jours (excluant la tâche éducative) de la manière suivante :

«  DÉTAILS DE LA PRÉSENCE À L’ÉCOLE

Accueil des élèves (5 minutes avant le cours)    : 120 min. (24 pér.) 125 (25 pér.)

                                                                                 130 (26 pér.) 140 (28 pér.)

 

Battement (midi ou autre)                                    :  130 minutes (max.) Environ 14

                                                                                 minutes par jour

Rencontre par niveau                                          :   54 minutes (60 minutes chaque

                                                                                 2 semaines) »

 

[286]      Chaque enseignant devait compléter les tableaux joints à ces paramètres et indiquer à l’horaire le temps de présence. Mme Raymond précise qu’elle reconnaissait 54 minutes ou 60 minutes chaque deux semaines pour participer à une rencontre par niveau. Le temps de concertation par niveau était fixé aux deux semaines de 16 h à 17 h à des jours spécifiques déterminés par la direction et variant en fonction du niveau. Mme Raymond souligne que ces rencontres sont très importantes, les enseignants devant échanger sur les jeunes. Elle précise que ce temps n’apparait pas à l’horaire mais que les enseignants savaient qu’ils devaient y participer.

[287]      Quant au forfait de 14 minutes comprenant les battements, Mme Raymond note que ce temps n’apparait pas à l’horaire. Elle ajoute que les enseignants pouvaient être appelés à intervenir dans les corridors et qu’elle reconnaissait donc ce forfait même s’il n’était pas intégré à l’horaire. En contre-interrogatoire, Mme Raymond précise que cinq minutes étaient reconnues aux fins de l’accueil après la récréation de l’avant-midi et la balance de neuf minutes couvrait n’importe quel moment entre deux classes. Un forfait de 14 minutes lui paraissait raisonnable.

[288]      Mme Raymond demandait aux enseignants de s’assurer de réserver du temps à certaines fins : « assurer un minimum de 3 périodes de disponibilité (dépannage) ; assurer une rotation des jours/cycle pour la tenue des rencontres ; réserver du temps pour les rencontres de comités ; les lundis du mois ou les 2 e et 4 e jeudis du mois. » Elle allouait 75 minutes par comité au sein duquel un enseignant participait et du temps pour des activités étudiantes.

[289]      Mme Raymond demandait à chaque enseignant de surveiller quatre récréations par cycle de neuf jours.

[290]      Elle estimait que la tâche éducative, mis à part les cours et leçons, comprenait : encadrement, récupération, projet parascolaire et activités culturelles.

[291]      Quant aux activités étudiantes, elle donne comme exemple le cas de M. Nicolas Bourdeau qui enseignait la géographie et la vie économique. Ce dernier organisait un voyage en France et à cette fin, elle reconnaissait 50 heures sur une base annuelle. Mme Raymond note que ce temps ne suffisait pas et ainsi, le temps consacré en surplus constituait du bénévolat.

[292]      Mme Raymond poursuit en expliquant que l’élaboration de la tâche dépendait des activités de chaque enseignant. Ainsi, elle reconnaissait plus de temps de récupération à Mme Louise Kelly qui enseignait en adaptation scolaire.

[293]      Mme Raymond rappelle que l’horaire final était remis à chaque enseignant et qu’il était appliqué avec souplesse. Si un enseignant devait s’absenter, il devait aviser la direction de l’école. Autrement, dans la mesure du possible, l’horaire des enseignants comprenait une période libre par jour. Ainsi, les enseignants pouvaient participer à la réunion mensuelle tenue avec les directions adjointes.

[294]      Durant les récréations, la direction n’avait aucune directive particulière sauf à l’égard de la surveillance. Également, la direction exigeait que les enseignants ne discutent pas de cas d’élèves pour des raisons d’éthique et de confidentialité. Autrement, Mme Raymond demandait aux professionnels de réserver ce temps pour des consultations avec les élèves. En contre-interrogatoire, elle précise que cette consigne n’interdisait pas des échanges entre les enseignants et les professionnels. Elle confirme même que de telles consultations pouvaient survenir et réitère que le forfait de 14 minutes couvrait également ces situations. Elle confirme que la direction n’avait pas émis de directive enjoignant les enseignants de ne pas répondre aux questions des élèves à la fin du cours ou au début de la période de récréation. Au contraire, en tant que directrice d’école, elle s’attendait à ce qu’ils répondent.

[295]      Toujours en contre-interrogatoire, Mme Raymond admet que tout enseignant doit écouter les soucis exprimés par un élève pendant les récréations. Une telle écoute fait partie de la présence attendue d’un enseignant, de sa profession et ne constitue pas du bénévolat. À son avis, ce temps est reconnu au forfait de 14 minutes. Elle confirme qu’il pouvait arriver qu’elle rencontre un enseignant pendant les récréations notamment pour placer un appel auprès d’un parent et ajoute que la direction et les enseignants n’étaient pas régis par les cloches et qu’elle n’avait pas de budgets pour compenser le temps que les enseignants exécutaient en dehors de leur tâche. Enfin, dans la mesure du possible, elle compensait pendant les périodes d’examens. Enfin, elle confirme que des enseignants pouvaient faire des suivis d’absences pendant les récréations.

[296]      Mme Raymond reconnait les deux demandes formulées par Mme Landry et Mme Nadeau. Elles ont demandé de placer du temps de nature personnelle durant les récréations. Sur réception desdites demandes, Mme Raymond les a acheminées à Mme St-Onge, directrice des ressources humaines à la Commission. Et, elle a refusé leur demande. Autrement, elle n’a pas reçu de réclamation à cet effet.

[297]      Mme Raymond explique également qu’elle acceptait que certains enseignants réduisent leur temps de présence pendant les périodes d’examens afin de compenser pour le temps qu’ils consacraient à certaines activités comme des voyages.

[298]      Mme Raymond souligne que M. Bernard Jalbert était un enseignant très impliqué. En plus des 24 périodes d’enseignement, il gérait la coopérative et assurait du suivi auprès d’élèves en cheminement particulier. Mme Raymond confirme que le développement du Projet Fonds Jeunesse en cheminement particulier demandait beaucoup de temps de la part des enseignants. M. Jalbert avait développé le cours de cuisine et d’hôtellerie. Mme Raymond explique également qu’on ne voit pas beaucoup de temps assigné à l’horaire de M. Jalbert car ils ne pouvaient savoir quand il participait au Projet Fonds Jeunesse ou qu’il donnait du support en informatique ou travaillait à la Coopérative. Ainsi, le seul temps assigné fixé était celui réservé à du suivi des élèves. Enfin, Mme Raymond souligne que M. Jalbert était toujours à l’école même lorsqu’il ne devait pas y être. Elle reconnait que M. Jalbert venait la rencontrer pendant les récréations pour rendre compte de l’état financier de la coopérative ou pour discuter d’autres questions relatives aux projets qu’il menait. En contre-interrogatoire, Mme Raymond reconnait que M. Jalbert est une personne honnête et crédible.

[299]      Par ailleurs, les absences des élèves devaient être notées par les enseignants sur un formulaire à cet effet et un étudiant devait déposer ledit formulaire au secrétariat. Par la suite, au besoin les enseignants pouvaient s’enquérir des motifs d’absences.

[300]      Mme Raymond confirme que le plan de réussite découle d’un consensus exprimé en assemblée générale. Elle estime que le temps qu’un enseignant doit consacrer à cette fin, comme remplir des questionnaires, fait partie du temps de présence. Elle note également que le règlement intégré à l’agenda des élèves constitue un outil important dans la vie d’une école. Elle réitère qu’un enseignant peut être appelé à intervenir auprès d’un élève au cours de ses déplacements dans les corridors et que le forfait de temps qu’elle allouait comme battement visait à reconnaitre en quelque sorte ces interventions.

[301]      Quant à la politique relative aux interventions auprès de l’élève en difficulté comportementale de la Commission, Mme Raymond estime que cette politique guide l’enseignant dans ses interventions auprès des élèves.

 

4.             École secondaire des Patriotes-de-Beauharnois

M. Pierre Vallée

[302]      M. Pierre Vallée a suivi une formation d’enseignent en mathématique au secondaire. Il a débuté sa carrière en 1989 et en 2004-2005, il enseignait les mathématiques en secondaire II et V.

[303]      En 2004-2005, les récréations se tenaient de 10 h 30 à 10 h 45 et de 14 h 25 à 14 h 40. Les enseignants devaient être à leur local cinq minutes avant la fin de la période de récréation soit à 10 h 40 ou 14 h 35. Ainsi, seuls les battements de cinq minutes étaient reconnus à la tâche de 27 heures à moins d’être assignés à de la surveillance. M. Vallée n’était pas affecté à de la surveillance durant les périodes de récréations en 2004-2005.

[304]      Durant les récréations, M. Vallée exécute les tâches suivantes auprès des élèves : il répond à leurs questions notamment au sujet du devoir ou du prochain examen ou de la prochaine période de récupération ; il retient un élève qui a retardé le déroulement du cours ; comme tuteur d’élèves, il profitait de cette période pour vérifier les feuilles de route des élèves ; il vérifiait qu’un élève assigné au local de retrait y était et que les bons motifs étaient notés et si l’élève avait fait défaut de se présenter ou avait inscrit la mauvaise raison, M. Vallée devait signifier la situation à la direction de l’école.

[305]      Dans le cadre de ses déplacements au cours des périodes de récréation, il devait intervenir auprès de tout étudiant qui n’était pas habillé conformément au code de vie. L’étudiant était alors référé à la direction pour qu’il se change.

[306]      M. Vallée explique qu’ils étaient trois à offrir le cours de mathématiques en secondaire II et qu’inévitablement, s’il n’était pas en classe, l’un des deux autres l’était. Ainsi, ils profitaient des récréations pour arrimer leur enseignement. Par ailleurs, M. Vallée souligne que les enseignants étaient regroupés par matières et par niveaux dans un local et que cette façon de faire facilitait les échanges entre enseignants et avec les professionnels, notamment durant les récréations. En contre-interrogatoire, M. Vallée précise qu’il se rendait très rarement au salon du personnel.

[307]      À tous les jours, il se rend à son pigeonnier pour vérifier ses messages. Également, il prenait possession durant les récréations des photocopies commandées. Il avait des échanges fréquents avec la direction durant ces périodes de temps. Parfois, il devait également changer le matériel (du secondaire II au secondaire V) et se déplacer du bloc C au bloc A. Lorsqu’il devait changer de bloc, s’il s’arrêtait au local, il y demeurait au plus cinq minutes. Il préférait rester en classe et souffler. À la fin du cours, il devait ranger le rétroprojecteur dans la classe.

[308]      Également, M. Vallée souligne qu’il arrive que le temps alloué pour subir un examen empiète sur le temps de récréation et tel est toujours le cas pour les examens du ministère qui durent trois heures.

[309]      Enfin, il estime consacrer au moins 50 % du temps de récréation à des activités professionnelles tout en ajoutant que ça prend cinq minutes juste pour se rendre à sa voiture. Ainsi, lorsqu’il peut s’arrêter, la pause dure au plus cinq minutes sur les dix minutes.

[310]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat convenu en 1999 et renouvelé d’année en année. M. Vallée soutient qu’il n’avait pas le droit d’inclure le temps de récréation (10 minutes) à une période contigüe et libre en temps de nature personnelle. Il pouvait toutefois, fixer du temps de nature personnelle pendant la période du diner, mais pas du temps de disponibilité. Il affirme ne pas demander de quitter plus tôt afin de compenser pour du temps consacré au cours de périodes non rémunérées et ajoute qu’il utilise pleinement tout le temps à sa disposition à l’école afin de réduire le temps devant être consacré au travail à la maison.

 

Mme Sonia Picard

[311]      Mme Sonia Picard détient un baccalauréat en linguistique et un certificat en enseignement des langues.

[312]      En 2004-2005, elle enseigne aux élèves de secondaire III, IV et V inscrits au Programme d’Éducation Internationale. L’école secondaire des Patriotes-de-Beauharnois accueille 1 200 élèves et 75 enseignants y travaillent. Quatre professionnels dispensent également des services, soit : un psychologue à temps plein, un psycho-éducateur à temps plein, un technicien en éducation spécialisée à temps plein et un animateur de vie spirituelle et d’engagement communautaire à temps plein. Un médecin et une infirmière assurent également les soins de santé.

[313]      En 2004-2005, il y avait deux récréations. Une prise en matinée de 10 h 30 à 10 h 45 et l’autre en après-midi de 14 h 25 à 14 h 40. Lesdites périodes de récréation étaient suivies d’un battement de cinq minutes. Les périodes de récréation n’étaient pas comptabilisées dans sa tâche à moins qu’elle ne soit assignée à de la surveillance. Mme Picard ne croit pas avoir eu en 2004-2005 de surveillance attitrée.

[314]      Mme Picard explique qu’elle est à la porte de sa classe au début du battement de cinq minutes et accueille les élèves.

[315]      Durant les récréations non assignées, Mme Picard répond aux questions posées par les élèves à la fin du cours au sujet du prochain examen ou du voyage qu’elle organise. Mme Picard organise un voyage à New York, en Europe et quelques sorties comme au Cegep John Abbott. Ces voyages s’inscrivent dans le programme d’éducation internationale. Ainsi, à New York les élèves visitent l’ONU tout en pratiquant leur anglais. L’Espagne est favorisée en Europe car plusieurs élèves du programme ont appris l’espagnol.

[316]      Les élèves profitent de la récréation pour échanger avec Mme Picard sur le développement de leur projet personnel qu’ils doivent réaliser aux fins de l’obtention de leur diplôme.

[317]      En 2004-2005, une de ses élèves a été impliquée dans une bataille de filles dans sa classe et Mme Picard l’a accompagnée auprès de la psychologue et prenait du temps à cet effet pendant les récréations. Mme Picard ajoute avoir un rôle d’éducation et ne peut laisser en plan ses élèves.

[318]      Au programme d’éducation internationale, Mme Picard note qu’il y a peu de discipline. Toutefois, dans le cadre de ses déplacements dans les corridors, elle intervient auprès des élèves pour les aviser sur leur habillement ou leur comportement.

[319]      Par ailleurs, Mme Picard ajoute qu’elle et des collègues assurent une pédagogie verticale et horizontale et qu’ils en discutent lors des journées pédagogiques mais que ces journées ne suffisent pas. Ainsi, les enseignants discutent pendant les périodes de récréations n’étant pas disponibles au même moment. Les enseignants profitent également de ces périodes pour discuter de particularités relatives à un élève fragile.

[320]      Les périodes de récréation sont également utilisées pour gérer des situations ponctuelles comme un élève en pleurs. Enfin, à titre d’exemple, Mme Picard note qu’au cours de l’avant-midi précédant son témoignage, elle a discuté avec huit élèves pendant la récréation.

[321]      Mme Picard discutait avec la psychologue au sujet de certains élèves que pendant les récréations n’ayant pas d’autres temps libres à cet effet. Mme Picard ajoute qu’en dehors des récréations, la psychologue est toujours en rencontre avec des élèves. Elle rencontrait également le psycho-éducateur concernant des élèves à l’égard desquels, elle soupçonnait de la consommation de substances illicites. La direction de l’école utilisait également les récréations pour discuter de certains élèves.

[322]      Mme Picard profite également des récréations pour faire des photocopies, faire des appels dans le cadre des activités extérieures qu’elle organise ou auprès des parents, réserver du matériel audio-visuel ou des bouquins à la bibliothèque. Elle estime consacrer au moins 90 % du temps de récréation à des fins professionnelles.

[323]      En contre-interrogatoire, Mme Picard reconnait le contrat convenu en 1990 et qui a été renouvelé depuis.

[324]      Elle admet qu’elle n’était pas obligée d’accompagner l’élève affectée par une bataille dans sa classe auprès de la psychologue. Cependant, elle ajoute qu’elle tenait informée la directrice adjointe, Mme Duquette du cheminement de l’élève. Elle admet ne pas avoir demandé de compensation pour le temps consacré à cet élève tout en précisant ne pas y avoir pensé. Elle croit également qu’une période de 60 minutes était reconnue à tous les professeurs à des fins de suivi auprès des élèves.

[325]      Mme Picard note qu’elle organisait bénévolement les voyages, ces derniers n’étaient pas reconnus dans sa tâche. Elle ajoute cependant que les voyages communautaires organisés par d’autres enseignants, comme celui à Cuba l’étaient.

 

M. Éric Thibaudeau

[326]      M. Thibodeau détient un baccalauréat en enseignement de l’histoire. Il débute sa carrière en 1991 et en 2004-2005, il enseignait l’histoire en secondaire IV et V à l’école secondaire des Patriotes-de-Beauharnois.

[327]      Les deux périodes de récréation d’une durée de 15 minutes comprenaient un battement de cinq minutes pour accueillir les élèves. Dix minutes par récréation n’étaient pas computées dans sa tâche de 27 heures à moins qu’il ne soit assigné à de la surveillance. Toutefois, en 2004-2005, il n’avait pas de surveillance à son horaire mais était responsable des quatre projets dont une partie du temps était reconnu durant les heures de lunch.

[328]      M. Thibaudeau et les élèves profitent des périodes de récréation pour finaliser des questions entourant un voyage organisé en lien avec l’enseignement comme en Normandie ou en Égypte. M. Thibaudeau note qu’aucun temps n’était reconnu à cet effet à son horaire.

[329]      Les élèves posent également des questions sur la matière enseignée ou encore sur le travail à compléter. Certains élèves se confient sur le temps des récréations. M. Thibaudeau disciplinait au besoin pendant les pauses de récréation et ajoute qu’il n’avait pas assez de temps pour se rendre pendant les récréations à son local alors il remplissait des formulaires comme celui des absences.

[330]      M. Thibaudeau saisit le temps des récréations pour rencontrer d’autres enseignants comme Mme Picard ou Mme Harel avec lesquels, il développe des jeux historiques intégrant l’apprentissage de l’histoire et des langues. Ils échangent également avec les autres enseignants d’histoire afin de clarifier les acquis des élèves dans ses classes et précise qu’il n’avait du temps reconnu à son horaire que pour des rencontres avec des enseignants qui dispensaient des cours de même niveau.

[331]      M. Thibaudeau explique qu’il intègre dans ses cours des nouvelles du jour et doit donc régulièrement imprimer durant les récréations du matériel d’actualité.

[332]      M. Thibaudeau doit également rencontrer des professionnels afin d’échanger sur des façons d’intervenir auprès de certains élèves ayant des difficultés particulières et le seul temps où ils sont disponibles en même temps est durant les récréations. Il donne en exemple, un élève qui était susceptible de faire des crises d’épilepsie et il devait être formé afin de prévenir la survenance de telle crise.

[333]      Il soutient également que la direction appelle les enseignants à l’interphone durant les récréations pour discuter de sujets diversifiés. Toutefois, en 2004-2005, son local d’enseignement était situé près des bureaux de la direction alors les directeurs se déplaçaient plutôt que d’appeler.

[334]      Enfin, M. Thibaudeau retourne les appels des parents ou effectue des appels liés notamment aux voyages au cours des pauses. Il estime consacrer 70 % du temps de récréation à des fins pédagogiques ou académiques.

[335]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat d’engagement convenu en 1997 et renouvelé depuis. Il précise que sur les 28,8 périodes à son horaire, 24 étaient réservés à l’enseignement et 4,8 à la récupération et aux projets personnels. Cette période de temps de 4,8 en présence d’élèves ne comprend pas le temps de disponibilité ni le temps de nature personnelle. Toutefois, de mémoire M. Thibaudeau ajoute que le temps de disponibilité et le temps de nature personnelle étaient distribués à l’horaire en début et fin de journée et dans tous les espaces libres à l’horaire.

[336]      Il réitère qu’il accepte d’organiser les voyages sur une base volontaire tout en soulignant que ces activités sont planifiées dans l’intérêt premier des jeunes et que la direction de l’école est au courant. Enfin, il admet disposer de son temps de disponibilité comme bon lui semble.

 

La direction

[337]      M. Robert Byette est retraité depuis le 13 mars 2013. Il a accumulé 36 années dans le secteur de l’enseignement dont 23 années comme enseignant d’histoire, et 13 années comme directeur adjoint ou directeur dans le secteur secondaire. De 2004 à 2011, il a été directeur de l’école secondaire des Patriotes-de-Beauharnois.

[338]      M. Byette aimait « marcher son école » et la gérait quotidiennement. Il reconnait le document préparé par Mme St-Onge. Il soutient qu’en 2004-2005, avec le support de la Commission, les directions des établissements commencent à décortiquer un peu plus la notion de temps de travail de nature personnelle et celle de temps assigné.

[339]      M. Byette reconnait également la note envoyée le 8 octobre 2003 par la Commission. [16] Il ajoute qu’en tant que directeur, la tâche éducative comptait le plus et le reste n’était pas encore entré dans les mœurs. Ainsi, la tâche éducative était établie en priorité avec les enseignants et par la suite, les autres tâches y étaient greffées (temps de nature personnelle et temps assigné). Les enseignants cherchaient à obtenir les meilleures places pour faire de la surveillance et déposaient donc rapidement leur proposition.

[340]      Les enseignants cherchent à placer le temps de travail de nature personnelle le matin ou en fin de journée et dans la mesure du possible en dehors des périodes libres à l’horaire. Les enseignants avec la direction décortiquaient le temps alloué à cette fin de manière à atteindre le temps prévu à la convention collective.

[341]      M. Byette se souvient de la rencontre du 21 octobre 2004 organisée par la Commission. L’objectif était d’unifier les façons de faire d’une direction d’école à l’autre. Les directeurs ont partagé cet objectif et dans ce cadre les battements avant et après les récréations ont été réduits de 10 minutes à 5 minutes à l’école secondaire des Patriotes-de-Beauharnois. Au cours de cette rencontre, l’on a découvert que certaines directions donnaient du temps pendant les récréations. Toutefois, Mme St-Onge a conseillé de cesser cette application. Autrement, M. Byette affirme que des enseignants auraient souhaité pouvoir placer du temps de travail de nature personnelle ou du temps de disponibilité durant les récréations non assignées.

[342]      M. Byette explique également que les directeurs des établissements se sont entendus sur des balises quant au temps à octroyer à l’égard des activités étudiantes. Ainsi, conformément à ces balises, il confirme que, selon le degré d’implication des enseignants dans l’organisation d’une activité étudiante, il reconnaissait 30, 90 ou même 150 minutes à cet effet. Par exemple, comme organisateur d’une activité de kayak appelée « Oumiak », M. Pierre Hamel disposait de 150 minutes par cycle.

[343]      M. Byette demandait également aux enseignants de réserver du temps pour échanger avec les enseignants du même niveau ou de la même spécialité. Il demandait que ce temps soit reconnu dans leur temps de disponibilité. Par exemple, le temps de disponibilité de Mme Lacasse, enseignante en adaptation scolaire, comprenait 30 minutes pour des réunions en cheminement particulier, 60 minutes pour la réforme et 60 minutes pour des rencontres avec les enseignants en anglais, par cycle. M. Byette fournit d’autres exemples de l’utilisation du temps de disponibilité : 45 minutes par cycle à M. Michel Lecompte afin qu’il écrive une politique pour contrer l’intimidation ; 75 minutes par cycle à Mme Claudia Léonard pour gérer les plans d’intervention en adaptation scolaire et la réintégration des élèves ; 60 minutes par cycle également à Mme Claudia Léonard afin qu’elle développe un cours d’exploration sur les métiers (qui s’est avéré un succès) ; 15 minutes pour du tutorat et 45 minutes pour des réunions des tuteurs, par cycle à Mme Manon Rémillard, enseignante en français.

[344]      M. Byette soutient que c’est impossible d’encadrer une tâche d’enseignant au secondaire et qu’il devait donc faire confiance aux enseignants. Il ajoute que parfois, des enseignants souhaitaient aménager autrement leur horaire et avisaient M. Byette avant de le faire. Il gérait avec souplesse les tâches des enseignants tout en s’attendant à être avisé de tout changement. En contre-interrogatoire, il souligne qu’au cours de l’année 2004-2005, l’enfant de Mme Dagenais est tombé malade et cette dernière a été remplacée par Mme Tétreault. Il ajoute que de tels aménagements se produisent fréquemment.

[345]      Lorsqu’il souhaitait rencontrer un enseignant, M. Byette regardait ces périodes de disponibilité et allait le rencontrer pendant ces périodes.

[346]      Par ailleurs, M. Byette admet qu’il acceptait que M. Thibodeau et Mme Picard entrent un peu plus tard lors des congés pédagogiques. Il ajoute toutefois, que ces enseignants n’ont jamais abusé du système et qu’ils sont deux professeurs impliqués. M. Byette reconnait également qu’il pouvait arriver que M. Thibodeau ou Mme Picard conduisent à la direction un élève pendant les récréations. Il précise que cela se produisait très occasionnellement, car il y a peu d’interventions disciplinaires auprès des élèves inscrits au programme international. En contre-interrogatoire, il précise que M. Thibodeau et Mme Picard sont des personnes crédibles.

[347]      Quant à M. Pierre Vallée, M. Byette souligne que cet enseignant n’aimait pas faire de la surveillance alors il enseignait 26 à 28 périodes et complétait avec de la récupération. Puis à l’heure du midi, il animait un centre d’aide en mathématiques. M. Byette précise que M. Vallée est un bon professeur.

[348]      Dans les cas où une rencontre de parent empiétait sur le temps de récréation, M. Byette effectuait un ajustement à l’horaire de l’enseignant concerné.

[349]      Quant aux périodes de récréation, il n’y avait aucune orientation précise. Toutefois, M. Byette essayait de ne pas rencontrer les enseignants pendant ces périodes de temps. En contre-interrogatoire, M. Byette confirme qu’il n’allait pas à la salle des professeurs pendant les récréations mais voyait régulièrement les enseignants prendre possession des communications laissées dans leurs pigeonniers.

[350]      M. Byette reconnait le projet éducatif qui était en vigueur en 2004-2005. Parmi les objectifs visés, il y en avait un relié au développement de chacun à travers l’humanisme, la rigueur et l’ouverture sur le monde. À cet effet, les enseignants devaient veiller au respect de cet objectif et ce en assurant à tous un climat sécuritaire et exempt de violence. M. Byette soutient que les enseignants interviennent à cette fin quotidiennement et qu’ils devaient agir lorsqu’ils étaient témoins d’une bataille ou d’une querelle même en dehors de leur tâche éducative. Il ajoute que c’est une question de gros bon sens. Enfin, en contre-interrogatoire, il affirme que tout le monde est responsable de la mission édictée au projet éducatif et au plan de réussite.

[351]      Tout en se référant au projet éducatif et en particulier aux actions définies, M. Byette confirme que certains élèves devaient faire compléter une feuille de route après chaque période d’enseignement et il estime que le temps consacré à cette fin par les enseignants était comptabilisé dans le temps reconnu en tutorat et comptabilisé dans la tâche éducative.

[352]      M. Byette confirme qu’il y avait un local de retrait situé près de la direction et que des enseignants pouvaient à l’occasion y conduire des élèves et ce après discussion avec la direction adjointe concernée. Il précise que ce genre d’interventions se produit plus souvent en adaptation scolaire.

[353]      Enfin, M. Byette rapporte que les directeurs adjoints ne convoquaient pas les enseignants pendant les récréations en 2004-2005. Toutefois, des enseignants se rendaient à la direction lorsque la période de récréation constituait un moment propice. En contre-interrogatoire, M. Byette rapporte être allé voir M. Thibodeau pendant des récréations sur une base amicale. Il confirme également que sa porte et celle des enseignants sont ouvertes durant les récréations et qu’il n’a jamais informé les enseignants qu’ils ne devaient pas parler aux élèves pendant ce temps. Il soutient que des élèves pouvaient aller consulter des enseignants mais souligne que le département était fermé.

[354]      En contre-interrogatoire, il précise que les battements situés avant et après les récréations ont été réduits de 10 minutes à 5 minutes à compter de l’année scolaire 2005-2006. Puis, tout en se référant à l’horaire de M. Pierre Vallée en 2004-2005, il reconnait qu’il y avait à cette époque 15 minutes entre les cours et que la direction s’attendait à ce que les enseignants demeurent au besoin en classe 5 minutes après les cours et qu’ils soient dans la classe 5 minutes avant le début du prochain cours. Puis, à compter de l’année scolaire 2005-2006, ces battements de 10 minutes ont été réduits à 5 minutes et devaient servir à l’accueil des élèves. Il précise que le battement de 5 minutes à la fin des classes devait servir à répondre aux questions, à vider les lieux et il ajoute qu’il est rare que cela requière plus que quelques minutes. Il reconnait que des élèves devaient surement rester pour discuter avec M. Thibodeau et Mme Picard. Enfin, il admet que les enseignants faisaient le même travail en 2004-2005 qu’en 2005-2006. Toutefois, en 2005-2006, ils n’étaient pas tenus de rester cinq minutes après les classes et la très grande majorité retournait à son département sauf M. Thibodeau car son département était situé à l’autre bout du monde. Il rapporte que les enseignants faisaient également des photocopies ou consultaient leurs pigeonniers entre les cours.

[355]      En contre-interrogatoire, il confirme qu’au besoin les enseignants en éducation physique changent les plateaux pendant les récréations.

 

5.         École de la Baie-Saint-François

[356]      M. Perreault détient un baccalauréat en enseignement de la géographie au secondaire. Il débute sa carrière d’enseignant en 1997 à l’école de la Baie-Saint-François. En 2004-2005, il enseigne l’histoire au secondaire IV et les activités technologiques (électricité, mécanique, dessin, etc.) au secondaire V. Cette école accueille environ 1 300 élèves et 80 enseignants y travaillent.

[357]      Les périodes de récréation étaient prises de 10 h 35 à 10 h 55 et de 14 h 35 à 14 h 50 quotidiennement. Ces dernières périodes comprenaient un cinq minutes pour l’accueil des élèves en classe. Ainsi, mis à part le battement de cinq minutes, le temps de récréation n’était pas computé dans sa tâche (27 heures) à moins qu’il n’était assigné à de la surveillance.

[358]      Tout en se référant à l’horaire, M. Perreault précise qu’il utilisait la période libre à son horaire le jour 2, pour définir avec une collègue enseignante l’application de la réforme scolaire dans l’école. La période libre au jour 3 (10 h 55-12 h 10) était utilisée pour diner, car M. Perreault surveillait de 12 h 10 à 13 h 20. Autrement, il ne se rappelle pas en détail de l’utilisation de toutes et de chacune des périodes de temps libre à son horaire (16 sur un cycle de 9 jours).

[359]      Par ailleurs, les élèves restent régulièrement en classe au début des périodes de récréation afin de se mettre à jour suite à une absence. M. Perreault note qu’il est préférable de répondre aux besoins des étudiants immédiatement, ne sachant quand ce sera possible de le faire dans un avenir rapproché. Ces derniers en profitent également pour clarifier une matière incomprise ou les directives d’un devoir à faire. Enfin, des rendez-vous pour des reprises d’examens sont souvent établis pendant les périodes de récréation.

[360]      M. Perreault rappelle que plusieurs étudiants inscrits en atelier technologique ont des problèmes de comportement et même que certains sont dangereux. Ainsi, toute intervention disciplinaire doit être exercée sur le champ. Autrement, au niveau secondaire, les élèves ont parfois le besoin de se confier auprès d’un enseignant et la période de récréation est un moment propice à cet effet. Ainsi, ils partagent leur tristesse suite à une peine d’amour ou leurs préoccupations suite à des gestes d’intimidation exprimés à leur égard.

