Gauthier c. Bouchard (Construction Pierre-Paul Bouchard enr.) |
2014 QCCQ 3705 |
|||||
JT-1425
|
||||||
Division des petites créances |
||||||
CANADA |
||||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||||||
DISTRICT D'ALMA |
|
|||||
Localité d'Alma |
||||||
« Chambre civile » |
||||||
N°: |
160-32-000125-125 |
|||||
|
|
|||||
|
||||||
DATE : |
9 avril 2014 |
|||||
______________________________________________________________________ |
||||||
|
||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE DORIS THIBAULT, J.C.Q. |
||||||
______________________________________________________________________ |
||||||
|
||||||
AUDREY GAUTHIER,
-et-
BENOÎT-CLAUDE AUCLAIR, |
||||||
|
||||||
Demandeurs; |
||||||
c. |
||||||
PIERRE-PAUL BOUCHARD, faisant affaires sous le nom de Construction Pierre-Paul Bouchard enr.,
|
||||||
Défendeur; |
||||||
|
||||||
______________________________________________________________________ |
||||||
|
||||||
JUGEMENT |
||||||
______________________________________________________________________ |
||||||
|
||||||
[1] Audrey Gauthier et Benoît-Claude Auclair (Auclair) réclament à Pierre-Paul Bouchard, faisant affaires sous le nom de Construction Pierre-Paul Bouchard enr ., une somme de 7 000 $ en dommages à la suite de défauts de construction qui affectent l'usage de leur résidence.
[2] Pierre-Paul Bouchard s'oppose à la réclamation plaidant que l'infiltration d'eau reprochée est la conséquence non pas du travail qu'il a effectué mais de celui du maçon qui a fait défaut d'installer des chantepleures dans le revêtement de maçonnerie de l'immeuble.
Le contexte
[3] Auclair achète un plan de maison de Dessins Drummond. Il confie une grande partie de la construction de la maison à Pierre-Paul Bouchard. Ce dernier doit construire la maison selon les plans à l'exception de la maçonnerie, l'électricité, la plomberie, le parement, la peinture, les portes intérieures. Ils conviennent que Pierre-Paul Bouchard sera payé à l'heure et que les matériaux seront fournis par Auclair. L'octroi des différents contrats est géré directement par Auclair.
[4] La construction se termine en octobre 2004. Dès que Pierre-Paul Bouchard termine la toiture, Auclair constate que l'eau s'infiltre à l'intersection du parement du mur et de la toiture sur la façade de l'immeuble. Plus particulièrement, l'eau s'infiltre par le toit au-dessus de la porte principale et glisse entre la pierre et le mur, se dirigeant vers le cadrage du bas de la porte pour ensuite s'écouler au sous-sol.
[5] En octobre 2004, Pierre-Paul Bouchard se présente chez Auclair afin de mettre un calfeutrant pour corriger la problématique d'infiltration d'eau. Il y retourne le 16 octobre et le 20 novembre, pour la pose de goudron et l'installation de tôles sur le petit toit.
[6] L'infiltration d'eau persistant, en octobre 2005, il effectue d'autres correctifs ainsi qu'à l'automne 2006. En janvier 2009 et en octobre 2010, il y retourne à quelques reprises.
[7] En somme, de 2004 à 2010, Pierre-Paul Bouchard se présente régulièrement pour effectuer divers travaux dans l'objectif de solutionner le problème d'infiltration d'eau. Il fait plusieurs correctifs.
[8] Les constantes infiltrations d'eau entraînent la pourriture d'une partie de la structure située sous la porte principale, au sous-sol.
[9] Auclair prétend que Pierre-Paul Bouchard n'a pas respecté le Code du bâtiment ni le plan qui lui a été fourni en ne posant pas de solin ni de membrane sur la toiture, ce qui a occasionné des infiltrations d'eau.
[10] Auclair retient les services de l'ingénieur Richard Villeneuve pour fin d'expertise.
[11] L'ingénieur qui examine l'immeuble constate :
«…
3. Les infiltrations ont comme conséquences d'imbiber la maçonnerie du parement, jusqu'à saturation, depuis l'espace intérieur de l'enveloppe, pour s'écouler vers le sous-sol, depuis l'interface entre la dalle et la lisse basse de la fondation, ce qui provoque désagrément et pourriture de la structure de bois. Des photos pourront être produites à cet effet.
4. Le fait que l'eau, qui s'infiltre à l'intérieur du parement, s'écoule vers le sous-sol, plutôt que vers l'extérieur, démontre un vice de construction au niveau du système d'étanchéité et de drainage qui est composé d'un solin remontant de 6 pouces (150 mm) derrière l'enveloppe, pour se poursuivre sous le rang de maçonnerie. L'eau doit être ensuite drainée par les chantes-pleures à la base de la maçonnerie et une pente positive de la dalle de béton de la galerie. J'ai pu constater qu'aucune chante-pleure n'était présente dans ce secteur.
…» [notre soulignement]
[12] et recommande les travaux correctifs suivants :
«…
7. à mon avis, afin de régler cette problématique, les travaux suivants, sans s'y limiter, doivent être exécutés :
1. Démanteler les matériaux de la toiture et poser une membrane d'étanchéité qui excède largement les noues . Idéalement, poser la membrane sur toute la surface pouvant être problématique.
