Manitiu c. Agence du revenu du Québec |
2014 QCCQ 4527 |
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COUR DU QUÉBEC |
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Division administrative et d'appel |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
Montréal |
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« Chambre civile » |
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N : |
500-80-020271-111 |
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DATE : |
29 mai 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JEAN-F. KEABLE |
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ANDREI C. MANITIU
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Partie demanderesse
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c.
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L'AGENCE DU REVENU DU QUÉBEC
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Partie défenderesse
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JUGEMENT SUR UN APPEL EN MATIÈRE FISCALE ( Loi sur l'administration fiscale, RLRQ, c. A-6.002, art. 93.1.10. à 93.1.25.)
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Les décisions de l'agent d'opposition et l'appel à la Cour du Québec
[1] Le 4 août 2011, l'agent d'opposition ratifie l'avis de cotisation du 16 août 2010 portant sur le numéro MW976102C01 pour l'année d'imposition 2007. Le contribuable, Andrei C. Manitiu se voit alors notamment ajouter à son revenu la somme de 100 000 $ [1] .
[2] Le 4 août 2011, l'agent d'opposition ratifie l'avis de cotisation du 1 er septembre 2010 portant le numéro MW996149C01 pour l'année d'imposition 2008. Le contribuable Manitiu se voit ajouter à son revenu la somme de 297 164 $ [2] .
[3] Le 18 octobre 2011, le contribuable dépose sa demande d'appel à la Cour du Québec selon les modalités prévues à l'article 93.1.17. de la Loi sur l'administration fiscale (la LAF ) [3] . Il conteste les cotisations parce qu'il affirme que c'est à tort que l'Agence du revenu du Québec (l'Agence) le considère débiteur d'Opale Net inc. (Opale) de 100 000 $ pour l'année 2007 et de 297 164 $ pour l'année 2008.
Les questions en litige
[4]
Comme l'indiquent les paragraphes 1 à 4 de la
requête introductive d'instance, qui font l'objet d'une admission, les faits
sont en apparence simples et ne demandent qu'à vérifier s'il y a eu un
remboursement en 2008 ou 2009 des dettes contractées au bénéfice d'une personne
morale, Opale, afin que le contribuable puisse profiter de l'exception que
prévoit l'article 115 de la
Loi sur les impôts
[4]
à la règle générale d'imposition de l'article
Les admissions de faits
1. La défenderesse a émis des avis nouvelles cotisations contre le demandeur détaillés comme suit :
NUMÉRO DE L’AVIS MONTANT ANNÉE
MW976102C01 28 929,14 $ 2007
MW996149C01 75 684,97 $ 2008
2. La défenderesse a
augmenté le revenu du demandeur d’un montant de 100 000 $ pour l’année
2007 en alléguant que le demandeur serait devenu débiteur de la société Opale
Net Inc. pour cette somme au sens de l’article
3. La défenderesse a
augmenté le revenu du demandeur d’un montant de 297 164 $ pour l’année
2008 en alléguant que le demandeur serait devenu débiteur de la société Opale
Net Inc. pour cette somme au sens de l’article
4. Qui plus est, la défenderesse allègue que les prétendues dettes du demandeur n’ont pas été remboursées dans l’année qui suit la fin de l’année d’imposition de Opale Net Inc. dans laquelle les dettes seraient survenues au sens de l’article 115 de la Loi sur les impôts . [5]
* * *
Les articles
113. Une personne ou une société de personnes qui est soit un actionnaire d'une société , soit une personne ayant un lien de dépendance avec un tel actionnaire, soit un membre d'une société de personnes ou un bénéficiaire d'une fiducie qui est actionnaire d'une société, et qui, dans une année d'imposition, reçoit un prêt, ou devient débiteur, de cette société , d'une autre société liée à cette société ou d'une société de personnes dont l'une ou l'autre de ces sociétés est membre, doit inclure le montant du prêt ou de la dette dans le calcul de son revenu pour l'année .
1972, c. 23, a. 102; 1978, c. 26, a. 28; 1984, c. 15, a. 25; 1994, c. 22, a. 80; 1997, c. 3, a. 71.
115. L'article 113 ne s'applique pas si le prêt ou la dette est remboursé dans l'année qui suit la fin de l'année d'imposition du prêteur ou du créancier dans laquelle le prêt est consenti ou la dette survient et s'il est établi que le remboursement n'a pas été fait comme partie d'une série d'opérations et de remboursements .