[361]      Après la fin du cours, l’enseignant doit mettre le local en état pour le prochain cours et M. Perreault note qu’il est plus facile de placer la classe en l’absence des élèves, n’ayant pas de gestion de classe à faire.

[362]      M. Perreault organisait une sortie éducative à Toronto et note que cette activité s’inscrit dans le projet éducatif de l’école. Responsable des finances de ce projet, il mettait les livres à jour pendant les récréations ou profitait de cette période pour discuter avec le secrétariat.

[363]      Également, comme enseignant, M. Perreault devait intervenir auprès des élèves lorsqu’il constatait que ces derniers ne respectaient pas le code de vie et ce même pendant ses déplacements dans les corridors de l’école pendant les récréations.

[364]      M. Perreault explique qu’il partageait un local avec sept autres enseignants en histoire, géographie et économie et certains échangeaient durant les récréations sur des trucs pour enseigner une matière en particulier ou pour harmoniser la préparation des élèves aux examens du ministère. Enfin, la porte du local est toujours ouverte et régulièrement des étudiants se présentent pour échanger avec un enseignant pendant les pauses. M. Perreault ajoute qu’il y a un va-et-vient continuel même lorsque les enseignants décident de fermer la porte du local.

[365]      Les élèves ont des feuilles de route et au besoin, M. Perreault consulte l’un des professionnels et vu leurs disponibilités restreintes, il le faisait pendant les récréations. Puis, régulièrement lors d’une intervention disciplinaire auprès d’un étudiant, il devait faire rapport à la direction de la situation le plus rapidement possible et souvent ce moment correspondait à la pause de récréation. M. Perreault souligne que la direction n’a jamais refusé de rencontre à cet effet pendant les pauses, même que si cette dernière le croisait alors qu’il prenait son courrier dans son pigeonnier, elle le questionnait sur différents sujets comme le voyage, un cas disciplinaire, l’enseignement, etc.

[366]      Afin de répondre à un besoin ponctuel d’un étudiant, il faisait quelques photocopies pendant la pause ou ramassait des commandes placées quelques jours avant. À la demande du secrétariat, il prenait des messages laissés par des parents ou profitait de la récréation pour parler avec un parent, notamment sur des devoirs non faits ou une décision d’expulsion de la classe.

[367]      M. Perreault utilisait également le temps de récréation pour s’assurer que tout le matériel nécessaire se trouvait en classe pour l’atelier technologique ou encore au besoin pour installer le rétroprojecteur, les cartes requises à l’enseignement du cours d’histoire. Enfin, il estime qu’il consacrait près de 75 % à 80 % du temps de récréation à des activités professionnelles.

[368]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat d’engagement à temps plein convenu en 1997. M. Perreault ne se souvient pas où n’étaient placés le temps de disponibilité ni le temps de nature personnelle à l’intérieur de l’horaire de cours déposé en preuve. Toutefois, du temps pour le voyage à Toronto était prévu à cet effet et M. Perreault précise qu’il organisait ce voyage avec trois autres enseignants et qu’il assumait la responsabilité.

[369]      En contre-interrogatoire, M. Perreault admet que la direction n’exige pas que les enseignants fassent rapport par exemple des interventions disciplinaires pendant les pauses et ajoute que la réussite des élèves est au cœur de leur mission et il comprend qu’il est de sa responsabilité de faire rapport le plus rapidement possible, incluant durant les pauses. Il enchaine en précisant que dans le cadre des assemblées générales, la direction rappelle aux enseignants qu’ils travaillent pour les élèves, qu’ils doivent les supporter et les aider et il en déduit que les interventions auprès de la direction au cours des pauses s’inscrivent à l’intérieur de ces orientations exprimées par la direction.

[370]      Par ailleurs, M. Perreault admet bénéficier d’une certaine autonomie dans la gestion de son temps de disponibilité à l’école.

 

6.         École intégrée Montpetit/Saint-Joseph

[371]      M. Brouillette a suivi une formation en enseignement au secondaire en biologie et en chimie. Il débute sa carrière d’enseignant en 1999.

[372]      En 2004-2005, il est à l’école Montpetit/St-Joseph et y enseigne les mathématiques et le cours de sciences. Environ 100 élèves fréquentent cette école et 4 enseignants y travaillent. Ces derniers étaient assistés d’un orthopédagogue et d’un psychologue qui visitaient l’école une fois par semaine. Et, deux spécialistes enseignaient l’anglais et les arts plastiques.

[373]      En 2004-2005, les périodes de récréation étaient les suivantes : de 9 h 30 à 9 h 55 et de 13 h 20 à 13 h 25. Hormis, les battements de deux minutes et demie, ces périodes n’étaient pas computées dans sa tâche à moins qu’il ne soit affecté à de la surveillance. Enfin, chaque récréation était précédée d’un battement de deux minutes et demie et suivi d’un battement d’une durée équivalente.

[374]      Les élèves du secondaire I et II étaient divisés en deux groupes et M. Brouillette enseignait aux deux groupes.

[375]      L’horaire du groupe A soumis en preuve montre que tous les jours 1, les élèves appartenant à ce groupe suivaient en après-midi un cours d’anglais et un cours d’arts plastiques. M. Brouillette explique qu’il était soit absent ou en période libre ces après-midis. Il quittait l’école en fin de journée. L’horaire prévoyait également le jour 2, deux périodes réservées à des projets en après-midi. Durant cette période, M. Brouillette réunissait avec l’enseignante de français un groupe d’élèves et faisait du « team teaching » à l’intérieur d’activités comme du théâtre ou de la cuisine.

[376]      Le jour 3, de 9 h 55 à 11 h 25, le groupe A était en cours d’anglais et M. Brouillette était pendant ce temps en disponibilité mais il ne peut préciser si ce temps était comptabilisé comme du temps de disponibilité ou de nature personnelle. Puis le même jour, au cours de la période d’enseignement qui suit celle réservée au diner, M. Brouillette demeurait à l’école. Le jour 4, en début de journée et en fin de journée, il enseignait au groupe B. Le jour 5, sa journée débutait avec du temps de disponibilité et M. Brouillette souligne qu’il devait être à l’école à compter de 9 h 25 tous les jours. Enfin, tous les après-midis des jours 5 étaient réservés à du « team teaching » de même nature que les jours 2.

[377]      Au début des récréations, M. Brouillette rapporte qu’il essaie de quitter la classe mais il y a souvent des situations qui demandent une attention immédiate comme les problèmes de comportement. M. Brouillette réglait donc ces situations durant les récréations ou au cours d’un autre moment libre au cours de la journée.

[378]      Il devait à l’occasion laisser les élèves finir un laboratoire ou encore préparer le prochain cours. Par exemple, il profitait des récréations, pour renouveler le matériel périssable au sein des 12 stations du laboratoire.

[379]      M. Brouillette ajoute que lorsqu’il décelait qu’un élève ne semblait pas bien aller, il profitait des pauses pour le sonder et lui permettre de ventiler.

[380]      Autrement, vu la taille de cette école, la direction n’y était qu’à raison d’une journée à une journée et demie par semaine. La secrétaire ne travaillait que trois avant-midis par semaine et l’infirmière travaillait à temps partiel également. Ainsi, les enseignants étaient régulièrement appelés à gérer les petites blessures des élèves pendant les récréations. M. Brouillette tentait également de joindre les parents pendant la récréation de l’avant-midi afin de les aviser que leur enfant avait oublié sa boite à lunch.

[381]      M. Brouillette considère comme des moments privilégiés pour échanger avec les enseignants d’anglais et d’arts sur le suivi des élèves. Il en est de même pour les professionnels, qu’il tentait d’accrocher au passage.

[382]      Lorsque la direction était présente, il avait des échanges avec cette dernière durant les pauses tout comme durant les périodes assignées et libres dans la mesure où ces dernières périodes correspondaient au temps de présence de la direction à l’école.

[383]      Les rencontres avec les parents étaient dans la mesure du possible fixées durant des périodes libres. Toutefois, il arrivait fréquemment que ces rencontres empiétaient sur la récréation. Le temps de pause servait aussi à répondre aux appels des parents et les enseignants se répartissaient en l’absence de la secrétaire la distribution du courrier dans les pigeonniers. Enfin, M. Brouillette faisait des photocopies et récupérait le matériel requis comme le rétroprojecteur pendant les pauses de récréation.

[384]      Il estime à 80 % le temps de récréation qu’il allouait à des activités professionnelles.

[385]      En contre-interrogatoire, il reconnait le premier contrat d’engagement à temps plein convenu en 2001.

[386]      Il admet que les battements de deux minutes et demie suivant les périodes de récréation devaient servir à vider les corridors tout en ajoutant qu’il y a toujours « des champions des casiers ». En 2004-2005, il estime que 30 à 40 % des élèves étaient visés par un plan d’intervention.

[387]      Toujours en contre-interrogatoire, il admet que tous les jours un 30 minutes en temps de nature personnelle était reconnu en début de journée et qu’il en était de même en fin de journée. Il reconnait aussi que du temps était reconnu pour l’organisation des voyages mais ajoute que ce temps ne couvrait pas tout. Tout en admettant être plutôt autonome dans son emploi, M. Brouillette ajoute que la direction validait régulièrement ce qu’il faisait.

 

Secteur de l’Éducation des adultes

La Nouvelle-École et le Centre Jean-XXIII

M. Scuzdi

[388]      M. Scuzdi détient un baccalauréat en pédagogie et débute sa carrière d’enseignant en 1979 dans un centre d’éducation aux adultes. En 2004-2005, il partage son temps entre deux écoles soit La Nouvelle-École et Centre Jean-XXIII et y enseigne l’anglais.

[389]      Les deux écoles accueillent environ 120 élèves et 6 à 7 enseignants y dispensent des cours. L’âge moyen de la clientèle de La Nouvelle-École est de 17 à 18 ans et l’objectif est de favoriser la réinsertion sociale. L’âge moyen du Centre Jean-XXIII est de 21 à 22 ans.

[390]      À l’école La Nouvelle-École, les pauses étaient prises aux heures suivantes : de 10 h 20 à 10 h 35 et de 14 h 05 à 14 h 20. Des pauses d’une durée équivalente étaient également prévues à l’horaire du Centre Jean-XXIII, mais M. Scuzdi ne peut affirmer l’heure exacte. Ces périodes de temps n’étaient pas computées dans sa tâche de 27 heures.

[391]      Pendant les pauses, M. Scuzdi rencontre les élèves qui éprouvent des difficultés de compréhension de la matière ou encore ceux qui vivent des situations conflictuelles ou d’abus. Il ajoute que les élèves plus timides profitent des pauses pour poser des questions et que ces derniers posent des questions à tous les jours, à toutes les pauses.

[392]      Durant les pauses, les collègues échangent au sujet des élèves. Ils discutent beaucoup des cas d’élèves ou au sujet de sorties, d’activités particulières comme de voyage à l’étranger. M. Scuzdi ajoute que ce sont des belles opportunités pour ces élèves d’aller plus loin que le pont Mercier.

[393]       M. Scuzdi note cependant qu’il est rarement appelé à faire de la discipline mais comme pédagogue, il est à l’écoute des problèmes personnels vécus par les élèves dont des problèmes de consommation de drogues.

[394]      M. Scuzdi explique que bien qu’il ait du temps réservé pour faire du tutorat, ce temps n’était pas suffisant alors il en faisait sur l’heure du diner ou les pauses.

[395]      À l’initiative de la direction ou à sa demande, M. Scuzdi rencontre la direction pendant les pauses pour discuter des budgets, des examens, de cas d’élèves ou de commandes de livres. Il arrive même que la direction se déplace à son local pour discuter d’affaires courantes.

[396]      Les pauses sont utilisées pour préparer la salle des tests lorsqu’un élève est prêt à passer une étape du programme individualisé.

[397]      M. Scuzdi profite des pauses pour faire des photocopies, pour aviser le concierge de bris nécessitant une réparation, pour accueillir des groupes invités à faire des présentations comme des policiers. M. Scuzdi estime que les pauses font partie intégrante de son travail et ajoute « les enseignants ne disent pas, la cloche a sonné, j’arrête ». Il estime utiliser 90 % du temps de pause à des fins professionnelles.

[398]      En contre-interrogatoire, il reconnait le contrat convenu en 2004.

[399]      Il admet que des élèves quittent avant la fin de l’année scolaire tout comme certains finissent avant.

[400]      En 2004-2005, M. Scuzdi voyageait sur l’heure du diner pour se rendre au Centre Jean-XXIII. Il exécutait 300 heures sur deux jours et demi à La Nouvelle-École et 225 heures au Centre Jean-XXIII. Il confirme que le temps de tutorat était établi en fonction de la durée de l’enseignement. Il affirme que les activités de tutorat, d’enseignement et les réunions d’équipe étaient considérées dans le temps de présence à l’école.

[401]      M. Lafontaine reconnait qu’il bénéficiait d’une certaine autonomie professionnelle. Il admet qu’il participait à la réalisation du voyage de ski à La Nouvelle-École. Toutefois, le temps effectué à cette fin n’était pas comptabilisé. La direction d’école faisait appel au bénévolat et il s’est porté volontaire.

 

Mme Louise St-Germain

[402]      Mme St-Germain détient un baccalauréat en adaptation scolaire, une maitrise en enseignement du français et un certificat en intervention en violence et société. En 1990, elle commence à enseigner le français aux adultes à La Nouvelle-École et poursuit au Centre du Nouvel-Envol et au Centre Jean-XXIII. En 2004-2005, elle accepte d’assumer les fonctions de directrice adjointe à temps partiel au Centre Jean-XXIII jusqu’au 2 février 2005. Elle consacre donc pendant cette dernière période 50 % de son temps à la direction du Centre et 50 % à l’enseignement. Elle reprend à compter du 2 février 2005, l’enseignement à temps plein.

[403]      Près de 80 élèves fréquentent le Centre Jean-XXIII et plus ou moins 4 enseignants y travaillent. Deux professionnels y travaillent également. En contre-interrogatoire, Mme St-Germain précise que le nombre d’élèves varie d’une semaine à l’autre. Les enseignants offrent un enseignement individuel et magistral, notamment sur des notions non comprises par le groupe.

[404]      Les périodes de récréations étaient prises en matinée de 10 h 50 à 11 h 00 et de 14 h 20 à 14 h 30 en après-midi. Ces périodes de temps n’étaient pas computées dans sa tâche de 27 heures.

[405]      Pendant les pauses, les élèves posent des questions sur la matière ou sur un examen à venir. Elle discute avec les élèves de l’état de leur avancement et s’ils sont prêts à passer l’examen de la prochaine étape, les élèves cheminant à leur propre rythme. Lorsqu’un élève perd le contrôle en classe, Mme St-Germain l’invite à la pause à discuter de la situation. Il arrive qu’un élève revoie avec Mme St-Germain durant la pause une notion qui fera partie de l’examen prévu en après-midi.

[406]      Mme St-Germain souligne que les enseignants gèrent les corridors d’autant plus qu’il n’y pas de direction présente en tout temps. Elle ajoute que la clientèle est composée de jeunes ayant des problèmes de consommation ou de comportement et que les enseignants doivent intervenir lorsqu’ils constatent qu’ils se chamaillent ou se tiraillent. Les enseignants rappellent aux élèves qu’il est temps de rentrer en classe, n’ayant pas de cloche à cet effet.

[407]      Durant les pauses, les enseignants échangent entre eux sur l’état d’avancement des élèves dans leurs cours respectifs. Mme St-Germain note que les élèves arrivaient sans dossier et qu’ainsi, les enseignants établissaient le profil des élèves au fur et à mesure que l’année avançait. Les pauses sont également utilisées pour établir des contacts dans la communauté ou pour installer du matériel particulier en classe.

[408]      Mme St-Germain échangeait avec la conseillère pédagogique ou la technicienne en éducation spécialisée sur l’état d’avancement de certains élèves et ce durant les pauses. Elle ajoute que les collègues se réunissaient une fois par semaine. Toutefois, les professionnels n’étaient pas nécessairement disponibles pour participer à ces rencontres hebdomadaires.

[409]      À la demande de la direction, Mme St-Germain discutait d’un cas d’élève notamment suite à un appel logé par un parent. Elle précise, avoir consulté les enseignants comme directrice adjointe durant les pauses. Elle enchaine en notant que les enseignants avisent la direction de bris en classe ou au centre pendant les pauses. Également, à l’occasion, comme enseignante elle devait saisir la direction d’une problématique disciplinaire.

[410]      Durant les pauses, à la demande du secrétariat, Mme St-Germain retournait des appels. Elle faisait des photocopies notamment lorsqu’elle réalisait que les élèves n’avaient pas bien assimilé une matière et qu’une révision était donc nécessaire.

[411]      Régulièrement, durant les pauses des ajustements étaient faits à l’horaire des élèves. Mme St-Germain précise que le tiers de ses élèves provenaient du Centre local d’emploi et elle profitait des pauses pour communiquer avec ce dernier pour négocier une modification de programme. Enfin, elle estime consacrer 75 % du temps des pauses à des fins professionnelles, tout en spécifiant être professionnelle et qu’elle ne comptait pas son temps. Elle ne se souvient pas s’être assise pendant les pauses pour prendre un café, même qu’à l’occasion, elle doit se cacher pour pouvoir respirer.

[412]      En contre-interrogatoire, elle reconnait le contrat d’engagement à temps plein convenu en 1993 et renouvelé d’année en année. Mme St-Germain reconnait que la tâche éducative comprenait les cours et leçons, le tutorat, la préparation des cours et les corrections des examens. Elle reconnait également que le temps assigné comprenait les activités suivantes : rencontres avec la direction, rencontres d’équipes, rencontres au sujet de cas d’élèves et celles tenues avec les professionnels.

[413]      Mme St-Germain explique qu’il n’y a pas en tant que tel de la surveillance dans le secteur des adultes. Toutefois, durant les pauses, sa classe demeure ouverte et elle demeure présente. Elle ajoute que c’est un petit milieu et que les enseignants prennent même souvent leurs pauses avec les élèves. Elle ajoute que les enseignants travaillent pendant les pauses et que c’était clair pour la direction.

[414]      Mme St-Germain reconnait le document préparé par la Commission et reproduit en annexe. Elle précise qu’elle organisait une sortie au Salon du livre, au théâtre et que ces activités faisaient partie de son travail.

 

La direction

[415]      M. André Robichaud est aujourd’hui retraité. Il a œuvré comme orthopédagogue de 1967 à 1981 et a poursuivi sa carrière comme enseignant et comme directeur. Il a assumé des fonctions de direction au Centre Val Séjour, à l’école Edgard-Hébert, à l’école Jonathan, à l’école Baie-François, au Centre du Nouvel-Envol et à Pointe-du-Lac. En 2004-2005, il était directeur du Centre du Nouvel-Envol.

[416]      M. Robichaud reconnait le document préparé par Mme St-Onge. Il a soumis en assemblée générale ledit document.

[417]      M. Robichaud explique que dans le secteur de l’éducation aux adultes, l’enseignement régulier équivalait à 800 heures par année ce qui représentait en moyenne 20 heures par semaine. Cette période de temps comprenait la présentation des cours et leçons et le suivi pédagogique ainsi que 12 heures consacrées à des journées pédagogiques. Le tutorat se situait donc en dehors des 800 heures, sauf pour deux groupes affectés à des jeunes ayant grand besoin de tutorat. Le tutorat était donc inclus dans le 27 heures et dans la tâche complémentaire.

[418]      Quant aux journées pédagogiques, M. Robichaud note que souvent les 12 heures étaient entamées dès le début de l’année et qu’il arrivait que des journées soient ajoutées en cours d’année. Dans de tels cas, des journées d’enseignement équivalant à 5 heures étaient considérées annulées.

[419]      M. Robichaud a élaboré un modèle d’horaire de travail à l’intérieur duquel chaque enseignant indiquait les cours et leçons, le temps de présence au Centre. Y étaient indiqués également les battements. Ainsi, en 2004-2005, il y avait un battement de 10 minutes de 8 h 20 à 8 h 30 et un autre de 11 h 45 à 11 h 50. Il y avait également deux pauses, l’une de 10 h à 10 h 10 et l’autre de 14 h 15 à 14 h 25. M. Robichaud a ajouté des battements à l’horaire afin que les enseignants accueillent les élèves en classe et développent des liens avec ces derniers d’autant plus que la plupart éprouvaient des difficultés. Des battements d’une durée de cinq minutes en l’après-midi ont également mis à l’horaire afin que les enseignants puissent répondre aux questions des élèves. Il précise que ce n’est pas parce qu’un cours est terminé que tout est pour autant complété, les enseignants doivent demeurer en classe pour répondre aux questions des élèves. M. Robichaud note également que parfois un enseignant représente une personne significative dans la vie d’un jeune et ce dernier profite des pauses pour se confier. Les battements étaient donc inclus dans la tâche complémentaire.

[420]      Il enchaine en expliquant que le temps de nature personnelle était placé à l’horaire en dernier lieu et généralement au début et à la fin de la journée. Il pouvait convoquer une enseignante pendant ce temps de travail de nature personnelle.

[421]      M. Robichaud n’a pas comptabilisé le temps des pauses ayant reçu des directives à cet effet. Il note que les élèves se rendent au local des élèves pendant les pauses ou vont fumer à l’extérieur. Les enseignants se rendent au salon du personnel ou vont fumer à l’extérieur et très rarement ont des contacts avec la direction. Toutefois, M. Robichaud précise que des situations peuvent requérir une intervention immédiate et dans ces cas, des échanges avaient lieu entre la direction et l’enseignant concerné pendant la pause. Il ajoute qu’il est rare, au quotidien qu’il n’y a pas d’enseignants au bureau de la direction durant les pauses.

[422]      Enfin, M. Robichaud gérait avec souplesse l’horaire des enseignants. L’application de l’horaire reposait sur la confiance. Ainsi, un enseignant pouvait déplacer du temps sans avoir à lui signifier. Il explique par ailleurs qu’il y avait peu de voyages organisés au Centre du Nouvel-Envol.

[423]      M. Robichaud estime que les enseignants doivent faire respecter le code de vie du Centre et cela même pendant leurs allées et venues dans le Centre.

[424]      En contre-interrogatoire, M. Robichaud reconnait qu’il ne se rendait pas en classe et qu’il pouvait arriver qu’un enseignant demeure en classe pendant une pause, notamment pour discuter avec un élève. Il ajoute que ce genre de situations ne se présentait pas tous les jours. M. Robichaud précise que les battements à l’horaire y sont pour couvrir ce genre de consultations ou d’échanges avec les élèves mais convient que cinq minutes ne suffisent pas toujours. Il admet que les enseignants discutaient pendant la pause, des examens ou de cas d’élèves. Toutefois, M. Robichaud demandait aux enseignants de ne pas discuter des cas d’élèves au salon du personnel, estimant que ce n’était pas le lieu approprié. Enfin, il ajoute que partout les enseignants ont tendance à discuter des cas d’élèves pendant les pauses.

[425]      Il admet également que tous les enseignants doivent s’assurer que les récréations se déroulent dans un climat exempt de violence. Tout comme il peut arriver que les enseignants discutent à l’occasion avec les professionnels durant les pauses ou saisissent la direction d’une problématique qui mérite une attention immédiate.

 

Secteur de la formation professionnelle

Centre de formation professionnelle de la Pointe-du-Lac

Mme Johanne Boucher

[426]      Mme Johanne Boucher a suivi une formation de premier cycle en administration et détient un baccalauréat en éducation, secteur administration, commerce et informatique. Elle a également obtenu un diplôme de deuxième cycle en intervention en formation professionnelle. Elle commence à enseigner à temps partiel en 1982 et en 2004-2005, elle enseigne au Centre de formation professionnelle de la Pointe-du-Lac, ci-après appelé « le Centre ». À l’audition, elle a accumulé 36 années d’expérience à la Commission. Deux centres de formation professionnelle sont offerts sur le territoire de la Commission.

[427]      Environ 200 élèves fréquentent ce Centre et près de 38 enseignants y travaillent.

[428]      En 2004-2005, les pauses étaient prises aux heures suivantes : de 10 h 15 à 10 h 30 et de 14 h 30 à 14 h 40. Mme Boucher affirme que la période de pause n’était pas comptée dans sa tâche de 27 heures. Elle soutient également que la surveillance était implicite puisque les enseignants demeurent responsables de leur groupe et disponibles pour toutes interventions. Elle ajoute que cette disponibilité fait partie du sens du devoir et des responsabilités de tout enseignant.

[429]      Mme Boucher, comme tous les autres enseignants, affirme n’avoir jamais reçu de directive sur ce qu’elle devait ou ne devait pas faire pendant les pauses et ajoute à sa déclaration n’avoir jamais reçu d’avis à cet effet. Quant au code de vie, elle précise que celui-ci peut varier d’un secteur à l’autre et qu’à tout évènement, elle doit assurer un certain calme dans les corridors d’autant plus que les horaires varient d’un secteur à l’autre. Elle estime, comme tous les autres enseignants, être responsable de l’application du code de vie et du plan de réussite même durant les pauses. Enfin, elle est d’avis que ses collègues font le même travail qu’elle.

[430]      Mme Boucher note qu’il n’y a pas de cloche annonçant la pause et les élèves demeurent donc en classe pour discuter de leur stage en milieu de travail ou d’une problématique à l’égard de la matière enseignée.

[431]      Elle précise qu’il peut s’écouler deux jours avant qu’elle ne revoie un élève,  ainsi si l’un d’eux arrive en retard ou a manqué un cours, il prend le temps de pause pour se mettre à jour. Fréquemment, les élèves lui posent aussi des questions alors qu’elle est en déplacement pendant les pauses. Elle discute de la fixation d’une période de récupération pendant les pauses. Elle ajoute que les élèves se présentent au local des professeurs pour poser des questions.

[432]      Mme Boucher installe le matériel d’animation comme le projecteur durant les pauses.

[433]      Si elle note qu’un élève ne semble pas bien aller, elle discute avec ce dernier pendant la pause.

[434]      Étant la plus expérimentée, ses collègues la consultent régulièrement pendant les pauses. Elle et une collègue avec qui elle partage un groupe font le point sur le temps des pauses.

[435]      Elle ajoute, qu’à la demande de la direction, elle complète le cahier des absences pendant la pause. Elle se rend au secrétariat pour signer des documents, pour prendre possession des messages ou pour retourner des appels auprès des employeurs qui retiennent des stagiaires. Mme Boucher ajoute que le directeur adjoint venait souvent aux bureaux des enseignants durant les pauses ou les appelait pour discuter d’affaires courantes.

[436]      Mme Boucher retourne les appels placés par les parents pendant les pauses, ajoutant qu’elle doit retourner les appels le même jour. Enfin, elle estime consacrer 90 % du temps de pause à des activités professionnelles.

[437]      En contre-interrogatoire, elle reconnait le contrat d’engagement convenu en 1996. Mme Boucher affirme que les deux périodes libres à son horaire les mardis et les jeudis étaient utilisées à de la récupération. Elle soutient également que la balance du temps de nature personnelle était placée en début ou en fin de journée.

[438]      Mme Boucher admet bénéficier d’une certaine autonomie professionnelle mais spécifie que M. Laurendeau a installé un suivi du temps de présence et de nature personnelle. Elle précise également qu’elle dispensait 30 heures de cours par semaine. Par ailleurs, Mme Boucher participe volontairement au comité de participation de l’école et ce temps n’est pas reconnu dans sa tâche.

 

Mme Sophie DeRepentigny

[439]      Mme DeRepentigny détient un baccalauréat en éducation, secteur professionnel. Elle enseigne la coiffure depuis 1995 au Centre de formation professionnelle de la Pointe-du-Lac.

[440]      Les parties ont admis que si Mme DeRepentigny était venue témoigner, le contenu de son témoignage aurait été essentiellement le même que celui de Mme Johanne Boucher.

 

La direction

[441]      M. Michel Laurendeau est aujourd’hui retraité après avoir complété une longue carrière dans le domaine de l’enseignement comme enseignant ou directeur. En 2004-2005, il était directeur de la formation professionnelle au Centre de formation professionnelle de la Pointe-du-Lac. À ce titre. Il était responsable de la gestion administrative et pédagogique. Il est assisté d’une direction adjointe et de chefs de groupes.

[442]      M. Laurendeau souligne que tous les programmes comprennent un module de stage en milieu de travail et à cette fin notamment travaille avec des partenaires, soit des entreprises de la région, le CSSS et le Centre hospitalier de la région. Le Centre accueille de plus la clientèle d’Emploi-Québec. La clientèle est âgée entre 25 et 35 ans et la majorité provient d’Emploi-Québec.

[443]      Aux fins de l’établissement de la tâche, M. Laurendeau souligne certaines particularités du secteur professionnel, à savoir : l’année scolaire comprend 200 jours, la durée d’enseignement varie d’un enseignant à l’autre, ainsi certains débutent plus tard et d’autres finissent plus tard, comme en juillet.

[444]      M. Laurendeau explique que l’adoption d’un code de vie et d’un plan de réussite a entrainé l’embauche d’un plus grand nombre d’enseignants, lesdits codes favorisant l’encadrement et la récupération. Également, ces orientations ont entrainé un suivi plus assidu de la présence des enseignants au Centre.

[445]      M. Laurendeau explique qu’il n’y a pas de récréations en formation professionnelle. Il y a des pauses pour les élèves. Également, il n’y a pas de rencontres avec les parents.

[446]      Aux fins de l’établissement de la tâche, M. Laurendeau a créé de sa propre initiative un fichier Excel. Chaque enseignant devait compléter ledit fichier.

[447]      M. Laurendeau rapporte également qu’il devait concilier la réalité du secteur avec les balises suggérées par la Commission. Par exemple, le stage en infirmerie débute à 7 h 15 et se termine à 17 h. Ainsi, pendant le stage, l’enseignant exécute des semaines de travail dépassant la norme de 35 heures. Il doit donc répartir le temps et tenir compte des moyennes.

[448]      En 2004-2005, M. Laurendeau n’a pas demandé aux enseignants de préciser le temps de nature personnelle au fichier. Ils devaient indiquer le nombre d’heures consacré à des cours, à la récupération et en présence. Il explique que les enseignants se réunissent au mois de juin de chaque année et choisissent les cours qu’ils souhaitent offrir. Puis, en fonction de leurs choix respectifs, ils calculent la répartition de leur tâche en heures. Ainsi, le 6 octobre 2004, M. Laurendeau a pu confirmer auprès de Mme Johanne Boucher sa tâche :

« Madame,

À titre d’enseignante à temps plein, votre tâche pour l’année scolaire 2004-2005 sera répartie comme suit :

-        636 heures de cours et leçons ;

-        84 heures de récupération et de surveillance d’examens.

Le total de votre tâche éducative sera de 720 heures au secteur Administration, Commerce et Informatique.

Enfin, 480 heures de présence au Centre seront échelonnées sur un calendrier de 200 jours compris entre le 1 er juillet au 30 juin 2005 et devront apparaître à votre horaire de travail.

L’organisation de votre semaine de travail devra tenir compte des paramètres mentionnés tout en répondant aux besoins particuliers des élèves de votre secteur. […] »

 

[449]      M. Laurendeau note que les 480 heures de présence correspondent à du temps assigné ou du temps de travail de nature personnelle. Il enchaine en expliquant qu’il peut arriver des situations requérant du temps exécuté « hors tâche » notamment lors d’un remplacement ou d’un dépassement du nombre d’élèves inscrits.

[450]      Durant les pauses, M. Laurendeau arpentait le Centre. Il soutient que la majorité des élèves se dirigeaient vers la cafétéria de la polyvalente adjacente au Centre ou allaient fumer à l’extérieur. Il ajoute que les horaires de cours varient d’un secteur à l’autre. Il précise que les enseignants n’étaient pas assignés à une tâche en particulier.