2. Défaire le soffite, toujours dans le secteur de la galerie avant, et augmenter la hauteur du parement en place , ce dernier n'excédant que de un seul pouce (25 mm), selon les estimations de monsieur Auclair. Dépendamment des différentiels de pressions qui s'exercent, de l'eau peut remonter une surface verticale.
3.
Démanteler la maçonnerie du bas afin de poser
scellant, solin et chante-pleure pour permettre l'écoulement des eaux
d'infiltration vers l'extérieur
, conformément aux prescriptions de la
sous-section
4. Exécuter tout autre travail qui pourrait être décelé comme requis afin de régler la problématique.
5. Changer tous les matériaux, dont la partie de la lisse basse, qui ont été affectés par l'eau et la pourriture suite aux infiltrations.
…» [notre soulignement]
[13] À l'automne 2010, Pierre-Paul Bouchard enlève le bardeau du toit, installe une membrane d'étanchéité, un solin en tôle et remet le bardeau. Depuis, selon Auclair, le problème est réglé.
[14] Il affirme qu'il n'y a plus d'infiltration d'eau et concentre sa réclamation sur les dommages subis à la structure de bois du sous-sol à la suite des infiltrations d'eau qui ont eu lieu entre 2004 et 2010.
[15] Auclair réclame 7 000 $ à Pierre-Paul Bouchard. Il explique que les nombreuses réparations effectuées sur la toiture l'ont tachée et affecté ses qualités esthétiques. Le type de bardeau utilisé pour le toit d'origine n'existe plus et il faudrait refaire la toiture en entier pour la remettre en état. Au surplus, les réparations exigées par les dommages au sous-sol nécessitent plus de 26 000 $ de travaux. Il réduit sa réclamation à 7 000 $ afin de profiter de la juridiction des petites créances.
[16] Pierre-Paul Bouchard qui insiste pour spécifier qu'il n'a pas agi en tant qu'entrepreneur général, nie sa responsabilité. Il prétend que s'il y a eu infiltration d'eau cela est dû au travail du maçon qui n'a pas installé de chantepleures sur la façade alors qu'il en a installées sur les trois autres murs.
[17] De son côté, il a fait tout ce qu'il a pu pour corriger le problème sur la partie de la construction qui était sous sa responsabilité. Il reconnaît les dommages causés par l'infiltration d'eau aux pièces du sous-sol.
[18] Il ne croit pas que le problème d'infiltration d'eau soit réglé. Il s'étonne de l'affirmation d'Auclair car il a reçu un téléphone de sa part en 2011 se plaignant de nouveau des infiltrations d'eau.
Le droit et l'analyse
[19]
Ce sont les articles
« Art. 2098 Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.
Art. 2100 L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.
Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure. »
[notre soulignement]
L'analyse et la décision
[20] Si le type de contrat qui lie Pierre-Paul Bouchard à Auclair est un contrat d'entreprise, la preuve ne permet pas de qualifier Pierre-Paul Bouchard d'entrepreneur général pour le projet de construction de la résidence d'Auclair. C'est ce dernier qui a négocié les différents contrats avec les différents spécialistes, tels le maçon, l'électricien, la plomberie, etc. Pierre-Paul Bouchard n'a pas été impliqué dans ces démarches, c'est Auclair qui a agi à titre d'entrepreneur général en engageant et payant directement ces professionnels.
[21] En tant que propriétaire d'une maison neuve, Auclair était en état de recevoir une résidence exempte de défaut de construction et conforme aux règles de l'art. Les malfaçons prouvées sont sérieuses. Il y a indéniablement des dommages au niveau des parties du sous-sol qui ont été imbibées d'eau au fil des ans. Il a le droit d'être indemnisé pour les inconvénients causés par les infiltrations d'eau et les réparations nécessaires sur l'immeuble.
[22] L'expertise identifie deux types de travaux correctifs, soit ceux en lien avec la réfection de la toiture et l'autre lié à l'absence de chantepleures sur la façade de l'immeuble, ce qui relève de la responsabilité du maçon.
[23] La preuve ne permet pas de départager la responsabilité entre Pierre-Paul Bouchard et le maçon. Seul Pierre-Paul Bouchard est concerné par la présente réclamation alors qu'il est incontestable que le maçon a une part de responsabilité dans les dommages. Il n'a pas respecté les règles en semblable matière. De façon arbitraire, le Tribunal la partage à parts égales.
[24] Pierre-Paul Bouchard devra donc verser la demie de la somme réclamée, soit une somme de 3 500 $ qui représente sa partie des dommages.
[25] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
[26] ACCUEILLE partiellement la requête;
[27]
CONDAMNE Pierre-Paul Bouchard à verser à Audrey Gauthier et
Benoît-Claude Auclair la somme de 3 500 $ avec intérêt au taux légal
et l'indemnité additionnelle prévue à l'article
[28] Chaque partie assumant ses frais.
|
||
|
___________________________ DORIS THIBAULT, JUGE C.Q. |
|
|
||
|
||
/ng
|
||
Date d’audience : |
4 mars 2014 |
|