1972, c. 23, a. 104; 1978, c. 26, a. 28; 1984, c. 15, a. 25; 1994, c. 22, a. 82.
(nos soulignés)
La présomption de validité de la cotisation
[5] L'arrêt St-Georges de la Cour d'appel précise la portée de l'article 1014 de la Loi sur les impôts [6] quant à la présomption de validité des cotisations et quant aux règles générales d'évaluation de la preuve :
[5] Le système d'imposition
québécois est basé sur les principes d'autocotisation et d'autodéclaration.
L'article
1014. Sous réserve des modifications ou de l'annulation résultant d'une opposition, d'un appel ou d'un appel sommaire et sous réserve d'une nouvelle cotisation, une cotisation est réputée valide et tenante nonobstant toute erreur, vice de forme ou omission qui s'y trouve ou qui se trouve dans toute procédure s'y rattachant. […]
[…]
[8] L'article
[9] Dans
9027-5967 Québec Inc. (Sous-Ministre du Revenu
),
[13] Dans l'arrêt Durand c . Québec (sous-ministre du Revenu) , la Cour a réitéré les règles relatives à la présomption de validité de la cotisation fiscale et des fardeaux de preuve qui en découlent. Reprenant les principes énoncés par la Cour suprême dans Hickman Motors Ltd. c . Canada , la Cour dit :
-
La cotisation fiscale jouit d'une
présomption de validité (art.
- Le fardeau initial du contribuable consiste à « démolir » l'exactitude de la présomption en présentant une preuve prima facie .
- Lorsque le contribuable présente une telle preuve, il y a renversement du fardeau de la preuve.
- Le fisc doit alors réfuter la preuve prima facie et prouver la cotisation établie par présomption.
[14] Règle générale, la preuve prima facie se définit comme une preuve suffisante pour établir un fait jusqu'à preuve du contraire. Dans Stewart c . M.R.N. , le juge Cain mentionne qu'«une preuve prima facie est celle qui est étayée par des éléments de preuve qui créent un tel degré de probabilité en sa faveur que la cour doit l'accepter si elle y ajoute foi, à moins qu'elle ne soit contredite ou que le contraire ne soit prouvé ».
[références omises]
[10] Dans
Capobianco c. Québec (Sous-ministre du Revenu)
,
[11] La preuve du contribuable doit toutefois comporter un certain degré de précision et de probabilité en sa faveur par opposition à des allégations vagues et ambiguës. Règle générale, la simple affirmation du contribuable ne suffit pas; elle aura avantage à être soutenue par une preuve documentaire ou circonstancielle .
[12] La
thèse voulant qu'une simple négation de la part du contribuable puisse contrer
la présomption de validité de l'article
(nos soulignés)
La preuve prima facie du contribuable
Les témoignages et les documents
[6] La preuve du contribuable repose sur plusieurs témoignages :
· celui du comptable André Jacques (CPA) qui était responsable de produire les états financiers d'Opale et de 9174-7956 Québec inc. (9174) pour les années financières 2007 à 2010, se terminant quant à Opale, le 28 février, ou quant à 9174, le 31 août;
· celui de Martine Gonthier, l'adjointe administrative de M. Manitiu depuis le 3 décembre 2007;
· celui de M. Manitiu, seul actionnaire d'Opale, et de 9174 jusqu'au 19 mars 2008. Depuis cette date, il détient toujours 100% des actions d'Opale mais ses actions dans 9174 sont transférées à la Fiducie familiale Strada (Strada) qui détient maintenant 100% des actions de 9174 [10] .
[7] Ces témoignages se complètent par de nombreux documents, notamment les suivants :
· les états financiers d'Opale au 28 février pour les années 2007, 2008 et 2010 [11] ;
· les états financiers de 9174 au 31 août pour les années 2009 et 2010 [12] ;
· les états financiers de Fiducie Strada au 31 décembre 2008 [13] et au 31 décembre 2011 [14] ;
· des preuves d'avances ou de remboursements pour les périodes d'avril à décembre 2008 [15] ;
· des relevés de comptes de la Banque Nationale de 2006 et 2007 [16] et d'une Caisse populaire pour avril 2008 [17] ;
· des écritures comptables relatives aux transactions entre M. Manitiu, Opale et 9174 concernant une somme de 100 000 $ et une somme de 455 158 $ [18] ;
· des résolutions de 9174 et de Fiducie Strada [19] ;
· un acte de donation [20] , un acte de fiducie [21] , des extraits de déclarations de revenus de M. Manitiu pour 2008 et 2009 [22] , des écritures et des registres comptables [23] , et autres documents de nature financière ou explicative [24] ;
· de nombreux courriels échangés entre la vérificatrice et M. Manitiu ou ses mandataires [25] ;
La naissance d'Opale, ses activités et la naissance de 9174
[8] M. Manitiu fonde Opale en janvier 2001. Cette personne morale œuvre surtout dans des activités internet ou des services informatiques. Elle gère des bannières publicitaires et cherche à s'introduire dans de nouveaux marchés lucratifs. En 2007-2008, elle compte une vingtaine d'employés. Un commis-comptable s'occupe de la tenue de livres des activités financières jusqu'en décembre 2007, moment où son emploi prend fin en raison de lacunes administratives importantes.