[451]      M. Laurendeau affirme qu’il n’y avait aucune récupération pendant les pauses. Il avait demandé à chaque enseignant de prévoir un temps à cet effet à l’horaire. Il ajoute qu’il n’existe pas comme tel de telles périodes libres en formation professionnelle.

[452]      Tout en soulignant n’avoir reçu aucune réclamation pour du travail effectué pendant les pauses, M. Laurendeau note qu’il peut arriver qu’un cours se poursuive pendant la pause, notamment en coiffure et dans ces cas, la pause est reportée à plus tard.

[453]      Tout en se référant à un horaire hebdomadaire de Mme Boucher, M. Laurendeau rapporte que les horaires étaient remis au secrétariat et y étaient indiqués que les cours et leçons. Il explique qu’il n’y a pas de surveillance ni de battements en formation professionnelle. Toutefois, il reconnait qu’il est possible qu’un enseignant soit appelé à intervenir dans le cadre de ses déplacements au Centre.

[454]      M. Laurendeau reconnait le plan de réussite et les règlements du Centre. Ces derniers étaient reproduits à l’agenda et comprenaient des règles relatives à la tenue vestimentaire et pouvant donc entrainer des interventions par les enseignants. M. Laurendeau estime également que le plan de réussite s’intègre à la tâche de l’enseignant.

[455]      En contre-interrogatoire, M. Laurendeau reconnait que les enseignants bénéficient d’une grande souplesse dans l’aménagement de leur tâche qui est en grande partie tributaire des cours offerts. Il admet que les adjoints ont une meilleure connaissance que lui de ce que font les enseignants pendant les pauses. Il admet que Mme Boucher est compétente et crédible. Il partage également le fait qu’il est important que les enseignants développent des liens avec les élèves. Il reconnait qu’il est possible qu’un élève pose des questions pendant la pause. Tout comme il est possible qu’un enseignant en déplacement dans les corridors doive intervenir auprès d’un élève ne respectant pas le code de vie du Centre.

[456]      M. Laurendeau confirme que des enseignants viennent le voir pendant les pauses. Il admet qu’il est également possible que des élèves demeurent en classe pour jaser avec l’enseignant.

[457]      M. Laurendeau affirme que la Commission avait interdit de placer de la récupération pendant les pauses. Enfin, il confirme qu’il n’avait pas l’habitude de prendre ses pauses avec les enseignants.

 

4.             Les prÉtentions deS parties

[458]      Vu la présence d’assesseurs et des échanges entourant la preuve et les arguments soutenus par leurs procureurs respectifs dans le cadre d’un délibéré, j’ai choisi de résumer très succinctement les principaux arguments défendus par les procureurs.

 

La partie syndicale

 

Le fond

[459]      Le procureur syndical soutient que la preuve a démontré de façon évidente, claire et non équivoque que les enseignants travaillent la majorité du temps de pause non assigné entre deux périodes de temps assigné. Ainsi, ces périodes de temps devraient être computées dans la tâche de 27 heures.

[460]      Il rappelle que la rémunération en compensation du travail effectué constitue une composante fondamentale du contrat de travail ou de la relation d’emploi et cite à cet effet, l’article 2085 du Code civil du Québec, l’article 1 du Code du travail et l’article 1 de la Loi sur les normes du travail. Ainsi, le bénévolat n’existe pas.

[461]      L’Employeur doit donc rémunérer le travail effectué par les enseignants pendant les récréations non assignées entre deux périodes assignées, sinon il viole l’article 57 de la Loi sur les normes du travail et en conséquence la convention collective.

[462]      L’analyse des questions en litige doit se faire à la lumière des paramètres entourant la définition de l’horaire de travail et de la tâche de l’enseignant et qui comporte en soi une certaine souplesse. Il faut également tenir compte des diverses obligations que tout enseignant doit respecter et qui découlent de la convention collective, des législations, des politiques adoptées par l’Employeur et de sa fonction particulière dans la société.

[463]      Le paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail est au cœur du litige. Cette disposition d’ordre public, à laquelle l’Employeur ne peut déroger, doit être interprétée de manière à favoriser l’atteinte de l’objet poursuivi par le législateur. En l’occurrence, le procureur suggère que l’objectif de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail vise à rémunérer le temps au cours duquel, les salariés se trouvent en raison de l’organisation du travail, disponibles ou en attente de travail. En l’espèce, tel est le cas durant les pauses ou récréations non assignées entre deux périodes assignées.

[464]      Tel que libellé, lorsque les trois conditions édictées à l’article 57 de la Loi sur les normes du travail sont rencontrées, le salarié est réputé au travail. En l’espèce, la preuve a démontré que les enseignants sont à la disposition de l’Employeur, doivent être sur les lieux du travail et sont obligés d’attendre qu’on leur donne du travail durant les pauses ou récréations non assignées entre deux périodes de travail assignées. Tel qu’il ressort des références déposées, le caractère obligatoire de la disponibilité constitue un facteur déterminant dans l’application de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail. Cette disponibilité peut résulter du cadre dans lequel le travail est exécuté. Ainsi, pour renverser cette présomption, l’Employeur doit prouver que le cadre d'exécution du travail qu’il impose aux salariés est clair et comporte des balises connues et qu’ils ont donc exécuté du travail de leur propre initiative et non pas à la demande de l’Employeur. La jurisprudence indique également que du travail effectué en raison d’une situation exceptionnelle ou de circonstances particulières ne constitue pas du temps d’attente.

[465]      En l’espèce, la preuve démontre que les enseignants exécutent régulièrement des tâches inhérentes à leurs fonctions durant les pauses ou récréations non assignées. Les enseignants doivent demeurer disponibles pendant les récréations non assignées, et ce en raison de l’organisation de leur travail ou de la nature de leur travail et de leurs obligations. Et, l’Employeur n’a pas réussi à renverser cette preuve prépondérante tout comme il n’a pas prouvé l’existence de règles claires et connues entourant l’utilisation des périodes de pauses ou de récréations.

[466]      Autrement, le procureur syndical rappelle qu’une application souple de certaines conditions de travail ne peut être invoquée comme moyen de compenser la non-application d’une disposition d’ordre public comme l’article 57 de la Loi sur les normes du travail.

[467]      Enfin, quant à l’argument présenté par l’Employeur sur l’estoppel, le procureur soutient que la soussignée a déjà tranchée la question dans sa sentence préliminaire rendue le 7 avril 2010. Cette dernière ayant l’autorité de la chose jugée, il n’y a pas lieu d’y revenir.

[468]      Il en est de même de sa compétence pour appliquer l'article 57 de Loi sur les normes du travail qu’elle a reconnu. D'ailleurs, soutient-il, la jurisprudence postérieure à sa sentence lui a donné raison. À cet égard, il réfère à l’arrêt Syndicat de la fonction publique du Québec c . Québec (Procureur général) [17] .

 

L’objection au dépôt en preuve de deux conventions locales

[469]      Le Syndicat soumet qu’il désire démontrer par le biais de ces conventions locales, qu’il est possible de prendre en compte le temps de récréation dans l’établissement de l’horaire de travail. Ainsi, le dépôt devrait être permis.


 

La partie patronale

 

L’objection au dépôt en preuve de deux conventions locales

[470]      La procureure patronale prétend que le Syndicat ne peut déposer deux conventions locales intervenues postérieurement entre des parties différentes de celles visées par le présent litige. Ces conventions locales constituant dans les circonstances une preuve extrinsèque inadmissible.

 

Le fond

[471]      D’entrée de jeu, la procureure patronale souligne qu’il y a une certaine incongruité entre la réclamation formulée au grief et celle défendue en plaidoirie. Le Syndicat référait alors au temps compris entre deux périodes de tâche éducative et maintenant il réclame le temps de pause ou de récréation entre deux périodes assignées.

[472]      Le Syndicat a également soutenu dans son grief, que les directions d’école et des centres de la Commission assignent une semaine de travail dont la durée est supérieure à celle prévue à l’article 8-5.02 de la convention collective nationale. Or, la preuve démontre que l’Employeur a respecté ces balises qui comportent par ailleurs plusieurs variables et annualisées. De surcroit, le Syndicat prétend que les enseignants auraient travaillé en temps supplémentaire alors que cette notion n’existe pas dans la convention collective. En somme, tous les enseignants ont reçu la rémunération annuelle prévue à la convention collective nationale.

[473]      La procureure patronale souligne qu’en dehors du temps de présence obligatoire déterminé entre les parties et ce conformément aux conventions collectives, les enseignants sont libres de déterminer l’organisation de leur travail tout comme ils sont libres de faire ce qu’ils veulent pendant les pauses ou récréations non assignées.

[474]      Ainsi, tout en s ’appuyant sur la jurisprudence en cette matière, la procureure soutient que la période de récréation des élèves ne peut être comptabilisée dans la tâche de l'enseignant à titre de temps de présence assignée par la direction à moins qu’il y soit spécifiquement assigné. Il en est d’ailleurs ainsi, soutient-elle, depuis 1998.

[475]      Considérant cela, les enseignants ne peuvent réclamer une rémunération pour des tâches effectuées quotidiennement autres que celles préalablement déterminées, assignées ou autorisées par l’Employeur, selon la convention. Ainsi, ajoute le procureur, tout dépassement de tâche qui n’a pas été autorisé doit être considéré comme étant effectué sur une base volontaire, sans rémunération additionnelle.

[476]      Il a été également démontré que ni la Commission et ni les directions d’école n’ont émis de directives quant à l’utilisation du temps des pauses ou des récréations non assignées. Tout comme dans ces moments, la Commission et les directions n’avaient aucune exigence particulière à l’égard des enseignants. Ainsi, toute réclamation pour du travail fait durant ces périodes de temps non assignées doit être considérée comme des initiatives.

[477]      La preuve a par ailleurs confirmé que les enseignants jouissent d’une grande autonomie professionnelle leur permettant de gérer avec souplesse leur quotidien permettant ainsi d'intervertir des périodes assignées en périodes libres selon les besoins ponctuels des enseignants ou de la direction, notamment lors de la période de récréation des élèves.

[478]      Aussi, la procureure patronale suggère que toutes interventions ou démarches effectuées par les enseignants dans le cadre de l’application d’un plan stratégique ou d’un projet éducatif ou de politiques de la Commission ou des directions d’écoles sont annualisées et comptabilisées dans la tâche complémentaire de l'enseignant. Par conséquent, ces interventions ne peuvent pas être comptabilisées à nouveau comme des heures travaillées parce qu’elles ont été exercées  pendant une période de récréation. En somme, le temps de récréation des élèves situé entre deux périodes assignées en tâche éducative ou complémentaire ou en temps de nature personnelle, ne saurait constituer du temps de présence assigné parce que :

-        La Commission scolaire et la direction de l’école n’ont pas assigné un enseignant pendant le temps de récréation des élèves autrement que lorsqu’ils exigent de cet enseignant de surveiller ce temps de récréation ou parce que du temps assigné et reconnu a été autrement computé dans la tâche de l’enseignant.

-        Les travaux identifiés par les enseignants ne constituent pas exclusivement des tâches pouvant relever de la tâche complémentaire (temps de présence assigné), mais souvent de la tâche éducative (ex. : information ou explications additionnelles à des élèves de la classe).

-        Le critère de l’existence de périodes assignées en tâche éducative avant et après un temps de récréation en cause n’apparait aucunement d’une norme contenue dans les ententes nationales applicables.

-        Le Syndicat réclame que la totalité du temps de récréation d’élèves soit computée en temps de présence assigné (tâche complémentaire) alors qu’aucun des enseignants (sous réserve de M. Scuzdi) ayant témoigné n’a prétendu faire du travail pendant 100 % de ces temps de récréation.

 

[479]      La procureure patronale prétend également que puisque la rémunération n’est pas versée selon le travail effectué quotidiennement, les enseignants ne peuvent réclamer une rémunération pour des tâches autres que celles préalablement déterminées, assignées ou autrement assignées par l’Employeur. Ainsi, tout dépassement de tâche d’un enseignant qui n’a pas été autorisé sera considéré comme étant effectué sur une base volontaire ou bénévole et par conséquent, ne saurait faire l’objet d’une rémunération additionnelle.

[480]      Tout en réitérant les grandes balises d’application de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail, la procureure patronale prétend essentiellement que le paragraphe 1 de l’article 57 ne peut être intégré à la convention collective nationale car cette intégration ajouterait aux dispositions de la convention reconnaissant la discrétion de l’Employeur de déterminer le temps de présence assigné à l’école de l’enseignant en tâche éducative et en tâche complémentaire. Elle rappelle qu’en l’absence d’assignation, l’enseignant ne peut prétendre être en temps de travail à comptabiliser dans la tâche de l’enseignant. Tout comme les parties ont convenu du traitement annuel exigible en contrepartie de la tâche déterminée selon cette même convention. Autrement dit, accueillir le grief équivaudrait comme l’a décidé la Cour suprême, à modifier la convention collective et à y inclure des modalités incompatibles avec les règles de détermination de la tâche de l’enseignant.

[481]      Enfin, la procureure patronale rappelle que le régime de rémunération de l’éducation forme un tout indépendant du minimum prévu à la Loi sur les normes du travail.

 

5.         ANALYSE ET DÉCISION

I.          Objection à la recevabilité d’une preuve extrinsèque

[481]      Le procureur syndical a déposé deux ententes locales postérieures au grief et conclues par des tierces commissions scolaires. Il souhaitait ainsi démontré que des parties œuvrant dans le milieu de l’éducation ont par le biais de leur entente locale résolu le temps des récréations. La procureure patronale s’est objectée au dépôt de ces ententes locales et le tout a été pris sous réserve.

[482]      Il est bien établi que l’utilisation d’une preuve extrinsèque comme moyen d’interprétation n’est possible qu’en présence d’une clause ambiguë d’une convention collective [18] . Les auteurs Blouin et Morin [19] rappellent cet objectif :

« V11.30 — L'objectif de la preuve extrinsèque n'est pas de démontrer l'existence de faits litigieux, mais d'établir des faits qui servent à interpréter le droit et en l'occurrence, la disposition conventionnelle dont s'autorise un grief. Cette preuve particulière sert à des fins ultimes d'interprétation. Une partie ne peut cependant introduire une telle preuve que si elle convainc au préalable l'arbitre qu'il est en présence d’une clause ambiguë, c'est-à-dire qui justifierait une intervention interprétative : interpretatio cessat in claris. Lorsque cette condition d'accès à la preuve extrinsèque est satisfaite, il est alors possible pour une partie de tenter de s'en rapporter à des faits extrinsèques et dont les plus connus sont relatifs à l'historique de la convention collective, à la pratique des parties à l'égard d'une clause de la convention collective, aux représentations d'une des parties quant à l'application d'une modalité de la convention collective, et autres. Il existe par ailleurs des conditions de recevabilité de ces faits extrinsèques. Ainsi, un fait extrinsèque ne serait admissible en preuve s'il ne porte pas sur la convention collective telle que finalement conclue et s'il ne respecte pas certaines autres conditions qui se différencient selon qu'il s'agisse d'une preuve documentaire ou non. »

[483]      Également, il est admis que seule la documentation émanant des parties en cause peut servir de moyen d’interprétation de leur convention collective. Ainsi, mon collègue Jean M. Morency dans la décision Collège François-Xavier Garneau [20] conclut que la documentation faite par des tiers ne rencontre pas l’une des conditions d’admissibilité de la preuve extrinsèque, à savoir qu’elle doit émaner des parties en cause :

« Toutefois, en regard des conditions de, recevabilité de la preuve extrinsèque, encore faut-il aussi que ces documents (1) reproduisent un texte final adopté et (2) qu'ils émanent des deux parties en cause. S'il ne semble pas faire de doute que les documents déposés comme pièces P-2 et P-3 en l'espèce sont des extraits de textes adoptés et finaux, il apparaît par ailleurs moins certain que les deux répondent également à la seconde condition.

En effet, la pièce P-2 contient des extraits de conventions collectives qui lient les mêmes parties en cause dans le présent grief (Personnel de soutien CECI et Collèges) alors que la pièce P-3 réfère le tribunal à des extraits de conventions qui régissent les syndicats affiliés à la CSN représentant le personnel de soutien dans d'autres collèges.

La pièce P-3 ne représente donc pas l'expression commune des parties en cause dans le présent grief et ne rencontre pas ainsi l'une des conditions d'admissibilité d'une preuve extrinsèque généralement exigée en vue de permettre l'introduction en preuve de documents susceptibles d'éclairer le tribunal sur le sens et la portée à donner aux dispositions en litige.

Il va de soi qu'une clause tirée d'une autre entente ne peut lier une personne qui n'est pas partie prenante à celle-ci. Il s'ensuit qu'une clause tirée d'une telle entente, même identique à celle que l'on analyse, peut difficilement et de façon fiable nous dévoiler par elle-même le sens et la portée d'une pareille clause recherché par cette personne dans une entente distincte. » [21]

 

[484]      En l’espèce, j’estime que les deux conventions locales ne sont pas admissibles en preuve puisque le litige ne soulève pas l’interprétation d’une clause ambigüe ni de la convention collective nationale ou locale. Le litige relève essentiellement une difficulté d’application ou de conciliation entre d’une part, une disposition d’ordre public (article 57 de la Loi sur les normes du travail) et d’autre part, l’organisation du travail des enseignants dans les écoles et auxquelles s’ajoute l’encadrement de la tâche des enseignants et défini dans la convention collective nationale et la convention locale en vigueur en 2004-2005. En somme, avec égards, je ne crois pas que des ententes locales convenues de surcroit par des tierces parties puissent constituer une preuve extrinsèque admissible dans les circonstances, propre à la présente affaire. Au plus, ces ententes pourraient servir de comparables dans le cadre du renouvellement des conventions collectives mais tel n’est pas le différend dont je suis saisi. L’objection est donc bien fondée et lesdites conventions collectives sont retirées du dossier.

 

II.         Le grief

[485]      Par le biais du grief et de ses représentations à l’audition, le Syndicat soutient essentiellement qu’en vertu de l’article 57 (1) de la Loi sur les normes du travail, les enseignants sont réputés être au travail durant les pauses ou les récréations non assignées et comprises entre deux périodes de travail assignées par l’Employeur et qu’ils doivent donc être rémunérés pour ce travail effectué.

[486]      De son côté, l’Employeur, avec l’appui du ministère de l’Éducation, prétend que l’organisation du travail, l’encadrement de la tâche des enseignants, la répartition du temps travaillé et la rémunération qui en découle constituent un tout, et ce tout s’oppose aux prétentions défendues par le Syndicat. À toutes fins utiles, l’Employeur argue que l’interprétation de l’article 57 de la Loi sur les normes défendue par le Syndicat est incompatible avec les conditions de travail des enseignants.

[487]      Les deux parties conviennent que l’appréciation du litige doit se faire en tenant compte de certaines particularités propres au secteur de l’Éducation. Ainsi, avant d’entamer l’analyse des faits soumis en preuve et des questions en litige, nous allons résumer les composantes pertinentes du cadre dans lequel les enseignants travaillent et l’état de la jurisprudence soumise par les parties en la matière .

 

L’enseignant (son rôle, ses droits et obligations)

La Loi sur l’instruction publique

[488]      La Loi sur l’instruction publique encadre certains droits et obligations de l’enseignant, notamment, il y est prévu :

«  SECTION I

DROITS DE L’ENSEIGNANT

19. Dans le cadre du projet éducatif de l’école et des dispositions de la présente loi, l’enseignant a le droit de diriger la conduite de chaque groupe d’élèves qui lui est confié.

L’enseignant a notamment le droit :

1. de prendre les modalités d’intervention pédagogique qui correspondent aux besoins et aux objectifs fixés pour chaque groupe ou pour chaque élève qui lui est confié ;

2. de choisir les instruments d’évaluation des élèves qui lui sont confiés afin de mesurer et d’évaluer constamment et périodiquement les besoins et l’atteinte des objectifs par rapport à chacun des élèves qui lui sont confiés en se basant sur les progrès réalisés.

[…]

 

SECTION II

OBLIGATIONS DE L’ENSEIGNANT

22. Il est du devoir de l’enseignant :

1. de contribuer à la formation intellectuelle et au développement intégral de la personnalité de chaque élève qui lui est confié ;

2. de collaborer à développer chez chaque élève qui lui est confié le goût d’apprendre ;

3. de prendre les moyens appropriés pour aider à développer chez ses élèves le respect des droits de la personne ;

4. d’agir d’une manière juste et impartiale dans ses relations avec ses élèves ;

5. de prendre des mesures nécessaires pour promouvoir la qualité de la langue écrite et parlée ;

6. de prendre des mesures appropriées qui lui permettent d’atteindre et de conserver un haut degré de compétence professionnelle ;

6.1 de collaborer à la formation des futurs enseignants et à l’accompagnement des enseignants en début de carrière ;

[…] »

 

[489]      Autrement, comme nous le verrons dans l’analyse détaillée, il sera question de projet éducatif et de plan de réussite. À ce sujet, la Loi sur l’instruction publique précise :

«  CHAPITER III

ÉCOLE

SECTION I

CONSTITUTION

36. L’école est un établissement d’enseignement destiné à dispenser aux personnes visées à l’article 1 les services éducatifs prévus à la présente loi et le régime pédagogique établi par le gouvernement en vertu de l’article 447 et à collaborer au développement social et culturel de la communauté. Elle doit, notamment, faciliter le cheminement spirituel de l’élève afin de favoriser son épanouissement.

Elle a pour mission, dans le respect du principe de l’égalité des chances, d’instruire, de socialiser et de qualifier les élèves, tout en les rendant aptes à entreprendre et à réussir un parcours scolaire.

Elle réalise cette mission dans le cadre du projet éducatif mis en œuvre par un plan de réussite.

36.1 Le projet éducatif est élaboré, réalisé et évalué périodiquement avec la participation des élèves, des parents, du directeur de l’école, des enseignants, des autres membres du personnel de l’école, des représentants de la communauté et de la commission scolaire.

37. Le projet éducatif de l’école contient les orientations propres à l’école et les objectifs pour améliorer la réussite des élèves. Il peut inclure des actions pour valoriser ces orientations et les intégrer dans la vie de l’école.

Ces orientations et ces objectifs visent l’application, l’adaptation et l’enrichissement du cadre national défini et des membres du personnel de l’école.

37.1 Le plan de réussite de l’école est établi en tenant compte du projet éducatif notamment les modalités relatives à l’encadrement des élèves ;

1. les moyens à prendre en fonction des orientations et des objectifs du projet éducatif notamment les modalités relatives à l’encadrement des élèves ;

2. les modes d’évaluation de la réalisation du plan de réussite.

Le plan de réussite est révisé annuellement et, le cas échéant, il est actualisé. »

 

La convention collective nationale et la convention locale

[490]      La tâche de l’enseignant et son aménagement sont définis à la convention collective nationale. Les parties rappellent que les conditions d’exercice de la profession doivent favoriser l’atteinte des objectifs éducatifs et qu’à cette fin, l’enseignant bénéficie d’une certaine autonomie [22]  :

«  8-1.01 Les conditions d’exercice de la profession d’enseignante ou d’enseignant doivent être telles que l’élève puisse bénéficier de la qualité d’éducation à laquelle elle ou il est en droit de s’attendre et que la commission et les enseignantes et enseignants ont l’obligation de lui donner.

[…]

8-1.05 Il revient à l’enseignante ou l’enseignant de choisir la démarche appropriée pour la préparation et la présentation de ses cours dans les limites des programmes autorisés.

[…] »

 

[491]      La fonction générale de tout enseignant consiste à :

«  8-2.00 Fonction générale

8-2.01 L'enseignante ou l'enseignant dispense des activités d'apprentissage et de formation aux élèves et elle ou il participe au développement de la vie étudiante de l'école.

Dans ce cadre, les attributions caractéristiques de l'enseignante ou l'enseignant sont :

1)          de préparer et de dispenser des cours dans les limites des programmes autorisés;

2)          de collaborer avec les autres enseignantes ou enseignants et les professionnelles ou professionnels de l'école en vue de prendre les mesures appropriées pour servir les besoins individuels de l'élève;

3)          d'organiser et de superviser des activités étudiantes;

4)          d'organiser et de superviser des stages en milieu de travail ;

5)          d'assumer les responsabilités d'encadrement auprès d'un groupe d'élèves;

6)          d'évaluer le rendement et le progrès des élèves qui lui sont confiés et d'en faire rapport à la direction de l'école et aux parents selon le système en vigueur; ce système est un objet soumis à l'organisme de participation des enseignantes et des enseignants déterminé dans le cadre du chapitre 4-0.00;

7)          de surveiller les élèves qui lui sont confiés ainsi que les autres élèves lorsqu'elles ou ils sont en sa présence;

8)          de contrôler les retards et les absences de ses élèves et d'en faire rapport à la direction de l'école selon le système en vigueur; ce système est un objet soumis à l'organisme de participation des enseignantes et enseignants déterminé dans le cadre du chapitre 4-0.00;

9)          de participer aux réunions en relation avec son travail;

10)       de s'acquitter d'autres fonctions qui peuvent normalement être attribuées à du personnel enseignant. »

 

[492]      Notons, par ailleurs, ces extraits de l’arrêt Ross [23] rendu par la Cour suprême et dans lequel ladite Cour souligne l’étendue des obligations inhérentes à la fonction de l’enseignant et l’importance du rôle qu’il occupe dans la société :

« [43]  Les enseignants sont inextricablement liés à l'intégrité du système scolaire. En raison de la position de confiance qu'ils occupent, ils exercent une influence considérable sur leurs élèves. Le comportement d'un enseignant influe directement sur la perception qu'a la collectivité de sa capacité d'occuper une telle position de confiance et d'influence, ainsi que sur la confiance des citoyens dans le système scolaire public en général.  Dans l'article « Freedom of Expression and Public School Teachers » (1995), 4 Dal. J. Leg. Stud.  35, Allison Reyes examine, à la p. 42, l'importance des enseignants dans le processus éducatif et leur impact sur le système:

[ traduction ]  Les enseignants représentent une partie importante du programme d'études officieux à cause de leur situation d'« intermédiaires. » Dans une très large mesure, la communication des « messages » prescrits (valeurs, croyances, connaissances) dépend des aptitudes de « l'intermédiaire » (l'enseignant).

[44] Le comportement de l'intermédiaire qu'est l'enseignant doit traduire son adhésion à ces valeurs, croyances et connaissances que le système scolaire cherche à communiquer. Son comportement est évalué en fonction de la position même qu'il occupe, et non en fonction de la question de savoir si le comportement en cause a été adopté en classe ou ailleurs. L'enseignant est perçu dans la collectivité comme l'intermédiaire par lequel passe le message éducatif, et en raison de la position qu'il y occupe, il n'est pas en mesure de [ traduction ] « choisir le chapeau qu'il portera et dans quelle occasion » (voir  Re Cromer and British Columbia Teachers' Federation (1986), 29 D.L.R. (4th) 641 (C.A.C.-B.), à la p. 660); ce chapeau d'enseignant, il ne l'enlève donc pas nécessairement à la sortie de l'école et, pour certains, il continue à le porter même après les heures de travail.  C'est ce que Reyes affirme, loc. cit. , à la p. 37:

[ traduction ]  L'intégrité du système d'éducation dépend aussi en grande mesure de la perception de l'intégrité des enseignants. C'est dans cette mesure que l'expression à l'extérieur de la classe devient pertinente. Bien que les activités des enseignants à l'extérieur de la classe ne semblent pas influer directement sur leur capacité d'enseigner, elles peuvent entrer en conflit avec les valeurs perpétuées par le système d'éducation. [En italique dans l'original.]

Le passage suivant de l'arrêt de la Cour d'appel de Colombie-Britannique Abbotsford School District 34 Board of School Trustees c. Shewan (1987), 21 B.C.L.R. (2d) 93, à la p. 97, m'apparaît tout aussi pertinent à cet égard:

[ traduction ]  La raison pour laquelle le comportement en dehors des heures de travail peut équivaloir à de l'inconduite est le fait que l'enseignant occupe une position de confiance et de responsabilité. Si celui-ci agit de manière déplacée, au travail ou après le travail, il peut en résulter une perte de confiance du public à son égard et à l'égard du système scolaire public, une perte de respect de la part des élèves envers lui et envers les autres enseignants en général, en plus de susciter à l'intérieur de l'école et de la collectivité une controverse qui perturbe le fonctionnement du système d'éducation.

[45] C'est en raison de cette position de confiance et d'influence que nous exigeons de l'enseignant qu'il se conforme à des normes élevées au travail comme à l'extérieur du travail, et c'est l'érosion de ces normes qui est susceptible d'entraîner, dans la collectivité, une perte de confiance dans le système scolaire public. Loin de moi l'idée de vouloir ainsi soumettre la vie entière des enseignants à un contrôle démesuré dicté par des normes morales plus strictes. Cela risquerait d'entraîner une violation importante des droits à la protection de la vie privée et des libertés fondamentales des enseignants. Toutefois, lorsque l'« empoisonnement » d'un milieu scolaire est imputable au comportement d'un enseignant après ses heures de travail, et qu'il est susceptible d'entraîner une perte correspondante de confiance dans l'enseignant et dans l'ensemble du système, ce comportement après le travail devient alors pertinent. »

 

L’aménagement de la tâche de l’enseignant

[493]      L’aménagement de la tâche de l’enseignant se fait à l’intérieur de certaines balises. Il comprend dans un premier temps, un nombre annuel de jours de travail et la distribution de ces jours à l’intérieur d’un calendrier scolaire est établie à l’échelle locale : [24]

« 8-4.01 L’année de travail des enseignantes ou enseignants comporte deux cents (200) jours de travail et, à moins d’une entente différente entre la commission et le syndicat, ils sont distribués du 1 er septembre au 30 juin suivant. »

 

[494]      En l’espèce, il est prévu à la convention locale :

«  8-4.02.00 DISTRIBUTION DANS LE CALENDRIER CIVIL DES JOURS DE TRAVAIL, À L’INTÉRIEUR DE L’ANNÉE DE TRAVAIL À L’EXCLUSION DE LA DÉTERMINATION DE JOURS DE TRAVAIL ET DE LA PÉRIODE COUVERTE PAR L’ANNÉE DE TRAVAIL

8-4.02.01 Les parties, à moins d’entente contraire, reconnaissent dans l’établissement du calendrier scolaire les congés fériés et chômés suivants :

[…] [25]

8.4.02.02 La Commission établit le calendrier scolaire conformément avec les principes suivants et les clauses 8-4.02.02 et 8-4.02.03 :

A) Pas plus de cinq (5) jours consécutifs précédant immédiatement le 1 er  septembre ;

B) deux (2) semaines de congé pour la période des fêtes de Noël et du Jour de l’An ;

C) une (1) semaine de vacances d’été reportée en hiver à la fin du mois de février ou au début du mois de mars dont la majorité des jours se situe au mois de mars ;

D) la protection des droits parentaux des enseignantes et enseignants dans le report de la semaine de vacances d’été (maximum cinq (5) jours) à la fin de février ou au début du mois de mars ;

E) dans le cas d’entrée progressive des élèves au début de l’année scolaire au préscolaire, en 1 er année du primaire et pour certains groupes d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, l’ensemble des jours ou parties de jours consacrés à cette entrée progressive sont considérés comme des jours en présence d’élèves.

8-4.02.03 La Commission soumet à l’organisme de participation prévue à l’article 4-2.00, un projet de distribution des jours de travail (jours de classe et journées pédagogiques) avant le 1 er mars de chaque année scolaire.

