Trudel c. Simard |
2014 QCCQ 3699 |
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JT-1425
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Division des petites créances |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT D'ALMA |
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Localité d'Alma |
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« Chambre civile » |
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N°: |
160-32-000024-138 |
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DATE : |
27 mars 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE DORIS THIBAULT, J.C.Q. |
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JACQUES TRUDEL, |
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Demandeur; |
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c. |
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JEAN-ROCK SIMARD,
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Défendeur; |
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JUGEMENT
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[1] Jacques Trudel réclame de Jean-Rock Simard une somme de 7 000 $ de dommages en application de la garantie de qualité contre les vices cachés découverts sur la propriété qu'il a achetée de celui-ci.
[2] Jean-Rock Simard s'oppose à la réclamation alléguant qu'il a dénoncé les infiltrations d'eau affectant l'immeuble et qu'il n'a pas cherché à maquiller les défauts dans le but de tromper un acheteur.
Le contexte
[3] Le 11 juillet 2011, Jacques Trudel achète un immeuble à St-Henri-de-Taillon au prix de 80 000 $.
[4] Il fait effectuer une inspection pré-achat.
[5] On lit au rapport d'inspection :
«…
Chaque printemps, une légère infiltration d'eau est constatée à la base des murs de fondation et sur la dalle . Ce problème mineur sera à corriger.
…» [notre soulignement]
[6] Dès la prise de possession, il refait le drain autour de la maison ainsi que le terrain.
[7] Le 30 août 2012, il constate une accumulation d'eau, qu'il qualifie d'importante, au centre de la dalle de béton dans le sous-sol et en avise rapidement Jean-Rock Simard.
[8] Jacques Trudel reconnaît que Jean-Rock Simard l'a informé avant la vente d'une légère infiltration d'eau présente à chaque année à la base des murs de fondation.
[9] Il dépose une soumission de Béton D.R.T. sur laquelle il est fait état qu'il en coûterait une somme de 5 000 $ pour effectuer la réparation du plancher de béton sur une surface de 13 x 20. Ce document ne contient aucune information relative à la source de l'infiltration d'eau.
[10] Jacques Trudel affirme qu'il a contacté un expert en fondations qui l'aurait informé que l'immeuble est situé sur la nappe phréatique, ce qui expliquerait les fissures à plusieurs endroits au sous-sol.
[11] Il choisit de ne pas faire entendre d'expert.
[12] Jean-Rock Simard explique qu'il a acquis l'immeuble en cause en 2001 et qu'il ne l'a jamais habité. Il le loue jusqu'en 2009 alors qu'il doit expulser des locataires en raison de l'état d'insalubrité dans lequel ils ont maintenu l'immeuble. Entre autres, les locataires ont laissé des chats enfermés au sous-sol pendant de longues périodes. Lorsqu'il reprend possession de son immeuble, la senteur au sous-sol est intolérable. Il effectue donc un grand ménage, refait la peinture dans l'objectif de le vendre.
[13] La peinture du sous-sol n'a pas été faite pour cacher un dégât d'eau précise-t-il mais bien pour régler le problème de la senteur provoqué par les chats.
[14] L'inspectrice de la municipalité qui a travaillé dans le dossier concernant l'insalubrité de l'immeuble de Jean-Rock Simard, confirme les propos de ce dernier. Elle a visité l'immeuble et a constaté l'odeur insupportable au sous-sol en lien avec la présence d'animaux.
[15] Jean-Rock Simard nie que l'immeuble est situé sur la nappe phréatique et oppose qu'il s'agit d'un vice apparent, si vice il y a. Il ajoute qu'il n'a pas fait de représentations trompeuses qui auraient pu sécuriser faussement l'acheteur et que finalement le montant réclamé pour effectuer les travaux est nettement exagéré.
Le droit et l'analyse
[16]
L'article
« Art. 1726 Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.
Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent ; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert. »
[notre soulignement]
[17] Dans le cadre d'un recours fondé sur un vice caché, l'acheteur a le fardeau de prouver, par une preuve prépondérante, quatre conditions, soit :
1) l'existence d'un vice;
2) le caractère caché du vice;
3) l'existence du vice au moment de la vente;
4) l'existence d'un vice qui rend le bien impropre à l'usage auquel on le destine mais diminue tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté ou n'aurait pas donné un si haut prix s'il l'avait connu;
[18] La preuve de Jacques Trudel quant au vice reproché est déficiente. En effet, le Tribunal ne peut apprécier la gravité du vice, ignorant la source du problème constaté car aucune preuve n'a été faite à ce niveau. Seuls les dommages ont été mis en preuve et encore là il est difficile de les qualifier avec précision vu l'absence de preuve sur la problématique qui les a entraînés.
[19] Mais il y a plus, Jacques Trudel a été informé de l'infiltration d'eau au sous-sol non seulement celle observée sur la base de murs mais également sur la dalle de béton; cela apparaît du rapport complété par son inspecteur lors de l'inspection préachat.
[20] Au surplus, l'inspecteur qualifie de "mineurs" les problèmes d'eau constatés à la base des murs et sur la dalle de béton.
[21] L'acheteur prudent doit effectuer une démarche plus approfondie lorsqu'on lui signale des problèmes d'infiltration d'eau. Jacques Trudel aurait dû être plus prudent et s'informer sur les causes de ces infiltrations de façon plus approfondie.
[22] Dans l'affaire Blanchard ( [1] ) , la Cour d'appel écrit sur le sujet des propos qui sont pertinents à la présente cause :
« [23] (…) l'acheteur était tenu d'être proactif et de se former une opinion éclairée sur la portée et les conséquences potentielles de l'information qui lui avait été rendue disponible. Car quelle importance réelle devrait-on accorder à l'obligation de renseigner si, une fois l'information relayée, l'acheteur n'avait pas l'obligation corrélative d'y donner suite d'une quelconque façon ?
[24] Aussi l'acheteur potentiel, qui voit ou apprend l'existence d'indices d'infiltration d'eau dans un sous-sol, doit-il, en personne raisonnable et diligente, enquêter sur les causes de cette infiltration et, au besoin, se faire assister par un conseiller compétent . (…) »
[notre soulignement]
[23] Le vice allégué par Jacques Trudel, même s'il avait été prouvé, ne peut être qualifié de vice caché ayant été dénoncé par le vendeur et confirmé lors de l'inspection préachat.
[24] Il n'y a pas eu de représentations trompeuses.
[25] Le demandeur n'a pas rencontré son fardeau de preuve.
[26] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
[27] REJETTE la requête;
[28] LE TOUT sans frais.
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___________________________ DORIS THIBAULT, JUGE C.Q. |
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/ng
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Date d’audience : |
3 mars 2014 |
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