Des transactions sources d'erreurs comptables
[9] En 2006, Opale souhaite devenir propriétaire d'un immeuble où elle pourrait loger ses employés. Un représentant de la Banque Nationale suggère de recourir à une société de gestion, d'où la création de 9174.
[10] Vers le 26 mai 2006, 9174 dépose une offre d'achat sur un immeuble; cette offre d'achat est accompagnée d'un dépôt de 100 000 $. Cette somme lui est fournie par Opale qui la puise à même une avance de M. Manitiu. L'offre d'achat demeure sans suite et le dépôt est remboursé par 9174 à Opale, le 17 août 2006. Les écritures comptables reliées à ces transactions sont parfois complexes et soulèvent des ambiguïtés.
[11] Le 25 septembre 2007, une société belge, LA SA Rentabiliweb Group et M. Manitiu concluent une entente sous condition suspensive. M. Manitiu prévoit céder toutes ses actions d'Opale (100) en considération d'un paiement monétaire pour 70 actions et d'un transfert d'actions de Rentabiliweb pour la valeur des 30 actions d'Opale restantes. [26]
[12] Selon une convention du 28 février 2008, la transaction du 25 septembre 2007 est annulée (aux torts exclusifs de M. Manitiu) et les parties se retrouvent dans la situation où elles se trouvaient avant le 25 septembre 2007. M. Manitiu remet les actions de Rentabiliweb et récupère celles d'Opale moyennant le remboursement du prix payé en septembre 2007. Il assume seul les variations négatives du taux de change de l'euro. [27]
La collaboration du contribuable et l'analyse de sa preuve par le Tribunal
[13] Le 28 mai 2010, la vérificatrice de l'Agence transmet à M. Manitiu des projets de cotisation où elle inscrit des augmentations de revenus de 100 000 $ pour l'année 2007 et de 297 164 $ pour l'année 2008.
[14] À cette date, le travail de vérification aux fins de produire des états financiers avec la mention « Avis au lecteur » n'est pas terminé. En juin et juillet 2010, M. Manitiu et ses mandataires collaborent pleinement avec la vérificatrice et lui fournissent tous les documents pertinents.
[15] Dans son témoignage, la vérificatrice ne se rappelle pas, par moments, d'avoir reçu l'ensemble des documents qui servent d'appui à la position de M. Manitiu, tel que relaté dans sa requête introductive d'instance. Le Tribunal attribue cela à des défaillances passagères de mémoire et non à de l'acharnement ou de la mauvaise foi à l'égard du contribuable.
[16] Par ailleurs, la vérificatrice reconnaît que M. Manitiu a déclaré, dans ses revenus pour les années 2006 à 2010, des dividendes qui reflètent les transactions réelles effectuées avec Opale.
[17] Le Tribunal doit donc se demander s'il est raisonnable que l'Agence profite des erreurs comptables pour imposer doublement le contribuable et le pénaliser pour des écritures comptables erronées.
[18] Il n'est certes pas facile de suivre le cheminement des écritures comptables. Plutôt que de les résumer de façon incomplète ou d'en omettre des parties essentielles, le Tribunal choisit de reproduire ci-après les notes déposées à l'audience du 4 avril 2014 aux fins d'expliquer les écritures comptables.
1- SELON LES ÉTATS FINANCIERS DE OPAL NET INC, LE DEMANDEUR N'A AUCUNE AVANCE À REMBOURSER À OPAL NET iNC.