[…] »

 

[495]      En 2004-2005, la tâche de l’enseignant s’articule également sur une base hebdomadaire. La semaine régulière de travail est de 35 heures et s’étale du lundi au vendredi et comporte 30 heures de travail à l’école à moins d’entente contraire entre la Commission ou la direction de l’école et l’enseignant. La tâche de l’enseignant doit s’exécuter à l’intérieur d’une amplitude quotidienne de 8 heures à moins d’entente contraire. Et, parmi les trente heures, 27 heures sont assignées par la commission ou la direction de l’école et la balance (trois heures) est du temps de travail de nature personnelle :

«  8-5.01 La semaine régulière de travail est de cinq (5) jours, du lundi au vendredi et comporte trente (30) [26] heures de travail à l’école. Cependant, la commission ou la direction de l’école peut, en ce qui concerne les vingt-sept (27) heures de travail prévues au sous-paragraphe 1) du paragraphe A) de la clause 8-5.02, assigner l’enseignante ou l’enseignant à un lieu de travail autre que l’école. De plus, sur demande de l’enseignante ou l’enseignant, la commission ou la direction de l’école peut, en ce qui concerne les trois (3) [27] heures prévues au sous-paragraphe 2) du paragraphe A) de la clause 8-5.02, assigner une enseignante ou un enseignant à un lieu de travail autre que l’école.

8-5.02

A)     Les heures de la semaine régulière de travail comprennent :

1)     vingt-sept (27) heures de travail au lieu assigné pour chaque enseignante ou enseignant par la commission ou la direction de l’école;

2)    - trois (3) heures pour l’accomplissement de travail de nature personnelle visé à la fonction générale énoncée à la clause 8-2.01;

-       Le temps requis pour les dix (10) rencontres collectives et pour les trois (3) premières réunions avec les parents; dans le cas où ce temps cause le dépassement de la semaine régulière de travail, le paragraphe E) de la présente clause s’applique.

Aux fins du calcul des heures consacrées à l’accomplissement du travail de nature personnelle, le temps requis pour les dix (10) rencontres collectives et pour les trois (3) premières réunions avec les parents est considéré comme du travail de nature personnelle.

 

B)     Les vingt-sept (27) heures de travail prévues au sous-paragraphe 1) du paragraphe A) ne comprennent ni le temps requis pour les dix (10) premières rencontres collectives ni le temps requis pour les trois (3) premières réunions avec les parents.

C)     À moins d’entente différente avec la commission et le syndicat, ces vingt-sept (27) heures sont accomplies aux moments déterminés pour chaque enseignante ou enseignant par la commission ou la direction de l’école.

D)     Ces vingt-sept (27) heures peuvent être déplacées selon les modalités suivantes :

1)     s’il s’agit d’un changement à caractère occasionnel, le préavis doit être suffisant pour permettre à l’enseignante ou l’enseignant d’être présent au moment voulu;

2)     s’il s’agit d’un changement à caractère permanent, l’enseignante ou l’enseignant doit avoir été consulté et, à défaut d’entente sur le moment du changement, le préavis doit être d’au moins cinq (5) jours.

E)     S’il y a dépassement de la semaine régulière de travail en raison de la tenue des dix (10) rencontres collectives ou des trois (3) premières réunions avec les parents, ce dépassement est compensé par une réduction équivalente, pour d’autres semaines ou d’autres journées, du temps prévu pour l’accomplissement du travail de nature personnelle visé au sous-paragraphe 2) du paragraphe A). Il revient à l’enseignante ou l’enseignant de déterminer les moments de cette réduction de la façon prévue au sous-paragraphe 2) du paragraphe F), comme s’il s’agissait d’un changement à caractère occasionnel.

F)     1) Il revient à l’enseignante ou l’enseignant de déterminer quel travail elle ou il accomplit au cours des heures prévues au sous-paragraphe 2) du paragraphe A), parmi celui de nature personnelle visé à la fonction générale énoncée à la clause 8-2.01 ainsi que les moments pour l’accomplissement de ce travail, parmi les moments non déjà déterminés par la commission ou la direction de l’école, pour les vingt-sept (27) heures de travail, pour les dix (10) rencontres collectives et les trois (3) premières réunions avec les parents.

 

3)     Les modalités suivantes s’appliquent relativement à la détermination des moments prévus pour l’accomplissement du travail de nature personnelle visé au sous-paragraphe 2) du paragraphe A), ces modalités pouvant faire l’objet d’une entente différente entre la commission et le syndicat :

i)               l’enseignante ou l’enseignant informe la direction de l’école de la détermination des moments appropriés pour l’accomplissement du travail de nature personnelle dans les meilleurs délais au début de l’année de travail;

ii)              par la suite, cette détermination doit être modifiée par l’enseignante ou l’enseignant pour tenir compte de toute détermination pouvant être faite par la direction de l’école quant aux moments d’accomplissement des vingt-sept (27) heures de travail et aux moments pour la tenue des dix (10) rencontres collectives et des trois (3) premières réunions avec les parents;

iii)             dans le cas où l’enseignante ou l’enseignant désire apporter, en cours d’année, un changement à caractère occasionnel ou permanent à la détermination des moments prévus pour l’accomplissement du travail de nature personnelle visé au sous-paragraphe 2) du paragraphe A), elle ou il procède ainsi :

s’il s’agit d’un changement à caractère occasionnel, elle ou il doit transmettre à la direction de l’école un préavis d’au moins vingt-quatre (24) heures;

s’il s’agit d’un changement à caractère permanent, elle ou il doit transmettre à la direction de l’école un préavis d’au moins cinq (5) jours;

le préavis doit indiquer le motif du changement.

 

4)     Le travail de nature personnelle visé au sous-paragraphe 2) du paragraphe A) est accompli dans l’amplitude quotidienne de huit (8) heures.

Malgré l’alinéa précédent et les clauses 8-5.03 et 8-5.04, après entente entre l’enseignante ou l’enseignant et la direction de l’école, ce travail de nature personnelle peut être accompli en dehors de l’horaire hebdomadaire de trente-cinq (35) heures ou de l’amplitude quotidienne de huit (8) heures.

Ce travail de nature personnelle peut également, si l’enseignante ou l’enseignant le détermine, être accompli en dehors de l’horaire hebdomadaire de trente-cinq (35) heures, aux conditions suivantes :

i)               un maximum de deux (2) heures et trente (30) minutes [28] par semaine peuvent ainsi être déterminées en dehors de l’horaire hebdomadaire de trente-cinq (35) heures ou de l’amplitude quotidienne de huit (8) heures;

ii)              ce travail se situe pendant la période de trente (30) minutes précédant immédiatement le début ou suivant immédiatement la fin de l’amplitude quotidienne de huit (8) heures, ou pendant toute partie de la période de repas prévue à la clause 8-7.05 excédant cinquante (50) minutes;

iii)             les moments pour l’accomplissement de ce travail ainsi déterminés pendant cette période de repas ne peuvent excéder soixante-quinze (75) minutes [29] par semaine.

 

8-5.03

A)     À moins d’entente différente entre la commission et le syndicat et sous réserve du paragraphe B) les trente (30) heures de la semaine régulière de travail se situent dans un horaire hebdomadaire de trente-cinq (35) heures, lequel est déterminé pour chaque enseignante ou enseignant par la commission ou la direction de l’école.

B)    Cet horaire de trente-cinq (35) heures ne comprend ni la période prévue pour les repas ni le temps requis pour les dix (10) rencontres collectives et pour les trois (3) premières réunions avec les parents.

C)    Cet horaire de trente-cinq (35) heures doit se situer dans une amplitude quotidienne n’excédant pas huit (8) heures, ces huit (8) heures comportant les mêmes exclusions que les trente-cinq (35) heures.

8-5.04

La commission, après consultation du syndicat, détermine le début et la fin de la journée de travail de l’enseignante ou l’enseignant.

8-5.06

Dans le cas où l’organisation de l’enseignement est sur un cycle différent d’un cycle de cinq (5) jours, les nombres d’heures mentionnés au présent article sont ajustés proportionnellement. »

 

[496]      La détermination de modalités de distribution des heures de travail relève des ententes locales et en l’espèce, les parties ont convenu :

«  8-5.05.01 La distribution des heures de travail se fait après consultation de chaque enseignante et enseignant ou groupe d’enseignantes et enseignants. »

 

[497]      Dans l’aménagement de la tâche, les parties doivent également tenir compte de certaines contraintes reliées à la tâche éducative. Plus spécifiquement en ce qui a trait à la tâche éducative, la convention nationale détaille les activités et interventions qui s’y rattachent ainsi que le temps moyen qui doit être réservé à cette fin [30] :

 

« 8-6.00 TÂCHE ÉDUCATIVE

8-6.01

Aux fins du présent chapitre, on entend par :

 

a) Encadrement

Intervention auprès d'un élève ou d'un groupe d'élèves visant le développement personnel et social de l'élève et l'invitant à assumer ses responsabilités relativement à sa propre formation.

 

b) Récupération

Intervention de l’enseignante ou de l’enseignant auprès d’un élève ou d’un groupe d’élèves visant à prévenir des difficultés ou des retards pédagogiques et à offrir un soutien particulier aux élèves aux prises avec des difficultés ou des retards pédagogiques.

 

c) Surveillance de l'accueil

Surveillance assurée par l'enseignante ou l'enseignant responsable du groupe d'élèves pendant l'entrée et pendant la sortie des classes. Cette surveillance ne fait pas partie de la tâche éducative. 

 

8-6.02

A) La tâche éducative comprend les activités professionnelles suivantes expressément confiées par la commission ou la direction de l'école : présentation de cours et leçons, récupération, activités de formation et d'éveil (préscolaire), activités étudiantes, encadrement et surveillances autres que les surveillances de l'accueil et des déplacements.

 

B) La tâche éducative est de 23 heures par semaine pour l'enseignante ou l'enseignant à temps plein du préscolaire et du niveau primaire et de 20 heures par semaine pour l'enseignante ou l'enseignant à temps plein du niveau secondaire.

 

C) Si, pour des raisons particulières, la commission assigne à une enseignante ou un enseignant une tâche éducative d’une durée supérieure à celle prévue au paragraphe B), elle ou il a droit à une compensation monétaire égale à 1/1000 du traitement annuel pour chaque période de 45 à 60 minutes. Pour toute période inférieure à 45 minutes ou supérieure à 60 minutes, la compensation est égale au nombre de minutes divisé par 45 et multiplié par 1/1000 du traitement annuel.

 

D) Afin de mieux répondre aux besoins des élèves et pour tenir compte du projet éducatif et des caractéristiques particulières des écoles ou des classes, la tâche éducative peut varier en durée pendant certaines semaines pourvu que la moyenne hebdomadaire n’excède pas, sur une base annuelle, 23 ou 20 heures, suivant le cas.

 

Toutefois, la variation de la tâche éducative ne peut être causée par une variation au niveau du temps consacré à la présentation de cours et leçons que lorsque l’organisation de l’école ou de l’enseignement l’exige.

 

L’application du présent paragraphe n’a pas pour effet de permettre le dépassement de la semaine régulière de travail prévue à la clause 8-5.02.

8-6.03

A) À moins d'entente différente entre la commission et le syndicat, le temps moyen à consacrer à la présentation de cours et leçons, ainsi qu'aux activités étudiantes à l'horaire des élèves n'excède pas :

1)     pour l'ensemble des enseignantes ou enseignants à temps plein du niveau primaire, 20 heures et 30 minutes;

2)     pour l'ensemble des enseignantes ou enseignants à temps plein du niveau secondaire, 17 heures et 5 minutes.

 

B) Ce temps moyen s’établit au 15 octobre en divisant la somme du nombre des heures consacrées à ces activités pour chacune des enseignantes ou chacun des enseignants à temps plein du niveau concerné par le nombre total d’enseignantes ou d’enseignants à temps plein de ce niveau; si le temps moyen d’enseignement prévu au paragraphe A) qui précède, la commission verse au budget de perfectionnement de l’année scolaire suivante une compensation établie de la façon suivante :

la différence entre le temps moyen observé et le temps moyen prévu, divisée par le temps moyen prévu, multipliée par le nombre d’enseignantes ou d’enseignants à temps plein du niveau, multipliée par le traitement moyen de ces enseignantes ou enseignants, divisée par deux cents (200) et multipliée par le nombre de jours pendant lesquels le dépassement existe.

C) […]

D) À moins d’entente différente entre la commission et le syndicat, au moins cinquante (50) pour cent de la tâche éducative doit être consacré à la présentation de cours et leçons et aux activités étudiantes à l’horaire de l’élève.

8-6.04 Dans le cas où l’organisation de l’enseignement est sur un cycle différent qu’un cycle de cinq (5) jours, les nombres d’heures mentionnés au présent article sont ajustés proportionnellement. »

 

[498]      Enfin, la surveillance de l’accueil et des déplacements non compris dans la tâche éducative relève des ententes locales et en l’espèce, les parties ont convenu :

«  8-6.05.01 Le temps requis pour la surveillance de l’accueil et des déplacements est comptabilisé à l’intérieur de la semaine régulière de travail. »

 

[499]      Par ailleurs, le présent litige concerne spécifiquement les temps de récréations ou de pauses fixés à l’horaire des établissements scolaires et au cours desquels les enseignants ne sont pas assignés à une tâche spécifique et qui se situent entre deux périodes assignées par l’Employeur. Or, tant la convention nationale que locale sont silencieuses sur cette notion. En 1984, l’arbitre Harvey Frumkin a décidé que ces périodes de temps ne pouvaient être comptabilisées dans le temps de présence à l’école puisque l’enseignant n’était pas tenu d’être présent à l’école :

« De l’avis du tribunal, les espaces de temps durant lesquels l’enseignant n’est pas tenu d’être présent sont ceux durant lesquels il n’a pas été spécifiquement affecté à une tâche ou ceux durant lesquels sa présence n’était pas expressément requise. Certes, il peut s’avérer peu pratique pour l’enseignant de quitter l’école au cours de ces périodes de temps; il peut alors décider d’utiliser ce temps pour s’acquitter des tâches de nature générale envisagées à la clause 8-1.02. [31] Quoi qu’il en soit, on ne peut oublier que les clauses sur lesquelles le tribunal est appelé à se prononcer dans le présent cas et qui sont reproduites ci-dessus ont pour but d’établir un mécanisme destiné à limiter le nombre d’heures de travail que peut exiger la commission scolaire de ses enseignants. À cette fin, les tâches de l’enseignant sont réparties en catégories et des limites sont envisagées pour chaque catégorie. Des limites différentes s’appliquent à des catégories différentes et chacune doit être examinée de façon distincte. Dans le présent cas, c’est la notion des heures de « présence qui est à l’étude et il s’agit de déterminer si la période de quinze minutes consacrée à la récréation entre dans cette catégorie.

Comme le tribunal l’a déjà mentionné, seul le temps consacré par l’enseignant à s’acquitter de tâches qui lui ont été spécifiquement affectées ou qui nécessitent sa présence entre dans le calcul des heures de présence. Le temps qu’il consacre à l’accomplissement de tâches qui ne lui ont pas été spécifiquement confiées ou qui n’exigent pas sa présence dans le cadre de sa semaine ou de sa journée de travail  ne peut figurer au nombre des heures de présence au sens où on l’entend à la clause 8-4.02. Ainsi, la période quotidienne de quinze minutes consacrée à la récréation des élèves n’entre pas dans le calcul des heures de présence de l’enseignant lorsque ce dernier n’a pas été spécifiquement affecté à la surveillance des étudiants au cours de cette période et qu’il n’est donc pas tenu d’être présent à l’école. Bien que cet intervalle de temps s’inscrive dans le cadre de la journée et de la semaine de travail de l’enseignant, il demeure que celui-ci n’a pas été spécifiquement affecté à la surveillance des élèves au cours de la récréation et que sa présence n’était pas alors expressément requise. Ainsi, dans la mesure où cet intervalle de temps déborde le cadre des heures de présence de l’enseignant lorsqu’il n’est pas tenu de surveiller les étudiants mais s’inscrit tout de même à l’intérieur de sa semaine de travail, il ne serait pas inclus dans le calcul de ses 27 h 00 de présence » [32]

 

[500]      Puis, au soutien de ses prétentions, le Syndicat souligne que la surveillance des élèves en sa présence constitue l’une des attributions caractéristiques de la fonction de l’enseignant et qu’il doit le faire même pendant les périodes de récréations non assignées notamment jusqu’à ce que la classe se vide ou au cours de ses déplacements pendant lesdites pauses ou récréations. Ainsi, aux fins de l’analyse, la sentence rendue par Me Frumkin en 1984 et déposée par la partie patronale m’apparait pertinente. Dans cette affaire, il décida que le temps consacré à de la surveillance d’une manière accessoire durant l’heure du diner ne pouvait être pris en compte dans la semaine de travail :

« Comme en témoigne l’horaire, il existe un intervalle de quatre minutes entre chacune des périodes (« déplacement »). En temps normal, certains enseignants doivent assurer la supervision des déplacements des élèves durant ces périodes de quatre minutes; ce temps de supervision est d’ailleurs calculé au nombre de leurs heures de présence. Ainsi, en vertu de son horaire, le plaignant devait surveiller les étudiants durant pas moins de dix périodes de quatre minutes par semaine. À chacune de ces dix périodes, le plaignant avait spécifiquement été affecté à la surveillance des élèves. Aucune surveillance n’était toutefois requise du plaignant au cours des périodes de quatre minutes précédant et suivant la cinquième période. [33]  

[…]

Ceci dit, le tribunal en déduit que lorsque l’on parle dans la convention collective de la présence de l’enseignant ou de sa tâche éducative en termes des limites auxquelles elles sont assujetties, on désigne les tâches qui ont été affectées à l’enseignant et qui exigent de lui sa présence à l’école et non pas les autres tâches envisagées à l’article 8-1.00 qui ne lui ont pas été spécifiquement confiées et qui ne nécessitent pas obligatoirement sa présence. De fait, les tâches qui sont assujetties à des limites de temps doivent être clairement identifiées afin qu’elles puissent être quantifiées dans le cadre de la tâche globale de l’enseignant. Les tâches dont il est question en vertu de la convention collective, lesquelles nécessitent la présence de l’enseignant, doivent lui avoir été affectées pour une période de temps définie. Autrement, il n’existerait aucun moyen de contrôler l’application des dispositions relatives aux limites de temps envisagées dans la convention collective.

Pour cette raison, le tribunal est d’avis que le temps consacré par un enseignant à s’acquitter des tâches envisagées dans la convention collective (que ce soit dans le cadre de sa tâche éducative ou de la présence qui est requise de lui) doit viser l’accomplissement de tâches qui lui ont été spécifiquement affectées et qui nécessitent sa présence à l’école; c’est seulement de cette façon que ces tâches deviendront pertinentes dans le cadre de la mise en application des dispositions de la convention régissant le calcul des heures. Il n’est aucunement fait état dans la convention du temps consacré à l’accomplissement de tâches qui sont accessoires au statut de l’enseignant, tâches qui ne lui ont pas été spécifiquement affectées par la commission et qui ne requièrent pas obligatoirement sa présence. Ce temps ne peut être envisagé dans le cadre de la convention collective si la question du calcul d’une période est soulevée. » [34]

 

[501]      Saisi d’une question similaire, l’arbitre Nicolas Cliche décida dans le même sens que Me Frumkin en précisant toutefois, qu’une telle « initiative » faisait partie de la charge individuelle d’enseignement :

« Il ressort de la preuve que la plaignante, lors de la fin des cours, voyait à surveiller le déplacement des élèves. Ceux-ci se rendaient à la cafétéria, à la chambre de bain ou aux autobus, elle s’assurait que ses élèves handicapés physiques se rendent à l’endroit voulu.

Après la période du dîner, la plaignante allait chercher ses élèves et les ramenait à la salle de cours.

Jamais la commission scolaire n’a imposé à la plaignante de faire « l’aiguillonnage » qu’elle dit avoir fait. Jamais cette tâche ne fit l’objet de directive : la plaignante ne faisait que s’assurer que ses élèves se rendent au bon endroit à la fin de la période du matin ou au début de la période de l’après-midi.

La clause 8-3.01 A) de la convention collective stipule que l’enseignant assure efficacement la surveillance des déplacements des élèves lors des entrées (accueil) et lors des sorties de l’école, lors du début et de la fin des temps de récréation.

Le présent tribunal est d’opinion que c’est exactement ce que la plaignante faisait; elle ne faisait pas de surveillance comme telle, elle ne faisait que veiller efficacement aux bons déplacements de ses élèves.

La fonction générale de l’enseignant prévoit à la clause 8-1.00 paragraphe 7 que dans le cadre de ses devoirs, les attributions caractéristiques de l’enseignant sont de « surveiller la conduite des élèves qui lui sont confiés ainsi que celle des autres élèves lorsqu’ils sont en sa présence ».

[…]

CONSIDÉRANT que le travail décrit par la plaignante était justement d’assurer efficacement la surveillance des déplacements des élèves lors des entrées (accueils) et des sorties de l’école conformément à la clause 8-3.01 A) de la convention collective;

CONSIDÉRANT la clause 8-2.01 C) de la convention collective établissant que le travail de surveillance prévu à la clause 8-3.01 A) est compris dans la charge individuelle d’enseignement;

CONSIDÉRANT qu’il ne fut pas prouvé que le directeur de l’école avait établi un système de rotation parmi les enseignants de son école pour effectuer les surveillances que faisait la plaignante et ce, comme l’exige la clause 8-3.01B) de la convention collective;

CONSIDÉRANT que l’opération décrite par la plaignante entre dans la description décrite à la clause 8-3.01 A).

Le tribunal est d’opinion que le travail effectué par la plaignante Lucie Fontaine n’avait pas à être comptabilisé et il y a lieu de rejeter le grief. » [35]

 

[502]      D’autre part, dans une affaire impliquant des enseignants à taux horaire, l’arbitre Jean M. Morency jugea que les temps de pauses entre les périodes d’enseignement devaient être comptabilisés et il retient plusieurs facteurs également applicables aux enseignants à temps plein et visés par le présent litige :

« […] La tâche d’enseignement de l’enseignant (e) à taux horaire comprend, à notre point de vue, non seulement le nécessaire à la préparation mais aussi l’encadrement, l’aide et la surveillance d’un groupe d’élèves confiés à sa charge suivant un horaire scolaire.

Il faut donc retenir de ce qui précède que l’enseignant (e) est et demeure en fonction d’enseignement tant et aussi longtemps qu’il a, suivant son horaire, la responsabilité d’un groupe d’élèves.

Cela se traduit pour les enseignant(e)s à taux horaire en temps de présence auprès des étudiants qui doit être rémunéré de manière équivalente. […]

C’est au niveau de la réduction de la rémunération que le bat blesse. Les enseignant(e)s considèrent que le nouvel horaire n’a, dans les faits, rien changé puisqu’ils ont dû consacrer autant de temps à leurs tâches. Selon eux, les prétendues « pauses » placées entre chaque période de 60 minutes n’ont pas soustrait à leurs devoirs principaux et accessoires. Leur présence est demeurée requise et elle s’intègre tout autant qu’avant dans la période d’enseignement dont ils doivent répondre suivant leur horaire.

L’Employeur, on se le rappelle, répond à cela qu’aucune compensation n’est prévue pour les pauses et que, en telles conditions, l’enseignant (e) doit s’y soumettre.

De l’avis du Tribunal, l’interprétation et l’application que l’Employeur fait de la convention collective en matière de rémunération des enseignant(e)s à taux horaire est biaisé et injuste.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, la période d’enseignement pouvant varier entre 50 et 60 minutes pour avoir droit à une rémunération équivalente au plein taux horaire n’implique pas seulement le temps consacré aux cours et leçons. Il comprend aussi les tâches inhérentes et accessoires que sa tâche principale commande. Parmi celles-ci, se trouve l’encadrement des étudiants qui exige tout autant de présence sur les lieux de travail que la livraison de leçons ou de cours.

Il s’agit à notre avis, de tâches nécessaires qui se situent à l’intérieur des périodes inscrites à l’horaire et qui correspondent à du temps de présence et à du travail effectivement exécuté dans le cadre des fonctions des enseignant(e)s.

Qui plus est, il nous apparaît que la volonté du Ministère de l’Éducation de voir l’enseignement effectué correspondre à une vraie durée de 60 minutes, aussi noble soit-elle, ne peut s’appliquer qu’en respect de règlements, dont celui sur l’horaire des élèves (R.Q. Ch. C-60, a. 30) et des conventions collectives existantes. Or, ceux-ci, d’une part, reconnaissent le droit des élèves à une pause de 5 minutes de détente après chaque période et cette situation fait partie des conditions de travail qui doivent être respectées sans pour autant être soustraites de l’horaire si l’enseignant demeure en fonction.

L’Employeur s’est bien gardé, à cet égard, de soustraire clairement les enseignants à taux horaire de leurs devoirs et il n’y a pas lieu, dans ces conditions, de le laisser seul tirer les bénéfices au détriment des enseignants. […]

D’autre part, la convention collective accorde aux enseignants à taux horaire une marge de 10 minutes par période pour bénéficier d’une pleine rémunération du taux horaire. Cette marge n’est pas sans raison d’être et à notre avis, elle ne peut être rendue inopérante par le seul vœu ou le seul souci administratif d’une des parties.

S’il apparaît bien justifié d’exiger le respect des périodes d’enseignement et des temps de détente, il nous apparaît tout autant justifié d’assurer le respect des périodes réelles d’enseignement assumées par les enseignants. » [36]

 

La rémunération (traitement annuel)

[503]      Enfin, la partie patronale prétend que le particularisme des clauses encadrant la tâche de l’enseignant et de sa rémunération s’oppose en son essence à la réclamation formulée par le Syndicat. Plus spécifiquement, la partie patronale affirme que pour chacun des 200 jours de travail, l’enseignant reçoit 1/200 de son traitement annuel, sans égard au contenu de cette journée de travail en terme de minutes ou d’heures pendant lesquelles les enseignants ont travaillé ou agi dans le cadre de leur fonction générale. À cette fin, elle rappelle quelques clauses de la convention nationale et certains constats établis par la jurisprudence.

[504]      Ainsi, en vertu des clauses 6-5.01 et 6-5.02 de la convention nationale, en contrepartie de la prestation de travail fixée à 200 jours de travail, tout enseignant reçoit une rémunération sous la forme d’un traitement annuel qui est versé en vingt-six (26) versements. Notons que le traitement annuel comprend les jours fériés et chômés et les jours de vacances.

[505]      Autrement, la convention nationale prévoit qu’un dépassement de la tâche éducative assignée par la commission entraine une compensation monétaire (article 8-6.02 C) de la convention nationale) [37] . Également, en cas de dépassement de la semaine régulière de travail en raison de la tenue de l’une des dix (10) rencontres collectives ou de l’une des trois (3) premières rencontres avec les parents, il peut y avoir compensation par une réduction du temps de travail de nature personnelle (article 8-5.02 E) de la convention nationale) [38] . Enfin, la suppléance peut entrainer également une rémunération additionnelle (article 6-8.02 de la convention nationale). Somme toute, hormis les cas précités et spécifiés à la convention nationale, il n’existe donc pas, à proprement parler de clause encadrant d’une manière générale tout travail pouvant être exécuté au-delà de la semaine régulière de travail ou de l’amplitude quotidienne (journée régulière de travail). Autrement dit, la notion de temps supplémentaire comme on l’entend habituellement n’existe pas dans la convention nationale.

[506]      Enfin, les parties ont prévu certaines situations pouvant entrainer un ajustement de la rémunération annuelle à l’article 6-8.00 de la convention nationale. En particulier,  la clause 6-8.04 a été à maintes reprises interprétée en arbitrage et la jurisprudence est constante. La partie patronale propose d’appliquer les constats et les principes retenus par les arbitres de griefs à la présente affaire. Ainsi, aux fins d’une bonne compréhension ou appréciation de la jurisprudence, la reproduction des clauses 6-8.01 et 6-8.04 m’apparait nécessaire :

« 6-8.00 DISPOSITIONS RELATIVES À LA RÉMUNÉRATION

6-8.01 L’enseignante ou l’enseignant reçoit son traitement annuel prévu à l’article 6-5.00 et à l’annexe XLII, de même que les suppléments prévus à l’article 6-6.00 et les primes pour disparités régionales prévues au chapitre 12-0.00 s’il y a lieu, en vingt-six (26) versements, selon les modalités suivantes :

a)     à compter du début de l’année de travail, l’enseignante ou l’enseignant reçoit, à tous les deux (2) jeudis, 1/26 des montants annuels applicables en traitement, suppléments et primes le premier jour de travail de la période de paie visée;

b)     malgré l’alinéa a) le vingt-sixième (26 e ) versement pour une année de travail doit être ajusté de sorte que l’enseignante ou l’enseignant ait reçu, pour cette année de travail, 1/200 de son traitement annuel applicable, de même que de ses suppléments et primes applicables s’il y a lieu, pour chaque jour de travail qu’elle ou il a effectué;

c)     malgré l’alinéa a), l’enseignante ou l’enseignant qui quitte le service de la commission reçoit, au moment de son départ, le solde du traitement ainsi que des suppléments et primes applicables qui lui sont dus.

La présente clause n’a pas pour effet d’accorder à l’enseignante ou l’enseignant un droit à une somme à laquelle elle ou il n’a pas droit en vertu d’une autre disposition de la convention. […]

6-8.04 La commission déduit 1/200 par jour de travail (lire 1/400 par demi-journée de travail et lire 1/1000 pour toute période de temps de 45 à 60 minutes) du traitement annuel applicable, de même que des suppléments et primes pour disparités régionales applicables, s’il y a lieu, de l’enseignante ou l’enseignant dans les cas suivants :

a)     absences autorisées sans traitement pour une durée inférieure à une année de travail;

b)     absences non autorisées ou utilisées à des fins autres que celles autorisées. »

 

[507]      Appelé à déterminer comment l’Employeur devrait opérer une déduction lors d’une absence motivée par l’état de santé d’un enseignant, l’arbitre Jean-Guy Ménard rappelle à quel point le régime des enseignants est particulier et que l’on ne peut en conséquence l’appliquer en comptant chaque minute travaillée sur une base quotidienne ou même hebdomadaire. Le régime reposant sur des assises à la fois précises et imprécises ou variables :

«  2. Le droit ou les règles conventionnelles

Comme le spécifie le tribunal dans l’affaire SYNDICAT DES ENSEIGNANTS DE SAINT-JÉROME ET COMMISSION SCOLAIRE DE SAINT-JÉROME [39] les modalités d’établissement de la rémunération des enseignants et même la formule d’organisation de leur travail sont à ce point particulières qu’il est impossible d’y trouver quelqu’affinité signifiante avec celles applicables dans d’autres secteurs d’activités. En certains cas, il est même difficile d’en vérifier l’application pratique; à preuve, qu’il s’agisse de penser, par exemple, au nombre d’enseignants qui ne travaillent pas effectivement 200 jours par année, alors qu’on sait pertinemment que la clause 8-3.01 stipule clairement l’effet contraire. Partant, il devient d’autant pertinent sinon important de revenir sur les principaux points de force des régimes conventionnels relatifs à l’organisation du travail et à la gestion de la paie des enseignants.

i)               L’organisation du travail

D’une part, on établit sans équivoque que l’année de travail de tout enseignant comporte 200 jours de travail se situant, en principe entre le 1 er septembre et le 30 juin suivant (clause 8-3.01). On circonscrit d’autre part la semaine régulière de travail à cinq jours, du lundi au vendredi (clause 8-4.01) et on en restreint le contenu à 27 heures de travail au lieu assigné et aux moments déterminés, lesquels sont sujets à modification suivant certaines modalités (clause 8-4.02). Dans cet ordre d’idées, on ajoute également que ces 27 heures de travail doivent se placer dans un horaire hebdomadaire de 35 heures qui suppose une amplitude quotidienne ne dépassant pas 8 heures (clause 8-4.03). Enfin, on stipule que la tâche éducative est de 23 heures par semaine au préscolaire et au primaire et de 20 heures par semaine au secondaire (clause 8-4.04) et on laisse toute latitude d’organiser l’enseignement sur une base différente du traditionnel cycle de cinq jours (clause 8-4.06).

ii)             La question de la rémunération

Dans un premier temps, on indique que l’enseignant reçoit un traitement annuel valant pour toute l’année scolaire, lequel traitement couvre autant les jours de travail, les jours fériés et chômés que les jours de vacances (clause 6-5.01). On spécifie ensuite que le versement de ce traitement se fait sur une base bimensuelle, donc par tranches de 1/24, les deux derniers versements d’une année donnée devant être ajustés « de sorte que l’enseignant reçoive, pour cette année scolaire, 1/200 de son traitement annuel applicable… pour chaque jour de travail qu’il a effectué durant cette année scolaire » (clause 6-8.01). Au cas de départ en cours d’année ou d’arrivée tardive, on édicte que le traitement est établi à raison de 1/200 par jour de travail effectué (clause 6-8.02). Finalement, on circonscrit l’état de déduction pour absence à 1/200 par jour de travail en ajoutant qu’on doit réduire de 1/400 pour une demi-journée de travail et de 1/1000 pour une période dont la durée est de 45 à 60 minutes (clause 6-8.03).