Voir P-2, page 6 (états financiers au 29 février 2008) - Solde des avances nil
Voir P-3, page 6 (états financiers au 28 février 2010) - Solde des avances nil
2- SELON LES ÉCRITURES COMPTABLES RÉGULARISÉES AU 28 FÉVRIER 2010, LE SOLDE DES AVANCES À REMBOURSER PAR M. MANITIU À OPAL NET INC. EST NIL
Voir P-19, p. 4 ou P-37, p. 5
3- EXPLICATION DES ÉCRITURES COMPTABLES EN LIEN AVEC L'ÉCRITURE DE 100 000 $ AU EN RÉDUCTION DU COMPTE "AVANCE ADMINISTRATEUR" DE OPAL NET INC. EN DATE DU 29 FÉVRIER 2008 (P-38 OU D-10)
A) Le 26 mai 2006, un chèque de Opal Net Inc. de 100 000 $ pour le dépôt en garantie pour une promesse d'achat d'immeuble au bénéfice de 9174 (P-19, p.9);
B) Le 17 août 2006, un dépôt de 100 000 $ pour le remboursement de 100 000 $ en raison de l'annulation de la promesse d'achat et ce dépôt a été comptabilisé dans les "autres revenus" (P-19, p. 10 et p. 11)
C) Le 28 février 2007, les avances de fonds totalisait 162 206,50 $ plus un placement en actions de cat. A de 300 000 $ (P-19, p. 5 ou P-37, p. 9)
D) Le 1er octobre 2007, M. Manitiu a avancé 455 158 $ à 9174 (P-16, P-17, P-18, p. 5)
E) Le 1er octobre 2007, 9174 a racheté ses actions cat A pour 300 000 $ et a remboursé les avances reçues d'Opale de 155 158 $ (P-19, p. 5 ou P-37, p. 9 et D-5, p. 6)
F) Lors de la préparation des états financiers au 28 février 2008, les comptables ont constaté l'erreur sur le dépôt de la promesse d'achat inclus dans les revenus et ils ont procéder (sic) aux redressements des états financiers (Voir P-1 modification des produits et des charges à la page 4 et modification du prêt à 9174 à la page 6) - Voir également P-2, page 6)
G) Compte tenu que 9174 avait déjà remboursé les avances d'Opale Net (voir alinéa E) et qu'une avance avait été faite par M. Manitiu pour effectuer ce remboursement (voir alinéa D), les comptables ont effectué l'écriture d'opération 11 pour régulariser la situation dans les deux sociétés (P-37, p. 5 ou P-19, p. 4; P-19, p. 6 ou P-37, p. 8; P-37, p. 10)
H) En conséquence, M. Manitiu n'est pas endetté de 100 000 $ envers Opale puisque M. Manitiu a payé la dette (réception de l'indu de 100 000 $) de Opale Net à 9174. Ainsi, Opale est devenu endettée envers M. Manitiu de 100 000 $ puisque ce dernier avait payé la dette de Opale. Voici les écritures constatant ces faits:
i) le 31 août 2007, paiement de M. Manitiu à 9174 par l'augmentation du compte avance de 9174 à M. Manitiu de 100 000 $ (totalisant 134 804 $ au 27 février 2008) P-18, p. 2 ou P-7, p. 2 -compte 1150 - voir la réduction du compte 2710 en date du 31 août 2008 (P-18, p. 1)
ii) le 29 février 2008, remboursement par Opale d'un montant de 100 000 $ à M. Manitiu par la diminution du compte avance d'un montant de 100 000 $ (P-19., p.4 et P-37, 5 et par le paiement de sa dette en annulant la déclaration du dividende de 91 500 $ (l'annulation du dividende a comme effet de créer simplement un remboursement de 91 500 $ sans imposition puisque le montant totalisant 91 500 $ avait déjà été versé en 2007 (voir P-29)
4- EXPLICATION DES ÉCRITURES COMPTABLES EN LIEN AVEC LE MONTANT 297 163 $ D'AVANCE QUI A ÉTÉ REMBOURSÉ AVANT LE 28 FÉVRIER 2010.
D-6, P-19, p. 4 ou P-38, p.5
A) le 19 mars 2008, transfert du billet de 455 158 $ entre M. Manitiu et la Fiducie (P-21 et P-24)
B) le 31 août 2008, écriture de 134 804 $ réduisant la dette de 9174 à 320 353 $ (P-18, p.1 et P-37, p. 4);
C) le 31 août 2009, 9174 a remboursé Fiducie d'un montant de 47 380 $ en réduisant le compte dû à l'administrateur de 47 380 $ (P-18, p. 1 ou P-37, p. 4) Il y a eu remise en capital de ce montant par la Fiducie en faveur de M. Manitiu (P-23 et P-34);
D) M. Manitiu a voulu régler toute ses dettes de 297 163,97 $ envers Opale avant la fin de l'exercice se terminant le 28 février 2010 et le règlement des autres dettes des sociétés. Le règlement des dettes a été exécuté ainsi:
i) remise en capital de 272 973$ par Fiducie à M. Manitiu (P-23 et P-34)
ii) règlement de la dette de M. Manitiu envers Opale au montant de 272 973 $ à dans le but que cette dernière règle sa dette envers 9174 et que cette dernière règle sa dette envers Fiducie pour le même montant - il a eu effectivement règlement des dettes respectives (stipulation pour autrui et délégation de paiement) - P-19, p.4 ou P-37, p.5; P-18, p.5 ou P-37, p.3; P-19, p. 6 ou P-37, p.8
iii) réduction d'un montant de 24 190 $ au compte avance à M. Manitiu par un dividende déclaré de 24 190 $ qui a été inclus dans les impôts de M. Manitiu (P-19, p.4 ou P-37, p. 5)
[19] Un courriel explicatif additionnel, transmis au Tribunal le 7 avril 2014, complète l'explication relative aux écritures comptables « en lien avec le montant de 297 163 $ d'avance qui a été remboursé avant le 28 février 2010. » :
Selon le solde au livre des avances en date du 28 février 2009, le montant des avances étaient de 297 163,97 (P-19, p. 4). Les écritures de régularisation en date du 28 février 2010 ont démontré que M. Manitiu a remboursé ce montant de 297 163,97 $ avant le 28 février 2010 par les écritures de 272 973,47 $ (remboursement reçu Andrei) et de 24 190,50 $ (dividende déclaré).
Ce remboursement évite que le montant
de 297 164 $ soit inclus dans l’année d’imposition 2008 de M. Manitiu
puisqu’il a été remboursé « dans l’année qui suit la fin de l’année
d’imposition du prêteur ou du créancier dans lequel le prêt est consenti ou la
dette survient » au sens de l’article
[20] Le Tribunal a vérifié chacun des énoncés de l'avocat de M. Manitiu et s'est assuré que toutes les pièces données en référence supportaient les énoncés formulés. Au terme de cet exercice, le Tribunal conclut que des explications raisonnables ont été fournies par le contribuable. Il serait injuste de le pénaliser pour des erreurs dont il n'est pas responsable.
La preuve de l'Agence
[21] La vérificatrice s'en remet au rapport de vérification du 20 août 2010 qui l'amène à s'en tenir à une interprétation stricte et trop conservatrice de certaines écritures comptables, sans en prendre en considération l'ensemble des explications qui ont été fournies.
[22] L'agent d'opposition de l'Agence, dont on avait annoncé le témoignage, ne s'est pas présenté à l'audience. Selon le dossier, le seul élément nouveau porté à sa connaissance est un écrit du 8 février 2011, préparé par les avocats du contribuable, pour expliquer de nouveau, de façon condensée, les informations déjà données auparavant à la vérificatrice.
[23] Les informations communiquées le 8 février 2011 sont les suivantes :
À QUI DE DROIT:
OBJET: Billet de 455 158 $ due par 9174-7956 Québec inc. daté du 1 er octobre 2007 -
Distribution de capital pour un montant de 320 353,47 $ en faveur du bénéficiaire M. Andrei Manitiu
Madame, Monsieur,
Les soussignés confirment qu'ils agissent à titre de fiduciaire de la FIDUCIE STRADA et ils confirment que le ou avant le 28 février 2010 les décisions suivantes ont été prises par eux concernant les sujets en rubrique. Les comptables Jacques Pépin Côté, SENC ont effectué les écritures comptables conformément à ces décisions.
1) Le 19 mars 2008, un montant de 320 353,47 $, qui était dû par 9174-7956 Québec inc. en faveur de André Manitiu, a été transféré par ce dernier en faveur de FIDUCIE STRADA par un acte de donation daté du 19 mars 2008.
2) La société 9174-7956 Québec inc. a remboursé le montant de 320 353,47 $ à la FIDUCIE STRADA et ce remboursement a été confirmé par les écritures comptables inscrites dans les registres de 9174-7956 Québec inc. dont notamment les écritures du 31 août 2009 au montant de 47 380 $ et du 28 février 2010 au montant de 272 973,47 $.
3) La FIDUCIE STRADA a effectué une remise en capital en faveur du bénéficiaire Andrei Manitiu conformément à l'acte de fiducie pour un montant de 320 543,47 $ afin que ce dernier paye sa dette à Opale Net inc. et à 9174-7956 Québec inc. Ces transactions ont été confirmées par les écritures comptables du 31 août 2009 aux registres de 9174-7956 Québec inc. au montant de 47 380 $ et les écritures comptables du 28 février 2010 aux registres de Opale Net inc. au montant de 272 973,47 $.