À la simple lecture de ce qui précède, on doit d’abord reconnaître que le traitement annuel de tout enseignant vaut à tout le moins pour les 200 jours de travail qu’on lui requiert, des lundi au vendredi se situant en principe entre le 1 er septembre et le 30 juin suivant. Partant de cette considération et y ajoutant l’évidence que l’économie des régimes applicables à l’organisation doit aussi convenir que chaque jour de travail génère à lui seul 1/200 du traitement annuel accordé à l’enseignant, le tout sans qu’on fasse quelque rapport que ce soit avec le volume de travail impliqué. » [40]

 

[508]      La partie patronale suggère que puisque la rémunération n’est pas versée en fonction du travail effectué quotidiennement, les enseignants ne peuvent réclamer une rémunération pour des tâches autres que celles préalablement déterminées, assignées ou autrement par l’Employeur. Elle ajoute, que tout dépassement de tâche d’un enseignant qui n’a pas été autorisé sera considéré comme étant effectué sur une base volontaire ou bénévole et par conséquent, ne saurait faire l’objet d’une rémunération additionnelle. En appui, à ses prétentions, elle réfère le tribunal à quelques sentences arbitrales.

[509]      Dans une affaire où un groupe d’enseignants a décidé de ne pas participer à une formation organisée par l’Employeur au cours d’une journée pédagogique, l’arbitre Me Denis Nadeau a décidé que lesdits enseignants se sont absentés sans autorisation et ce même s’ils ont au cours de la journée exécuté des activités qui relèvent de leur fonction et donc que leur rémunération devait être réduite en conséquence :

«  62 Il est vrai que les enseignants qui se sont absentés de cette activité de formation ont, pendant la durée de celle-ci, effectué du travail correspondant à celui prévu à l’annexe VIII de la convention collective. (S-3). Toutefois, et il n’est pas requis d’insister sur ce point, ce travail ne représentait pas celui qui avait été préalablement déterminé par l’employeur.

63. La partie syndicale a fait valoir que l’employeur ne peut néanmoins procéder à la coupure de traitement puisqu’il a laissé les enseignants effectuer, dans leur lieu habituel de travail, des activités utiles et au profit de l’institution. Selon le procureur syndical, sans exiger des mesures d’expulsion de l’école pour les enseignants qui ne se sont absentés de l’activité de formation - ce qui serait, de l’avis de tous, totalement exagéré et incompatible avec la nature du travail des enseignants - l’employeur aurait dû prévenir les enseignants que s’ils ne se présentaient pas à la formation, ils devaient quitter l’école pour la durée de celle-ci. Dans deux sentences, l’arbitre Rodrigue Blouin a déjà indiqué - sans toutefois se prononcer sur le mérite de ce point - que l’employeur devait signifier « son opposition à l’exécution de tâches autres que celles spécifiquement requises lorsqu’il constate que les enseignantes et enseignants se livrent à une telle manœuvre. («  Syndicat de l’enseignement de Lanaudière et Commission scolaire des Samares  », SAE 7279, p.4 et  «  Syndicat  des professeurs de Shawinigan et Collège de Shawinigan  », SAE 1747, p.7-8).

64. Je ne peux retenir la proposition syndicale. Dans le présent dossier, l’employeur a clairement informé, et ce avant la journée de l’activité, le personnel enseignant du caractère obligatoire de la formation du 13 mai 2011 et du fait qu’il s’agissait de la seule prestation de travail acceptée et rémunérée pour cette période (S-5c). Je note qu’un tel avis formel ne se retrouvait pas dans les litiges examinés par l’arbitre Blouin. Cet avis me paraît pourtant déterminant puisqu’il indique quelle sera l’unique prestation de travail « qui sera acceptée et rémunérée » au moment de la formation prévue. Sans avoir à faire une analyse textuelle complexe, le personnel enseignant pouvait facilement comprendre que toute autre fonction exercée pendant la période de la formation ne serait pas rémunérée. Je ne vois pas en quoi un avis additionnel, indiquant, le matin même de l’activité, aux enseignants qui s’absentaient de la formation, de quitter l’école pendant la durée de celle-ci aurait été nécessaire. À la lumière des termes retenus par l’employeur dans les missives S-5 d) et ce, je suis d’avis que cette démarche n’était pas requise. Les enseignants qui, comme Guy Dussault, sont demeurés à leur école pendant la période de la formation (soit 1 h 45 dans le cas de l’école Notre-Dame du Foyer), étaient suffisamment informés de la prestation de travail qui était requise par l’employeur à ce moment (présence à la formation) et de la conséquence découlant de leur absence de celle-ci. Ces enseignants ont néanmoins décidé d’effectuer du travail lié au cadre d’organisation des journées pédagogiques pendant la durée de la formation. Cette décision personnelle ne peut leur être reprochée, mais rien en droit ne peut contraindre l’employeur de les rémunérer pour une telle substitution, non autorisée, de prestation de travail.  » [41]

 

[510]      L’arbitre Jean-Pierre Tremblay rejette la réclamation faite par un enseignant pour du temps qui dépasse les limites définies à la convention nationale et consacré à l’organisation de trois projets d’activités sportives. Hormis les défaillances de la preuve, il souligne l’absence d’autorisation au préalable de la part de l’employeur :

«  Le tribunal ne peut que louanger Lorne CLAYMORE pour l’énergie et le temps qu’il a consacré à fournir aux étudiants des locaux, des équipements et une formule de participation qui leur a permis sans doute un plus large épanouissement. Il n’a d’ailleurs pas attendu d’avoir le « OK officiel » pour ce faire, et il n’a pas « fermé les gymnases » en cours d’année; pour reprendre une expression consacrée, « il n’a pas compté ses heures », du moins jusqu’à ce qu’il constate qu’il n’a pu obtenir une forme de compensation quelconque, en temps ou en argent, en regard du temps qu’il avait ainsi consacré aux étudiants. […]

Par ailleurs, la preuve démontre clairement que Lorne CLAYMORE n’a pas obtenu les autorisations nécessaires pour dépasser le nombre des heures prévues originalement aux trois projets qui ont été acceptés par la direction de l’école. Il ne peut de son propre chef, et sans autorisation préalable sauf pour des cas de force majeure, engendrer des dépenses qui vont au-delà des budgets prévus aux projets puis chercher ultérieurement une compensation financière. C’est de sa propre initiative et de son propre chef que Lorne CLAYMORE a dépassé le nombre d’heures prévues et il ne peut alors exiger une compensation financière pour ces dépassements (voir à ce sujet notamment S.T.E. de l’Est du Québec c. C.S.R. de la Péninsule, S.A.E. no. 3513). [42]

Dans une autre affaire, la réclamation faite par des enseignants qui ont à l’encontre d’une consigne claire émise par la direction de l’école, substitué en temps d’enseignement deux minutes d’encadrement prévues à l’intérieur de toutes périodes de 50 minutes d’enseignement a été rejetée. L’arbitre a décidé que la substitution n’avait pas été autorisée et qu’en conséquence le dépassement en résultant ne pouvait être réclamé :

« L’article 8-2.05 de la convention collective, sur lequel s’appuie la réclamation des enseignants stipule que le droit de l’enseignant à une compensation monétaire naît « Si, pour des raisons particulières, la commission dépasse, pour un enseignant donné, le temps maximum individuel prévu […] ». Il faut comprendre de ce texte que c’est à la demande de l’employeur qu’un dépassement peut survenir; le contraire eût d’ailleurs été surprenant.

La demande de la commission scolaire, par la voix du directeur de l’école, était à l’effet que les enseignants fournissent, par périodes de 50 minutes, 48 minutes d’activités d’enseignement (type A), et deux minutes d’activités d’encadrement (types B et C).

La preuve montre que cette demande formulée par la commission ne souffrait pas d’ambiguïté, et était clairement comprise par les enseignants. Ceci ressort particulièrement de la lettre adressée par le conseil d’école au directeur d’école, le 7 février 1979, où les enseignants décrivent ainsi l’horaire proposé : « […] soit des périodes de 48 minutes de tâche A plus deux minutes d’encadrement/récupération/étude […] ».

Dans le présent cas, rien dans la preuve ne permet d’affirmer que c’est à l’initiative ou à la demande de la commission scolaire que le dépassement du temps maximum individuel est survenu. La preuve révèle plutôt que c’est à leur propre initiative, et de leur propre chef, que les enseignants ont substitué deux minutes d’activités de type A par période aux activités d’encadrement prévues à leur horaire. En effet, certains enseignants ont affirmé clairement qu’ils ont agi de leur propre chef, en ignorant délibérément ce qui était explicitement prévu à leur horaire.

Dans ce contexte, il n’est pas certain que la commission scolaire soit tenue de compenser les enseignants qui ont excédé le temps maximum individuel prévu à la convention collective pour les activités de type A. En effet, il n’y a aucune preuve de consentement implicite ou explicite de la direction de l’école à ce que les enseignants exécutent des activités d’enseignement durant les deux minutes prévues à l’horaire à des fins d’encadrement. Au contraire, le directeur de l’école, M. Lapierre, a expliqué en détail en quoi consistaient les activités requises des enseignants durant lesdites deux minutes d’encadrement des élèves. Il a affirmé devant le tribunal qu’il s’attendait à ce que les enseignants réalisent ce type d’activités, tout en précisant qu’il leur laissait une grande latitude quant au moment et à la durée de ces activités. » [43]

 

[511]      Par ailleurs, dans un autre cadre, l’arbitre Francine Beaulieu a décidé que le dépassement de la limite hebdomadaire des 27 heures de présence assignées par l’employeur et résultant de l’omission d’avoir comptabilisé le temps de récréation tel que prévu à la convention locale devait être compensé. Elle ajoute même que la clause convenue entre les parties ne fait que confirmer l’article 57 de la Loi sur les normes du travail :

« [55] Disons tout de suite, qu’à mon avis, la clause 8-5.05 c) de l’entente locale [44] ne fait que confirmer ce que prévoit déjà l’article 57 de la « Loi sur les normes du travail » à savoir qu’un salarié est réputé être au travail pendant sa pause. En effet, les parties ont convenu à cette clause que le temps de récréation est comptabilisé dans les 27 heures de présence. Rappelons que la semaine régulière de travail est de 32 heures (clause 8-5.01) dont 27 heures de travail au lieu assigné par l’Employeur et 5 heures pour l’accomplissement de travail de nature personnelle (clause 8-5.02 A).

[60] Autrement dit, le temps de récréation se retrouve à l’intérieur des heures travaillées et l’enseignant est réputé être au travail même si, dans les faits, il est en temps de récréation. Ce n’est pas une question de disponibilité, mais plus d’un temps de pause « comptabilisé dans les vingt-sept (27) heures de présence », donc ce temps est considéré comme étant du temps travaillé.

[…]

[62] Avec respect pour l’opinion contraire, si ce temps n’est pas inscrit et n’est pas comptabilisé dans les 27 heures, il a donc été travaillé. Il faut conclure qu’il y a eu nécessairement dépassement de la semaine régulière de travail.

[63] Eu égard au fait que les enseignants ont reconnu que leur tâche avait été respectée, je considère que cet élément ne fait pas la preuve que le temps de récréation a été pris et qu’il n’y a pas dépassement. D’ailleurs, il est en preuve que le directeur des écoles concernées a bel et bien refait les horaires pour tenir compte de ces temps de récréation. De plus, je retiens de la preuve présentée que les enseignants étaient présents au travail pendant ce temps. Par conséquent, le grief est accueilli.

[64] Quant au mode de compensation pour les dépassements de la semaine régulière de 27 heures de travail, la convention collective est muette à ce sujet. Par ailleurs, je suis d’avis, comme l’ont suggéré les arbitres dans les sentences arbitrales qui ont été déposées, que les parties pourront, pour effectuer le calcul de la compensation, s’inspirer de la clause 8-6.02 C) qui prévoit « une compensation monétaire égale à 1/1000 du traitement annuel pour chaque période de 45 à 60 minutes. » [45]

 

[512]      Enfin, dans certains cas, les arbitres Rodrigue Blouin et Fernand Morin ont accordé des réclamations correspondant à de courtes durées, en rappelant que tout travail fait doit être payé sinon, il y a en quelque sorte enrichissement sans cause. [46]

 

III.        L’article 57.1 de la Loi sur les normes du travail

[513]      D’ordre public, l’article 57.1 de la Loi sur les normes du travail prévoit que le salarié est réputé être au travail durant le temps d’attente. Le salarié a donc droit à une rémunération lorsque trois conditions cumulatives sont rencontrées, à savoir :

« 57. Un salarié est réputé au travail dans les cas suivants:

1° lorsqu'il est à la disposition de son employeur sur les lieux du travail et qu'il est obligé d'attendre qu'on lui donne du travail; […] »

 

[514]      En l’espèce, la disponibilité et l’obligation d’attendre qu’on donne du travail aux enseignants sont au cœur du litige. La condition relative au lieu du travail étant en l’espèce plutôt théorique puisque, comme nous le verrons plus amplement, vu la durée des pauses ou des récréations entre deux assignations, les enseignants demeurent sur les lieux du travail, c’est-à-dire à l’école.

[515]      La présomption qui découle de cet article est une présomption juris tantum, laquelle peut être réfutée par le non-respect de certaines conditions par opposition à une présomption juris et de jure, laquelle ne peut être réfutée. [47] La Commission des normes du travail dans un Guide Interprétation et Jurisprudence suggère comment l’Employeur peut renversée la présomption :

« Cette présomption peut être renversée par une preuve de l’employeur. Cette preuve que peut faire l’employeur découle de l’obligation qui lui incombe d’établir le cadre d’exécution du travail relativement à la tâche qu’il demande au salarié de remplir, à la façon de le faire ainsi qu’au temps à consacrer pour le faire. Cette obligation incombe à l’employeur pour chacune des situations décrites aux quatre paragraphes de cet article. » [48]

 

[516]      L’article 41 de la Loi d’interprétation [49] favorise une interprétation large et libérale d’une telle loi :

« 41.  Toute disposition d'une loi est réputée avoir pour objet de reconnaître des droits, d'imposer des obligations ou de favoriser l'exercice des droits, ou encore de remédier à quelque abus ou de procurer quelque avantage.

 

Une telle loi reçoit une interprétation large, libérale, qui assure l'accomplissement de son objet et l'exécution de ses prescriptions suivant leurs véritables sens, esprit et fin. »

 

[517]      Dans l’affaire Rizzo [50] , la Cour suprême a rappelé qu’une loi édictant des normes minimales de travail devrait être interprétée de manière à garantir la réalisation de son objet :

« [22] Je m’appuie également sur l’art.  10 de la Loi d’interprétation , L.R.O. 1980, ch. 219, qui prévoit que les lois « sont réputées apporter une solution de droit » et doivent « s’interpréter de la manière la plus équitable et la plus large qui soit pour garantir la réalisation de leur objet selon leurs sens, intention et esprit véritables ».

 

[23] Bien que la Cour d’appel ait examiné le sens ordinaire des dispositions en question dans le présent pourvoi, en toute déférence, je crois que la cour n’a pas accordé suffisamment d’attention à l’économie de la LNE , à son objet ni à l’intention du législateur; le contexte des mots en cause n’a pas non plus été pris en compte adéquatement. Je passe maintenant à l’analyse de ces questions.

 

[24] Dans l’arrêt Machtinger c. HOJ Industries Ltd. , [1992] 1 R.C.S. 986 , à la p. 1002, notre Cour, à la majorité, a reconnu l’importance que notre société accorde à l’emploi et le rôle fondamental qu’il joue dans la vie de chaque individu. La manière de mettre fin à un emploi a été considérée comme étant tout aussi importante (voir également Wallace c. United Grain Growers Ltd. , [1997] 3 R.C.S. 701 ). C’est dans ce contexte que les juges majoritaires dans l’arrêt Machtinger ont défini, à la p. 1003, l’objet de la LNE comme étant la protection «. . . [d]es intérêts des employés en exigeant que les employeurs respectent certaines normes minimales, notamment en ce qui concerne les périodes minimales de préavis de licenciement ». Par conséquent, les juges majoritaires ont conclu, à la p. 1003, qu’". . . une interprétation de la Loi qui encouragerait les employeurs à se conformer aux exigences minimales de celle-ci et qui ferait ainsi bénéficier de sa protection le plus grand nombre d’employés possible est à préférer à une interprétation qui n’a pas un tel effet". »

 

La condition relative à : « être à la disposition de son employeur »

[518]      La disponibilité volontaire ne donne pas ouverture à l’application de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail. Toutefois, comme le souligne la Commission des normes du travail,  la disponibilité du salarié peut découler de l’organisation du travail :

« Le caractère obligatoire de la disponibilité est un facteur déterminant. La disponibilité volontaire qu’offre un employé à son employeur par souci de professionnalisme ou autre ne saurait entraîner l’application de l’article 57 LNT.

Cette disponibilité doit être demandée par l’employeur dans le cadre de l’exécution du travail. Si les conditions d’exécution font en sorte que cette disponibilité est requise bien que l’employeur ne l’ait pas demandée expressément, le salarié pourrait bénéficier du salaire correspondant au temps consacré à l’exécution de sa tâche, sauf le caractère déraisonnable du temps consacré à l’exécution de la tâche qui devrait alors être démontré par l’employeur.

Certains faits peuvent permettre de déceler l’existence de cette obligation imposée au salarié. L’horaire de travail habituel, la nature des activités de l’entreprise, la quantité de travail à exécuter pendant une période donnée sont autant de critères à analyser.

Il s’agit d’évaluer la contrainte imposée par l’employeur au salarié de lui réserver sa disponibilité pendant la période prévue parce qu’il est susceptible d’effectuer le travail requis. » [51]

 

[519]    Les auteurs Dubé et Di Iorio suggèrent que la disponibilité doit à la lumière des circonstances, avoir un caractère obligatoire:

« Il faut noter que la règle relative au paiement du temps d’attente s’applique seulement si la disponibilité est obligatoire. Ainsi, lorsque des salariés résidant sur les lieux du travail terminent leur quart de travail et que l’employeur leur laisse entière liberté quant à l’utilisation de leur temps de loisirs, ces mêmes salariés ne peuvent ensuite réclamer le paiement d’heures supplémentaires s’ils ont choisi de passer leurs heures de loisir avec les groupes de personnes qu’ils étaient chargés d’animer pendant leur journée de travail. Cette disponibilité volontaire ne saurait créer d’obligation chez l’employeur. Tel que mentionné, la disponibilité doit donc, à la lumière des circonstances, avoir un caractère obligatoire. » [52]

 

[520]      Dans l’affaire Commission des normes du travail c. Les Cèdres [53] , le juge Jacques Lachapelle rappelle des propos tenus par le juge François Chevalier à l’effet que le fardeau d’établir que le salarié doit cesser toute activité relève de l’employeur. Ainsi, en l’absence de directives claires, les employés pouvaient croire qu’ils devaient demeurer disponibles pendant les périodes de repas :

« Le juge Chevalier écrit au sujet de l’article de cette ordonnance :

« […] Dans l’opinion du Tribunal, pour qu’un employeur puisse déduire le temps pris pour le repas par son employé, il faut que l’entente intervenue entre l’un et l’autre soit claire à l’effet que, durant la période utilisée pour sa réfection, l’employé devra cesser toute activité qui constitue un travail. C’est l’employeur qui a le fardeau de prouver cette interdiction; s’il tolère un état de choses contraire, il est responsable du paiement horaire que ce travail disponible comporte. »

La preuve a-t-elle démontré que les salariées n'étaient pas autorisées à quitter leur poste de travail? Il n'y a certes pas d'interdiction formelle à ce sujet. Cependant il nous faut considérer le contexte dans lequel ces tâches sont exercées par les employées. Rappelons qu'aucune directive n'a été donnée aux employées quant à la période de repas. Le programme de travail [P-4] ne contient d'ailleurs aucune mention à ce sujet. De fait les employées demeuraient et mangeaient sur place et répondaient aux demandes des résidants. Les instructions générales données aux employées étaient que celles-ci devaient répondre en tout temps aux demandes raisonnables des résidants. Aucune des employées ne mangeait à l'extérieur ou dans un autre endroit que la cuisine attenante â la salle à manger.

En l'absence de directive claire à l'effet contraire, tous ces faits pouvaient laisser croire aux employées qu'elles n'étaient autorisées à quitter leur poste de travail. Dans ces circonstances, il appartenait à la défenderesse de donner des instructions précises à ses employées.

Le Tribunal conclut donc que ces salariés n’étaient pas autorisés à quitter leur poste de travail et qu’en conséquence, elles doivent être rémunérées pour la période de repas. »

 

[521]      Dans l’affaire Edphy, la juge Micheline Sasseville de la Cour du Québec jugea que les moniteurs d’un camp d’été étaient dans les faits, disponibles pendant les heures de repas. Leur disponibilité résultait de la culture de l’entreprise et des directives écrites par l’employeur :

« Il s’infère de l’ensemble de la preuve que la présence des moniteurs était nécessaire toute la journée. L’on exigeait de ces salariés qu’ils soient disponibles en tout temps, alors qu’ils étaient payés sur une base de six heures par jour. L’employeur soutient, par exemple, que, ce n’est pas parce que les moniteurs prenaient leurs repas avec les campeurs qu’ils étaient en fonction. Or, il a été démontré que plusieurs interventions de la part des moniteurs étaient alors exigées pendant les repas sans que ce temps soit comptabilisé et pris en compte. […]

 

En vertu de l’article 57 de la loi, un salarié est réputé être au travail lorsqu’il est à la disposition de son employeur, sur les lieux du travail et qu’il est obligé d’attendre qu’on lui donne du travail. Dans l’arrêt Cléroux-Strasbourg c. Gagnon [54] , la Cour d’appel déclare ce qui suit :

C’est à l’employeur de décrire la tâche qu’il confie à son employé, de limiter le nombre d’heures de travail. S’il ne le fait pas, l’employé peut consacrer à la tâche qu’on lui a confiée, le temps nécessaire pour l’accomplir. Dans les circonstances, l’employeur n’a fait qu’indiquer la nature de la tâche confiée, sans limite quelconque. Il lui incombait donc d’établir non pas que le nombre d’heures était déraisonnable eu égard à la rémunération, mais plutôt déraisonnable eu égard à la nature de l’immeuble en question [l’appelant était concierge dans un immeuble].

Au surplus, il n’est pas contesté que l’appelante devait être disponible en tout temps pour recevoir les loyers et s’occuper de l’immeuble en général. En l’absence de directives précises de l’employeur, l’appelante était justifiée de consacrer à son ouvrage le nombre d’heures nécessaires pour mener sa tâche de concierge à bonne fin. 

Il y a lieu d’adopter cette même position au cas soumis en l’espèce, compte tenu que les monitrices étaient incitées par la culture de l’entreprise et par les directives écrites transmises par l’employeur lors de leur embauche à se préoccuper sans cesse du sort des enfants qu’elles prenaient en charge, sans qu’il soit question de mesurer le temps consacré à chacune des tâches quotidiennes accomplies. » [55]

[522]      Enfin, le juge Claude Filion accueillit une réclamation, estimant que l’employeur doit assumer les conséquences de la confusion de l’encadrement du travail dans lequel les salariées devaient travailler :

« [19] Dans la présente cause, la salariée est logée et, bien que la preuve soit en partie contradictoire sur la gratuité des repas qu’elle prend, la Cour est satisfaite du fait qu’elle est également nourrie. Aucune entente n’avait été préalablement conclue sur les heures de travail, non plus que sur l’aspect pécuniaire de sa rémunération. La salariée, selon la preuve faite, se comporte comme une préposée responsable et accomplit les tâches afin d’assurer le bien-être des deux (2) pensionnaires de la résidence pour personnes âgées.

[20] Il incombe aux défendeurs d’assumer les conséquences de la confusion relative aux paramètres entourant la prestation de travail de leur salariée. La « Loi » est d’ordre public et doit recevoir application. […] » [56]

 

La condition relative à : «  être obligé d’attendre qu’on lui donne du travail »

[523]      L’arbitre Me Diane Fortier a rejeté un grief soulevant l’application de l’article 57.1 de la Loi sur les normes, estimant que le fait de prévoir qu’un salarié doit être disponible, pendant les pauses repas, pour intervenir lors d’un bris de la presse ne peut être considéré comme étant une obligation d’attendre qu’on lui donne du travail, l’application étant dans les faits exceptionnelle :

« 1) L’entente intervenue entre les parties (lettre d’entente no 6) fait en sorte qu’un salarié en période de repos ou de repas doit retourner à son poste si la presse ne fonctionne pas à pleine efficacité et que son arrêt justifie la présence du salarié à son poste. Les parties ont donc identifié une circonstance pour laquelle le salarié s’est engagé à se rendre disponible. Il est donc à la disposition de l’employeur. […]

3) L’employeur a identifié avec le syndicat la circonstance pour laquelle un salarié doit retourner à son poste. Et cette circonstance ne me semble pas être l’équivalent d’une obligation d’attendre qu’on lui donne du travail. En effet, le salarié se présente à son poste de travail et il exécute les fonctions pour lesquelles il est rémunéré. La Loi et la convention lui permettent d’arrêter de travailler pendant son repas. C’est ce qu’il fait. Son travail normal et principal n’est pas de réparer les bris de presse, il est de travailler sur la presse.

Les parties ont donc prévu des conditions particulières de travail (45 minutes de repas au lieu de 30 minutes, interdiction de prendre son repas à l’extérieur de l’établissement) lorsque la presse brise et que cela justifie qu’on interrompre le repas pour parer à cette situation particulière. La preuve a démontré qu’en plus d’être particulière, cette situation est exceptionnelle. […]

Cette preuve non-contredite me démontre bien que nous ne sommes pas en présence du contexte prévu par le législateur. Les parties, par lettre d’entente, ont simplement transigé sur une situation, je le répète, particulière et exceptionnelle. Il n’y pas, dans cette entente, de notion d’obligation d’attente de recevoir du travail de l’employeur, les salariés travaillent, et pendant la période de repas, ils cessent de travailler. » [57]

 

[524]      Récemment, l’arbitre Diane Lemieux souligne que l’article 57 de la Loi sur les normes du travail ne permet aucune dérogation contrairement à l’article 79 et qu’aux fins de l’application de l’article 57, les salariés doivent demeurer sur les lieux du travail et non à leur poste de travail :

« [68] Il reste cependant à déterminer si l’article 57 L.n.t. trouve application pendant la période de prise de repas des techniciens ambulanciers? À mon avis, le paragraphe (1) de l’article 57 s’applique au cas présent. Il convient de remarquer que cet article ne comporte aucune dérogation permise par la loi contrairement à ce que l’article 79 L.n.t. […]

[69] On peut noter que, contrairement à l’alinéa 79 (20 L.n.t. qui impose une rémunération de la période de repas du seul fait que le salarié n’est pas autorisé à quitter son poste de travail, le paragraphe 57 (1) L.n.t. exige pour qu’un salarié soit considéré réputé au travail qu’il soit obligé d’attendre qu’on lui donne du travail. Le paragraphe 57 (1) L.n.t. n’impose pas cependant que le salarié soit à son poste de travail. Il suffit qu’il soit sur les lieux du travail. » [58]

 

[525]      Enfin, le juge Jean Normand de la Cour supérieure note que « le salarié qui doit attendre qu’on lui donne du travail est nécessairement à la disposition de l’employeur, mais l’inverse n’est pas vrai. » [59]

 

L’effet des normes du travail

[526]      Comme relaté précédemment, l’article 57 de la Loi sur les normes du travail ne permet pas de dérogation et est d’ordre public. [60] Ainsi, une disposition d’une convention collective ou d’un décret qui déroge à une norme du travail est nulle de nullité absolue.

[527]      L’article 94 de la Loi sur les normes du travail et d’application générale prévoit qu’une convention ou un décret peut avoir pour effet d’accorder une condition de travail plus avantageuse qu’une norme prévue à ladite Loi et dans un tel cas, la disposition conventionnelle peut y déroger. Toutefois, il est bien établi que cette appréciation doit se faire en isolant la stipulation conventionnelle par rapport à la norme légale :

«  246. - Caractère d’ordre public et minimal - Les normes du travail édictées par la Loi sur les normes du travail ou par les règlements adoptés sous son empire sont d’ordre public ( art.93 , al. 1 L.N.T.), à moins que la Loi ne le permette expressément, nul ne peut y déroger. L’article 93 , al. 2 L.N.T. prononce la nullité absolue de toute convention, individuelle ou collective, ou de tout décret de convention collective, qui prétendrait déroger à une norme du travail. La loi ne définit pas l’expression « norme du travail ». La Cour d’appel a décidé qu’elle se rapportait à tout droit et tout avantage que la Loi confère au salarié. L’article 94 L.N.T. tempère le caractère d’ordre public des normes du travail. Il autorise une convention ou un décret qui a pour effet d’accorder au salarié une condition de travail plus avantageuse que celle prévue par la norme légale. Cette dernière revêt donc un caractère minimal. L’évaluation d’une condition de travail conventionnelle (ou contenue dans un décret) par rapport à la norme légale qui lui correspond doit s’effectuer en isolant la stipulation conventionnelle ; celle-ci ne peut compenser sa faiblesse par rapport à la norme légale par d’autres avantages qui peuvent être contenus dans la même entente. La jurisprudence de la Cour d’appel favorise une interprétation libérale de la Loi de façon à permettre la réalisation de ses objectifs selon la règle d’interprétation énoncée à l’article 41 de la Loi d’interprétation. [61]  »

 

[528]      Ainsi, les décideurs interprètent restrictivement les dérogations :

« La jurisprudence a été appelée à déterminer de quelle façon une convention ou un décret doit être envisagé pour déterminer s’il respecte le minimum prévu par la Loi. D’emblée, la conception voulant que la convention individuelle ou collective, ou encore le décret, soit considéré dans son ensemble pour déterminer si les conditions offertes sont globalement plus avantageuses que la Loi a été rejetée. Les tribunaux ont plutôt retenu le principe voulant que les clauses conventionnelles doivent être considérées individuellement plutôt que globalement et que pour déterminer si l’une d’elles est plus généreuse qu’une norme, il importe de comparer les dispositions conventionnelles relatives à la condition de travail avec une norme de même nature et ayant le même effet.

[…]

Les dérogations permises aux normes contenues à la Loi sur les normes du travail doivent être interprétées restrictivement. Il appartient à l’employeur de prouver que le traitement qu’il accorde à l’employé, bien que dérogeant à une norme du travail, est plus avantageux que la norme prévue par la Loi. À défaut de faire une telle preuve, l’employeur sera tenu d’accorder au salarié les avantages que lui confère la Loi. [62]  »

 

[529]      Dans l’affaire Middleton, la Cour d’appel a proposé le test suivant :

« Il est clair que les expressions une condition et une norme impliquent que toute comparaison doit être faite par disposition afin de déterminer si l’une est plus avantageuse que l’autre, et non l’une avec l’ensemble des dispositions de l’autre.

L’approche doit comprendre en premier lieu une analyse de la condition de travail pour en déterminer la nature et l’objet et en second lieu une analyse correspondante de la norme que l’on veut remplacer par la condition de travail. On ne pourrait pas comparer une condition d’une certaine nature avec une norme d’une autre nature, non plus que l’on pourrait comparer globalement l’ensemble d’une convention collective avec l’ensemble des normes édictées par la loi, Il faut comparer des choses comparables, c’est-à-dire de même nature et ayant le même objet.

S’il en était autrement, l’employeur pourrait toujours argumenter que les salaires élevés qu’il paie constituent une condition de travail plus avantageuse que n’importe quelle norme ou même que l’ensemble des normes.

[…]

La condition conventionnelle plus avantageuse doit porter sur le même objet et viser la même fin si l’on ne veut pouvoir appliquer la règle « le plus contient le moins ». Autrement, cette appréciation ne serait que subjective et aléatoire. La Cour suprême du Canada reconnut d’ailleurs que l’on ne pourrait, à cette fin, établir un bilan général des conditions de travail garanties à une convention collective pour le comparer à l’ensemble des conditions assurées par voie de décret ou de la loi et établir ainsi si la convention collective est plus avantageuse. [63]  »

 

[530]      Il ressort de cette jurisprudence, que toute exclusion doit être interprétée restrictivement et que l’appréciation d’une condition conventionnelle équivalente ou plus avantageuse à la Loi sur les normes du travail doit se faire en isolant les conditions comparables.

[531]      Toutefois, dans le secteur de l’éducation, certains décideurs ont conclu que la rémunération particulière et spécifique au secteur de l’éducation formait un tout indépendant des normes minimales prévues à la Loi sur les normes du travail, notamment en application de l’article 94 de cette même Loi.

[532]      Il en est ainsi dans Collège Vanier [64] où l’arbitre Fernand Morin conclut que la norme conventionnelle était plus avantageuse considérant le mode de rémunération annuelle des enseignants que celle prévue à la Loi sur les normes du travail   :

Il n'y a pas lieu, pour un arbitre, d'apprécier ni de critiquer les normes conventionnelles des parties. Il nous faut les recevoir et les traiter au besoin à titre de résultats d'une négociation collective par ailleurs relativement complexe et dont les auteurs ne sont nullement des novices ou des profanes en semblable matière.

Lorsque des normes conventionnelles du travail portent sur le même objet que des normes législatives et qu'il en résulte un conflit de droit, l'ordre public social impose de donner préséance à la norme conventionnelle si elle est objectivement plus avantageuse. À cette fin, l'analyse comparative doit s'effectuer en ne considérant que la condition de travail directement visée sans égard aux autres avantages ou désavantages que ces deux actes, la convention collective et la Loi sur les normes du travail, peuvent par ailleurs offrir ou imposer. De plus, une telle comparaison réalisée par l'arbitre devrait se limiter aux seuls éléments réellement conflictuels et ce, par respect de l'autonomie conventionnelle des parties que les articles 62 du Code du travail et 94 de la Loi sur les normes du travail affirment à leur manière respective.

[…]

ii) L'article 94 L.N.T. permet aux parties à la convention collective de rendre plus avantageuse aux salariés telle ou telle norme minimale sans plus. Ce n'est que dans la mesure où la norme conventionnelle est, de fait, expressément et réellement plus avantageuse à ce salarié qu'elle s'impose d'autorité puisqu'il est entendu, selon les articles 93 et 94 L.N.T., que le plus conventionnel peut contenir le moins étatique.

Dès lors, il nous faut conclure que l'application faite par l'Employeur telle que décrite (point 3.2), respecte à notre avis la lettre et l'esprit de la Loi sur les normes du travail. Les articles 55 , 93 et 94 L.N.T. n'imposent nullement que la « semaine normale de travail » pour fin du calcul de la rémunération due suite au temps supplémentaire soit celle de la convention collective, soit trente-cinq (35) heures pour les salariés y assujettis. En ce cas, l'Employeur respecte et la semaine normale de travail » au sens de l'article 52 L.N.T. et le taux habituel majoré de moitié.

Pour retenir la thèse opposée, il nous aurait fallu modifier nous-mêmes cet article 8-2.00 de la convention collective et prêter à l'article 55 L.N.T, un sens qu'il n'a pas, à notre avis du moins et avec respect pour les tenants de l'avis contraire. »

 

[533]      Dans l’affaire Commission scolaire Western Québec [65] , l’arbitre Michel G-Picher décida que la rémunération particulière versée aux enseignants s’opposait à l’application de l’article 57 paragraphe 1 de la Loi sur les normes du travail :

« L'arbitre ne voit pas non plus de dérogement aux dispositions de l'article 57 paragraphe 1 de la "Loi sur les normes du travail". Le salaire annuel que reçoit l'enseignant est clairement fondé sur certaines ententes mutuelles, dont l'obligation de l'enseignant d'être présent à l'école pendant les heures stipulées au-dedans de la convention collective. Qui plus est, il ne semble pas contesté dans le dossier qui nous concerne que les enseignantes et enseignants ne se voient pas refuser la possibilité de s'absenter de l'édifice de l'école, quitte à tenir la direction au courant de leurs activités et de rester disponible au contact, par téléphone ou autrement, si la nécessité se présente. »

 

L’analyse de la preuve à partir de ces paramètres

[534]      D’emblée, soulignons qu’initialement, le Syndicat réclamait par le biais du grief, le temps compris entre deux périodes de tâches éducatives. Toutefois, la preuve soumise a été limitée aux périodes de récréations ou de pauses non assignées. Et, au moment des plaidoiries, le Syndicat a toutefois élargi la portée du grief en référant aux périodes de récréations ou de pauses non assignées et comprises entre deux périodes de travail assignées par l’Employeur. Nous allons donc restreindre le dispositif à la demande qui découle à la fois du libellé du grief et de la preuve, soit aux récréations ou pauses comprises entre deux périodes de tâches éducatives. [66] Soulignons toutefois, que la nature des périodes entourant les récréations ou les pauses, dans la mesure où elles sont assignées n’affectent pas l’appréciation en vertu de l’article 57.1 de la Loi sur les normes du travail .

[535]      Également, comme nous le verrons, la preuve réfère amplement au temps consacré à l’accueil et déplacement des élèves et aux battements fixés à l’horaire. Aux fins d’une meilleure compréhension de la preuve, il y a lieu de rappeler certains paramètres découlant de la convention nationale à cet égard. Ainsi, en vertu de la clause 8-6.01 c) de la convention nationale, la surveillance assurée par l’enseignant pendant l’entrée et la sortie des classes ne fait pas partie de la tâche éducative. Ce temps de surveillance est inclus à la tâche complémentaire de l’enseignant (27 heures). Toutefois, en vertu de la clause 8-6.02 A), le temps de surveillance pendant les récréations est inclus dans la tâche éducative et comptabilisé dans le 27 heures. Enfin, les battements fixés à l’horaire avant ou après les périodes de récréations sont exclus de la tâche éducative (clause 8-6.01 c)) et sont donc comptabilisés dans la tâche complémentaire de l’enseignant (27 heures). [67]

[536]      Soulignons que la preuve démontre également que dans tous les secteurs, les directeurs d’école ont reçu de la Commission des directives claires quant à l’aménagement de la tâche et plus particulièrement, à l’égard des périodes de récréations ou de pauses fixées à l’horaire et non assignées. Ce temps ne devait pas être comptabilisé dans la tâche de l’enseignant. Ainsi, aucune rémunération ne devait être versée à ce titre. Et, cette consigne émise par la Commission a été respectée par les directions d’écoles.

[537]      Autrement, la preuve démontre que l’horaire varie d’une école à l’autre et qu’il est déterminé par la direction de l’école. L’aménagement de la tâche de l’enseignant se fait donc à partir de cet horaire. Enfin, bien que la direction des écoles devrait assigner la tâche à l’enseignant, la preuve démontre que dans les faits, l’enseignant la détermine et la soumet pour approbation à la direction de l’école. L’aménagement de la tâche est convenu entre l’enseignant et la direction de l’école. Et, en l’espèce, quelques enseignants (Mme Dimuzio, M. Hébert, Mme Landry, Mme Nadeau et M. Scuzdi) ont demandé que le temps de récréation non assignée soit comptabilisé (en temps de nature personnelle ou en tâche complémentaire (27 heures), mais leurs demandes ont été refusées,  selon les directives émises par la Commission.

[538]      Aussi, tous les enseignants ont expliqué qu’ils estimaient que le code de vie, le projet éducatif et le plan de réussite adoptés au sein de chaque école font partie intégrante de leurs responsabilités professionnelles et qu’ils devaient l’appliquer en tout temps, même en période de travail non assignée (incluant les récréations et les pauses). Étant inhérentes à leur fonction d’enseignant, les interventions qu’ils exercent à ce titre (intervenir lors d’une bataille ou d’un conflit, faire respecter le code vestimentaire ou corriger un comportement inadéquat) constituent de l’encadrement. [68] Et cet encadrement relève en vertu de la clause 8-6.01 de la convention nationale de la tâche éducative. M. Lambert, Mme Chagnon, M. Robichaud, directeurs d’école sont du même avis. Mme St-Onge de la Commission reconnait également que la Politique relative aux interventions auprès de l’élève en difficulté comportementale et le plan stratégique adoptés par la Commission s’appliquent en tout temps. Elle estime toutefois que les obligations qui découlent de ces politiques ou orientations font appel au professionnalisme des enseignants et ne peuvent être considérées aux fins de la détermination de la tâche et de la rémunération qui en découle, d’autant plus que les interventions des enseignants à ce titre sont très ponctuelles. M. Byette, directeur d’une école secondaire, affirme que les enseignants interviennent quotidiennement auprès des élèves afin de faire respecter le code de vie et ajoute que c’est une question de gros bon sens. Enfin, M. Perreault, enseignant, ajoute que la réussite des élèves est au cœur de sa mission et il comprend qu’il est de sa responsabilité de faire rapport rapidement de tout écart de comportement significatif, même durant les pauses. Il ajoute que la direction rappelle lors des assemblées générales, que les enseignants travaillent pour les étudiants, qu’ils doivent les supporter et les aider et il estime donc que ces interventions au cours de la récréation s’inscrivent à l’intérieur des orientations signifiées par la direction de l’école. M. Laurendeau, directeur d’un Centre de formation professionnelle, estime que le plan de réussite s’intègre à la tâche de l’enseignant.

[539]      Et, la très grande majorité des enseignants ont rapporté qu’ils profitaient des récréations ou des pauses pour échanger avec les professionnels (psychologue, psycho-éducateur, etc.), ne pouvant les consulter pendant leurs périodes libres à l’horaire car ces derniers ne sont pas nécessairement libres à ces moments. Leurs témoignages ont été corroborés par Mme Lara Quévillon, psycho-éducatrice qui œuvre dans le secteur primaire. Elle estime échanger avec des enseignants près de 90 % du temps des récréations. Mme Quévillon précise que des situations surviennent ponctuellement et nécessitent une intervention immédiate, soit le même jour. Et, aucune direction d’école n’a demandé de suspendre les discussions effectuées à l’égard d’une situation particulière pendant les récréations. Mme Raymond, directrice d’une école secondaire, précise qu’elle demandait aux professionnels de demeurer libres pour des consultations ponctuelles auprès des élèves. Toutefois, elle admet qu’il est possible que des échanges aient lieu entre les enseignants et les professionnels durant les récréations et estime que ces démarches étaient couvertes par le forfait de 14 minutes qu’elle allouait.

[540]       Ainsi, bien que les enseignants bénéficient de périodes libres et qu’ils pourraient fixer des rendez-vous avec les professionnels au cours de leurs périodes libres et rémunérées (en dehors des périodes d’enseignement en classe), la réalité est telle, que dans les faits, ils échangent fréquemment avec les professionnels pendant les récréations ou les pauses fixées à l’horaire et ce d’autant plus que dans bien des cas, ces derniers ne viennent que quelques jours par semaine à l’école.

[541]      Dix-huit enseignants œuvrant dans tous les secteurs ont déclaré n’avoir jamais reçu de directive ou de communication de quelque nature que ce soit de la Commission ou de la direction de l’école sur l’utilisation des périodes de récréations ou des pauses alors qu’ils n’étaient pas assignés à de la surveillance. [69] À ces enseignants s’ajoutent Mme Dimuzio et Mme Mongrain. Mme Raymond, directrice de l’école secondaire Arthur-Pigeon, confirme qu’aucune directive particulière à l’égard de l’utilisation du temps de récréation n’a été émise, sauf quant à la surveillance. Toutefois, pour des raisons d’éthique et de confidentialité, la direction exigeait que les enseignants ne discutent pas de cas d’élèves au salon du personnel.

[542]      Enfin, dix-huit enseignants ont déclaré qu’ils estimaient que leurs collègues de travail effectuaient sensiblement le même travail pendant les périodes de récréations. [70]

 

1.         Le secteur primaire

Les enseignants

[543]      Pour ce secteur, dix enseignants, deux directeurs d’école et une professionnelle œuvrant dans dix écoles primaires ont été entendus.

[544]      Pendant les périodes de récréations, Mme Dimuzio exécute des activités qui relèvent de la tâche éducative, à savoir : aide l’élève à terminer son travail, fait reprendre un travail, fournit des explications à un élève qui a de la difficulté avec une matière, discute du comportement d’un élève, écoute et discute avec un élève ayant des problèmes personnels. [71]

[545]      Mme Mongrain ajoute qu’elle devait garder deux à trois fois par semaine en retenue un élève particulièrement turbulent. Mme Schmidt affirme qu’elle devait régulièrement garder un élève affecté du syndrome x fragile pendant les récréations, et ce afin de le calmer ou de l’aider à reprendre des travaux. Mme Brunet note que les périodes de récréations sont utilisées pour faire des répétitions surtout avant le spectacle de Noël. Mme Isabelle note que les récréations sont également utilisées pour préparer des concours oratoires. M. Jazienicki, enseignant en éducation, attend que les élèves se changent et en profite pour souligner la bonne performance de certains élèves. Il revoit certains apprentissages avec certains élèves et prend le temps de regarder de plus près un élève qui s’est blessé pendant le cours. Il demeure sur les lieux afin que les élèves puissent pratiquer des prouesses de cirque et ajoute que ces derniers apprécient ces petits extras.

[546]      Mme Dimuzio consulte les professionnels de l’école. Elle effectue également des tâches diverses qui peuvent relever de la tâche complémentaire ou du temps de nature personnelle, soit : réserve un autobus pour une sortie éducative, discute avec la secrétaire de l’école, fait des photocopies, reproduit du matériel d’enseignement, communique avec un parent, installe du matériel dans la classe (rétroprojecteur, arts plastiques, etc.), change la disposition de la classe. [72]

[547]      Mme Mongrain note qu’elle profitait des récréations pour connaitre les motifs d’absence d’un élève. Mme Schmidt soutient que les enseignants spécialisés profitaient des récréations pour la consulter au sujet de ses élèves ayant des troubles de comportement ou d’apprentissage. Mme Lalonde ajoute que les enseignants en profitent pour échanger sur les projets, leurs méthodes respectives d’enseignement et diverses questions liées à l’horaire ou l’organisation du travail. Mme Brunet qui était responsable de la classification des élèves pour leur passage au secondaire souligne que le seul moment au cours duquel elle pouvait échanger à ce sujet avec les enseignants de cinquième année était la période de récréation. Elle souligne que cette appréciation se fait sur plusieurs mois. Mme Brunet précise que le seul temps pour retourner des appels de parents les lundis et jeudis correspondait aux récréations. Elle utilise également les périodes de récréations pour accueillir des visiteurs. M. Daoust-Charest profite de cette période pour échanger avec l’autre enseignant du même niveau. Mme Isabelle profite des récréations pour faire de la rétroaction auprès des stagiaires dans sa classe. Elle échange également avec les enseignants spécialisés qui ne sont pas disponibles en même temps qu’elle. Mme Isabelle avise le concierge d’un bris de matériel pendant les récréations ou encore elle lui demande de nettoyer un casier dans lequel un jus a coulé. Elle décore la classe pour les fêtes. M. Jazienicki avise le concierge des bris de matériel au gymnase et profite de ce temps pour récupérer du matériel livré. Il place le matériel requis pour les cours à venir. Mme Dupuis décore également la classe pendant les récréations et prépare du matériel pour souligner la fête d’un élève. Elle devait régulièrement échanger avec la technicienne spécialisée en trouble de comportement notamment au sujet d’un élève qui souffrait d’autisme et d’un trouble anxieux. Elle précise que la plupart des crises ou des conflits requièrent une intervention immédiate et qu’elle ne pouvait les reporter à une période de disponibilité prévue à l’horaire.

[548]      Mme Dimuzio rencontre également le directeur de l’école pour discuter de sujets divers. Elle rencontre également des parents dans le cadre des plans d’intervention des élèves de sa classe. Mme Dimuzio ajoute que M. Lambert, le directeur de son école, vient fréquemment chercher un enseignant au salon des enseignants pendant les récréations. Mme Brunet souligne également que les rencontres relatives aux plans d’intervention empiètent souvent sur les récréations et admet que la direction de l’école lui a offert de reprendre ce temps.

[549]      M. Hébert soutient également que le directeur de l’école partage son temps entre deux écoles et profite des récréations pour discuter avec les enseignants. Il ajoute que les rencontres relatives aux plans d’intervention pouvaient empiéter sur le temps des récréations. Mme Mongrain affirme que la direction de l’école la convoque durant les périodes de récréations au moins une fois par semaine et régulièrement, elle doit gérer une question disciplinaire avec le directeur de l’école.

[550]      Mme Schmidt affirme que la direction de l’école demandait aux enseignants de prendre régulièrement les messages laissés dans leur pigeonnier et notamment, durant les récréations. Elle ajoute que les vendredis, le seul moment pour ce faire était la période de récréation. La direction la convoquait au moins une fois par semaine pour discuter d’affaires courantes. Enfin, la direction faisait des rappels à tous au moins aux deux semaines.

[551]      Mme Lalonde discute régulièrement avec la direction des écoles des plans d’intervention des élèves pendant les récréations et ajoute que la direction partageait son temps avec une autre école. Elle reconnait avoir rencontré la direction de l’école pendant ses périodes libres.

[552]      Mme Brunet rencontre régulièrement la direction de son école pendant l’heure du diner ou les récréations et qui, de surcroit, partage son temps entre deux écoles.

[553]      M. Daoust-Charest note que la direction de l’école distribuait une feuille de chou en début de semaine et les enseignants la lisaient pendant la récréation. À l’occasion, la direction le convoque pour discuter d’un plan d’intervention ou d’un projet ou pour fixer un rendez-vous.

[554]      Mme Isabelle rencontre la direction de l’école lors de cas qu’elle juge pressants et principalement au sujet d’élèves turbulents et susceptibles de perturber la classe. Elle ajoute que la direction profite des récréations pour diffuser des messages.

[555]      M. Jazienicki discute de cas turbulents avec la direction pendant les récréations et précise que ces périodes libres servaient à se déplacer entre les deux écoles.

[556]      M. Jazienicki, enseignant d’éducation physique dans deux écoles primaires, rapporte que dans les deux écoles la période de récréation était suivie d’un battement de deux minutes et demie à trois minutes. Il estime la durée de ces battements insuffisante.

[557]      Mme Dupuis rencontre régulièrement la direction de l’école au sujet de problèmes de comportement.

[558]      Mme Dimuzio n’a jamais été informée par la direction de l’école que les périodes de récréation constituaient du temps qui lui appartenait et qu’elle était en conséquence libre de faire ce qu’elle désirait.

[559]      À son école, la période de récréation était suivie d’un battement de cinq minutes et ce temps était comptabilisé dans sa tâche complémentaire (27 heures). Mme Dimuzio, enseignante en quatrième année, explique que la cloche sonnait au début de la période de récréation à 9 h 45 et elle devait demeurer avec les élèves pendant qu’ils s’habillaient pour aller à l’extérieur. Elle exécutait le même travail au retour de la récréation à 10 h. Toutefois, après la récréation, ce travail était reconnu (battement de cinq minutes).

[560]      M. Hébert, enseignant en cinquième année, soutient également qu’il y avait un battement de cinq minutes entre la récréation du matin et la période d’enseignement qui suit. Ce temps était reconnu dans le temps d’accueil et de déplacement, et ce au même titre que les autres battements à l’horaire, soit : 3 minutes de 8 h à 8 h 03, 5 minutes de 12 h 45 à 12 h 50 et 5 minutes de 14 h 25 à 14 h 30. Il devait rester avec les élèves jusqu’à ce qu’ils soient prêts à aller dehors. Le temps de préparation varie grandement en fonction des saisons et peut atteindre 5 minutes l’hiver.

[561]      Mme Mongrain croit qu’il y avait des battements avant et après les deux récréations. Elle estime que le temps nécessaire pour se préparer varie de 5 à 10 minutes et ajoute que la motivation des élèves influence grandement le temps de préparation.

[562]      Mme Schmidt, enseignante de troisième année, affirme que la récréation du matin est précédée et suivie d’un battement de cinq minutes. Elle estime que le temps de préparation jusqu’à la porte de l’école varie de sept à huit minutes.

[563]      Mme Lalonde, enseignante de première année, soutient qu’il y avait deux battements de deux ou trois minutes avant et après les récréations. Toutefois, elle soutient que ce temps était insuffisant. Elle évalue ce temps de préparation de cinq à huit minutes tout en précisant que ce temps varie en fonction des saisons.

[564]      Mme Brunet, enseignante en sixième année, rapporte que la récréation du matin était précédée d’un battement de deux minutes et suivie d’un battement de trois minutes. Elle estime que la durée des battements était insuffisante surtout en hiver.

[565]      M. Daoust-Charest, enseignant en troisième année, déclare que la récréation du matin était suivie d’un battement de cinq minutes. Au cours de cette période, les élèves se placent en rang, se dirigent vers leurs classes et se déshabillent. À son avis, la durée est suffisante en été mais pas en hiver. Il précise que le processus est le même avant la récréation.

[566]      Mme Isabelle, enseignante en sixième année, affirme que la récréation du matin était précédée d’un battement de deux minutes et suivie d’un battement de cinq minutes. Elle admet avoir commencé à l’occasion le battement de deux minutes avant le début prévu à l’horaire. Elle estime que la durée du battement est insuffisante surtout en hiver.

[567]      Mme Dupuis affirme qu’il y avait deux récréations par jour et ces dernières étaient suivies d’un battement de cinq minutes. Elle estime la durée des battements insuffisante, devant intervenir régulièrement auprès des élèves pendant ces périodes. Elle admet que la direction d’école acceptait surtout en hiver, que les enseignants empiètent sur le temps d’enseignement pour préparer les élèves aux périodes de récréation.

[568]      Mme Dimuzio estime être toujours à la disposition de l’école pendant les périodes de récréation et évalue à 75 % le temps qu’elle consacre à des activités professionnelles pendant les périodes de récréations. M. Hébert évalue ce temps entre 70 à 80 %. Mme Mongrain soutient consacrer trois à quatre récréations par semaine à des fins professionnelles. Mme Schmidt évalue à 75 % du temps des récréations consacré à des activités professionnelles et ajoute que l’engagement d’un enseignant débute du moment qu’il met les pieds dans l’école et se termine à la sortie. Mme Lalonde affirme consacrer les trois quarts du temps de récréation à des interventions auprès des élèves. Elle ajoute que le temps de disponibilité ou de nature personnelle ne suffit pas et qu’elle doit empiéter sur les périodes de récréation. Mme Brunet consacre 75 % de son temps de récréation à des activités professionnelles. M. Daoust-Charest consacre 40 % du temps de récréation à des fins professionnelles. Mme Isabelle travaille 75 % du temps de récréation. M. Jazienicki estime à 60 % le temps qu’il travaille pendant les récréations. Mme Dupuis estime à 75 % le temps des récréations qu’elle réserve à des activités professionnelles.

[569]      Mme Brunet admet bénéficier d’une certaine autonomie professionnelle et très occasionnellement avec la permission de la direction de l’école, avoir quitté plus tôt. Elle devait toutefois, reprendre ce temps. M. Daoust-Charest admet également que l’horaire était appliqué avec souplesse et conformément à la convention collective, sujet à un préavis de 24 heures, la direction autorisait ses demandes de réaménagement du temps de travail.

[570]      Mme Isabelle admet que 400 minutes étaient reconnues à son horaire aux fins de l’organisation des sorties scolaires, dont le voyage à Ottawa. Et, quant aux rencontres concernant les plans d’intervention, elle souligne que certaines devaient être fixées pendant ses heures de classe et qu’une suppléante devait être embauchée. Par ailleurs, elle admet qu’elle peut rencontrer certains enseignants pendant ses périodes de disponibilité.

[571]      Mme Dupuis admet que le temps qu’elle allouait au comité des fêtes de l’Halloween ou de Noël l’était sur une base volontaire et bénévole. Elle précise par ailleurs, qu’elle devait computer son temps et le répartir en fonction de ses engagements. Elle estime cependant, que dans les faits, elle dépassait toujours le temps prévu et particulièrement sur le temps de récréation. Enfin, elle admet que la direction de l’école l’a autorisée à quitter une fois l’école plus tôt.

 

Les directeurs d’école

[572]      M. Lambert, directeur d’école reconnait qu’il profite des périodes de récréations pour faire des rappels auprès des enseignants. Il admet que les enseignants peuvent être appelés à s’occuper d’un élève blessé et ce comme la secrétaire ou le directeur de l’école. Enfin, il reconnait qu’il est appelé à gérer des questions disciplinaires pendant ces périodes de temps.

[573]      Mme Chagnon admet que les directions d’école se sont entendues pour ne reconnaitre aucun temps durant les récréations à l’exception de la surveillance assignée. Et, malgré ces directives, elle admet que les enseignants travaillaient et travaillent toujours pendant les récréations. Elle admet que des enseignants d’éducation physique peuvent être appelés à déplacer du matériel pendant les récréations ou les battements.

[574]      Mme Chagnon précise qu’elle ne pouvait fixer un battement avant le début de la récréation du matin et ce en raison de diverses contraintes liées à l’organisation scolaire. Autrement, elle se souvient d’un cas où un enseignant a demandé de quitter plus tôt.

[575]      Mme Chagnon exigeait que les enseignants ne discutent pas des cas d’élèves pendant les récréations notamment à des fins de confidentialité. Elle reconnait toutefois qu’il n’y avait pas de consigne interdisant aux enseignants de discuter des cours, d’activités pédagogiques ou extérieures ou des examens. Elle n’empêchait pas un enseignant de garder en retenue un élève afin qu’il puisse compléter un travail mais pouvait le faire à l’occasion. Enfin, elle soutient que les enseignants se rendent peu souvent à son bureau pendant les récréations pour régler des questions disciplinaires.

 

2.         Le secteur secondaire

[576]      Pour ce secteur, neuf enseignants œuvrant au sein de six écoles et deux directeurs d’école ont été entendus.

[577]      M. Bribeau enseigne la géographie et l’histoire en cinquième et sixième secondaire. Il se rend habituellement au salon du personnel pendant la pause. M. Lafontaire, enseignant en éducation physique, demeure au bureau situé près du gymnase car le local des enseignants est situé trop loin. M. Thibaudeau, enseignant en histoire, demeurait dans son local de classe n’ayant pas assez de temps pour se déplacer pendant les récréations et en profitait pour remplir des formulaires comme celui des absences.

[578]      Pendant les récréations, ils exécutent diverses activités qui relèvent de la tâche éducative telle que : régler des problèmes de discipline avec un étudiant turbulent, faire compléter un travail, écouter les confidences d’un élève. [73]

[579]      M. Campbell, enseignant en histoire et en morale, ajoute que les étudiants ne se dirigent pas nécessairement vers l’extérieur. Certains se confient et partagent leur peine d’amour. Il doit également inscrire des notes à l’agenda afin que le titulaire de l’élève puisse faire le suivi approprié. Il estime que les élèves posent fréquemment des questions et plus particulièrement, pendant les périodes d’examens. M. Quenneville souligne qu’il doit fréquemment intervenir auprès des élèves dans le corridor. Il répond aux questions posées par les élèves alors qu’il est en déplacement.

[580]       M. Jalbert, enseignant en informatique et en cuisine, rapporte qu’il demeure en classe le temps que les élèves ferment les ordinateurs et demande aux élèves d’imprimer le travail effectué en classe et le temps requis à cette fin déborde presque toujours sur la période de récréation. Dans le cadre du cours de cuisine, la classe doit être remise en état et cette activité empiète sur la période de récréation. Comme d’autres enseignants, il garde en retenue un élève qui a fait perdre du temps au groupe. En déplacement, il fait de courtes interventions auprès des élèves. M. Jalbert explique ne pas avoir de temps réservé pour échanger avec les tuteurs au sujet des comportements des élèves sous leur gouvernent et les enseignants utilisent les récréations à cette fin.

[581]      M. Vallée, tuteur d’élèves, vérifie qu’un élève assigné au local retrait y soit et que les bons motifs sont notés et en cas de non-respect des consignes, il avise la direction. Il profite également de ces périodes pour vérifier les feuilles de route des élèves. M. Vallée précise que les examens du ministère empiètent toujours sur le temps des récréations. M. Byette, directeur d’école, soutient que la gestion des feuilles de route des élèves était reconnue en temps de tutorat et comptabilisée dans la tâche éducative.

[582]      Mme Picard, enseignante dans un programme international, organise bénévolement plusieurs voyages et sorties et elle doit répondre régulièrement à des questions posées à cet effet par les élèves. Ces derniers en profitent également pour échanger sur le développement de leur projet personnel qu’ils doivent soumettre aux fins de l’obtention de leur diplôme. En 2004-2005, Mme Picard a accompagné une élève affectée par une altercation survenue à l’école chez la psychologue de l’école, estimant qu’elle ne pouvait l’abandonner. En contre-interrogatoire, elle confirme que la direction de l’école était au courant de la situation.

[583]      M. Perreault précise qu’il est important de répondre rapidement aux questions posées par les élèves ne sachant quand ce sera possible dans un avenir rapproché. Il fixe également des rendez-vous pour la reprise d’examens pendant les récréations. M. Perreault enseigne des cours technologiques et affirme qu’il est plus facile de placer une classe à la fin des cours alors que le local est vide. Il ajoute que la porte du local qu’il partageait avec d’autres enseignants était toujours ouverte et des étudiants se présentaient pour poser des questions.

[584]      M. Thibaudeau, enseignant en histoire, organise des voyages en Égypte et en Normandie. Les élèves le questionnent régulièrement à ce sujet pendant les récréations et aucun temps n’est reconnu à cet effet.