4) Il n'y a pas eu d'échange de montants d'argents entre les différentes personnes impliquées puisque les écritures comptables confirmaient les transactions entre les parties.
Les décisions mentionnées aux présentes ont été prises par les fiduciaires Andrei Manitiu et Andreea Schmitzer et ce, conformément à l'article 10 de l'acte de fiducie. [29]
[…]
Conclusion
[24] La complexité des écritures comptables et leur absence de clarté occasionnelle amènent le Tribunal, le 9 avril 2014, à requérir des éclaircissements additionnels des avocats des parties.
[25] Le 22 avril 2014, l'avocat de l'Agence commente abondamment la preuve dans une longue lettre de 78 paragraphes (12 pages), il soutient, qu'à tous égards, les cotisations sont bien fondées.
[26] Le 24 avril 2014, l'avocat du contribuable prétend noter certaines erreurs dans l'interprétation que l'avocat de l'Agence donne à la preuve. Pour l'essentiel, l'avocat du contribuable est en mesure de maintenir de façon raisonnable, les explications apportées aux écritures comptables dans ses notes déposées à l'audience du 4 avril 2014 [30] .
[27] La preuve du contribuable n'a pas à être parfaite pour renverser la présomption. Il suffit qu'elle comporte «un certain degré de précision et de probabilité». Une fois repoussée la présomption, l'Agence doit démontrer la justesse de sa position par la prépondérance de la preuve souvent basée sur des présomptions. Le Tribunal croit que cette démonstration n'a pas été faite.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
ACCUEILLE l'appel;
ANNULE les avis de cotisation du 16 août 2010 pour l'année 2007 (MW976102C01), et du 1 er septembre 2010 pour l'année 2008 (MW996149C01);
DÉFÈRE au Ministre les avis de cotisation du 16 août 2010 (MW976102C01) et du 1 er septembre 2010 (MW996149C01) pour un nouvel examen et de nouvelles cotisations pour tenir compte du fait qu'une somme de 100 000 $ ne doit pas être ajoutée aux revenus de monsieur Andrei C. Manitiu pour l'année 2007, et qu'une somme de 297 164 $ ne doit pas être ajoutée aux revenus de monsieur Andrei C. Manitiu pour l'année 2008;
Avec dépens.
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__________________________________ Jean-F. Keable, J.C.Q. |
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Dates d’audience : 2, 3 et 4 avril 2014 |
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Me Richard Généreux DEGRANDPRE CHAIT 1000, rue de la Gauchetière, suite 2900 Montréal (QC) H3B 4W5
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Avocat de la partie demanderesse |
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Me Michel Rossignol LARIVIÈRE MEUNIER 3, Complexe Desjardins, secteur D221LC C.P. 5000, succ. Desjardins Montréal (QC) H5B 1A7
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Avocat de la partie défenderesse |
[1] D-4 et D-2.
[2] Ibid.
[3] Loi sur l'administration fiscale, RLRQ, c. A-6.002.
[4] Loi sur les impôts, RLRQ, c. I-3.
[5] Requête introductive d'instance, 17 octobre 2011.
[6] Ibid.
[7]
Voir, sur ce point,
Chernenkoff c. Minister of National Revenue
,
[1949] C.T.C. 369;
Distributeurs Clé d'Or Inc. c. Québec (Sous-ministre du
Revenu),
[8]
Voir sur ce point:
Rafla (Provision Viau inc.) c. Québec (Sous-Ministre
du Revenu)
,
[9]
St-Georges
c.
Québec (Sous-Ministre du Revenu)
,
[10] D-8, P-24 et P-25.
[11] P-1 à P-4.
[12] P-5 et P-6.
[13] D-9.
[14] P-34.
[15] P-7 à P-13.
[16] P-14 et P-17.
[17] P-10.
[18] P-18 et P-19.
[19] P-20, P-21 et P-23.
[20] P-24.
[21] P-25.
[22] P-28.
[23] P-29, P-30 et P-32.
[24] P-22, P-31 et P-33.
[25] P-36 à P-43 et D-11.
[26] P-26.
[27] Ibid.
[28] Courriel de Me Richard Généreux au Tribunal, 7 avril 2014.
[29] P-23.
[30] Voir paragr. 18 de ce jugement.