[585]      M. Bribeau effectue également diverses tâches complémentaires comme : accompagne un élève blessé au secrétariat, échange avec des enseignants spécialisés sur des élèves dont il est titulaire et surtout à l’égard des élèves ayant des problèmes de comportement, prend les messages des parents, prend ses messages dans le pigeonnier, organise des activités scolaires (appelle les fournisseurs), retourne les appels des parents, place la vidéo ou le téléviseur, fait des photocopies au secrétariat, vérifie les motifs d’absences des élèves. [74]

[586]      M. Campbell ajoute qu’il profitait de ces périodes pour conseiller une collègue moins expérimentée. M. Lafontaine précise qu’il demeure sur les lieux afin de s’assurer qu’il n’y ait pas de vandalisme, ni de conflits ou d’intimidation. M. Lafontaine profite également des pauses pour prendre possession du plateau requis pour les prochains cours ou pour remplir les agendas. Étant impliqué dans l’organisation de plusieurs activités sportives parascolaires, il est souvent questionné à ce sujet par les élèves. Il ajoute que le temps reconnu à cette fin ne couvre jamais tout le temps investi. M. Quenneville, enseignant en géographie, profite de ces pauses pour écrire des notes à l’agenda et liées au programme de tutorat. M. Quenneville affirme que les enseignants appartenant à une même famille discutent afin de s’harmoniser.

[587]      M. Jalbert supervise la coopérative étudiante et il doit fréquemment s’y rendre pendant les récréations pour déverrouiller le cadenas défectueux. M. Jalbert profite des récréations pour aménager les locaux d’informatique et de cuisine. M. Vallée, enseignant en mathématiques, précise qu’ils étaient trois enseignants en mathématiques en secondaire II et s’il n’était pas en classe, inévitablement les deux autres l’étaient. Ainsi, ils profitaient des récréations pour échanger. Il ajoute que les professionnels et les enseignants du même niveau avaient un local réservé et ils échangeaient pendant la récréation. Il se rendait rarement au salon du personnel. Enfin, s’il devait se déplacer du bloc C au bloc A, il ne pouvait demeurer au local que cinq minutes. Il choisissait alors de demeurer en classe afin de souffler. Mme Picard précise qu’elle offre un enseignement vertical et horizontal et échange avec les autres enseignants impliqués dans cette dynamique pendant les récréations, les journées pédagogiques n’étant pas suffisantes. Ils discutent également des élèves plus fragiles. M. Thibaudeau, enseignant à la même école que Mme Picard confirme la tenue de ces rencontres ou échanges pendant les récréations. M. Thibaudeau intègre des questions d’actualité dans ses cours et il doit régulièrement photocopier du matériel.

[588]      M. Brouillette profite du temps de récréations pour renouveler le matériel périssable distribué parmi les douze stations du laboratoire. Et, vu la taille de l’école (une centaine d’élèves), les enseignants sont régulièrement sollicités pendant les récréations comme pour assister un élève blessé.

[589]      M. Bribeau rencontre la direction afin de faire un suivi disciplinaire de certains élèves ou pour leur imposer une tâche punitive. Il discute d’achat de matériel ou de sorties avec la direction. Il estime échanger avec la direction durant les pauses une à deux fois par semaine. M. Campbell affirme également qu’il rencontrait régulièrement la direction afin de discuter des cas disciplinaires. Il se présentait également pour donner suite à un appel logé par intercom.

[590]      M. Lafontaine doit à l’occasion se rendre à la direction, et ce à la demande de cette dernière, notamment pour remplir des formulaires ou répondre à un appel placé par un parent. M. Quenneville affirme qu’à la demande de la direction, il fait rapport de toute situation disciplinaire urgente incluant les cas d’expulsions le plus tôt possible, et profite des récréations pour ce faire. Au besoin, M. Jalbert conduit un élève ayant eu un problème de comportement à la direction. Mme Raymond, directrice d’école, reconnait que M. Jalbert la rencontrait pendant les récréations pour rendre des comptes sur les finances de la coopérative ou pour discuter de projets. M. Thibaudeau affirme que la direction le convoque à des rencontres fixées pendant les récréations.

[591]      M. Bribeau reconnait qu’il y a un battement de cinq minutes avant la pause de récréation, mais ajoute que ce temps n’est pas suffisant surtout en hiver. M. Campbell note que les deux récréations sont suivies d’un battement d’une durée de cinq minutes. Ce temps est comptabilisé dans la tâche de l’enseignant (27 heures). M. Vallée précise qu’il devait être en classe au début du battement de cinq minutes qui suivait immédiatement la fin de la récréation. Mme Picard affirme qu’elle était à la porte de sa classe au début du battement de cinq minutes et accueille les élèves.

[592]      M. Brouillette, enseignant en biologie et chimie, rapporte que la durée des battements était de deux minutes et demie. Chaque récréation était précédée et suivie d’un battement. En contre-interrogatoire, il admet qu’il devait vider les corridors pendant ces battements tout en ajoutant qu’il y a toujours des « champions des casiers ».

[593]      M. Bribeau admet avoir rencontré la direction, des parents ou des spécialistes pendant ces périodes libres dans la mesure où les disponibilités de tous convergent. Enfin, il soutient n’avoir jamais utilisé du temps de nature personnelle ou de disponibilité à des fins personnelles. M. Byette, directeur d’école, regardait l’horaire d’un enseignant et tentait de le voir pendant ces périodes libres.

[594]      M. Quenneville admet que du temps était réservé à l’horaire afin que les enseignants de la même famille puissent se réunir. Il admet également bénéficier d’une certaine autonomie et ajoute qu’il doit cependant respecter les balises de temps indiquées à son horaire. M. Jalbert admet que du temps est reconnu aux fins des activités, dont la coopérative. Il précise qu’il doit respecter l’horaire et s’il est en retard ou omet de se présenter, il y a des conséquences.

[595]      M. Thibaudeau admet qu’il organise volontairement des voyages et souligne que ces voyages sont planifiés dans l’intérêt premier des élèves et que la direction de l’école est au courant. Il admet également disposer de son temps de disponibilité comme bon lui semble. M. Brouillette admet que du temps était reconnu pour l’organisation des voyages, mais ce temps ne couvrait pas tout le temps investi. Enfin, tout en étant plutôt autonome dans son travail, M. Brouillette soutient que la direction vérifiait régulièrement ce qu’il faisait.

[596]      M. Bribeau estime travailler trois récréations sur quatre. M. Campbell évalue à 80 % le temps de récréation réservé à des fins professionnelles. M. Lafontaine évalue ce temps également à 75 %. M. Quenneville estime aussi ce temps à 75 %. M. Jalbert soutient consacrer 70 % du temps des récréations à des activités professionnelles. M. Vallée évalue ce temps à 50 % et ajoute que ça prend cinq minutes, juste pour se rendre à sa voiture, ainsi lorsqu’il prend une pause, il s’arrête au plus cinq minutes. Mme Picard travaille 90 % du temps de récréation. Et, M. Thibaudeau travaille 70 % du temps de récréation. M. Perreault consacre 75 % à 80 % du temps de récréation à des activités professionnelles. M. Brouillette estime aussi ce temps à 80 %.

 

La direction

[597]      À compter de l’année 1993, Mme Raymond a été directrice de l’école Arthur-Pigeon jusqu’à sa retraite. Elle a assisté aux réunions entourant l’aménagement de la tâche des enseignants dirigé par la Commission. Il fut convenu que le temps de récréation ne pouvait être comptabilisé comme du temps de nature personnelle ou du temps assigné à moins que le temps de récréation ne suive une période libre. Ainsi, si un enseignant avait une période libre de 75 minutes avant la récréation, 90 minutes pouvaient être reconnues.

[598]      M. Byette, directeur de l’école secondaire des Patriotes-de-Beauharbois, a été directeur de 2004 à 2013 et est aujourd’hui retraité. Il corrobore dans son ensemble le témoignage de Mme Raymond à l’égard des directives émises par la Commission mais ajoute que les écoles ont uniformisé le temps alloué aux battements entourant notamment les récréations, pour les réduire uniformément de 10 minutes à 5 minutes. Lors de ces rencontres, les directeurs ont découvert que certains reconnaissaient du temps pendant les récréations. Mme St-Onge a conseillé de cesser cette pratique. Enfin, les directeurs se sont également entendus sur des balises de temps à octroyer pour des activités étudiantes.

[599]      M. Byette reconnait en contre-interrogatoire, que les battements entre les cours ont été réduits à compter de l’année scolaire 2005-2006. Il précise que le battement après un cours devait servir à répondre aux questions des élèves, à vider les lieux et il estime que ce temps était suffisant. Par ailleurs, il admet que le travail des enseignants n’a pas changé au cours de toutes ces années et que des élèves devaient surement consulter Mme Picard ou M. Thibaudeau après les classes.

[600]      Quant aux battements fixés à la fin des récréations, Mme Raymond demandait aux enseignants d’être présents en classe au début du battement. Elle exigeait que les enseignants se dirigent vers leur local dès que la cloche sonnait. Elle reconnaissait 14 minutes pour les déplacements entre les cours.

[601]      Mme Raymond précise que le battement de 14 minutes reconnu à chaque jour comprend le temps de déplacement des enseignants dans les corridors puisque ces derniers peuvent être appelés à intervenir. En contre-interrogatoire, elle ajoute que les 14 minutes comprennent les 5 minutes d’accueil après la récréation et la balance de 9 minutes couvre le temps écoulé entre deux classes. Elle estime qu’un forfait de 14 minutes par jour est raisonnable.

[602]      Elle confirme que la direction n’avait pas émis de directive enjoignant aux enseignants de ne pas répondre aux questions des élèves à la fin des cours ou au début de la période de récréation. Au contraire, en tant que directrice d’école, elle s’attendait à ce qu’ils répondent. Elle admet également que les enseignants doivent écouter les soucis des élèves. À son avis, une telle écoute fait partie de la présence attendue d’un enseignant, de sa profession et ne constitue pas du bénévolat. Elle estime que ce temps est reconnu dans le forfait de 14 minutes.

[603]      Mme Raymond admet qu’elle pouvait rencontrer un enseignant pendant les récréations notamment pour placer un appel auprès d’un parent et précise que la direction et les enseignants n’étaient pas régis par les cloches et que la direction d’école n’avait pas de budget pour compenser le temps que les enseignants exécutaient en dehors de leur tâche. Enfin, elle essayait de compenser pendant les périodes d’examens. Elle admet que les enseignants faisaient des suivis d’absences pendant les récréations. M. Byette reconnait qu’il voyait régulièrement des enseignants prendre possession de leurs messages dans le pigeonnier pendant les récréations.

[604]      Mme Raymond reconnaissait également 54 ou 60 minutes à chaque deux semaines afin que les enseignants d’un même niveau puissent se rencontrer. Elle ajoute que ces rencontres sont importantes. M. Byette demandait aux enseignants de réserver du temps de disponibilité à des fins spécifiques comme pour des rencontres d’enseignants de même niveau, des réunions en cheminement particulier, des échanges sur la réforme, pour le tutorat, etc.

[605]      Comme les autres directeurs, Mme Raymond tenait compte du temps requis par chaque enseignant dans l’organisation d’activités étudiantes. Elle donne en exemple, M. Bourdeau qui organisait un voyage en France. Elle reconnaissait 50 heures sur une base annuelle et ajoute que ce temps ne couvrait pas tout le temps investi, le surplus constituant du bénévolat.

[606]      Mme Raymond appliquait avec souplesse les horaires des enseignants et essayait de prévoir une période libre par jour à l’horaire de chaque enseignant. M. Byette affirme qu’il est impossible d’encadrer la tâche d’un enseignant au secondaire et qu’il devait faire confiance aux enseignants. Il appliquait l’horaire avec souplesse tout en exigeant d’être avisé lors d’un changement.

[607]      M. Byette confirme que les enseignants font des photocopies pendant les récréations. Tout comme, il est possible que l’enseignant en éducation physique ait besoin de changer le plateau pendant ces périodes.

[608]      M. Byette précise que si une rencontre de parents empiétait sur la récréation, il ajustait l’horaire de l’enseignant.

3.         Le secteur de l’éducation des adultes

[609]      Pour ce secteur, deux enseignants ont témoigné (M. Scuzdi et Mme Louise St-Germain) et un directeur d’école (M. Robichaud).

[610]      Mme St-Germain occupe pendant l’année scolaire 2004-2005, deux fonctions. Elle enseigne le français et occupe temporairement le poste de directrice adjointe une partie de l’année au Centre Jean-XXIII.

[611]      M. Scuzdi partage son temps entre deux écoles, la Nouvelle-École et le Centre Jean-XXIII. L’âge moyen des élèves à la Nouvelle-École est de 17 à 18 ans et au Centre Jean-XXIII, de 21 à 22 ans. Deux pauses par jour étaient fixées à l’horaire et ce temps de pause n’était pas comptabilisé dans sa tâche.

[612]      Pendant les pauses, M. Scuzdi exécute différentes tâches éducatives, dont celles-ci : rencontre des élèves qui ont des problèmes de compréhension avec la matière, discute avec des élèves qui vivent des conflits ou de l’abus, répond aux questions posées par les élèves plus timides, écoute les élèves qui ont des problèmes de consommation de drogues, fait du tutorat (en surplus du temps reconnu). Mme St-Germain effectue essentiellement les mêmes tâches, mais précise discuter de l’état d’avancement d’un élève pendant les pauses, ces derniers progressant à leur propre rythme. Si un élève perd le contrôle pendant le cours, elle le retient pour discuter pendant la pause. Elle révise une matière avec un élève avant qu’il ne subisse son examen dans les heures qui suivent.

[613]      M. Scuzdi effectue également des tâches diverses comme : échange avec des collègues au sujet des élèves, échange sur les sorties, avise le concierge d’un bris, accueille des personnes qui viennent faire des présentations. Il rencontre également la direction, à sa demande, pour discuter des budgets, des examens, de cas d’élèves ou de commandes de livres. La direction se déplace même à son local pour discuter avec lui. Mme St-Germain ajoute qu’elle profite des pauses pour faire des photocopies d’une matière enseignée ultérieurement mais non comprise.

[614]      Mme St-Germain note que la clientèle a des problèmes de comportement et que les enseignants doivent intervenir régulièrement dans les corridors. Les enseignants ont également besoin d’échanger régulièrement sur le profil des élèves. Elle appelle des parents, et ce à la demande parfois de la direction. Elle profite des pauses pour communiquer avec le Centre local d’emploi qui fournit le tiers de la clientèle du Centre Jean-XXIII.

[615]      Mme St-Germain rencontre à l’occasion la direction pour discuter des cas d’élèves.

[616]      M. Scuzdi estime que les pauses font partie intégrante de son travail et précise que « les enseignants ne disent pas, la cloche a sonné, j’arrête ». Il estime travailler 90 % du temps de pause. En contre-interrogatoire, il reconnait qu’il participait bénévolement à l’organisation d’un voyage de ski. Mme St-Germain estime consacrer 75 % du temps des pauses à des fins professionnelles tout en rappelant qu’elle est professionnelle et ne compte pas son temps. Enfin, elle ne se souvient pas de s’être assise pendant une pause même qu’elle doit parfois se cacher pour pouvoir récupérer. Elle demeure présente dans sa classe et ajoute que les enseignants prennent souvent la pause avec les étudiants.

[617]      M. Robichaud, directeur d’école, a intégré des battements à l’horaire. Il voulait que les enseignants saisissent ce temps pour accueillir les étudiants et développer des liens. Il ajoute que l’établissement de liens est important d’autant plus que la majorité de la clientèle éprouve des difficultés ou des problèmes personnels. Les battements placés en après-midi devaient également servir à répondre aux questions posées par les élèves. Il ajoute que ce n’est pas parce qu’un cours est terminé que tout est pour autant fini. Les enseignants doivent demeurer en classe pour répondre aux questions des élèves. Ainsi, les battements étaient inclus dans la tâche complémentaire.

[618]      M. Robichaud soutient que les enseignants se rendent au salon du personnel pendant les pauses et ont rarement des contacts avec la direction. Toutefois, des situations particulières peuvent nécessiter une intervention immédiate. Enfin, au quotidien, il y a habituellement au moins un enseignant au bureau de la direction pendant les pauses. Il gérait avec souplesse les horaires et faisait confiance aux enseignants.

 

4.         Le secteur de la formation professionnelle

[619]      Une enseignante a témoigné, Mme Johanne Boucher et les parties ont admis que si Mme De Repentigny était venue témoigner, son témoignage aurait essentiellement été le même que celui rendu par Mme Boucher. Comme directeur d’un centre de formation professionnelle, M. Laurendeau a exposé la perspective patronale.

[620]      Mme Boucher estime que la surveillance des élèves pendant les pauses est implicite puisque les enseignants demeurent responsables de ces derniers.

[621]      Au Centre de formation professionnelle, aucune cloche n’annonce le début de la pause. Ainsi, les élèves demeurent en classe et jasent de leur stage en milieu de travail ou d’une problématique particulière à l’égard de la matière enseignée.

[622]      Puisque plusieurs jours peuvent s’écouler avant qu’elle ne voie à nouveau un élève, Mme Boucher s’assure de fournir à un élève qui a manqué un cours le matériel et prend le temps des pauses pour ce faire. Elle fixe des périodes de récupération avec des élèves pendant les pauses. Elle installe le projecteur. Étant expérimentée (36 années d’expérience), ses collègues la consultent régulièrement pendant les pauses. Elle complète les cahiers d’absences, signe des documents au secrétariat, prend ses messages, retourne des appels notamment auprès des employeurs qui ont retenu des stagiaires. Elle retourne les appels des parents le même jour.

[623]      Mme Boucher soutient que le directeur adjoint de l’école se rendait souvent au salon du personnel pour discuter d’affaires courantes. Enfin, elle consacre 90 % du temps des pauses à des activités professionnelles.

[624]      M. Laurendeau, directeur d’école, explique que l’adoption d’un code de vie et d’un plan de réussite a entrainé l’embauche d’un plus grand nombre d’enseignants, lesdits codes favorisant la récupération et l’encadrement. Il souligne qu’il n’y a pas de récréations en formation professionnelle mais des pauses.

[625]      M. Laurendeau estime que la très grande majorité des élèves se dirigent vers la cafétéria pendant les pauses ou vont fumer à l’extérieur. Il ajoute qu’il n’y a pas de récupération pendant les pauses et si un cours empiète sur le temps des pauses, comme en coiffure, l’horaire de l’enseignant est ajusté en conséquence.

[626]      En contre-interrogatoire, M. Laurendeau admet que les enseignants bénéficient d’une grande souplesse dans l’aménagement de leur tâche qui est toutefois tributaire de l’horaire des cours. Il admet qu’il est important de développer des liens avec les étudiants et qu’il est possible que des élèves posent des questions pendant les pauses. Tout comme il est possible qu’un enseignant intervienne auprès d’un élève alors qu’il est en déplacement dans le centre.

 

Constats qui se dégagent de la preuve et conclusion

[627]      Il ressort de la preuve et du résumé (paragraphes 534 à 626) que dans l’ensemble, les enseignants travaillent pendant les récréations ou les pauses des élèves. Les vingt et un enseignants entendus ont tous expliqué les interventions diversifiées qu’ils exécutent pendant ces périodes. En moyenne, ces derniers estiment travailler plus de cinquante pour cent du temps réservé aux récréations ou aux pauses et même que la très grande majorité évalue ce temps à soixante et quinze pour cent ou plus. Les directeurs d’école ont même corroborés le témoignage des enseignants. La preuve est éloquente : les enseignants de tous les secteurs travaillent la majorité du temps pendant les récréations ou les pauses. Ils travaillent à la connaissance des directeurs d’école et parfois même à la demande explicite ou implicite de ces derniers.

[628]      Toutes ces interventions exercées par les enseignants pendant les récréations ou les pauses des élèves constituent-elles des initiatives personnelles ou découlent-elles de la fonction inhérente de tout enseignant et pour laquelle il est rémunéré ? Constituent-elles, du point de vue de l’organisation du travail, du temps travaillé en vertu du paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes ?

[629]      De prime abord, il est important de rappeler que la durée et le moment de la prise des récréations et des pauses des élèves sont déterminés par les directions des écoles dans les horaires de chaque école. [75] La fixation et la détermination des récréations et des pauses à l’horaire de l’école relèvent de la discrétion de chaque direction d’école. Et, ces périodes se situent habituellement au milieu de l’avant-midi ou de l’après-midi. Ces dernières s’inscrivent dans le cadre de la journée (de l’amplitude quotidienne de huit heures) et de la semaine de travail de l’enseignant. Ainsi, à moins d’être libéré au cours de la période qui suit la récréation ou la pause des élèves, l’enseignant doit demeurer sur les lieux pendant ces périodes d’autant plus que lesdites périodes sont de courtes durées (en moyenne dix à quinze minutes). Même que dans bien des cas, l’enseignant doit assurer le battement qui précède ou suit la récréation ou la pause.  

[630]      Toutefois, aux fins de l’application de la convention nationale, au cours de ces périodes de temps dites non assignées, les enseignants sont considérés libres. La consigne émise par la Commission est claire. Le temps des récréations ou des pauses ne peut être comptabilisé dans l’aménagement de la tâche de tout enseignant à moins qu’il ne soit assigné à de la surveillance. Ainsi, toutes et chacune de ces périodes de temps non assignées ne sont pas rémunérées. Somme toute, l’interprétation des dispositions de la convention nationale aux fins de l’aménagement de la tâche et de la rémunération retenue et émise par la Commission est claire, mais peut-on en dire autant quant aux consignes entourant l’organisation du travail ? Sur le terrain, les consignes sont-elles aussi claires ou même congruentes ?

[631]      À ce jour, l’interprétation défendue par la Commission est celle retenue par la jurisprudence rendue dans le secteur. Toutefois, dans leur analyse, les décideurs n’ont tenu compte que des paramètres édictés à la convention nationale. Rappelons qu’en vertu du paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail, un salarié est réputé être au travail lorsqu’il est à la disposition de son employeur sur les lieux du travail et qu’il est obligé d’attendre qu’on lui donne du travail.

[632]      Comme nous l’avons vu, cette condition minimale de travail ne couvre pas la disponibilité volontaire ni les initiatives professionnelles, car autrement tout employeur n’aurait aucun contrôle sur le suivi des horaires qu’il définit et par ricochet, sur la rémunération versée aux employées. L’établissement des horaires et la détermination du travail à accomplir relèvent des prérogatives de tout employeur.

[633]      En l’espèce, l’horaire est établi par les directions des écoles et l’aménagement de la tâche doit se faire à l’intérieur des balises édictées à la convention collective. L’Employeur soutient donc, que les règles conventionnelles entourant l’aménagement de la tâche, dont celle relative à la notion de « temps assigné », définissent en quelque sorte toutes les balises de l’organisation du travail dans les écoles et qu’en conséquence, toute réclamation associée à du travail non assigné ou non reconnu en vertu de ces règles ne peut être accueillie. Pour la Commission, le travail effectué par les enseignants pendant les récréations ou les pauses des élèves entre deux périodes assignées doit être considéré à toutes fins utiles comme du bénévolat ou des initiatives.

[634]      Toutefois, la preuve démontre que dans les faits, tous les enseignants et même les directeurs d’école s’attendent à ce que les enseignants répondent aux questions des élèves à la fin des cours ou interviennent lorsqu’ils sont témoins d’un comportement inadéquat. Mme Raymond, qui a été directrice d’une école secondaire, s’attend même à ce que les enseignants écoutent les soucis des élèves, et octroyait un forfait de 14 minutes à chaque enseignant afin qu’il fasse toutes et chacune des interventions ponctuelles attendues et qui se présentent inévitablement au quotidien et ce même une fois que la cloche de la récréation des élèves a sonné.  

[635]      Tous les enseignants ont expliqué leur compréhension de leurs obligations découlant des codes de vie, des projets éducatifs ou des plans de réussite adoptés au sein de chaque école. Ces derniers s’appliquent en tout temps, en présence des élèves, et les enseignants doivent intervenir en tout temps. Cette compréhension n’a d’ailleurs pas été contredite par les directeurs d’école, au contraire, ils l’ont corroborée. Il est vrai que chaque enseignant n’intervient pas à tous les jours pendant les récréations ou les pauses dans le cadre de l’un de ces codes, toutefois ces interventions s’ajoutent aux autres tâches qu’ils doivent exécuter et le tout représente de l’avis des enseignants plus de la moitié du temps des récréations ou des pauses.

[636]      La vie d’une école primaire, secondaire, professionnelle ou pour adultes et décrite par les enseignants et les directeurs révèle que dans la réalité de tous les jours, des situations ponctuelles et imprévues se présentent, en présence des élèves, au cours des récréations et des pauses. Et les directions des écoles s’attendent à ce que les enseignants répondent à ces demandes ponctuelles et pour la plupart imprévisibles. L’on peut dire que le milieu s’attend à ce qu’un enseignant clarifie la matière enseignée à la demande d’un élève, qu’il fournit la matière enseignée à un élève qui s’est absenté, qu’il écoute ses confidences, qu’il l’aide dans sa préparation d’examens, qu’il l’encourage, le garde en retenue lors d’un comportement déviant, l’assiste s’il est blessé, etc., et ce même au cours des périodes dites libres à l’horaire de l’enseignant. Dans les faits, il n’existe aucune directive interdisant de telles interventions. Et, j’ai peine à imaginer comment l’on pourrait écrire de telles directives.

[637]      Hormis quelques consignes entourant la protection de la confidentialité des élèves, ni la Commission et ni les directeurs d’école n’ont signifié expressément aux enseignants qu’ils ne devaient pas faire de telles interventions. Au contraire, tous les intervenants du milieu s’attendent implicitement à ce que les enseignants les accomplissent et cette réalité fait partie de la vie d’une école. C’est comme un acquis.

[638]      Cependant, aux fins de l’aménagement de la tâche et de la rémunération qui en découlent, la Commission suggère que ces dernières interventions relèvent de la fonction des enseignants et fait appel à leur sens professionnel. Il est vrai que les enseignants jouissent d’une grande autonomie dans l’exercice de leur fonction et sont à ce titre des professionnels, toutefois leurs conditions de travail sont encadrées dans des conventions collectives. L’on peut dire qu’ils détiennent en quelque sorte un statut hybride, un statut de cadre salarié. Ils jouissent d’une certaine autonomie professionnelle assimilable à celle d’un cadre dans l’exercice de leur fonction tout en bénéficiant de conditions de travail applicables à des salariés. Un salarié étant une personne qui travaille pour un employeur, et qui a droit à un salaire. [76] Bien que le côté professionnel de leur fonction puisse faire appel à une certaine souplesse et puisse entrainer des écarts ponctuels dans l’aménagement de leur travail, les parties sont tout de même liées par un contrat de travail. Elles sont liées par un contrat de travail qui englobe deux obligations essentielles, soit, la fourniture d’une prestation de travail et le versement d’une rémunération :

« 2085. Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s’oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d’une autre personne, l’employeur. » [77]

 

[639]      Et, vu l’ampleur et la fréquence, selon la preuve entendue, du temps travaillé durant les récréations ou les pauses par les enseignants et les obligations respectives des parties, il m’apparait difficile de défendre que tout ce temps doit être considéré accessoire et relevant de l’autonomie professionnelle des enseignants. Il va sans dire que nous considérons ce temps travaillé d’une manière globale, ne pouvant le disséquer, à la minute près, en catégorie (encadrement, activité étudiante, surveillance, tutorat, etc.), sur une base quotidienne, et ce en raison de la grande diversité des interventions exercées quotidiennement par les enseignants pendant ces récréations ou ces pauses. Cependant, ce temps peut être facilement circonscrit étant exercé à l’intérieur d’une période de temps connue et facilement mesurable (comme les battements).

[640]      Les enseignants ont également démontré que les récréations ou les pauses constituaient des moments propices pour effectuer différentes tâches, comme consulter un professionnel, se procurer du matériel pour les prochains cours, échanger avec un collègue, aménager la classe, confirmer une sortie d’école, rappeler un parent, etc.   

[641]      La Commission soutient aussi que ces différentes tâches sont rémunérées étant incluses dans la tâche complémentaire de tout enseignant. Les interventions ponctuelles effectuées à ce titre par les enseignants sont donc de l’avis de la Commission comprises dans la tâche complémentaire ou même dans le temps de nature personnelle. Elle prétend également que les enseignants devraient attendre l’arrivée de ces périodes de temps libres pour exécuter ces tâches.  

[642]      La preuve démontre cependant, d’une manière prépondérante, que ces périodes ne répondent pas toujours aux besoins quotidiens. Ces périodes libres à l’horaire de l’enseignant (c’est-à-dire au cours desquelles l’enseignant n’enseigne pas) ne représentent pas nécessairement le moment propice pour retourner un appel de parent ou pour consulter un professionnel. La preuve à cet égard est convaincante, l’on ne peut affirmer qu’il y a arrimage entre les périodes dites libres et rémunérées et les besoins découlant de l’organisation du travail. Et contraindre l’exécution de toutes et chacune de ces interventions pendant les périodes libres et rémunérées à l’horaire de l’enseignant affecterait, selon la preuve entendue, inévitablement la qualité de l’enseignement. Une telle conséquence irait même à l’encontre de l’article 8-1.01 de la convention nationale. [78]

[643]      Doit-on cependant considérer que ces diverses tâches sont rémunérées et ne peuvent donc constituer un excédent étant prisent en compte globalement dans l’aménagement de la tâche annualisée de l’enseignant. La preuve démontre effectivement que certaines de ces tâches peuvent être exercées pendant les périodes libres à l’horaire de l’enseignant comme faire des photocopies ou réserver un autobus. Ainsi, vu la notion de temps assigné que l’on retrouve à la convention collective, l’Employeur ne devrait pas verser de rémunération à ce titre et ce en raison du seul fait qu’un enseignant choisit de le faire à un moment qui lui convient mieux et de surcroit pendant une période qui est à sa connaissance non rémunérée.

[644]      Toutefois, comme relaté précédemment, il ressort de la preuve que dans la très grande majorité des cas, les activités effectuées pendant les récréations ou les pauses sont exercées afin de répondre à des besoins ponctuels et même imprévisibles. Notons les photocopies d’articles de journaux sur un sujet d’actualité, la consultation d’un professionnel au sujet d’un élève désorganisé le jour même, aménager la classe pour l’anniversaire d’un enfant ou d’une fête collective, placer le rétroprojecteur, aviser le concierge d’un bris ou d’un dégât, rappeler un parent. Bref, la preuve démontre que les enseignants ont peu ou pas de marge de manœuvre dans le choix du moment pour exercer la majorité de ces activités puisqu’elles découlent de l’organisation du travail.

[645]      En plus, la preuve révèle que la Commission n’applique pas de compensation à cet égard. Hormis, quelques cas où la direction a offert à quelques enseignants de reprendre leur temps suite à un débordement sur la période de récréation à l’occasion d’une rencontre de parents, la preuve démontre qu’il n’y a pas de compensation à tout le moins de la même envergure ou équivalent au temps travaillé par les enseignants. L’on ne peut donc dans ces circonstances considérer ce temps comme étant rémunéré. Il va sans dire, qu’il serait pour le moins fastidieux de comptabiliser la durée de toutes et chacune de ces interventions exercées quotidiennement par chaque enseignant au sein de chaque école et de surcroit par catégorie (complémentaire, éducative, etc.). Toutefois, une telle contrainte ne constitue pas à mon humble avis un motif valable pour être libéré de l’obligation de verser le salaire dû pour du temps travaillé et au surplus à la demande implicite ou explicite de la direction des écoles ou selon les attentes et us et coutumes du milieu.  

[646]      Bref, avec égards pour l’opinion contraire, j’estime que l’on ne peut qualifier globalement ces interventions, d’initiatives ou de zèle, puisqu’elles font partie intégrante de l’organisation du travail et au surplus qu’elles sont effectuées par les enseignants à l’intérieur de l’amplitude quotidienne et hebdomadaire prévue à la convention nationale. Tout comme l’on ne peut affirmer que ces interventions sont comptabilisées dans la tâche complémentaire ou même dans le temps de nature personnelle.

[647]      Je crois également que la situation décrite en l’espèce se distingue nettement de celles analysées par mes collègues et où ils qualifièrent le travail non assigné et effectué par quelques enseignants d’initiative ou de tâches accessoires. [79] Rappelons qu’en l’espèce, les enseignants ont démontré qu’ils travaillent plus de cinquante pour cent du temps réservé aux récréations ou aux pauses et que ces périodes de temps sont fixées à l’horaire de l’école et qu’à toutes fins utiles, les enseignants doivent demeurer sur les lieux du travail.

[648]      J’estime donc que la disponibilité des enseignants au cours des récréations ou des pauses ne résulte pas de leur seule volonté, mais de contraintes découlant des lois, des codes de vie ou des plans de réussite, des attentes des directions des écoles et du milieu, des us et coutumes, en définitive de l’organisation du travail. Vu cet ensemble de contraintes, les enseignants sont susceptibles d’effectuer des attributions qui relèvent de leur fonction d’enseignant au cours des récréations et des pauses. Et, la preuve démontre qu’ils le font d’une façon récurrente et la majorité du temps, à la demande expresse ou implicite des directions des écoles ou des attentes du milieu. En définitive, l’organisation du travail décrite en l’espèce m’apparait fort similaire à celles où des juges ont décidé que le paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes s’appliquait, et décrites aux paragraphes 520 à 522.

[649]      Les consignes sur le terrain et les attentes du milieu ne m’apparaissent pas congruentes avec les directives émises par la Commission quant à l’aménagement de la tâche et de la rémunération qui s’ensuit. D’une main, on interdit de tenir compte du temps travaillé pendant ces périodes fixées à l’horaire et de l’autre main, on sait que dans les faits, les enseignants devront inévitablement exécuter des tâches qui relèvent de leur fonction et qu’elles font partie de la vie quotidienne d’une école.  

[650]      Le Syndicat a donc prouvé d’une manière particulièrement prépondérante, que les enseignants de tous les secteurs sont, en vertu du paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail , réputés au travail pendant les récréations ou les pauses des élèves fixées à l’horaire de l’école, entre deux périodes assignées (ou de tâches éducatives), puisqu’ils sont à la disposition de l’Employeur sur les lieux du travail et dans l’attente qu’on leur donne du travail. Et, j’estime que l’Employeur n’a pas réussi à réfuter le fait que les enseignants sont réputés au travail pendant les périodes de récréations ou les pauses. Rappelons, que pour ce faire, l’Employeur doit prouver que le cadre d’exécution du travail relativement à la tâche qu’il demande au salarié de remplir, à la façon de faire ainsi qu’au temps à consacrer pour le faire réfute ladite présomption. Il doit démontrer la présence de directives claires d’autant plus que l’article 57 de la Loi sur les normes du travail doit être interprété de manière à favoriser l’atteinte de son objectif. Or, tel que relaté, les directives concernant l’interprétation de la convention collective sont claires, mais celles concernant l’organisation du travail ne le sont pas. Au contraire, il y a une certaine dichotomie entre les demandes émises par les directions des écoles, les attentes et les us et coutumes du milieu et l’aménagement de la tâche. Cette dernière ne tenant pas compte du temps travaillé pendant les périodes de récréations ou de pauses et ce alors que les enseignants doivent, selon la preuve entendue, travailler la majorité du temps. En l’espèce, l’on ne peut qualifier leur disponibilité comme étant volontaire. La disponibilité des enseignants est, de par l’organisation du travail, obligatoire.

[651]      Par ailleurs, la Commission prétend à toutes fins utiles que cette disposition entraine des effets incompatibles avec le régime fort particulier des enseignants. À son avis, l’intégration du paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes constitue un ajout incompatible notamment avec les modalités de la rémunération versée aux enseignants et l’absence de temps supplémentaire comme on l’entend généralement dans les régimes collectifs de travail.

[652]      A priori , soulignons qu’en l’espèce, le litige vise l’intégration d’une norme minimale de travail, collective et d’ordre public dans une convention de travail prévoyant des conditions de travail collectives. Ainsi, comme relaté dans la sentence intérimaire du 7 avril 2010, j’estime que la notion d’incompatibilité développée dans l’affaire Isidore Garon rendue par la Cour suprême du Canada ne s’applique pas.

[653]      Au soutien de ce dernier argument, la Commission prétend que les horaires de travail sont appliqués avec souplesse et que les enseignants en retirent un certain bénéfice. Bien que la preuve ait démontré que les directeurs d’école ne peuvent suivre à la minute près les enseignants comme des travailleurs en usine, la preuve combinée à une lecture de la convention nationale révèle que les horaires de travail sont tout de même bien circonscrits. Notamment, tout aménagement doit au préalable être convenu avec la direction de l’école et j’ajouterais comme dans tout milieu de travail même syndiqué ou non. Cet argument me semble donc peu convaincant.

[654]      Par ailleurs, je ne crois pas que la latitude dont disposent les enseignants quant à l’utilisation du temps de nature personnelle ou pendant le temps reconnu aux fins des tâches complémentaires soit vraiment pertinente aux fins de l’appréciation du temps travaillé, reconnu et rémunéré. Cette latitude découle de l’autonomie professionnelle des enseignants et ne doit pas être confondue avec celle relative à la comptabilisation du temps travaillé et rémunéré. Enfin, comme relaté, au surplus la preuve démontre qu’il n’y a pas ou très peu de compensation quant au temps effectué par les enseignants pendant les récréations ou les pauses.

[655]      Quant aux modalités de la rémunération, la Commission rappelle que ces dernières sont particulières. À cet effet, l’arbitre Jean-Guy Ménard résume bien ces composantes : « les modalités d’établissement de la rémunération des enseignants et même la formule d’organisation de leur travail sont à ce point particulières qu’il est impossible d’y trouver quelque affinité signifiante avec celles applicables dans d’autres secteurs d’activités. En certains cas, il est même difficile d’en vérifier l’application pratique; à preuve, qu’il s’agisse de penser, par exemple, au nombre d’enseignants qui ne travaillent pas effectivement 200 jours par année, alors qu’on sait pertinemment que la clause 8-3.01 stipule clairement l’effet contraire. » [80]

[656]      Dans la présente affaire, la Commission a démontré qu’il n’existe pas une adéquation parfaite entre le temps reconnu pour chaque enseignant dans sa tâche annualisée et le temps qu’il travaille dans les faits et la rémunération qui lui est versée. Il peut y avoir des écarts, et si l’on peut s’exprimer ainsi, parfois en faveur de la Commission et parfois en faveur de l’enseignant. La Commission a prouvé qu’il est impossible de suivre à la lettre un enseignant et donc de comptabiliser le temps travaillé à la minute près. L’analyse du seul temps que les enseignants effectuent pendant les récréations et les pauses corrobore cette affirmation. Toutefois, une telle difficulté ne peut constituer un motif pour ne pas rémunérer du temps travaillé surtout lorsque ce temps, lorsque considéré globalement, est facilement mesurable. D’ailleurs, les parties ont développé un régime original et adapté à la dynamique du travail de l’enseignant. Ce régime comporte toutefois, à mon humble avis, des composantes de base et communes à tout régime de travail, dont : une définition de tâches, une durée de travail et une rémunération.

[657]      Ainsi, comme tout régime de relations de travail, la convention nationale prévoit que la rémunération versée à un enseignant peut être réduite lorsqu’il ne peut fournir la prestation de travail attendue. Cette réduction constitue le corollaire de l’aménagement de la tâche et de la durée de travail quotidienne, hebdomadaire et annuelle. Cette réduction édictée à la convention nationale est aussi précise qu’imprécise que l’aménagement de la tâche de l’enseignant. Toutefois, il va sans dire que les parties ont comme dans tous contrats de travail prévu de réduire la rémunération lors d’une interruption de la prestation de travail et l’inverse c’est-à-dire le versement d’un excédent en présence d’un surplus d’heures de travail. En définitive, bien que le régime des enseignants est particulier et comporte des balises peu communes, je ne crois pas que ces composantes sont, à ce point, particulières pour que l’on puisse conclure qu’elles sont incompatibles ou inconciliables avec la Loi sur les normes du travail .

[658]      À toutes fins utiles, retenir cette dernière prétention de la Commission équivaudrait à mon humble avis à exclure tout simplement l’application de la Loi sur les normes du travail aux enseignants. Cette résultante contrevient clairement à la volonté exprimée par le législateur. Les enseignants sont aux fins de la Loi sur les normes , des salariés. Et, malgré les multiples caractéristiques particulières du régime de travail des enseignants, le législateur n’a pas choisi de les exclure comme il l’a fait notamment à l’égard des salariés de l’industrie de la construction et qui sont régis par un régime de relations du travail également particulier.

[659]      La Commission a également prétendu que le paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail vise à octroyer du temps supplémentaire, ce qui serait à son avis, encore inconciliable avec les dispositions de la convention nationale. La notion de temps supplémentaire n’existant pas.

[660]      Avec égards, je ne crois pas que cette condition minimale de travail vise à octroyer du temps supplémentaire. Cette condition de travail a pour objectif de rémunérer le temps au cours duquel un salarié est disponible sur les lieux du travail et en attente de recevoir du travail. Il est alors réputé au travail. Ce qui a été à mon humble avis démontré. Et, bien que les parties ne reconnaissent pas spécifiquement le temps travaillé pendant les récréations ou les pauses ou tout dépassement qui peuvent en résulter, comme les arbitres Rodrigue Blouin et Fernand Morin l’ont affirmé, il en résulte une forme d’enrichissement sans cause. [81] Ce temps doit donc être considéré comme un excédent ou un dépassement même si la convention n’y pourvoit pas spécifiquement.

[661]      En définitive, selon la Commission, il suffirait pour réfuter toute réclamation de cette nature d’invoquer les limites de l’aménagement de la tâche et du temps de travail et de la rémunération établies conventionnellement, ce qui semble encore une fois, contraire à l’objectif visé au paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail . La présomption édictée à cet article résultant essentiellement de toutes les composantes d’une organisation du travail dont celles édictées conventionnellement. L’organisation du travail étant définie comme :

« Procédé technique qui, par l’étude systématique des différents postes dans une entreprise, vise à les aménager de façon que soit obtenu un résultat optimum.

1.     Agencement logique des fonctions confiées à un groupe de personnes en vue de réaliser des objectifs communs clairement définis, grâce à la répartition entre elles des tâches et à leur exercice coordonné selon une hiérarchie de pouvoirs et de responsabilités.

2.     Pour le BIT, il s’agit de l’ensemble des activités qui ont pour but d’établir la coordination optimum des fonctions dans une entreprise, par exemple, l’organisation du travail. […] » [82]

 

[662]      En dernier ressort, la Commission a affirmé qu’en vertu de l’article 94 de la Loi sur les normes du travail , la norme conventionnelle est plus avantageuse que celle prévue à la Loi. À cet effet, elle réfère principalement à la rémunération globale versée aux enseignants et au temps de nature personnelle et au cours duquel l’enseignant est libre de faire ce qu’il veut et à l’égard duquel l’Employeur n’a à toutes fins utiles aucun contrôle sur la nature du travail effectué (comme discuté précédemment).

[663]      Je ne retiens pas cette prétention défendue par la Commission, cette dernière ne respectant pas, à mon humble avis, les critères d’application de l’article 94 de la Loi sur les normes du travail et définis plus précisément par la jurisprudence. L’appréciation doit se faire en isolant la stipulation conventionnelle par rapport à la norme légale et ces dernières doivent être de même nature et interprétées restrictivement. [83] La rémunération globale versée aux enseignants ne constitue pas une condition de travail de même nature que celle édictée au paragraphe 1 de l’article 57 de la Loi sur les normes du travail et ne peut donc à mon avis être invoquée comme étant une condition de travail plus avantageuse.

[664]      La réclamation du Syndicat doit donc être accueillie puisqu’il a prouvé que les enseignants sont pendant les récréations ou les pauses entre deux périodes de tâches éducatives disponibles sur les lieux du travail et en attente de recevoir du travail. Et, cette disponibilité découle directement de l’organisation du travail et est dans les circonstances assimilable à du « temps assigné » en vertu de la convention nationale. Et, avec égards pour l’opinion contraire, une telle interprétation ne peut constituer un ajout à la convention collective, puisque cette dernière est muette quant aux récréations ou pauses des élèves. Et, comme ma collègue Francine Beaulieu l’a souligné, dans une sentence arbitrale où l’interprétation d’une clause locale prévoyant la rémunération du temps des récréations ou des pauses était litigieuse, une telle condition de travail apparait de prime abord conforme à l’article 57.1 de la Loi sur les normes du travail . [84]

[665]      Ainsi, ce temps de disponibilité dont la durée reste à définir, devrait être rémunéré et comptabilisé à l’intérieur du 27 heures de temps assigné dans l’aménagement de la tâche de l’enseignant. Cette reconnaissance aura également le mérite d’enrayer l’iniquité qui découle des différences de temps reconnu d’une école à l’autre comme battement avant ou après les récréations ou les pauses des élèves, et ce à l’égard de chaque cadre de travail sectoriel.   

POUR TOUS CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE le grief CSVT-05-143 ;

RÉSERVE juridiction sur le quantum.

 

 

 

Me Maureen Flynn, arbitre

 

Assesseure syndicale : Mme Annick Coulombe

Assesseur patronal : M. Bernard Roy

Procureur syndical : Me Denis Lavoie

Procureure patronale : Me Véronique Morin

Procureur de l’intervenant : Me Germain Gohier

Dates d’audience : 14 jours entre le 14 octobre 2011 et le 25 juin 2013

Date de délibéré : 28 mars 2014

 

Notre dossier : MF-1206-30130-QED

Sentence # 158-14



[1]     Greffe de l’Éducation n o 8377, 7 avril 2010

[2]     Ce temps est majoré à trois heures pour l’année scolaire 2004-2005 et à cinq heures pour 2005-2006. La durée de la semaine régulière de travail de 27 heures est ajustée en conséquence, soit portée à 29 heures pour 2003-2004, 30 heures pour 2004-2005 et 32 heures pour 205-2006.

[3]     Voir article 8-5.02 de l’entente du 8 novembre 2002, p. 11.

[4]     Aux fins du présent litige, M. Guillemette attire l’attention aux paragraphes 2, 3, 4, 5, 7 et 8 en particulier.

[5]     Au cours de cette période d’accueil, les enseignants sont assignés à un endroit précis et aident les enfants  à se déshabiller ou gèrent les conflits qui peuvent survenir. Les enseignants s’occupent de leurs élèves et des élèves des enseignants assignés à la surveillance de la récréation.

[6]     Voir le résumé du témoignage de Mme Chagnon, directrice de cette école à temps partiel, en 2004-2005, sous la rubrique de l’école des Jeunes Riverains.

[7]     Notons que tous les enseignants de tous les secteurs ont reconnu en contre-interrogatoire avoir reçu le traitement annuel prévu à la convention nationale et n’avoir reçu aucune rémunération supplémentaire ou une compensation quelconque à l’égard d’un excédent. Tous ont admis ne pas avoir reçu de rémunération en temps supplémentaire ou pour un dépassement. Tous ont également admis ne pas avoir formulé de griefs individuels pour réclamer une rémunération additionnelle pouvant découler d’un dépassement.

[8]     Notons qu’à cette école, il n’y avait pas de cours d’anglais, vu les difficultés langagières des élèves.

[9]     Voir : article 8-2.03 de la convention collective intervenue entre le Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires francophones (CPNCF) et la Centrale de l’enseignement du Québec pour le compte des syndicats de professionnelles et professionnels, représentée par la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (CEQ).

[10]    Selon l’horaire, Mme Brunet et l’enseignante de 5 e année étaient disponibles en même temps les vendredis de 8 h 54 à 9 h 39.

[11]    Voir les extraits reproduits au paragraphe 22 de la présente sentence.

[12]    Aucune période de musique n’apparait à l’horaire déposé en preuve pour le groupe 321 de Mme Isabelle.

[13]    Mme Sylvie Lalonde, Mme Nancy Brunet, M. Sébastien Daoust-Charest, Mme Caroline Isabelle, M, Marc Jazienicki, M. Sébastien Campbell, M. Bernard Jalbert, M. Pierre Vallée, Mme Nathalie Dupuis, Mme Sonia Picard, M. Éric Thibaudeau, M. François Perreault, M. François Quenneville, M. Yohan Brouillette, M. Marc Lafontaine, M. Brent Csuzdi, Mme Louise St-Germain ont affirmé le même fait dans leur déclaration écrite.

[14]    Mme Sylvie Lalonde, Mme Nancy Brunet, M. Sébastien Daoust-Charest, Mme Caroline Isabelle, M. Marc Jazienicki, M. Sébastien Campbell, M. Bernard Jalbert, M. Pierre Vallée, Mme Nathalie Dupuis, Mme Sonia Picard, M. Éric Thibaudeau, M. François Perreault, M. François Quenneville, M. Yohan Brouillette, M. Marc Lafontaine, M. Brent Csuzdi, Mme Louise St-Germain ont affirmé la même compréhension dans leur déclaration écrite et ont déposé en appui à leurs prétentions le projet éducatif ou le plan de réussite de l’école où ils enseignent.

[15]    Mme Sylvie Lalonde, Mme Nancy Brunet, M. Sébastien Daoust-Charest, Mme Caroline Isabele, M. Marc Jazienicki, M. Sébastien Campbell, M. Bernard Jalbert, M. Pierre Vallée, Mme Nathalie Dupuis, Mme Sonia Picard, M. Éric Thibaudeau, M. François Perreault,  M. François Quenneville, M. Yohan Brouillette, M. Marc Lafontaine, M.Brent Csuzdi, Mme Louise St-Germain ont affirmé le même constat dans leur déclaration écrite.

[16]    Voir les extraits reproduits au paragraphe 22 de la présente sentence.

[17]    2010 CSC 28 , [2010] 2 R.C.S. 61 .

[18]    Sylvain Bouchard, La preuve extrinsèque en arbitrage des griefs , Les Éditions Yvon Blais Inc., 1995, p. 21.

[19]    Blouin Rodrigue et Morin Fernand, Droit de l'arbitrage de grief , 6 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2012, p. 418.

[20]     Collège François-Xavier Garneau et Syndicat du personnel de soutien du Collège François-Xavier Garneau, SAE-6876, Me Jean M. Morency, 1999-03-24, p. 6-8. Voir aussi : Syndicat des professionnels et professionnelles en soins infirmiers et cardio-respiratoires du centre de santé de Chicoutimi et Centre de santé Chicoutimi , A.A.S. 2007A-57 , 15-05-2007.

[21]    Voir au même effet : Commission scolaire de Bellechasse et Syndicat des employés des Commissions scolaires Louis-Fréchette , SAE-563, Me Gilles Ferland, 1984-11-13, p. 12-13 et 14-15 ; Syndicat des professionnels et professionnelles en soins infirmiers et cardio-respiratoires du centre de santé de Chicoutimi , A.A.S. 2007A-57 , M. Noël Malette, 15-05-2007, paragr. 12, 17, 53-57 et 63-69.

[22]    À des fins de conciliation avec les documents déposés en preuve, nous avons choisi de reproduire les conditions de travail applicables au cours de l’année scolaire 2004-2005. Et, afin d’alléger la lecture, nous avons choisi de ne reproduire que les dispositions touchant les enseignants dans le secteur primaire et secondaire et le cas échéant de tenir compte des particularités propres à l’éducation aux adultes et à la formation professionnelle dans l’analyse proprement dite. Soulignons que des dispositions particulières pour l’éducation aux adultes sont prévues au chapitre 11 de la convention nationale. Et, la formation professionnelle est traitée au chapitre 13 de la même convention.

[23]    Ross c. Conseil scolaire du district n o 15 du Nouveau-Brunswick , [1996] R.C.S. 825.

[24]    En contrepartie des 200 jours travaillés, l’enseignant reçoit un traitement annuel. (Voir les clauses 6-5.01 et 6-5.02 de la convention nationale).

[25]    Douze jours fériés et chômés sont reconnus.

[26]    À compter de l’année scolaire 2005-2006, ce nombre est porté à trente-deux (32) heures.

[27]    À compter de l’année scolaire 2005-2006, ce nombre est porté à cinq (5) heures.

[28]    Ce nombre est porté à quatre (4) heures à compter de l’année scolaire 2005-2006.

[29]    Ce nombre est porté à deux (2) heures à compter de l’année scolaire 2005-2006.

[30]    Au primaire, les trente (30) heures à l’école incluent vingt-trois (23) heures de tâche éducative, quatre (4) heures de temps de présence assigné et trois (3) heures de temps de travail de nature personnelle. Au niveau secondaire, ledit trente (30) heures à l’école comprend vingt (20) heures de tâche éducative, sept (7) heures de temps de présence assigné et trois (3) heures de temps de travail de nature personnelle.

[31]    La clause 8-2.01 correspond à la clause 8-1.02 à laquelle Me Frumkin réfère. Notons, qu’en l’espèce la preuve révèle qu’à toutes fins utiles les récréations ou pauses situées entre deux périodes assignées ne pouvaient être comptabilisées dans la tâche de l’enseignant et donc que l’enseignant ne peut profiter de ces périodes de temps comme l’indique Me Frumkin pour s’acquitter des tâches de nature générale, à moins de le faire bénévolement. Enfin, en 1984, la notion de temps de travail de nature personnelle n’existait pas.

[32]    Commission scolaire Laurenval et Laurentian Teachers Union of North Island , SAE-3511, Me Harvey Frumkin, 1984-10-05, p. 7-8.

[33]    La cinquième période correspond à l’heure du diner et l’enseignant soutient que la période de cinquante minutes du diner est amputée de huit minutes qu’il doit consacrer à la surveillance des élèves.

[34]    Commission scolaire régionale protestante South-Shore et Syndicat des enseignants Saint-Laurent-Richelieu , SAE-3426, Me Harvey Frumkin, 1984-07-10, p. 5 et 6.

[35]    Commission scolaire régionale de l’Estrie et Syndicat de l’enseignement de l’Estrie , SAE-3646, Me Nicolas Cliche, 1985-01-31, p. 5 et 6.

[36]    Commission scolaire des écoles catholiques de Sherbrooke et Syndicat de l’enseignement de l’Estrie , T.A., 2 août 1993, SAET 5933.

[37]    Reproduit au paragraphe 497 des présentes.

[38]    Reproduit au paragraphe 495 des présentes.

[39]    Syndicat des enseignants de Saint-Jérôme et Commission scolaire Saint-Jérôme , S.A.E. 4554, Me Michel Leblond, 1 er février 1988, p. 5

[40]    Commission scolaire Sainte-Croix et Syndicat de l’enseignement de l’Ouest de Montréal , SAR-4682, Me Jean-Guy Ménard, 1988-06-30, p. 18 et 19. Voir au même effet : Commission scolaire Sainte-Croix et Syndicat de l’enseignement de l’Ouest de Montréal , SAE-4683, Me Jean-Guy Ménard, 1988-06-30 ; Commission scolaire Baldwin-Cartier et Syndicat de l’enseignement de l’Ouest de Montréal , SAE=5170, Me Michel Bergevin, 1990-07-05 ; Commission scolaire Jérôme-Le Royer et Syndicat des enseignants et enseignantes de la Commission scolaire Jérôme-Le Royer , SAE-6702, Me Ginette Gosselin, 1998-01-05 ; Commission scolaire de Laval et Syndicat de l’enseignement de la région de Laval , SAE-8504, Me Jacques Bherer, 2011-11-04.

[41]    Commission scolaire de Montréal et Alliance des professeures et professeurs de Montréal , SAE-8551, Me Denis Nadeau, 2012-04-04.

[42]    Commission scolaire des Laurentides et Syndicat des enseignantes et enseignants des Laurentides , SAE-6494, Me Jean-Pierre Tremblay, 1996-09-10, p. 11.

[43]    Commission scolaire régionale de la Péninsule et Syndicat des travailleurs de l’enseignement de l’Est du Québec , SAE-3513, Me Claude Rondeau, 1984-10-05, p. 4 et 5.

[44]    La clause 8-5.05 c) édicte « le temps de récréation situé à l’intérieur de l’horaire de l’enseignant est comptabilisé dans les vingt-sept (27) heures de présence. »

[45]    Commission scolaire du Fer et Syndicat de l’enseignement de la région du Fer , T.A., 16 février 2011, SAET 8438.

[46]    Commission scolaire Jérôme-Le Royer et Syndicat des enseignantes et enseignants de Le Royer , T.A., Me Rodrigue Blouin, 12 mars 1997, SAET 6579 ; Commission scolaire de l’Énergie et Syndicat de l’enseignement de la Mauricie , T.A., Me Fernand Morin, 19 avril 2011, SAET 8452.

[47]    Voir : C.N.T. c. Immeubles R. Savignac inc., D.T.E. 2002T-1107 et Cie minière Québec-Cartier c. Métallurgistes unis d’Amérique, section locale 5778 , D.T.E. 93T-167 .

[48]    Commission des normes du travail, Guide Interprétation et jurisprudence , 19 juin 2013.

[49]    LRQ c. I-16.

[50]    Rizzo & Rizzo Shoes Ltd . (Re), [1998] 1 R.C.S. 27 .

[51]    Extrait du Guide Interprétation et Jurisprudence de la Commission des normes du travail, 19 juin 2013.

[52]    Jean-Louis Dubé et Nicola Di Iorio, Les normes du travail , 2 e Édition, Les Éditions Revue de Droit, Université de Sherbrooke, 1992, p. 122.

[53]    Commission des normes du travail c. Les Cèdres - Centre d'accueil pour personnes âgées , D.T.E. 94T-1174 , p. 8, 10 et 11. Voir aussi Commission des normes du travail c. Camping colonie Notre-Dame , D.T.E. 2003T-1061 .

[54]    [1986] R.J.Q. 2820 (C.A.), 2822.

[55]    Commission des normes du travail c. Edphy International Inc. , (C.Q.), [2000] R.J.D.T., p. 194 et 195. Sur l’obligation d’adopter une politique claire quant à l’aménagement de la tâche, voir également : Commission des normes du travail c. Assurexperts Guy Lapointe Inc. , C.Q., 6 septembre 2002, 86T-831.

[56]    Commission des normes du travail c. Richard Boucher et Barbara Woodall , C.Q. 15 novembre 2002, 2003T-16 .

[57]    Syndicat de l’industrie de l’Imprimerie de Saint-Hyacinthe (CSD) et Imprimerie Transcontinental Inc. division Saint-Hyacinthe , T.A., Me Diane Fortier, 8 février 2001, AZ-01141113 , 2001T-406 , p. 19 et 20.

[58]    RETAQ-CSN et CETAM , D.T.E. 2006T-450 , Me Diane Lemieux, 2006-03-23.

[59]    C.N.T. c. Immeubles R. Savignac inc. , D.T.E. 2002T-1107 (C.S.), 2002-11-05, paragraphe 34.

[60]    Article 93 de la Loi sur les normes du travail.

[61]    Robert P. Gagnon, Le droit du travail du Québec , 6 e édition, mis à jour par Langlois Kronström Desjardins, Éditions Yvon Blais, p. 180-181.

[62]    Nathalie-Anne Béliveau, Les normes du travail , 2 e édition, avec la collaboration de Marc Ouellet, Éditions Yvon Blais, p. 406 à 407.

[63]    Montreal Standard c. Middleton , 89T-429, AZ=89011297, p. 2 et 4. Voir également les sentences suivantes : Commission des normes c. La Compagnie Minière I.O.C.inc. , 95T-397 (C.A.) ; Commission de l’industrie de la construction c. C.T.C.U.M. , [1986] 2 R.C.S. 327  ; Commission scolaire des Trois-Lacs c. Fernand Morin et Syndicat du personnel de soutien en éducation, région des Trois-Lacs , 2003T-1024 , (C.S.), AZ-50193894  ; Agropur Coopérative (E.V. Beauceville) et Teamsters Québec, Local 1999 (F.T.Q.), 2006T-592 , AZ-50377050  ; Commission des normes du travail c. Béatrice Foods inc. 97T-1172, Cour du Québec, 4 juillet 1997.

[64]   Collège Vanier et Association des professionnels non enseignants du Collège Vanier, SAE-6903, Me Fernand Morin, 1999-06-08, p. 2-3 et 5. Notons que dans cette affaire, l’arbitre devait apprécier le litige à la lumière des clauses 8-2.01 et 8-2.02 de la convention applicable aux professionnels non enseignants. La clause 8-2.01 stipule que sont considérées comme des heures de travail supplémentaires les heures de travail faites en sus d’une semaine de travail de trente-cinq (35) heures et la clause 8-2.02 stipule que les heures de travail supplémentaires sont compensées à taux simple.

[65]    Commission scolaire Western Québec et Association des enseignantes et enseignants de l'Ouest du Québec , SAE-7950, Me Michel-G. Picher, 2006-08-22, p. 1-4, 6 et 7. Notons que dans cette affaire, l’arbitre a conclu que le temps réclamé par les enseignants respectait la limite de 30 heures de présence à l’école et dans les circonstances considéra injustifiée la réclamation du temps effectué au-delà de la limite de 27 heures.

[66]    Soulignons que dans le cadre de leurs plaidoiries soumises à l’étape préliminaire, les parties patronales ont également référé aux périodes de récréations ou pauses des étudiants. Dès lors, l’étendue du « temps compris » était bien comprise par les deux parties.

[67]    La notion de surveillance des élèves n’existe pas dans le secteur des adultes (clause 11-10.02 de la convention nationale).

[68]    Voir paragraphe 218 et la note de bas de page.

[69]    Voir paragraphe 218 et la note de bas de page.

[70]    Voir paragraphe 219 et la note de bas de page.

[71]    M. Hébert, Mme Mongrain, Mme Schmidt, Mme Lalonde, Mme Brunet, M. Daoust-Charest, Mme Isabelle, M. Jazienicki et Mme Dupuis exécutent essentiellement les mêmes tâches.

[72]    M. Hébert, Mme Mongrain, Mme Schmidt, Mme Lalonde, Mme Brunet, M. Daoust-Charest, Mme Isabelle, M. Jazienicki et Mme Dupuis font essentiellement les mêmes tâches.

[73]    M. Campbell, M. Lafontaine, M. Quenneville, M. Jalbert, M. Vallée, Mme Picard, M. Thibaudeau, M. Perreault et M. Brouillette exécutent essentiellement les mêmes fonctions.

[74]    M. Campbell, M. Lafontaine, M. Quenneville, M. Jalbert, M. Vallée, Mme Picard, M. Thibaudeau, M. Perreault et M. Brouillette effectuent essentiellement les mêmes activités professionnelles.

[75]    Les directions d’école doivent toutefois respecter certaines dispositions législatives à cet effet.

[76]    Voir la définition du salarié à l’article 1.10 de la Loi sur les normes .

[77]    Code civil du Québec .

[78]    Reproduit au paragraphe 490.

[79]    Voir les paragraphes 500 et 501.

[80]    Voir paragraphe 507.

[81]    Voir paragraphe 512.

[82]    Dictionnaire des relations du travail, Gérard Dion, Deuxième Édition, Les Presses de l’Université Laval, 1986.

[83]    Voir paragraphes 523 à 525.

[84]    Voir paragraphe 511.